SYNTHÈSE

Le présent bilan, présenté par Mme Sylvie Vermeillet, Présidente de la délégation du Bureau en charge du travail parlementaire et des conditions d'exercice du mandat de sénateur, s'appuie sur l'examen détaillé présenté par chaque commission permanente du Sénat sur la mise en application des lois relevant de sa compétence. Les conclusions de la commission des affaires européennes y figurent également. Ce rapport d'information analyse la mise en application des lois votées lors de la session parlementaire 2022-2023, c'est-à-dire entre le 1er octobre 2022 et le 30 septembre 2023.

Le taux global d'application des lois calculé par le Sénat est de 64 %, soit un taux stable par rapport à celui de l'année précédente (65 %). Si l'on exclut les mesures dont le législateur a autorisé une entrée en vigueur différée, ce taux d'application s'élève à 68 %, soit un niveau identique au taux de 2020-2021. Par ailleurs, les mesures règlementaires d'application ont été en moyenne publiées 5 mois et 23 jours après la promulgation de la loi. Ce délai moyen est pour la deuxième année consécutive sous la limite de 6 mois que s'est fixée le Gouvernement.

Trois éléments nuancent cependant la portée de cette stabilisation globale.

Les lois examinées après engagement de la procédure accélérée présentent de manière paradoxale des taux d'application particulièrement insatisfaisants. D'année en année, ce taux d'application se détériore. Il s'établit désormais à seulement 50 %. Au 31 mars 2024, la moitié des mesures d'application de ces lois - pourtant présentées comme urgentes - n'ont donc pas été prises. Le Gouvernement impose une célérité au Parlement pour l'examen de ces lois, à laquelle lui-même ne s'astreint pas.

Les dispositions issues de lois d'origine parlementaire connaissent en moyenne des taux d'application inférieurs à celles des lois d'initiative gouvernementale (taux moyen de seulement 43 % contre 64 % toutes lois confondues). Pourtant, l'adoption rapide des textes réglementaires par le Gouvernement, quelle que soit l'origine des dispositions législatives, est indispensable à la bonne application de la loi et au respect de la volonté du législateur. Un tel écart de vingt points n'est pas acceptable. Le délai moyen pour la prise des textes d'application de ces lois est de 7 mois et 9 jours, dépassant la limite de 6 mois.

Le taux de remise des rapports au Parlement se dégrade fortement. Pour la session 2022-2023, ce taux s'établit à seulement 18 % contre 36 % pour 2021-2022 et 21 % pour 2020-2021. Après l'amélioration observée l'année dernière, cet indicateur se dégrade de nouveau, alors même que le nombre total de rapports à déposer est en recul (98 rapports prévus pour 2022-2023 contre 132 en 2021-2022).

Dans la continuité des conclusions du groupe de travail sur la modernisation des méthodes de travail du Sénat de mars 2021, un suivi particulier des ordonnances, et distinct du bilan annuel de l'application des lois, a été mis en place. Un débat est désormais organisé, dont la première version s'est tenue le 1er février 2022.

Tableau synthétique des principales données du bilan de l'application des lois votées lors de la session 2022-2023, comparées avec celles de la précédente session

 

Session 2022-2023

Nombre de lois votées lors de la session 2022-2023, hors conventions internationales

44 (-20)

Nombre de lois votées après engagement de la procédure accélérée

26 (-19)

Taux d'application des lois votées lors de la session parlementaire 2022-2023

64 % (-1 pt)

Nombre de rapports demandés au Gouvernement lors de la session 2022-2023

98 (-34)

Nombre de rapports demandés au Gouvernement lors de la session 2022-2023 non remis en date du 31 mars 2024

80 (-4)

Délai moyen de parution des mesures d'application pris lors de la session 2022-2023

5 mois et 23 jours

(+3 jours)

SOMMAIRE

Pages

L'ESSENTIEL 7

AVANT-PROPOS 15

PREMIÈRE PARTIE : SYNTHÈSE DES DONNÉES DE L'APPLICATION DES LOIS 17

I. LE BILAN ANNUEL DE L'APPLICATION DES LOIS : UN OUTIL DE CONTRÔLE INDISPENSABLE DU SENAT 19

II. LES DONNÉES GÉNÉRALES DE LA SESSION 2022-2023 26

DEUXIÈME PARTIE : ANALYSE DES COMMISSIONS 41

I. COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES 43

II. COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES, DE LA DÉFENSE ET DES FORCES ARMÉES 173

III. COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES 191

IV. COMMISSION DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE 305

V. COMMISSION DE LA CULTURE, DE L'ÉDUCATION, DE LA COMMUNICATION ET DU SPORT 345

VI. COMMISSION DES FINANCES 367

VII. COMMISSIONS DES LOIS 457

VIII. COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES 517

IX. COMMISSION SPÉCIALE SUR LA PROPOSITION DE LOI RELATIVE AU RISQUE INCENDIE 525

X. COMMISSION SPÉCIALE SUR LA PROPOSITION DE LOI RELATIVE AU ZÉRO ARTIFICIALISATION NETTE (ZAN) 537

ANNEXE 545

L'ESSENTIEL

Présenté par Mme Sylvie Vermeillet, Vice-présidente du Sénat, présidente de la délégation du Bureau en charge du travail parlementaire et des conditions d'exercice du mandat de sénateur, le bilan annuel de l'application des lois au 31 mars 2024 porte sur les lois adoptées lors de la session 2022-2023. Il s'appuie sur le suivi, par les commissions permanentes, des textes pris en application des lois relevant de leur compétence, ainsi que sur les statistiques générales calculées par le logiciel APLEG.

I. LE CONTRÔLE DE L'APPLICATION DES LOIS PROMULGUÉES LORS DE LA SESSION 2022-2023

A. L'APPLICATION DE LA LOI : UNE OBLIGATION JURIDIQUE À FORTE RÉSONANCE POLITIQUE CONTRÔLÉE PAR LE SÉNAT

Depuis maintenant cinquante ans, le Sénat s'attache à vérifier que les mesures d'application appelées par les lois votées par le Parlement sont bel et bien prises, et dans un délai raisonnable. Alors que nos concitoyens croient parfois que les lois sont appliquées dès leur passage en conseil des ministres, une lenteur excessive dans la prise des textes réglementaires requis peut susciter, à l'heure des réseaux sociaux et de l'information en continu, des incompréhensions d'autant plus grandes que la médiatisation des projets du Gouvernement aura été forte. Or l'exécutif, qui semble chercher à rapprocher le temps du législateur du temps de l'information, ne s'astreint pas toujours à la même rigueur lorsqu'il s'agit de s'assurer de l'application complète des dispositions législatives votées par le Parlement. Le suivi exercé de longue date par le Sénat apparaît, dans ces conditions, toujours plus nécessaire.

Chiffres clés de la session 2022-2023

Établi à la date du 31 mars 2024, le présent bilan se concentre sur les lois adoptées entre le 1er octobre 2022 et le 30 septembre 2023. Il tient ainsi compte du délai de six mois que s'est fixé le Gouvernement pour prendre les textes réglementaires prévus par la loi dans la circulaire du Premier ministre du 29 février 2008 relative à l'application des lois, en accord avec l'obligation consacrée par le Conseil d'État de prendre les mesures règlementaires nécessaires à l'application des lois dans un délai raisonnable1(*). Cet objectif a été réaffirmé par la circulaire de la Première ministre du 27 décembre 2022 relative à l'application des lois.

Là où le Gouvernement ne suit que les décrets, le Sénat contrôle également la prise des arrêtés, tout aussi indispensables à la mise en oeuvre de la loi. Comme chaque année, ce bilan a été effectué en lien avec les services du Secrétariat général du Gouvernement, avec lesquels les échanges se sont montrés fluides et fructueux.

Un début de suivi des arrêtés par le SGG

Le Secrétariat général du Gouvernement (SGG) - répondant à une demande répétée du Sénat - a commencé à partir du 1er janvier 2024 à suivre les arrêtés nécessaires à l'application des lois, un travail de rattrapage devant également s'effectuer. Le SGG n'a néanmoins pas été en mesure de transmettre des taux de parution consolidés des arrêtés pour la session 2022-2023 mais a assuré pouvoir le faire l'année prochaine. Le Sénat salue cette avancée, rappelant que pour l'application d'une loi, peu importe que la disposition adoptée renvoie à un décret ou à un arrêté : la non-adoption de l'un ou de l'autre a pour effet, dans les deux cas, d'empêcher la volonté du législateur de se traduire pleinement dans le droit et dans les faits. Le suivi effectif des arrêtés fera l'objet de toute l'attention du Sénat pour le bilan 2023-2024 de l'application des lois.


* 1 Conseil d'État, 13 juillet 1962, Sieur Kevers Pascalis, n° 45 891 et Conseil d'État, Assemblée, 27 novembre 1964, Dame Veuve Renard, n° 59 068.

Les thèmes associés à ce dossier

Partager cette page