Mme Isabelle Debré, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision.
La conclusion d'un avenant à un accord d'intéressement en cours peut permettre à une entreprise de bénéficier du crédit d'impôt prévu à l'article 1er du projet de loi. Il convient cependant de préciser que cet avenant doit modifier les modalités de calcul de l'intéressement. Il serait en effet injustifié d'accorder le crédit d'impôt si l'avenant n'était pas susceptible de modifier le montant des primes d'intéressement versées.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 61 rectifié, présenté par Mmes Henneron et Sittler et M. Revet, est ainsi libellé :
Supprimer les VI et VII de cet article.
La parole est à Mme Françoise Henneron.
Mme Françoise Henneron. Ces dispositions prévoyant la possibilité d'un versement exceptionnel d'intéressement n'ont pas d'utilité puisqu'elles sont déjà prévues, de manière pérenne, par l'article L. 3314–10 du code du travail.
M. le président. L'amendement n° 36, présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la première phrase du deuxième alinéa du VI de cet article :
Cette prime est répartie uniformément entre tous les salariés.
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Cet amendement de repli vise à offrir aux salariés les plus mal payés un peu d’oxygène.
Pour que le pouvoir d’achat soit amélioré là où il est le plus faible, nous proposons que la prime exceptionnelle soit répartie uniformément entre tous les salariés, y compris, par conséquent, les salariés en contrat à durée déterminée, les travailleurs à temps partiel et, dans les entreprises concernées, les intérimaires.
Chacun sait combien ces supplétifs de l’industrie sont indispensables à la gestion à flux tendus, alors qu’ils ne bénéficient pas, faute d’ancienneté, des mêmes avantages que les autres salariés.
De plus, cette formule inédite de répartition permettrait de tester la volonté réelle des employeurs de faire participer les salariés aux bénéfices dégagés, puisque l’octroi de la prime est à leur entière discrétion.
Une prime, fût-elle exceptionnelle, qui aboutirait à un avantage inversement proportionnel au salaire serait en fait une compensation à l’absence de politique salariale.
Enfin, il est avéré que l’argent versé aux plus modestes est immédiatement utilisé pour l’achat de biens et de services dont ces familles ont grandement besoin.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Les régimes juridiques applicables respectivement à la prime exceptionnelle et au supplément d’intéressement ne sont pas exactement identiques.
Le supplément d’intéressement est bien adapté à la situation d’entreprises qui disposent déjà d’un accord d’intéressement et qui décident, à la clôture de l’exercice, de verser une part d’intéressement supérieure à ce que prévoit l’accord.
La prime exceptionnelle, quant à elle, pourra être versée sans délai dès que l’entreprise se sera dotée d’un accord d’intéressement.
Pour ces raisons, madame Henneron, je vous demande de bien vouloir retirer l’amendement n° 61 rectifié. À défaut, la commission émettra un avis défavorable.
Quant à l’amendement n° 36, il vise à ce que la prime exceptionnelle, dont le versement est autorisé à l’article 1er du projet de loi, soit obligatoirement répartie de façon uniforme entre tous les salariés.
D’une manière générale, nous sommes peu favorables aux mesures contraignantes. Dans le cas présent, elles auraient en outre un effet très négatif.
Le projet de loi prévoit que la prime puisse aussi être proportionnelle au salaire ou à l’ancienneté du salarié dans l’entreprise. Ces règles sont les mêmes que celles qui sont prévues pour la prime d’intéressement. Dans un souci de simplicité, et pour offrir de la souplesse aux entreprises dans leur politique de rémunération, la commission souhaite maintenir ces différentes possibilités de choix et s’oppose à toute mesure uniforme. Par conséquent, elle émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Madame Henneron, le versement exceptionnel d’intéressement est versé après l’intéressement. Or la prime prévue par le texte sera versée antérieurement. L’adoption de votre amendement n° 61 rectifié aurait pour conséquence, je le crains, de pénaliser les salariés. C’est pourquoi je vous saurais gré de bien vouloir le retirer.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur l’amendement n° 36, qui entend imposer une répartition uniforme de la prime exceptionnelle.
M. le président. Madame Henneron, l'amendement n° 61 rectifié est-il maintenu ?
Mme Françoise Henneron. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 61 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 36.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 2, présenté par Mme Debré, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Remplacer les paragraphes VIII et IX de cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
VIII. - Avant le 30 juin 2014, le Parlement évalue les dispositifs institués par les I à VII du présent article sur la base d'un rapport remis par le Gouvernement au plus tard le 31 décembre 2012.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement vise à simplifier les dispositions adoptées par l'Assemblée nationale en vue de l'évaluation du crédit d'impôt institué à l'article 1er. Il ne nous paraît pas justifié d'exiger la remise d'un rapport tous les ans – le Parlement reçoit déjà beaucoup de rapports – ni de citer expressément tous les articles de la Constitution qui font référence aux pouvoirs de contrôle du Parlement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Nous avons achevé l’examen des amendements appelés en priorité.
Articles additionnels avant l'article 1er A
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements présentés par Mmes David, Pasquet et Hoarau, MM. Fischer, Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 68 est ainsi libellé :
Avant l'article 1er A, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Par dérogation aux dispositions fiscales en vigueur, pour les dirigeants d'entreprises qui ont une rémunération annuelle excédant 250 000 euros après prélèvement des cotisations sociales, le montant des indemnités de départ qui excède ce montant est imposé à un taux de 100 %.
Par dérogation aux dispositions fiscales en vigueur, la société qui octroie une rémunération de départ supérieure, calculée conformément au premier alinéa, en vertu d'un contrat de travail, d'un contrat d'entreprise ou d'un mandat est soumise à une taxe supplémentaire de 15 % sur son bénéfice imposable.
L'amendement n° 69 est ainsi libellé :
Avant l'article 1er A, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
I. - À la fin du premier alinéa de l'article L. 225-38 du code du commerce, les mots : « du conseil d'administration » sont remplacés par les mots : « de l'assemblée générale ».
II. - Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Cette convention est soumise à l'accord du comité d'entreprise. »
III. - À la fin de la première phrase du second alinéa de l'article L. 225-39 du même code, les mots : « au président du conseil d'administration » sont remplacés par les mots : « à l'assemblée générale des actionnaires ».
IV. - Dans le premier alinéa de l'article L. 225-42 du même code, les mots : « du conseil d'administration » sont remplacés par les mots : « de l'assemblée générale des actionnaires ».
L'amendement n° 70 est ainsi libellé :
Avant l'article 1er A, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Par dérogation aux dispositions fiscales en vigueur, toute rémunération ou partie de rémunération qui est liée à l'évolution de cours boursiers, octroyée ou calculée sous quelle que forme que ce soit, est soumis à une taxe de 100 %.
L'amendement n° 71 est ainsi libellé :
Avant l'article 1er A, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 2242-1 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Cette négociation porte également sur les éléments de rémunérations versées aux dirigeants salariés de l'entreprise, sous quelque forme que ce soit, notamment dans le cadre des dispositions visées aux articles L. 225-177 à L. 225-186 du code de commerce. »
La parole est à Mme Annie David, pour présenter ces quatre amendements.
Mme Annie David. Ces quatre amendements ont pour objet identique de moraliser certaines pratiques des dirigeants de grandes entreprises en matière de revenus.
Nous avons décidé de les déposer en réponse à l’amendement n° 20 du Gouvernement tendant à lier l’attribution de stock-options aux mandataires sociaux soit à la distribution de stock-options ou d’actions gratuites aux salariés, soit à la mise en place d’un accord d’intéressement ou de participation dérogatoire.
Ainsi, cet amendement vise à permettre la généralisation des stock-options sous prétexte « d’une meilleure diffusion des accords d’intéressement et de participation », objectif affiché de ce projet de loi.
Dans le contexte de crise financière que nous connaissons, vouloir généraliser ces stock-options pour les salariés nous semble relever de la provocation. L’inquiétude de ces derniers porte, de façon encore plus criante aujourd’hui, sur l’absence d’augmentations collective de salaire et non sur l’attribution éventuelle de produits financiers spéculatifs.
Le risque n’est-il pas de surcroît que ce soient les salariés qui participent au plan de sauvetage des fonds de gestion chargés de gérer ces actifs financiers dont on leur ferait cadeau ?
De même, la totale disproportion entre les revenus des salariés et l’attribution de parachutes dorés exorbitants à des dirigeants d’entreprise qui, pour certains, partent en ayant causé plusieurs millions d’euros de pertes dans leur entreprise n’est plus acceptable aujourd’hui.
Il est quand même paradoxal que ce projet de loi, censé revaloriser la valeur travail, c’est-à-dire reconnaître que les salariés apportent de la valeur ajoutée et un savoir-faire à la production et à l’entreprise, produise un effet inverse en favorisant les dirigeants qui sont rémunérés par des stock-options ou « remerciés » par des parachutes dorés alors qu’ils ont contribué à dévaloriser le travail des salariés.
De telles pratiques, que l’on peut aisément qualifier d’immorales, sont évidemment source d’exaspération pour les salariés, qui attendent une ambitieuse politique en faveur des salaires.
Notre volonté est donc de rompre avec les politiques économiques et financières antérieures.
Tout d’abord, nous souhaitons interdire les parachutes dorés et les stock-options ; ensuite, nous demandons que ce soit l’assemblée générale, et non plus seulement le conseil d’administration, qui intervienne dans la définition des conditions de rémunérations des dirigeants ; enfin, nous prévoyons que la négociation annuelle sur les salaires porte également sur les rémunérations des dirigeants salariés de l’entreprise.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. L’amendement n° 68 est présenté comme un amendement « anti-parachutes dorés ». Il vise à taxer au taux de 100 % les indemnités de départ perçues par les dirigeants d’entreprise dont la rémunération annuelle excède 250 000 euros.
Le débat sur la taxation des parachutes dorés est parfaitement légitime, ma chère collègue, tant certains abus ont pu être choquants. Je signale d’ailleurs que la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a adopté un amendement qui a pour objet d’augmenter le montant des contributions sociales pesant sur ces indemnités de départ. Ce débat trouvera plus naturellement sa place, pour son volet social, dans le cadre de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale et, pour son volet fiscal, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances.
Pour ces raisons, je vous saurais gré de bien vouloir retirer cet amendement.
M. Guy Fischer. Ah non !
Mme Isabelle Debré, rapporteur. À défaut, la commission émettra un avis défavorable.
L’amendement no 69 vise à soumettre à l’autorisation de l’assemblée générale de la société et du comité d’entreprise la conclusion de convention entre la société et ses mandataires sociaux. À l’heure actuelle, seule l’autorisation du conseil d’administration est requise.
Il n’est pas sûr que cet amendement ait sa place dans ce projet de loi. Cette modification touche le droit des sociétés et nous n’avons pas pu en évaluer les conséquences.
Si l’idée de renforcer les pouvoirs de contrôle de l’assemblée générale est séduisante, il faut se souvenir que la convocation d’une assemblée générale est une opération assez contraignante, notamment en termes de délais. Je crains qu’elle ne soit pas adaptée aux besoins de souplesse et de réactivité des sociétés commerciales.
L’amendement no 70 vise à taxer à 100 % les plus-values sur les stock-options. S’il faut moraliser la distribution des stock-options – le Gouvernement a d’ailleurs déposé un amendement no 20 rectifié allant dans ce sens – il ne faut pas se priver de cet outil de rémunération qui est bien adapté à certaines situations, par exemple dans les jeunes entreprises innovantes.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
Enfin, madame David, par l’amendement no 71, vous voulez que la négociation annuelle sur les salaires porte sur tous les salaires versés dans l’entreprise, y compris sur ceux des dirigeants.
Cet amendement nous paraît sans objet puisque c’est déjà le cas. La commission y est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Nous avons déjà évoqué ce sujet pendant la discussion générale et nous y reviendrons lors de la discussion de l’amendement no 20 rectifié. Cette question devrait également faire l’objet d’une proposition de loi déposée par le groupe socialiste. Pour l’heure, je suis défavorable à ces amendements.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Mme le rapporteur, vous m’avez appelée à retirer l’amendement no 68. Vous comprendrez que je ne puisse accéder à votre demande.
Vous m’avez également conseillé de soulever à nouveau cette question lors de la discussion du projet de loi de finances. Croyez bien que nous n’y manquerons pas !
L’amendement no 69 porte sur le droit des sociétés, lequel ne peut, selon vous, être modifié sans concertation.
Soit ! Pourtant, la semaine dernière, nous avons largement modifié, sans aucune concertation, des articles du code du travail qui touchaient au droit des salariés. Je m’en suis étonnée. Il m’a été répondu : si le législateur ne peut pas faire ce qu’il veut…
Mme Isabelle Debré, rapporteur. Si, mais pas n’importe comment.
Mme Annie David. Ce qui est valable un jour semble ne plus l’être le suivant ! C’est étrange !
Pour toutes ces raisons, je maintiendrai l’amendement no 69.
En ce qui concerne l’amendement no 70, nous considérons que l’amendement no 20 rectifié ne répond pas à ce que nous souhaitons. Nous proposons même un dispositif inverse de celui du Gouvernement.
Vous considérez, madame, que l’amendement no 71 est sans objet puisque la négociation sur les salaires porte déjà sur celui de tous les salariés, y compris les dirigeants. Soit ! Je maintiens néanmoins l’amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 71.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 1er A
Au début de l'intitulé du livre III de la troisième partie du code du travail, sont insérés les mots : « Dividende du travail : ».
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 34 est présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 72 est présenté par Mmes David, Pasquet et Hoarau, MM. Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle, pour présenter l'amendement n° 34.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Cet amendement vise à supprimer la mention « dividende du travail » qui a été insérée dans ce projet de loi à l’Assemblée nationale.
Cette expression crée une confusion qui n’est pas seulement sémantique. Jusqu’à son introduction dans la législation, en 2006, il était clairement acquis que le dividende était associé à l’investissement en capital et le salaire à l’apport en travail.
Contrairement à ce que l’on veut nous faire admettre, les sommes acquises par les salariés dans le cadre de l’intéressement, de la participation et de l’épargne salariale sont non pas des dividendes associés à un investissement, mais des primes et des éléments de rémunération. Le code du travail est à cet égard très clair.
En ce qui concerne l’intéressement, l’article L. 3314-8 du code du travail parle bien de primes.
La répartition de la réserve de participation entre les salariés – ce mot est important – est calculée proportionnellement au salaire perçu, selon l’article L. 3324-5.
S’agissant de l’épargne salariale, l’article L. 3332-10 précise que les versements annuels d’un salarié à un plan d’épargne entreprise ne peuvent excéder un quart de sa rémunération annuelle.
Il y a donc indiscutablement un lien entre ces trois régimes et le statut de salarié. Rien n’empêche quelqu’un d’aller dans une banque ouvrir un PEA ou un compte titre. La personne est alors actionnaire d’une entreprise avec laquelle elle n’a aucun autre lien.
Le salarié qui est dans un des trois régimes visés, même si le plan d’épargne entreprise, le PEE, et le plan d’épargne pour la retraite collectif, le PERCO, lui permettent de constituer un portefeuille de valeurs mobilières, n’y figure que parce que son lien fondamental avec l’entreprise porteuse est d’en être salarié ou retraité. Et c’est en tant que salarié qu’il est dans un lien de sujétion avec son employeur, ce qui implique notamment qu’il peut être licencié et voir disparaître intéressement et participation.
S’il n’est pas abusif de définir ces sommes comme revenus du travail, il faudrait préciser que ce sont des revenus accessoires et aléatoires. Ce ne sont pas des salaires, et en aucun cas des dividendes.
Il ne s’agit pas d’opposer dans un esprit manichéen les salariés, les employeurs et les actionnaires. Mais le législateur a pour premier devoir d’être précis et clair. Sur ce point, nous ne devons pas désespérer de nous-mêmes.
La confusion ne s’arrête pas là. Elle est aussi dans le fait que vous votez des lois qui détruisent méthodiquement les garanties des salariés.
Ainsi, le projet de loi que nous examinons aujourd’hui comporte, en son article 3, une bombe à retardement pour tous les salariés rémunérés au SMIC, alors que le salaire est en général leur seul revenu, et que c’est cela qu’il convient de préserver.
Nous sommes clairement opposés à ces fantaisies sémantiques qui masquent des cheminements intellectuels et législatifs beaucoup moins candides.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 72.
Mme Annie David. La notion de « dividende du travail » a été créée par la loi du 30 décembre 2006 relative au développement de la participation et de l’actionnariat salarié.
Déjà, à l’époque, nous contestions l’introduction, dans le code du travail, de cette notion qui renvoie à une conception purement financière et spéculative de la rétribution du travail.
Notre position reste sur ce point inchangée depuis 2006 : seul le salaire doit constituer la contrepartie du travail.
Le problème est que nous assistons à une faible évolution du revenu du travail par rapport à l’évolution des revenus du capital. La répartition des richesses s’effectue aujourd’hui de façon inéquitable : le partage entre le capital et le travail est inversé, notamment au regard de l’absence d’investissement.
L’enrichissement des actionnaires passe avant les salaires et avant les besoins de l’entreprise elle-même.
Or, chacun le sait, et en premier lieu les salariés, les actionnaires sont rémunérés sous la forme de dividendes.
Les 740 salariés de Matussière et Forest, qui ont vu leur entreprise rachetée par le fonds de pension Matlin Patterson, payent cash le prix de cette politique.
En ces temps de crise financière, il est plutôt malvenu de pérenniser la notion de dividende du travail, qui renvoie nécessairement à la notion d’actionnariat.
La notion de dividende du travail ne correspond donc pas à une réalité : elle est un non-sens d’un point de vue économique et social et, surtout, elle est bien loin des préoccupations des salariés, pour qui l’augmentation du pouvoir d’achat se fait encore attendre.
La notion de dividende du travail tend à faire admettre aux salariés qu’il est normal qu’une partie de leur rémunération soit non pas le salaire, mais des éléments aléatoires de rémunération.
Pourtant, seul le salaire a vocation à rétribuer une qualification et, pour ce faire, il doit rester le seul élément de référence.
Si l’objectif était de redistribuer les bénéfices des entreprises afin d’augmenter les salaires, nous ne pourrions que l’approuver. Mais ce n’est pas le cas.
Décidément, le Gouvernement peine à trouver des solutions efficaces en faveur du pouvoir d’achat. Voilà maintenant deux ans, depuis la loi de décembre 2006, qu’il tente, de façon quasi désespérée, de faire passer les suppléments d’intéressement et de participation pour des hausses de salaires et une amélioration du pouvoir d’achat. Je doute que les travailleurs pauvres, à temps partiel ou sous contrats précaires, soient réellement sensibles à cet argument.
C’est pour ces raisons que nous demandons la suppression de l’article 1erA.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Isabelle Debré, rapporteur. L’article 1erA, introduit par l’Assemblée nationale sur l’initiative de M. Patrick Ollier, vise à faire figurer la notion de dividende du travail dans le code du travail.
Comme vous l’avez rappelé, madame David, nous avions longuement évoqué cette question. La commission ayant approuvé cet article, elle ne peut qu’être défavorable aux amendements de suppression nos 34 et 72.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Je partage l’argumentation de la commission, ce qui me conduit, à regret, à émettre un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 34 et 72.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, je vous demande de bien vouloir suspendre la séance afin de permettre à la commission des affaires sociales d’examiner le reste des amendements qui ont été déposés sur ce texte.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons donc interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt-cinq, est reprise à vingt et une heures trente.)
M. le président. La séance est reprise.
Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, en faveur des revenus du travail.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus aux amendements tendant à insérer un article additionnel après l’article 1er.