Sommaire
5. Mise au point au sujet d'un vote
MM. Aymeri de Montesquiou, le président.
6. Revenus du Travail. – Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence.
Discussion générale : MM. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité ; Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi ; Mme Isabelle Debré, rapporteur de la commission des affaires sociales ; M. Serge Dassault, rapporteur pour avis de la commission des finances ; Mmes Annie David, Catherine Procaccia, M. Aymeri de Montesquiou, Mmes Annie Jarraud-Vergnolle, Gisèle Printz, Nicole Bricq.
MM. le ministre, le secrétaire d'État.
Clôture de la discussion générale.
MM. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales ; le ministre, le président.
Motion no 32 de Mme Raymonde Le Texier. – Mmes Raymonde Le Texier, le rapporteur, M. le ministre. – Rejet.
Amendements identiques nos 21 de M. Serge Dassault, rapporteur pour avis, 35 de Mme Annie Jarraud-Vergnolle et 73 de Mme Annie David. – M. le rapporteur pour avis, Mmes Annie Jarraud-Vergnolle, Annie David, le rapporteur, M. le ministre, Mme Jacqueline Alquier, MM. François Marc, Guy Fischer. – Rejet, par scrutin public, des trois amendements.
Amendement no 1 de la commission. – Mme le rapporteur, M. le ministre. – Adoption.
Amendements nos 61 rectifié de Mme Françoise Henneron et 36 de Mme Annie Jarraud-Vergnolle. – Mmes Françoise Henneron, Gisèle Printz, le rapporteur, M. le ministre. – Retrait de l’amendement no 61 rectifié ; rejet de l’amendement no 36.
Amendement no 2 de la commission. – Mme le rapporteur, M. le ministre. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels avant l'article 1er A
Amendements nos 68 à 71 de Mme Annie David. – Mmes Annie David, le rapporteur, M. le ministre. – Rejet des quatre amendements.
Amendements identiques nos 34 de Mme Annie Jarraud-Vergnolle et 72 de Mme Annie David. – Mmes Annie Jarraud-Vergnolle, Annie David, le rapporteur, M. le ministre. – Rejet des deux amendements.
Adoption de l'article.
M. le président de la commission.
Suspension et reprise de la séance
Articles additionnels après l'article 1er
Amendement n° 37 de Mme Annie Jarraud-Vergnolle. – Mmes Jacqueline Alquier, le rapporteur, M. le ministre. – Rejet.
Amendement n° 93 de M. Philippe Dominati. – M. Philippe Dominati, Mme le rapporteur, M. le ministre. – Retrait.
Amendements nos 74 de Mme Annie David et 95 de M. Philippe Dominati. – Mme Isabelle Pasquet, M. Philippe Dominati, Mme le rapporteur, M. le ministre, Mme Annie David. – Retrait de l’amendement n° 95 ; rejet de l’amendement n° 74.
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l'article 1er bis
Amendements nos 62 rectifié et 64 rectifié de Mme Françoise Henneron. – Mmes Françoise Henneron, le rapporteur, M. le ministre. – Retrait des deux amendements.
Amendement n° 38 de Mme Annie Jarraud-Vergnolle et sous-amendement n° 102 de M. Serge Dassault. – Mmes Gisèle Printz, le rapporteur, MM. Serge Dassault, le ministre. – Rejet du sous-amendement et de l’amendement.
Amendements identiques nos 39 de Mme Annie Jarraud-Vergnolle et 75 de Mme Annie David ; amendements identiques nos 3 de la commission, 22 de M. Serge Dassault, rapporteur pour avis, 40 de Mme Annie Jarraud-Vergnolle et 76 de Mme Annie David ; amendements nos 41, 42 de Mme Annie Jarraud-Vergnolle, 23, 24 de M. Serge Dassault, rapporteur pour avis, 4, 5 de la commission et 65 rectifié de Mme Catherine Procaccia ; amendements identiques nos 43 de Mme Annie Jarraud-Vergnolle et 77 de Mme Annie David. – Mme Annie Jarraud-Vergnolle, M. Guy Fischer, Mme le rapporteur, M. le rapporteur pour avis, Mmes Annie David, Catherine Procaccia, Gisèle Printz, M. le ministre. – Retrait de l’amendement no 65 rectifié ; rejet des amendements nos 39, 75, 41, 42, 43 et 77 ; adoption des amendements nos 3, 22, 40, 76, 23, 4 et 5, l’amendement n° 24 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 2
Amendement n° 44 rectifié de M. Jean-Pierre Godefroy. – Mmes Jacqueline Alquier, le rapporteur, M. le ministre. – Rejet.
Amendement n° 25 rectifié de M. Serge Dassault et sous-amendement n° 103 de Mme Isabelle Pasquet, rapporteur pour avis. – MM. le rapporteur pour avis, le président de la commission, Mme le rapporteur, MM. le ministre, François Marc, Mmes Isabelle Pasquet, Nicole Bricq. – Rejet du sous-amendement et de l’amendement.
Amendement n° 26 de M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. – M. le rapporteur pour avis, Mme le rapporteur, M. le ministre. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 27 de M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. – M. le rapporteur pour avis, Mme le rapporteur, M. le ministre. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendements nos 45 de Mme Annie Jarraud-Vergnolle et 6 de la commission. – M. Roland Courteau, Mme le rapporteur, M. le ministre. – Rejet de l’amendement n° 45 ; adoption de l’amendement n° 6.
Adoption de l’article modifié.
Amendements nos 78 de Mme Annie David et 63 rectifié de Mme Françoise Henneron. – Mmes Isabelle Pasquet, Françoise Henneron, le rapporteur, M. le ministre. – Retrait de l’amendement n° 63 rectifié ; rejet de l’amendement n° 78.
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l'article 2 quater
Amendement n° 46 de M. Jean-Pierre Godefroy. – Mmes Annie Jarraud-Vergnolle, le rapporteur, M. le ministre. – Rejet.
Amendement n° 7 de la commission. – Mme le rapporteur, M. le ministre. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendements identiques nos 47 de Mme Annie Jarraud-Vergnolle et 79 de Mme Annie David ; amendements nos 8 et 100 de la commission. – Mmes Maryvonne Blondin, Annie David, le rapporteur, M. le ministre. – Rejet des amendements identiques nos 47 et 79 ; adoption des amendements nos 8 et 100.
Adoption de l’article modifié.
Amendements identiques nos 48 de Mme Annie Jarraud-Vergnolle et 80 de Mme Annie David. – Mme Maryvonne Blondin, M. Guy Fischer, Mme le rapporteur, M. le ministre. – Rejet des amendements identiques nos 48 et 80.
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l'article 2 sexies
Amendement n° 30 rectifié de Mme Catherine Procaccia. – Mmes Catherine Procaccia, le rapporteur, M. le ministre. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 9 de la commission. – Mme le rapporteur, M. le ministre. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article additionnel avant l'article 2 nonies
Amendement n° 10 rectifié de la commission. – Mme le rapporteur, M. le ministre. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendements identiques nos 49 de Mme Annie Jarraud-Vergnolle et 81 de Mme Annie David. – Mmes Gisèle Printz, Annie David, le rapporteur, M. le ministre. – Rejet des deux amendements.
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l'article 2 nonies
Amendement n° 82 de Mme Annie David. – Mmes Annie David, le rapporteur, M. le ministre. – Rejet.
Amendement n° 83 rectifié de Mme Annie David. – Mmes Annie David, le rapporteur, M. le ministre. – Rejet.
Amendement n° 29 rectifié de M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. – M. le rapporteur pour avis, Mme le rapporteur, M. le ministre. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 11 rectifié ter de la commission. – Mme le rapporteur, M. le ministre. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 12 de la commission. – Mme le rapporteur, M. le ministre. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 13 de la commission. – Mme le rapporteur, M. le ministre. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 14 de la commission. – Mme le rapporteur, M. le ministre. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 20 rectifié du Gouvernement et sous-amendement no 92 de Mme Nicole Bricq. – M. le ministre, Mmes Nicole Bricq, le rapporteur, Annie David. – Rejet du sous-amendement ; adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 28 de M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. – M. le rapporteur pour avis, Mme le rapporteur, M. le ministre, Mme Annie David. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendements identiques nos 50 de Mme Annie Jarraud-Vergnolle, 84 de Mme Annie David et 96 de M. Philippe Dominati ; amendements nos 51, 52 de Mme Annie Jarraud-Vergnolle, 15, 16 de la commission et 85 de Mme Annie David ; amendements identiques nos 17 de la commission, 53 de Mme Annie Jarraud-Vergnolle et 86 de Mme Annie David. – Mmes Annie Jarraud-Vergnolle, Annie David, M. Philippe Dominati, Mmes Gisèle Printz, le rapporteur, Jacqueline Alquier, MM. le ministre, Guy Fischer, Mme Catherine Procaccia. – Retrait de l’amendement n° 96 ; rejet des amendements nos 50, 84, 51, 52 et 85 ; rejet, par scrutin public, des amendements nos 17, 53 et 86 ; adoption des amendements nos 15 et 16.
Adoption de l'article modifié.
Renvoi de la suite de la discussion.
7. Dépôt d'une proposition de loi
8. Dépôt de propositions de résolution
compte rendu intégral
Présidence de M. Roger Romani
vice-président
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Décès d'un ancien sénateur
M. le président. Mes chers collègues, j’ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Jean Clouet, maire honoraire de Vincennes, qui fut sénateur du Val-de-Marne de 1986 à 2004.
Au nom de M. le président du Sénat et du Sénat tout entier, je tiens à exprimer nos sincères condoléances à sa famille et à ses proches.
3
Commission mixte paritaire
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d’une commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion.
Il sera procédé à la nomination des représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire selon les modalités prévues par l’article 12 du règlement.
4
Modification de la composition du groupe de travail sur la révision constitutionnelle et la réforme du règlement
M. le président. J’informe le Sénat que Mme Éliane Assassi remplace Mme Annie David au sein du groupe de travail sur la révision constitutionnelle et la réforme du règlement.
5
Mise au point au sujet d'un vote
M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou. Monsieur le président, lors du scrutin public sur l'ensemble du projet de loi généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion, mon collègue Robert Tropeano a été porté comme ayant voté contre, alors qu’il souhaitait s’abstenir.
M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, monsieur de Montesquiou.
6
Revenus du travail
Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, en faveur des revenus du travail (no 502, 2007-2008 ; nos 43, 48).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre. (M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales, et Mme Isabelle Debré, rapporteur, applaudissent.)
M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires sociales, madame le rapporteur, monsieur le rapporteur pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, vous connaissez notre projet : remettre le travail au cœur de notre modèle de société.
En effet, pour partager des richesses, il faut d’abord les créer. Or c’est par le travail que l’on crée des richesses et, donc, du pouvoir d’achat. C’est par le travail que l’on prépare mieux l’avenir de la société. C’est aussi par le travail que l’on peut améliorer sa situation professionnelle et personnelle.
M. Guy Fischer. Tiens donc !
M. Xavier Bertrand, ministre. Tous nos efforts, toutes les réformes engagées depuis plus d’un an en matière économique et sociale ont permis de donner une place centrale à la valeur travail.
Avec ce texte, comme l’a rappelé le Président de la République, il s’agit de donner au travail la juste part des richesses qu’il contribue à produire et de le faire dans le cadre du dialogue social.
Il est évident qu’une société qui propose la juste rétribution des efforts de chacun et qui privilégie la discussion est plus forte et mieux armée pour affronter la compétition économique ou les difficultés économiques.
Il est également évident que le capital et le travail sont tous les deux indispensables au développement économique et à la vitalité d’une entreprise : l’un ne va pas sans l’autre, et les opposer n’a jamais rien produit de positif.
La participation, ce sont 5 millions de salariés qui ont touché un peu plus de 7 milliards d’euros en 2006.
L’intéressement, ce sont 4,3 millions de salariés qui ont bénéficié de 7 milliards d’euros. Voilà des outils importants pour continuer à améliorer les revenus des Français.
L’intéressement et la participation donnent donc déjà des résultats, mais nous devons faire plus et mieux, car, aujourd’hui, ces dispositifs restent essentiellement limités aux grandes entreprises : seul un salarié sur dix dans les PME de moins de cinquante salariés en bénéficie.
Or les PME sont des acteurs clés du développement : c’est là que nous saurons trouver de nouveaux gisements de croissance. Il nous faut à la fois dynamiser et faire plus largement connaître les bénéfices de ce système, et ce au plus près du terrain.
Alors que nous traversons une conjoncture économique difficile, il est d’autant plus crucial d’élargir les marges de manœuvre des entreprises et d’offrir davantage de possibilités pour augmenter les revenus.
Aujourd'hui, 6 millions de salariés ne bénéficient ni de l’intéressement ni de la participation. C’est cette situation qu’il nous faut changer.
Ce projet de loi, nous l’avons préparé avec Christine Lagarde et Laurent Wauquiez, et nous avons voulu qu’il permette de développer les revenus du travail, rapidement et efficacement. Il comporte deux versants complémentaires : l’intéressement et la participation, pour mieux associer les salariés à la réussite économique des entreprises ; les salaires, parce qu’il faut aujourd’hui moderniser et dynamiser la politique salariale dans notre pays.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous présenterai maintenant les détails qui concernent l’intéressement, la participation et le SMIC, avant que Laurent Wauquiez vous expose plus précisément la conditionnalité des allégements de charges pour les entreprises et les branches.
L’intéressement et la participation sont de grandes idées, nous en convenons tous. Dès lors, pourquoi ne pas en faire profiter le plus grand nombre de salariés, notamment dans les PME ?
Ce projet de loi s’inscrit dans une relance plus générale de la participation, cette association entre le capital et le travail lancée, voilà plus de cinquante ans, par le général de Gaulle.
Notre projet de loi fixe des objectifs simples.
Les entreprises doivent tout d’abord distribuer davantage à leurs salariés. Pour cela, il faut développer l’intéressement. Ainsi mettons-nous en place un crédit d’impôt de 20 % sur les sommes supplémentaires versées : c’est simple et c’est immédiat. Si un chef d’entreprise distribue en plus 1 000 euros d’intéressement à ses salariés, il bénéficiera d’un crédit d’impôt de 200 euros.
Pour inciter les entreprises à jouer le jeu sans attendre et pour permettre aux salariés de percevoir immédiatement une prime, le projet de loi autorise les entreprises qui auront déjà signé un accord d’intéressement avant la mi-2009 de verser aux salariés une prime de 1 500 euros exonérée de charges et d’impôt.
Sur ce sujet, j’ai bien entendu la proposition formulée par la commission des finances et par vous-même, monsieur le rapporteur pour avis. Mais, sans crédit d’impôt, nous n’atteindrons jamais l’objectif : nous ne ferons pas bénéficier de l’intéressement un plus grand nombre de salariés, en doublant, comme nous le souhaitons, les montants versés au titre de l’intéressement.
Or nous avons, me semble-t-il, trouvé un point d’équilibre avec les différents acteurs, notamment les parlementaires. Monsieur Dassault, si je comprends bien le sens et la portée de votre proposition, il n’est pas possible, selon moi, de la retenir aujourd'hui, au risque de bouleverser l’équilibre qui a été trouvé et qui repose – j’assume ce choix – sur l’incitation.
En outre, l’Assemblée nationale a permis de prévoir dans les accords d’intéressement des possibilités de reconduction tacite, ce qui facilitera également la vie des entreprises. Ce qui marche, c’est ce qui est simple. Voilà aussi pourquoi cette mesure était de bon sens.
Nous voulons aussi faire confiance aux salariés, en leur laissant la liberté de choix : au moment où ils percevront leur participation, ils pourront soit disposer tout de suite de leur épargne, soit la bloquer.
Il est temps de sortir d’une conception qui consistait à choisir à la place du salarié. Ce n’est pas au ministre du travail, derrière son bureau, de choisir à la place du salarié. C’est à ce dernier de savoir s’il souhaite se constituer une épargne automatique, en prenant avant tout en compte, pour lui-même et par lui-même, sa situation, ses projets, voire ses besoins.
Naturellement, cette réforme n’entrera en vigueur que pour les droits à participation nouvellement distribués ; elle ne modifiera pas les cas de déblocage anticipé qui existent.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens également à souligner que cette réforme ne réduira pas non plus l’intérêt et le développement de l’épargne salariale. Celle-ci poursuivra son essor. Je sais que beaucoup d’entre vous, sur toutes ces travées, notamment vous-même, madame le rapporteur, y sont légitimement attachés.
L’Assemblée nationale a complété la liberté de choix par plusieurs dispositions importantes, qui répondent aux attentes formulées par les entreprises elles-mêmes et en leur sein. Elle a ouvert la possibilité d’abonder la participation bloquée comme pour l’intéressement, ainsi que la possibilité de bloquer par accord collectif la partie de la participation qui excède l’application de la formule légale.
En simplifiant les règles, nous voulons développer l’attrait de ces mécanismes, pour les entreprises comme pour les salariés : plus d’intéressement et plus de participation, c’est plus de revenus qui viennent s’ajouter aux salaires.
J’ai bien dit « ajouter », car l’intéressement et la participation ne remplacent pas les salaires : ils viennent en plus des salaires ! C’est d’ailleurs pourquoi ce projet de loi est un tout, que nous vous présentons à deux, Laurent Wauquiez et moi-même.
Ce texte dynamise également la politique salariale, l’échelle des salaires et la négociation sur les salaires.
L’Assemblée nationale a voulu étendre le bénéfice de ces outils aux chefs d’entreprises employant jusqu’à deux cent cinquante salariés. Il est en effet logique que tout le monde puisse être associé aux performances de l’entreprise, tout comme il est logique que la rémunération des dirigeants soit liée aux succès de l’entreprise.
En ce domaine, le Président de la République a souligné combien il était primordial, particulièrement dans la conjoncture actuelle, de moraliser les pratiques de notre économie, notamment pour ce qui concerne la rémunération des dirigeants.
Comme vous le savez, le MEDEF et l’AFEP, l’Association française des entreprises privées, ont fait, sur ce sujet, des recommandations intéressantes.
Mme Nicole Bricq. Intéressantes, en effet !
M. Xavier Bertrand, ministre. Il faut maintenant que chacun des conseils d’administration des sociétés concernées s’engage à les respecter. Formuler des recommandations, c’est bien ; prendre des décisions, c’est encore mieux ! Il nous faut aujourd'hui attendre de telles décisions, tout en sachant que – j’y insiste – l’Autorité des marchés financiers établira chaque année un rapport sur la mise en œuvre de ces recommandations.
De son côté, le Gouvernement prend ses responsabilités sans tarder. Nous avons déposé un amendement tendant à mettre en place, dans les entreprises qui versent des stock-options à certains dirigeants, un dispositif comparable pour les salariés sous forme d’actions gratuites, de stock-options, d’intéressement ou de participation.
Les stock-options réservées à certains, c’est terminé ! Cette possibilité existera désormais pour tous. Tel est l’esprit de ce projet de loi en faveur des revenus du travail. (Mme Catherine Procaccia applaudit. – Mmes Nicole Bricq et Annie David s’exclament. ) J’ai cru comprendre, dans les propos tenus au sujet des banques, que cette proposition recueillait le soutien de tous, et j’en suis très heureux. (M. Guy Fischer proteste.)
Cette proposition me tient particulièrement à cœur. En effet, si nous voulons renforcer les solidarités dans l’entreprise et faire reconnaître encore davantage la valeur du travail, il nous faut instaurer une forme de solidarité dans les rémunérations.
Nous pensons aussi à ceux dont la rémunération se situe en bas de l’échelle des salaires. C’est pourquoi nous voulons moderniser le mode de fixation du SMIC.
Depuis trop longtemps, la fixation du SMIC est devenue un rendez-vous politique de plus en plus déconnecté de la réalité économique et sociale.
Les « coups de pouce » gouvernementaux, les multiples SMIC qu’il nous a fallu unifier en raison des 35 heures, le rendez-vous annuel autour des partenaires sociaux qui plaident, les uns, pour une augmentation significative, les autres, pour un statu quo, n’ont pas vraiment conduit à améliorer la situation des salariés et des entreprises.
M. Guy Fischer. Et vous ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Ils n’ont pas davantage permis de disposer d’une « rémunération plancher » dynamique, tant pour la croissance des entreprises que pour l’échelle des salaires. Il faut donc que l’évolution du SMIC ...
M. Guy Fischer. Vous allez le tuer, le SMIC !
Mme Nicole Bricq. C’est ce qu’ils veulent !
M. Xavier Bertrand, ministre. ... soit davantage en phase avec les conditions économiques et le rythme des négociations salariales, et que l’on puisse sortir de ce qui est devenu un véritable jeu de rôle, notamment politique.
En avançant la date de la revalorisation annuelle au 1er janvier, nous voulons donner de la visibilité aux négociations salariales annuelles dans les entreprises et les branches. En effet, l’ensemble des négociations salariales pâtissent du fait que cette date est actuellement fixée au 1er juillet, car il ne se passe rien ou presque au cours des mois de juillet et août.
Nous ne changeons rien aux règles légales de fixation et de revalorisation du SMIC.
Mme Annie David. Jusqu’à quand ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Nous souhaitons tout simplement obtenir un éclairage supplémentaire.
Nous proposons que des experts indépendants soient consultés (Exclamations sur les travées du groupe CRC.) et remettent chaque année à la Commission nationale de la négociation collective et au Gouvernement un rapport sur les évolutions souhaitables du SMIC.
Il s’agit de faire en sorte que la fixation du SMIC soit l’objet d’une analyse sereine, objective et indépendante, comme chez nos voisins européens, tout simplement. L’Assemblée nationale a voulu que cette analyse soit faite par un groupe d’experts indépendants et non par une commission supplémentaire. Ce message, qui émanait également des sénateurs, a été bien reçu. Les moyens de ce groupe d’experts seront mutualisés avec ceux d’une instance existante.
Enfin, nous allons conditionner les allégements de charges, pour qu’ils soient versés à ceux qui jouent le jeu de la négociation salariale.
Laurent Wauquiez vous exposera plus en détail cet axe de notre projet, mais je veux souligner certains points qui me tiennent particulièrement à cœur.
Est-il normal que presque le quart des entreprises qui ont l’obligation légale de négocier chaque année sur les salaires n’en fassent rien ? Non, bien sûr !
Il ne s’agit pas d’augmenter les salaires par la loi, mais l’État peut choisir de retirer des allégements de charges sociales à ceux qui ne respectent pas un engagement minimal, à savoir dialoguer et échanger avec les représentants des salariés sur les possibilités de revalorisation salariales.
Les entreprises qui ne respecteront pas leur obligation de négociations salariales se verront retirer 10 % des allégements de charges dont elles bénéficient.
M. Aymeri de Montesquiou. Très bien !
M. Xavier Bertrand, ministre. En outre, il n’est pas admissible que des minima salariaux fixés par la négociation de branche soient encore inférieurs au SMIC.
Avant de conclure, je veux souligner un dernier point qui est, à mes yeux, essentiel.
Il faut que chaque entreprise puisse mettre en œuvre ce système de la façon la plus simple et la plus adaptée à sa situation. C’est pourquoi je souhaite que nous fassions ensemble un effort de pédagogie sur le sujet, ce que j’appelle le « service après vote ». Je suis en effet convaincu qu’une réforme n’existe vraiment que lorsqu’elle est appliquée, lorsqu’elle entre dans le quotidien de nos concitoyens, lorsque ceux-ci la comprennent et en mesurent les effets, en un mot, lorsqu’ils se l’approprient.
Durant tout le débat parlementaire, et donc avant le vote, le Gouvernement sera attentif aux propositions que vous pourrez faire pour améliorer ce texte. Je veux d’ores et déjà saluer le travail de la commission des affaires sociales, de son président, de ses membres et de son rapporteur, Isabelle Debré, dont les propositions d’amendements permettront d’enrichir le présent projet de loi. Je tiens à la remercier pour sa contribution et son implication. Je salue également le regard exigeant de la commission des finances et de son rapporteur pour avis, Serge Dassault.
Avec ce texte, nous envoyons un signal clair aux entreprises et aux salariés. Nous créons les conditions pour favoriser davantage ceux qui travaillent dans le partage des richesses, ...
M. Guy Fischer. Il y a de quoi faire !
M. Xavier Bertrand, ministre. ... pour développer le dialogue social et pour mieux associer les salariés aux succès de leur entreprise. Nous pensons qu’il est juste que les salariés touchent le dividende de leur travail, de même que les actionnaires perçoivent le dividende de leur investissement.
M. Guy Fischer. Il vaut mieux entendre cela que d’être sourd !
M. Xavier Bertrand, ministre. Avec ce projet de loi, l’action politique prend tout son sens moderne : la loi incite et fixe un cap, mais ce sont les acteurs de l’entreprise qui lui donnent sa portée pratique.
Ambition et pragmatisme, tels sont les deux aspects de ce texte attendu. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État chargé de l’emploi. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires sociales, madame, monsieur les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, le texte que nous vous présentons, avec Xavier Bertrand et Christine Lagarde, revêt une actualité toute particulière dans le contexte économique que nous connaissons.
Face aux difficultés auxquelles se heurtent les uns et les autres, des réflexions s’engagent, notamment sur la question du partage des revenus entre la rémunération du capital et celle du travail. Ce projet de loi s’adresse précisément à ceux qui n’ont que leur travail pour capital !
Pour cela, il est nécessaire de moderniser et d’adapter les règles qui déterminent les rémunérations dans notre pays, non pas en légiférant de manière exceptionnelle, dans l’urgence, mais en réformant en profondeur les modes de négociation salariale. Cette philosophie, comme l’a rappelé Xavier Bertrand, est celle de la revalorisation du travail.
Ce projet de loi, qui est complémentaire par rapport à la loi généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion, s’adresse en priorité aux ménages des classes moyennes modestes, qui ont été trop souvent les grands oubliés des politiques salariales menées depuis vingt-cinq ans.
En effet, au cours des vingt-cinq dernières années, on a pratiqué une politique publique des rémunérations qui consistait uniquement à revaloriser le SMIC. Le SMIC est alors devenu l’outil d’une politique de revenu et pas seulement d’une politique de salaire plancher. Les débats se sont donc concentrés uniquement sur les fameux « coups de pouce », qui expliquent à eux seuls 60 % des hausses du SMIC depuis sa création en 1970, sans que l’on se demande jamais quel effet ces coups de pouce pouvaient avoir sur l’ensemble des salaires.
Il ne s’agit bien évidemment pas de tuer le SMIC, mais je rappelle que, pour 85 % de nos concitoyens, le SMIC n’est pas le seul mode de fixation des salaires.
Mme Isabelle Debré, rapporteur de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Nous devons donc éviter d’en faire l’alpha et l’oméga de toute notre politique salariale. Ce n’est que l’arbre qui cache la forêt, cette forêt dans laquelle se trouvent la majorité des salariés.
On a, du coup, oublié précisément ceux qui gagnent juste un peu plus que le SMIC. Or les autres salaires n’ont pas suivi la même progression. L’écart entre le SMIC et le salaire des classes moyennes modestes s’est ainsi resserré année après année.
Le résultat est simple.
L’économie française présente une particularité très nette : 15% des salariés sont rémunérés au SMIC, contre 5 % seulement en moyenne dans les autres pays européens. Ce phénomène ne serait pas inquiétant en soi si ne s’y ajoutait un autre paramètre : les perspectives pour ces salariés de sortir du SMIC ont été pratiquement divisées par deux depuis vingt ans. Le SMIC joue donc comme une trappe : une fois au SMIC, un salarié voit ses chances d’en sortir se réduire année après année.
Cette situation est inacceptable, notamment pour les jeunes, qui sont payés au SMIC deux fois plus souvent que leurs aînés et auxquels on promet toute une vie de travail sans perspective de progression et sans véritable stimulation.
Le projet de loi qui vous est soumis tend clairement à rompre avec cette tendance et à récréer des perspectives de rémunération et de progression salariale, notamment à l’échelle des bas salaires. Il faut pour cela une action à tous les niveaux : salaires dans les entreprises, grilles salariales des branches et compléments de rémunération, comme l’intéressement et la participation.
Je ne reviendrai ni sur l’intéressement et la participation, dont a parlé Xavier Bertrand, avec lequel j’ai travaillé de façon très complémentaire, ni sur le mode de fixation du SMIC.
Je souhaite en revanche m’attarder sur l’articulation entre le SMIC et les minima de branche, d’une part, et sur la conditionnalité des allégements de charges, d’autre part.
Permettez-moi auparavant, mesdames, messieurs les sénateurs, de revenir sur la méthode que nous avons retenue. Celle-ci consiste à faire le pari du dialogue social, tout en veillant à ne pas faire de celui-ci un simple mot ou un simple appel à la négociation : il s'agit de fixer un délai pour la négociation et des contraintes claires.
La conditionnalité des allégements de cotisations doit permettre de stimuler les négociations de salaires de manière à recréer des perspectives salariales.
Disons-le clairement : il n’est pas normal que des lois votées par la représentation nationale et qui sont celles de la République ne soient pas appliquées.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. C’est clair !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Or c’est le cas aujourd’hui ! L’obligation de négocier annuellement sur les salaires n’est pas respectée dans une entreprise sur quatre et dans une grande entreprise sur dix. Ce n’est pas sain !
Il est de l’intérêt de l’entreprise d’avoir, au moins une fois par an, un vrai débat sur la question des salaires, où l’on explique, si le contexte économique est difficile, pourquoi les salaires ne peuvent pas être revalorisés, ou, à l’inverse, comment le résultat constaté, fruit du travail de l’ensemble des équipes, permet d’ouvrir des perspectives de négociations salariales.
Pour la première fois, mesdames, messieurs les sénateurs, un gouvernement se pose donc la question de l’application concrète et du respect de cette disposition, adoptée au milieu des années quatre-vingt !
Les entreprises qui ne joueront pas le jeu verront leurs allégements diminuer de 10 % chaque année.
L’Assemblée nationale a même souhaité aller plus loin en retirant 100% des allégements aux entreprises qui ne jouent pas le jeu trois années de suite, dans le but de sanctionner fortement les « passagers clandestins ».
Pour autant – nous avons eu à ce sujet un débat très intéressant avec M. Dassault –, l’objectif n’est pas de supprimer les allégements de cotisations sociales. Cette politique a été évaluée de manière rigoureuse sur plus de dix années, et il ressort de ce retour d’analyse qu’elle a permis d’enrichir notre croissance en emplois, notamment au bénéfice des moins qualifiés. J’ai la conviction que c’est sans doute l’outil le plus efficace dont nous disposons en termes de création et de préservation de l’emploi.
M. Guy Fischer. Tout le monde ne dit pas cela !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Il est vrai que tout cela représente un effort budgétaire important pour la collectivité. C’est pourquoi nous sommes fondés à demander aux entreprises qui bénéficient de cet effort national qu’elles respectent, en contrepartie, leurs obligations en matière de rémunération.
J’en viens maintenant aux branches.
Dans certaines branches, et ce malgré le travail remarquable réalisé par Gérard Larcher lorsqu’il était ministre chargé du travail, le bas des grilles de salaires est durablement décalé par rapport au SMIC. Cela signifie non pas que les salaires versés sont inférieurs au SMIC, mais que l’étagement des carrières et des salaires est comprimé encore plus au niveau du SMIC. Concrètement, même si vous continuez à voir vos responsabilités croître dans l’entreprise, vous restez au SMIC.
Nous souhaitons donc que les négociations annuelles démarrent au plus vite, dès l’année prochaine, pour mettre les minima au niveau du SMIC. Les négociations entre partenaires sociaux doivent nous permettre de revaloriser les minima sociaux des branches qui ne les ont pas portés au niveau du SMIC afin de donner de nouvelles perspectives en la matière.
M. Guy Fischer. Ce ne sont pas des minima sociaux !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Sept branches sont concernées.
Votre rapporteur, Isabelle Debré, a attiré notre attention sur la nécessité de bien articuler les niveaux de négociation de branche et d’entreprise. Le débat permettra certainement de trouver des solutions en la matière. Ce sujet mérite que nous nous y attardions.
Permettez-moi, en conclusion, de saluer le travail remarquable accompli par le rapporteur de la commission des affaires sociales, Mme Isabelle Debré, et par le rapporteur pour avis de la commission des finances, M. Serge Dassault, qui, par leurs propositions, ont permis d’enrichir sensiblement le texte du Gouvernement.
Si je devais résumer ce texte tout en respectant sa forte cohérence interne et sans oublier les apports de vos commissions, mesdames, messieurs les sénateurs, je dirais qu’il a un objectif - les salariés modestes et les classes moyennes -, qu’il privilégie une méthode - la négociation sociale -, et qu’il a un but : la revalorisation des salaires de ceux qui n’ont que leur travail pour capital. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le pouvoir d’achat demeure, plus que jamais, au cœur des préoccupations de nos concitoyens. Le Parlement a adopté, au cours des derniers dix-huit mois, plusieurs textes destinés à répondre à leurs attentes. Je pense notamment à la loi TEPA du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, qui a détaxé les heures supplémentaires, ou à la loi du 8 février 2008 pour le pouvoir d’achat, qui a facilité le rachat de jours de repos et procédé à un déblocage exceptionnel de la participation.(M. Guy Fischer s’exclame.)
Il nous est aujourd’hui proposé de franchir une nouvelle étape, en jouant sur deux leviers complémentaires : d’une part, l’intéressement, la participation et l’épargne salariale ; d’autre part, la politique salariale.
L’intéressement et la participation permettent aux salariés de partager les fruits de la croissance de leur entreprise. Ces mécanismes s’inscrivent, nous le savons tous, dans la tradition profondément gaullienne d’association du capital au travail.
À l’heure actuelle, un tiers environ des salariés sont couverts par un accord d’intéressement. Cette statistique, qui n’est certes pas défavorable, ne doit pas nous faire oublier pour autant que cette proportion est beaucoup plus faible dans les PME. Le crédit d’impôt prévu par le projet de loi a pour objectif de contribuer à combler cet écart en diffusant plus largement l’intéressement dans nos entreprises. Le coût de cette mesure, non négligeable, pourrait être de l’ordre de 370 millions d’euros la première année et dépasser 1 milliard d’euros en 2012 si l’objectif de doublement des sommes versées au titre de l’intéressement est atteint.
Je sais que certains de nos collègues jugent ce coût excessif pour les finances publiques. Cette préoccupation s’est exprimée au sein de la commission des affaires sociales et, plus encore, au sein de la commission des finances, attachée, comme nous tous, au retour à l’équilibre des comptes de l’État. Pour autant, la crise actuelle et le contexte de ralentissement économique doivent-ils nous conduire à rejeter cette mesure au motif qu’elle aurait pour effet de diminuer nos recettes fiscales ?
Permettez-moi de rappeler que le développement de l’intéressement n’est pas seulement un moyen de distribuer du pouvoir d’achat aux salariés. C’est aussi, et surtout, un instrument d’amélioration de la performance de nos entreprises. En effet, la logique qui sous-tend tout accord d’intéressement est de lier le versement d’une prime à la réalisation de certains objectifs. Elle constitue donc un moyen puissant de motivation des salariés et d’amélioration du climat social dans l’entreprise, puisque les efforts de chacun sont gratifiés.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. La perte de recettes qui résultera du crédit d’impôt doit donc être considérée, à notre avis, non comme une perte sèche pour le budget de l’État, mais plutôt comme un investissement dans nos entreprises.
À ce sujet, je crois utile d’évoquer une mesure du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, que nous allons examiner très prochainement. Ce texte prévoit un « forfait social », qui se traduira par un prélèvement de 2 % sur les primes d’intéressement.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ce n’est pas très cohérent !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Si je comprends la nécessité de trouver de nouvelles recettes pour les caisses de sécurité sociale dont le déficit s’aggrave tandis que les besoins augmentent, je m’interroge cependant sur la cohérence du message adressé aux entreprises.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Qu’on en juge : d’un côté, un crédit d’impôt introduit par le projet de loi en faveur des revenus du travail ; de l’autre, un prélèvement supplémentaire opéré par la loi de financement de la sécurité sociale. N’est-ce pas un peu singulier ?
Certes, les montants en jeu ne sont pas les mêmes : le prélèvement au titre du forfait social sera très faible comparé au bénéfice que l’entreprise retirera du crédit d’impôt. Mais le forfait social a vocation à être pérenne, alors que le crédit d’impôt est, lui, une mesure provisoire, applicable jusqu’à la fin de l’année 2014 seulement.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Il faudra donc veiller, lors du débat sur la loi de financement de la sécurité sociale, à ce que la mise en place du forfait social n’aille pas, monsieur le ministre, à l’encontre de l’objectif ambitieux que s’est fixé le Gouvernement en matière de développement de l’intéressement.
Venons-en maintenant à la question de la participation. Le projet de loi a pour objectif de donner une nouvelle liberté de choix aux salariés.
Traditionnellement, les sommes que les salariés reçoivent au titre de leur participation aux résultats de l’entreprise sont bloquées pendant cinq ans, sauf déblocage anticipé pour les aider dans certains moments heureux ou difficiles de leur vie personnelle ou professionnelle.
Je suis résolument attachée à cette règle d’indisponibilité des fonds pendant cinq ans, et ce pour deux raisons principales. D’abord, elle permet à des salariés, souvent modestes, de se constituer une épargne ; il faut savoir, par exemple, qu’un grand nombre de primo-accédants à la propriété - de mémoire, 80 % -, n’ont que leur épargne salariale comme apport personnel ; ensuite, la participation, en venant consolider les fonds propres des entreprises, contribue ainsi à leur financement.
Le texte vise à donner aux salariés le choix entre blocage de la participation et disponibilité immédiate de leurs droits. Cet assouplissement me paraît acceptable dans la mesure où il est strictement encadré : dans le temps, car les salariés disposeront d’un délai limité pour indiquer s’ils souhaitent disposer immédiatement de leur participation ; dans l’esprit, car l’absence de choix vaudra confirmation du blocage ; dans l’étendue, puisque l’encours de participation ne sera pas « déblocable », seul le flux annuel distribué le sera.
J’ajoute, enfin, que le régime fiscal incitera les salariés à faire le choix du blocage et, donc, de l’épargne longue, puisque seules les sommes bloquées pendant cinq ans seront exonérées d’impôt sur le revenu.
Comme nos collègues de l’Assemblée nationale, qui ont modifié le texte en ce sens, je suis convaincue de la nécessité de développer l’épargne retraite en raison des contraintes qui pèsent sur nos régimes de retraite par répartition. Je vous proposerai, au nom de la commission, des amendements qui confortent cette orientation.
La commission s’est également intéressée à la question de l’actionnariat salarié, qui est une autre manière d’associer les salariés à la bonne marche de leur entreprise.
Les sociétés ont la possibilité de procéder à des augmentations de capital réservées à leurs salariés. Les opérations de ce type dans les PME, qui sont pour la plupart des sociétés non cotées, sont toutefois freinées par le montant des frais d’expertise qu’elles occasionnent. Nous proposerons donc d’alléger les formalités qui s’y attachent.
Il me paraît aussi très important que l’on puisse améliorer la liquidité des titres des sociétés non cotées. La Caisse des dépôts et consignations a engagé en ce sens une réflexion qu’il conviendrait de faire aboutir rapidement, monsieur le ministre.
J’aborderai maintenant le volet du texte qui porte sur la politique salariale et, en premier lieu, sur la modernisation de la procédure de fixation du SMIC en y associant, à titre consultatif, un groupe d’experts indépendants.
Notre commission a été sensible à la volonté qui s’est exprimée à l’Assemblée nationale d’éviter la création d’une énième instance consultative dans le domaine de l’emploi, alors que ces instances sont déjà très nombreuses. Nous approuvons donc l’engagement pris par le ministre du travail de rattacher ce nouveau groupe d’experts à une structure existante, ce qui permettra de limiter au minimum ses dépenses de fonctionnement.
Sur le fond, ce groupe d’experts devrait jouer un rôle utile en éclairant le débat public par des analyses économiques rigoureuses. Son avis viendra compléter celui de la Commission nationale de la négociation collective, qui réunit les partenaires sociaux, sans remettre en cause les règles légales d’indexation du SMIC, ni la responsabilité du Gouvernement en matière de revalorisation du salaire minimum.
La commission est, en revanche, plus dubitative sur l’utilité d’avancer au 1er janvier la date de revalorisation du SMIC, fixée jusqu’ici au 1er juillet ; j’y reviendrai.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Enfin, le texte a pour objet de dynamiser les négociations salariales grâce à un mécanisme de conditionnalité des allégements de cotisations sociales.
La commission a approuvé sans réserve le dispositif qui prévoit de réduire ces allégements de charges dans les entreprises qui ne procéderont pas à la négociation annuelle obligatoire sur les salaires.
Certains de nos collègues ont regretté que l’on n’aille pas plus loin et que le bénéfice des allégements de charges ne soit pas conditionné à la conclusion d’un accord salarial. Cependant, respectueuse de l’autonomie des partenaires sociaux, la commission n’a pas souhaité, dans sa majorité, que le législateur menace de sanctions les entreprises qui ne concluraient pas d’accord. L’obligation d’un accord risquerait aussi de fausser les conditions de la négociation.
La mobilisation des syndicats et le sens des responsabilités des chefs d’entreprise, qui savent que la motivation de leurs équipes passe par un partage équitable des fruits de la croissance, suffiront, selon nous, à donner son plein effet à cette mesure.
Je profite de l’occasion qui m’est donnée pour interroger le ministre sur une question plus ponctuelle, qui concerne les entreprises de travail temporaire. Elles s’inquiètent des conséquences que pourrait avoir pour elles l’application de ce nouveau dispositif de conditionnalité des allégements de charges. Elles se demandent notamment si elles devront tenir compte de la situation de chacune de leurs entreprises clientes ou si c’est le respect, par l’entreprise d’intérim, de son obligation de négocier sur les salaires qui sera pris en considération. Il semble que la deuxième option est la bonne, mais il serait bon que le ministre puisse nous le confirmer.
J’en viens à la question des accords salariaux négociés au niveau des branches professionnelles.
Certaines grilles de salaires comportent, vous le savez, des minima inférieurs au SMIC. Cela n’a, bien sûr, aucune incidence sur le salaire effectivement versé puisque le SMIC est d’ordre public. En revanche, cela peut avoir un impact sur le montant de certaines primes calculées par référence aux minima conventionnels et entraîne un « écrasement » du bas de l’échelle des rémunérations : des salariés qui se situent à des niveaux différents de la grille salariale parce qu’ils sont plus ou moins qualifiés se retrouvent, en pratique, tous rémunérés au niveau du SMIC.
Notre président, Gérard Larcher, a lancé, lorsqu’il était ministre délégué aux relations du travail, une politique volontariste destinée à résoudre ce problème des minima conventionnels inférieurs au SMIC. Cette politique a eu des résultats très positifs puisque le nombre de branches concernées est passé de dix-huit, à la fin de l’année dernière, à six seulement aujourd’hui.
Le Gouvernement souhaite cependant aller plus loin et propose de rendre moins favorable le barème de l’allégement Fillon lorsqu’il s’appliquera à des entreprises qui relèvent d’une branche dont les minima salariaux sont inférieurs au SMIC.
Cependant, le mécanisme proposé présente, selon nous, monsieur le ministre, l’inconvénient de pénaliser financièrement des entreprises vertueuses en matière salariale mais qui dépendent d’une branche dans laquelle la négociation n’a pas abouti. On peut, certes, estimer, comme le fait le Gouvernement, que les entreprises feront alors pression sur les représentants patronaux qui négocient, en leur nom, au niveau de la branche, mais cette vision des choses nous paraît assez théorique. En effet, de quels moyens de pression peut bien disposer une PME dans une branche où dominent quelques grands groupes ?
Par ailleurs, il est tout de même singulier de donner une telle portée à l’accord de branche, alors que la loi portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail vient, au contraire, de donner la priorité à l’accord d’entreprise, plus adapté aux réalités du terrain, comme pourrait nous le confirmer notre collègue Alain Gournac, rapporteur de ce récent texte !
Nous ferons des propositions pour résoudre le paradoxe qui conduirait à pénaliser les entreprises vertueuses. D’autres collègues iront aussi dans ce sens. Nul doute que, du débat que nous aurons sur ce point, monsieur le ministre, surgira une solution satisfaisante.
Cette réserve ne remet pas en cause l’appréciation globalement positive de la commission sur l’ensemble de ce projet de loi, qui agit sur plusieurs leviers pour soutenir le pouvoir d’achat des ménages. Nous vous demandons, en conséquence, de l’adopter, mes chers collègues. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, avant de vous présenter mon rapport pour avis, je voudrais vous citer un extrait du discours prononcé à Toulon par le Président de la République, le 25 septembre 2008.
M. Guy Fischer. Ça commence !
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Je cite le Président de la République : « La loi à venir sur la participation et l’intéressement s’inscrit exactement dans la perspective de rééquilibrage entre le capital et le travail. Ne pas donner tous les bénéfices aux dirigeants et aux actionnaires, en destiner une part plus grande à ceux qui par leur travail ont créé la richesse, redonner du pouvoir d’achat aux travailleurs sans alourdir les charges fixes de l’entreprise et ainsi remettre le capitalisme à l’endroit, voilà l’autre révolution qu’il nous faut entreprendre. »
Et cette révolution, voulue par le Président de la République, votre commission des finances vous invite à la commencer de suite en modifiant la définition de la réserve de participation. En effet, le montant de cette réserve, calculée par la formule de départ datant de 1967, ne représente que 10 % environ des bénéfices après impôts. Elle ne supprime pas du tout l’inégalité de traitement entre les salariés et les actionnaires comme le demande le Président Sarkozy, car elle donne ainsi la plus grande partie des bénéfices aux actionnaires.
En revanche, si la formule des trois tiers était appliquée, tous les problèmes soulevés par le Président de la République seraient en partie résolus.
Elle mettrait en effet les salariés et les actionnaires à égalité, puisqu’elle prévoit la distribution du même montant, à savoir le tiers du bénéfice net, aux salariés et aux actionnaires.
Elle permettrait aussi d’augmenter le pouvoir d’achat des salariés sans alourdir les charges de l’entreprise puisque les sommes correspondantes ne concernent pas les coûts de production. Quant aux salariés dont le pouvoir d’achat serait ainsi augmenté, ils seraient autorisés à choisir entre l’épargne et la distribution directe.
J’ajoute que cela ne coûterait rien à l’État si les sommes ainsi perçues supportaient la totalité des charges et des impôts.
Je proposerai donc à ce sujet un amendement, voté à l’unanimité par la commission des finances.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Nous allons en discuter, monsieur le rapporteur pour avis !
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Je voudrais ajouter que cette règle des trois tiers, dont je parle depuis plus de vingt ans, n’est pour moi ni une idée fixe ni un caprice : elle a un effet bénéfique considérable, à la fois pour les salariés, les actionnaires et l’entreprise.
Cette règle m’a été inspirée par mon expérience : en tant que chef d’entreprise, et depuis quarante ans, puisque cela a commencé en 1968, j’ai été plongé maintes fois dans des conflits sociaux. Chaque fois, je me suis demandé ce qu’il faudrait faire pour les éviter. Chaque fois revenait le même slogan : « Le patron peut payer ! », quand ce n’était pas : « Dassault peut payer ! » (Sourires.)
Cela, Dieu sait combien de fois je l’ai entendu, parce que, quand la société faisait des bénéfices et que le personnel n’était pas augmenté, il y avait conflit, le conflit éternel entre profits et salaires que je peux résumer en une revendication : « moins de profits pour les actionnaires et plus de salaires pour les salariés ».
Alors, pour éviter ces conflits permanents, je me suis dit que, si l’on distribuait aux salariés la même somme qu’aux actionnaires, on résoudrait le problème.
C’est ce que souhaitait d’ailleurs le général de Gaulle, qui avait lancé l’idée de l’association capital-travail et de l’égalité entre l’un et l’autre, comme c’est ce que souhaite aujourd'hui le Président Sarkozy lorsqu’il dit vouloir « donner une part plus grande à ceux qui par leur travail ont créé la richesse ».
C’est ainsi qu’est née la règle des trois tiers, que j’ai appliquée, dès 1965, à Dassault Électronique et, à partir de 1986, à Dassault Aviation, par accord dérogatoire.
Et c’est ainsi aussi que, depuis plus de vingt ans, nous n’avons plus eu de grève et qu’en 2007 nous avons distribué aux salariés de Dassault Aviation près de quatre mois de salaire au titre de la participation, en plus des treize mois habituels ; je signale que les actionnaires ont accepté de recevoir des dividendes d’un montant inférieur à celui de la participation. Le sacrifice des actionnaires a été largement compensé par un climat social complètement participatif et une motivation plus grande de tous les salariés.
Mais revenons au projet de loi.
La commission des finances s’est saisie pour avis de celles des dispositions du présent projet de loi qui auraient un impact sur l’équilibre des finances publiques. Elle a le souci, et c’est son rôle, de refuser d’aggraver le déficit budgétaire par de nouvelles mesures alourdissant les dépenses sans augmenter les recettes.
Je vous exposerai les principales dispositions de ce projet de loi, qui aborde de nombreux thèmes tels que l’intéressement, la participation, les réévaluations permanentes du SMIC, et traiterai des conséquences budgétaires correspondantes.
Les principales dispositions du projet de loi concernent notamment, à l’article 1er, la mise en œuvre d’un crédit d’impôt en faveur de l’intéressement, et, à l’article 3, l’évolution du SMIC.
À ce sujet, je tiens à citer de nouveau Nicolas Sarkozy, qui, à Toulon, s’exprimait ainsi : « Je n’accepterai pas d’augmenter les charges qui pèsent sur les entreprises parce que ce serait affaiblir leur compétitivité quand, au contraire, il faudrait la renforcer. » Il a raison ! Or, en augmentant le SMIC, à dire d’experts ou autrement, et ce quel que soit l’intérêt porté aux salariés, on va exactement en sens inverse, car augmenter le SMIC, c’est augmenter aussi les charges et les coûts de production des entreprises mais sans augmenter, on l’oublie trop souvent, leurs recettes, ce qui diminue leur compétitivité.
Surtout, cette augmentation des salaires est aggravée par les charges, qui doublent pratiquement le salaire net, en grande partie parce que la sécurité sociale est financée par une taxe sur les salaires.
Ce ne sont en effet pas tant les augmentations de salaire que les charges correspondantes qui créent le problème, et c’est sous cet angle qu’il faut s’y attaquer. Si au moins on déchargeait les salaires du financement de la sécurité sociale, l’entreprise pourrait plus facilement procéder à des augmentations de rémunération, car elles lui coûteraient moins cher, et le montant de ses charges serait diminué de près de 30 %.
C’est pourquoi je demande, une fois encore, que l’on étudie sérieusement des modalités de financement de la sécurité sociale qui ne fassent plus intervenir les salaires. D’autres solutions, dont j’ai déjà évoqué les principes, existent. Rien ne serait plus grave que de ne rien faire, mais c’est, hélas ! ce que l’on fait…
Je veux aussi insister sur le fait que tout a des conséquences sur tout : l’augmentation des salaires peut avoir des conséquences graves sur l’emploi si les entreprises ne peuvent pas supporter l’augmentation des charges correspondante et perdent ainsi leur productivité.
L’article 1er institue un crédit d’impôt sur les primes d’intéressement pour inciter les chefs d’entreprise à développer l’intéressement.
C’est une idée, mais si ce texte ne se traduit pas par l’engagement de dépenses budgétaires nouvelles, l’« incitation » fiscale attachée au crédit d’impôt en faveur de l’intéressement représentera une perte de recettes pour l’État comprise, selon les évaluations actuelles, entre 800 millions d’euros et plus d’un milliard d’euros.
La commission des finances estime qu’il serait déraisonnable de mettre cette mesure en application, car elle serait susceptible d’augmenter notre déficit budgétaire et, soit dit entre nous, l’incitation fiscale des chefs d’entreprise par ce crédit d’impôt n’aura pas l’efficacité que l’on pense. En effet, ou ils croient aux effets positifs de l’intéressement, notamment sur la motivation des salariés, et ils le pratiquent, ou ils n’y croient pas et ce n’est pas un crédit d’impôt qui les poussera à le faire.
En tout état de cause, rien n’est plus grave pour notre économie que l’augmentation de notre déficit budgétaire, déjà considérable, et de notre dette. Alors que le contexte économique est fortement marqué par la crise financière internationale et que les perspectives de croissance s’amenuisent au point de devenir inexistantes, je vous appelle donc, mes chers collègues, à examiner avec la plus grande fermeté toute mesure fiscale nouvelle qui aggraverait encore notre déficit budgétaire.
C’est le cas de ce crédit d’impôt, qui, je le répète, ne peut avoir un caractère incitatif. La commission des finances a ainsi voté à l’unanimité un amendement visant à sa suppression.
Il faut aussi noter que la décision, pour un chef d’entreprise, d’appliquer un contrat d’intéressement est prise pour des raisons relatives à la motivation de son personnel, et non pas pour bénéficier d’une incitation fiscale, évidemment bienvenue mais pas décisive au regard de l’efficacité de la participation, qui, elle, concerne, l’ensemble des salariés.
En résumé, en retenant comme base de calcul de la réserve spéciale de participation la « règle des trois tiers », on motive tous les salariés, qui ne travailleront ainsi plus uniquement pour les actionnaires ou pour le « patron », mais aussi pour eux, et c’est cela qui importe dans leur motivation : ils savent qu’en travaillant plus et mieux ils travaillent aussi pour eux puisqu’ils percevront une part plus importante des bénéfices ainsi réalisés.
Quant à l’article 3, il traite du problème de l’augmentation du SMIC à dire d’experts.
Je ne suis pas contre l’augmentation du SMIC systématique, mais, comme une telle augmentation entraînera un accroissement considérable des charges de l’entreprise tant que la sécurité sociale sera financée par les salaires, j’estime qu’une telle augmentation aura des conséquences négatives sur l’emploi en France, car il ne sert à rien d’augmenter les salaires si les entreprises n’embauchent pas…
Mme Gisèle Printz. Oh !
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Enfin, le crédit d’impôt sur l’intéressement devrait être supprimé pour des raisons strictement budgétaires.
Tels sont, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, les avis émis par la commission des finances. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Annie David. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
Mme Annie David. Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, le texte que nous allons examiner aurait vocation, selon vous, à « mettre en place un cadre plus favorable à la dynamisation des revenus du travail », à moderniser le SMIC et à relancer les négociations salariales.
Cependant, il convient d’inscrire ce projet de loi dans le contexte de la crise économique et financière actuelle : le Président de la République et le Gouvernement viennent d’injecter 360 milliards d’euros dans notre économie afin, entre autres choses, de sauver les banques. (Exclamations sur certaines travées de l’UMP.)
Le Crédit agricole recevra 3 milliards d’euros ; la BNP Paribas obtient 2,55 milliards d’euros; la Société Générale, 1,7 milliard d’euros; le Crédit mutuel, 1,2 milliard d’euros; les Caisses d’Épargne, 1,10 milliard d’euros; les Banques populaires reçoivent « seulement », ai-je envie de dire, 950 millions d’euros. Soit un total de 10,5 milliards d’euros affectés à six établissements bancaires !
Selon le gouverneur de la Banque de France, cette « recapitalisation publique » n’a pas pour objet de « pallier un quelconque défaut ou une quelconque faiblesse ». Or on retrouve dans ce qui n’est ni plus ni moins qu’un plan de sauvetage deux banques – la Société Générale et les Caisses d’Épargne – dont les autorités de contrôle interne ont fait preuve de légèreté dans la gestion de leurs avoirs.
D’un côté, les banques sont sauvées, de l’autre, nos concitoyennes et concitoyens vont payer l’addition : hausse de l’inflation et des impôts, sans parler des conséquences néfastes sur l’emploi.
Le contribuable, contrairement à ce qu’affirme le Gouvernement, sera sollicité financièrement suite à ce vaste plan de pseudo-nationalisation de banques au bord de la faillite : le plan de sauvetage accroît la dette publique et ce sont bien les impôts qui combleront, en partie, cette dette.
Quant aux conséquences de cette crise sur l’emploi, elles se font déjà sentir. Adecco annonce 600 suppressions d’emploi ; Sanofi-Aventis, 900 ; La Redoute, 672 ; Renault, 4 900 ; Nexity, 150, 500 suppressions supplémentaires étant envisagées.
Mon département n’est pas épargné. Matussière et Forest, en dépôt de bilan, supprime 740 emplois,…
M. Guy Fischer. C’est scandaleux !
Mme Annie David. … dont 460 en Isère.
Tyco Electronics suppriment 520 emplois, dont 228 en Isère toujours.
Ugimag, sauvée in extremis par un repreneur et par le soutien financier de la commune de Saint-Pierre-d’Allevard, en surprime 61.
Quant à Hewlett-Packard/EDS, il annonce 580 suppressions en France. Combien sur le site isérois ?...
Demain, les 180 salariés de l’entreprise familiale Celette, à Vienne, leader mondial et seule sur le marché du marbre automobile, manifesteront devant le tribunal de commerce, à la suite de la liquidation judiciaire, pour demander au repreneur de maintenir leurs emplois...
Et comme pour faire écho à ces sinistres annonces, les déclarations de chômage technique fleurissent …
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, ce que veulent les salariés, ce n’est pas tant travailler plus que sauvegarder leurs emplois !
Dans ce contexte, la présentation de votre projet de loi, le troisième, je le rappelle, à avoir pour objectif la relance du pouvoir d’achat, après la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat d’août 2007, dite loi TEPA, et la loi pour le pouvoir d’achat de février 2008, apparaît en complet décalage avec le quotidien subi par les salariés. Sauf à reconnaître l’échec de votre politique en matière de relance du pouvoir d’achat …
À l’heure où le Gouvernement est capable de trouver 360 milliards d’euros pour un plan de sauvetage de l’économie, dont 10,5 milliards sont d’ores et déjà affectés à la recapitalisation de six banques, c’est bien l’absence d’une véritable politique salariale qui est en cause !
Ne rien prévoir en faveur d’une augmentation des salaires...
M. Guy Fischer. Et des retraites !
Mme Annie David. …relève de l’indécence.
Voilà quelques jours, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l’Assemblée nationale, saisie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, a décidé de présenter un amendement visant à supprimer la prime de transport, au motif que « le dispositif proposé ne se justifie pas ou plus, en particulier parce qu’il vaut mieux privilégier le salaire direct et que les prix du pétrole ont baissé ».
M. Guy Fischer. C’est un vrai scandale !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C’est surprenant !
M. Guy Fischer. Mais Xavier Bertrand va rétablir cela !
Mme Annie David. Je pourrais répondre : chiche !
Mais, jusqu’à présent, le Gouvernement s’est systématiquement refusé à répondre aux demandes d’augmentation des salaires, car celle-ci jouerait prétendument « contre l’emploi ». M. Serge Dassault vient de nouveau de l’affirmer.
C’est donc en intervenant sur les autres éléments de rémunération que le Gouvernement compte compenser la pression qui s’exerce sur les salaires. Monsieur le ministre, je vous rappelle que 6 millions de salariés ne bénéficient d’aucune prime et qu’un peu plus de 2 millions de salariés sont rémunérés au SMIC.
Tout d’abord, ce texte prévoit d’instituer un crédit d’impôt au bénéfice des entreprises qui se doteraient d’un accord d’intéressement.
Égal à 20 % du montant des primes d’intéressement versées, ce crédit d’impôt viendrait en déduction de l’impôt sur les bénéfices de l’entreprise. Il s’agit bien là d’une nouvelle exonération accordée aux entreprises ! Malgré vos arguments, monsieur le ministre, cela devient intolérable au regard de la situation de nos comptes sociaux et des conséquences pour nos concitoyens.
Ensuite, le projet de loi entend donner la possibilité aux salariés de choisir entre le blocage de la participation, soit une épargne sur le long terme, et la disponibilité immédiate de ces fonds, afin, nous est-il dit, d’améliorer leur pouvoir d’achat.
Cependant, il convient de mettre l’article du texte concerné en perspective avec l’article 13 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, qui semble le contredire. En effet, l’article 13 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 instaure une contribution de 2 %, dite « forfait social », à la charge des employeurs, contribution qui s’appliquera à des éléments de rémunération à la fois exclus de l’assiette des cotisations de sécurité sociale et assujettis à la contribution sociale généralisée. Il s’agit des sommes versées au titre de l’intéressement, du supplément d’intéressement et de l’intéressement de projet, de la participation et du supplément de réserve spéciale de participation, des abondements de l’employeur aux plans d’épargne d’entreprise – PEE et PERCO – et des contributions des employeurs au financement des régimes de retraite supplémentaire.
Cette logique est difficilement compréhensible, monsieur le ministre, puisqu’elle risque de ne pas inciter les employeurs à favoriser l’intéressement et la participation !
Mme Nicole Bricq. Exactement !
Mme Annie David. Ne vous méprenez toutefois pas sur la nature de mes propos : le groupe CRC n’est pas favorable à la généralisation de ces éléments de rémunération, qui sont par nature aléatoires et individualisés.
Le salaire doit être la juste rémunération de la force de travail et assurer les moyens nécessaires à l’existence de chaque salarié dans les conditions d’aujourd’hui, en dehors de tout autre élément de rémunération.
M. Guy Fischer. Très bien !
Mme Annie David. Il doit assurer une véritable garantie et reconnaissance des qualifications et des compétences du salarié.
L’intéressement et la participation affaiblissent la part des salaires dans les revenus du travail et ils sont des facteurs d’inégalités et de discriminations entre les salariés.
Or le patronat a un vieux rêve : pouvoir payer les salariés différemment les uns par rapport aux autres, et ce d’un mois sur l’autre. Voilà qui rappelle fortement le travail à la tâche, comme cela avait cours au début du XIXe siècle !
Ce projet de loi se situe dans cette logique, puisque les critères de rémunération deviennent de plus en plus individualisés. Votre volonté de généraliser les stock-options contribuera à cette individualisation, tout en légitimant ces pratiques. Vous êtes gagnant sur les deux tableaux, monsieur le ministre !
Le développement de l’intéressement et de la participation aura également pour conséquence de créer un nouveau manque à gagner pour les comptes sociaux, mais aussi pour les salariés, puisque ces rémunérations ne sont pas intégrées dans le calcul de la retraite.
Mais ces dispositions ne sont pas les seules à recueillir notre réprobation.
Malgré les modifications apportées par l'Assemblée nationale, l’article 3, qui crée un groupe d’experts chargé de se prononcer « chaque année sur l’évolution du salaire minimum de croissance et de l’ensemble des revenus » et qui avance au 1er janvier la date de réévaluation du SMIC, ne trouve pas grâce à nos yeux.
Combinées, ces deux dispositions auront pour effet de déconnecter la réévaluation du SMIC des réalités sociales de notre pays, car seuls seront pris en compte les critères économiques. C’est l’annualisation programmée du SMIC, qui n’est rien d’autre qu’une vieille revendication du MEDEF, relayée encore récemment par Mme Parisot.
Monsieur le ministre, lors de votre audition par la commission des affaires sociales, vous m’avez affirmé qu’il n’y aurait pas d’annualisation. J’aimerais que vous le confirmiez aujourd’hui.
Mme Annie David. Par ailleurs, le déroulement des carrières dans l’entreprise doit être déconnecté de la fixation du SMIC, mais aussi rapproché de la politique salariale et sociale au sein de l’entreprise.
Quant aux articles 4 et 5, qui conditionnent les exonérations de cotisations sociales à l’obligation de négociations et imposent de prendre en compte les minima de branche pour le calcul des exonérations sociales, ils ne sont pas à la hauteur des enjeux.
En effet, la sanction prévue par l’article 4 est légère – homéopathique, pourrais-je dire ! Le problème n’est pas tant l’absence de négociations que le résultat auquel elles peuvent conduire, car elles se soldent trop souvent par des constats de carence.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C’est un début !
Mme Annie David. Le dispositif prévu par l’article 5 n’aura d’impacts positifs que pour les minima sociaux, sans effet incitatif sur l’éventail des salaires.
Je ne m’attarderai pas sur les articles insérés sur l’initiative des députés, que j’évoquerai plus longuement lors de la discussion des amendements.
Mais je tiens à dire dès à présent que nous ne pouvons accepter l’extension de la participation aux chefs d’entreprise et à leurs conjoints dans les entreprises de 250 salariés, ou encore le principe de l’adhésion automatique à un PERCO, qui concurrence ainsi – pour le supplanter un jour, sans doute –notre système de retraite par répartition, fondé sur la solidarité intergénérationnelle et non sur l’épargne individuelle et les fonds de pension.
Ai-je besoin de rappeler que, de juin 2007 à juin 2008, la tempête financière a déjà réduit de 1 000 milliards de dollars – soit environ 10 % – la valeur des actifs détenus par les fonds de pension privés et publics aux États-Unis, mettant gravement en péril le niveau des retraites ?
M. Guy Fischer. Voilà la réalité !
Mme Annie David. En conclusion, ce projet de loi accentue les mécanismes d’individualisation des rémunérations mis en œuvre depuis un an par le Gouvernement, sans apporter de réponse concrète et immédiate aux attentes légitimes de nos concitoyens : hausse des salaires, des retraites et des minima sociaux. Pis, il aggrave la situation de nos comptes sociaux.
Et ce n’est pas l’amendement n° 20 rectifié du Gouvernement déposé à la dernière minute et visant à généraliser les stock-options qui changera la donne, monsieur le ministre !
Nous voterons donc contre ce projet de loi, qui sert d’alibi au Gouvernement sans pour le moins du monde corriger ni même renier ce système capitaliste auquel vous êtes farouchement attaché ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Monsieur le président, mes chers collègues, comme l’a indiqué M. Xavier Bertrand, ce projet de loi a lui aussi pour objectif l’amélioration du pouvoir d’achat des salariés. Il s’inscrit donc bien dans la droite ligne des réformes déjà engagées par le Gouvernement et que le groupe UMP a soutenues.
Ce nouveau texte s’attache non seulement à l’intéressement et à la participation, mais aussi à l’épargne salariale à travers les PEE et le PERCO. Il porte également sur les négociations salariales.
Par conséquent, ce texte doit agir comme un aiguillon sur le dialogue social auquel je suis attachée.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Très bien !
Mme Catherine Procaccia. Voilà près de cinquante ans que le général de Gaulle, convaincu qu’il pouvait exister une voie française originale pour unir le capital et le travail, instaura ces deux régimes d’épargne salariale, qui furent améliorés à plusieurs reprises. Je pense notamment à la loi pour le développement de la participation et de l’actionnariat salarié et portant diverses dispositions d’ordre économique et social, adoptée par le Sénat au mois de décembre 2006 et dont Isabelle Debré était le brillant rapporteur.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Tout à fait !
Mme Catherine Procaccia. L’épargne salariale est une épargne très dynamique. En 2006, 7 milliards d'euros au titre de la participation et 7 milliards d'euros au titre de l’intéressement – soit un total de 14 milliards d’euros – ont été versés à chaque fois à près de 5 millions de salariés.
Xavier Bertrand et Isabelle Debré ayant décrit très clairement les deux systèmes, je n’y reviendrai pas. En revanche, j’insisterai sur les objectifs de cette réforme.
En favorisant l’intéressement, il s’agit de remédier à une réelle inégalité entre les salariés. Si les deux tiers des salariés qui travaillent dans de grandes entreprises bénéficient d’un accord d’intéressement, ces accords sont quasiment absents du tissu des petites et très petites entreprises de moins de 50 salariés : alors que quatre salariés sur dix y travaillent, seuls 11 % d’entre eux en bénéficient.
L’intéressement étant facultatif, la difficulté consiste à convaincre les entreprises, notamment les PME, de s’y lancer. Pour ce faire, le texte a choisi le principe des incitations fiscales, dont le mécanisme vous a déjà été présenté.
Personnellement, monsieur le rapporteur pour avis, je ne vois pas quel autre biais aurait pu être proposé. Sans incitation fiscale, je doute que ce dispositif puisse se développer, et je ne crois pas non plus que la méthode coercitive soit possible.
C'est la raison pour laquelle je soutiendrai le texte du Gouvernement et les améliorations proposées par Mme le rapporteur. Je ne voterai donc pas l’amendement de la commission des finances, qui est un peu provocateur et ne vise pas véritablement à remettre en cause le projet de loi. Il se veut plutôt une préparation – une sorte de mise en bouche (Sourires) – à la très prochaine discussion budgétaire !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Très bien !
Mme Catherine Procaccia. J’espère que, malgré la crise économique annoncée, les PME se sentiront mobilisées.
M. Guy Fischer. La crise n’est pas annoncée, elle est présente !
Mme Catherine Procaccia. La disposition introduite par les députés, prévoyant l’extension de la participation, sous certaines conditions, au chef d’entreprise et à son conjoint, est une excellente disposition, de nature à inciter les PME à se lancer dans l’aventure.
Il faudrait cependant peut-être fixer un terme aux dispositions prévues par ce projet de loi, afin de savoir si la voie incitative a porté ses fruits. La date de 2012 pourrait être retenue, puisque le Président de la République a fixé comme objectif le doublement en quatre ans du montant de l’intéressement versé aux salariés.
Comme vous, mes chers collègues, j’ai entendu la déception des entreprises, pourtant vertueuses, qui ont déjà signé un accord d’intéressement avec leurs salariés, mais qui ne bénéficieront pas des avantages fiscaux fixés par ce texte, hormis si elles renégocient cet accord pour le rendre plus avantageux.
La justification en est simple : l’objectif de ce texte est bien d’étendre l’intéressement aux salariés qui n’en bénéficient pas encore et non pas de privilégier les autres.
Le dispositif actuel de participation prévoit déjà neuf cas de déblocage anticipé, qui prennent en compte de nombreux événements de la vie personnelle, Mme le rapporteur les a rappelés. Or le salarié peut avoir bien d’autres raisons de vouloir disposer de ces sommes immédiatement. Avec ce texte, il aura enfin une vraie liberté de choix. (M. le secrétaire d’État acquiesce.)
Perçue immédiatement, la participation sera soumise à l’impôt sur le revenu, comme l’intéressement. Sinon, elle sera bloquée pendant cinq ans et exonérée d’impôt. La participation pourra donc répondre à deux finalités complémentaires : accroissement immédiat du pouvoir d’achat ou épargne si la somme est bloquée. Elle pourra même remplir ces deux fonctions si le salarié en perçoit une partie et en bloque une autre. La participation acquiert donc la souplesse de l’intéressement, qui plaît tant aux salariés.
Un des sujets d’inquiétude était que cette nouvelle liberté pouvait mettre l’entreprise en difficulté. Mais seules les sommes attribuées au titre de la participation après la promulgation du texte pourront être versées, celles qui auront été constituées avant ne pouvant bénéficier de cette disposition. En d’autres termes, les stocks des cinq dernières années ne pourront être brutalement débloqués. Cette précision me semble importante pour rassurer les entreprises. Les salariés, quant à eux, pourront toujours invoquer les neuf possibilités de déblocage existantes.
Pour que les deux dispositions phares de ce projet de loi en faveur des revenus du travail se développent auprès des PME, qui en sont le cœur de cible, il faudra expliquer, rassurer et aider les petites entreprises. Les mesures fiscales qui sont créées pourront paraître complexes aux chefs d’entreprise, et la diffusion de l’intéressement touchera un nouveau public peu familier de l’épargne salariale.
Je me souviens que, fraîchement arrivée à la direction des ressources humaines de l’entreprise dans laquelle j’ai travaillé, j’ai passé trois semaines à comprendre, mais surtout à expliquer de façon simple, dans un document destiné aux salariés, les mécanismes de l’intéressement et de la participation !
Nous savons, monsieur le ministre, tout l’attachement que vous portez au SAV, le « service après vote » ! Il est indispensable au succès de ce texte.
Le projet de loi concerne également les salaires.
Le Président de la République s’était engagé, pendant la campagne présidentielle, à imposer aux entreprises une politique du « donnant-donnant ».
M. le secrétaire d'État l’a rappelé, si les entreprises ont l’obligation de conduire des négociations annuelles sur les salaires, toutes ne jouent pas le jeu.
Ainsi, 25 % d’entre elles omettent de tenir compte de cette obligation légale. D’ailleurs, elles n’en respectent pas bien d’autres, en toute impunité. Citons l’établissement du rapport sur les salaires entre hommes et femmes auquel vous êtes, je le sais, très attaché, monsieur le ministre.
Le projet de loi prévoit que les entreprises de plus de 50 salariés, qui, en 2009, se déroberont à l’obligation annuelle d’ouvrir une négociation sur les salaires devront rembourser 10 % des allégements de charges reçus en 2008.
Je salue cette disposition car, comme le disait M. le secrétaire d'État, ouvrir des négociations est tout de même à la portée de tous. Aboutir à un accord, comme le faisait remarquer Mme le rapporteur, c’est autre chose. Mais l’ouverture de négociations conduit les parties à se parler, voire à se comprendre. C’est le premier niveau du dialogue social !
Se pose aussi la question délicate des sept branches dans lesquelles les minima sont actuellement en dessous du SMIC. Ce texte les incite à négocier sous deux ans, sinon, à partir de 2010, les allégements de charges seront diminués à proportion de l’écart entre le SMIC et les minima salariaux de la branche. À cet égard, 200 000 salariés sont concernés, soit un nombre important !
Le dispositif peut paraître sévère, puisque toutes les entreprises d’une même branche sont susceptibles de voir leurs allégements de cotisations sociales réduits du seul fait de leur appartenance à cette branche.
C’est pourquoi j’apprécie l’esprit de l’amendement présenté par Mme le rapporteur, au nom de la commission des affaires sociales, même si je considère qu’il peut être amélioré par le biais d’un autre amendement tendant à conditionner l’entrée en vigueur du dispositif à l’absence d’une nette amélioration d’ici à deux ans du nombre de branches qui n’ont pas remis leurs minima à niveau.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Je suis tout à fait d’accord !
Mme Catherine Procaccia. J’en viens à la question de la fixation du SMIC.
Un paradoxe subsiste. Le SMIC a certes régulièrement progressé ces dernières années, mais la rémunération des salariés a, quant à elle, stagné. L’évolution de la rémunération plancher ne se répercute pas sur la grille salariale, ce qui est particulièrement préjudiciable pour ceux dont la rémunération se situe en bas de l’échelle.
Le constat d’une insuffisante expertise économique préalable à la fixation du SMIC a été fait à plusieurs reprises, et dernièrement, cette année même, par le Conseil d’orientation pour l’emploi.
Le projet de loi examiné et modifié par l’Assemblée nationale prévoit qu’un groupe d’experts fera chaque année des propositions publiques de revalorisation du SMIC, propositions qui obligeront un gouvernement qui ne suivrait pas cet avis à s’en expliquer.
Je souhaite seulement que ce collège d’experts ne comprenne pas seulement des économistes, car l’approche de ces derniers risque d’être trop convergente. Or c’est de la diversité des approches que naîtra la richesse !
Enfin, le texte prévoit que la revalorisation du SMIC se fera, à partir de 2010, au 1er janvier. Connaissant bien le fonctionnement des entreprises, je pense que cette disposition de bon sens favorisera une négociation collective salariale plus efficace, quelles que soient les branches. Madame le rapporteur, comme vous pouvez le constater, sur ce point, je suis beaucoup moins réservée que vous.
Enfin, je veux indiquer d’ores et déjà que l’amendement gouvernemental tendant à encadrer l’attribution de stock-options aux dirigeants me satisfait totalement.
Mme Catherine Procaccia. Subordonner une telle attribution à l’existence d’un accord d’intéressement ou de participation ou son extension à tous les salariés me paraît être une mesure d’équilibre et de justice sociale.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
Mme Catherine Procaccia. J’espère, pour ma part, que les deux amendements que j’ai déposés rencontreront le même soutien que celui que j’apporte à ce texte. Il ne s’agit pas, je le précise, de politique du donnant- donnant.
Le premier de ces amendements concerne les agents généraux d’assurance. Il avait été adopté au cours de l’examen du projet de loi de finances pour 2006 puis « retoqué » lors de l’adoption par le Sénat de nouvelles dispositions. Le second, très pragmatique, est relatif au versement de la participation au titre de 2008
Je tiens, pour conclure, à saluer la qualité du travail de Mme le rapporteur et de M. le rapporteur pour avis, dont les amendements, s’ils sont adoptés, permettront d’enrichir le projet de loi.
Mieux associer les salariés à la marche des entreprises en permettant le partage des richesses est un facteur important de cohésion sociale, notamment dans une conjoncture économique difficile. Aussi le groupe UMP approuve-t-il cette réforme. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, cette réforme de l’épargne salariale et de la politique salariale traduit un esprit d’équité et un nouvel équilibre dans les rapports sociaux internes à l’entreprise. Le projet de loi que nous soumet le Gouvernement élargit les possibilités de participation des salariés aux performances de l’entreprise en prenant en compte les difficultés de la situation actuelle et en offrant une souplesse jouant sur l’incitation plutôt que sur la contrainte.
M. Aymeri de Montesquiou. Un chiffre résume l’ampleur du chantier auquel s’attelle ce texte : aujourd'hui, 5 millions de Français sont couverts par un accord d’intéressement. Ce chiffre peut paraître important, mais il ne représente qu’un tiers des salariés. L’accès à l’intéressement demeure tributaire de la taille des entreprises : moins de 10 % des salariés des entreprises comptant entre 10 et 49 salariés bénéficient de l’intéressement, contre 20 % dans les entreprises employant de 50 à 99 salariés et près de 70 % dans les entreprises de plus de 1 000 salariés. Il existe donc une inégalité, voire une véritable iniquité liée à la taille de l’entreprise.
Afin d’inciter les entreprises à conclure des accords d’intéressement, l’article 1er institue un crédit d’impôt égal à 20 % des sommes versées à ce titre pendant six ans. C’est une bonne décision.
Deux mesures nouvelles complètent ce dispositif. D’une part, le bénéfice de ce crédit d’impôt est étendu aux entreprises qui modifieraient, par voie d’avenant, l’accord d’intéressement en cours pour accroître les sommes versées aux salariés. D’autre part, les entreprises qui concluraient un accord d’intéressement ou un avenant à un tel accord pourront accorder à leurs salariés, avant le 30 septembre 2009, une prime d’un montant maximal de 1 500 euros exonérée de cotisations de sécurité sociale, conformément à toute distribution effectuée au titre de l’intéressement.
Un second chiffre mérite d’être rappelé : chaque année, plus de 7 milliards d’euros sont distribués aux salariés au titre de la participation, soit un versement moyen de 1 300 euros par salarié suivi d’une période de blocage pendant cinq ans.
L’article 2 a pour objet de mettre fin au principe de la non-disponibilité de la participation pendant cette période bloquée. Il prévoit d’offrir aux salariés le choix de percevoir immédiatement les sommes versées à ce titre, en acquittant l’impôt sur le revenu, ou de les bloquer pendant cinq ans pour profiter d’une exonération fiscale. Les modalités de versement de la participation sont ainsi alignées sur celles de l’intéressement.
Avec ce nouveau dispositif plus clair, les salariés pourront choisir de mobiliser ces sommes soit pour consommer, soit pour investir. Ils disposent donc de la liberté de choix qui caractérise ces dispositions nouvelles.
Ces deux réformes ont une ambition commune, à savoir répondre à la préoccupation partagée par tous nos concitoyens quant au pouvoir d’achat, et nous permettent d’améliorer ce dernier.
À ceux qui pourraient s’interroger sur le nombre et sur la diversité des mesures prises, je rétorque que l’on ne peut refuser aucune piste ; tous les leviers doivent être utilisés pour répondre au défi lancé à notre pays, à notre économie, à nos entreprises et à nos salariés, pour relancer la progression du pouvoir d’achat, pour conforter nos entreprises, source d’emploi la plus importante. Votre texte y concourt, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État.
De plus, je veux rappeler que le Gouvernement a engagé une action très volontaire en proposant, depuis le début de la législature, trois textes ayant des applications en matière de pouvoir d’achat. Les mesures contenues dans le présent projet de loi marquent une nouvelle étape de cette politique en faveur du pouvoir d’achat. Il est d’autant plus impératif pour notre économie de faciliter le dialogue social dans nos entreprises à un moment particulièrement critique sur le plan national et international. Nous devons encourager les plus petites d’entre elles à proposer la mise en place de l’épargne salariale à l’occasion de la conclusion des accords d’intéressement.
L’annonce de ce projet de loi a suscité quelques craintes et interrogations parmi les chefs d’entreprise ou les gestionnaires de l’épargne salariale. Nombre d’entre eux sont circonspects à l’égard des changements de législation et de l’alourdissement de la réglementation en matière d’épargne salariale. Je suis absolument convaincu que ces mesures incitatives les rassureront.
Les organisations syndicales ont manifesté des réserves ; décrivant l’intéressement et la participation comme des « substituts aléatoires aux salaires », elles considèrent que les mesures en cause ne permettront pas d’améliorer le pouvoir d’achat. À mon sens, les salariés leur donneront tort, car ils considèrent comme juste d’être eux aussi concernés lorsque l’entreprise réalise de bons résultats.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Bien sûr !
M. Aymeri de Montesquiou. Ce n’est pas en multipliant les contraintes que l’on développera l’intéressement, la participation et l’épargne salariale : il faut que la mise en place de ces systèmes dans les entreprises suscite l’intérêt des salariés.
Le mécanisme du crédit d’impôt relatif à l’augmentation de l’intéressement va injecter un supplément de revenus du travail et de pouvoir d’achat dans notre économie. Il représente, certes, une dépense fiscale nouvelle, mais, inversement, il va mécaniquement apporter des recettes fiscales supplémentaires, et ce à plusieurs titres. Les salariés paient sur l’intéressement disponible l’impôt sur le revenu, la CSG et la CRDS ; les entreprises paieront désormais le forfait social de 2 % que nous examinerons dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ces nouvelles recettes vont quasiment équilibrer le coût de ce crédit d’impôt.
Dans le contexte économique actuel, nous devons soutenir les entreprises qui feront des efforts pour accroître l’intéressement. Ce crédit d’impôt les y incitera toutes, et plus particulièrement les PME. Il ne remet nullement en cause le caractère aléatoire de l’intéressement. Il nécessite la mise en place ou la renégociation des accords d’intéressement, dans un dialogue social renouvelé. Il traduit un état d’esprit. Il permettra d’augmenter le nombre de salariés bénéficiaires de l’intéressement.
Si nous ne mettons pas en place ce crédit d’impôt, les salariés seront pénalisés.
Non seulement la dégradation économique n’enlève rien à la pertinence de ce crédit d’impôt, mais elle en renforce la nécessité en donnant une marge de manœuvre supplémentaire aux entreprises et aux salariés. Nous devons donc l’adopter.
Je veux à nouveau souligner la logique du libre choix des salariés quant à l’usage de la participation. Aujourd’hui, lorsque l’entreprise distribue de la participation, cette dernière représente en moyenne 19 % du bénéfice. Des différences importantes doivent cependant être notées selon les secteurs. Il ne semble pas raisonnable de vouloir transformer la formule légale actuelle en faisant distribuer par les entreprises le tiers de leur bénéfice fiscal ; cela risquerait, en période de trésorerie très tendue, de les affaiblir. Surtout, nous ne devons ni alourdir les charges des entreprises dans le contexte actuel ni déterminer de manière rigide dans la loi la répartition des résultats, au détriment des salaires ou de l’investissement.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. Aymeri de Montesquiou. Sur ces deux points, je souhaite le rétablissement du texte du Gouvernement, qui traduit une ambition à la fois juste et réaliste.
Soyons convaincus de la nécessité d’une modernisation des dispositifs d’épargne salariale au profit d’une plus grande cohérence et d’une plus grande lisibilité, tant pour les salariés que pour les dirigeants d’entreprise. Je partage aussi le souci du chef de l’État de répondre sans retard aux inquiétudes des Français sur le pouvoir d’achat : j’estime, à ce propos, que le présent projet de loi, qui favorise la mobilisation de l’intéressement et de la participation, y contribuera de façon décisive.
C’est pourquoi, avec nombre de mes collègues du RDSE, j’invite la Haute Assemblée à soutenir les propositions novatrices de votre texte, monsieur le ministre. Elles vont, je le répète, dans le sens d’une plus grande équité et d’une plus grande solidarité à l’intérieur de l’entreprise.
Ayant été profondément marqué par le rugby, j’estime que ce texte favorisera au sein de l’entreprise le sentiment concret d’appartenir à une équipe. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l’avantage des formules toutes faites, c’est qu’elles marquent durablement les esprits crédules. En l’espèce, « travailler plus pour gagner plus » constitue un exemple de choix, une perle rare ! (Marques d’ironie au banc des commissions.)
Nous ne démontrerons pas une énième fois en quoi ce sophisme révèle une vision obtuse, qui vénère le quantitatif au détriment du qualitatif.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Et vous, pour mieux vous comprendre, il faut réfléchir plus…
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Or l’inconvénient des slogans et des promesses de campagne, qui sont souvent des formules simplistes, c’est que la réalité est toujours un peu plus compliquée.
La phrase : « Je serai le président du pouvoir d’achat » nous permet d’en faire l’expérience cruelle, et pas seulement pour le Président de la République, malheureusement.
Monsieur le ministre, ce projet de loi est le quatrième texte en un an à afficher sans vergogne une volonté de revaloriser le pouvoir d’achat, après la loi TEPA, c'est-à-dire la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, le projet de loi pour le pouvoir d’achat – rien de moins ! –, qui prévoyait le rachat des RTT, enfin le projet de loi portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail, soit quatre textes en moins d’un an !
À trois reprises, la majorité a prétendu améliorer la situation de millions de Français et réussi surtout à provoquer la réticence des employeurs, à rendre visibles des heures supplémentaires préexistantes et à grever les finances publiques, sans créer d’emplois !
À ce jour, seule une entreprise sur cinq propose le rachat des jours de RTT, et bien peu de salariés le demandent.
Or, comme les enquêtes d’opinion le montrent unanimement, les salariés, notamment les cadres, sont attachés à leurs RTT, d'ailleurs bien utiles dans ces moments de crise aux entreprises, qui s’en servent pour amortir leurs difficultés croissantes liées à la baisse de leurs carnets de commandes.
De même, le déblocage de la participation était censé, en 2008, atteindre 12 milliards d’euros, ces sommes devant se diriger préférentiellement vers la consommation. Or il n’en a rien été.
Il est vrai qu’il n’est pas simple de prôner la constitution d’une épargne dite « de longue durée » en vue de la retraite par capitalisation et, dans le même temps, de multiplier les mesures de déblocage afin d’inciter les salariés à soutenir la consommation en dépensant immédiatement ces mêmes sommes !
Trois textes en un an... Quel aveu de l’inefficience de vos mesures ! Et pour être bien sûrs qu’ils ne fonctionnent pas, vous en ajoutez encore un. Nous voilà donc à quatre textes !
Le Parlement s’apprête à examiner le présent projet de loi pour savoir ce que vous nous avez concocté, au beau milieu d’une crise systémique qui révèle à quel point les rémunérations annexes ont pu entraîner des dérives et creuser le fossé entre, d’une part, les plus riches, munis de parachutes dorés et de boucliers fiscaux, et d’autre part, ceux dont il faudra bien améliorer véritablement le pouvoir d’achat avant que tout n’explose !
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, que contient donc ce projet de loi ? Cinq articles seulement, c’est vite vu...
Le premier instaure un crédit d’impôt au profit des entreprises concluant un accord d’intéressement et prévoyant le versement d’une prime exceptionnelle.
Cette disposition coûtera aux finances publiques la bagatelle de 377 millions d’euros en 2010, de 783 millions d'euros en 2011 et de plus de 1 200 millions d’euros en 2012 ! Croyez-vous que le moment soit bien choisi pour adopter une telle mesure ?
Mme Nicole Bricq. Non !
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. La réforme de l’épargne salariale portée par l’article 2 rencontre l’hostilité des milieux économiques, et nous les comprenons tant ils éprouvent aujourd’hui des difficultés à accéder au crédit bancaire pour consolider leur trésorerie ou investir.
L’article 3 du projet de loi a pour objet de modifier la procédure de fixation du SMIC, au moment même où nous examinons dans l’urgence la mise en place du RSA…
Cet éparpillement des moyens est tout simplement illisible et incompréhensible. Il n’incite à croire ni à une simplification des procédures ni à une réelle volonté du Gouvernement de se doter d’un outil susceptible de réduire la pauvreté.
En effet, la publication de récents critères laisse à penser que la remise en cause de la vocation initiale du SMIC est bien en cours. Mes chers collègues, je vous renvoie au rapport qu’a réalisé sur ce thème, pour le Gouvernement, le Conseil d’analyse économique.
Parce qu’il est toujours bon, notamment eu égard à l’esprit et à la lettre de la LOLF, d’équilibrer financièrement une nouvelle mesure, vous proposez aux articles 4 et 5 du projet de loi d’ouvrir des négociations salariales dans les entreprises. Mais il s’agit là, d’ores et déjà, d’une obligation !
De surcroît, les chefs d’entreprise n’auront qu’à entamer une négociation pour bénéficier des exonérations, sans avoir à se soucier de déboucher sur des accords d’entreprise, qui sont eux-mêmes très difficiles à encadrer et que l’on peut d’ores et déjà soupçonner de se conclure au détriment des salariés.
Dans le même esprit, sans doute dicté une fois de plus par le MEDEF, vous proposez de remettre à 2011 l’alignement des minima de branche sur le SMIC. Mais avez-vous réellement pris la mesure des événements récents et de la situation dans laquelle se trouve la majeure partie de nos concitoyens ?
En effet, monsieur le ministre, que devient le million et demi de travailleurs pauvres qui, par essence, n’est pas concerné par la première mesure ? Je veux parler des allocataires du RSA, bien sûr, mais aussi des étudiants, des retraités, des fonctionnaires d’État, de la fonction publique territoriale et hospitalière, ou encore des personnes handicapées et des demandeurs d’emploi !
Cette mesure semble intrinsèquement inégalitaire, à moins que, dans votre conception, le pouvoir d’achat ne concerne que les salariés du secteur privé. Cette dernière explication est envisageable, après tout, dans une philosophie qui remet en cause le salaire en tant qu’élément structurant du pouvoir d’achat au profit d’autres rémunérations beaucoup plus aléatoires. Le gouvernement auquel vous appartenez n’en est pas à une contradiction près !
D’ailleurs, il va de soi que le revenu différé – la seconde mesure que vous proposez – se trouve parfaitement adapté à une revalorisation immédiate du pouvoir d’achat ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
La création d’un comité d’observation du RMI, dont vous vous passez bien dans l’urgence de la mise en place presque simultanée du RSA, est d’une logique implacable !
Monsieur le ministre, le Gouvernement prétend aujourd'hui moraliser le capitalisme, mais il réussit surtout à démoraliser les ménages et les Français, qui n’ont pas beaucoup progressé depuis que M. Raffarin évoquait la « France d’en bas ». Ils auraient même plutôt encore régressé !
Assurément, le Gouvernement n’a pas réalisé les promesses de campagne du Président de la République, à savoir augmenter le pouvoir d’achat des Français, loin s’en faut ! Depuis le temps que vous vous y efforcez, vous n’y parvenez guère, monsieur le ministre. Soyons sérieux !
En ce qui concerne la moralité, n’en déplaise au MEDEF, occupons-nous de légiférer afin d’encadrer la rémunération et le statut des grands patrons. Voilà du concret !
S'agissant du pouvoir d’achat des Français et de la réhabilitation de la valeur travail, contentons-nous de revaloriser les salaires. C’est tellement plus simple, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, et tellement plus efficace ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la baisse du pouvoir d’achat des ménages constitue aujourd’hui une réalité que nul ne peut nier.
Les enquêtes le prouvent, l’INSEE prévoit que le salaire moyen en 2008 stagnera dans le secteur privé et baissera de 0,9 % dans les administrations publiques. La masse salariale se trouve donc globalement sur une pente descendante, tandis que l’inflation augmente.
Cette réalité, nous la percevons quotidiennement dans nos permanences, où nous recevons des personnes en détresse sociale qui ont perdu leur emploi, des familles monoparentales qui peinent à se loger, des femmes cantonnées aux contrats de travail à temps partiel, des ménages qui peinent à finir le mois, et cela malgré deux salaires mensuels, des retraités qui vivent de plus en plus difficilement... La baisse du pouvoir d’achat frappe toutes les couches de la population.
Jusqu’à présent, le Gouvernement n’a apporté que de mauvaises réponses à ce problème. Il y eut, tout d’abord, le « paquet fiscal » ou loi TEPA de l’été 2007, qui fut un scandaleux festival de cadeaux, du bouclier fiscal à la mise en cause de l’ISF. Ce dernier objectif a d'ailleurs été atteint pour une infime minorité de très gros contribuables, dont certains reçoivent du Trésor public des chèques de remboursement d’un montant faramineux.
Or ce bouclier fiscal est de plus en plus mal vécu aujourd’hui, en période de crise, par la population. Comme il inclut également la CSG, la CRDS et, depuis peu, le RSA, les plus hauts revenus se trouvent exonérés de tout effort de solidarité nationale.
Nous ne cesserons de dénoncer cette injustice, ou plutôt ce scandale, comme nous l’avons fait déjà lors de la discussion sur le RSA.
Par ailleurs, la loi du 8 février 2008 pour le pouvoir d’achat visait le rachat de leurs RTT par les salariés.
Or, selon l’URSSAF, seule une entreprise sur cinq propose un tel rachat. Surtout, bien peu de salariés l’ont demandé, ce qui prouve, si besoin en était, qu’ils sont très attachés à leurs RTT.
Cette même loi du 8 février 2008 prévoyait également le versement d’une prime exceptionnelle de 1 000 euros dans les PME, ainsi qu’un déblocage de la participation. Dans l’un et l’autre cas, le bilan est mitigé.
Selon vos prévisions, 12 milliards d’euros devaient être débloqués, mais en réalité ce montant est plus proche de 4 milliards d’euros.
Par ailleurs, en décembre 2007, le Gouvernement a fait adopter par le Parlement une loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs. Ce texte devait faire baisser les prix, mais force est de constater qu’il n’en a rien été.
Enfin, en juillet dernier, ce fut la loi de modernisation de l’économie, qui devait libérer toutes les énergies. Elle avait pour objectif d’apporter 0,3 % de croissance de plus et de créer 50 000 emplois par an. On sait aujourd’hui ce qu’il en est : ces objectifs ne seront pas atteints !
En fait, les Français dans leur grande majorité n’ont absolument pas perçu les efforts du Gouvernement pour améliorer leur pouvoir d’achat. En revanche, ils ont subi la hausse des matières premières, des denrées alimentaires, de l’essence, du gaz…
Ils ont aussi pâti – notamment les plus pauvres d’entre eux, qui hésitent aujourd’hui à se soigner – des prélèvements déguisés du Gouvernement, à savoir les déremboursements et les franchises médicales.
La diminution du pouvoir d’achat doit absolument être combattue, car notre pays se trouve sur une mauvaise pente. Avec le recul du PIB aux deuxième et troisième trimestres de 2008, avec 43 200 chômeurs supplémentaires en août dernier, nous sommes entrés en récession.
La crise financière a déjà eu des répercussions sur l’économie, dans des secteurs clés comme l’immobilier, l’automobile et le bâtiment. Elle en aura d’autres dans les prochains mois.
Que fait le Gouvernement ? En septembre dernier, il a convoqué le Parlement en session extraordinaire. On eût été tenté de croire que c’était pour organiser un Grenelle du pouvoir d’achat… Or tel n’était pas le cas : le Gouvernement a seulement apporté une mauvaise réponse de plus à travers ce projet de loi alors soumis à l’Assemblée nationale.
Ce texte a de quoi décevoir toutes celles et tous ceux qui attendaient une réponse à leurs difficultés quotidiennes.
Tout d’abord, il est profondément inégalitaire. Je le répète, alors que la baisse du pouvoir d’achat concerne toutes les catégories de la population, ce texte exclut les retraités, les étudiants, les fonctionnaires, les bénéficiaires des pensions d’invalidité, les adultes handicapés, les chômeurs et les salariés des entreprises dont la nature, la taille, les résultats ou l’absence de volonté rendent inopérants les dispositifs d’intéressement.
Ensuite, ce projet de loi remet totalement en cause la notion de salaire qui, jusqu’à présent, constituait le pilier principal du revenu des ménages.
Avec votre texte, monsieur le ministre, ce revenu sera constitué en partie seulement du salaire, le reste provenant des heures supplémentaires, de l’intéressement, de la participation ou encore de l’épargne salariale.
Les mesures que vous proposez – crédits d’impôts, exonérations de cotisations sociales et autres niches fiscales – auront pour seule conséquence d’inciter les entreprises à ne pas augmenter les salaires et à privilégier toutes les formes annexes de rémunération.
Comment dès lors garantir un revenu décent ? Quelles seront les conséquences de ces dispositions sur les retraites ? Les revenus annexes que vous encouragez seront-ils pris en compte dans le calcul des pensions ?
Par ailleurs, nous avons toutes les raisons de nous interroger sur l’incidence de ce texte sur le budget national. On nous répète depuis plusieurs mois que « les caisses sont vides », le Premier ministre ayant même évoqué un « État en faillite ».
Or, en dépit de ces déclarations, le Gouvernement a souhaité procéder à une nouvelle dépense fiscale d’un milliard d’euros.
Aussi la commission des finances s’est-elle inquiétée de cette nouvelle charge. Elle a supprimé à l’unanimité le nouveau crédit d’impôt en faveur de l’intéressement.
Enfin, monsieur le ministre, ce texte nous paraît présenter certains risques pour le SMIC, dont la progression est actuellement fondée sur l’inflation et le pouvoir d’achat.
En avançant au 1er janvier de chaque année la fixation annuelle du SMIC, on se dirige vers un lissage annuel depuis longtemps revendiqué par le MEDEF. Nous n’y sommes pas favorables.
De plus, ce texte vise à confier à un groupe d’experts un avis annuel sur l’évolution du SMIC et de l’ensemble des revenus. Un décret devra fixer les conditions de leur désignation afin de garantir leur indépendance. Il y a de quoi se poser des questions sur les intentions réelles du Gouvernement, d’autant que, selon certains experts, le SMIC serait trop élevé par rapport à la productivité des salariés peu qualifiés…
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Il y a de tout chez les experts !
Mme Gisèle Printz. … et que, dans son rapport du 23 juillet 2008, le Conseil d’analyse économique émet de vives critiques sur l’efficacité du SMIC et propose de modifier les règles actuelles : « une commission d’experts pourrait être créée, les membres en étant nommés dans des conditions garantissant leur indépendance ».
Pour conclure, posons-nous la question : ce texte répond-il aux attentes des Français ?
Mme Nicole Bricq. Non !
Mme Gisèle Printz. Va-t-il augmenter leur pouvoir d’achat ?
Mme Nicole Bricq. Non !
Mme Gisèle Printz. Non, nous ne le croyons pas. Ce texte est inégalitaire et dangereux à la fois pour les salariés, les entreprises et le budget de l’État. Il tend à substituer au salaire des formes annexes de rémunération, incertaines parce qu’indexées sur les résultats des entreprises, et à créer les conditions de la remise en cause du SMIC.
Monsieur le ministre, pour améliorer le pouvoir d’achat, c’est sur le salaire qu’il faut faire porter vos efforts et non pas sur les compléments de revenus. Ce texte est une mauvaise réponse gouvernementale supplémentaire à une vraie question de société. Le groupe socialiste ne le votera pas. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, c’est à la fin du mois de mai dernier, à Verberie, dans l’Oise, que le chef de l’État a donné « sa » réponse au pouvoir d’achat : il a annoncé un projet de loi sur l’intéressement – les sommes versées aux salariés seraient doublées – et sur la participation, avec la fin du blocage automatique des sommes consignées.
Avec l’intéressement, chacun y trouve son compte, a affirmé Nicolas Sarkozy : l’entreprise dont la performance et les résultats s’améliorent ; les salariés qui voient leur travail récompensé et sont directement associés à la bonne marche des affaires.
Le Gouvernement s’est donc mis dans les pas du Président de la République en déposant, le 23 juillet dernier, le projet de loi dont nous débattons aujourd’hui.
Cependant, entre-temps, il y a eu l’accumulation des mauvais chiffres affectant entreprises et ménages, et la panique financière des mois de septembre et d’octobre.
Le chef de l’État, dans son discours prononcé à Annecy, la semaine dernière, ne déclarait-il pas – et cette citation revêt toute son importance dans le contexte actuel – : « Je tenais à affirmer que plus rien, dans l’économie mondiale, ne sera comme avant. Vouloir continuer avec les mêmes idées, les mêmes habitudes, les mêmes pratiques qu’auparavant serait une erreur fatale » ?
Pourtant, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, vous continuez « avec les mêmes idées, les mêmes habitudes, les mêmes pratiques qu’auparavant », comme si, malgré la crise économique, les entreprises allaient pratiquer intéressement et participation, comme si elles n’avaient pas particulièrement besoin, en cette période difficile, de fonds propres, quand leur accès au crédit est compromis. Pour vous, tout continue comme avant !
Ce projet de loi ne permettra d’améliorer ni la consommation, ni le pouvoir d’achat, ni la situation des entreprises, ni les finances publiques.
La commission des finances s’est saisie pour avis du texte ; elle a bien fait de s’intéresser tout particulièrement aux articles 1er et 2.
L’article 1er vise à créer, en effet, un crédit d’impôt supplémentaire au profit des entreprises qui concluent un accord d’intéressement ; l’article 2 tend à prévoir le déblocage de la participation des flux à venir.
C’est à l’unanimité – vous l’avez souligné tout à l’heure, monsieur le rapporteur pour avis – que la commission des finances a adopté la suppression de ce crédit d’impôt. Je veux résumer ici les quelques arguments des commissaires socialistes à cet égard.
Tout d’abord, ce texte, comme bien d’autres, comme trop d’autres, tend à consacrer une mauvaise habitude du Gouvernement, celle de démanteler la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale.
Ensuite, est-il utile de rappeler que le maintien en l’état du projet de loi de finances pour 2009 laisse sans réponse la question du soutien à l’économie, alors que la récession est annoncée et qu’elle se traduira à la fois par un « désinvestissement » des entreprises et une remontée du chômage ?
Ce crédit s’imputera donc sur les recettes de l’État. Si l’objectif du Gouvernement de doubler l’intéressement sur quatre ans était atteint, il se traduirait, en régime de croisière, par un coût d’un milliard d’euros pour les finances de l’État. Je suppose que M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, doit souhaiter, en son for intérieur, que cela ne marche pas.
Cette estimation n’a cependant pas fait l’objet d’études d’impact – voilà une autre mauvaise habitude du Gouvernement ! – et serait le résultat d’un sondage effectué par un cabinet privé auprès d’un panel d’entreprises. Cette fantaisie est-elle de mise dans la période particulièrement critique que nous traversons ?
Ce crédit d’impôt est toutefois limité à 2014, année à laquelle il devrait être évalué. La date est lointaine et l’on ignore quelle sera la méthode.
La mise en œuvre de la réforme constitutionnelle ouvre le champ de l’évaluation au Parlement. J’espère que le Sénat, particulièrement la commission des finances, dont je suis membre, profitera pleinement de cette opportunité.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. La commission des affaires sociales aussi !
Mme Nicole Bricq. Par ailleurs – et c’est vraiment une raison de fond –, une réduction d’impôt qui serait payée par une augmentation du déficit public n’aurait aucun effet sur la production, la consommation ou l’investissement.
Ce sont là trois facteurs décisifs qui, dans le contexte macroéconomique dépressif actuel, plaident en faveur de la suppression du crédit d’impôt.
Les ménages l’avaient déjà compris, avant même la prise en compte – tardive, d’ailleurs ! – de la crise par le Gouvernement : la consommation flanche depuis le début de l’année et le taux d’épargne est remonté à 16 % du revenu disponible des ménages, soit plus de deux points qu’à la même période en 2006.
Cela signifie que les ménages ont anticipé le signal d’une augmentation des prélèvements obligatoires, et ce par une épargne de précaution quand ils le peuvent. La ruée vers le livret A, depuis l’été dernier, atteste de la remontée de cette épargne.
Enfin, concernant les prélèvements obligatoires, dont nous débattrons ici même dans quelques jours avant d’entamer la discussion du projet de loi de finances pour 2009, le Gouvernement, par ce texte, envoie un message contradictoire, puisqu’il instaure une incitation fiscale en même temps qu’un « forfait » social. Comprenne qui pourra !
Tous ces arguments motivent notre refus persistant de ce crédit d’impôt, auquel, monsieur le ministre, vous avez rappelé que vous teniez tant.
Je dirai un mot du versement de la prime exceptionnelle de 1 500 euros. La loi du 8 février 2008 prévoyait déjà le versement d’une prime de 1 000 euros par salarié. Cette récente mesure n’est même pas évaluée que l’on nous propose un nouveau dispositif !
Nous n’avons pas plus d’évaluation des déblocages anticipés prévus à la suite des mesures de 2004 et de 2005 !
Tout cela manque de sérieux, et le Parlement ne peut s’en satisfaire, sous peine d’être taxé de complaisance à l’égard d’un exécutif qui fait loi sur loi sans se soucier de leurs conséquences ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Pourtant, dès l’automne 2005, nos collègues députés MM. François Cornut-Gentille et Jacques Godfrain remettaient au Premier ministre d’alors un rapport dans lequel ils s’alarmaient de « la multiplication des textes ».
Je conclurai en déplorant que, dans ce projet de loi, le Gouvernement évite la question de fond du partage de la valeur ajoutée entre rémunération du capital et rémunération du travail.
Le constat est simple, malheureusement : il vaut mieux être actionnaire que salarié.
Mme Annie David. C’est sûr !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Pas en ce moment ! Il vaut mieux ne pas être actionnaire !
Mme Nicole Bricq. À l’intérieur de la part revenant au capital, une part croissante de l’excédent d’exploitation a servi à financer le versement des dividendes aux actionnaires, qui, de ce fait, se sont enrichis bien plus que les salariés. Le niveau des dividendes excède largement les capacités de profit des entreprises.
M. Guy Fischer. Soit 120 % !
Mme Nicole Bricq. Celles-ci ont distribué si largement aux actionnaires qu’elles ont été amenées, ce qui est un comble, à emprunter pour satisfaire des actionnaires insatiables…
M. Guy Fischer. Incroyable !
Mme Nicole Bricq. … au détriment des investissements pourtant si nécessaires à la compétitivité, que le Gouvernement prétend favoriser par ailleurs.
M. Guy Fischer. Incroyable mais vrai !
Mme Nicole Bricq. Nous avons voté l’amendement de M. le rapporteur pour avis, qui vise à répartir les bénéfices des entreprises entre actionnaires, investissement et salariés sous forme de participation. Il ne répond pas à la question essentielle des salaires directs,…
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Voilà !
Mme Nicole Bricq. … mais au moins se soucie-t-il de la place des salariés parties prenantes de la création de richesses.
Enfin, le Gouvernement a récemment déposé un amendement n° 20 rectifié tendant à poser des conditions à l’attribution de stock-options ou d’actions gratuites.
C’est une réponse très insuffisante aux dégâts considérables causés chez nos concitoyens par l’écart qui ne cesse de se creuser entre, d’une part, les salariés et, d’autre part, la petite classe de privilégiés que le Gouvernement protège par ailleurs – bouclier et niches fiscales confondus – et dont la fortune n’a cessé ainsi de s’accroître.
C’est pourquoi nous avons déposé un sous-amendement à cet amendement gouvernemental, qui tend à conditionner la distribution à un accord relatif aux salaires dans les deux ans.
Nous étions allés plus loin en déposant des amendements au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, amendements que M. François Marc avait défendus et qui ont été repoussés. Le groupe socialiste fera encore mieux avec sa proposition de loi sur la régulation financière qui sera discutée ici le 4 novembre prochain. Rendez-vous est pris ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. Madame le rapporteur, je vous remercie du soutien que vous apportez à ce texte, en particulier s’agissant de l’encouragement à l’intéressement.
Je vous rassure, le forfait social ne vient pas contredire notre volonté de développer l’intéressement. Nous aurons l’occasion de revenir sue ce point au cours des débats. Le sujet était à l’étude depuis bien longtemps. L’intéressement aurait même pu, à en croire un certain nombre de ses promoteurs, se situer à des niveaux beaucoup plus élevés. En tout état de cause, il n’y a aucun risque qu’il vienne se substituer aux salaires.
Monsieur le rapporteur pour avis, il est évident que nous voulons tous les deux développer l’intéressement. Nous ne manquerons pas d’en reparler en détail lors de l’examen de l’article 1er et des amendements que vous avez déposés.
Le Gouvernement a choisi la voie de l’incitation : la situation économique actuelle montre qu’il a tout intérêt à inciter les entreprises plutôt qu’à les contraindre.
Par ailleurs, modifier les règles applicables en matière de calcul de la participation ne permettra pas aux entreprises de se développer. Il est en effet évident, compte tenu des circonstances, que les obliger à verser 33 % de leurs bénéfices risque de mettre un certain nombre d’entre elles en difficulté. Tel n’est pas l’enjeu du dispositif.
J’ai pris note de vos propos sur le crédit d’impôt et l’intéressement. Sur ce point également, nous aurons l’occasion de revenir en détail. Ce dispositif du crédit d’impôt aura, c’est vrai, un coût, mais il se révélera être un investissement en matière d’intéressement, car il entraînera des recettes supplémentaires, fiscales et sociales.
Madame David, il n’y aura pas d’annualisation du SMIC. Elle n’est prévue dans aucun texte, même en filigrane, même de façon subliminale. Le mode de fixation du SMIC restera inchangé.
Je vous remercie, madame Procaccia, des propos que vous avez tenus. Vous avez raison de relever que le Gouvernement entend mettre en place une forte incitation et de souligner à quel point il est nécessaire de faire preuve de pédagogie dans les entreprises. Je sais que votre expérience est grande en la matière.
Monsieur de Montesquiou, vous avez souligné que, selon la taille des entreprises, les salariés ne sont pas égaux face à l’intéressement. C’est à cette inégalité que le Gouvernement veut remédier. Vous l’avez dit, tous les moyens d’incitation doivent être utilisés. Le Gouvernement entend les mettre en œuvre, persuadé, comme vous, que la contrainte ne permettra pas de développer l’intéressement.
Madame Jarraud-Vergnolle, plusieurs lois ont, depuis 2007, permis d’améliorer les revenus des salariés. Chacune a produit des résultats. Sur ce point également, nous aurons l’occasion de revenir au cours du débat.
Je vous ai écoutée avec grande attention. Vous avez critiqué un projet de loi dont l’objet est de faire en sorte que toutes les ressources dont dispose le législateur soient mobilisées en faveur du pouvoir d’achat des salariés. Mais vous n’avez pas proposé beaucoup de mesures ou de politiques alternatives à celle du Gouvernement ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Nicole Bricq. Vous n’avez pas bien écouté !
M. François Marc. Vous n’écoutez pas !
M. Xavier Bertrand, ministre. J’ai entendu beaucoup de belles paroles, mais le Gouvernement, quant à lui, par le présent projet de loi, s’inscrit dans le monde du réel, et fait preuve de volonté et de pragmatisme.
Madame Bricq, je ne peux pas vous laisser dire non plus que la loi du 8 février 2008 n’a pas été évaluée : 4 milliards d’euros ont été débloqués pour son application, et, s’agissant de la prime prévue, les déclarations annuelles des données sociales, les fameuses DADS, qui seront disponibles au début de l’année 2009, permettront de connaître précisément le montant des versements.
Madame Printz, vous avez évoqué les risques de substitution au salaire. Il est explicitement prévu dans le projet de loi que l’intéressement est un élément supplémentaire ; qui plus est, la négociation le garantit. Les salariés le savent bien, qui plébiscitent l’intéressement, comme j’ai eu l’occasion de m’en rendre compte dernièrement avec vous en Moselle.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Ma réponse concernera les articles 4 et 5.
Je remercie d’abord Mme le rapporteur de son intervention. Je sais que le sujet de l’intérim lui tient à cœur. Lors de nos débats, nous ferons le point sur la situation des entreprises d’intérim : nous tâcherons de faire en sorte qu’elles ne soient pas pénalisées et que soit évalué leur comportement, et non pas celui des entreprises pour lesquelles elles travaillent.
S’agissant des accords d’entreprise et des accords de branche, permettez-moi à ce stade du débat – nous y reviendrons ultérieurement – de préciser qu’aucun principe n’a été fixé dans la loi du 20 août 2008 quant à un niveau : celui de l’entreprise n’est pas plus privilégié que celui de la branche.
En revanche, vous soulevez une vraie question abordée également par Mme Procaccia : comment trouver un juste équilibre entre les avancées au niveau de la branche et les avancées au niveau des entreprises ? Sur ce point, l’amendement de la commission permettra, me semble-t-il, d’enrichir le texte sous réserve de trouver un équilibre entre les différentes propositions formulées par les uns et les autres.
Je remercie M. le rapporteur pour avis de son intervention. Il a attiré notre attention sur le fait que le dispositif ne doit pas être déconnecté des réalités économiques, et il a exprimé son souci de la bonne gestion des deniers publics. Nous aurons sans doute un débat sur les allégements de charges et leur évaluation afin de répondre à vos souhaits et à vos remarques sur ce sujet, monsieur Dassault.
Madame David, je vous remercie de votre intervention. Vous avez demandé si les dispositions des articles 4 et 5 devaient figurer dans ce projet de loi. Nous pensons – je sais que nous divergeons sur ce point – que cela permet de marquer clairement que l’intéressement et la participation sont non pas des substituts au salaire mais des compléments de ce dernier. Voilà pourquoi le projet de loi prévoit également des dispositifs qui ne concernent que la question des salaires ; mais nous avons déjà eu ce débat dans le cadre des travaux de la commission.
Pour le reste, vous avez souligné malgré tout le fait que les articles 4 et 5 allaient dans la bonne direction, mais qu’ils étaient insuffisants. J’entends bien vos arguments. Néanmoins, si nous prenons l’exemple des minima de branche, la disposition prévue nous permet de transposer les dispositions adoptées jusque-là au coup par coup, telles les mesures prises par Michel Rocard ou celles qui avaient été proposées par Gérard Larcher encore dernièrement, et de les systématiser pour essayer de porter durablement les minima sociaux de branches au niveau du SMIC. Et, disant cela, je réponds également à Mme Printz.
Madame Jarraud-Vergnolle, madame Bricq, nous pensons que ce texte permet de répondre à la situation des salariés qui gagnent de 1 300 à 1 500 euros par mois et qui ont le sentiment que les politiques salariales et les efforts réalisés jusqu’à maintenant n’ont pas vraiment pris en compte leur situation, notamment dans les TPE et les PME, où les mesures prises par Xavier Bertrand ont tout de même apporté des améliorations.
Enfin, je remercie Mme Procaccia et M. de Montesquiou qui sont tous deux de fins connaisseurs des réalités économiques, y compris dans les PME, et qui ont souligné l’injustice de notre système. Le fait que le dispositif prévu repose sur la chance donnée à la négociation, assortie d’une pression claire pour obtenir des résultats devrait nous permettre d’aboutir.
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…
La discussion générale est close.
Organisation des débats
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Avant d’aborder la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable, la commission demande la priorité de l’article 1er et, au sein de ce dernier, la disjonction de l’examen des trois amendements identiques nos 21, 35 et 73, tendant à la suppression de l’article.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?
M. le président. La priorité est de droit.
La commission souhaite également disjoindre de la discussion commune les amendements nos 21, 35 et 73 tendant à la suppression de l’article 1er.
Il n’y a pas d’opposition ?...
Il en est ainsi décidé.
Question préalable
M. le président. Je suis saisi, par Mmes Le Texier, Jarraud-Vergnolle, Printz, Bricq, Alquier, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, d'une motion n°32.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l'article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, en faveur des revenus du travail (n° 502, 2007-2008).
Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d’opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à Mme Raymonde Le Texier, auteur de la motion.
Mme Raymonde Le Texier. Le projet de loi que vous nous présentez aujourd'hui, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, constitue le cinquième texte consacré au pouvoir d’achat depuis juillet 2007 : rien de moins.
Par ordre d’entrée en scène, nous avons eu le paquet fiscal, dit loi TEPA, avec ses désormais célèbres 15 milliards d’euros partiellement engloutis dans les baisses d’impôts pour les plus riches...
Ensuite, en décembre 2007, nous avons eu la loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs. Ces dispositions n’ont pas un an et, pourtant, tout le monde les a déjà oubliées. L’objectif de ce texte était de faire baisser les prix grâce à la « sacro-sainte » concurrence. L’inflation atteignant maintenant 3,5 % et le salaire moyen dans le secteur privé étant en stagnation, ce n’est pas cette année que l’on vous remettra la médaille du mérite !
Mme Raymonde Le Texier. Puis ce fut le tour de la loi pour le pouvoir d’achat avec le rachat des RTT. Vous nous direz sans doute que le bilan est mitigé, que ce n’est certainement pas un échec. Tel n’est pas l’avis de l’URSSAF. En effet, selon cette dernière, seule une entreprise sur cinq propose le rachat des jours de RTT et peu de salariés l’ont demandé, comme cela a déjà été dit au cours du débat. La raison de cet échec est simple et était d’autant plus prévisible que toutes les enquêtes d’opinion le montraient : les salariés, notamment les cadres et les agents de maîtrise, sont très attachés à leurs RTT.
Enfin, plus récemment, a été adoptée la loi de modernisation de l’économie, dont les experts de Bercy continuent de tenter de percer les mystères, de comprendre l’intérêt et le contenu !
J’arrête là le bilan et, bien sûr, je salue l’activisme effréné de ce gouvernement sur un problème aussi essentiel que le pouvoir d’achat.
Mme Raymonde Le Texier. Toutefois, vous conviendrez qu’on peut s’interroger sur cette frénésie. Une loi, je veux bien. Deux, c’était sans doute nécessaire. Trois, c’est pour parfaire l’effort. Mais enfin, cinq lois en à peine seize mois !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C’est beaucoup !
Mme Raymonde Le Texier. Serait-ce parce que ni la première, ni la deuxième, ni aucune de ces mesures n’a été pertinente ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. La conjoncture change !
Mme Raymonde Le Texier. Aucune de ces mesures ne se serait révélée efficace et à la hauteur des enjeux ? Aucune de ces mesures n’aurait amélioré la vie des Français ? Assurément !
Aussi, la loi des séries étant ce qu’elle est, il n’est pas étonnant que vous nous ressortiez ce vieux ballon de baudruche de l’intéressement et de la participation.
Mme Raymonde Le Texier. Si ma mémoire est bonne, la dernière fois date d’octobre 2006.
Héritage de cette vertueuse tradition des gaullistes chrétiens, le principe est élémentaire : libérer les dividendes de l’entreprise en les redistribuant avec parcimonie aux salariés. Ceux-ci, en raison de leurs faibles revenus, dépensent actuellement plus qu’ils n’épargnent. Ils ne manqueront pas de réintroduire cet argent dans l’économie en consommant à tout va. Ainsi, tout ira pour le mieux dans le meilleur des mondes.
Tout ira pour le mieux dans le meilleur des mondes sauf qu’il ne faut quand même pas trop en attendre : votre dernière expérience en matière de participation tablait sur la libération de 12 milliards d’euros. À ce jour, nous atteignons difficilement les 4 milliards d’euros : un gain trois fois inférieur aux prévisions, et pourtant vous souhaitez renouveler l’expérience !
Le raisonnement est un peu simpliste, son impact réel complètement surestimé, mais admettons.
Cependant, pour que votre projet marche, cela suppose qu’il y ait des dividendes à partager et, pour cela, il faut de la croissance. Or, en ce moment, ça coince !
Après que le Président de la République a tenté d’aller « chercher la croissance avec les dents »,…
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Oui !
Mme Raymonde Le Texier. … après de multiples annonces toujours surévaluées et continuellement revues à la baisse, votre collègue Mme Lagarde a fini par avouer contrainte et forcée que la croissance sera quasi nulle cette année : au mieux 0,9 %, et sans doute moins encore l’année prochaine.
Pour les deux derniers trimestres de 2008, l’INSEE prévoit même une croissance négative. J’ai beau ne pas être économiste, je sais que deux trimestres d’affilée avec une croissance négative, c’est-à-dire deux trimestres où nous ne produisons pas de richesses mais où nous en perdons, cela s’appelle une récession. Les ministres ont reçu la consigne de pas prononcer le mot, mais cela ne change rien, nous sommes bien en « récession », et vous préparez une politique reposant sur de la croissance !
Dans le même temps, une étude parue la semaine dernière nous apprend le profond malaise des industriels dont le moral est au plus bas depuis un long moment parce que, disent-ils, « les carnets de commandes sont anormalement vides ».
En résumé, pas d’argent public pour un plan de relance – à ne pas confondre avec un plan de renflouement des banques sans contrepartie –, pas de croissance mais la récession, pas de commandes dans les entreprises, donc pas de bénéfices en perspective.
Tous les éléments dont votre projet de loi a irrémédiablement besoin pour réussir un tant soit peu font défaut !
Vous misez sur des choses qui n’existent pas, sur des fantasmes. En psychiatrie, le diagnostic serait clair : « déni de réalité ». Plus communément, on appelle cela « n’en faire qu’à sa tête » ou être « irresponsable ».
Vous allez nous dire que c’est la faute de la crise. Mais la crise n’est pas mère de tous les maux, y compris de ceux qui préexistaient de longue date.
Peut-être serez-vous tentés par une nouvelle campagne de publicité destinée à faire croire aux Français que, malgré toutes les difficultés qu’ils affrontent dans leur vie quotidienne, les mesures prises par ce gouvernement vont dans le bon sens. Je vous le dis : la baisse du pouvoir d’achat, ce n’est pas un problème de communication ou de mesures mal expliquées. La baisse du pouvoir d’achat, ce n’est pas seulement dans la tête des Français !
Heureusement, la vigie de l’INSEE et les services statistiques des ministères sont là pour confirmer à nos concitoyens qu’ils ne sont pas fous, qu’ils ne rêvent pas et qu’il est effectivement de plus en plus difficile de boucler les fins de mois !
L’enquête du ministère de l’emploi sur l’activité de la main-d’œuvre, publiée le 27 août dernier, indique que le salaire mensuel de base a augmenté de 2,7 % sur un an. Néanmoins, avec une inflation de 3,2 %, cela représente une perte de pouvoir d’achat de 0,5 %. De même, l’INSEE annonce une baisse de pouvoir d’achat de 0,4 % sur un an. Devant ces chiffres, il n’y a pas trente-six conclusions : Nicolas Sarkozy est bien le président de la baisse du pouvoir d’achat !
Alors même que votre projet de loi repose sur un postulat irréaliste et n’a aucune chance de marcher, il pose en outre deux problèmes de fond : la remise en cause du salaire comme premier et principal revenu du travail et la brèche ouverte dans le SMIC.
Comment ne pas voir dans ce projet de loi une tentative pour substituer le salaire, revenu fixe, encadré et déterminé, sur lequel s’assoit l’organisation de notre société, par un type de revenu totalement variable et imprévisible.
Pour notre part, nous ne souhaitons pas voir les revenus du travail des Français soumis aux aléas des performances et des contre-performances des entreprises et, pis, aux aléas des placements financiers.
Si l’on suit ce que vous entendez développer, quelle sera demain la part des salaires dans les revenus du travail ? N’y a-t-il donc aucune leçon à tirer de la crise actuelle ?
De plus, au-delà du fait que votre système favorise, une fois de plus, les hauts revenus, que deviendra le million et demi de travailleurs pauvres qui, par essence, n’est pas concerné par cette mesure ?
Dans cette même logique et malgré un contexte d’explosion de la précarité et une hausse du chômage sans précédent depuis plus de vingt ans, vous entendez redéfinir la fixation du SMIC.
Chantre du « pragmatisme » tous azimuts, qu’il pleuve, qu’il vente, qu’il neige ou même que ce ne soit pas du tout la question, M. le ministre a parlé de « dépolitiser » la fixation du SMIC. (M. le ministre s’exclame.) Comme si le caractère politique du SMIC était une tare.
Je me vois dans l’obligation de rappeler ici que la création du SMIC fut, et demeure, un progrès social, et constitue donc une avancée politique. C’est précisément parce que le SMIC est le fruit de la volonté politique visant à garantir que même les plus modestes ne seront pas payés au-dessous d’un minimum décent qu’il est une protection pour des millions de personnes. À gauche, nous le savons bien, car nous avons de la mémoire : le SMIC, c’est politique !
La création d’un « groupe d’experts » à l’indépendance garantie par un décret en Conseil d’État – nous voilà rassurés ! – entend non seulement miner l’importance de la Commission nationale de la négociation collective, mais également imposer de nouveaux critères pour la fixation du SMIC. Évidemment, me direz-vous, il n’y a là aucun caractère politique ! Évolution de la productivité, partage de la valeur ajoutée, compétitivité des entreprises, évolution des salaires minima dans les pays comparables, ou encore structures des salaires ne sont que quelques-uns de ces nouveaux critères. Mais tous ont un point commun : ils sont étrangers à la nécessité de couvrir les besoins essentiels et de constituer la base de la rémunération du travail.
Si une mesure comme la fixation du SMIC au 1er janvier et non plus au 1er juillet est, paraît-il, anodine, pourquoi est-elle alors réclamée depuis des années par le MEDEF ? Ce dernier vous a d’ailleurs probablement soufflé l’idée de repousser à 2011 l’alignement des minima de branche sur le SMIC. Mais cette proposition est sans doute, là encore, anodine !
Décidément, c’est à croire que vous ne l’aimez pas ce salaire minimum ! En lieu en place d’une « pseudo- dépolitisation » du SMIC, c’est bien la première étape de sa reprise en main, de sa mise au pas et, potentiellement, de sa disparition que vous enclenchez ici !
Monsieur le ministre, vous attendiez-vous vraiment à ce que nous ne fassions pas le lien entre la remise en cause du salaire comme seul revenu du travail, la « pseudo-dépolitisation » du SMIC et toutes les autres mesures que vous avez fait adopter ces derniers mois, telles que, entre autres, l’instauration des périodes d’essai allant jusqu’à huit mois, la création de nouveaux CDD, comme le contrat de mission, ou encore, l’obligation pour les chômeurs d’accepter rapidement des emplois sous-payés …
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ils ne sont pas sous-payés !
Mme Raymonde Le Texier. … et sans aucun rapport avec leurs compétences ou leurs souhaits ? À cela s’ajoute le RSA, le revenu de solidarité active, dont nous avons débattu la semaine dernière, par le biais duquel l’État se substitue aux entreprises pour payer les salaires.
L’ensemble de ces mesures rendent les travailleurs, et plus encore les personnes à la recherche d’un emploi, corvéables à merci. Elles visent toutes, y compris celles que nous examinons aujourd'hui, à tirer les salaires toujours plus vers le bas, car elles se fondent sur le mythe selon lequel le niveau des salaires serait la cause de tous les déboires.
L’idée que la main-d’œuvre est la seule variable d’ajustement a beau être contredite par la réalité et avoir été usée jusqu’à la corde par l’ultralibéralisme depuis plus d’un siècle, vous continuez à organiser toute votre politique autour d’elle. Continuez ainsi, nous continuerons à nous y opposer !
Incisif comme vous l’êtes, vous ne manquerez pas de répéter, pour vous en convaincre, que nous ne faisons que nous opposer ! En réponse à notre collègue Annie Jarraud-Vergnolle, vous avez indiqué tout à l'heure que nous ne proposons rien. Pourtant, vous savez que c’est faux !
Voilà quelques mois, vous avez refusé de débattre d’une proposition de loi déposée par le groupe socialiste et qui visait à relancer le pouvoir d’achat en rendant le chèque-transport obligatoire – celui-là même que la majorité de l’Assemblée nationale a tenté de passer à la trappe la semaine dernière ! –, en taxant les énormes bénéfices des entreprises pétrolières et en ouvrant une conférence nationale sur les salaires. Et si cela ne vous suffit pas, monsieur le ministre, voici d’autres idées encore pour relancer la machine : supprimer les franchises médicales profondément injustes et pénalisantes pour les petits revenus, abandonner une partie des 30 milliards d’euros d’exonérations de cotisations sociales accordées sans contrepartie en matière d’emploi, revoir votre position sur la TIPP flottante, augmenter les taxes sur les stock-options, et ne pas faire semblant de vouloir toucher aux niches fiscales, alors que vous ne cessez d’en créer de nouvelles…
Les membres du groupe socialiste étant « bonne pâte », ils vous offrent toutes ces idées, monsieur le ministre ! Prenez-les, car les Français en ont besoin. Mais, par bonté, faites disparaître votre projet de loi dans les oubliettes de votre ministère, et passons aux choses sérieuses ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. La commission des affaires sociales est évidemment défavorable à la motion tendant à opposer la question préalable.
Comme je l’ai indiqué au cours de la discussion générale, le projet de loi joue sur plusieurs leviers complémentaires pour dynamiser le pouvoir d’achat des ménages : intéressement et participation, d’une part, politique salariale, d’autre part.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement souhaite que la motion tendant à opposer la question préalable soit repoussée.
M. le président. Je mets aux voix la motion n° 32, tendant à opposer la question préalable.
Je rappelle que l'adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi.
(La motion n'est pas adoptée.)
Mme Nicole Bricq. Vous n’êtes pas raisonnables, mes chers collègues !
M. le président. En conséquence, nous passons à la discussion des articles.
Mes chers collègues, je rappelle que le Sénat a décidé d’examiner par priorité l’article 1er, et, au sein de ce dernier, de disjoindre de la discussion commune les trois amendements identiques de suppression.
Article 1er (priorité)
I. - Après l'article 244 quater S du code général des impôts, il est inséré un article 244 quater T ainsi rédigé :
« Art. 244 quater T. - I. - Les entreprises imposées d'après leur bénéfice réel ou exonérées en application des articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 septies, 44 octies, 44 octies A, 44 decies, 44 undecies et 44 duodecies, et ayant conclu un accord d'intéressement en application du titre Ier du livre III de la troisième partie du code du travail peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des primes d'intéressement dues en application de cet accord.
« II. - Ce crédit d'impôt est égal à 20 % :
« a) De la différence entre les primes d'intéressement mentionnées au I dues au titre de l'exercice et la moyenne des primes dues au titre de l'accord précédent ;
« b) Ou des primes d'intéressement mentionnées au I dues au titre de l'exercice lorsque aucun accord d'intéressement n'était en vigueur au titre des quatre exercices précédant celui de la première application de l'accord en cours.
« III. - Les primes mentionnées au I ne peuvent entrer à la fois dans la base de calcul du crédit d'impôt et dans celle d'un autre crédit d'impôt.
« IV. - En cas de fusion, apports ou opérations assimilées réalisés pendant la durée d'application de l'accord en cours ou de l'accord précédent, ou au cours de l'un des trois exercices séparant l'accord en cours du précédent, la moyenne des primes mentionnées au a du II dues par la société absorbante ou bénéficiaire des apports et par la société apporteuse est égale au montant moyen des primes dues à chaque salarié au titre de l'accord précédent multiplié par le nombre total de salariés constaté à l'issue de ces opérations.
« V. - Un décret fixe les conditions d'application du présent article, notamment les obligations déclaratives. »
II. - Après l'article 199 ter Q du même code, il est inséré un article 199 ter R ainsi rédigé :
« Art. 199 ter R. - Le crédit d'impôt défini à l'article 244 quater T est imputé sur l'impôt sur le revenu dû par le contribuable au titre de l'année ou de la période de douze mois au cours de laquelle les primes d'intéressement sont dues. Si le montant du crédit d'impôt excède le montant de l'impôt dû au titre de ladite année, l'excédent est restitué. »
III. - Après l'article 220 X du même code, il est inséré un article 220 Y ainsi rédigé :
« Art. 220 Y. - Le crédit d'impôt défini à l'article 244 quater T est imputé sur l'impôt sur les sociétés de l'exercice au titre duquel les primes d'intéressement sont dues. Si le montant du crédit d'impôt excède le montant de l'impôt dû au titre dudit exercice, l'excédent est restitué. »
IV. - Le 1 de l'article 223 O du même code est complété par un x ainsi rédigé :
« x) Des crédits d'impôt dégagés par chaque société du groupe en application de l'article 244 quater T ; l'article 220 Y s'applique à la somme de ces crédits d'impôt. »
V. - Les I à IV s'appliquent au crédit d'impôt calculé au titre des primes d'intéressement dues en application d'un accord d'intéressement ou d'un avenant à un accord d'intéressement en cours à la date de publication de la présente loi, conclus à compter de la date de publication de la présente loi et au plus tard le 31 décembre 2014. Pour le calcul du crédit d'impôt en cas d'avenant à un accord en cours à la date de publication de la présente loi, l'accord précédent s'entend de la période couverte par l'accord en cours jusqu'à la date d'effet de l'avenant.
VI. - Dans les entreprises ayant conclu un accord d'intéressement, ou un avenant à un accord en cours, à compter de la publication de la présente loi et au plus tard le 30 juin 2009, et applicable dès cette même année, l'employeur peut verser à l'ensemble de ses salariés une prime exceptionnelle.
Cette prime est répartie uniformément entre les salariés ou selon des modalités de même nature que celles prévues par cet accord ou cet avenant. Son montant est plafonné, après répartition, à 1 500 € par salarié. Elle est prise en compte pour l'application de l'article L. 3314-8 du code du travail.
Cette prime ne peut se substituer à des augmentations de rémunération et à des primes conventionnelles prévues par l'accord salarial ou par le contrat de travail. Elle ne peut se substituer à aucun des éléments de rémunération au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale et de l'article L. 741-10 du code rural versés par l'employeur ou qui deviennent obligatoires en vertu de règles légales ou contractuelles.
Cette prime est exonérée de toutes cotisations et contributions d'origine légale ou conventionnelle rendue obligatoire par la loi, à l'exception des contributions définies aux articles L. 136-2 du code de la sécurité sociale et 14 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale.
Dans le cas où un salarié qui a adhéré à un plan d'épargne salariale au sens du titre III du livre III de la troisième partie du code du travail affecte à la réalisation de ce plan tout ou partie des sommes qui lui sont versées au titre de cette prime exceptionnelle, ces sommes sont exonérées d'impôt sur le revenu, dans les conditions prévues par l'article L. 3332-27 du même code.
Le versement de la prime doit intervenir le 30 septembre 2009 au plus tard.
VII. - La prime exceptionnelle prévue au VI est ajoutée à la base de calcul du crédit d'impôt prévu à l'article 244 quater T du code général des impôts relatif à l'exercice au titre duquel elle est versée.
VIII. - L'évaluation du dispositif créé par les I à VII est organisée par le Parlement dans les conditions définies aux articles 24, 47-2 et 48 de la Constitution, avant le 30 juin 2014.
IX. - Le Gouvernement présente au Parlement, avant le 30 juin de chaque année, un rapport portant sur l'application du présent article et son impact sur la diffusion de l'intéressement dans les petites et moyennes entreprises.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 21 est présenté par M. Dassault, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° 35 est présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 73 est présenté par Mmes David, Pasquet et Hoarau, MM. Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° 21.
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Monsieur le ministre, je ne suis contre rien a priori ! Simplement, je mesure les conséquences des décisions qui sont prises.
Actuellement, l’un des problèmes principaux de la France est son déficit budgétaire, qui ne cesse de s’accroître avec les nouvelles mesures d’allégement de charges que le Gouvernement multiplie. Or je ne vois aucune décision susceptible de réduire ce déficit.
La commission des finances, gardienne du budget, sera toujours opposée à toutes les mesures, quelles qu’elles soient et quel que soit leur intérêt, visant à aggraver encore notre déficit budgétaire et nos charges. Celui-ci s’élève déjà, en 2008, à plus de 50 milliards d’euros ! Vous prenez des mesures de nature à entretenir l’activité économique et à enrayer la crise financière – on ne sait d’où proviennent les fonds accordés dernièrement aux banques… –, qui vont creuser plus encore le déficit ! À combien s’élèvera-t-il en 2009 ?
Vous souhaitez, monsieur le ministre, accorder un crédit d’impôt pour favoriser l’intéressement. Je ne suis pas contre l’intéressement, au contraire ! Mais, en l’occurrence, on ne sait pas de quoi l’on parle dans ce texte, parce que l’intéressement n’y est pas défini. L’intéressement, c’est la possibilité donnée au chef d’entreprise d’intéresser son personnel à un problème précis, à un service ou à une activité, mais pas à l’ensemble de l’entreprise. Les chefs d’entreprise ont peu recours à cette mesure, qui est facultative. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le général de Gaulle, après avoir créé l’intéressement en 1959, a décidé d’instaurer la participation, qui revêt, elle, un caractère obligatoire.
Vous affirmez, monsieur le ministre, que ce crédit d’impôt va encourager les chefs d’entreprise. Peut-être, peut-être pas… Pourquoi risquer d’aggraver encore le déficit en prenant une mesure incitative, dont on ne mesure pas les conséquences ?
Un chef d’entreprise qui a compris l’intérêt de motiver son personnel n’a pas besoin d’incitations fiscales pour mettre en place l’intéressement.
Mme Nicole Bricq. Bien sûr !
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Si une incitation fiscale existe, il en profitera bien sûr, mais ce n’est pas pour cette raison qu’il mettra en place l’intéressement dans son entreprise. Ne croyez donc pas que tous les chefs d’entreprise vont se précipiter sur l’intéressement !
De plus, je le répète, on ne sait pas de quoi l’on parle. S’agit-il d’un intéressement à l’économie, à l’activité, au chiffre d’affaires, au bénéfice ? On peut faire de l’intéressement à n’importe quoi !
Contrairement à la participation, dont les principes sont clairs – l’entreprise partage ses éventuels bénéfices à égalité entre les salariés et les actionnaires –, l’intéressement est laissé à la libre discrétion du chef d’entreprise, qui, je le répète, l’utilise assez peu.
Le déficit budgétaire est vraiment la première préoccupation des membres de la commission des finances. On ne peut pas continuer à accroître le déficit budgétaire en offrant des cadeaux, en accordant des allégements de charges, même si cela fait plaisir et contribuera peut-être à augmenter le pouvoir d’achat. En effet, il n’appartient pas à l’État de payer les charges et les salaires au sein de l’économie privée ! C’est aux acteurs de cette dernière de le faire en fonction de leurs possibilités et de leurs besoins.
On entend dire qu’il faut augmenter les salaires. Peut-être, mais une fois que ces derniers sont augmentés, ils le sont tout le temps ! Et si, à un certain moment, l’entreprise a moins de recettes et plus de dépenses, notamment des dépenses de personnel, elle ne pourra survivre et courra à la faillite, au licenciement et, donc, au chômage.
Il faut donc permettre à l’entreprise de faire ce qu’elle peut en fonction de ses contraintes. Tout l’intérêt de la participation, c’est que le partage du bénéfice ne grève pas à long terme l’économie.
Monsieur le ministre, en l’absence de M. le président de la commission des finances, je ne puis prendre à mon compte le retrait de cet amendement, adopté à l’unanimité des commissaires, opposition et majorité confondues. Je le voterai donc avec les membres aujourd'hui présents de la commission des finances.
M. François Marc. Très bien !
Mme Nicole Bricq. Merci, monsieur le rapporteur pour avis ! Vous êtes fidèle à l’esprit de nos travaux !
M. le président. La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle, pour présenter l'amendement n° 35.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Notre amendement rejoint celui de M. le rapporteur pour avis de la commission des finances, M. Serge Dassault. Nous voulons supprimer l’article 1er de ce projet de loi pour les mêmes raisons budgétaires, mais aussi pour d’autres raisons.
Le fait d’envoyer par cette simple mesure, dès 2009, plusieurs centaines de millions d’euros par-dessus les moulins est absolument hors de saison, et la commission des finances, avec raison, a été unanime sur ce point.
Comme je l’ai indiqué tout à l'heure dans le cadre de la discussion générale, le dispositif prévu pour l’intéressement devrait coûter 377 millions d’euros en 2010, 783 millions en 2011 et plus de 1 200 millions d’euros en 2012.
Quant à la prime exceptionnelle d’intéressement, elle engendrerait, de votre propre aveu, monsieur le ministre, un coût de 139 millions d’euros en 2009, pour une moyenne de 750 euros par salarié.
Ce crédit d’impôt à hauteur de 20 % est bien cher payé pour permettre aux employeurs de faire passer des primes jusqu’alors stables en intéressement aléatoire.
De plus, les exonérations ne seront pas compensées, ce qui accentuera encore le déficit de la sécurité sociale, et ce à cause d’une manipulation budgétaire et d’un cadeau octroyé aux employeurs.
Par ailleurs, avec l’article 1er, vous poursuivez, monsieur le ministre, la lente dérive des salaires vers ce que vous appelez les revenus du travail, des revenus d’origines diverses parcellisés et aléatoires, à la discrétion de l’employeur, des revenus qui maintiennent les salariés dans une insécurité et une soumission constantes. Les employeurs en tirent deux avantages : distribuer ou non l’intéressement et contourner le dialogue social.
Nous n’en voulons pour preuve que l’amendement adopté par l’Assemblée nationale et prévoyant que les accords d’intéressement peuvent être renouvelés par tacite reconduction.
Sous l’alibi du pouvoir d’achat, voilà une belle manipulation, qui va bien au-delà d’un projet de loi que certains croient anodin.
Encore une fois, il ne s’agit donc que de diminuer subrepticement l’imposition des entreprises, en accentuant le caractère aléatoire de la rémunération du travail. Et c’est le contribuable qui doit de nouveau assurer le financement de la mesure !
M. Guy Fischer. Et voilà !
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Nous rejoignons donc M. le rapporteur pour avis dans son opposition à cet article totalement inopportun et dont le fondement politique est profondément nuisible à la politique salariale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 73.
Mme Annie David. L’article 1er a pour vocation de modifier le dispositif existant en matière d’intéressement.
Si l’on en croit le Gouvernement, le principe de l’intéressement aurait fait ses preuves. Dès lors, pourquoi les Français ont-ils le sentiment, justifié, que leur pouvoir d’achat n’augmente pas ? Selon un indice définitif de la direction de l’animation, de la recherche et des études statistiques, la DARES, le salaire mensuel de base a accusé une perte de pouvoir d’achat de 0,4 point au deuxième trimestre 2008, comme au premier trimestre.
Depuis 2006, le Gouvernement multiplie les lois afin, prétendument, d’augmenter le pouvoir d’achat, de relancer l’économie, de booster la croissance et la consommation des ménages. Durant la campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy avait même promis qu’il demanderait « aux entreprises de faire un effort sur les salaires, car l’État fait lui-même un effort sur les allégements de charges ».
Or l’article 1er du projet de loi prévoit bien de nouveaux allégements de charges en direction des entreprises, mais – et ce n’est pas vraiment étonnant ! – l’effort demandé aux entreprises sur les salaires n’apparaît pas comme une contrepartie de ces allégements.
Il est proposé en effet qu’un crédit d’impôt, égal à 20 % des sommes versées, soit accordé aux entreprises concluant un accord d’intéressement.
Autrement dit, la voie choisie par le Gouvernement pour augmenter le pouvoir d’achat passe, une nouvelle fois, par une incitation fiscale, au profit des entreprises, mais au détriment des comptes sociaux et des déficits publics.
Sur ce sujet, je suis en accord avec les propos de M. le rapporteur pour avis.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je le dirai à M. Roland Muzeau ! (Sourires.)
Mme Annie David. Le rapporteur pour avis de ce texte à l’Assemblée nationale, M. Louis Giscard d’Estaing, s’inquiète lui aussi du coût de cette mesure pour les finances publiques. II l’explique en ces termes : « L’impact d’un tel dispositif sur les finances publiques n’est pas négligeable. Sur la base d’un doublement des sommes versées au titre de l’intéressement en quatre ans, le Gouvernement estime à un milliard d’euros par année le coût, en régime de croisière, de cette mesure incitative. »
Les caisses de l’État étant vides – mais on trouve 360 milliards d’euros pour les banques ! – le chef de l’État, par cette nouvelle incitation en faveur de l’intéressement, renvoie les salariés qui voudraient accroître leur pouvoir d’achat vers leurs entreprises. Mais, d’une part, ce n’est pas en créant un nouveau crédit d’impôt que les caisses de l’État vont se remplir à nouveau et, d’autre part, les salariés se rendent bien compte que l’intéressement ne remplace pas une augmentation de leur salaire.
Les entreprises, qui bénéficieront une nouvelle fois d’exonérations fiscales en contrepartie de l’extension de l’intéressement et de la prime exceptionnelle de 1 500 euros, auront tout intérêt à privilégier ces modes de rémunération, sans avoir à augmenter les salaires ou même à les aligner sur les prix.
Cependant, ce choix ne sera pas sans conséquences sur les salariés : il risque fort de renforcer les inégalités et les disparités selon la taille de l’entreprise et la nature de l’activité, sans compter bien évidemment les conséquences sur les retraites et les régimes d’assurance maladie.
Vous l’aurez compris, comme nos collègues socialistes et M. le rapporteur pour avis, nous vous demandons, mes chers collègues, de voter pour la suppression de l’article 1er. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Je ne vous cacherai pas, mes chers collègues, que la commission des affaires sociales, comme moi à titre personnel, s’est interrogée sur le manque à gagner qu’engendrera l’adoption de l’article 1er.
Cela étant, cette incitation est indispensable, dans le contexte de crise que nous connaissons, pour relancer l’intéressement et la participation. Comme le disait tout à fait justement M. le ministre, il est essentiel de mettre en place auprès des chefs d’entreprise des mesures très incitatives pour doubler la participation et l’épargne salariale.
Mme Nicole Bricq. Cela ne marchera pas !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Pourquoi dites-vous cela ?
M. Guy Fischer. L’expérience !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Parce qu’elle est attachée au développement de l’intéressement, la commission des affaires sociales est donc défavorable à ces trois amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Je connais, depuis la semaine dernière, la position de la commission des finances sur ce sujet, et j’ai bien compris qu’elle attendait un certain nombre de réponses. Par ailleurs, j’ai écouté attentivement les propos de M. Serge Dassault, qui a décidé de maintenir cet amendement, car la commission des finances l’avait adopté et qu’il n’était pas en son pouvoir de le retirer. En définitive, monsieur le rapporteur pour avis, c’était une manière d’engager un débat sur ce sujet ! (Murmures sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Ce crédit d’impôt, il est vrai, représente un effort important. Si nous voulons booster l’intéressement, en le doublant d’ici à 2012, il faut décider des moyens à utiliser, car les grands discours ne suffiront pas !
Certes, il y a la voie de la contrainte, mais elle est dangereuse. En effet, pour connaître personnellement le monde de l’entreprise, je peux vous dire que, en contraignant de la même façon toutes les entreprises, on nie leur réalité, car elles sont toutes différentes. Ne comptez pas sur moi pour refaire l’erreur des 35 heures de Mme Aubry ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Dominique Braye. Très bien !
M. Xavier Bertrand, ministre. On ne met pas le même costume à toutes les entreprises de France ! Deux entreprises de tailles différentes ou de secteurs différents rencontrent des problèmes différents qui appellent des réponses différentes.
Par conséquent, je crois au sur-mesure, lequel est rendu possible par l’outil que constitue le crédit d’impôt. C’est d’ailleurs cette disposition qui nous permettra de faire progresser l’intéressement dans les PME.
Monsieur Larcher, vous qui avez occupé mes fonctions avant de devenir président du Sénat, vous savez que le pragmatisme est la bonne réponse. Vous qui êtes aussi un expert en matière de dialogue social, vous savez que le champ de l’intéressement, c’est le dialogue social.
Certains d’entre vous mettent en avant le coût d’une telle opération. Pour moi, c’est un investissement.
En effet, si nous réussissons à doubler l’intéressement d’ici à 2012, le coût du dispositif atteindra 1 milliard à 1,1 milliard d’euros. Mais, monsieur le rapporteur pour avis, il faut tout dire, il faut également évoquer les recettes qui seront ainsi créées.
Comme je l’ai dit à la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, l’intéressement est assujetti à la CSG-CRDS et à l’impôt. Par ailleurs, comme Mme le rapporteur l’a souligné tout à l’heure, le forfait social s’appliquera également à l’intéressement.
Au final, entre le fiscal et le social, si cet investissement d’un milliard d’euros représente effectivement un manque à gagner pour le budget de l’État, il sera forcément récupéré, et ce à l’euro près, par le budget de l’État et celui de la sécurité sociale. (M. Guy Fischer proteste.)
Je comprends votre grande vigilance à l’égard des finances publiques, mais ce qui importe, c’est que le coût soit neutre pour le budget de l’État et de la sécurité sociale et que le gain soit réel pour les salariés. Or on peut dire que 7 milliards d’euros supplémentaires seront distribués aux salariés. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Comme vous pouvez le constater, il y aura un équilibrage entre l’investissement et les recettes.
M. Guy Fischer. Mais non !
M. Xavier Bertrand, ministre. Si vous n’êtes pas intéressé par 7 milliards d’euros supplémentaires pour les salariés, c’est votre choix, monsieur Fischer ! (Protestations sur les travées du groupe CRC.)
Si vous estimez que l’État doit fixer les salaires, c’est votre droit. Toutefois, je n’ai pas le sentiment que ce soit le choix ni des entrepreneurs ni des Français.
M. Guy Fischer. Ce sont des salaires confisqués !
M. Xavier Bertrand, ministre. Telles sont les raisons pour lesquelles l’incitation est la vraie solution.
M. Guy Fischer. On en reparlera !
M. Xavier Bertrand, ministre. J’opposerai la même argumentation à Mmes Jarraud-Vergnolle et David.
Puisque vous ne pouvez pas retirer l’amendement n° 21, qui a été adopté par la commission des finances, monsieur Dassault, le Gouvernement engage le Sénat à ne pas l’adopter.
M. Guy Fischer. C’est un appel à la majorité !
M. Xavier Bertrand, ministre. En effet, sans l’article 1er, il est certain que nous ne réussirons pas à faire profiter les salariés, notamment ceux des PME, d’un doublement de l’intéressement.
Je souhaitais vous apporter, mesdames, messieurs les sénateurs, ces quelques éléments de réponse aux questions légitimes que vous avez posées. Sans l’article 1er, qui est le cœur de ce texte, il n’y a plus de projet de loi sur l’intéressement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Monsieur le ministre, vous êtes enthousiaste, car vous croyez que cette mesure va marcher. Au demeurant, si tel n’est pas le cas, il n’y aura pas de problème…
Cela dit, présentez-nous, dans un an, le bilan de cette opération, en dénombrant les entreprises qui ont effectivement profité de cette mesure pour développer l’intéressement ! Je vous fais le pari que leur nombre ne sera pas considérable !
Pour ma part, je me soucie surtout du déficit budgétaire. Bien sûr, vous dites que vous allez récupérer ces sommes par d’autres biais, mais ce qui « plombe » notre déficit, ce sont tous les allégements généraux de cotisations sociales décidés par le Gouvernement. En 2009, ils devraient atteindre environ 25 milliards d’euros !
Quand allons-nous nous arrêter ? Cette déduction sera-t-elle permanente ou ne durera-t-elle que quelques années ? En effet, chaque fois que des allégements fiscaux sont prévus, aucune limite n’est jamais fixée ! Pourriez-vous, dans ce cas, fixer une limite ?
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Alquier, pour explication de vote.
Mme Jacqueline Alquier. L’objectif affiché de ce projet de loi est de « moderniser et dynamiser la politique salariale de notre pays ».
On a appris à savoir ce que cela veut dire, car, dans l’avalanche de textes toujours présentés en urgence, mais aussi avec une certaine persévérance, c’est toujours la même logique idéologique qui s’affirme : « moderniser » signifie désengager l’État et diminuer les services publics ; « dynamiser » veut dire détricoter toutes les garanties collectives assurant la protection du salarié.
Cet article 1er d’un projet de loi censé agir pour le pouvoir d’achat – question ô combien préoccupante pour nos concitoyens ! – institue un crédit d’impôt, à hauteur de 20 % des sommes versées, pour les entreprises qui concluent un accord d’intéressement dans certaines conditions et rend possible le versement d’une prime exceptionnelle plafonnée à 1 500 euros par salarié, si un accord ou un avenant est conclu entre certaines dates.
Toujours les mêmes placebos pour un mal qui, pendant ce temps, s’aggrave et s’étend ! Les niches fiscales assèchent depuis des années les finances publiques, puisqu’elles représentent 22,8 milliards d’euros en 2008, comme M. le rapporteur pour avis vient de le rappeler, et ce sans réel impact sur les créations d’emploi et l’amélioration du pouvoir d’achat.
L’instauration de primes, cela a déjà été tenté dans la loi pour le pouvoir d’achat adoptée en février dernier, c'est-à-dire très récemment. Quel en est le résultat ? On ne sait pas ! On légifère de nouveau sans jamais avoir de bilans sur lesquels s’appuyer.
On a aussi, essayé les heures supplémentaires - travailler plus pour gagner plus ! - et le rachat des jours de RTT, avec les maigres résultats que l’on connaît...
En l’espace de dix-huit mois, c’est le quatrième texte concernant le pouvoir d’achat qui nous est présenté : quel formidable aveu d’inefficacité et d’incompétence de la part du Gouvernement, incapable d’apporter des solutions concrètes et tangibles à ceux qui peinent à se loger, à se soigner et à vivre dignement !
Pourtant, vous nous affirmez que ça marche, monsieur le ministre, alors même que le pouvoir d’achat, loin d’augmenter, a baissé de 0,4 point en douze mois !
Mais, si ça marche, pourquoi déposer un autre texte ? Peut-être pour avancer encore d’un pas dans la fragilisation de la garantie collective que constitue le salaire direct ! Car cet article 1er, loin de favoriser, tout simplement, l’augmentation des salaires - ce qui permettrait de combattre directement et efficacement l’érosion du pouvoir d’achat -, vise à faire dépendre les revenus du seul bon vouloir - ou pouvoir - des dirigeants d’entreprises, avec tout ce que cela comporte d’aléatoire et donc d’insécurisant !
Les revenus ne seront plus garantis collectivement, mais individualisés et donc soumis à des résultats bien incertains dans le contexte actuel.
Rappelons, au surplus, que les primes exonérées de cotisations sociales ne sont pas prises en compte pour la retraite...
Ce n’est certainement pas avec ce genre de solutions qui, en outre, ne concernent que 8 millions de salariés et excluent les salariés des fonctions publiques, les retraités, les chômeurs et des catégories de salariés pour lesquels la question d’un quelconque intéressement ne se posera jamais, que le Gouvernement va rassurer les Français et leur redonner confiance dans l’avenir...
En conséquence, nous rejetterons cet article 1er. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. François Marc, pour explication de vote.
M. François Marc. Avant d’expliquer mon vote et celui de mes amis du groupe socialiste, je commencerai par rendre hommage à notre collègue Serge Dassault.
Même si nous conservons certains points de désaccord avec lui, nous sommes frappés par son souci d’honnêteté intellectuelle sur le sujet qui nous occupe. Incontestablement, il parle de choses qu’il connaît bien : l’entreprise, la nécessité de motiver ses acteurs et ses salariés, mais aussi de mieux répartir le profit et les bénéfices après impôt. Il mérite d’être entendu !
Il éprouve pourtant de la peine à convaincre ses collègues, alors qu’il ne fait que rapporter objectivement ce que la commission des finances a décidé, à l’unanimité. La rumeur prétend qu’il n’y avait pas grand monde en commission.
Mme Nicole Bricq. Nous étions tous là !
M. François Marc. En fait, le taux de présence était nettement supérieur à celui que l’on observe ce soir dans cet hémicycle ! Je peux moi-même en attester ! C’est incontestablement à l’unanimité que la commission des finances a approuvé cette stratégie qui consiste à faire preuve de vigilance sur toutes les questions budgétaires, notamment sur la suppression des exonérations et des niches fiscales.
Aujourd’hui, le déficit public pour 2009 avoisinera les 60 milliards d’euros, la dette publique, les 1 300 milliards d’euros et la charge de la dette, les 50 milliards d’euros. La situation est donc exceptionnellement difficile.
Depuis quelques semaines, on se demande de toute part, à droite, à gauche, au centre, comme dans tous les pays, pourquoi on n’a pas anticipé, pourquoi on n’a pas su éviter ces dérives. En l’occurrence, nous sommes confrontés à une dérive budgétaire parfaitement organisée, puisque vous venez, à l’instant, monsieur le ministre, de nous expliquer que nous ne sommes pas à 1,2 milliard près !
Notre groupe est soucieux de rappeler au Sénat la responsabilité qu’il a de prendre en considération le vote émis par la commission des finances.
À l’instant, M. Dassault se demandait quand cette dérive allait cesser. Il ne faisait que traduire une idée partagée par tous les membres de la commission des finances. Il est temps, en effet, de mettre un coup d’arrêt à ces logiques d’exonérations et de niches fiscales.
C’est la raison pour laquelle nous devons voter en faveur de la suppression de ce nouveau crédit d’impôt accordé aux entreprises, mes chers collègues.
Comme on nous l’a expliqué tout à l’heure, ça ne marchera pas ! Gardons pour nous ces 1,2 milliard d’euros et veillons à préserver nos équilibres budgétaires, comme le souhaite unanimement la commission des finances.
J’entends dire que le Gouvernement devra, dans un an, rendre compte des effets produits par les mesures adoptées. Je me permettrai de faire deux remarques à ce sujet.
Premièrement, on entend dire depuis 2002 qu’il faut booster l’économie, en adoptant des dispositions fiscales plus favorables à l’investissement, en incitant, au moyen de baisses d’impôts, les investisseurs à créer davantage d’emplois. Or, incontestablement, les résultats ne sont pas au rendez-vous.
Deuxièmement, avec la réforme constitutionnelle, l’opposition est aujourd’hui dans la capacité de demander des comptes. Ainsi, et à moins que vous n’en preniez vous-même l’initiative, monsieur le ministre, notre groupe, comme l’ensemble de l’opposition, sera à même de vous interroger d’une façon précise, devant notre assemblée.
Pour l’instant, nous souhaitons qu’une majorité de nos collègues vote en faveur de cet amendement de suppression de l’article 1er. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. Je viens soutenir l’amendement de suppression qu’a présenté notre camarade Annie David.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Et le camarade Dassault. (Sourires.)
M. Guy Fischer. On croirait entendre Roland Muzeau ! (Nouveaux sourires.)
Cet amendement s’avère d’autant plus pertinent que la réalité est très claire : le Gouvernement s’apprête à faire un nouveau cadeau fiscal de 1,2 milliard aux entreprises.
M. Aymeri de Montesquiou. C’est lié !
M. Guy Fischer. On sait bien comment ça se passe ! J’ai entre les mains un extrait du Figaro magazine daté du 27 septembre 2008.
M. Guy Fischer. Dans ce numéro, M. Dassault nous explique que la France compte 507 niches fiscales, qui sont autant de dérogations à la règle générale et dont le coût avoisine les 73 milliards d’euros, un fromage dans lequel on pourrait puiser, aussi bien pour financer le RSA – c’est d’actualité – que pour combler le trou grandissant des finances publiques.
Dans le même temps, le déficit des comptes sociaux continue de s’aggraver. Savez-vous, mes chers collègues, à combien nous en sommes en matière d’exonérations de cotisations sociales ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. À 30 milliards.
M. Guy Fischer. En fait, à 32 milliards d’euros !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. À 2 milliards près !
M. Guy Fischer. Alors que le Gouvernement tente de nous faire croire que les entreprises, notamment les petites, vont distribuer à leurs salariés intéressement et participation, nous assistons dans le même temps à une destruction d’emplois sans précédent.
Quatre secteurs sont particulièrement touchés : l’immobilier – il fallait s’y attendre –, l’automobile, l’intérim et la publicité. S’agissant plus particulièrement des difficultés du secteur automobile, elles auront des conséquences en chaîne sur tous les petits sous-traitants, notamment les équipementiers, qui sont tous des PME – on le sait bien dans la région lyonnaise !
À l’heure où ces différents tsunamis sont en train de balayer plusieurs milliers d’emplois, on peut légitimement s’interroger sur la validité de la démarche suivie par le Gouvernement.
Pour leur part, les groupes CRC et socialistes plaident pour une véritable politique des salaires.
Mme Gisèle Printz. Voilà !
M. Guy Fischer. On assiste en effet à un écrasement sans précédent des salaires et des retraites.
Si l’on fait le bilan de l’année 2008, on constate que les retraites ont été revalorisées de 1,1 % au 1er janvier et de 0,8 % au mois de septembre, soit 1,37% sur l’année, alors que l’inflation s’élève à 3,5 %, voire 3,6 %. Quant aux salaires dans la fonction publique, ils ont augmenté de 0,8 % au mois de mars et de 0,3 % au 1er octobre. Pour les retraités, on parle d’une baisse de 15 % de leur pouvoir d’achat sur les dix dernières années.
Ce sont autant de raisons qui expliquent qu’aujourd’hui les Françaises et les Français veulent voir leur pouvoir d’achat augmenter, non pas à l’aide d’un salaire différé, mais grâce à un véritable relèvement des salaires, des retraites et des minima sociaux. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. Monsieur Marc, si ça coûte, c’est que ça marche ! Vous avez l’air de vous en étonner… C’est pourtant clair : si ce coût pour les finances publiques se matérialise effectivement, c’est tout simplement qu’on aura distribué 7 milliards d’euros supplémentaires aux salariés !
Je ne cherche pas à relever une contradiction, mais simplement à vous dire qu’il faut savoir ce que l’on veut !
Mme Nicole Bricq. C’est vous qui vous contredisez !
M. Xavier Bertrand, ministre. Madame Bricq, ce genre de phrases ne rime à rien ! Prenons plutôt le temps de débattre et d’argumenter.
Monsieur Fischer, j’entends votre argumentation, même si je ne la partage pas, ce dont vous ne serez pas surpris, mais le vrai sujet, c’est de savoir de quels moyens on dispose aujourd’hui pour accroître le revenu des salariés. Ce projet de loi vise à inciter les entreprises à jouer le jeu des négociations salariales. C’est ce que s’attachera à défendre Laurent Wauquiez. Voilà des années qu’on en parle. Nous le faisons !
M. Guy Fischer. C’est virtuel !
M. Xavier Bertrand, ministre. C’est pourquoi, dans ce texte, on trouve à la fois des éléments relatifs à l’intéressement, à la participation et aux salaires. Ainsi, on marche bien sur deux jambes, l’intéressement et la participation venant s’ajouter, et non se substituer, à la négociation salariale.
Monsieur le rapporteur pour avis Serge Dassault, j’entends bien ce que vous me dites, et je suis prêt à relever le défi que vous m’avez lancé, parce que j’ai confiance en notre projet. J’entends également ce que vous avez voulu proposer avec la règle des trois tiers. Je comprends que vous souhaitez, même, aller au-delà.
Mais, vous le savez, et j’en parlais à l’instant avec le président About, quand on doit légiférer, on commence par se poser des questions, on recherche la meilleure solution. Puis, à un moment donné, on doit décider et apporter des réponses.
En l’occurrence, les chefs d’entreprise nous demandent de pas leur imposer des normes trop contraignantes, mais de procéder plutôt par voie d’incitation. C’est précisément le choix que nous avons fait.
Si je vous ai bien compris, monsieur Dassault, vous étiez d’accord avec le dispositif gouvernemental, à condition que celui-ci soit évalué. J’y suis favorable. Mais, en attendant, le Gouvernement demande que les différents amendements soient rejetés. J’espère que vous partagerez ce point de vue, monsieur le rapporteur pour avis.
M. François Marc. Le problème, c’est le déficit !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 21, 35 et 73.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires sociales.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n°25 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 171 |
Pour l’adoption | 145 |
Contre | 195 |
Le Sénat n'a pas adopté.
M. François Marc. On s’approche de la majorité !
M. le président. L'amendement n° 1, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du V de cet article, après les mots :
en cours à la date de publication de la présente loi
insérer les mots :
modifiant les modalités de calcul de l'intéressement
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision.
La conclusion d'un avenant à un accord d'intéressement en cours peut permettre à une entreprise de bénéficier du crédit d'impôt prévu à l'article 1er du projet de loi. Il convient cependant de préciser que cet avenant doit modifier les modalités de calcul de l'intéressement. Il serait en effet injustifié d'accorder le crédit d'impôt si l'avenant n'était pas susceptible de modifier le montant des primes d'intéressement versées.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 61 rectifié, présenté par Mmes Henneron et Sittler et M. Revet, est ainsi libellé :
Supprimer les VI et VII de cet article.
La parole est à Mme Françoise Henneron.
Mme Françoise Henneron. Ces dispositions prévoyant la possibilité d'un versement exceptionnel d'intéressement n'ont pas d'utilité puisqu'elles sont déjà prévues, de manière pérenne, par l'article L. 3314–10 du code du travail.
M. le président. L'amendement n° 36, présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la première phrase du deuxième alinéa du VI de cet article :
Cette prime est répartie uniformément entre tous les salariés.
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Cet amendement de repli vise à offrir aux salariés les plus mal payés un peu d’oxygène.
Pour que le pouvoir d’achat soit amélioré là où il est le plus faible, nous proposons que la prime exceptionnelle soit répartie uniformément entre tous les salariés, y compris, par conséquent, les salariés en contrat à durée déterminée, les travailleurs à temps partiel et, dans les entreprises concernées, les intérimaires.
Chacun sait combien ces supplétifs de l’industrie sont indispensables à la gestion à flux tendus, alors qu’ils ne bénéficient pas, faute d’ancienneté, des mêmes avantages que les autres salariés.
De plus, cette formule inédite de répartition permettrait de tester la volonté réelle des employeurs de faire participer les salariés aux bénéfices dégagés, puisque l’octroi de la prime est à leur entière discrétion.
Une prime, fût-elle exceptionnelle, qui aboutirait à un avantage inversement proportionnel au salaire serait en fait une compensation à l’absence de politique salariale.
Enfin, il est avéré que l’argent versé aux plus modestes est immédiatement utilisé pour l’achat de biens et de services dont ces familles ont grandement besoin.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Les régimes juridiques applicables respectivement à la prime exceptionnelle et au supplément d’intéressement ne sont pas exactement identiques.
Le supplément d’intéressement est bien adapté à la situation d’entreprises qui disposent déjà d’un accord d’intéressement et qui décident, à la clôture de l’exercice, de verser une part d’intéressement supérieure à ce que prévoit l’accord.
La prime exceptionnelle, quant à elle, pourra être versée sans délai dès que l’entreprise se sera dotée d’un accord d’intéressement.
Pour ces raisons, madame Henneron, je vous demande de bien vouloir retirer l’amendement n° 61 rectifié. À défaut, la commission émettra un avis défavorable.
Quant à l’amendement n° 36, il vise à ce que la prime exceptionnelle, dont le versement est autorisé à l’article 1er du projet de loi, soit obligatoirement répartie de façon uniforme entre tous les salariés.
D’une manière générale, nous sommes peu favorables aux mesures contraignantes. Dans le cas présent, elles auraient en outre un effet très négatif.
Le projet de loi prévoit que la prime puisse aussi être proportionnelle au salaire ou à l’ancienneté du salarié dans l’entreprise. Ces règles sont les mêmes que celles qui sont prévues pour la prime d’intéressement. Dans un souci de simplicité, et pour offrir de la souplesse aux entreprises dans leur politique de rémunération, la commission souhaite maintenir ces différentes possibilités de choix et s’oppose à toute mesure uniforme. Par conséquent, elle émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Madame Henneron, le versement exceptionnel d’intéressement est versé après l’intéressement. Or la prime prévue par le texte sera versée antérieurement. L’adoption de votre amendement n° 61 rectifié aurait pour conséquence, je le crains, de pénaliser les salariés. C’est pourquoi je vous saurais gré de bien vouloir le retirer.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur l’amendement n° 36, qui entend imposer une répartition uniforme de la prime exceptionnelle.
M. le président. Madame Henneron, l'amendement n° 61 rectifié est-il maintenu ?
Mme Françoise Henneron. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 61 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 36.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 2, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Remplacer les paragraphes VIII et IX de cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
VIII. - Avant le 30 juin 2014, le Parlement évalue les dispositifs institués par les I à VII du présent article sur la base d'un rapport remis par le Gouvernement au plus tard le 31 décembre 2012.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement vise à simplifier les dispositions adoptées par l'Assemblée nationale en vue de l'évaluation du crédit d'impôt institué à l'article 1er. Il ne nous paraît pas justifié d'exiger la remise d'un rapport tous les ans – le Parlement reçoit déjà beaucoup de rapports – ni de citer expressément tous les articles de la Constitution qui font référence aux pouvoirs de contrôle du Parlement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Nous avons achevé l’examen des amendements appelés en priorité.
Articles additionnels avant l'article 1er A
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements présentés par Mmes David, Pasquet et Hoarau, MM. Fischer, Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 68 est ainsi libellé :
Avant l'article 1er A, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Par dérogation aux dispositions fiscales en vigueur, pour les dirigeants d'entreprises qui ont une rémunération annuelle excédant 250 000 euros après prélèvement des cotisations sociales, le montant des indemnités de départ qui excède ce montant est imposé à un taux de 100 %.
Par dérogation aux dispositions fiscales en vigueur, la société qui octroie une rémunération de départ supérieure, calculée conformément au premier alinéa, en vertu d'un contrat de travail, d'un contrat d'entreprise ou d'un mandat est soumise à une taxe supplémentaire de 15 % sur son bénéfice imposable.
L'amendement n° 69 est ainsi libellé :
Avant l'article 1er A, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
I. - À la fin du premier alinéa de l'article L. 225-38 du code du commerce, les mots : « du conseil d'administration » sont remplacés par les mots : « de l'assemblée générale ».
II. - Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Cette convention est soumise à l'accord du comité d'entreprise. »
III. - À la fin de la première phrase du second alinéa de l'article L. 225-39 du même code, les mots : « au président du conseil d'administration » sont remplacés par les mots : « à l'assemblée générale des actionnaires ».
IV. - Dans le premier alinéa de l'article L. 225-42 du même code, les mots : « du conseil d'administration » sont remplacés par les mots : « de l'assemblée générale des actionnaires ».
L'amendement n° 70 est ainsi libellé :
Avant l'article 1er A, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Par dérogation aux dispositions fiscales en vigueur, toute rémunération ou partie de rémunération qui est liée à l'évolution de cours boursiers, octroyée ou calculée sous quelle que forme que ce soit, est soumis à une taxe de 100 %.
L'amendement n° 71 est ainsi libellé :
Avant l'article 1er A, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 2242-1 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Cette négociation porte également sur les éléments de rémunérations versées aux dirigeants salariés de l'entreprise, sous quelque forme que ce soit, notamment dans le cadre des dispositions visées aux articles L. 225-177 à L. 225-186 du code de commerce. »
La parole est à Mme Annie David, pour présenter ces quatre amendements.
Mme Annie David. Ces quatre amendements ont pour objet identique de moraliser certaines pratiques des dirigeants de grandes entreprises en matière de revenus.
Nous avons décidé de les déposer en réponse à l’amendement n° 20 du Gouvernement tendant à lier l’attribution de stock-options aux mandataires sociaux soit à la distribution de stock-options ou d’actions gratuites aux salariés, soit à la mise en place d’un accord d’intéressement ou de participation dérogatoire.
Ainsi, cet amendement vise à permettre la généralisation des stock-options sous prétexte « d’une meilleure diffusion des accords d’intéressement et de participation », objectif affiché de ce projet de loi.
Dans le contexte de crise financière que nous connaissons, vouloir généraliser ces stock-options pour les salariés nous semble relever de la provocation. L’inquiétude de ces derniers porte, de façon encore plus criante aujourd’hui, sur l’absence d’augmentations collective de salaire et non sur l’attribution éventuelle de produits financiers spéculatifs.
Le risque n’est-il pas de surcroît que ce soient les salariés qui participent au plan de sauvetage des fonds de gestion chargés de gérer ces actifs financiers dont on leur ferait cadeau ?
De même, la totale disproportion entre les revenus des salariés et l’attribution de parachutes dorés exorbitants à des dirigeants d’entreprise qui, pour certains, partent en ayant causé plusieurs millions d’euros de pertes dans leur entreprise n’est plus acceptable aujourd’hui.
Il est quand même paradoxal que ce projet de loi, censé revaloriser la valeur travail, c’est-à-dire reconnaître que les salariés apportent de la valeur ajoutée et un savoir-faire à la production et à l’entreprise, produise un effet inverse en favorisant les dirigeants qui sont rémunérés par des stock-options ou « remerciés » par des parachutes dorés alors qu’ils ont contribué à dévaloriser le travail des salariés.
De telles pratiques, que l’on peut aisément qualifier d’immorales, sont évidemment source d’exaspération pour les salariés, qui attendent une ambitieuse politique en faveur des salaires.
Notre volonté est donc de rompre avec les politiques économiques et financières antérieures.
Tout d’abord, nous souhaitons interdire les parachutes dorés et les stock-options ; ensuite, nous demandons que ce soit l’assemblée générale, et non plus seulement le conseil d’administration, qui intervienne dans la définition des conditions de rémunérations des dirigeants ; enfin, nous prévoyons que la négociation annuelle sur les salaires porte également sur les rémunérations des dirigeants salariés de l’entreprise.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. L’amendement n° 68 est présenté comme un amendement « anti-parachutes dorés ». Il vise à taxer au taux de 100 % les indemnités de départ perçues par les dirigeants d’entreprise dont la rémunération annuelle excède 250 000 euros.
Le débat sur la taxation des parachutes dorés est parfaitement légitime, ma chère collègue, tant certains abus ont pu être choquants. Je signale d’ailleurs que la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a adopté un amendement qui a pour objet d’augmenter le montant des contributions sociales pesant sur ces indemnités de départ. Ce débat trouvera plus naturellement sa place, pour son volet social, dans le cadre de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale et, pour son volet fiscal, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances.
Pour ces raisons, je vous saurais gré de bien vouloir retirer cet amendement.
M. Guy Fischer. Ah non !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. À défaut, la commission émettra un avis défavorable.
L’amendement no 69 vise à soumettre à l’autorisation de l’assemblée générale de la société et du comité d’entreprise la conclusion de convention entre la société et ses mandataires sociaux. À l’heure actuelle, seule l’autorisation du conseil d’administration est requise.
Il n’est pas sûr que cet amendement ait sa place dans ce projet de loi. Cette modification touche le droit des sociétés et nous n’avons pas pu en évaluer les conséquences.
Si l’idée de renforcer les pouvoirs de contrôle de l’assemblée générale est séduisante, il faut se souvenir que la convocation d’une assemblée générale est une opération assez contraignante, notamment en termes de délais. Je crains qu’elle ne soit pas adaptée aux besoins de souplesse et de réactivité des sociétés commerciales.
L’amendement no 70 vise à taxer à 100 % les plus-values sur les stock-options. S’il faut moraliser la distribution des stock-options – le Gouvernement a d’ailleurs déposé un amendement no 20 rectifié allant dans ce sens – il ne faut pas se priver de cet outil de rémunération qui est bien adapté à certaines situations, par exemple dans les jeunes entreprises innovantes.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
Enfin, madame David, par l’amendement no 71, vous voulez que la négociation annuelle sur les salaires porte sur tous les salaires versés dans l’entreprise, y compris sur ceux des dirigeants.
Cet amendement nous paraît sans objet puisque c’est déjà le cas. La commission y est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Nous avons déjà évoqué ce sujet pendant la discussion générale et nous y reviendrons lors de la discussion de l’amendement no 20 rectifié. Cette question devrait également faire l’objet d’une proposition de loi déposée par le groupe socialiste. Pour l’heure, je suis défavorable à ces amendements.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Mme le rapporteur, vous m’avez appelée à retirer l’amendement no 68. Vous comprendrez que je ne puisse accéder à votre demande.
Vous m’avez également conseillé de soulever à nouveau cette question lors de la discussion du projet de loi de finances. Croyez bien que nous n’y manquerons pas !
L’amendement no 69 porte sur le droit des sociétés, lequel ne peut, selon vous, être modifié sans concertation.
Soit ! Pourtant, la semaine dernière, nous avons largement modifié, sans aucune concertation, des articles du code du travail qui touchaient au droit des salariés. Je m’en suis étonnée. Il m’a été répondu : si le législateur ne peut pas faire ce qu’il veut…
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Si, mais pas n’importe comment.
Mme Annie David. Ce qui est valable un jour semble ne plus l’être le suivant ! C’est étrange !
Pour toutes ces raisons, je maintiendrai l’amendement no 69.
En ce qui concerne l’amendement no 70, nous considérons que l’amendement no 20 rectifié ne répond pas à ce que nous souhaitons. Nous proposons même un dispositif inverse de celui du Gouvernement.
Vous considérez, madame, que l’amendement no 71 est sans objet puisque la négociation sur les salaires porte déjà sur celui de tous les salariés, y compris les dirigeants. Soit ! Je maintiens néanmoins l’amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 71.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 1er A
Au début de l'intitulé du livre III de la troisième partie du code du travail, sont insérés les mots : « Dividende du travail : ».
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 34 est présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 72 est présenté par Mmes David, Pasquet et Hoarau, MM. Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle, pour présenter l'amendement n° 34.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Cet amendement vise à supprimer la mention « dividende du travail » qui a été insérée dans ce projet de loi à l’Assemblée nationale.
Cette expression crée une confusion qui n’est pas seulement sémantique. Jusqu’à son introduction dans la législation, en 2006, il était clairement acquis que le dividende était associé à l’investissement en capital et le salaire à l’apport en travail.
Contrairement à ce que l’on veut nous faire admettre, les sommes acquises par les salariés dans le cadre de l’intéressement, de la participation et de l’épargne salariale sont non pas des dividendes associés à un investissement, mais des primes et des éléments de rémunération. Le code du travail est à cet égard très clair.
En ce qui concerne l’intéressement, l’article L. 3314-8 du code du travail parle bien de primes.
La répartition de la réserve de participation entre les salariés – ce mot est important – est calculée proportionnellement au salaire perçu, selon l’article L. 3324-5.
S’agissant de l’épargne salariale, l’article L. 3332-10 précise que les versements annuels d’un salarié à un plan d’épargne entreprise ne peuvent excéder un quart de sa rémunération annuelle.
Il y a donc indiscutablement un lien entre ces trois régimes et le statut de salarié. Rien n’empêche quelqu’un d’aller dans une banque ouvrir un PEA ou un compte titre. La personne est alors actionnaire d’une entreprise avec laquelle elle n’a aucun autre lien.
Le salarié qui est dans un des trois régimes visés, même si le plan d’épargne entreprise, le PEE, et le plan d’épargne pour la retraite collectif, le PERCO, lui permettent de constituer un portefeuille de valeurs mobilières, n’y figure que parce que son lien fondamental avec l’entreprise porteuse est d’en être salarié ou retraité. Et c’est en tant que salarié qu’il est dans un lien de sujétion avec son employeur, ce qui implique notamment qu’il peut être licencié et voir disparaître intéressement et participation.
S’il n’est pas abusif de définir ces sommes comme revenus du travail, il faudrait préciser que ce sont des revenus accessoires et aléatoires. Ce ne sont pas des salaires, et en aucun cas des dividendes.
Il ne s’agit pas d’opposer dans un esprit manichéen les salariés, les employeurs et les actionnaires. Mais le législateur a pour premier devoir d’être précis et clair. Sur ce point, nous ne devons pas désespérer de nous-mêmes.
La confusion ne s’arrête pas là. Elle est aussi dans le fait que vous votez des lois qui détruisent méthodiquement les garanties des salariés.
Ainsi, le projet de loi que nous examinons aujourd’hui comporte, en son article 3, une bombe à retardement pour tous les salariés rémunérés au SMIC, alors que le salaire est en général leur seul revenu, et que c’est cela qu’il convient de préserver.
Nous sommes clairement opposés à ces fantaisies sémantiques qui masquent des cheminements intellectuels et législatifs beaucoup moins candides.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 72.
Mme Annie David. La notion de « dividende du travail » a été créée par la loi du 30 décembre 2006 relative au développement de la participation et de l’actionnariat salarié.
Déjà, à l’époque, nous contestions l’introduction, dans le code du travail, de cette notion qui renvoie à une conception purement financière et spéculative de la rétribution du travail.
Notre position reste sur ce point inchangée depuis 2006 : seul le salaire doit constituer la contrepartie du travail.
Le problème est que nous assistons à une faible évolution du revenu du travail par rapport à l’évolution des revenus du capital. La répartition des richesses s’effectue aujourd’hui de façon inéquitable : le partage entre le capital et le travail est inversé, notamment au regard de l’absence d’investissement.
L’enrichissement des actionnaires passe avant les salaires et avant les besoins de l’entreprise elle-même.
Or, chacun le sait, et en premier lieu les salariés, les actionnaires sont rémunérés sous la forme de dividendes.
Les 740 salariés de Matussière et Forest, qui ont vu leur entreprise rachetée par le fonds de pension Matlin Patterson, payent cash le prix de cette politique.
En ces temps de crise financière, il est plutôt malvenu de pérenniser la notion de dividende du travail, qui renvoie nécessairement à la notion d’actionnariat.
La notion de dividende du travail ne correspond donc pas à une réalité : elle est un non-sens d’un point de vue économique et social et, surtout, elle est bien loin des préoccupations des salariés, pour qui l’augmentation du pouvoir d’achat se fait encore attendre.
La notion de dividende du travail tend à faire admettre aux salariés qu’il est normal qu’une partie de leur rémunération soit non pas le salaire, mais des éléments aléatoires de rémunération.
Pourtant, seul le salaire a vocation à rétribuer une qualification et, pour ce faire, il doit rester le seul élément de référence.
Si l’objectif était de redistribuer les bénéfices des entreprises afin d’augmenter les salaires, nous ne pourrions que l’approuver. Mais ce n’est pas le cas.
Décidément, le Gouvernement peine à trouver des solutions efficaces en faveur du pouvoir d’achat. Voilà maintenant deux ans, depuis la loi de décembre 2006, qu’il tente, de façon quasi désespérée, de faire passer les suppléments d’intéressement et de participation pour des hausses de salaires et une amélioration du pouvoir d’achat. Je doute que les travailleurs pauvres, à temps partiel ou sous contrats précaires, soient réellement sensibles à cet argument.
C’est pour ces raisons que nous demandons la suppression de l’article 1erA.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. L’article 1erA, introduit par l’Assemblée nationale sur l’initiative de M. Patrick Ollier, vise à faire figurer la notion de dividende du travail dans le code du travail.
Comme vous l’avez rappelé, madame David, nous avions longuement évoqué cette question. La commission ayant approuvé cet article, elle ne peut qu’être défavorable aux amendements de suppression nos 34 et 72.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Je partage l’argumentation de la commission, ce qui me conduit, à regret, à émettre un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 34 et 72.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, je vous demande de bien vouloir suspendre la séance afin de permettre à la commission des affaires sociales d’examiner le reste des amendements qui ont été déposés sur ce texte.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons donc interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt-cinq, est reprise à vingt et une heures trente.)
M. le président. La séance est reprise.
Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, en faveur des revenus du travail.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus aux amendements tendant à insérer un article additionnel après l’article 1er.
Articles additionnels après l'article 1er
M. le président. L'amendement no 37, présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le quatrième alinéa (3°) de l'article L. 2241-2 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 4° L'évolution des montants des primes distribuées au titre de l'intéressement. »
La parole est à Mme Jacqueline Alquier.
Mme Jacqueline Alquier. L’article L. 2241-2 du code du travail dispose que les négociations de branche portent une fois par an sur les salaires. À cette occasion sont examinées l’évolution économique et la situation de l’emploi dans la branche, les prévisions établies, les perspectives d’utilisation des contrats à durée déterminée et des missions de travail temporaire, les actions de prévention envisagées, compte tenu de ces prévisions, en matière d’emploi – en d’autres termes, la gestion prévisionnelle des emplois avant des plans sociaux –, l’évolution des salaires effectifs.
Nous proposons d’ajouter à cette liste l’évolution des montants des primes distribuées au titre de l’intéressement.
L’évolution qu’il est proposé, dans le projet de loi, de mettre en œuvre conduit en effet à craindre que la substitution de l’intéressement au salaire ne se poursuive et ne s’amplifie. On a déjà constaté que les sommes distribuées au titre de l’intéressement ont crû plus vite que les salaires. C’est le résultat du développement de l’emploi précaire, mais c’est aussi l’effet de l’absence de négociation salariale : à la précarité des contrats de travail des uns correspond la précarité de la rémunération des autres.
Il nous paraît donc important que les partenaires sociaux se saisissent de cette question à l’échelon des branches, ce qui rejoint votre préoccupation apparente de porter les minima conventionnels au niveau du SMIC. Mais nous y reviendrons.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement a pour objet que les branches examinent tous les ans l’évolution du montant des primes d’intéressement.
Néanmoins, dans la mesure où la mise en œuvre d’un accord d’intéressement relève de la seule décision de l’entreprise, il n’est pas sûr que la branche soit le niveau approprié pour mener ces discussions ni qu’elle disposera des données statistiques nécessaires pour se prononcer.
La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Il est défavorable.
Je vois un très grave danger dans cet amendement : le risque de substitution de l’intéressement au salaire, que vous-même et vos amis dénoncez souvent, madame le sénateur. En effet, expliquez-moi comment, s’il entre dans le champ des négociations sur les salaires, l’intéressement ne finira pas, d’une façon ou d’une autre, par s’y substituer ! Ce n’est pas ce que voulez, je ne le veux pas non plus.
J’émets donc un avis défavorable.
M. le président. L'amendement no 93, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L'article L. 3312-2 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les entreprises de 50 salariés et moins, l'employeur peut mettre en application unilatéralement un régime d'intéressement conforme aux dispositions du présent chapitre. Les délégués du personnel, s'ils existent, sont consultés sur le projet d'assujettissement unilatéral à l'intéressement au moins quinze jours avant son dépôt auprès du directeur du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle. »
II. – La perte de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Les dirigeants des petites entreprises hésitent parfois à s'engager dans la négociation d'un accord d'intéressement. C'est pourquoi cet amendement vise à faciliter la diffusion de ce dispositif en donnant à l’employeur la possibilité de mettre en place, par décision unilatérale, un régime de participation pour les salariés, et ce par parallélisme des formes avec l'article 9 de la loi du 30 décembre 2006.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. La commission est opposée à la mise en place unilatérale d’un régime d’intéressement par le chef d’entreprise.
En effet, les mécanismes d’intéressement liant le versement d’une prime à la réalisation de certains objectifs de performance, il est indispensable que ces derniers soient discutés dans l’entreprise. Un accord d’intéressement est un outil de motivation des salariés : celle-ci ne sera pas au rendez-vous si l’employeur prend des décisions unilatérales.
J’ajoute que la loi du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale a ouvert de nouvelles possibilités de négociations dans les PME dépourvues de délégué syndical.
Pour toutes ces raisons, mon cher collègue, j’émets un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Monsieur le sénateur, je vous ferai une proposition que je qualifierai d’honnête : retirez cet amendement. (Sourires.)
L’intéressement ne peut pas être dissocié du dialogue social, même si l’on peut discuter des formes de celui-ci et, par exemple, décider de recourir, en l’absence de représentant du personnel, au référendum à la majorité des deux tiers. Je sais que cette idée ne vous déplaît pas puisque vous l’avez défendue à plusieurs reprises, notamment cet été, lors d’un autre débat parlementaire !
Ne nous privons pas de la souplesse qu’offre le dialogue social ! En matière d’intéressement, une décision unilatérale ne me semble pas être la meilleure des voies.
Voilà pourquoi je vous inviterai, monsieur le sénateur, à retirer votre amendement, faute de quoi je serai désolé d’émettre un avis défavorable, ce que je ne souhaite vraiment pas.
M. le président. Monsieur Dominati, l'amendement no 93 est-il maintenu ?
M. Philippe Dominati. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement no 93 est retiré.
Article 1er bis
Après l’article L. 3312-7 du code du travail, il est inséré un article L. 3312-8 ainsi rédigé :
« Art. L. 3312-8. – Un régime d’intéressement peut être établi au niveau de la branche. Les entreprises de la branche qui le souhaitent bénéficient de ce régime. Elles concluent à cet effet un accord dans les conditions prévues à l’article L. 3312-5. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement no 74, présenté par Mmes David, Pasquet et Hoarau, MM. Fischer, Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. L’article 1er bis a été inséré dans le projet de loi par le biais d’un amendement de la commission de l’Assemblée nationale. Il vise à permettre l’établissement d’un régime d’intéressement au niveau de la branche.
L’objectif de la majorité est prétendument d’encourager le développement de l’intéressement dans les plus petites entreprises. Cependant, nous voyons deux inconvénients à ce dispositif.
Premièrement, dans la mesure où, il faut le rappeler, les accords de branche en matière de salaires aboutissent rarement, un accord de branche en matière d’intéressement a également peu de chances d’aboutir. Dans ces conditions, il est difficile d’envisager l’extension des négociations de branche aux accords d’intéressement.
Deuxièmement, la branche est le niveau de négociation des salaires ; en en faisant le niveau de négociation de l’intéressement, la majorité et le Gouvernement entretiennent la confusion entre salaire et intéressement, autrement dit entre salaire et éléments accessoires de la rémunération. Une telle démarche n’est pas innocente : elle contribue à la dévalorisation du travail et à la déresponsabilisation des employeurs, particulièrement des grandes entreprises, face à la question salariale. Il leur sera ainsi encore plus facile de couper court à toute revendication collective en matière de salaires en utilisant l’argument de la relance de l’intéressement envisagée dans le projet de loi.
Faire croire aux salariés qu’ils trouveraient avantage dans la possibilité de négocier des accords d’intéressement au niveau de la branche est un leurre : d’une part, parce qu’il ne s’agit que d’une possibilité et que cette disposition n’a rien de contraignant ; d’autre part, parce que, nous le savons, le rapport de force dans la branche est moins favorable aux salariés que dans l’entreprise.
Ces arguments devraient donc logiquement vous conduire, mes chers collègues, à adopter notre amendement de suppression de l’article 1er bis.
M. le président. L’amendement no 95, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
I. – Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l’article L. 3312-8 du code du travail :
« Art. L. 3312-8. – Un régime d’intéressement peut être mis en place par accord collectif de branche. Les entreprises de la branche qui le souhaitent peuvent bénéficier de ce régime dans les conditions prévues par cet accord. »
II. – Pour compenser les pertes de recettes résultant pour l’État et les organismes de sécurité sociale du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – 1. La perte de recettes résultant pour l’État de la possibilité pour les entreprises d’une branche de bénéficier directement d’un régime d’intéressement mis en place par accord de branche est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
2. La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale de la possibilité pour les entreprises d’une branche de bénéficier directement d’un régime d’intéressement mis en place par accord de branche est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Seule une grande simplicité dans la mise en œuvre de l’intéressement permettra un réel développement de ce dispositif dans les petites et moyennes entreprises. Cet amendement a donc pour objet de permettre à celles-ci d’appliquer directement le régime d’intéressement défini par l’accord collectif négocié et conclu au niveau de la branche. Une telle solution existe déjà en matière d’épargne salariale et a largement montré son efficacité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. L’article 1er bis vise seulement à légitimer la pratique des accords-cadres négociés au niveau des branches : un ou plusieurs modèles d’accord d’intéressement peuvent être négociés par la branche, puis repris par les entreprises qui le souhaitent.
La commission estime qu’il s’agit d’un bon dispositif et souhaite le conserver. En conséquence, elle a émis un avis défavorable sur l’amendement de suppression no 74.
Monsieur Dominati, comme je l’ai indiqué en donnant son avis sur l’amendement no 93, la commission est attachée à ce que la mise en place d’un régime d’intéressement soit négociée dans l’entreprise. Or votre amendement no 95 ouvrirait la porte à des modalités de mise en place différentes de celles qui sont prévues dans le code du travail.
C’est pourquoi, mon cher collègue, je vous prie de me pardonner de vous demander encore une fois le retrait de votre amendement, à défaut de quoi j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Sur l’amendement no 74, présenté par le groupe CRC, l’avis du Gouvernement est défavorable. Il n’y a aucune raison de penser, de dire ou même d’écrire – et cela ne figure nulle part – que l’intéressement se substituera aux négociations salariales.
Monsieur Dominati, je ne sais pas si vous êtes satisfait, mais j’ai le sentiment que votre amendement l’est.
L’établissement d’un accord d’intéressement au niveau de la branche ne figurait pas, c’est vrai, dans le texte initial du projet de loi. Cette disposition a été ajoutée par l’Assemblée nationale, à l’issue de longues discussions, précisément pour éviter qu’il n’y ait carence dans certaines entreprises. Aussi, peut-être accepterez-vous de retirer votre amendement.
M. le président. Monsieur Dominati, l’amendement no 95 est-il maintenu ?
M. Philippe Dominati. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement no 95 est retiré.
La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l'amendement n° 74.
Mme Annie David. Monsieur le ministre, j’ai sans doute mal compris vos explications sur notre amendement et sur le précédent amendement du groupe socialiste.
Nous demandons la suppression de l’article 1er bis, qui prévoit que des accords d’intéressement peuvent être conclus au niveau des branches. Or vous avez déclaré que l’intégration du suivi de l’intéressement dans les négociations de branche risquait d’apporter de la confusion.
En somme, à un instant donné, vous redoutez que nous n’apportions de la confusion et, à l’article suivant, vous estimez au contraire qu’il faut maintenir le dispositif, car il offre une possibilité intéressante. Je ne comprends pas les deux explications que vous nous avez données à quelques minutes d’intervalle. Il me semble qu’elles se contredisent quelque peu.
Je souhaiterais donc que vous me redonniez des explications sur l’article 1er bis.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. Un accord de branche peut prévoir un canevas type. Rien n’empêche ensuite les entreprises concernées de faire du sur-mesure.
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er bis.
M. Guy Fischer. Le groupe CRC vote contre !
(L'article 1er bis est adopté.)
Articles additionnels après l'article 1er bis
M. le président. L'amendement n° 62 rectifié, présenté par Mmes Henneron et Procaccia, M. Revet et Mmes Rozier et Sittler, est ainsi libellé :
Après l'article 1er bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le premier alinéa de l'article L. 3312-4 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'un redressement de cotisations a pour origine une mauvaise application des dispositions prévues à l'alinéa précédent, le redressement de cotisations et contributions ne portera que sur la fraction substituée sauf en cas de mauvaise foi ou d'agissements répétés du cotisant. »
II. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Françoise Henneron.
Mme Françoise Henneron. Monsieur le président, si vous l’acceptez, je vais défendre simultanément l’amendement n° 64 rectifié, qui est pratiquement identique, mais qui tend à insérer un article additionnel après l’article 2 sexies.
L’article L. 3312-4 du code du travail prévoit que les sommes attribuées aux bénéficiaires, en application de l’accord d’intéressement, n’ont pas le caractère de rémunération. Ces sommes ne peuvent se substituer à aucun des éléments de rémunération, au sens des mêmes articles, en vigueur dans l’entreprise ou qui deviennent obligatoires en vertu de dispositions légales ou de clauses contractuelles sauf si un délai de douze mois s’est écoulé entre le dernier versement de cet élément de rémunération et la date d’effet de cet accord.
La jurisprudence est sévère sur ce point estimant que la moindre substitution, comme, par exemple, la suppression d’une prime de moindre importance après la mise en place de l’intéressement, caractérise la substitution et remet en cause l’ensemble des exonérations sociales.
Il convient donc de modérer ce principe en ne prévoyant le redressement que sur la fraction substituée, sauf en cas de mauvaise foi ou d’agissements répétés du cotisant.
On retrouve d’ailleurs ce même principe à l’article L. 133-4-3 du code de la sécurité sociale pour les titres restaurant, ces dispositions ayant été votées lors de la loi de modernisation de l’économie.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement a donné lieu à un débat en commission. Nous sommes bien sûr soucieux de ne pas affaiblir la portée du principe de non-substitution, alors même que nous nous engageons dans une politique qui vise à dynamiser l’intéressement. Dans le même temps, la sanction applicable n’est-elle pas, parfois, un peu disproportionnée ?
La commission a donc donné un avis de sagesse et souhaiterait recevoir l’éclairage du Gouvernement sur ce sujet.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement saura-t-il être éclairant ? C’est la responsabilité qui, à la demande de madame le rapporteur, pèse sur mes épaules. (Sourires.)
Je comprends parfaitement le sens de cet amendement. Il s’agit de déterminer s’il est possible, tout en luttant contre la substitution, d’éviter d’appliquer un redressement trop important, cela sans entrer dans la logique de la bonne ou de la mauvaise foi. Je saisis donc bien le principe visé.
Mais j’ai également examiné en détail cet amendement et j’y vois un problème pratique. Comment réellement identifier la part d’intéressement qui a été versée en plus ?
Après de nombreuses interrogations, nous sommes persuadés que ce point risque d’être un facteur d’insécurité juridique et que nous risquons d’être confrontés à des difficultés au niveau des entreprises redressées.
Comment allons-nous calculer la cotisation réellement due en fonction de l’appréciation qui peut être portée par les URSSAF sur la bonne ou mauvaise foi de l’employeur ? Comment déterminer le surplus qui, justement, dépasse ou diffère de la portion de rémunération ?
Ce sujet est très complexe et vous avez raison de le pointer du doigt.
Pour notre part, nous sommes persuadés que l’amendement, s’il est adopté, ne simplifiera pas la gestion des entreprises. Voilà pourquoi je vous demande de le retirer. À défaut, je rendrai un avis défavorable.
Comprenez-bien que cette position est liée à la seule raison que j’invoque ! J’ai conscience que le fait de baser le calcul de la pénalité sur l’intégralité de l’intéressement est coûteux, mais je ne vois pas trop comment procéder en se basant sur un différentiel.
Je vous parle en toute franchise. Je ne rejette pas en bloc cette proposition et je n’ai pas de certitude complète sur le sujet. Mais elle pose une question de faisabilité et d’insécurité juridique.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Henneron.
Mme Françoise Henneron. Je retire l’amendement n° 62 rectifié.
M. le président. Madame Henneron, dois-je comprendre que vous retirez également l’amendement n° 64 rectifié, qui est pratiquement identique, mais s’applique, lui, au redressement de cotisations sur les plans d’épargne d’entreprise et qui appellera sans doute le même avis du Gouvernement ?
Mme Françoise Henneron. Dans ces conditions, je retire également l’amendement n° 64 rectifié.
M. le président. Les amendements nos 62 rectifié et n° 64 rectifié sont retirés.
L'amendement n° 38, présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article premier bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. L'article L. 3322-2 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 3322-2. - À compter du 1er janvier 2009, toute entreprise employant habituellement au moins dix salariés, quelles que soient la nature de son activité et sa forme juridique, est soumise aux obligations de la présente section, destinées à garantir le droit des salariés à participer aux résultats de l'entreprise.
« Pour l'application des dispositions qui précèdent, l'effectif des salariés employés habituellement par les entreprises de travail temporaire est calculé en ajoutant au nombre des salariés permanents le nombre moyen par jour ouvrable des salariés qui ont été liés par un contrat à durée déterminée ou un contrat de travail temporaire au cours de l'exercice.
« Les entreprises constituant une unité économique et sociale reconnue dans les conditions prévues à l'article L. 2322-4 et employant habituellement au moins 10 salariés sont également soumises aux obligations de la présente section, qu'elles mettent en œuvre soit par un accord unique couvrant l'unité économique et sociale, soit par des accords distincts couvrant l'ensemble des salariés de ces entreprises. »
II. Les articles L. 3322-3 et L. 3322-4 du même code sont abrogés.
III. La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I et II ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
IV. La perte de recettes résultant pour l'État des I et II ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Cet amendement vise à ce que, à compter du 1er janvier 2009, dans toute entreprise employant habituellement au moins dix salariés, la participation soit rendue obligatoire.
Ce faisant, nous souhaitons que se développe la négociation dans l’entreprise, la négociation sur la participation ne pouvant éluder la négociation sur les salaires.
Par ailleurs, cette mesure serait de nature à conduire les salariés, y compris dans les petites entreprises, à se constituer une épargne de précaution à condition, bien entendu, que celle-ci demeure bloquée pendant cinq ans au minimum.
Aujourd’hui, quand on regarde l’ensemble des éléments – rémunérations et avantages annexes –, on constate que l’on est en présence d’une échelle salariale et d’un droit social à deux vitesses. Tout demandeur d’emploi ira de préférence, s’il le peut, dans une grande entreprise, sachant que les salariés des petites entreprises sont plus mal lotis.
Si la participation doit demeurer un élément important des rapports sociaux, ce à quoi nous ne sommes pas opposés, elle doit concerner aussi les petites et moyennes entreprises, au-delà de dix ou vingt salariés.
À cet égard, nous souhaitons exactement l’inverse de ce que propose le gouvernement : que l’on franchisse un pas en faveur de l’extension d’une véritable participation, conforme à l’éthique qui a présidé à sa mise en œuvre, en faveur des salariés comme de l’entreprise.
La participation ne doit pas devenir un morceau de salaire sans cotisation sociale. Sinon, elle perd sa valeur, qui justifie seule son régime fiscal.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement, qui propose de ramener à dix salariés le seuil de la participation obligatoire, est un peu curieux. Cette mesure ne nous paraît pas opportune. Les petites et moyennes entreprises employant de dix à quarante-neuf salariés risquent d’avoir bien du mal à respecter cette obligation, qui suppose de disposer d’un minimum de ressources techniques, juridiques ou de relations humaines, dans l’entreprise.
Il me semble effectivement curieux et quelque peu surprenant que ce soit le groupe socialiste qui propose cet amendement. En effet, je l’ai bien souvent entendu craindre une substitution de la participation aux salaires. Et, dans cet amendement, il propose d’étendre le dispositif à un grand nombre de petites entreprises !
Je suis donc surprise et, bien évidemment, la commission rendra un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. J’interviens à titre personnel, car cet amendement n’a pas été discuté au sein de la commission des finances.
Depuis longtemps, j’entends les petites entreprises exprimer des demandes dans ce sens. Je trouve donc normal d’abaisser le seuil de la participation obligatoire. Il y a tellement d’entreprises de moins de cinquante salariés en France qui ne peuvent pas bénéficier de ces dispositions ! Je suis donc favorable à la fixation de ce seuil, si ce n’est à dix, du moins à vingt salariés.
Évidemment, le seuil avait été fixé à cinquante salariés, dans le cadre d’un dispositif reposant sur des accords passés avec les comités d’entreprise. Cependant, à partir du moment où la participation est régie par des règles bien précises, c’est différent, et la diminution de ce seuil sera très appréciée, en particulier par les petites et moyennes entreprises.
C’est pourquoi je suis favorable à cet amendement. Il me semble que ce serait une bonne mesure pour l’ensemble des petites entreprises et de leurs salariés, même si elle est proposée par le groupe socialiste. D’ailleurs, cela n’a rien d’anormal, puisque nous sommes tous là pour favoriser l’activité économique et la motivation des salariés. Permettre à ces derniers de bénéficier d’une participation n’est-ce pas un bon facteur de motivation ?
Cela dit, je souhaiterais déposer un sous-amendement visant à fixer le seuil à vingt salariés.
M. le président. Je suis donc saisi d’un sous-amendement n° 102, présenté par M. Dassault, et ainsi libellé :
Aux premier et troisième alinéas du texte proposé par l'amendement n° 38 pour l'article L 3322-2 du code du travail, remplacer le chiffre :
dix
par le chiffre :
vingt
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Je ferai la même réponse que précédemment. Je le répète, il est possible, aujourd’hui, de mettre en place des accords de participation dans les entreprises, indépendamment du nombre de leurs salariés. Je suis opposée, à titre personnel, à en faire une obligation pour les entreprises de moins de cinquante salariés, alors même que ces processus demandent une grande assistance, aussi bien juridique que technique. Je suis donc défavorable, à titre personnel, à ce sous-amendement et je pense que la commission souscrirait à cet avis : oui à l’incitation, non à l’obligation.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 38.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 2
I A. - À la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 3323-5 du code du travail, le mot : « huit » est remplacé par le mot : « cinq ».
I B. - Au début de la dernière phrase du deuxième alinéa de l’article L. 3323-5 du même code, le mot : «. Elles » est remplacé par les mots : «, sauf si le salarié demande le versement de tout ou partie des sommes correspondantes dans un délai fixé par décret. La demande peut être présentée à l’occasion de chaque versement effectué au titre de la répartition de la réserve spéciale de participation. Les sommes précitées, versées à des comptes courants, ».
I. - La section 3 du chapitre IV du titre II du livre III de la troisième partie du même code est intitulée : « Règles de disponibilité des droits des salariés ».
II. - L’article L. 3324-10 du même code est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par les mots et deux phrases ainsi rédigées : «, sauf si le salarié demande le versement de tout ou partie des sommes correspondantes dans un délai fixé par décret. La demande peut être présentée à l’occasion de chaque versement effectué au titre de la répartition de la réserve spéciale de participation. Toutefois, un accord collectif qui, en application de l’article L. 3324-2, établit un régime de participation comportant une base de calcul différente de celle établie à l’article L. 3324-1, peut prévoir que tout ou partie de la part des sommes versées aux salariés au titre de la participation aux résultats de l’entreprise supérieure à la répartition d’une réserve spéciale de participation calculée selon les modalités de l’article L. 3324-1 n’est négociable ou exigible qu’à l’expiration d’un délai de cinq ans à compter de l’ouverture de ces droits. » ;
2° Au début du second alinéa, sont insérés les mots : « Lorsque les sommes ont été affectées dans les conditions prévues à l’article L. 3323-2, ».
III. - Dans le premier alinéa de l’article L. 3325-2 du même code, les mots : « revenant aux salariés au titre de la participation » sont remplacés par les mots : « affectées dans les conditions prévues à l’article L. 3323-2 ».
IV. - Le b du 5 de l’article 158 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sous réserve de l’exonération prévue à l’article 163 bis AA, les dispositions du a sont également applicables aux sommes revenant aux salariés au titre de la participation aux résultats de l’entreprise en application du titre II du livre III de la troisième partie du code du travail. »
V. - Le premier alinéa de l’article 163 bis AA du même code est complété par les mots : « lorsqu’elles ont été affectées dans les conditions prévues à l’article L. 3323-2 du même code ».
VI. - Les I à V sont applicables aux droits à participations des salariés aux résultats de l’entreprise qui n’ont pas été affectés en application de l’article L. 3323-2 du code du travail à la date de publication de la présente loi.
M. le président. Je suis saisi de quinze amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 39 est présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L’amendement n° 75 est présenté par Mmes David, Pasquet et Hoarau, MM. Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle, pour présenter l’amendement n° 39.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Nous proposons la suppression de cet article 2 pour plusieurs raisons, qui tiennent tant à l’entreprise qu’au salarié.
Le fondement politique de la participation est que le salarié participe aux fruits de la croissance – quand ils existent… –, tout en se constituant une épargne et en la plaçant, pour au moins cinq ans, dans l’entreprise. Celle-ci dispose alors de fonds propres plus importants, qui garantissent sa stabilité.
Décider de débloquer la participation à tout va, c’est porter atteinte à cet équilibre et fragiliser les entreprises, notamment en cas d’offre publique d’achat hostile.
De plus, les entreprises vont avoir besoin de fonds propres au moment où les lignes de crédits vont être réduites, voire annulées, du fait de l’impéritie des banques, lesquelles se sont mises dans une situation catastrophique, ce qui va les amener à faire payer les contribuables ainsi que leurs clients et, parmi ceux-ci, notamment les entreprises.
Nombre de chefs d’entreprise sont déjà inquiets, tout comme les salariés le sont maintenant pour leur emploi. C’est donc le moment que vous choisissez pour poursuivre aveuglément sur votre lancée et présenter un texte supposé favoriser le pouvoir d’achat. Mais il ne favorise rien du tout, puisque vous proposez de distribuer aux salariés ce qui leur appartient déjà et qui est temporairement bloqué.
Vous « offrez » aux salariés bénéficiant de la participation la possibilité de remettre en cause leur épargne de précaution, en prévoyant, en plus, une ponction par le biais de l’impôt sur le revenu. Décidément, vous ne laissez échapper aucune occasion de combler le déficit du budget de l’État ! Vous faites flèche de tout bois pour réparer l’erreur tragique du paquet fiscal, et ce au détriment de l’intérêt des salariés et des entreprises.
Dans cette affaire, l’entêtement à ne pas vouloir relancer une politique salariale et les bricolages budgétaires se rejoignent pour fabriquer des dispositions à contresens des mesures qu’exige l’actuelle situation de crise.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour présenter l’amendement n° 75.
M. Guy Fischer. L’article 2 a pour objet de poursuivre la logique, à l’œuvre depuis 2004, qui revient à multiplier les mesures de déblocage exceptionnel de la participation, la dernière en date ayant été instaurée par la loi du 8 février 2008 pour le pouvoir d’achat.
Cet article modifie en effet, pour les inscrire dans la durée, les conditions de disponibilité des droits à participation : le salarié disposerait ainsi du libre choix entre le versement des sommes issues de la participation et le placement de ces droits sous la forme existante du blocage.
Certes, le projet de loi ne crée pas, à proprement parler, une nouvelle dérogation au blocage de la participation, mais il instaure une option pour le salarié entre disponibilité immédiate et blocage de ses droits.
Du reste, l’esprit de cette disposition est identique à celui qui vous a conduit à multiplier les mesures de déblocage exceptionnel. L’idée est toujours la même : il s’agit de redonner du pouvoir d’achat aux salariés. Or, si la solution résidait dans le déblocage de la participation, le pouvoir d’achat des salariés n’aurait pas continué à chuter après le vote de la loi du 9 août 2004 relative au soutien à la consommation et à l’investissement.
Et n’oublions pas que la loi TEPA du 21 août 2007 ainsi que la loi pour le pouvoir d’achat, déjà citée, étaient également censées relancer le pouvoir d’achat. C’est dire si toutes ces mesures ont été efficaces…
En fait, c’est du vent !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Mais non ! C’est une brise ! (Sourires sur le banc des commissions.)
M. Guy Fischer. Mais si, monsieur le président de la commission !
Nous doutons donc de l’efficacité du dispositif présenté par le Gouvernement, d’autant qu’il va à l’encontre d’une vraie politique salariale.
Pour autant, non contente d’occulter la question des salaires par le biais de la participation, la majorité a décidé d’étendre encore davantage le dispositif de l’article 2.
L’Assemblée nationale, sur la proposition du rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, a en effet modifié le régime du déblocage de la participation dans le cas où les salariés sont soumis au régime d’autorité.
Jusqu’à présent, les avoirs étaient bloqués pendant huit ans. Or la majorité a décidé de ramener ce délai à cinq ans.
Cette disposition traduit la volonté de transformer, à terme, la participation en une épargne immédiatement disponible et, partant, de supprimer toutes les barrières à son blocage.
Mais alors, pourquoi ne pas directement augmenter les salaires ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Mais non ! On veut développer les plans d’épargne retraite !
M. Guy Fischer. C’est une question, monsieur le président About, à laquelle nous sommes très attachés !
En fait, la réponse tient en quelques mots : les employeurs préfèrent privilégier des éléments de rémunération variables et individualisés plutôt que de s’engager dans une politique d’augmentation des salaires. Cela renvoie les salariés à une relation individualisée, donc inégalitaire, avec leur employeur. Tout à l’heure, M. Dassault n’a pas dit autre chose : pour ceux qui sont un peu mieux considérés, on donne un peu plus !
L’épargne salariale ne corrige pas les inégalités de salaires ; au contraire, elle les amplifie. C’est ce qu’a démontré l’INSEE dans une étude publiée en septembre 2006 et intitulée Épargne salariale, des pratiques différenciées selon les entreprises et les salariés.
Lorsque l’épargne salariale fait un bond, on constate systématiquement que les salaires, eux, ne progressent pas. Ces tendances, démontrées par l’INSEE, confirment ce que nous ne cessons de répéter depuis plusieurs années maintenant : le danger est réel de voir, à plus ou moins court terme, l’épargne salariale, comme l’intéressement d’ailleurs, se substituer à une véritable politique d’augmentation des salaires.
C’est pourquoi nous demandons la suppression de cet article 2.
M. le président. Les quatre amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 3 est présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales.
L’amendement n° 22 est présenté par M. Dassault, au nom de la commission des finances.
L’amendement n° 40 est présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L’amendement n° 76 est présenté par Mmes David, Pasquet et Hoarau, MM. Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Supprimer le I A de cet article.
La parole est à Mme le rapporteur, pour présenter l’amendement n° 3.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. L’Assemblée nationale a souhaité ramener de huit à cinq ans la durée de blocage des fonds issus de la participation dans le cas où un régime « d’autorité » est en vigueur. Ce dernier est appliqué d’office lorsqu’une entreprise, légalement tenue de mettre en place un accord de participation parce qu’elle emploie plus de cinquante salariés, s’abstient de le faire.
Cette mesure, en alignant la durée de blocage sur celle qui est applicable à un accord de participation de droit commun, risque cependant de décourager la conclusion d’accords de participation négociés. En effet, quelle incitation y a-t-il à signer un accord de participation si le régime applicable en l’absence d’accord est plus intéressant que le régime de droit commun ? Il faut se souvenir en effet que le taux de rémunération des fonds de la participation est plus élevé en cas d’application du régime d’autorité, puisqu’il correspond au taux moyen de rendement des obligations des sociétés privées majoré d’un tiers.
Afin de conserver l’incitation à conclure un accord de participation, la commission propose donc de maintenir la durée du blocage à huit ans en cas d’application du régime d’autorité.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° 22.
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Je n’ai rien à ajouter aux propos de Mme le rapporteur.
M. le président. La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle, pour présenter l’amendement n° 40.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Nous avons déposé cet amendement pour les mêmes raisons que celles qui viennent d’être exposées par Mme le rapporteur.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l’amendement n° 76.
Mme Annie David. Mme le rapporteur a tout dit. Je n’allongerai donc pas le débat.
M. le président. L’amendement n° 41, présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer le I B de cet article.
La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Il s’agit d’un amendement de cohérence, qui tend à supprimer, dans le cadre du régime d’autorité, la possibilité de débloquer les sommes incluses dans la réserve de participation.
M. le président. L’amendement n° 23, présenté par M. Dassault, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I. À la fin de la première phrase du I B de cet article, remplacer les mots :
dans un délai fixé par décret
par les mots :
dans des conditions fixées par décret
II. En conséquence, à la fin de la première phrase du 1° du II de cet article, remplacer les mots :
dans un délai fixé par décret
par les mots :
dans des conditions fixées par décret
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Il s’agit d’un amendement de précision.
Aux termes de l’article 2 du projet de loi, le salarié peut disposer immédiatement de ses droits acquis annuellement au titre de la participation.
Cet amendement vise à prévoir qu’un décret doit préciser toutes les conditions relatives à la demande du salarié, et non pas seulement le délai pour effectuer cette demande.
M. le président. L’amendement n° 4, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Avant le I de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
I C. - L’article L. 3323-9 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’article L. 3324-10, l’accord de participation applicable dans ces sociétés peut prévoir que tout ou partie de la réserve spéciale de participation n’est exigible qu’à l’expiration d’un délai de cinq ans à compter de l’ouverture de ces droits. »
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement a pour objet de permettre aux accords de participation conclus dans les sociétés coopératives de prévoir un blocage obligatoire de la participation pendant cinq ans. Cette dérogation au principe de liberté d’option du salarié introduit par le projet de loi nous paraît justifiée par les modalités d’organisation et de financement des coopératives.
Dans ces dernières, les sommes issues de la participation jouent en effet un rôle considérable dans la constitution des fonds propres. Afin de ne pas les fragiliser, surtout dans un contexte international qui rend plus difficile l’accès au crédit bancaire, l’accord de participation pourra prévoir – mais ce ne sera qu’une faculté – que la participation est obligatoirement bloquée pendant cinq ans.
M. le président. L’amendement n° 42, présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer le II de cet article.
La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Il s’agit d’un amendement de cohérence.
M. le président. L’amendement n° 65 rectifié, présenté par Mmes Procaccia, Rozier, Henneron, Papon, Bout et Garriaud-Maylam et M. Cambon, est ainsi libellé :
Après le II de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Toutefois, à titre transitoire, le 1° du II n’est pas applicable à la part des sommes versées aux salariés au titre de la participation des salariés aux résultats de l’entreprise supérieure à la répartition d’une réserve spéciale de participation calculée selon les modalités de l’article L. 3324-1 du code du travail pour l’exercice en cours et lui seul, à la date de publication de la présente loi.
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Il s’agit d’améliorer une disposition introduite par l’Assemblée nationale, relative à un régime de participation dérogatoire.
Des entreprises, certes peu nombreuses, ont signé des accords qui sont d’ores et déjà en cours de mise en œuvre. L’objet de cet amendement est, non pas du tout de remettre en cause les accords existants, mais d’instaurer une dérogation de courte durée, afin de permettre à ces entreprises de prendre le temps de procéder aux négociations nécessaires.
M. le président. L’amendement n° 5, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le VI de cet article :
VI. - Les I à V sont applicables aux droits à participation des salariés aux résultats de l’entreprise attribués au titre des exercices clos après la promulgation de la présente loi.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement vise à rendre les dispositions de l’article 2 applicables à la participation distribuée au titre des exercices clos après la promulgation de la loi. Il s’agit de donner un délai aux entreprises pour s’adapter aux nouvelles dispositions légales, dans la mesure où elles doivent en effet organiser une procédure de consultation de leurs salariés afin que ceux-ci indiquent s’ils souhaitent, ou non, le versement immédiat de leur participation.
M. le président. L’amendement n° 24, présenté par M. Dassault, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le VI de cet article :
VI. - Les I à V sont applicables aux droits à participations des salariés aux résultats de l’entreprise qui n’ont pas été affectés en application de l’article L. 3323-2 du code du travail à la date de publication de la présente loi, sous réserve de la mise en œuvre d’une période transitoire définie par décret pour les entreprises dont l’exercice comptable est clos avant le 31 décembre 2008.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Cet amendement est quasiment identique à celui que vient de présenter Mme le rapporteur.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 43 est présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L’amendement n° 77 est présenté par Mmes David, Pasquet et Hoarau, MM. Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les dispositions du présent article ne s’appliquent pas aux sociétés coopératives ouvrières de production régies par la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978 portant statut des sociétés coopératives ouvrières de production au sein desquelles ont été conclus des accords dans les conditions prévues à l’article L. 3324-2 du code du travail.
La parole est à Mme Gisèle Printz, pour présenter l’amendement n°°43.
Mme Gisèle Printz. Mme le rapporteur l’a indiqué, la question des SCOP, les sociétés coopératives ouvrières de production, n’est pas mineure.
Les SCOP emploient 37 000 salariés : 98% d’entes elles ont un accord dérogatoire qui les conduit à répartir une participation annuelle représentant 40 % de leur bénéfice.
Bon nombre d’entre elles sont issues de la volonté de certains salariés de reprendre des entreprises, en faisant le sacrifice qui consiste à renoncer temporairement à un emploi pour permettre à ces entreprises et au bassin d’emploi de survivre.
Si les SCOP ne peuvent plus compter sur leurs fonds propres en quantité suffisante et durable, ces opérations seront vouées à l’échec, d’autant que les banques seront encore plus exigeantes à leur égard.
Nous ne pouvons que relever un nouveau contresens dans cette « politique de cavalerie » autour du pouvoir d’achat. Le discours incitant à la création et à la reprise d’entreprise est battu en brèche par de tels projets de loi.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l’amendement n° 77.
Mme Annie David. Alors que la crise financière continue à s’étendre, malgré les milliards débloqués par le Gouvernement, nombreux sont celles et ceux qui craignent, à raison, une contagion à ce que l’on appelle l’économie réelle. Les récents communiqués des grandes entreprises de l’automobile attestent déjà que la crise ne sera pas sans conséquence pour les salariés de notre pays.
Or cette crise pourrait ne pas être sans conséquences pour les sociétés coopératives de production, qui sont des sociétés atypiques tant par leur mode de fonctionnement – la cogestion – que par leur organisation financière. En effet, le capital des SCOP est majoritairement, quand ce n’est pas totalement, détenu par les salariés eux-mêmes, qui revêtent le statut de salariés actionnaires. Et s’il existe différents modes d’intéressement, une partie non négligeable de la participation des salariés est réinvestie dans l’entreprise, sous la forme d’actions ou de parts sociales. Aussi existe-t-il dans les SCOP de nombreux accords dérogatoires – cela concerne 98 % des 1 700 coopératives ouvrières de production – qui prévoient que 40 % des bénéfices annuels des SCOP sont répartis sous forme de participation salariale.
Il nous apparaît donc très important de prendre les mesures nécessaires pour assurer l’équilibre et la pérennité des entreprises coopératives de production. En effet, les sommes dont nous venons de parler, ces bénéfices répartis, partagés et réinvestis sous forme de parts sociales, constituent une fraction non négligeable des investissements des entreprises en question.
Aussi, permettre un déblocage anticipé, un mécanisme de mise à disposition permanente des fonds, constituerait un risque considérable pour les SCOP elles-mêmes puisque cela les priverait de manière certaine des fonds qui sont nécessaires à leur autofinancement.
Nous ne pouvons accepter que cette mesure vienne affecter des entreprises qui emploient plus de 37 000 salariés et qui contribuent réellement, en raison de leur mode d’organisation, à faire reconnaître et à revaloriser les revenus du travail.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Les amendements identiques nos 39 et 75 visent à priver les salariés de la nouvelle liberté de choix portant sur les modalités d’utilisation des sommes versées au titre de la participation, qui est l’une des dispositions essentielles du projet de loi. La commission ne peut donc qu’y être défavorable.
La commission est en revanche favorable aux amendements nos 22, 40 et 76, identiques à l’amendement n° 3 de la commission.
Madame Jarraud-Vergnolle, le I B de l’article 2, introduit à l’Assemblée nationale, vise à laisser aux salariés couverts par un régime d’autorité la même liberté de choix qu’aux salariés couverts par un accord de participation de droit commun. Il nous paraît donc utile de conserver ces dispositions. La commission émet en conséquence un avis défavorable sur votre amendement n° 41.
La précision rédactionnelle préconisée par M. le rapporteur pour avis dans l’amendement n° 23 est tout à fait bienvenue. La commission y est extrêmement favorable.
L’amendement n° 42 vise à supprimer totalement le cœur de l’article 2. La commission ne peut qu’y être défavorable.
L’amendement n° 65 rectifié vise à donner du temps aux entreprises qui disposent d’un accord de participation dérogatoire afin de négocier sur le point de savoir si la part dérogatoire de la participation doit être bloquée ou non.
La commission s’en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement de Mme Procaccia et souhaite entendre les explications éclairées de M. le ministre sur cette question.
L’amendement n° 24 de M. Dassault vise, comme l’amendement n° 5 de la commission, à différer légèrement la mise en application de l’article 2, qui donne une nouvelle liberté de choix aux salariés pour utiliser leur participation.
Nous proposons d’appliquer l’article au titre des exercices clos après l’entrée en vigueur de la loi. La commission des finances suggère de prévoir une période transitoire au profit des entreprises dont l’exercice est clos avant la fin de l’année. Elle propose donc de retarder encore davantage l’entrée en vigueur de la mesure. Par ailleurs, les contours de cette période transitoire seraient fixés par décret, sans que la loi n’impose aucune contrainte.
Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
L’amendement n° 43 tend, comme l’amendement n° 4 de la commission, à prévoir des règles dérogatoires pour les sociétés coopératives. L’amendement de la commission offre cependant davantage de souplesse, en renvoyant à l’accord de participation le soin de définir si tout ou partie de la réserve de participation est obligatoirement bloqué.
Je propose donc à nos collègues socialistes de soutenir plutôt l’amendement de la commission et de bien vouloir retirer le leur. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
La commission émet le même avis défavorable sur l’amendement n° 77, identique à l’amendement n° 43.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Je ne peux être favorable aux amendements identiques nos 39 et 75, qui tendent à priver les salariés d’une liberté de choix. Laissons les salariés décider !
Je suis très heureux de donner un avis favorable sur l’amendement n° 76 de Mme David, qui se demande souvent si le Gouvernement l’entend. La réponse est oui ! Vous voilà rattrapée par le principe de réalité !
Mme Annie David. Il est identique à celui de la commission !
M. Xavier Bertrand, ministre. J’émets le même avis favorable sur les amendements identiques n° 40 de Mme Jarraud-Vergnolle, n° 22 de M. Serge Dassault et n° 3 de la commission. Il fallait en effet, s’agissant du régime d’autorité, maintenir une période plus longue.
Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 41.
Il est, en revanche, favorable à l’amendement n° 23 de M. Dassault.
Compte tenu des explications de Mme le rapporteur, le Gouvernement a modifié sa position sur l’amendement n° 4 et s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 42.
J’en viens à l’amendement n° 65 rectifié de Mme Procaccia. Afin de répondre aux demandes de certaines entreprises, a été adopté à l’Assemblée nationale un amendement tendant à permettre le blocage de la partie dérogatoire de la participation par accord. Ces entreprises ont été entendues et il leur suffit aujourd’hui de renégocier un accord sur le seul point visé, sans devoir attendre la renégociation globale de l’accord de participation.
Cette garantie a d’ores et déjà été introduite lors des débats à l’Assemblée nationale, au cours desquels j’avais tenu à apporter tous les éclaircissements nécessaires. On m’a d’ailleurs rapporté qu’un véritable apaisement s’était ensuivi au sein des entreprises concernées.
Votre amendement étant satisfait, madame Procaccia, je vous demande donc de bien vouloir le retirer. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
J’émets un avis favorable sur l’amendement n° 5 de la commission.
Cet amendement n° 5 apportant plus de précisions que l’amendement n° 24, je me permets de vous demander, monsieur Dassault, de bien vouloir retirer celui-ci. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Enfin, le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques nos 43 et 77.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 39 et 75.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 3, 22, 40 et 76.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Madame Procaccia, l’amendement n° 65 rectifié est-il maintenu ?
Mme Catherine Procaccia. Tout dépend de la date à laquelle sera promulguée cette loi ! Il faut en effet laisser le temps aux entreprises de négocier. M. le ministre l’a dit : nous sommes tous attachés à la négociation. Or, lorsqu’une entreprise fait beaucoup en la matière, il paraît logique qu’elle souhaite obtenir un délai de négociation suffisant.
Si la loi est promulguée dans les deux ou trois semaines qui suivront son adoption, cela peut poser un problème. Si elle l’est dans deux ou trois mois, cela laissera à l’accord de 2008 le temps de s’appliquer.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. Oui, madame Procaccia, l’accord de 2008 aura le temps de s’appliquer. Évidemment, la date de promulgation dépendra de la durée des débats. Mais, si je vous apporte des motifs d’apaisement, personne n’aura à cœur de les faire durer plus qu’il ne faut !
Je parle sous le contrôle de M. le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement. Vous comprendrez donc que je fasse preuve de prudence oratoire ! (Sourires sur les travées de l’UMP.)
La loi devrait être promulguée en début d’année. Le temps que s’ouvre une négociation, le délai sera donc suffisamment large pour tenir compte des résultats à venir. Je pense que les délais normaux sont suffisants pour vous donner satisfaction.
M. le président. Madame Procaccia, compte tenu des explications de M. le ministre, maintenez-vous l’amendement n° 65 rectifié ?
Mme Catherine Procaccia. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L’amendement n° 65 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 5.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l’amendement n° 24 n’a plus d’objet.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 43 et 77.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 2, modifié.
(L’article 2 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 2
M. le président. L’amendement n° 44 rectifié, présenté par M. Godefroy, Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, M. Desessard et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le septième alinéa (6°) de l'article L. 2271-1 du code du travail est complété par les mots : « et l'évolution des accords d'intéressement et de participation ».
La parole est à Mme Jacqueline Alquier.
Mme Jacqueline Alquier. L’article L. 2271-1 du code du travail précise les compétences de la Commission nationale de la négociation collective, la CNNC. Parmi ces compétences, au nombre de neuf, figure le suivi de l’évolution des salaires effectifs et des rémunérations minimales de branches.
Nous proposons d’y ajouter l’examen de l’évolution des accords d’intéressement et de participation. Les partenaires sociaux auront ainsi l’occasion de mesurer les effets du rapprochement entre l’intéressement et la participation, et d’un glissement possible de la participation vers l’intéressement, ainsi que les effets de substitution des salaires vers l’intéressement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. La commission vous proposera un amendement tendant à créer un conseil d’orientation de la participation, de l’intéressement, de l’épargne salariale et de l’actionnariat salarié, qui se substituerait au Conseil supérieur de la participation. L’élargissement proposé des compétences de la CNNC ne lui paraît donc pas opportun.
La commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 25, présenté par M. Dassault, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - La section 1du chapitre IV du titre II du livre III de la troisième partie du code du travail est ainsi modifiée :
1° L'article L. 3324-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 3324-1. - La réserve spéciale de participation est égale au tiers du bénéfice après impôt. »
2° En conséquence, la troisième phrase du premier alinéa de l'article L. 3324-2 est supprimée.
II. - La perte de recettes résultant pour l'État des dispositions du I est compensée par une augmentation à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des dispositions du I est compensée par une augmentation à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Sans revenir longuement sur les raisons pour lesquelles j’ai déposé cet amendement, je tiens à rappeler deux choses.
D’abord, la formule de la participation, qui n’a pas été modifiée depuis plus de quarante ans, est désuète. Parfaitement inadaptée à la situation économique actuelle, elle est, de surcroît, absolument incompréhensible. Je souhaite donc, au nom de la commission des finances, que cette formule soit revue.
Ensuite, le Président de la République souhaite qu’il y ait égalité de traitement entre les salariés et les actionnaires, entre la participation et les dividendes. Ce n’est pas du tout le cas aujourd’hui. C’est la raison pour laquelle la commission des finances propose cette répartition du résultat en trois tiers, un tiers pour les actionnaires, un tiers pour les salariés et un tiers pour l’investissement.
J’ai, toutefois, conscience d’un certain nombre d’oppositions fondées sur le fait que cette règle peut limiter la marge d’autofinancement de l’entreprise.
Je serais donc enclin à proposer, bien que cela n’ait pas été discuté en commission des finances, une rectification de l’amendement, qui ne remettrait toutefois pas en cause l’égalité de traitement entre salariés et actionnaires, laquelle est fondamentale pour préserver la motivation des salariés, de manière que ceux-ci ne puissent plus se dire moins bien lotis que les patrons.
On peut envisager une solution telle que serait laissé à l’entreprise le soin de décider quelle part du bénéfice reviendra aux actionnaires, étant entendu qu’une part égale sera ensuite destinée aux salariés. Puisque le Président de la République a voulu que cette opération procure aux salariés un gain de pouvoir d’achat, il faudra en tout cas aller au-delà de l’actuelle formule, qui leur donne à peu près 10 %.
Je propose que le minimum de 10 % soit maintenu, sauf dans certains cas. Supposons que les actionnaires souhaitent s’attribuer 20 % du bénéfice ; eh bien, la participation s’établira à 20 %. Et il en ira de même quel que soit le pourcentage retenu par les actionnaires.
Si la nécessité d’autofinancement atteint 100 %, certes, les salariés n’auront rien, mais les actionnaires non plus et l’on peut considérer que la hauteur de l’autofinancement est justifiée par la perspective de profits futurs, auxquels tout le monde à intérêt !
Je serai intéressé de connaître l’avis de M. le ministre sur ce point ou, au moins, avoir l’espoir de pouvoir en rediscuter ultérieurement avec lui
Je crois qu’il faut accepter l’idée de revenir sur la formule actuelle, qui n’est plus adaptée, parce que trop faible. Elle doit être revue sur la base d’une égalité entre les dividendes et la participation des salariés.
On peut rapprocher la position des uns et des autres en faisant en sorte que la motivation des salariés soit encore plus forte puisque la participation tendrait vraiment à suivre les résultats de l’entreprise. Actionnaires et salariés touchant la même somme, c’en serait fini des jalousies !
Je vous propose donc de modifier cet amendement, avec une formule plus souple, qui tient compte du souhait du Président de la République de tendre vers une meilleure participation pour le personnel et une égalité de traitement.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 25 rectifié, présenté par M. Dassault, au nom de la commission des finances, et ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - La section 1 du chapitre IV du titre II du livre III de la troisième partie du code du travail est ainsi modifiée :
1° L'article L. 3324-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 3324-1. - La réserve spéciale de participation est égale au tiers du bénéfice après impôt. Les dividendes versés aux actionnaires sont au plus égaux à la réserve spéciale de participation. »
2° En conséquence, la troisième phrase du premier alinéa de l'article L. 3324-2 est supprimée.
II. - La perte de recettes résultant pour l'État des dispositions du I est compensée par une augmentation à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des dispositions du I est compensée par une augmentation à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je souhaiterais savoir si, dans l’esprit de M. Dassault, il s’agit de maintenir la formule telle qu’elle est aujourd’hui prévue, laquelle associe aussi bien les bénéfices que les capitaux propres, la valeur ajoutée, les salaires, etc., mais assortie d’une obligation de ne pas dépasser, pour ce qui concerne les dividendes versés aux actionnaires, la part donnée aux salariés. À la limite, pourquoi pas ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. L’amendement n° 25 rectifié n’ayant pas été examiné par la commission, je ne peux me prononcer que sur l’amendement n° 25, c’est-à-dire sur la formule des trois tiers.
Je vous le concède, la formule actuelle de calcul de la réserve de la participation est un peu compliquée. Elle introduit plusieurs paramètres – les bénéfices de l’exercice, les capitaux propres, les salaires versés, la valeur ajoutée… Aujourd’hui, notre collègue Serge Dassault voudrait, en fait, ne retenir qu’un tiers des bénéfices nets de la société.
Mais toutes les entreprises n’ont pas les mêmes besoins d’investissement et il n’est pas possible de leur imposer, de manière uniforme, de consacrer un tiers de leurs bénéfices à la réserve spéciale de participation.
En outre, les entreprises qui souhaitent verser un tiers de leurs bénéfices sous forme de participation en concluant un accord dérogatoire à cette fin peuvent déjà le faire. On ne saurait passer à une obligation valant pour toutes les entreprises qui sont sur notre territoire !
Dans ces conditions, la commission émet un avis totalement défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Une fois n’est pas coutume : je ne serai pas sur la même ligne que Mme le rapporteur. En effet, l’avis n’est pas totalement défavorable, il est simplement défavorable, monsieur le rapporteur pour avis. (Sourires.)
Et cela pour une seule et bonne raison : c’est que je comprends le souci qui est le vôtre, monsieur le rapporteur pour avis. Vous voulez aller au-delà, vous voulez faire plus que ce qui est proposé aujourd’hui.
Pour autant, je ne vois pas comment, particulièrement dans les circonstances actuelles – peut-être le discours aurait-il été différent voilà quelques mois –, il serait possible qu’une formule dérogatoire devienne une formule de droit commun. En effet, il n’y a pas deux entreprises qui se ressemblent !
Dans une profession que je connais bien, celle d’agent d’assurance, les besoins d’investissement ne sont pas les mêmes que dans d’autres secteurs. Il est des secteurs où la concurrence est telle que l’investissement est absolument impératif. Bref, rien ne dit que ce tiers puisse être garanti en permanence.
Si vous en faites un principe général, il faut d’ores et déjà imaginer des dérogations possibles. En fin de compte, nous retrouverions avec un système renversé.
Monsieur Dassault, vous m’avez proposé d’en rediscuter avec vous. Tout à l’heure, un autre amendement sera proposé par le rapporteur, Isabelle Debré, qui tendra à élargir les missions du Conseil supérieur de la participation et à en modifier la dénomination en conséquence. Votre suggestion a manifestement vocation à y être débattue. Autrement dit, ce dossier n’est pas enterré. Je ne m’exposerai pas aux habituels commentaires ironiques que suscite, lorsqu’un sujet embarrasse, l’évocation de la création d’une commission. Le Conseil supérieur de la participation ou l’institution amenée à le remplacer sera habilité à se saisir de ce sujet et à étudier l’impact des différentes mesures qui peuvent être envisagées. On interpelle souvent les ministres sur ces fameuses études d’impact. Là, cela vaut la peine d’en réaliser parce que, là, le jeu en vaut vraiment la chandelle !
Vous l’avez dit, monsieur Dassault, le mode de calcul date de 1967. La croissance était alors d’au moins 4 %. Comment mesurer l’impact d’une augmentation de la réserve dans la conjoncture actuelle ?
Dans ces conditions, et compte tenu des circonstances, je vous suggère, si cela est possible, de retirer cet amendement.
En revanche, je ne retire pas ma proposition, monsieur le rapporteur pour avis, de poursuivre vos travaux dont se saisira l’instance qui remplacera probablement le Conseil supérieur de la participation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Je signale que l’amendement initial a été voté à l’unanimité par la commission des finances.
L’amendement rectifié donne simplement plus de souplesse quant à la fixation du montant affectée à la participation des salariés, afin que les besoins de l’entreprise soient respectés, tout en maintenant l’égalité entre actionnaires et salariés, principe fondamental que je veux introduire, conformément au souhait de M. le Président de la République. Cette égalité peut être redéfinie en fonction des besoins de l’entreprise et de son activité.
Dans ces conditions, je ne retire pas l’amendement n° 25 rectifié.
M. le président. La parole est à M. François Marc, pour explication de vote.
M. François Marc. M. Dassault l’a dit, cela fait quarante et un que la formule de calcul de la réserve de participation n’a pas été modifiée. Bien que ce gouvernement, comme M. le ministre vient encore de le laisser entendre, se fait fort de « faire bouger les lignes », il se refuse visiblement à faire évoluer cette formule. Pourtant, la proposition votée à l’unanimité par la commission des finances semble raisonnable.
D’aucuns, il y a peu, annonçaient qu’ils iraient chercher la croissance « avec les dents » !
Mme Nicole Bricq. C’est avec la tête qu’il fallait y aller !
M. François Marc. C’est en effet avec la tête que l’on aurait dû aller chercher le point de croissance manquant, tout simplement en se persuadant de l’efficacité du grand principe d’organisation aujourd'hui appliqué dans la plupart des entreprises et des organisations : mieux on motive le personnel, mieux on motive les acteurs, plus on a de chance de les voir se mobiliser en faveur d’un objectif commun ! Et c’est bien de cela qu’il est question en l’occurrence, puisqu’il s’agit de donner aux entreprises les bases pour fonctionner le plus efficacement possible.
Cela étant, les dysfonctionnements qui expliquent les difficultés rencontrées actuellement pour motiver les salariés font l’objet d’un constat général, d’ailleurs traduit de façon explicite dans le rapport l’Organisation internationale du travail paru ce mois-ci.
D’une part, ce rapport relève en effet un glissement depuis vingt ans de la rémunération du travail au profit de celle du capital. C’est une tendance lourde, et la question fondamentale est de savoir si ce n’est pas une des causes des crises graves que nous vivons et de celles que nous devrons vraisemblablement encore traverser dans les mois qui viennent.
D’autre part, l’OIT démontre que les pays qui ont les taux de croissance les plus importants sont ceux qui disposent des meilleurs mécanismes de solidarité et de répartition des richesses. C’est incontestablement, mes chers collègues, un enseignement dont nous devons nous inspirer, car le classement fait apparaît que, sur ce plan, la France se situe dans le peloton de queue.
Une prise de conscience est nécessaire, et c’est certainement ce qui a conduit la commission des finances à estimer que la proposition que présente depuis déjà deux ou trois ans notre collègue Serge Dassault était porteuse.
Aujourd'hui, en effet, la participation porte à peu près sur 10 % des bénéfices annuels après impôts, ce qui, reconnaissez-le, est très modeste. La formule de calcul est d’ailleurs parlante : est d’abord rémunéré le capital, puis le peu qui reste va au travail.
Il faut changer cette situation, et l’amendement qui nous est proposé répond à cette légitime ambition en visant à instaurer la règle des trois tiers, soit un tiers pour les salariés, un tiers pour les actionnaires et un tiers pour l’autofinancement.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Et que feront les entreprises qui ont besoin de plus d’un tiers pour l’autofinancement ?
M. François Marc. M. Dassault a justement pris en considération la nécessité de laisser plus de souplesse à l’entreprise pour décider de la part qui, dans les deux tiers restants, doit revenir à la rémunération du capital et de celle qui doit être consacrée à l’autofinancement dans son amendement rectifié, qui, pour cette raison, nous paraît encore meilleur que celui qui avait été voté en commission des finances.
Monsieur le ministre, l’amendement n° 25 rectifié constituerait ainsi une avancée qui pourrait se révéler capitale pour atteindre l’objectif que vous nous dites viser, mais sans que cela ne se traduise, à nos yeux, par des progrès très concrets.
Il s’agit là d’une idée vraiment intéressante, que la commission des finances unanime – et j’attire l’attention de tous mes collègues sur cette unanimité – a reconnue comme telle.
Enfin, reconnaissez-le, considérer aujourd'hui que les salariés ne pourraient durablement prétendre qu’à 10 % du bénéfice après impôt reviendrait à figer une situation vieille de quarante ans et qui doit évoluer. C’est la raison pour laquelle nous appelons le Sénat à voter cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote.
Mme Isabelle Pasquet. Certes, l’amendement n° 25 rectifié peut paraître favorable aux salariés en prévoyant une autre répartition des bénéfices.
À notre avis, la notion d’égalité de traitement entre actionnaires et salariés est intéressante et mérite d’être approfondie. À ce titre, nous proposons d’ailleurs de supprimer la phrase : « La réserve spéciale de participation est égale au tiers du bénéfice après impôt. ». Ainsi, l’article L. 3324-1 ne comporterait que la phrase suivante : « Les dividendes versés aux actionnaires sont au plus égaux à la réserve spéciale de participation. »
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je serais assez d’accord !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Moi, j’émettrai un avis défavorable !
Mme Isabelle Pasquet. Je tiens cependant à dire que, même ainsi modifié, l’amendement resterait dans une logique d’éléments aléatoires de rémunération du salarié, logique à laquelle, chacun l’aura compris, nous ne sommes pas favorables.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Le premier argument en faveur du maintien de l’amendement du rapporteur pour avis est qu’il a été – c’est suffisamment rare pour être souligné – voté à l’unanimité de la commission des finances, et cela sans que nous ayons, les uns ou les autres, à « mégoter » notre soutien.
Mais je veux revenir sur les deux arguments utilisés par M. le ministre.
En premier lieu, vous dites, monsieur le ministre, que la règle de la dévolution du tiers des bénéfices aux investissements n’a pas vocation universelle et vous prenez pour exemple un secteur que vous connaissez bien, celui des assurances. Mais, justement, dans le domaine des services, l’investissement dans le capital de connaissances et dans l’immatériel est tout aussi important, à l’ère que nous vivons, que l’est, dans les entreprises de manufacture, l’investissement dans des machines !
En second lieu, si votre argument selon lequel la proposition de M. Dassault serait idéale dans une économie en croissance d’au moins 4 % est fondé, il doit valoir pour l’ensemble de votre texte, comme nous l’avons d’ailleurs dit dans la discussion générale, et non pas seulement contre cet amendement.
En faveur de ce dernier, j’ajoute un dernier argument, à mes yeux extrêmement important : dans les temps actuels, j’estime fondamental que le Sénat envoie un message positif aux salariés. Depuis des mois, ils n’en ont pas reçu un seul ! Au contraire, la distorsion entre l’absence de mesures à leur égard et le traitement réservé à une classe de privilégiés qui tirent un avantage indu de rémunérations variables ne cesse de s’accroître !
Nous nous devons donc d’apporter, en votant cet amendement, un soutien psychologique aux salariés qui sont mis à l’épreuve dans la crise économique actuelle.
M. le président. J’ai donc été saisi d’un sous-amendement n° 103, présenté par Mme Pasquet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, qui est ainsi libellé :
Supprimer la première phrase du texte proposé par l'amendement n° 25 rectifié pour l'article L. 3324-1 du code du travail.
Quel est l’avis de la commission sur ce sous-amendement ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Vous me permettrez, monsieur le président, d’émettre un avis personnel puisque la commission n’a pas été saisie de ce sous-amendement : je n’y suis pas favorable.
En revanche, j’estime très important, comme le disait fort justement M. le ministre, que l’on se penche sur cette proposition au sein du Conseil supérieur de la participation, qui sera, je l’espère, sera relancé très rapidement grâce à l’amendement que je défendrai tout à l'heure. Il me semble en effet très difficile de prendre de telles décisions sans concertation avec les partenaires sociaux.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. L’avis du Gouvernement est défavorable, tant sur l’amendement initial que sur l’amendement rectifié et sur le sous-amendement.
On demande toujours au Gouvernement des études d’impact…
Mme Nicole Bricq. Oui !
M. Xavier Bertrand, ministre. …et je tiens à vous redire, monsieur Dassault, que, sur un tel sujet, des études d’impact sont en effet absolument nécessaires.
Mme Nicole Bricq. Il en faudrait pour l’ensemble du projet de loi !
M. Xavier Bertrand, ministre. Je ne vous annonce pas qu’elles auront lieu l’an prochain, ni que nous allons constituer un groupe de travail à cet effet, car le réceptacle existe déjà : il s’agit du Conseil supérieur de la participation.
Quant à la méthode – car qui peut être en désaccord avec le fait qu’il y ait des dividendes, mais aussi de la participation ? –, il faut justement examiner l’impact économique et financier, d’une part,…
M. François Marc. C’est la crise : il faut bouger !
M. Xavier Bertrand, ministre. … ainsi que la façon dont on pourra faire vivre le dispositif, d’autre part.
Très franchement, sur un sujet comme celui-ci, je pense que cela va bien au-delà de la rédaction d’un simple amendement et, a fortiori, d’un simple sous-amendement.
M. Xavier Bertrand, ministre. Je vous demande donc de continuer à approfondir cette question, dont, je le répète, le Conseil supérieur de la participation sera le réceptacle idéal. Je fais confiance aux parlementaires, et davantage encore aux parlementaires siégeant au sein de ce conseil pour porter un tel dossier.
Je partage votre souhait d’aller le plus loin possible, et ce n’est donc que sur les modalités que je ne peux pas, ce soir, être en totale symbiose avec vous.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Monsieur le ministre, au nom de la commission des finances, je suis tout de même obligé de maintenir l’amendement tel qu’il a été voté à l’unanimité, et je le maintiens donc, mais je souhaiterais qu’il soit examiné au sein du Conseil supérieur de la participation avec une formule prévoyant que la réserve de participation doit être au moins – et pas au plus – égale au montant des dividendes distribués par l’entreprise à ses actionnaires.
La règle doit en effet être telle que la participation soit plus importante que les dividendes distribués aux actionnaires. Chaque année, cela variera puisque cela dépendra des dividendes versés.
En attendant, puisque nous nous sommes mis d’accord sur la règle des trois tiers, je propose de garder cette règle, mais j’aimerais avoir l’assurance du Gouvernement que la formule sera étudiée par le Conseil supérieur de la participation et qu’ensuite nous discuterons ensemble pour arrêter une rédaction définitive.
Ainsi, comme le souhaite le Président de la République, la réserve de participation aura été augmentée et il y aura – et c’est l’important – égalité de traitement.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 103.
Mme Nicole Bricq. Je veux faire remarquer à M. le ministre et à mes collègues que le projet de loi a été déclaré d’urgence.
Mme Nicole Bricq. Or le débat introduit par l’amendement du rapporteur pour avis est un débat de fond et, s’il y avait eu des navettes, nous aurions pu, nous législateur, améliorer la proposition de Serge Dassault.
Je profite donc de la présence du secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement pour inviter le Gouvernement à cesser de déclarer l’urgence sur les textes qu’il nous présente, car nous légiférons mal ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Mes chers collègues, Mme Bricq a raison, et c’est précisément parce qu’il ne faut pas mal légiférer que nous devons absolument repousser cet amendement, qui n’est d’ailleurs plus l’amendement voté par la commission des finances, mais un amendement de la commission des finances rectifié en séance, qui ne correspond donc plus à la volonté de celle-ci. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Nous nous donnerons le temps de rédiger, éventuellement dans un autre texte, quelque chose de correct.
Je rappelle que cet amendement tend à insérer un article additionnel après l'article 2 et n’a donc pas de lien direct avec le texte tel qu’il nous a été soumis par le Gouvernement. Nous pourrons donc parfaitement l’étudier donc dans un autre cadre.
C’est pourquoi je souhaite que notre assemblée le repousse ce soir.
M. le président. L'amendement n° 26, présenté par M. Dassault, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le neuvième alinéa (8°) de l'article L. 6313-1 du code du travail, après les mots : « l'économie », sont insérés les mots : « et à la gestion ».
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Il s’agit d’un amendement de précision.
Nous proposons de faire en sorte que les salariés puissent être formés non seulement à l'économie, mais aussi à la gestion de l'entreprise. C’est important, car cela leur permet de saisir comment fonctionne l’entreprise et, en particulier, de comprendre que celle-ci est faite pour satisfaire des clients, pas uniquement les actionnaires ou même les syndicats.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement vise à préciser que les actions de formation mises en œuvre dans l’entreprise peuvent englober une formation à l’économie et à la gestion de l’entreprise.
Il n’est pas sûr que la modification proposée ait une très grande portée, mais insérer cette précision ne pose pas de problème. C'est la raison pour laquelle la commission s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Les avis se suivent et ne se ressemblent pas : le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 2.
L'amendement n° 27, présenté par M. Dassault, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 3322-1 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Elle concourt à la mise en œuvre de la gestion participative dans l'entreprise. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à introduire la notion de gestion participative. Elle est un complément à la participation et améliore les relations entre les salariés, la direction et les actionnaires.
Il s’agit de faire en sorte que les salariés soient bien considérés, soient informés de ce qui se passe dans l’entreprise et aient suffisamment de responsabilités, ce qui n’est pas toujours le cas. Ce devrait pourtant être une obligation.
Introduire la notion de gestion participative a une simple portée psychologique, mais cela peut avoir un impact non négligeable dans les relations à l’intérieur de l’entreprise. Cela permet à chacun de savoir ce qu’il fait, pourquoi il le fait et d’être motivé pour le faire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement vise à indiquer que la participation concourt à la mise en œuvre de la gestion participative dans l’entreprise. Cet ajout ne semble pas avoir de réelle portée juridique et introduit dans le code du travail une notion dont les contours sont mal définis.
La commission s'en remet donc à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 2.
Article 2 bis
Le code du travail est ainsi modifié :
1° L'article L. 3312-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le salarié d'un groupement d'employeurs peut bénéficier du dispositif d'intéressement mis en place dans chacune des entreprises adhérentes du groupement auprès de laquelle il est mis à disposition dans des conditions fixées par décret. » ;
2° L'article L. 3322-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le salarié d'un groupement d'employeurs peut bénéficier du dispositif de participation mis en place dans chacune des entreprises adhérentes du groupement auprès de laquelle il est mis à disposition dans des conditions fixées par décret. » ;
3° L'article L. 3332-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le salarié d'un groupement d'employeurs peut bénéficier du plan d'épargne salariale mis en place dans chacune des entreprises adhérentes du groupement auprès de laquelle il est mis à disposition dans des conditions fixées par décret. » – (Adopté.)
Article 2 ter
L'article L. 3312-5 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Si aucune des parties ne demande de renégociation dans les trois mois précédant la date d'échéance de l'accord, ce dernier est renouvelé par tacite reconduction, si l'accord d'origine en prévoit la possibilité. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 45, présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Mes chers collègues, ne dit-on pas que le diable gît dans les détails ? (Sourires.) Force est de constater que ce détail-là ne manque pas d’importance !
L’article 2 ter prévoit que les accords d’intéressement peuvent être renouvelés par tacite reconduction si l’accord initial le prévoit et si aucune des deux parties ne demande de renégociation dans les trois mois précédant la date d’échéance.
Cet article est révélateur de la volonté de certains représentants du patronat de limiter la négociation d’un accord d’intéressement à l’accord initial et d’agir ensuite comme ils l’entendent.
Les effets des accords de branche ont été limités par la suppression du principe de faveur, le Gouvernement et la majorité nous expliquant alors qu’il fallait mettre l’entreprise au centre de la négociation collective, au plus près des réalités.
Aujourd’hui, on nous propose de limiter la négociation d’entreprise elle-même. Cela est d’autant plus grave, monsieur le ministre, que vous entendez développer l’intéressement, notamment en vertu des dispositions de l’article 1er. En d’autres termes, dans les entreprises qui auront signé un accord ou un avenant pour bénéficier du crédit d’impôt, cet accord pourra presque être reconduit ad vitam aeternam !
Cette disposition étant dangereuse pour les salariés, nous en demandons la suppression.
M. le président. L'amendement n° 6, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa de cet article, après le mot :
parties
insérer les mots :
habilitées à négocier ou à ratifier un accord d'intéressement dans les conditions prévues aux 1°, 2° et 3°
La parole est à Mme le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur l'amendement n° 45.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. L’amendement n° 6 vise à préciser la notion de « parties », qui figure à l'article 2 ter. Il ne faudrait pas que celle-ci soit interprétée comme désignant les seules parties à l'accord d'intéressement en cours, c'est-à-dire les signataires de l'accord. Ce serait en effet trop restrictif.
Un nouveau syndicat représentatif aura pu s'implanter dans l'entreprise et il est légitime qu'il puisse demander la renégociation de l'accord d'intéressement. De même, la renégociation doit pouvoir être demandée par le comité d'entreprise.
Par ailleurs, la commission des affaires sociales est favorable à la possibilité de renouvellement d’un accord d’intéressement par tacite reconduction – à condition que soit bien définie la notion de « parties ». Il s’agit là d’une simplification utile pour les PME. Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 45.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 45. En revanche, il est favorable à l'amendement n° 6.
M. le président. Je mets aux voix l'article 2 ter, modifié.
(L'article 2 ter est adopté.)
Article 2 quater
I. - Le code du travail est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa de l'article L. 3321-1 est ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d'État détermine les établissements publics de l'État à caractère industriel et commercial et les sociétés, groupements ou personnes morales, quel que soit leur statut juridique, dont plus de la moitié du capital est détenue directement par l'État, qui sont soumis aux dispositions du présent titre. Ce décret fixe les conditions dans lesquelles ces dispositions leur sont applicables. » ;
2° Le dernier alinéa de l'article L. 3321-1 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les dispositions du présent titre sont également applicables aux sociétés, groupements ou personnes morales, quel que soit leur statut juridique, dont plus de la moitié du capital est détenue, ensemble ou séparément, indirectement par l'État et directement ou indirectement par ses établissements publics, s'ils ne bénéficient pas de subventions d'exploitation, ne sont pas en situation de monopole et ne sont pas soumis à des prix réglementés.
« Un décret en Conseil d'État peut déterminer les sociétés, groupements ou personnes morales, quel que soit leur statut juridique, dont plus de la moitié du capital est détenue, ensemble ou séparément, indirectement par l'État et directement ou indirectement par ses établissements publics, bénéficiant de subventions d'exploitation, étant en situation de monopole ou soumis à des prix réglementés, qui sont soumis aux dispositions du présent titre. Ce décret fixe les conditions dans lesquelles ces dispositions leur sont applicables. » ;
3° À l'article L. 3323-10, la première occurrence des mots : « l'entrée en vigueur du présent article » est remplacée par les mots : « le 1er janvier 2005 » ;
4° À l'article L. 3323-10, les mots : « à l'entrée en vigueur du présent article » sont remplacés par les mots : « au 1er janvier 2005 ».
II. - Le présent article s'applique à compter du 1er mai 2008. Les entreprises et établissements publics qui entraient légalement dans le champ de la participation à cette date demeurent soumis au même régime.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 78, présenté par Mmes David, Pasquet et Hoarau, MM. Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. L’article L. 3321-1 du code du travail détermine les conditions dans lesquelles la participation est applicable aux entreprises publiques, aux établissements publics et à leurs filiales.
L’article 2 quater tend à faire entrer à nouveau ces entreprises dans le champ d’application du régime de la participation, y compris celles qui bénéficient de subventions d’exploitation, qui sont en situation de monopole et pratiquent des prix réglementés.
Nous avons déposé un amendement de suppression de l’article 2 quater afin de manifester notre opposition à la logique de la participation dans les entreprises publiques. En effet, nous estimons paradoxal d’étendre la participation à des entreprises publiques qui assurent un service public : les salariés des entreprises publiques ne sont pas des salariés comme les autres. Les entreprises publiques, comme EDF ou la SNCF – puisqu’il est question d’y étendre bientôt la participation –, font certes des bénéfices, mais en accomplissant une mission de service public.
Plaquer, sans autre forme de considérations, le régime de la participation mis en œuvre dans le secteur privé sur le secteur public n’est pas neutre. Cela renforce encore un peu l’idée selon laquelle, dans l’accomplissement de leurs missions, les entreprises publiques ne se distinguent pas des entreprises privées.
De fait, cela favorise la privatisation rampante – ou finalisée, comme dans le cas de GDF – des services publics à laquelle vous vous livrez depuis maintenant plusieurs années.
Plutôt que de développer la participation dans les entreprises publiques, le Gouvernement ferait mieux de se préoccuper de la politique salariale dans ces mêmes entreprises, et aussi au sein de la fonction publique.
La question de l’augmentation des salaires dans les entreprises publiques ne regarde pas uniquement les patrons de ces entreprises. L’État ne peut pas se comporter avec ses salariés comme les patrons se comportent avec les salariés des entreprises sous-traitantes.
Par ailleurs, à l’heure de la crise économique et énergétique, la priorité ne réside-t-elle pas plutôt dans la renationalisation d’EDF-GDF, afin de constituer un grand pôle public de l’énergie sous le contrôle de l’État et des citoyens, en lieu et place d’une politique de concurrence libre et non faussée dont on mesure actuellement les conséquences ?
M. le président. L'amendement n° 63 rectifié, présenté par Mme Henneron, M. Revet et Mmes Rozier et Sittler, est ainsi libellé :
I. - Compléter le texte proposé par le 2° de cet article pour l'article L. 3321-1 du code du travail par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions du présent titre sont également applicables, dans des conditions prévues par décret aux organismes et associations à but non lucratif employant habituellement cinquante salariés et plus. »
II. - Pour compenser la perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
... - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant de l'extension aux organismes et associations à but non lucratif de l'obligation d'établir une réserve de participation est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. - Pour compenser la perte de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
... - La perte de recettes pour l'État résultant de l'extension aux organismes et associations à but non lucratif de l'obligation d'établir une réserve de participation est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Françoise Henneron.
Mme Françoise Henneron. Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 63 est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 78 ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. L'article 2 quater a simplement pour objet de corriger une erreur de recodification, afin de respecter le principe de recodification à droit constant. Dans la mesure où nos collègues sont très attachés à ce principe, cet amendement de suppression est un peu surprenant !
Par ailleurs, pourquoi priver les salariés du secteur public d’un accord de participation lorsque l’activité de leur employeur le leur permet ?
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable.
Je remercie Mme Henneron d’avoir retiré l'amendement n° 63, qui était satisfait.
M. le président. Je mets aux voix l'article 2 quater.
(L'article 2 quater est adopté.)
Articles additionnels après l'article 2 quater
M. le président. L'amendement n° 46, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 2 de la loi n° 2004-1487 du 30 décembre 2004 relative à l'ouverture du capital de DCN et à la création par celle-ci de filiales est ainsi rédigé :
« Art. 2. - Les dispositions des titres Ier, II, III et IV du livre III de la troisième partie du code du travail sont applicables aux personnels de l'État mis à disposition de DCN ou de ses filiales. »
II. - Les pertes de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. - Les pertes de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Cet amendement a été rédigé par notre collègue Jean-Pierre Godefroy, qui ne peut être présent ce soir pour le défendre, mais qui tient particulièrement à son adoption, tout comme son collègue M. Bernard Cazeneuve, député-maire de Cherbourg-Octeville.
Pour bien comprendre l’objet de cet amendement, il faut revenir à la fin de l’année 2004, au moment de l’ouverture du capital de la société DCN.
Pour faire face à l’opposition forte des personnels de DCN, notamment des ouvriers sous statut – ils constituent aujourd’hui encore la principale catégorie de salariés de cette entreprise –, le Gouvernement avait en quelque sorte « acheté » la paix sociale en déposant des amendements au projet de loi relatif à l’ouverture du capital de DCN et à la création par celle-ci de filiales. Les ouvriers sous statut ont ainsi pu bénéficier de dispositifs d’intéressement et d’actionnariat salarié.
En 2006, au moment de l’examen du projet de loi pour le développement de la participation et de l’actionnariat salarié, le Sénat a voté à l’unanimité deux amendements, l’un sur l’initiative de Mme Debré, qui était également rapporteur de ce texte, l’autre sur l’initiative de Jean-Pierre Godefroy, visant à permettre aux ouvriers d’État de la société de bénéficier du PEE et de la participation, déjà accessibles aux autres catégories de personnel de DCN.
À l’époque, en commission mixte paritaire, M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur de l'Assemblée nationale et M. Patrick Ollier, député, avaient fait « retoquer » l’amendement relatif à la participation au motif que son adoption pouvait créer un « déséquilibre » entre les salariés à statut et les autres. Cette justification était déjà contestable à l’époque puisque tous les salariés d’une entreprise, quel que soit leur statut, contribuent également à ses succès.
M. Roland Courteau. Tout à fait !
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Aujourd’hui, la donne a changé puisque l’article 2 quater, que le Sénat vient d’adopter, a été introduit à l’Assemblée nationale sur l’initiative de M. Patrick Ollier, justement. Il a pour objet de permettre à des entreprises publiques dont la liste est fixée par décret de faire bénéficier leurs salariés de la participation, et vise en particulier, selon les propos de son auteur, les salariés de la SNCF, qui ont également un statut particulier.
Répondant, en commission, à une question de Jean-Pierre Godefroy, vous avez assuré, monsieur le ministre, que la société DCN serait visée dans le décret que le Gouvernement va prendre pour compléter la liste des entreprises publiques couvertes par un accord de participation. Nous en prenons acte.
Néanmoins, pour plus de sécurité juridique, nous avons jugé utile de déposer un amendement tendant à modifier l’article 2 de la loi n° 2004-1487 du 30 décembre 2004 relative à l’ouverture du capital de DCN et à la création par celle-ci de filiales et à permettre ainsi aux personnels de l’État mis à la disposition de la société DCNS ou de ses filiales de bénéficier de la participation, tout comme les autres personnels de l’entreprise.
De surcroît, cet amendement tient compte de la nouvelle architecture du code du travail.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. M. le ministre a indiqué devant la commission qu’il comptait inscrire la société DCN sur la liste, fixée par décret, des entreprises publiques auxquelles s’appliquent les dispositions relatives à la participation. S’il nous le confirme dans l’hémicycle, l’amendement n° 46 deviendrait sans objet. Par conséquent, je souhaite connaître l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est, donc, l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Je n’ai peut-être pas été totalement clair en commission, madame le rapporteur, mais je ne pense pas qu’il y ait la moindre contradiction. Les salariés de droit privé bénéficient déjà de la participation. J’avais apporté cette réponse à M. Godefroy. Je tiens à la confirmer ce soir.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable dans la mesure où les personnes visées sont déjà couvertes.
M. le président. Quel est, maintenant, l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. En raison de cette explication, je demande à Mme Jarraud-Vergnolle de bien vouloir retirer l’amendement n° 46.
M. le président. Madame Jarraud-Vergnolle, l'amendement n° 46 est-il maintenu ?
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Je présente cet amendement au nom de M. Godefroy. Je ne pense pas qu’il souhaiterait le retirer. De plus, les membres de mon groupe préfèrent la sécurité législative à la promesse d’un décret.
M. Roland Courteau. Exactement !
M. le président. L'amendement n° 7, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l'article 2 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- Après l'article L. 3335-1 du code du travail, il est inséré un article L. 3335-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 3335-2. - Les sommes détenues par un salarié, au titre de la réserve spéciale de la participation des salariés aux résultats de l'entreprise, dont il n'a pas demandé la délivrance au moment de la rupture de son contrat de travail, peuvent être affectées dans le plan d'épargne, mentionné aux articles L. 3332-1, L. 3333-1 et L. 3334-1, de son nouvel employeur. Dans ce cas, le délai d'indisponibilité écoulé des sommes transférées s'impute sur la durée de blocage prévue par le plan d'épargne, mentionné aux articles L. 3332-1 et L. 3333-1, sur lequel elles ont été transférées, sauf si ces sommes sont utilisées pour souscrire à une augmentation de capital prévue à l'article L. 3332-18.
« Les sommes détenues par un salarié dans un plan d'épargne mentionné aux articles L. 3332-1 et L. 3333-1 peuvent être transférées, à la demande du salarié, avec ou sans rupture de son contrat de travail, dans un autre plan d'épargne mentionné aux mêmes articles, comportant dans son règlement une durée de blocage d'une durée minimale équivalente à celle figurant dans le règlement du plan d'origine. Dans ce cas, le délai d'indisponibilité déjà écoulé des sommes transférées s'impute sur la durée de blocage prévue par le plan sur lequel elles ont été transférées, sauf si ces sommes sont utilisées pour souscrire à une augmentation de capital prévue à l'article L. 3332-18.
« Les sommes détenues par un salarié dans un plan d'épargne mentionné aux articles L. 3332-1, L. 3333-1 et L. 3334-1 peuvent être transférées, à la demande du salarié, avec ou sans rupture de son contrat de travail, dans un plan d'épargne mentionné à l'article L. 3334-1.
« Les sommes transférées ne sont pas prises en compte pour l'appréciation du plafond mentionné au premier alinéa de l'article L. 3332-10. Elles ne donnent pas lieu au versement complémentaire de l'entreprise prévu à l'article L. 3332-11, sauf si le transfert a lieu à l'expiration de leur délai d'indisponibilité, ou si les sommes sont transférées d'un plan d'épargne mentionné aux articles L. 3332-1, L. 3333-1 vers un plan d'épargne mentionné à l'article L. 3334-1. Les sommes qui ont bénéficié du supplément d'abondement dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 3332-11 ne peuvent être transférées, sauf si le règlement du plan au titre duquel le supplément d'abondement a été versé l'autorise. »
II. - Le présent article s'applique à compter du 1er mai 2008.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement vise à corriger une erreur survenue lors de la recodification du code du travail. En effet, ne figurent plus dans ledit code les dispositions relatives au transfert des sommes détenues par le salarié d'un plan d'épargne salariale à un autre. Cet amendement vise à les rétablir.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 2 quater.
Article 2 quinquies
I. - L'article L. 3323-6 du code du travail est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les chefs de ces entreprises ou, s'il s'agit de personnes morales, leurs présidents, directeurs généraux, gérants ou membres du directoire, ainsi que le conjoint du chef d'entreprise s'il bénéficie du statut de conjoint collaborateur ou de conjoint associé mentionné à l'article L. 121-4 du code de commerce, peuvent bénéficier de ce régime. » ;
2° Au dernier alinéa, les mots : « et leurs salariés bénéficient alors, dans les mêmes conditions, du » sont remplacés par les mots : «, leurs salariés et les bénéficiaires visés au deuxième alinéa se voient appliquer le ».
II. - Après le deuxième alinéa de l'article L. 3324-2 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les entreprises dont l'effectif habituel est compris entre un et deux cent cinquante salariés, la part de la réserve spéciale de participation excédant le montant qui aurait résulté d'un calcul effectué en application de l'article L. 3324-1 peut être répartie entre les salariés et les chefs de ces entreprises, les présidents, directeurs généraux, gérants ou membres du directoire s'il s'agit de personnes morales, le conjoint du chef d'entreprise s'il a le statut de conjoint collaborateur ou de conjoint associé mentionné à l'article L. 121-4 du code de commerce. »
III. - L'article L. 3324-5 du même code est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le mot : « salariés » est remplacé par le mot : « bénéficiaires » ;
2° Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Pour les bénéficiaires visés au deuxième alinéa de l'article L. 3323-6 et au troisième alinéa de l'article L. 3324-2, la répartition est calculée proportionnellement à la rémunération annuelle ou au revenu professionnel imposé à l'impôt sur le revenu au titre de l'année précédente, plafonnés au niveau du salaire le plus élevé versé dans l'entreprise, et dans les limites de plafonds de répartition individuelle déterminés par le même décret. » ;
3° Au deuxième alinéa, le mot : « salariés » est remplacé par le mot : « bénéficiaires ».
IV. - À la première phrase du premier alinéa de l'article L. 3324-7, à l'article L. 3324-8 et au premier alinéa de l'article L. 3324-12 du même code, après le mot : « salariés », sont insérés les mots : « et, le cas échéant, les bénéficiaires visés au deuxième alinéa de l'article L. 3323-6 et au troisième alinéa de l'article L. 3324-2, ».
V. - Au premier alinéa de l'article L. 3324-10 du même code, les mots : « au profit des salariés » sont supprimés.
VI. - À l'article L. 3324-11 et au premier alinéa de l'article L. 3325-2 du même code, après les mots : « aux salariés », sont insérés les mots : « et, le cas échéant, aux bénéficiaires visés au deuxième alinéa de l'article L. 3323-6 et au troisième alinéa de l'article L. 3324-2, ».
VII. - Au troisième alinéa de l'article L. 3325-2 du même code, après les mots : « les salariés », sont insérés les mots : « et, le cas échéant, les bénéficiaires visés au deuxième alinéa de l'article L. 3323-6 et au troisième alinéa de l'article L. 3324-2 ».
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les amendements nos 47 et 79 sont identiques.
L'amendement n° 47 est présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 79 est présenté par Mmes David, Pasquet et Hoarau, MM. Fischer, Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Maryvonne Blondin, pour présenter l’amendement n° 47.
Mme Maryvonne Blondin. Monsieur le président, si vous le permettez, je présenterai en même temps les amendements nos 47 et 48, qui ont pour objet de supprimer respectivement l’article 2 quinquies et l’article 2 sexies.
Ces deux articles visent à étendre la participation aux chefs d’entreprise, présidents, directeurs généraux, gérants, membres du directoire et conjoints de chef d’entreprise s’ils sont conjoints collaborateurs.
Au prix d’un bel effort, Mme le rapporteur nous a expliqué que cette disposition allait inciter les chefs d’entreprise de moins de cinquante salariés à se doter d’un accord de participation. Dans les entreprises de moins de deux cent cinquante salariés, de nouveaux accords plus avantageux seraient conclus.
La phrase de conclusion est savoureuse : « dans les deux cas, en effet, le chef d’entreprise bénéficiera de l’effort ainsi consenti ». Donc, il ne signera un accord que parce qu’il en bénéficiera lui-même, ainsi que sa femme.
Voilà qui n’est pas, de la part de Mme le rapporteur, le signe d’une grande estime pour l’état d’esprit des chefs d’entreprise envers la participation !
Il est vrai que cette disposition, ajoutée par l’Assemblée nationale, sur l’initiative de deux commissions, est difficile à justifier. Elle est à l’opposé de la législation qui dispose que « la participation a pour objet de garantir collectivement aux salariés le droit de participer aux résultats de l’entreprise ». Elle constitue donc un véritable détournement.
Cette disposition est même parfaitement injustifiable du point de vue de la participation, pour ne rien dire de la simple décence !
Ce projet de loi est décidément méconnu. Il comporte de réelles innovations, particulièrement en matière fiscale. Il n’est, en effet, pas besoin d’être un grand fiscaliste pour voir immédiatement que l’Assemblée nationale a introduit, sous couvert de participation, un nouveau dispositif d’évasion fiscale.
Il est vrai que l’on parle un peu trop en ce moment de la fiscalité des classes aisées, qu’il s’agisse de l’inébranlable bouclier fiscal ou du plafonnement des niches. Comment compenser cette malencontreuse atteinte aux capacités d’épargne et de consommation de nos concitoyens les plus argentés ? Il convient de procéder par petites touches et de saisir toutes les occasions.
La participation, de façon inattendue, en est une. Ainsi, les chefs d’entreprise et leur épouse pourront bénéficier non seulement de leur rémunération de base, mais aussi de bonus sur résultats, de stock-options et de la participation.
C’est une évasion fiscale considérable qui se prépare, et l’on ne peut que souhaiter que les bénéficiaires vous en remercient.
Il devrait en être de même des experts-comptables et des conseillers fiscaux, dont les mérites vont ainsi croître auprès de leurs clients.
Il faut aussi rendre hommage à l’esprit d’à-propos des auteurs des deux articles en question. La situation budgétaire de la France et l’état de l’opinion se prêtent, en effet, très bien à cette opération. Il est permis de se demander si, à défaut de civisme, ceux qui sont à la source de ces textes ont une vision lucide des choses.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 79.
Mme Annie David. L’article 2 quinquies a pour objet d’étendre le régime de la participation aux chefs d’entreprise et à leur conjoint collaborateur dans les entreprises de moins de cinquante salariés non assujetties à l’obligation de mise en œuvre d’un régime de participation; et dans les entreprises d’un à deux cent cinquante salariés dans le cas où ces dernières ont mis en place un accord de participation dérogatoire.
Cet article a été introduit à l’Assemblée nationale à la suite de l’adoption de deux amendements identiques déposés par le rapporteur, Gérard Cherpion, et par le rapporteur pour avis, Patrick Ollier. Ces textes prévoyaient initialement d’étendre le bénéfice de la participation aux chefs d’entreprise de moins de cent salariés. Mais, estimant cette mesure insuffisante, un député de la majorité a présenté un amendement, qui a été adopté, tendant à porter ce seuil à deux cent cinquante salariés.
Comme vous l’aurez certainement compris, nous trouvons cette nouvelle disposition tout à fait anormale, et ce pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, depuis sa création, en 1967, la participation est réservée aux seuls salariés. Elle a pour objet, aux termes du code du travail, de « garantir collectivement aux salariés le droit de participer aux résultats de l’entreprise ».
En ouvrant la participation aux chefs d’entreprise et à leur conjoint collaborateur, vous créez une confusion incompréhensible entre le statut de chef d’entreprise et celui de salarié. Or la différence fondamentale entre un chef d’entreprise et ses salariés réside dans la subordination des seconds vis-à-vis du premier.
Par ailleurs, je rappelle que la disposition prévue par l’article 2 quinquies s’applique, entre autres, aux chefs d’entreprise de moins de deux cent cinquante salariés. Un tel effectif correspond à une entreprise suffisamment importante pour imaginer que son dirigeant perçoit une rémunération très nettement supérieure à celle de ses salariés. De surcroît, ce dernier peut également bénéficier d’avantages, tels les stock-options et les bonus sur résultats, dont ne profitent pas les salariés. Et vous voudriez lui permettre de bénéficier en outre de la participation, bref d’avoir le beurre et l’argent du beurre ?
Une telle mesure me semble injustifiée et inopportune au regard de la situation salariale de nombre de nos concitoyens, a fortiori dans le contexte de crise économique que nous traversons.
M. Ollier a tenté de justifier sa proposition en soutenant qu’il souhaitait « modifier la loi de façon à inciter le chef d’entreprise à signer un accord de participation, dans l’intérêt même des salariés », affirmant pour conclure que les salariés le remercieraient. Au demeurant, c’est un peu ce que j’ai entendu tout à l’heure en commission.
Si les chefs d’entreprise ont besoin d’être directement concernés par la participation pour que leurs salariés en bénéficient, cela revient à envoyer un signal négatif à l’ensemble des salariés, surtout lorsque l’on prétend moraliser le capitalisme.
C’est pourquoi nous demandons la suppression de l’article 2 quinquies, qui présente d’évidents risques de dérive.
M. le président. L'amendement n° 8, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Dans le VI de cet article, supprimer les mots :
et au premier alinéa de l'article L. 3325-2
L'amendement n° 100, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
VIII. - Dans le 1° et le 2° du II de l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale, les références « L. 441-4 », « L. 442-4 » et « L. 443-8 » sont remplacées respectivement par les références : « L. 3312-4 », « L. 3324-5 » et « L. 3332-27 ».
IX. - Dans la seconde phrase du deuxième alinéa de l'article L. 136-3 du code de la sécurité sociale, et dans la troisième phrase du troisième alinéa du I de l'article L. 136-4 du même code, les références : « L. 441-4 et L. 443-8 » sont remplacées par les références : « L. 3312-4, L. 3324-5 et L. 3332-27 ».
La parole est à Mme le rapporteur, pour présenter ces deux amendements et pour donner l’avis de la commission sur les amendements identiques nos 47 et 79.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Les deux amendements de la commission sont des amendements de coordination.
L’amendement n° 8, tend à revenir sur l’une des modifications rédactionnelles proposées par le VI de l’article 2 quinquies, cette modification n’étant plus justifiée compte tenu de ce que nous avons voté à l’article 2.
L’amendement n° 100 vise à garantir que les employeurs qui recevront de la participation seront assujettis, comme les salariés, à la CSG et à la CRDS. Il tend également à actualiser certaines références au code du travail figurant dans le code de la sécurité sociale.
Madame Blondin, l’une de vos phrases m’a beaucoup choquée. Vous avez soutenu que le système proposé visait les chefs d’entreprise et leur « femme ». Or un dirigeant de société peut être une femme !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Un tel propos tenu dans notre hémicycle me semble assez choquant.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Sont concernés le chef d’entreprise et son conjoint dès lors qu’il s’agit d’un collaborateur, et ce peut être aussi bien une femme qu’un homme.
Pour le reste, je ne vois pas pourquoi ils seraient exclus lorsqu’un accord dérogatoire a été signé ou lorsque la société compte moins de cinquante salariés.
La commission émet donc un avis défavorable sur les amendements identiques nos 47 et 79.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement est favorable aux amendements nos 8 et 100 mais défavorable aux amendements identiques nos 47 et 79.
Madame Blondin, les propos tenus dans cet hémicycle sont libres. Mais ceux que vous venez de proférer sont proprement scandaleux et relèvent du pur mensonge. Comment pouvez-vous parler d’évasion fiscale sur un tel sujet ? Il faut remettre les choses à leur place ! Ce n’est pas parce que vous vous complaisez dans le mensonge à l’égard du paquet fiscal et du bouclier fiscal que vous devez vous entêter dans cette voie ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Par vos propos, vous entretenez le scandale, et de manière délibérée.
M. Roland Courteau. Mesurez les vôtres, de propos, monsieur le ministre !
M. Xavier Bertrand, ministre. Vous savez qu’il s’agit d’un mensonge et qu’il ne sert à rien, à certains moments particuliers, de troubler les esprits.
Vous savez pertinemment qu’il s’agit d’un accord collectif. Pour que le dirigeant en profite, il faut que ses salariés en bénéficient. C’est cela, la vérité !
En l’espèce, vous faites de la démagogie.
M. Roland Courteau. Et vous de l’agression !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 47 et 79.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 2 quinquies, modifié.
(L'article 2 quinquies est adopté.)
Article 2 sexies
Aux premier alinéa de l'article L. 3312-3 et deuxième alinéa de l'article L. 3332-2 du code du travail, le mot : « cent » est remplacé par les mots : « deux cent cinquante ».
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 48 est présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 80 est présenté par Mmes David, Pasquet et Hoarau, MM. Fischer, Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
L’amendement n° 48 a déjà été défendu.
La parole est à M. Guy Fischer, pour présenter l’amendement n° 80.
M. Guy Fischer. Je défendrai cet amendement brièvement, car les articles 2 sexies et 2 quinquies ont à peu près la même logique.
En effet, l’article 2 sexies a pour objet d’élever le seuil à partir duquel les chefs d’entreprise peuvent bénéficier de l’intéressement et des plans d’épargne salariale de cent à deux cent cinquante salariés.
Les arguments avancés lors de la présentation de l’amendement de suppression de l’article 2 quinquies sont donc tout aussi valables dans le cas présent : les rémunérations des dirigeants d’entreprises de deux cent cinquante salariés n’étant en rien comparables à celles des salariés, il me semble anormal de leur accorder les mêmes avantages liés à l’intéressement et à l’épargne salariale. C'est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Ces deux amendements identiques sont sous-tendus par la même logique que les deux amendements de suppression de l’article 2 quinquies, que le Sénat a repoussés.
Par souci de cohérence, la commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 48 et 80.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 2 sexies.
(L'article 2 sexies est adopté.)
Articles additionnels après l'article 2 sexies
M. le président. L'amendement n° 30 rectifié, présenté par Mmes Procaccia, Garriaud-Maylam, Bout, Papon, Hummel, Henneron, Malovry, G. Gautier, Troendle, Rozier, Lamure, Sittler, Desmarescaux et B. Dupont et MM. Cambon, Cornu, Pointereau, J. Gautier et César, est ainsi libellé :
Après l'article 2 sexies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 3332-2 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les travailleurs non salariés visés à l'article L. 134-1 du code du commerce ou au titre IV du livre V du code des assurances ayant un contrat individuel avec une entreprise dont ils commercialisent des produits, peuvent bénéficier du plan d'épargne salariale mis en place dans l'entreprise, si le règlement le prévoit, dans des conditions fixées par décret. »
II. - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. - La perte de recettes pour l'État est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Les dispositions de cet amendement sont similaires à celles que le Sénat avait adoptées en 2006, mais qui avaient finalement été « retoquées », en même temps qu’un certain nombre d’autres mesures financières.
Il s'agit d’un amendement assez généreux. S’il était adopté, les entreprises qui le souhaitent pourraient étendre leur plan d’épargne salariale aux travailleurs indépendants qui ne sont pas juridiquement des salariés, donc qui se trouvent en principe exclus du dispositif, mais qui sont liés à ces sociétés par un contrat individuel. Sont concernés essentiellement les agents généraux d’assurance et les agents commerciaux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement vise à permettre aux agents commerciaux et aux agents d’assurance qui possèdent un statut de travailleur indépendant mais qui sont liés par contrat à une entreprise de bénéficier du plan d’épargne salariale de cette dernière.
Cette mesure est de bon sens, ma chère collègue, et elle paraît tout à fait propice au développement de l’épargne salariale. La commission émet donc un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Il s’agit donc de l'amendement n° 30 rectifié bis.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 2 sexies.
L'amendement n° 64 rectifié, présenté par Mmes Henneron et Procaccia, M. Revet et Mmes Rozier et Sittler, est ainsi libellé :
Après l'article 2 sexies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 3332-13 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'un redressement de cotisations a pour origine une mauvaise application des dispositions prévues à l'alinéa précédent, le redressement de cotisations et contributions ne portera que sur la fraction substituée sauf en cas de mauvaise foi ou d'agissements répétés du cotisant. »
II. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement a été précédemment retiré.
Article 2 septies
La dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 3332-11 du code du travail est ainsi rédigée :
« Cette contribution peut être constituée des sommes provenant de l'intéressement, de la participation aux résultats de l'entreprise et des versements volontaires des bénéficiaires. »
M. le président. L'amendement n° 9, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
A. - Compléter cet article par trois paragraphes ainsi rédigés :
II. - Après le premier alinéa de l'article L. 3332-11 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Dans la limite du plafond prévu à l'alinéa précédent, des sommes peuvent être versées à un salarié ou à une personne mentionnée à l'article L. 3332-2 qui décide, à l'expiration du délai d'indisponibilité mentionné à l'article L. 3332-25, de prolonger d'au moins cinq ans la durée d'indisponibilité des actions ou parts acquises pour son compte. »
III. - Les pertes de recettes pour l'État résultant du II sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575A du code général des impôts.
IV. - Les pertes de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du II sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575A du code général des impôts.
B. - En conséquence, faire précéder le premier alinéa d'un I.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement vise à autoriser l'entreprise à verser un abondement de fidélisation au salarié lorsque celui-ci décide de bloquer, pendant au moins cinq ans, les sommes qu'il détient dans son PEE, à l'expiration du délai d'indisponibilité prévu par la loi.
Cette mesure est de nature à encourager l'épargne longue.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Bien que je comprenne tout à fait vos intentions, madame le rapporteur, je demande le retrait de cet amendement, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Madame le rapporteur, l'amendement n° 9 est-il maintenu ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Oui, je le maintiens, monsieur le président, et je demande à mes collègues de bien vouloir le voter !
M. Guy Fischer. Mais c’est qu’elle résiste ! (Sourires sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 2 septies, modifié.
(L'article 2 septies est adopté.)
Article 2 octies
Le dernier alinéa de l'article L. 3333-7 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ce règlement peut également prévoir des modalités de conclusion identiques des avenants rendus nécessaires par des dispositions législatives ou réglementaires postérieures à l'institution du plan. » – (Adopté.)
Article additionnel avant l'article 2 nonies
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 10, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Avant l'article 2 nonies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans la première phrase de l'article L. 3334-2 du code du travail, après les mots : « peut être mis en place », sont insérés les mots : « à l'initiative de l'entreprise ou ».
II. - L'article L.3334-2 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l'entreprise compte au moins un délégué syndical ou est dotée d'un comité d'entreprise, le plan d'épargne pour la retraite collectif est négocié dans les conditions prévues à l'article L. 3322-6. Si, au terme de la négociation, aucun accord n'a été conclu, un procès-verbal de désaccord est établi dans lequel sont consignées en leur dernier état les propositions respectives des parties et les mesures que l'employeur entend appliquer unilatéralement. »
III. - La perte de recettes pour l'État résultant du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
IV. - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Actuellement, un PERCO ne peut être mis en place que par voie d'accord collectif, alors qu'un plan d'épargne d'entreprise peut être institué soit par voie d'accord, soit sur décision unilatérale de l'employeur.
Afin de favoriser la diffusion des PERCO et de rendre cohérentes les règles applicables aux différentes catégories de plans d'épargne salariale, nous proposons, à travers cet amendement, que le PERCO puisse lui aussi être mis en place sur décision de l'employeur.
Bien sûr, l’employeur aura la faculté d’abonder, ou non, ce plan, de même que les salariés auront le libre choix d’y adhérer ou de ne pas le faire.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Il s'agit donc d’un amendement n° 10 rectifié.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 2 nonies.
L'amendement n° 94 rectifié, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Avant l'article 2 nonies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans la première phrase de l'article L. 3334-2 du code du travail, après les mots : « mis en place », sont insérés les mots : « à l'initiative de l'entreprise ou ».
II. - La perte de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Article 2 nonies
Après l'article L. 3334-5 du code du travail, il est inséré un article L. 3334-5-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 3334-5-1. - Un plan d'épargne pour la retraite collectif peut prévoir l'adhésion par défaut des salariés de l'entreprise, sauf avis contraire de ces derniers. Les salariés sont informés de cette clause dans des conditions prévues par décret. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 49 est présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 81 est présenté par Mmes David, Pasquet et Hoarau, MM. Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Gisèle Printz, pour présenter l'amendement n° 49.
Mme Gisèle Printz. Cet article 2 nonies est tout à fait extraordinaire d’un point de vue juridique. En effet, sans vouloir remettre en cause le résultat de la négociation collective dans l’entreprise qui aboutit à la création d’un PERCO, il n’est pas normal que chaque salarié ne donne pas explicitement son accord.
Mes chers collègues, nous vous rappelons que les sommes versées sur le PERCO peuvent provenir de l’intéressement, de la participation ou de tout autre versement.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 81.
Mme Annie David. L’article 2 nonies a été introduit par l’Assemblée nationale sur l’initiative du rapporteur de ce projet de loi.
Grâce à cette disposition, les règlements des PERCO pourront prévoir des clauses d’adhésion automatique pour tous les salariés d’une entreprise, qui garderont chacun en théorie la possibilité d’émettre un avis contraire et de ne pas adhérer à ce plan.
À l’Assemblée nationale, la majorité et le Gouvernement ont qualifié cette disposition de « non contraignante » dès lors le salarié aura le libre choix d’adhérer, ou non, à ce dispositif. Mme le rapporteur a développé pour nous la même argumentation.
Toutefois, le « libre choix » consiste à pouvoir adhérer, ou non, à un PERCO, non à être obligé de préciser que l’on ne souhaite pas le faire ! La nuance est de taille, mais vous semblez l’avoir occultée…
Si le salarié veut refuser d’adhérer à un PERCO, il devra engager les démarches nécessaires dans les délais impartis, ce qui, selon moi, relève bien de la contrainte.
De surcroît, le projet de loi ne précise ni comment les salariés seront informés ni quelle procédure ils devront suivre – celle-ci se trouve renvoyée à un décret –, ce qui signifie que nous ignorons encore, aujourd'hui, comment ils seront mis au courant de leur droit de refuser à leur employeur leur adhésion au PERCO !
Par ailleurs, plusieurs problèmes se posent.
Tout d'abord, on peut imaginer que, à terme, un certain montant de cotisation sera obligatoire, ou encore qu’un prélèvement sur le salaire sera mis en place.
Mais le plus grave tient à la philosophie même de la généralisation des PERCO : depuis la réforme des retraites de 2003, tous les gouvernements qui se sont succédé ont eu pour objectif de mettre un terme à notre système de retraite par répartition, donc fondé sur la solidarité intergénérationnelle.
En l’espèce, l’adhésion automatique à un PERCO non seulement généralise l’épargne individuelle en prévision de la retraite, mais surtout oblige les salariés à financer les grandes entreprises et leurs actionnaires par le biais des fonds de pension.
Peu à peu, les plans d’épargne, qui concurrencent déjà le système de retraite par répartition, risquent de prendre le pas sur ce dernier. Mais n’est-ce pas votre objectif, monsieur le ministre ?
Vous renvoyez ainsi les salariés à leur responsabilité individuelle d’assurer leur retraite, alors même que le système du PERCO est profondément inégalitaire. En effet, chaque salarié cotise en fonction de ses moyens ; les plus pauvres, les travailleurs précaires ou, tout simplement, ceux qui disposent de revenus modestes n’auront aucune couverture vieillesse.
C’est pourquoi, dès lors que nous sommes, par principe, opposés au dispositif du PERCO, nous rejetons catégoriquement la règle de l’adhésion automatique des salariés à ces plans d’épargne prévue par l’article 2 nonies, dont nous demandons la suppression.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. La commission a approuvé le principe d’une – éventuelle – adhésion par défaut du salarié au PERCO. Elle ne peut donc qu’être hostile à ces deux amendements identiques de suppression.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable : en définitive, c’est l’ouverture qui est automatique, et non l’adhésion ; il n’est donc pas question d’imposer au salarié un versement qui ne serait pas volontaire.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Monsieur le ministre, à partir du moment où, dans une entreprise, un accord aura été conclu qui instituera un PERCO et prévoira une adhésion automatique des salariés, ceux-ci ne pourront faire autrement que d’y souscrire ! Ils adhéreront d’office quand ils entreront dans l’entreprise.
En outre, ce projet de loi ne précise pas les conditions dans lesquelles les salariés seront informés et pourront faire savoir à leur entreprise qu’ils ne souhaitent pas adhérer automatiquement au PERCO. Ces dispositions sont renvoyées à un décret, ce que je trouve tout de même assez « fort de café » s'agissant d’une obligation d’adhésion prévue dans un accord, fût-il signé à la suite d’une négociation par les parties concernées !
Monsieur le ministre, les explications que vous nous avez données ne me satisfont donc nullement. Aussi, j’invite le Sénat à voter ces deux amendements identiques.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 49 et 81.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 9 nonies.
(L'article 9 nonies est adopté.)
Articles additionnels après l'article 2 nonies
M. le président. L'amendement n° 82, présenté par Mmes David, Pasquet et Hoarau, MM. Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 2 nonies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le premier alinéa de l'article L. 2242-1 du code du travail, après le mot : « négociation », il est inséré le mot : « loyale ».
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Il s'agit en quelque sorte d’un amendement d’appel, qui vise à prévoir que la négociation annuelle obligatoire sera « loyale ».
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Parce que les négociations ne sont pas loyales ?
Mme Annie David. Nous avons beaucoup parlé de « bonne foi » tout à l'heure. C’est pourquoi nous vous proposons, mes chers collègues, de préciser ce point dans le projet de loi.
En effet, quand débutent les négociations annuelles obligatoires, les fameuses NAO, le résultat est – si j’ose dire – connu d’avance : le dirigeant a pratiquement la certitude que la négociation débouchera sur l’accord qu’il souhaite ou n’aboutira pas, puisque, in fine, c’est de lui que dépend la décision.
C’est pourquoi nous demandons que la négociation salariale soit « loyale », ce qui suppose que les parties soient de bonne foi et qu’elle aboutisse à des hausses de salaires.
Cet amendement est cohérent avec notre souhait, plus général, de renforcer les pouvoirs des salariés dans l’entreprise, notamment afin que ceux-ci aient connaissance de l’utilisation des capitaux qui y est faite.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. J’ai bien compris qu’il s’agissait d’un amendement d’appel.
Toutefois, je crains que cet ajout ne soit facteur d’insécurité juridique et de contentieux, car la notion de « négociation loyale » peut se prêter à bien des interprétations.
En outre, la procédure qui préside à la négociation annuelle sur les salaires se trouve déjà minutieusement encadrée par le code du travail.
Pour toutes ces raisons, l’ajout proposé ne me semble pas opportun, et j’émets donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Il est défavorable : tant le code du travail que la jurisprudence apportent déjà les précisions demandées par les auteurs de cet amendement. Ce dernier est donc satisfait.
M. le président. L'amendement n° 83 rectifié, présenté par Mmes David, Pasquet et Hoarau, MM. Fischer, Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 2 nonies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Au début du premier alinéa de l'article L. 2242-4 du code du travail, il est ajouté une phrase ainsi rédigée :
« Au terme de la négociation, l'accord conclu doit être majoritaire au sens de l'article L. 2236-6 du code du travail.
II. Dans le premier alinéa de l'article L. 2232-6 du code du travail, remplacer les mots : « au moins 30 % » par les mots : « au moins 50 % ».
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. L’article L. 2242-4 du code du travail a trait à la validité des accords collectifs, dont les accords de branche.
Chacun, ici, se souviendra que, lors de l’examen du projet de loi relatif au dialogue social et au temps de travail, nous avions, mes collègues et moi-même, déposé de nombreux amendements sur ce qui allait devenir l’article 8, pour modifier les dispositions relatives à la validité des accords de branche.
En effet, la rédaction proposée alors, et retenue par la majorité, visait à reconnaître la validité d’un accord dès lors que celui-ci était signé par au moins une organisation représentative, c’est-à-dire ayant obtenu au moins 30 % des suffrages exprimés.
Je me souviens également d’avoir mis en garde le Gouvernement contre le risque de création d’une nouvelle forme d’accord minoritaire qui pourrait résulter de son acceptation par une minorité que l’on pourrait appeler « minorité renforcée », ou « qualifiée ». Je visais la situation où un accord de branche serait signé par une seule organisation syndicale représentative ayant obtenu plus de 30 % des suffrages exprimés, alors que les autres organisations syndicales, supérieures en nombre et pourcentages obtenus, mais n’atteignant pas le seuil des 50 %, seraient défavorables à cet accord, sans pouvoir légalement s’y opposer.
Je ne reviendrai pas sur la discussion que nous avons eue alors, notamment quant à la modification unilatérale apportée par le Gouvernement à l’article 17 de la position commune, et donc, par voie de conséquence, à l’ensemble de la loi relative au dialogue social. Cependant, il faut garder cela en tête, pour se souvenir de ce que furent alors les positions des organisations syndicales.
Je crois pouvoir dire sans trop me tromper que l’émergence d’un accord majoritaire, assis sur les résultats obtenus aux élections de branche, plus précisément sur un seuil de 50 %, aurait pour effet de légitimer réellement les accords ainsi conclus, puisque reposant véritablement sur la représentativité.
C’est pourquoi nous proposons l’adoption de cet amendement, qui fait écho à la réponse que m’avait faite M. About, en qualité de président de la commission des affaires sociales, à savoir que l’accord majoritaire viendrait : le temps est venu !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement vise à ce que tout accord salarial conclu dans l’entreprise soit obligatoirement un accord majoritaire.
Les règles relatives à la validité des accords collectifs viennent d’être réformées par la loi du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail. Cette loi a transposé les dispositions d’une position commune signée par plusieurs organisations patronales et syndicales, dont la CGT.
Les partenaires sociaux n’ont pas souhaité que la règle de l’accord majoritaire soit retenue à ce stade.
Il n’est donc pas opportun d’imposer, par ce texte, la conclusion d’accords majoritaires alors que la loi du 20 août n’a pas encore commencé à produire ses effets.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Je ne sais plus exactement quel a été le vote de Mme David sur le texte du 20 août (Sourires sur les travées de l’UMP), mais je sais que ledit texte répond à sa question.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
Mme Annie David. C’est 30 % dans le texte !
M. Xavier Bertrand, ministre. Pas plus de 50 % d’opposition ! Je ne sais pas si vous avez voté ce texte, mais vous le connaissez bien !
M. Guy Fischer. Oui, nous le connaissons bien ! D’ailleurs, nous connaissons bien tous les textes ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 29, présenté par M. Dassault, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 2 nonies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans l'article L. 3334-3 du code du travail, les mots : « cinq ans » sont remplacés par les mots : « trois ans à la date de publication de la loi n° ... du ... en faveur des revenus du travail ».
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à encourager la conclusion d'accords d'épargne retraite.
Dans le droit existant, l'article L. 3334-3 du code du travail prévoit que, dans les entreprises ayant mis en place un plan d'épargne d'entreprise depuis plus de cinq ans, une négociation doit s'ouvrir en vue de la mise en place d'un PERCO.
Cependant, ces dispositions sont inappliquées parce que la date à partir de laquelle court le délai de cinq ans n'est pas précisée. Par ailleurs, ce délai de cinq ans est très long : il faut pouvoir négocier plus rapidement la mise en place d'accords d'épargne retraite.
Le présent amendement vise donc, d'une part, à préciser que le délai entre la négociation d'un PEE et celle d'un PERCO doit être apprécié à compter de la date de publication de la présente loi au Journal officiel, et, d'autre part, à réduire ce délai de cinq ans à trois ans.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement vise à rendre obligatoire une négociation sur la mise en place d’un PERCO dans les entreprises disposant d’un PEE depuis plus de trois ans à la date de promulgation de la loi.
Actuellement, une disposition similaire figure dans le code du travail, mais elle prévoit un délai de cinq ans.
La commission est favorable au développement du PERCO.
Elle souhaite entendre l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Je demande à M. le rapporteur pour avis de rectifier son amendement, en supprimant les mots : « à la date de publication de la loi n° ... du ... en faveur des revenus du travail ». Cette rectification est indispensable pour que le Gouvernement puisse émettre un avis favorable.
M. le président. Monsieur le rapporteur pour avis, acceptez-vous de procéder à cette rectification ?
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 29 rectifié, présenté par M. Dassault, au nom de la commission des finances, et qui est ainsi libellé :
Après l'article 2 nonies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans l'article L. 3334-3 du code du travail, les mots : « cinq ans » sont remplacés par les mots : « trois ans ».
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Elle s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée, n’ayant pas examiné l’amendement dans sa version rectifiée.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 2 nonies.
L'amendement n° 11 rectifié bis, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l'article 2 nonies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 3334-6 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En outre, si le règlement du plan le prévoit, les entreprises peuvent effectuer un versement initial dans ce plan, dans la limite d'un plafond fixé par décret, même en l'absence de contribution du salarié. Ce versement est soumis au même régime social et fiscal que les contributions des entreprises visées à l'alinéa précédent. »
II. - Les pertes de recettes pour l'État résultant du I sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. - Les pertes de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du I sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement tend à autoriser les entreprises à effectuer un versement dans les PERCO que l'on pourrait qualifier de « versement d’amorçage » : au moment où le salarié adhère au PERCO, l'entreprise pourrait effectuer un premier versement avant même que le salarié ait lui-même versé une contribution. De cette manière, le salarié sera – nous l’espérons – encouragé à s'intéresser au PERCO et à y placer une partie de son épargne.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 11 rectifié ter.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 2 nonies.
L'amendement n° 12, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l'article 2 nonies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le chapitre VI du titre IV du livre III de la troisième partie du code du travail est ainsi renommé : « Conseil d'orientation de la participation, de l'intéressement, de l'épargne salariale et de l'actionnariat salarié ».
II. - Dans le chapitre VI du titre IV du livre III de la troisième partie du code du travail, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. 3346-1. - Le Conseil d'orientation de la participation, de l'intéressement, de l'épargne salariale et de l'actionnariat salarié a pour missions :
« 1° De promouvoir auprès des entreprises et des salariés les dispositifs de participation, d'intéressement, d'épargne salariale et d'actionnariat salarié ;
« 2° D'évaluer ces dispositifs et de formuler toute proposition susceptible de favoriser leur diffusion.
« Il peut en outre être saisi par le Gouvernement et par la commission compétente de chaque assemblée de toute question entrant dans son champ de compétences. Les rapports et recommandations établis par le Conseil d'orientation sont communiqués au Parlement et rendus publics.
« Le Conseil d'orientation est présidé par le Premier ministre ou par son représentant. Un décret détermine sa composition et ses modalités de fonctionnement, dans des conditions de nature à assurer son indépendance et sa représentativité et à garantir la qualité de ses travaux. »
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement vise à substituer au Conseil supérieur de la participation, le CSP, qui s'est réuni pour la première fois il y a une douzaine d'années, un Conseil d'orientation pour la participation, l'intéressement, l'épargne salariale et l'actionnariat salarié, ou COPIESAS.
Ce Conseil, aux compétences élargies, serait rattaché au Premier ministre, et non plus au ministre du travail, afin de bien souligner le caractère interministériel de ses activités.
Il serait chargé d'une fonction d'évaluation, de recommandation et de promotion de ces dispositifs.
Il comprendrait des représentants des administrations concernées, des partenaires sociaux, des associations, ainsi que des personnalités qualifiées. Les conditions de nomination de ses membres et ses modalités de fonctionnement seront précisées par décret dans des conditions garantissant son indépendance.
Comme il se substituera au CSP, il n'occasionnera pas de frais supplémentaires pour les finances publiques. Peut-être, ainsi, monsieur le rapporteur pour avis, pourrons-nous étudier toutes celles de vos propositions que nous n’aurons pas pu retenir aujourd'hui.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Il est tout à fait favorable, car cet amendement est d’une grande pertinence : de nombreuses modifications ont affecté la participation depuis maintenant plus d’une dizaine d’années, et il était essentiel que le Conseil supérieur de la participation évolue.
Je saisis cette occasion pour souligner le rôle très important qu’a joué Franck Borotra, fervent partisan de la participation, à la tête de cet organisme.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 2 nonies.
L'amendement n° 13, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l'article 2 nonies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l'article L. 3332-20 du code du travail, il est inséré un nouvel alinéa ainsi rédigé :
« À compter du troisième exercice clos, le prix de cession des titres émis par des entreprises employant moins de cinq cents salariés peut être déterminé, au choix de l'entreprise, selon l'une des méthodes décrites aux deux alinéas précédents. »
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Lorsqu'une société non cotée décide de procéder à une augmentation de capital réservée aux adhérents du plan d'épargne d'entreprise, elle doit d'abord faire évaluer la valeur de ses titres par un expert. Cette expertise est coûteuse, de l'ordre de 15 000 euros, et induit des coûts récurrents puisqu'elle doit être reproduite chaque année par le commissaire aux comptes pour actualiser la valorisation de la société. Cela explique que peu de PME non cotées procèdent à ce type d'augmentation de capital.
Afin de les encourager à y avoir recours, et donc pour favoriser l'actionnariat salarié, la commission propose, par cet amendement, d'autoriser les entreprises de moins de cinq cents salariés à utiliser une méthode de valorisation de leurs titres moins coûteuse, qui s'appuie sur la valeur de l'actif net réévalué, déterminée à partir d'un bilan certifié.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 2 nonies.
L'amendement n° 14, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l'article 2 nonies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 214-40 du code monétaire et financier est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation aux dispositions de l'article L. 214-3, la constitution, la transformation, la fusion, la scission ou la liquidation d'un fonds commun de placement d'entreprise investi en titres non admis aux négociations sur un marché réglementé et émis par une entreprise employant moins de cinq cents salariés n'est pas soumise à l'agrément de l'autorité des marchés financiers mais doit lui être déclarée, dans des conditions définies par son règlement général, dans le mois qui suit sa réalisation. »
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Afin d'encourager les PME à avoir recours aux FCPE – fonds communs de placement d’entreprise – d'actionnariat salarié, la commission propose, par cet amendement, de simplifier la procédure d'agrément de ces FCPE par l'autorité des marchés financiers.
Plutôt que d'accorder son agrément à chaque FCPE pris individuellement, l'AMF approuverait un modèle de règlement et des documents types que les sociétés de gestion pourraient ensuite – ce serait une simple faculté – proposer aux PME. Cela permettrait de disposer d'un système « clé en main » pour la mise en place de FCPE d'actionnariat salarié. L'AMF serait naturellement informée de la création de chaque FCPE, ce qui lui permettrait d'exercer son contrôle.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement, l’AMF ayant mis en place, depuis peu, une procédure d’agrément par analogie qui vise à simplifier et à accélérer les procédures d’agrément, sans toutefois en supprimer la nécessité.
À défaut de retrait, l’avis du Gouvernement sera défavorable.
M. le président. Madame le rapporteur, votre amendement est-il maintenu ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Oui, monsieur le président.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 2 nonies.
L'amendement n° 20 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l'article 2 nonies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - La première phrase du quatrième alinéa de l'article L. 225-185 du code de commerce est complétée par les mots : « et L. 225-186-1 ».
II. - Après l'article L. 225-186 du même code, il est inséré un article L. 225-186-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 225-186-1. - Dans une société dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé, des options ouvrant droit à la souscription ou à l'achat d'actions ne peuvent être attribuées aux personnes mentionnées au quatrième alinéa de l'article L. 225-185 que si la société remplit au moins une des conditions suivantes au titre de l'exercice au cours duquel sont attribuées ces options :
« 1° la société procède, dans les conditions prévues aux articles L. 225-177 à L. 225-186, à une attribution d'options au bénéfice de l'ensemble de ses salariés et des salariés de ses filiales au sens de l'article L. 233-1 et relevant de l'article L. 210-3 ;
« 2° la société procède, dans les conditions prévues aux articles L. 225-197-1 à L. 225-197-5, à une attribution gratuite d'actions au bénéfice de l'ensemble de ses salariés et des salariés de ses filiales au sens de l'article L. 233-1 et relevant de l'article L. 210-3 ;
« 3° un accord d'intéressement au sens de l'article L. 3312-2 du code du travail, un accord de participation dérogatoire au sens de l'article L. 3324-2 du même code ou un accord de participation volontaire au sens de l'article L. 3323-6 du même code est en vigueur au sein de la société et de chacune de ses filiales au sens de l'article L. 233-1 et relevant de l'article L. 210-3. Si dans la société ou dans ses filiales précitées, des accords sont en vigueur ou étaient en vigueur au titre de l'exercice précédent, la première attribution autorisée par une assemblée générale postérieure à la date de publication de la loi n° ... du ... en faveur des revenus du travail, ne peut intervenir que si les sociétés concernées modifient les modalités de calcul de chacun de ces accords au moyen d'un accord ou d'un avenant ou versent un supplément d'intéressement collectif au sens de l'article L. 3314-10 du code du travail ou un supplément de réserve spéciale de participation au sens de l'article L. 3324-9 du même code. »
III. - L'article L. 225-184 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ce rapport indique également le nombre, le prix et les dates d'échéance des options de souscription ou d'achat d'actions consenties, durant l'année, par les sociétés visées à l'alinéa précédent, à l'ensemble des salariés bénéficiaires ainsi que le nombre de ceux-ci et la répartition des options consenties entre les catégories de ces bénéficiaires. »
IV. - Les premier et deuxième alinéas du II de l'article L. 225-197-1 du même code sont complétés par les mots : « et dans le respect des conditions mentionnées à l'article L. 225-197-6 ».
V. - Après l'article L. 225-197-5 du même code, il est inséré un article L. 225-197-6 ainsi rédigé :
« Art. L. 225-197-6. - Dans une société dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé, des actions ne peuvent être attribuées dans le cadre des premier et deuxième alinéas du II de l'article L. 225-197-1 que si la société remplit au moins une des conditions suivantes au titre de l'exercice au cours duquel sont attribuées ces actions :
« 1° la société procède, dans les conditions prévues aux articles L. 225-197-1 à L. 225-197-5, à une attribution gratuite d'actions au bénéfice de l'ensemble de ses salariés et des salariés de ses filiales au sens de l'article L. 233-1 et relevant de l'article L. 210-3 ;
« 2° la société procède, dans les conditions prévues aux articles L. 225-177 à L. 225-186, à une attribution d'options au bénéfice de l'ensemble de ses salariés et des salariés de ses filiales au sens de l'article L. 233-1 et relevant de l'article L. 210-3 ;
« 3° un accord d'intéressement au sens de l'article L. 3312-2 du code du travail, un accord de participation dérogatoire au sens de l'article L. 3324-2 du même code ou un accord de participation volontaire au sens de l'article L. 3323-6 du même code est en vigueur au sein de la société et de chacune de ses filiales au sens de l'article L. 233-1 et relevant de l'article L. 210-3. Si dans la société ou dans ses filiales précitées, des accords sont en vigueur ou étaient en vigueur au titre de l'exercice précédent, la première attribution autorisée par une assemblée générale postérieure à la date de publication de la loi n° ... du ... en faveur des revenus du travail, ne peut intervenir que si les sociétés concernées modifient les modalités de calcul de chacun de ces accords au moyen d'un accord ou d'un avenant ou versent un supplément d'intéressement collectif au sens de l'article L. 3314-10 du code du travail ou un supplément de réserve spéciale de participation au sens de l'article L. 3324-9 du même code. »
VI. - L'article L. 225-197-4 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ce rapport indique également le nombre et la valeur des actions qui, durant l'année, ont été attribuées gratuitement par les sociétés visées à l'alinéa précédent, à l'ensemble des salariés bénéficiaires ainsi que le nombre de ceux-ci et la répartition des actions attribuées entre les catégories de ces bénéficiaires. »
VII. - Les I à VI s'appliquent aux attributions d'options ou aux attributions gratuites d'actions autorisées par les assemblées générales extraordinaires réunies à compter de la date de publication de la présente loi.
La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. J’ai évoqué l’objet de cet amendement lors de la discussion générale et il est très simple : plus de stock-options seulement pour quelques-uns. C’est un principe qui a été évoqué à différentes reprises par M. le Président de la République pendant la campagne présidentielle : s’il y a des stock-options pour quelques-uns, il y a forcément un dispositif pour l’ensemble des salariés. C’est aussi simple que cela !
Cet amendement vise à mettre un terme à ce que je qualifierai d’ « anachronisme » ou de « spécificité », situation qui, à mon sens, n’est pas logique si l’on veut associer l’ensemble des salariés à la réussite de l’entreprise.
Par conséquent, s’il y a des stock-options pour certains dirigeants, il doit forcément y avoir un dispositif pour l’ensemble des salariés : soit des stock-options, soit des actions gratuites, soit davantage d’intéressement, soit davantage de participation. S’il y a pour quelques-uns, il y a pour tous : tel est le principe simple de cet amendement.
M. le président. Le sous-amendement n° 92, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. - Après le quatrième alinéa (3°) du texte proposé par le II de l'amendement n° 20 pour l'article L. 225-186-1 du code de commerce, insérer un alinéa rédigé comme suit :
« ...° Un accord relatif aux salaires a été conclu dans la société depuis moins de deux ans.
II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant pour l'État et les organismes de sécurité sociale du I ci-dessus, compléter l'amendement n° 20 par un paragraphe ainsi rédigé :
... - 1. - La perte de recettes résultant pour l'État de la possibilité pour une société de proposer à ses mandataires sociaux des options ouvrant droit à la souscription ou à l'achat d'actions lorsqu'a été conclu en son sein un accord relatif aux salaires est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
2. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale de la possibilité pour une société de proposer à ses mandataires sociaux des options ouvrant droit à la souscription ou à l'achat d'actions lorsqu'a été conclu en son sein un accord relatif aux salaires est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. L’amendement du Gouvernement, déposé tardivement dans la discussion, est habile – et M. le ministre ne manque pas d’habileté ! –, mais c’est tout de même un leurre.
Monsieur le ministre, vous nous proposez finalement trois conditions à l’attribution de stock-options.
Je ferai d’abord remarquer que, face à l’indignation de nos concitoyens qui ont eu à connaître des scandales récents concernant l’attribution de parachutes dorés ou la levée d’options alors même que leur entreprise était en grande difficulté, le Gouvernement lâche du lest. Toutefois, cela n’aura guère d’effet dans la mesure où vous proposez, comme condition alternative, soit un plan d’intéressement, soit un accord de participation – c’est une idée qui avait été émise au printemps dernier par Mme la ministre de l’économie, mais qui n’avait alors pas connu de suite –, soit la distribution généralisée de stock-options.
Je ferai également remarquer que, l’année dernière, lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, mon collègue François Marc et moi-même avions présenté des amendements concernant l’assujettissement des stock-options au régime fiscal normal et aux taxes sociales. Or, dans la discussion forte intéressante qui s’était ensuivie, M. le rapporteur général avait fait valoir que les stock-options étaient un élément essentiel de l’attractivité de nos entreprises pour les cadres de haut niveau et il avait assimilé le régime applicable aux stock-options non pas à des éléments de rémunération variables mais à une plus-value.
En disant que vous généralisez – à bon compte, du reste – le mécanisme des stock-options, vous faites dépendre un élément variable de la rémunération des salariés du cours de l’action de leur entreprise. Dans la période que nous vivons, cela apparaît comme de la monnaie de singe !
Le MEDEF a fait savoir qu’il ne voulait pas qu’on légifère sur le montant des différents avantages financiers consentis aux cadres dirigeants. Vous ne l’évoquez donc pas dans votre amendement.
C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous présenterons le 4 novembre prochain, lors de l’examen d’une proposition de loi que nous avons déposée, un mécanisme complet visant à limiter les avantages consentis à quelques dirigeants d’entreprise, et qui aura une portée autrement plus grande.
Nous vous proposons aujourd'hui d’introduire une quatrième condition, plus intéressante pour les salariés, nous semble-t-il, en vertu de laquelle l’entreprise qui souhaite distribuer des avantages financiers tels que les stock-options doit être couverte par un accord salarial datant de moins de deux ans. Il s’agit selon nous d’une condition de base nécessaire – peut-être pas suffisante – à l’amélioration du pouvoir d’achat et à la clarification de la gestion des entreprises.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. L’amendement n° 20 rectifié vise à garantir que, en cas de distribution de stock-options dans l’entreprise, tous les salariés bénéficient d’un dispositif qui les associe aux fruits de la croissance de l’entreprise.
C’est une mesure cohérente avec les efforts engagés en vue de développer l’intéressement et la participation et une mesure de justice pour les salariés. La commission émet un avis favorable.
Le sous-amendement n° 92 tend à subordonner l’attribution de stock-options à la conclusion d’un accord salarial dans l’entreprise depuis moins de deux ans.
Cette proposition s’inscrit mal dans la logique de l’amendement n° 20 rectifié, qui prévoit que les stock-options ne pourront être attribuées que s’il existe dans l’entreprise un mécanisme associant l’ensemble des salariés à ses résultats. La conclusion d’un accord salarial relève d’une logique différente puisque les salaires ne sont pas liés au montant des bénéfices réalisés par l’entreprise une année donnée.
Telle est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur ce sous-amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 92 ?
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote, sur l’amendement n° 20 rectifié.
Mme Annie David. Mme Bricq a dit que cet amendement était un leurre. Pour nous, non seulement c’est un leurre, mais c’est une provocation dans cette période où le pouvoir d’achat des salariés est au plus bas, où les uns et les autres se demandent de quoi sera fait le lendemain, notamment dans un grand nombre d’entreprises où les plans sociaux se suivent et où les salariés sont chaque fois moins nombreux, où les salariés privés d’emploi vont bientôt se voir réduits au RSA ou à d’autres minima sociaux mis en place par votre gouvernement pour les obliger à accepter de travailler dans des conditions tout à fait indignes.
Monsieur le ministre, prétendre que vous allez permettre à tous les salariés d’être gagnants grâce à cette généralisation des stock-options et aux nouvelles conditions que vous voulez imposer est véritablement indécent lorsqu’est en jeu le pouvoir d’achat de millions de personnes. Aujourd’hui, je le rappelle, plus de 2 millions de salariés sont encore au SMIC, sans compter tous les demandeurs d’emploi, toutes les personnes à temps partiel et tous ceux qui galèrent chaque jour.
Nous voterons farouchement contre cet amendement car nous sommes opposés à cette méthode qui tend à faire croire que la rémunération, c’est autre chose que le salaire, que chacun dans l’entreprise est l’égal de l’autre. Toutefois, vous oubliez l’essentiel, à savoir qu’il existe un lien de subordination entre les uns et les autres, et que ceux qui touchent le jackpot sont toujours les mêmes, vous le savez très bien, monsieur le ministre.
M. Guy Fischer. Très bien !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 2 nonies.
La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. Les explications que vous avez données, mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, montrent bien votre gêne à l’égard de cet amendement.
À l’Assemblée nationale, Jean-Pierre Balligand avait déposé un amendement qui allait moins loin que celui-ci et le Gouvernement avait pris l’engagement d’aller, lui, plus loin : c’est ce que nous faisons.
Vous parlez de cette mesure depuis longtemps, mais vous n’en avez jamais pris l’initiative, hormis la proposition de loi qui sera présentée prochainement (Protestations sur les travées du groupe socialiste.) …
Mme Nicole Bricq. Si !
M. Xavier Bertrand, ministre. C’est le Gouvernement et sa majorité qui sont à l’initiative de cette mesure. Vous, vous ne l’êtes pas. Je voulais juste le souligner, cela fait du bien !
M. Jean-Paul Emorine. Très bien !
Mme Nicole Bricq. Je demande la parole.
M. le président. Vous vous êtes déjà exprimée, ma chère collègue, et nous avons voté ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
M. François Marc. Il s’agit d’une mise en cause !
M. le président. S’il y a une mise en cause, c’est un fait personnel et vous pourrez intervenir à la fin de la séance, madame Bricq. En cet instant, le règlement ne me permet pas de vous donner la parole.
Mme Nicole Bricq. Mais le ministre a parlé, lui, et après le vote !
M. François Marc. Et pour dire des mensonges !
M. le président. L'amendement n° 28, présenté par M. Dassault, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 2 nonies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'avant-dernière phrase du premier alinéa du I de l'article 8 de l'ordonnance n° 2006-344 du 23 mars 2006 relative aux retraites professionnelles supplémentaires est ainsi rédigée :
« Cette personne morale a pour objet exclusif d'administrer une ou plusieurs institutions de retraite professionnelle. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. Cet amendement concerne les problèmes de retraite des salariés étrangers venant travailler en France.
Aujourd’hui, quand un salarié italien vient travailler en France, un gestionnaire français de PERCO ne peut pas gérer le compte d’épargne retraite de cet Italien dans la mesure où il n’a pas été signé en France, alors qu’un teneur de compte italien pourra gérer le plan d’épargne collective d’un salarié français qui va travailler en Italie ; c’est la même chose pour un salarié allemand.
Notre législation est plus restrictive que celle de nos voisins et plus restrictive que ce qu’exige la directive européenne.
L’amendement tend à remédier à cette situation en autorisant les teneurs de comptes français à gérer les plans d’épargne signés dans un autre pays de l’Union pour les salariés qui viennent travailler en France et, en conséquence, à renforcer les sociétés de gestion françaises.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement très technique vise à permettre à des administrateurs de retraite professionnelle installés en France de gérer des plans d’épargne retraite analogues aux PERCO existant dans d’autres États membres de l’Union européenne. Il modifie pour ce faire une ordonnance de 2006 qui a transposé de façon trop restrictive une directive européenne de 2003.
La commission émet un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l'amendement n° 28.
Mme Annie David. Nous ne voterons pas cet amendement, mais je veux surtout dire à M. le ministre que nous ne sommes absolument pas « gênés » par l’amendement n° 20 rectifié.
Vous n’avez sans doute pas bien écouté, .monsieur le ministre : nous sommes farouchement opposés à toute rémunération aléatoire et différée par rapport au salaire et nous considérons que, particulièrement dans le contexte actuel, votre amendement relève de la pure provocation.
Puisque nous ne pouvions pas vous répondre, j’ai profité de cette explication de vote pour le faire.
M. Guy Fischer. Très bien !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 2 nonies.
Article 3
I. - Un groupe d'experts se prononce chaque année sur l'évolution du salaire minimum de croissance et de l'ensemble des revenus.
Le rapport qu'il établit à cette occasion est adressé à la Commission nationale de la négociation collective et au Gouvernement. Il est rendu public.
Le Gouvernement, qui remet à la Commission nationale de la négociation collective, préalablement à la fixation annuelle du salaire minimum, une analyse des comptes économiques de la Nation et un rapport sur les conditions économiques générales s'écartant du rapport établi par le groupe d'experts, motive par écrit ces différences auprès de la Commission nationale de la négociation collective.
Un décret détermine les modalités d'application des alinéas précédents, notamment les conditions dans lesquelles sont désignés les experts visés ci-dessus, garantissant leur indépendance.
I bis. - Le code du travail est ainsi modifié :
1° Au 5° de l'article L. 2271-1, après le mot : « donner », sont insérés les mots : «, après avoir pris connaissance du rapport annuel établi par un groupe d'experts désigné à cet effet, » ;
2° Aux articles L. 3231-6 et L. 3231-11, la date : « 1er juillet » est remplacée par la date : « 1er janvier ».
II. - L'article L. 3231-6 du code du travail, dans sa rédaction issue de la présente loi, est applicable à compter du 1er janvier 2010. La date d'effet de la fixation du salaire minimum de croissance pour l'année 2009 est maintenue au 1er juillet.
M. le président. Je suis saisi de onze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les amendements nos 50, 84 et 96 sont identiques.
L'amendement n° 50 est présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 84 est présenté par Mmes David, Pasquet et Hoarau, MM. Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 96 est présenté par M. P. Dominati.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle, pour présenter l’amendement n° 50.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Avant de présenter cet amendement, je tiens à vous dire, monsieur le ministre, que l’amendement n° 20 rectifié que vous avez défendu tout à l'heure reprend certaines dispositions contenues dans la proposition de loi déposée par Mme Bricq.
L’article 3 de ce projet de loi s’inscrit dans la stratégie globale que vous déployez depuis plusieurs années maintenant avec le MEDEF pour détruire toutes les dispositions qui constituent le statut salarié, lequel a été difficilement acquis à partir du xixe siècle.
Vous avez bricolé le code du travail, vous avez démantelé la législation relative à la durée du travail, vous avez supprimé le principe de faveur des accords de branche, vous avez réduit à néant les droits des demandeurs d’emploi, vous vous attaquez méthodiquement au financement de la protection sociale, qui est indispensable, surtout pour les plus modestes d’entre nous, vous détruisez les services publics essentiels pour assurer la cohérence territoriale et la cohésion sociale de notre pays.
Sous couvert de mener une réforme indispensable, qui n’est que l’imitation servile et à contretemps d’un libéralisme sous respiration artificielle, les gouvernements qui se succèdent depuis 2002, mais surtout depuis 2007, se comportent comme une machine à broyer.
Les salariés, les chômeurs, les étudiants, les retraités, tous subissent déjà cet acharnement. Demain, ils devront, de surcroît, se priver d’une part de leurs revenus pour remédier aux errements de ce système financier sur l’autel duquel on les sacrifie.
L’article 3 de votre projet de loi n’en est que plus choquant dans la mesure où il vise à diminuer encore les salaires des plus mal rémunérés de nos concitoyens, au prétexte qu’ils ne sont pas compétitifs avec les salariés des pays en développement. Vous commettez ainsi à la fois une faute sur le plan social et une erreur sur le plan économique.
Notre économie tient largement par la consommation. Or nous sommes dans un système qui implose. On n’hésite pas à nous « seriner » que l’argent ne manque pas, qu’il y a des liquidités, mais que c’est la confiance qui fait défaut.
En effet, le salarié au SMIC n’a confiance ni en vous ni dans le système bancaire. Il est dépourvu de liquidités et est, en permanence, sur la corde raide. Aujourd’hui, il est presque hors jeu, réduit à la débrouillardise et au hard discount pour boucler ses fins de mois.
Réduire son salaire direct revient à réduire encore, je le précise, sa capacité à consommer, et cette décision aura des conséquences sur les entreprises, qui vont avoir besoin non seulement de crédits, mais également de débouchés pour assurer leurs propres fins de mois ! Soutenir l’économie, ce n’est pas seulement mettre en place un plan de soutien en faveur des entreprises, c’est aussi leur assurer le retour sur investissement.
Nous le savons tous, ce sont non pas les hauts revenus, sérieusement écornés, qui vont relancer l’économie réelle, mais la consommation des millions de gens modestes. Il faudrait leur permettre d’accéder à la consommation pour « relancer la machine ».
Poursuivre la politique de destruction du statut salarial est aujourd’hui un contresens, et nous sommes totalement opposés à la machinerie que cet article met en place.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 84.
Mme Annie David. L’article 3 a subi quelques modifications depuis le projet de loi initialement présenté aux députés.
Au départ, le Gouvernement souhaitait créer une commission intitulée « Commission du salaire minimum de croissance », chargée de se prononcer chaque année sur l’évolution souhaitable du SMIC et appelée à conduire « une analyse économique sur les évolutions du marché du travail, en particulier l’évolution de la productivité, le partage de la valeur ajoutée, la compétitivité des entreprises, l’évolution des salaires minima dans les pays comparables, les interactions entre salaires et emploi, la structure des salaires et l’évolution des prix ».
Par ailleurs, l’article 3 fixe la date de revalorisation annuelle du SMIC au 1er janvier, et non plus au 1er juillet, comme c’est actuellement le cas.
Dans son exposé des motifs, le Gouvernement assure que l’objet de l’article 3 est « de moderniser la procédure de fixation du SMIC pour favoriser, à l’avenir, une évolution du SMIC davantage en phase avec les conditions économiques et le rythme des négociations salariales et en assurant une juste rétribution du travail ».
Mais je crois surtout que l’objectif du Gouvernement est d’accéder au vœu de Laurence Parisot, qui s’est déclarée favorable, en avril 2008, à une augmentation du SMIC en fonction non pas de critères politiques, mais de « critères économiques repérables et incontestables ». L’inflation est déjà prise en compte, mais elle a souhaité qu’une commission soit mise en place pour prendre la décision d’y intégrer l’évolution de la productivité. Or, comme par hasard, trois mois plus tard, en juillet dernier, vous appuyant sur un rapport du Conseil d’analyse économique – en voilà un qui tombe à pic ! –, vous proposez la création d’une commission devant prendre notamment en compte l’évolution de la productivité dans la fixation du SMIC.
Toutefois, l'Assemblée nationale a estimé qu’il n’était pas opportun de créer une énième commission chargée de réfléchir sur l’évaluation du SMIC.
En effet, il est difficilement compréhensible de vouloir moderniser la procédure de fixation du SMIC en créant une nouvelle commission alors qu’existent déjà un certain nombre d’organismes compétents en matière salariale : la Commission nationale de la négociation collective, le Conseil de l’emploi, des revenus et de la cohésion sociale, le Conseil d’analyse économique ou encore le Conseil d’orientation pour l’emploi, sans compter l’INSEE et la DARES, qui dépend, elle, du ministère du travail.
Certes, l’Assemblée nationale a décidé qu’un groupe d’experts serait chargé de se prononcer chaque année sur l’évolution du salaire minimum de croissance et de l’ensemble des revenus. Mais cela ne nous empêche pas de nous interroger sur le crédit que vous accordez à tous ces organismes publics et aux personnes qui les composent, à savoir des experts, impartiaux de surcroît ! Nul besoin d’en nommer de nouveaux, d’autant que les conditions de leur nomination seront fixées par décret, ce qui, quoi qu’en dise le texte, ne garantit pas leur indépendance !
Que ce soit au sein d’une commission ou d’un groupe d’experts, cette nouvelle procédure d’évaluation du salaire minimum de croissance, qui a perdu au passage son caractère interprofessionnel, ne nous satisfait pas, pas plus d’ailleurs que le fait de fixer, suivant une vieille revendication du MEDEF, la date de revalorisation du SMIC au 1er janvier, et non plus au 1er juillet.
En effet, le MEDEF souhaite depuis longtemps que la revalorisation du SMIC soit fixée le 1er janvier afin de l’annualiser, mais vous m’avez garanti, monsieur le ministre, que tel ne serait pas le cas !
M. Guy Fischer. Il a menti ! (Mme le rapporteur s’exclame.)
Mme Annie David. L’avenir nous le dira…
Avancer au 1er janvier la date de revalorisation annuelle du SMIC permettra sans aucun doute de ne pas prendre en compte l’inflation enregistrée en cours d’année avant le 1er juillet, mais surtout, d’intégrer les primes, les indemnités, le treizième mois, etc.
Par conséquent, nous demandons la suppression de l’article 3 de ce projet de loi, qui nous semble être l’instrument créé sur mesure pour répondre aux attentes du MEDEF.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, pour présenter l'amendement n° 96.
M. Philippe Dominati. Le libéral que je suis rejoint Mmes Jarraud-Vergnolle et David sur la volonté de suppression de l’article 3…
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Vous m’inquiétez !
M. Philippe Dominati. … mais ce n’est peut-être pas tout à fait pour les mêmes raisons.
L’acharné du dialogue social que vous êtes, monsieur le ministre, vous incite bien souvent à nous proposer la création d’organismes nouveaux. Naguère, vous prôniez la création d’une Haute Autorité ; aujourd'hui, vous proposez la création d’une commission du salaire minimum de croissance. L'Assemblée nationale, qui a voulu alléger le dispositif, a prévu qu’un groupe d’experts se prononcerait chaque année sur l’évolution du salaire minimum de croissance et de l’ensemble des revenus. Une expertise de plus ! Mais ce groupe d’experts n’aura aucun pouvoir décisionnaire.
D’une manière générale, je souhaite que le Gouvernement réduise le nombre de ces organismes. Voilà pourquoi j’ai déposé un amendement tendant à supprimer l’article 3.
M. le président. L'amendement n° 51, présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer le I de cet article.
La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Monsieur le ministre, combien existe-t-il aujourd’hui de conseils et de commissions chargés d’évaluer les effets des salaires et des revenus sur la situation des Français ? Officiellement au moins quatre : la Commission nationale de la négociation collective, dont la composition est tripartite, avec des représentants de l’État et des partenaires sociaux ; le Conseil de l’emploi, des revenus et de la cohésion sociale, composé d’experts très qualifiés et présidé par Jacques Delors ; le Conseil d’analyse économique, placé auprès du Premier ministre – ce qui n’est pas indifférent, on le verra –, composé d’une trentaine de membres nommés à titre personnel et de représentants de grandes administrations économiques et sociales ; le Conseil d’orientation pour l’emploi, qui a notamment pour mission de formuler des propositions susceptibles de lever les obstacles de toute nature à la création d’emplois.
Or le Gouvernement nous propose d’ajouter à ce brillant aréopage un groupe d’experts, au sein duquel on retrouverait certainement des personnalités issues de ces différentes instances, pour se prononcer sur la fixation annuelle du SMIC.
Il nous est donc permis, monsieur le ministre, de nous interroger sur le bien-fondé de cette mesure et sur son coût. Pourquoi créer une commission, un comité ou un groupe d’experts, alors que plusieurs de ses membres étudient déjà le même sujet ? Où est l’économie budgétaire dans cette affaire ? Mais là n’est pas le plus grave.
Aujourd’hui, c’est la Commission nationale de la négociation collective qui, en vertu du 5° de l’article L. 2271-1 du code du travail, donne un avis motivé au Gouvernement sur la fixation du SMIC. Pour ce faire, elle s’appuie sur les avis d’experts qu’elle souhaite entendre, le cas échéant, mais qui n’ont pas un caractère officiel. Au final, c’est la délibération de cet organe tripartite qui importe.
Avec ce projet de loi, vous allez exercer, monsieur le ministre, une pression sur les partenaires sociaux avant toute délibération de cette CNNC, au moyen d’un groupe d’experts officiels et d’un rapport public. Il conviendrait d’ailleurs que nous soyons informés du contenu du décret garantissant l’indépendance du groupe d’experts, à défaut de leur impartialité. Mais nous avons déjà un échantillon des procédés qui attendent les salariés !
Pour, selon vous, « dépolitiser » la fixation du SMIC, vous avez commandé à trois experts, MM. Cahuc, Cette et Zylberberg, membres du Conseil d’analyse économique, un rapport dont la teneur est heureusement connue depuis le mois de juillet dernier, même si sa parution officielle n’est prévue que pour le 4 novembre prochain, lorsque ce projet de loi aura été voté. On comprend pourquoi vous n’avez pas voulu que ce rapport soit diffusé avant notre débat !
Selon ce rapport intitulé « Salaire minimum et bas revenus : comment concilier justice sociale et efficacité économique ? », le SMIC n’est pas un moyen efficace pour réduire la pauvreté et les inégalités ; la pauvreté est principalement due au manque d’emploi, au trop faible nombre d’heures travaillées et à la situation familiale ; le salaire minimum est trop contraignant et trop élevé ; les prestations sociales conduisent à une trop faible incitation à la reprise d’emploi pour les moins qualifiés ; les jeunes sont particulièrement victimes de ce système. Les auteurs proposent en conséquence de réduire la pauvreté par des mesures ciblées, plutôt que par un salaire minimum élevé et uniforme. Ils sont favorables à la mise en place du RSA et à une nouvelle gestion du SMIC.
Le projet de loi généralisant le RSA et celui-ci ne font qu’un même texte : ils sont fidèles à la théorie selon laquelle le chômage des moins qualifiés serait dû au fait qu’ils sont trop payés et que le montant de l’ensemble des prestations sociales est trop élevé pour les obliger à sortir de leur paresse !
Vous mettez en place le RSA, un sous-SMIC subventionné, et, parallèlement, vous cassez le SMIC. Vous multipliez les emplois de service en contrats précaires et à temps partiel subi ; vous détruisez les garanties salariales et privatisez la protection sociale.
Votre projet politique est fondamentalement réactionnaire en ce qu’il tire profit de la fin des structures industrielles dans nos pays pour détruire le statut des salariés et les plonger dans la précarité et l’insécurité permanentes.
Je n’ai pas besoin d’ajouter, monsieur le ministre, que nous sommes irréductiblement opposés à ce processus.
M. le président. L'amendement n° 52, présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du I de cet article, après le mot :
croissance
insérer les mots :
en prenant obligatoirement en compte les critères d'évolution de l'indice national des prix à la consommation et d'évolution du pouvoir d'achat des salaires horaires moyens,
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Aux termes des articles L. 3231-5 et L. 3231-8 du code du travail, deux éléments doivent impérativement être pris en compte pour la fixation du SMIC : l’indice national des prix à la consommation établi par l’INSEE – sur lequel il y aurait beaucoup à dire, mais ce n’est pas notre sujet aujourd’hui – et l’augmentation du pouvoir d’achat des salaires horaires moyens.
Par cet amendement, nous proposons que le groupe d’experts, pour son travail sur l’évolution du SMIC, prenne obligatoirement en compte ces deux critères.
Aujourd’hui, 70 % des embauches se font sur la base du SMIC et en contrat précaire. Beaucoup sont des temps partiels imposés, notamment dans la grande distribution et le nettoyage, branches où les employeurs fondent leur prospérité sur l’exploitation de salariées femmes sous-payées.
C’est surtout pour ces catégories que nous sommes inquiets. En effet, le texte initial de votre projet de loi, monsieur le ministre, mentionnait les critères qui devraient être pris en compte : l’analyse économique des évolutions du marché du travail, l’évolution de la productivité, le partage de la valeur ajoutée, la compétitivité, l’évolution des salaires minimaux dans les pays comparables, les interactions entre salaires et emploi, la structure de salaires et l’évolution des prix.
Si vous avez abandonné, lors de l’examen du texte par l’Assemblée nationale, cette litanie un peu trop révélatrice des préoccupations du MEDEF et de la CGPME, il ne fait pas de doute qu’elle figurera dans le décret relatif au groupe d’experts. Or si la structure de salaires et l’évolution des prix sont des notions infiniment plus vagues que celles qui sont inscrites dans le code du travail, à savoir l’indice INSEE des prix et l’augmentation du pouvoir d’achat des salaires moyens, les autres critères sont tout à fait précis et révélateurs de vos intentions. En effet, vous liez clairement le taux de chômage au niveau du SMIC et des plus bas salaires.
Pourtant, lorsque les « experts » de l’économie – toujours eux ! – nous expliquent que, dans les prochains mois, le taux de chômage va remonter, comme il a déjà commencé à le faire, ce n’est pas en raison des salaires mirobolants des caissières de supermarchés ! C’est bien – personne ne peut le contester – à cause de la folie de votre système financier et de l’incurie des banquiers. Et nous sommes fort loin, avec les pratiques des bonus et des stock-options, du niveau du salaire moyen des Français.
Vous êtes à ce point conscient de l’indécence de ces rémunérations et de la colère de l’opinion que vous nous présentez un amendement par lequel vous prétendez encadrer l’attribution des stock-options.
Votre situation n’est pas facile : vous devez faire voter le RSA et la destruction du SMIC, deux mesures clefs illustrant la diffusion du phénomène des travailleurs pauvres, tout en annonçant le sauvetage des banques à coups de centaines de milliards d’euros d’argent public. C’est le sauvetage de la richesse pour les uns et le partage de la pauvreté pour les autres !
Cela n’a plus aucun sens sur le plan économique et témoigne simplement de la poursuite d’une politique de division de la société, qui répond aux intérêts de quelques-uns, à l’encontre des intérêts du pays.
M. le président. L'amendement n° 15, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
À la fin du premier alinéa du I de cet article, supprimer les mots :
et de l'ensemble des revenus
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement vise à recentrer les missions confiées au groupe d'experts que le projet de loi tend à instituer. L'Assemblée nationale a prévu que ce groupe émette un avis non seulement sur l'évolution du SMIC, mais aussi sur l’évolution de l'ensemble des revenus. Cela revient à lui donner un champ d'investigation très large : les revenus de transfert, comme les pensions de retraite ou les allocations familiales, les minima sociaux et les revenus du capital font partie des revenus des ménages, mais relèvent de problématiques différentes de celle du SMIC.
Il paraît donc préférable, pour éviter que le groupe ne se disperse dans ses travaux, qu'il se prononce, chaque année, sur la seule revalorisation du SMIC. Naturellement, cette question sera analysée au regard de celle, plus générale, de l'évolution des salaires.
Divers organismes, comme le Conseil d'analyse économique – CAE – ou le Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts – CERC –, sont en mesure de produire des études plus globales sur l'ensemble des revenus.
M. le président. L'amendement n° 85, présenté par Mmes David, Pasquet et Hoarau, MM. Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
À la fin du premier alinéa du I de cet article, remplacer les mots :
et de l'ensemble des revenus
par les mots :
dans le respect des dispositions prévues par les articles L. 3231-4 et L. 3231-5 du code du travail.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Il s’agit d’un amendement de repli, qui vise à clarifier le texte de l’article 3, en fixant deux objectifs.
Tout d’abord, le fait de prévoir que les experts devront se prononcer sur l’évolution du salaire minimum de croissance et sur l’ensemble des revenus tend à installer dans les esprits l’idée que salaire et revenus variables se situent sur le même plan. Or la position que nous défendons en général, et sur ce texte en particulier, est de ne pas confondre ces deux éléments de rémunération, le premier étant fixe, les seconds aléatoires.
L’expression « l’ensemble des revenus » confirme bien ce que j’ai dénoncé lors de la présentation de mon précédent amendement. Je faisais part de notre crainte de voir pris en compte, pour la revalorisation du SMIC au 1er janvier, des éléments autres que l’inflation, tels les primes, les indemnités ou encore le treizième mois.
Le fait que les experts doivent se prononcer sur l’évolution du SMIC et sur l’ensemble des revenus finira, à terme, par légitimer l’instauration d’un revenu annuel garanti, qui comprendrait à la fois le salaire et des éléments de rémunération variables.
Et si l’on pousse à l’extrême le rapport du CAE, auquel notre collègue Annie Jarraud-Vergnolle vient de se référer, pourquoi ne pas ajouter, dans la liste des revenus concernés par ce rapport, certaines prestations, familiales, par exemple, ou encore le RSA, comme cela a été clairement évoqué ?
Nous souhaitons donc que l’expression « l’ensemble des revenus » ne soit pas utilisée dans le cadre de la mission confiée aux experts, afin de ne pas amplifier la confusion entre le salaire et les autres éléments de rémunération. En ce sens, je rejoins la position exprimée par Mme le rapporteur.
Ensuite, la création d’un groupe d’experts chargés de se prononcer sur l’évolution du SMIC ne doit pas aboutir à la remise en cause du dispositif légal actuel de fixation de ce dernier.
Certes, mes chers collègues, le Gouvernement nous assure du contraire. Pourtant, les réflexions dont je viens de vous faire part sur l’article 3 me laissent augurer le pire. Il vaut donc mieux s’assurer que ces experts devront se prononcer dans le respect de la législation actuelle applicable à la fixation du SMIC.
Par conséquent, nous vous demandons, mes chers collègues, de bien vouloir adopter cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 16, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le troisième alinéa du I de cet article :
Le Gouvernement remet à la commission nationale de la négociation collective, préalablement à la fixation annuelle du salaire minimum, une analyse des comptes économiques de la Nation et un rapport sur les conditions économiques générales. Si ce rapport s'écarte de celui établi par le groupe d'experts, le Gouvernement motive par écrit ces différences auprès de la commission nationale de la négociation collective.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision rédactionnelle.
M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 17 est présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 53 est présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 86 est présenté par Mmes David, Pasquet et Hoarau, MM. Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer le 2° du I bis et le II de cet article.
La parole est à Mme le rapporteur, pour présenter l’amendement n° 17.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement tend à maintenir au 1er juillet la date de fixation du SMIC. L'avancement de cette date au 1er janvier ne paraît pas justifié, et ce pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, les entreprises sont habituées depuis longtemps à négocier les salaires dans le cadre d’une fixation du SMIC au 1er juillet : elles n’ont pas exprimé le souhait que cette date soit modifiée. Elles n'organisent d'ailleurs pas toutes leurs négociations selon le même calendrier.
Par ailleurs, l’argument selon lequel il serait plus facile de négocier si le SMIC était connu en début d'année est fragile, dans la mesure où celui-ci peut être modifié plusieurs fois en cours d'année, comme la loi le prévoit, dès lors que l'inflation franchit un certain seuil. Cette situation s'est produite au cours de l'année 2008, puisque le SMIC a été revalorisé en mai et en juillet.
Plus fondamentalement, les négociations salariales doivent-elles dépendre de la revalorisation du SMIC ? Idéalement, celui-ci devrait être un filet de sécurité et non un élément d'impulsion de la politique salariale.
Pour ces raisons, il semble souhaitable de maintenir la date du 1er juillet à laquelle tous les acteurs sont habitués.
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Alquier, pour présenter l'amendement n° 53.
Mme Jacqueline Alquier. Cet amendement vise à conserver la date de fixation du SMIC au 1er juillet de chaque année.
Nous ne croyons pas que la fixation au 1er janvier soit simplement une mesure de facilité comptable. À l’évidence, il s’agit de répondre à la demande récurrente du MEDEF d’annualiser le SMIC.
La situation des salariés rémunérés au SMIC est suffisamment difficile au quotidien pour que l’on n’y ajoute pas une telle disposition. Votre objectif, monsieur le ministre, qui a été fixé par les représentants du patronat, est de mettre en place un SMIC compétitif tel que celui du Portugal ou des pays de l’Est, dont le montant serait d’environ 400 euros, et qui serait complété par un RSA, pour dépasser tout juste le seuil de pauvreté.
Il n’est tout simplement pas concevable de prévoir un élément de variabilité sur l’année : ce serait envoyer directement les personnes et les familles qui seront victimes de ce système dans les associations caritatives ou les obliger à avoir un second emploi, voire un petit boulot au noir, pour boucler leurs fins de mois.
Au demeurant, il est aujourd’hui démontré que ce n’est pas le niveau du SMIC, tout au moins pour les salariés à temps plein, qui pose le plus gros problème. C’est la précarité, qui n’est absolument pas compensée par une politique de sécurisation des parcours et par une formation continue pour décrocher des emplois qualifiés et à temps plein.
Votre politique est de maintenir délibérément tout un pan de la population salariée dans l’insécurité, en accordant aux personnes concernées des « bouts » d’emploi précaires et sous-payés, destinés à être complétés par la prime pour l’emploi et le revenu de solidarité active.
À terme, cela aboutira à une gestion de la main-d’œuvre totalement contre-productive. Vous appliquez cette politique parce que vous estimez qu’une partie de cette main-d’œuvre souffre d’un « défaut d’employabilité », pour utiliser le jargon moderne.
Mais, en réalité, vous ne faites rien pour améliorer cette employabilité, vous vous contentez de constater une situation, sans y porter remède, et de donner à notre économie les moyens d’un développement conforme aux exigences de la mondialisation. En somme, c’est exactement le contraire de ce que devrait faire un gouvernement porteur d’autres perspectives que la diminution de la fiscalité des personnes les plus aisées.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 86.
Mme Annie David. Cet amendement a le même objet que ceux qui viennent d’être présentés. Il est un peu moins ambitieux que mon amendement de suppression de l’article 3, sur lequel je me suis déjà longuement exprimé. Il se contente en effet de prévoir le maintien de la date du 1er juillet pour la fixation du SMIC.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. S’agissant des amendements identiques nos 50 et 84, la commission a approuvé le principe de la création d’un groupe d’experts sur le SMIC, pour les raisons que j’ai indiquées lors de la discussion générale.
Dans la mesure où M. le ministre s’est engagé à ce que cette mesure n’entraîne pas de frais supplémentaires, puisque ce groupe d’experts sera rattaché à un organisme existant, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements.
L’amendement n° 96 est identique aux amendements nos 50 et 84. La commission y est défavorable, car elle considère que le groupe d’experts pourra éclairer le débat sur la revalorisation du SMIC en fournissant des analyses économiques.
Concernant l’amendement n° 51, le groupe d’experts, je le répète, pourra éclairer le débat sur le SMIC par ses analyses économiques, qui viendront donc compléter l’avis de la Commission nationale de la négociation collective, et non pas s’y substituer. La commission y est donc défavorable.
L’amendement n° 52 non seulement n’est pas indispensable, mais il est même un peu inutile et maladroit, car il laisse entendre que le projet de loi remettrait en cause les critères légaux d’indexation du SMIC, ce qui n’est absolument pas le cas. Les critères légaux s’imposant au Gouvernement, l’avis du groupe d’experts aidera surtout à décider s’il convient de donner ou non un coup de pouce. La commission est donc défavorable à cet amendement.
L’amendement n° 85 procédant du même esprit que l’amendement n° 52 présenté par le groupe socialiste, la commission y est également défavorable.
Quant aux amendements nos 53 et 86, ils sont identiques à l’amendement n° 17 de la commission.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques nos 50 et 84.
S’agissant de l’amendement n° 96, je vous demande de bien vouloir le retirer, monsieur Dominati, car je pense que vous avez été entendu par anticipation. Pour ma part, je ne veux pas d’une nouvelle commission ! Il y en a déjà bien assez !
En ce moment, dans l’ensemble des ministères, nous sommes en train de « peigner » la liste des organismes et des commissions, afin de déterminer ce qui est vraiment utile et ce qui peut être regroupé. Je sais qu’il s’agit d’une question de lisibilité et d’efficacité.
M. Philippe Dominati. Très bien !
M. Xavier Bertrand, ministre. À l’époque où j’étais parlementaire et membre de la commission des finances de l’Assemblée nationale, c’était déjà ma conviction ; elle n’a pas changé ! Je peux vous le garantir, j’ai demandé à mes services d’établir, avant la fin de l’année, un état précis de ce que l’on peut déplacer, de ce que l’on peut changer et de ce que l’on peut éventuellement supprimer, sans y perdre en termes d’efficacité de l’action publique.
Par ailleurs, je me suis engagé à procéder par mutualisation : aucun recrutement supplémentaire ne sera opéré.
Je voudrais que vous compreniez bien comment les choses se passent aujourd’hui. Au sein de la Commission nationale de la négociation collective, j’ai face à moi les représentants des salariés et ceux des employeurs. Pour certains, il faut un coup de pouce, pour d’autres, il n’en faut surtout pas ! Avec ça, je suis bien avancé !
Je souhaite dépolitiser la question du SMIC. Loin de moi l’idée de ne pas endosser ma responsabilité politique : en tant que ministre du travail, il me revient de fixer le montant de la revalorisation du SMIC. Et voilà deux fois de suite que je n’ai pas entendu céder à la logique du coup de pouce systématique.
Donc, sur tous ces sujets, le fait de recueillir l’avis d’experts indépendants, comme cela se fait dans différents pays, contribuera à nous donner un autre éclairage. La Commission nationale de la négociation collective pourra aussi travailler à partir de cet avis, et ne pas se contenter des positions qui auront été relayées par la presse.
Oui, je veux sortir des habitudes ! Je ne veux pas d’un « truc » en plus, d’un « machin » supplémentaire qui ne servirait à rien. On n’en a nullement besoin ! À mon sens, ce ne sera pas le cas de ce groupe d’experts. Je suis persuadé que l’avis qu’il rendra contribuera à porter un regard plus objectif sur cette question, qui a besoin d’être un peu dépolitisée. Et puis si jamais ce n’était pas le cas, il vous suffirait, mesdames et messieurs les sénateurs, de le supprimer dans le prochain budget.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements nos 51, 52 et 85. En revanche, il est favorable aux amendements nos 15 et 16.
S’agissant de l’amendement n° 17, il a été déposé par la commission. Il n’est donc pas possible de le retirer. Mais peut-être pourrais-je, madame le rapporteur, vous convaincre de ne plus le soutenir ?
Sur la question, notamment, du choix entre le 1er juillet ou le 1er janvier, regardons les choses en face : aujourd’hui, le SMIC est revalorisé au 1er juillet et, dans certaines entreprises, on attend de connaître le montant de la revalorisation pour engager des négociations salariales. En juillet et en août, c’est le temps des vacances, si bien que les négociations dans les entreprises ne débutent qu’à partir du mois de septembre. Sacrée lisibilité sur l’année en cours, qui est déjà presque terminée !
Beaucoup de négociations d’entreprises ou de branches ont lieu plutôt en début d’année, ou au premier trimestre. Dans cette optique, la revalorisation du SMIC au 1er janvier nous semble donc intéressante et cohérente. En effet, les entreprises qui s’illustrent socialement, en négociant chaque année sur les salaires, le font plutôt en début d’année. Mais elles restent toujours dans l’incertitude, en se demandant si le Gouvernement donnera ou non un coup de pouce au SMIC au 1er juillet. En fixant la date au 1er janvier, ce ne sera plus le cas.
Depuis deux ans, je prends mes responsabilités : il n’y a pas eu de coup de pouce. Celui-ci présente en effet l’inconvénient de laisser de côté les 87% de salariés qui ne sont pas au SMIC. Ainsi, le salarié qui touche dix euros de plus que le SMIC n’a droit à rien ! Pour ma part, je suis favorable à une augmentation des salaires pour l’ensemble des salariés, ce que prévoit ce texte, et pas seulement pour 15 % d’entre eux !
En choisissant le 1er janvier, vous avez, mesdames, messieurs les sénateurs, la garantie qu’il y aura, dès le début de l’année, une négociation salariale cohérente avec, tant du côté des entrepreneurs que du côté des représentants des salariés, une vraie vision d’ensemble.
Vous vous demandez également si, en choisissant le 1er janvier, il n’y aura pas une pression supplémentaire pour accorder le coup de pouce. Il me semble que cette pression ne sera pas plus forte au 1er janvier qu’au 1er juillet, où la perspective des vacances incite également à la générosité.
M. Guy Fischer. Et pourquoi pas en avril ?
M. Xavier Bertrand, ministre. C’est, avant tout, une question de responsabilité politique. Il faut s’assurer de l’intérêt, indissociable, des salariés et des entreprises. Voilà pourquoi je ne souhaite pas dissocier les négociations d’entreprises, qui ont lieu en début d’année, et cette revalorisation du 1er janvier, laquelle me semble vraiment s’inscrire dans une logique de cohérence.
M. le président. Monsieur Dominati, l'amendement n° 96 est-il maintenu ?
M. Philippe Dominati. Monsieur le ministre, vous m’avez convaincu. J’ai noté l’engagement que vous avez pris de faire réaliser, d’ici au 31 décembre de cette année, un audit au sein de votre ministère, afin de regrouper ou de supprimer un certain nombre d’organismes et de commissions. Dans ces conditions, je retire cet amendement, et je soutiendrai votre position et votre méthode de travail.
M. le président. L'amendement n° 96 est retiré.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 50 et 84.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Les explications de M. le ministre sont brillantes. Cependant, l’amendement n° 17 étant un amendement de la commission, je ne peux le retirer. À titre personnel, je m’en remets à la sagesse de notre assemblée.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote sur les amendements nos 17, 53 et 86.
M. Guy Fischer. Avec cet article, on enterre le SMIC, monsieur le ministre ! Le SMIC a vécu !
Mme Annie David. Eh oui !
M. Guy Fischer. L’objectif final est d’aboutir à une remise en question du niveau du salaire minimum. On ne peut absolument pas dissocier cet article du débat que nous avons eu, la semaine passée, sur le RSA. Avec l’adoption de celui-ci, tous les droits connexes passent à la trappe !
À l’instar de Mme Jarraud-Vergnolle, il convient de faire le lien avec les conclusions du rapport rendu le 23 juillet 2008 par le Conseil d’analyse économique. Selon ses auteurs, une politique efficace d’amélioration des bas revenus et de réduction de la pauvreté devrait s’appuyer sur des mesures fiscales et des prestations sociales ciblées, plutôt que sur un salaire minimum élevé et uniforme. On sait ce que cela veut dire ! Il est important de préciser également que les auteurs de ce rapport fondent leur jugement sur un examen précis des situations qui prévalent dans des pays de l’Union européenne où le salaire minimum est moins contraignant qu’en France, voire inexistant.
Cet article dont nous discutons ce soir est d’une gravité sans précédent ! L’ultralibéralisme du Gouvernement s’y exprime pleinement ! Il en résultera un émiettement du travail et, pour les millions de Français travailleurs pauvres – 7 millions selon le Gouvernement, 15 millions selon notre groupe -, des revenus et des ressources qui, avec la disparition du SMIC et malgré la compensation offerte par le RSA, ne dépasseront pas 500 à 800 euros par mois ! Évidemment, les plus pauvres seront les plus touchés.
Nous aurons l’occasion, monsieur le ministre, de faire le point, tant sur le RSA que sur l’évolution du SMIC et sur les politiques salariales qui seront menées par les entreprises. Vous verrez, la précarité va exploser !
C’est pourquoi nous ne pouvons absolument pas voter cet article.
Et lorsque vous vous demandez s’il convient d’effectuer la hausse du SMIC en janvier ou en juillet, je remarque que, pour les retraites, on a tranché : ce sera au 1er avril.
M. Guy Fischer. Parce qu’on connaît le taux d’inflation !
M. Guy Fischer. Il y a, certes, une volonté d’alignement sur les retraites complémentaires, afin d’harmoniser les gestions. Mais c’est surtout parce que, à cette époque de l’année, on connaît le taux d’inflation.
Pour l’ensemble de ces raisons, nous voterons contre cet article.
M. le président. La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle, pour explication de vote.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Monsieur le ministre, j’ignore si mes collègues ont compris vos explications, mais, pour ma part, j’avoue être perdue. Il faut dire que vous avez peu ou prou dit tout et son contraire !
Vous affirmez ne pas vouloir d’un groupe d’experts supplémentaire, avant d’ajouter immédiatement qu’il sera adjoint aux quatre autres ! Vous affirmez qu’il ne coûtera rien, avant d’ajouter aussitôt qu’il nous sera loisible de supprimer son financement dans le projet de loi de finances ! Comment peut-il ne rien coûter et être inscrit au budget ? J’ai du mal à comprendre !
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Certes, il est fort possible, monsieur le ministre, que j’aie mal entendu ou mal compris vos propos. Je n’ai pas tout noté, je n’ai fait que reprendre les principales idées. Mais nous sommes dans une période de grands bouleversements à laquelle plus personne ne comprend rien. Aussi, est-il bien nécessaire, comme vous en donnez l’impression, de brouiller les cartes ? Notre société traverse une très grave crise du sens.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. Je tiens simplement à préciser que, en me prononçant tout à l’heure en faveur de la date du 1er janvier, je m’exprimais en partie au nom du groupe UMP. Au sein de la commission, nos positions étaient partagées. Isabelle Debré, quant à elle, a émis un avis de sagesse. Toujours est-il que le groupe, après avoir mené une réflexion, se prononcera à l’occasion de ce scrutin public.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 17, 53 et 86.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 26 :
Nombre de votants | 322 |
Nombre de suffrages exprimés | 322 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 162 |
Pour l’adoption | 139 |
Contre | 183 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.)
M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
7
Dépôt d'une proposition de loi
M. le président. J’ai reçu de Mmes Éliane Assassi, Nicole Borvo Cohen-Seat, Josiane Mathon-Poinat, M. François Autain, Mme Marie-France Beaufils, MM. Michel Billout, Jean-Claude Danglot, Mmes Annie David, Michelle Demessine, Évelyne Didier, MM. Guy Fischer, Thierry Foucaud, Mmes Brigitte Gonthier Maurin, Gélita Hoarau, MM. Robert Hue, Gérard Le Cam, Mme Isabelle Pasquet, MM. Jack Ralite, Ivan Renar, Mmes Mireille Schurch, Odette Terrade, MM. Bernard Vera et Jean-François Voguet une proposition de loi visant à assurer un droit à un recours effectif.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 56, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d’une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
8
Dépôt de propositions de résolution
M. le président. J’ai reçu de Mmes Catherine Tasca, Michèle André, MM. Robert Badinter, Yannick Bodin, Didier Boulaud, Mmes Bernadette Bourzai, Monique Cerisier-ben Guiga, M. Pierre-Yves Collombat, Mme Christiane Demontès, MM. Yves Krattinger, Serge Lagauche, Jean-Claude Peyronnet, Roland Ries, Simon Sutour, Michel Teston et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, une proposition de résolution, présentée en application de l’article 73 bis du règlement, sur la communication de la Commission européenne sur son programme législatif pour l’année 2008 (E–3692) et sur la communication de la Commission européenne sur sa stratégie politique annuelle pour 2009 (COM (2008) 72 FINAL).
La proposition de résolution sera imprimée sous le n° 57, distribuée et renvoyée à la commission des affaires économiques, sous réserve de la constitution éventuelle d’une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J’ai reçu de Mmes Muguette Dini, Jacqueline Alquier, Brigitte Bout, Annie David, Annie Jarraud-Vergnolle, Gisèle Printz, Catherine Procaccia, MM. Nicolas About, Jean Boyer et Guy Fischer, une proposition de résolution, présentée en application de l’article 73 bis du règlement, sur la proposition de directive du Conseil relative à la mise en œuvre de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de religion ou de convictions, de handicap, d’âge ou d’orientation sexuelle (E 3918).
La proposition de résolution sera imprimée sous le n° 58, distribuée et renvoyée à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle d’une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
9
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mardi 28 octobre 2008 :
À dix heures :
1. Questions orales.
(Le texte des questions figure en annexe).
À seize heures et, éventuellement, le soir :
2. Scrutins pour l’élection de six membres titulaires et de six membres suppléants représentant la France à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe et à l’Assemblée de l’Union de l’Europe occidentale ;
Le scrutin sera ouvert pour une durée d’une heure
3. Suite de la discussion du projet de loi (n° 502, 2007-2008), adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, en faveur des revenus du travail ;
Rapport (n° 43, 2008-2009) de Mme Isabelle Debré, fait au nom de la commission des affaires sociales.
Avis (n° 48, 2008-2009) de M. Serge Dassault, fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation.
En outre, à dix-huit heures :
Désignation des douze sénateurs membres de la « commission paritaire » sur la situation et l’avenir du système financier européen et mondial et les moyens de sa régulation.
Délai limite pour le dépôt pour les candidatures : mardi 28 octobre, à seize heures.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le mardi 28 octobre 2008, à une heure.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD