M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…
La discussion générale est close.
Organisation des débats
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Avant d’aborder la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable, la commission demande la priorité de l’article 1er et, au sein de ce dernier, la disjonction de l’examen des trois amendements identiques nos 21, 35 et 73, tendant à la suppression de l’article.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?
M. le président. La priorité est de droit.
La commission souhaite également disjoindre de la discussion commune les amendements nos 21, 35 et 73 tendant à la suppression de l’article 1er.
Il n’y a pas d’opposition ?...
Il en est ainsi décidé.
Question préalable
M. le président. Je suis saisi, par Mmes Le Texier, Jarraud-Vergnolle, Printz, Bricq, Alquier, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, d'une motion n°32.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l'article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, en faveur des revenus du travail (n° 502, 2007-2008).
Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d’opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à Mme Raymonde Le Texier, auteur de la motion.
Mme Raymonde Le Texier. Le projet de loi que vous nous présentez aujourd'hui, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, constitue le cinquième texte consacré au pouvoir d’achat depuis juillet 2007 : rien de moins.
Par ordre d’entrée en scène, nous avons eu le paquet fiscal, dit loi TEPA, avec ses désormais célèbres 15 milliards d’euros partiellement engloutis dans les baisses d’impôts pour les plus riches...
Ensuite, en décembre 2007, nous avons eu la loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs. Ces dispositions n’ont pas un an et, pourtant, tout le monde les a déjà oubliées. L’objectif de ce texte était de faire baisser les prix grâce à la « sacro-sainte » concurrence. L’inflation atteignant maintenant 3,5 % et le salaire moyen dans le secteur privé étant en stagnation, ce n’est pas cette année que l’on vous remettra la médaille du mérite !
Mme Raymonde Le Texier. Puis ce fut le tour de la loi pour le pouvoir d’achat avec le rachat des RTT. Vous nous direz sans doute que le bilan est mitigé, que ce n’est certainement pas un échec. Tel n’est pas l’avis de l’URSSAF. En effet, selon cette dernière, seule une entreprise sur cinq propose le rachat des jours de RTT et peu de salariés l’ont demandé, comme cela a déjà été dit au cours du débat. La raison de cet échec est simple et était d’autant plus prévisible que toutes les enquêtes d’opinion le montraient : les salariés, notamment les cadres et les agents de maîtrise, sont très attachés à leurs RTT.
Enfin, plus récemment, a été adoptée la loi de modernisation de l’économie, dont les experts de Bercy continuent de tenter de percer les mystères, de comprendre l’intérêt et le contenu !
J’arrête là le bilan et, bien sûr, je salue l’activisme effréné de ce gouvernement sur un problème aussi essentiel que le pouvoir d’achat.
Mme Raymonde Le Texier. Toutefois, vous conviendrez qu’on peut s’interroger sur cette frénésie. Une loi, je veux bien. Deux, c’était sans doute nécessaire. Trois, c’est pour parfaire l’effort. Mais enfin, cinq lois en à peine seize mois !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C’est beaucoup !
Mme Raymonde Le Texier. Serait-ce parce que ni la première, ni la deuxième, ni aucune de ces mesures n’a été pertinente ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. La conjoncture change !
Mme Raymonde Le Texier. Aucune de ces mesures ne se serait révélée efficace et à la hauteur des enjeux ? Aucune de ces mesures n’aurait amélioré la vie des Français ? Assurément !
Aussi, la loi des séries étant ce qu’elle est, il n’est pas étonnant que vous nous ressortiez ce vieux ballon de baudruche de l’intéressement et de la participation.
Mme Raymonde Le Texier. Si ma mémoire est bonne, la dernière fois date d’octobre 2006.
Héritage de cette vertueuse tradition des gaullistes chrétiens, le principe est élémentaire : libérer les dividendes de l’entreprise en les redistribuant avec parcimonie aux salariés. Ceux-ci, en raison de leurs faibles revenus, dépensent actuellement plus qu’ils n’épargnent. Ils ne manqueront pas de réintroduire cet argent dans l’économie en consommant à tout va. Ainsi, tout ira pour le mieux dans le meilleur des mondes.
Tout ira pour le mieux dans le meilleur des mondes sauf qu’il ne faut quand même pas trop en attendre : votre dernière expérience en matière de participation tablait sur la libération de 12 milliards d’euros. À ce jour, nous atteignons difficilement les 4 milliards d’euros : un gain trois fois inférieur aux prévisions, et pourtant vous souhaitez renouveler l’expérience !
Le raisonnement est un peu simpliste, son impact réel complètement surestimé, mais admettons.
Cependant, pour que votre projet marche, cela suppose qu’il y ait des dividendes à partager et, pour cela, il faut de la croissance. Or, en ce moment, ça coince !
Après que le Président de la République a tenté d’aller « chercher la croissance avec les dents »,…
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Oui !
Mme Raymonde Le Texier. … après de multiples annonces toujours surévaluées et continuellement revues à la baisse, votre collègue Mme Lagarde a fini par avouer contrainte et forcée que la croissance sera quasi nulle cette année : au mieux 0,9 %, et sans doute moins encore l’année prochaine.
Pour les deux derniers trimestres de 2008, l’INSEE prévoit même une croissance négative. J’ai beau ne pas être économiste, je sais que deux trimestres d’affilée avec une croissance négative, c’est-à-dire deux trimestres où nous ne produisons pas de richesses mais où nous en perdons, cela s’appelle une récession. Les ministres ont reçu la consigne de pas prononcer le mot, mais cela ne change rien, nous sommes bien en « récession », et vous préparez une politique reposant sur de la croissance !
Dans le même temps, une étude parue la semaine dernière nous apprend le profond malaise des industriels dont le moral est au plus bas depuis un long moment parce que, disent-ils, « les carnets de commandes sont anormalement vides ».
En résumé, pas d’argent public pour un plan de relance – à ne pas confondre avec un plan de renflouement des banques sans contrepartie –, pas de croissance mais la récession, pas de commandes dans les entreprises, donc pas de bénéfices en perspective.
Tous les éléments dont votre projet de loi a irrémédiablement besoin pour réussir un tant soit peu font défaut !
Vous misez sur des choses qui n’existent pas, sur des fantasmes. En psychiatrie, le diagnostic serait clair : « déni de réalité ». Plus communément, on appelle cela « n’en faire qu’à sa tête » ou être « irresponsable ».
Vous allez nous dire que c’est la faute de la crise. Mais la crise n’est pas mère de tous les maux, y compris de ceux qui préexistaient de longue date.
Peut-être serez-vous tentés par une nouvelle campagne de publicité destinée à faire croire aux Français que, malgré toutes les difficultés qu’ils affrontent dans leur vie quotidienne, les mesures prises par ce gouvernement vont dans le bon sens. Je vous le dis : la baisse du pouvoir d’achat, ce n’est pas un problème de communication ou de mesures mal expliquées. La baisse du pouvoir d’achat, ce n’est pas seulement dans la tête des Français !
Heureusement, la vigie de l’INSEE et les services statistiques des ministères sont là pour confirmer à nos concitoyens qu’ils ne sont pas fous, qu’ils ne rêvent pas et qu’il est effectivement de plus en plus difficile de boucler les fins de mois !
L’enquête du ministère de l’emploi sur l’activité de la main-d’œuvre, publiée le 27 août dernier, indique que le salaire mensuel de base a augmenté de 2,7 % sur un an. Néanmoins, avec une inflation de 3,2 %, cela représente une perte de pouvoir d’achat de 0,5 %. De même, l’INSEE annonce une baisse de pouvoir d’achat de 0,4 % sur un an. Devant ces chiffres, il n’y a pas trente-six conclusions : Nicolas Sarkozy est bien le président de la baisse du pouvoir d’achat !
Alors même que votre projet de loi repose sur un postulat irréaliste et n’a aucune chance de marcher, il pose en outre deux problèmes de fond : la remise en cause du salaire comme premier et principal revenu du travail et la brèche ouverte dans le SMIC.
Comment ne pas voir dans ce projet de loi une tentative pour substituer le salaire, revenu fixe, encadré et déterminé, sur lequel s’assoit l’organisation de notre société, par un type de revenu totalement variable et imprévisible.
Pour notre part, nous ne souhaitons pas voir les revenus du travail des Français soumis aux aléas des performances et des contre-performances des entreprises et, pis, aux aléas des placements financiers.
Si l’on suit ce que vous entendez développer, quelle sera demain la part des salaires dans les revenus du travail ? N’y a-t-il donc aucune leçon à tirer de la crise actuelle ?
De plus, au-delà du fait que votre système favorise, une fois de plus, les hauts revenus, que deviendra le million et demi de travailleurs pauvres qui, par essence, n’est pas concerné par cette mesure ?
Dans cette même logique et malgré un contexte d’explosion de la précarité et une hausse du chômage sans précédent depuis plus de vingt ans, vous entendez redéfinir la fixation du SMIC.
Chantre du « pragmatisme » tous azimuts, qu’il pleuve, qu’il vente, qu’il neige ou même que ce ne soit pas du tout la question, M. le ministre a parlé de « dépolitiser » la fixation du SMIC. (M. le ministre s’exclame.) Comme si le caractère politique du SMIC était une tare.
Je me vois dans l’obligation de rappeler ici que la création du SMIC fut, et demeure, un progrès social, et constitue donc une avancée politique. C’est précisément parce que le SMIC est le fruit de la volonté politique visant à garantir que même les plus modestes ne seront pas payés au-dessous d’un minimum décent qu’il est une protection pour des millions de personnes. À gauche, nous le savons bien, car nous avons de la mémoire : le SMIC, c’est politique !
La création d’un « groupe d’experts » à l’indépendance garantie par un décret en Conseil d’État – nous voilà rassurés ! – entend non seulement miner l’importance de la Commission nationale de la négociation collective, mais également imposer de nouveaux critères pour la fixation du SMIC. Évidemment, me direz-vous, il n’y a là aucun caractère politique ! Évolution de la productivité, partage de la valeur ajoutée, compétitivité des entreprises, évolution des salaires minima dans les pays comparables, ou encore structures des salaires ne sont que quelques-uns de ces nouveaux critères. Mais tous ont un point commun : ils sont étrangers à la nécessité de couvrir les besoins essentiels et de constituer la base de la rémunération du travail.
Si une mesure comme la fixation du SMIC au 1er janvier et non plus au 1er juillet est, paraît-il, anodine, pourquoi est-elle alors réclamée depuis des années par le MEDEF ? Ce dernier vous a d’ailleurs probablement soufflé l’idée de repousser à 2011 l’alignement des minima de branche sur le SMIC. Mais cette proposition est sans doute, là encore, anodine !
Décidément, c’est à croire que vous ne l’aimez pas ce salaire minimum ! En lieu en place d’une « pseudo- dépolitisation » du SMIC, c’est bien la première étape de sa reprise en main, de sa mise au pas et, potentiellement, de sa disparition que vous enclenchez ici !
Monsieur le ministre, vous attendiez-vous vraiment à ce que nous ne fassions pas le lien entre la remise en cause du salaire comme seul revenu du travail, la « pseudo-dépolitisation » du SMIC et toutes les autres mesures que vous avez fait adopter ces derniers mois, telles que, entre autres, l’instauration des périodes d’essai allant jusqu’à huit mois, la création de nouveaux CDD, comme le contrat de mission, ou encore, l’obligation pour les chômeurs d’accepter rapidement des emplois sous-payés …
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ils ne sont pas sous-payés !
Mme Raymonde Le Texier. … et sans aucun rapport avec leurs compétences ou leurs souhaits ? À cela s’ajoute le RSA, le revenu de solidarité active, dont nous avons débattu la semaine dernière, par le biais duquel l’État se substitue aux entreprises pour payer les salaires.
L’ensemble de ces mesures rendent les travailleurs, et plus encore les personnes à la recherche d’un emploi, corvéables à merci. Elles visent toutes, y compris celles que nous examinons aujourd'hui, à tirer les salaires toujours plus vers le bas, car elles se fondent sur le mythe selon lequel le niveau des salaires serait la cause de tous les déboires.
L’idée que la main-d’œuvre est la seule variable d’ajustement a beau être contredite par la réalité et avoir été usée jusqu’à la corde par l’ultralibéralisme depuis plus d’un siècle, vous continuez à organiser toute votre politique autour d’elle. Continuez ainsi, nous continuerons à nous y opposer !
Incisif comme vous l’êtes, vous ne manquerez pas de répéter, pour vous en convaincre, que nous ne faisons que nous opposer ! En réponse à notre collègue Annie Jarraud-Vergnolle, vous avez indiqué tout à l'heure que nous ne proposons rien. Pourtant, vous savez que c’est faux !
Voilà quelques mois, vous avez refusé de débattre d’une proposition de loi déposée par le groupe socialiste et qui visait à relancer le pouvoir d’achat en rendant le chèque-transport obligatoire – celui-là même que la majorité de l’Assemblée nationale a tenté de passer à la trappe la semaine dernière ! –, en taxant les énormes bénéfices des entreprises pétrolières et en ouvrant une conférence nationale sur les salaires. Et si cela ne vous suffit pas, monsieur le ministre, voici d’autres idées encore pour relancer la machine : supprimer les franchises médicales profondément injustes et pénalisantes pour les petits revenus, abandonner une partie des 30 milliards d’euros d’exonérations de cotisations sociales accordées sans contrepartie en matière d’emploi, revoir votre position sur la TIPP flottante, augmenter les taxes sur les stock-options, et ne pas faire semblant de vouloir toucher aux niches fiscales, alors que vous ne cessez d’en créer de nouvelles…
Les membres du groupe socialiste étant « bonne pâte », ils vous offrent toutes ces idées, monsieur le ministre ! Prenez-les, car les Français en ont besoin. Mais, par bonté, faites disparaître votre projet de loi dans les oubliettes de votre ministère, et passons aux choses sérieuses ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. La commission des affaires sociales est évidemment défavorable à la motion tendant à opposer la question préalable.
Comme je l’ai indiqué au cours de la discussion générale, le projet de loi joue sur plusieurs leviers complémentaires pour dynamiser le pouvoir d’achat des ménages : intéressement et participation, d’une part, politique salariale, d’autre part.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement souhaite que la motion tendant à opposer la question préalable soit repoussée.
M. le président. Je mets aux voix la motion n° 32, tendant à opposer la question préalable.
Je rappelle que l'adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi.
(La motion n'est pas adoptée.)
Mme Nicole Bricq. Vous n’êtes pas raisonnables, mes chers collègues !
M. le président. En conséquence, nous passons à la discussion des articles.
Mes chers collègues, je rappelle que le Sénat a décidé d’examiner par priorité l’article 1er, et, au sein de ce dernier, de disjoindre de la discussion commune les trois amendements identiques de suppression.
Article 1er (priorité)
I. - Après l'article 244 quater S du code général des impôts, il est inséré un article 244 quater T ainsi rédigé :
« Art. 244 quater T. - I. - Les entreprises imposées d'après leur bénéfice réel ou exonérées en application des articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 septies, 44 octies, 44 octies A, 44 decies, 44 undecies et 44 duodecies, et ayant conclu un accord d'intéressement en application du titre Ier du livre III de la troisième partie du code du travail peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des primes d'intéressement dues en application de cet accord.
« II. - Ce crédit d'impôt est égal à 20 % :
« a) De la différence entre les primes d'intéressement mentionnées au I dues au titre de l'exercice et la moyenne des primes dues au titre de l'accord précédent ;
« b) Ou des primes d'intéressement mentionnées au I dues au titre de l'exercice lorsque aucun accord d'intéressement n'était en vigueur au titre des quatre exercices précédant celui de la première application de l'accord en cours.
« III. - Les primes mentionnées au I ne peuvent entrer à la fois dans la base de calcul du crédit d'impôt et dans celle d'un autre crédit d'impôt.
« IV. - En cas de fusion, apports ou opérations assimilées réalisés pendant la durée d'application de l'accord en cours ou de l'accord précédent, ou au cours de l'un des trois exercices séparant l'accord en cours du précédent, la moyenne des primes mentionnées au a du II dues par la société absorbante ou bénéficiaire des apports et par la société apporteuse est égale au montant moyen des primes dues à chaque salarié au titre de l'accord précédent multiplié par le nombre total de salariés constaté à l'issue de ces opérations.
« V. - Un décret fixe les conditions d'application du présent article, notamment les obligations déclaratives. »
II. - Après l'article 199 ter Q du même code, il est inséré un article 199 ter R ainsi rédigé :
« Art. 199 ter R. - Le crédit d'impôt défini à l'article 244 quater T est imputé sur l'impôt sur le revenu dû par le contribuable au titre de l'année ou de la période de douze mois au cours de laquelle les primes d'intéressement sont dues. Si le montant du crédit d'impôt excède le montant de l'impôt dû au titre de ladite année, l'excédent est restitué. »
III. - Après l'article 220 X du même code, il est inséré un article 220 Y ainsi rédigé :
« Art. 220 Y. - Le crédit d'impôt défini à l'article 244 quater T est imputé sur l'impôt sur les sociétés de l'exercice au titre duquel les primes d'intéressement sont dues. Si le montant du crédit d'impôt excède le montant de l'impôt dû au titre dudit exercice, l'excédent est restitué. »
IV. - Le 1 de l'article 223 O du même code est complété par un x ainsi rédigé :
« x) Des crédits d'impôt dégagés par chaque société du groupe en application de l'article 244 quater T ; l'article 220 Y s'applique à la somme de ces crédits d'impôt. »
V. - Les I à IV s'appliquent au crédit d'impôt calculé au titre des primes d'intéressement dues en application d'un accord d'intéressement ou d'un avenant à un accord d'intéressement en cours à la date de publication de la présente loi, conclus à compter de la date de publication de la présente loi et au plus tard le 31 décembre 2014. Pour le calcul du crédit d'impôt en cas d'avenant à un accord en cours à la date de publication de la présente loi, l'accord précédent s'entend de la période couverte par l'accord en cours jusqu'à la date d'effet de l'avenant.
VI. - Dans les entreprises ayant conclu un accord d'intéressement, ou un avenant à un accord en cours, à compter de la publication de la présente loi et au plus tard le 30 juin 2009, et applicable dès cette même année, l'employeur peut verser à l'ensemble de ses salariés une prime exceptionnelle.
Cette prime est répartie uniformément entre les salariés ou selon des modalités de même nature que celles prévues par cet accord ou cet avenant. Son montant est plafonné, après répartition, à 1 500 € par salarié. Elle est prise en compte pour l'application de l'article L. 3314-8 du code du travail.
Cette prime ne peut se substituer à des augmentations de rémunération et à des primes conventionnelles prévues par l'accord salarial ou par le contrat de travail. Elle ne peut se substituer à aucun des éléments de rémunération au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale et de l'article L. 741-10 du code rural versés par l'employeur ou qui deviennent obligatoires en vertu de règles légales ou contractuelles.
Cette prime est exonérée de toutes cotisations et contributions d'origine légale ou conventionnelle rendue obligatoire par la loi, à l'exception des contributions définies aux articles L. 136-2 du code de la sécurité sociale et 14 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale.
Dans le cas où un salarié qui a adhéré à un plan d'épargne salariale au sens du titre III du livre III de la troisième partie du code du travail affecte à la réalisation de ce plan tout ou partie des sommes qui lui sont versées au titre de cette prime exceptionnelle, ces sommes sont exonérées d'impôt sur le revenu, dans les conditions prévues par l'article L. 3332-27 du même code.
Le versement de la prime doit intervenir le 30 septembre 2009 au plus tard.
VII. - La prime exceptionnelle prévue au VI est ajoutée à la base de calcul du crédit d'impôt prévu à l'article 244 quater T du code général des impôts relatif à l'exercice au titre duquel elle est versée.
VIII. - L'évaluation du dispositif créé par les I à VII est organisée par le Parlement dans les conditions définies aux articles 24, 47-2 et 48 de la Constitution, avant le 30 juin 2014.
IX. - Le Gouvernement présente au Parlement, avant le 30 juin de chaque année, un rapport portant sur l'application du présent article et son impact sur la diffusion de l'intéressement dans les petites et moyennes entreprises.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 21 est présenté par M. Dassault, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° 35 est présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 73 est présenté par Mmes David, Pasquet et Hoarau, MM. Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° 21.
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Monsieur le ministre, je ne suis contre rien a priori ! Simplement, je mesure les conséquences des décisions qui sont prises.
Actuellement, l’un des problèmes principaux de la France est son déficit budgétaire, qui ne cesse de s’accroître avec les nouvelles mesures d’allégement de charges que le Gouvernement multiplie. Or je ne vois aucune décision susceptible de réduire ce déficit.
La commission des finances, gardienne du budget, sera toujours opposée à toutes les mesures, quelles qu’elles soient et quel que soit leur intérêt, visant à aggraver encore notre déficit budgétaire et nos charges. Celui-ci s’élève déjà, en 2008, à plus de 50 milliards d’euros ! Vous prenez des mesures de nature à entretenir l’activité économique et à enrayer la crise financière – on ne sait d’où proviennent les fonds accordés dernièrement aux banques… –, qui vont creuser plus encore le déficit ! À combien s’élèvera-t-il en 2009 ?
Vous souhaitez, monsieur le ministre, accorder un crédit d’impôt pour favoriser l’intéressement. Je ne suis pas contre l’intéressement, au contraire ! Mais, en l’occurrence, on ne sait pas de quoi l’on parle dans ce texte, parce que l’intéressement n’y est pas défini. L’intéressement, c’est la possibilité donnée au chef d’entreprise d’intéresser son personnel à un problème précis, à un service ou à une activité, mais pas à l’ensemble de l’entreprise. Les chefs d’entreprise ont peu recours à cette mesure, qui est facultative. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le général de Gaulle, après avoir créé l’intéressement en 1959, a décidé d’instaurer la participation, qui revêt, elle, un caractère obligatoire.
Vous affirmez, monsieur le ministre, que ce crédit d’impôt va encourager les chefs d’entreprise. Peut-être, peut-être pas… Pourquoi risquer d’aggraver encore le déficit en prenant une mesure incitative, dont on ne mesure pas les conséquences ?
Un chef d’entreprise qui a compris l’intérêt de motiver son personnel n’a pas besoin d’incitations fiscales pour mettre en place l’intéressement.
Mme Nicole Bricq. Bien sûr !
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Si une incitation fiscale existe, il en profitera bien sûr, mais ce n’est pas pour cette raison qu’il mettra en place l’intéressement dans son entreprise. Ne croyez donc pas que tous les chefs d’entreprise vont se précipiter sur l’intéressement !
De plus, je le répète, on ne sait pas de quoi l’on parle. S’agit-il d’un intéressement à l’économie, à l’activité, au chiffre d’affaires, au bénéfice ? On peut faire de l’intéressement à n’importe quoi !
Contrairement à la participation, dont les principes sont clairs – l’entreprise partage ses éventuels bénéfices à égalité entre les salariés et les actionnaires –, l’intéressement est laissé à la libre discrétion du chef d’entreprise, qui, je le répète, l’utilise assez peu.
Le déficit budgétaire est vraiment la première préoccupation des membres de la commission des finances. On ne peut pas continuer à accroître le déficit budgétaire en offrant des cadeaux, en accordant des allégements de charges, même si cela fait plaisir et contribuera peut-être à augmenter le pouvoir d’achat. En effet, il n’appartient pas à l’État de payer les charges et les salaires au sein de l’économie privée ! C’est aux acteurs de cette dernière de le faire en fonction de leurs possibilités et de leurs besoins.
On entend dire qu’il faut augmenter les salaires. Peut-être, mais une fois que ces derniers sont augmentés, ils le sont tout le temps ! Et si, à un certain moment, l’entreprise a moins de recettes et plus de dépenses, notamment des dépenses de personnel, elle ne pourra survivre et courra à la faillite, au licenciement et, donc, au chômage.
Il faut donc permettre à l’entreprise de faire ce qu’elle peut en fonction de ses contraintes. Tout l’intérêt de la participation, c’est que le partage du bénéfice ne grève pas à long terme l’économie.
Monsieur le ministre, en l’absence de M. le président de la commission des finances, je ne puis prendre à mon compte le retrait de cet amendement, adopté à l’unanimité des commissaires, opposition et majorité confondues. Je le voterai donc avec les membres aujourd'hui présents de la commission des finances.