COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. GUY FISCHER
vice-président
M. le président. La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à dix heures trente.)
PROCÈS-VERBAL
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procés-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
RAPPEL AU RÈGLEMENT
M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, pour un rappel au règlement.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Mon rappel au règlement se fonde sur l'article 36 du règlement du Sénat.
Chers collègues, par ce rappel au règlement, je veux alerter le Sénat sur une opération d'une très grande ampleur mettant en cause l'avenir de l'une des premières institutions financières publiques de ce pays, opération en train de s'effectuer sinon totalement à notre insu du moins au mépris de nos prérogatives de parlementaires.
Je vous rappelle en effet, chers collègues, que la Caisse des dépôts et consignations, la CDC, puisque c'est d'elle qu'il s'agit, est placée, depuis sa fondation, aux termes de la loi de 1816, « de la manière la plus spéciale, sous la garantie et le contrôle de l'autorité législative », c'est-à-dire, vous l'avez bien compris, du Parlement.
Je vous rappelle également que la loi de 2000 sur les nouvelles régulations économiques a confirmé le caractère de service public et la mission d'intérêt général de l'ensemble du groupe Caisse des dépôts et consignations, ainsi que de toutes ses filiales.
Pourtant, qu'apprenons-nous depuis le 2 juillet dernier par la presse alors que le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations, M. Francis Mayer, était auditionné par notre commission des finances le 1er juillet sur l'activité de l'année passée de la CDC. Nous découvrons que la filiale Ixis regroupant les activités financières de la Caisse des dépôts et consignations dans les secteurs de l'assurance, de l'immobilier et, surtout, de la banque d'investissement, est sur le point d'être vendue à la Caisse nationale des caisses d'épargne, c'est-à-dire privatisée, puisque les caisses d'épargne ont un statut privé depuis la loi de 1999, cette privatisation entraînant celle de l'ensemble de la compagnie financière Eulia, pour l'instant contrôlée à 50,1 % par la CDC. La mise en Bourse d'Ixis serait également prochaine.
C'est ainsi l'une des principales et des dernières grandes institutions publiques de crédit que l'on s'apprêterait à livrer au secteur privé. Ses 17 milliards d'euros de fonds propres qui équivalent à ceux de la troisième banque d'affaires du pays seraient définitivement détournés du financement des besoins de la nation.
Cette opération, dont nous décelons peu à peu les contours, aurait des conséquences extrêmement lourdes pour le pays. Elle constituerait un véritable séisme de nature à déstabiliser le Crédit foncier, la Caisse naitonale de prévoyance, ainsi que toute l'organisation et les missions publiques du reste du groupe Caisse des dépôts et consignations.
Elle porterait en particulier un nouveau coup à la collecte et à la gestion par la CDC de l'épargne populaire, à commencer évidemment par le livret A, normalement destiné à financer le logement social. Des milliers d'emplois sont aussi directement menacés.
Ixis, Eulia à vendre, Ixis, Eulia vendues ! La presse annonce que la vente pourrait être bouclée d'ici à la fin du mois de juillet ! D'autres repreneurs s'empressent d'ailleurs de donner signe de vie avant qu'il soit trop tard.
Si l'opération semble recevoir l'assentiment du ministère de l'économie et des finances, également tenté, semble-t-il, de piocher à cette occasion dans les fonds propres de la CDC pour compenser les cadeaux budgétaires qu'il va encore accorder aux entreprises et aux ménages aisés, la commission de surveillance de la CDC n'a même pas été consultée - je vous le confirme - et le Parlement, à commencer par notre commission des finances, est tout simplement tenu à l'écart, comme je viens de vous l'indiquer.
Nous considérons qu'il s'agit d'un coup de force inacceptable et que cet affront à l'autorité du Parlement est proprement inadmissible. Plusieurs de nos collègues parlementaires s'en sont émus, y compris notre collègue Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, même si ses objectifs finaux sont certainement peut-être un peu différents des miens.
Les organisations syndicales de la Caisse des dépôts et consignations ont lancé un appel : « Ixis et Eulia doivent rester dans le groupe public Caisse des dépôts. » Elles nous interpellent. D'ailleurs, les organisations syndicales, toutes tendances confondues, ont appelé à une journée d'action le 24 juillet prochain.
Je considère qu'il est de notrre devoir, chers collègues, de réagir au plus vite à cette tentative de coup de force de la direction de la CDC et du Gouvernement.
Avec mon groupe CRC, je vous propose qu'avec mes collègues députés, qui l'ont déjà fait, nous nous auto-saisissions du dossier de l'avenir de la Caisse des dépôts et consignations avec l'objectif de faire respecter simplement la loi. Le Parlement est garant de la préservation et du développement du caractère public, conformément à l'intérêt général de l'ensemble de la Caisse des dépôts et consignations.
Notre rôle est d'empêcher la spoliation de la nation qui se prépare.
La présidente de notre groupe communiste républicain et citoyen transmettra une lettre dans ce sens à M. le président du Sénat. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. Je vous donne acte de votre rappel au règlement, madame Beaudeau.
RÉFORME DES RETRAITES
Suite de la discussion
d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi (n° 378, 2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant réforme des retraites. [Rapport n° 382 (2002-2003) et avis n° 383 (2002-2003)].
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, après l'examen en priorité des articles 4 et 5, aux amendements tendant à insérer des articles additionnels avant l'article 4, qui avaient été précédemment réservés.
Articles additionnels avant l'article 4 (priorité)
M. le président. L'amendement n° 120, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article 4, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale est abrogé. »
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet amendement tente de soulever le voile sur l'un des deux piliers cachés de votre réforme des retraites, monsieur le ministre.
Au travers de la plupart des 81 articles du projet de loi initial, vous organisez l'affaiblissement de la répartition, la baisse des retraites, en vous attachant particulièrement à casser le code des pensions de la fonction publique.
Mais comme nous l'avons déjà souligné, de mesure de financement significative, il n'en figure pas dans votre projet de loi. Pourtant, il y en a deux dans vos choix politiques, aussi néfastes l'une que l'autre, et dont votre texte de loi est le reflet : premièrement, le blocage du taux de cotisation vieillesse patronale, qui empêche notre système de s'adapter naturellement au besoin de financement à venir en bloquant la clef de la répartition de la richese créée et des gains de productivité à venir ; deuxièmement, les exonérations de cotisations sociales patronales. Dans les deux cas, il s'agit, dans l'intérêt de classe immédiat du MEDEF, de lui permettre de faire main basse, pour nourrir les profits et l'accumulation financière, sur ce qu'il avait bien été obligé de concéder en 1945, cette part socialisée du salaire destinée à financer la protection sociale que constitue la cotisation sociale.
Notre amendement vise à supprimer les plus significatives de ces déductions de cotisations patronales par l'abrogation de l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, qui depuis l'adoption de la loi laquelle porte votre nom, monsieur le ministre, et prétendait « assouplir les 35 heures », regroupe les exonérations Juppé sur les bas salaires, les exonérations Aubry attribuées au nom de la réduction du temps de travail, et la majoration progressive d'ici à 2005 de ces exonérations que vous avez fait voter et qui est effective depuis le 1er juillet.
Au total, et nous pouvons d'ailleurs être reconnaissants à notre collègue Yves Bur d'en avoir dressé le tableau dans son rapport parlementaire sur la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003, car nous avons ainsi pu nous rafraîchir la mémoire, le patronat bénéficie de pas moins de cinquante-six formes d'exonération de cotisation, dont je ne vais pas, bien entendu, dresser l'inventaire.
Vous seriez surpris, chers collègues, de la diversité des prétextes qui ont justifié ces exonérations, auxquelles s'ajoute la majoration incluse dans la loi de janvier que je viens de mentionner.
Ces exonérations atteindront la somme de 23 milliards d'euros cette année. Prenons bien conscience de ce que ce montant représente. Le rapport de la Cour des comptes de septembre 2002 sur la sécurité sociale montre qu'en 2001 les exonérations avaient atteint 16,5 milliards d'euros, à comparer avec les 93,9 milliards d'euros de cotisations patronales effectivement perçues par le régime général.
Faites vos calculs : cela représente 14,9 % de déduction de cotisation pour le patronat. Cette année, cette déduction atteindra près de 20 %. Rapporté au taux de cotisation vieillesse, cela correspond à une baisse moyenne de 8,2 à 6,6 %. Elle est là, monsieur le ministre, votre véritable réforme du financement des retraites !
Pourquoi, monsieur le ministre, n'avez-vous pas le courage politique de baisser directement le taux de cotisation vieillesse ? A la suite de votre prédécesseur, je vous l'accorde - je suis obligée de le dire, même si cela ne fait pas très plaisir -, vous aggravez la sape systématique des ressources légitimes de notre système de retraite par répartition.
Les exonérations coûteront, cette année, à la seule assurance vieillesse, plus de 10 milliards d'euros, soit plus de deux fois le coût du retour aux 37,5 annuités pour tous les salariés.
L'encouragement à la pratique des bas salaires, à la substitution de travailleurs mieux payés, les effets d'aubaine aggravent encore le préjudice pour les comptes sociaux. Il faut en finir !
Je connais d'avance vos deux objections à ce qui n'est pourtant qu'un constat.
La première objection, que je n'ai pas beaucoup entendue, ce que je comprends, chers collègues de la majorité sénatoriale, après les salves nourries que vous aviez réservées au Fonds de financement de la réforme de cotisations patronales de sécurité sociale, le FOREC, consiste à prétendre que ces exonérations sont compensées pour la sécurité sociale. Vous savez bien que c'est faux : 14 des 36 exonérations listées par M. Bur ne donnent lieu à aucune contrepartie.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Les vôtres !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Les plus importantes, qui représentent 16,6 milliards d'euros en 2003, sont prétendument prises en charge par le FOREC. Or la majorité des ressources de ce FOREC, comme je l'ai denoncé dès sa création en 2001, provient de taxes qui étaient déjà affectées - mais vous le savez bien - à la sécurité sociale, les droits sur les tabacs, l'alcool, les assurances...
Le FOREC, que vous reprenez à votre compte, monsieur le ministre, chers collègues, je le constate avec amusement, effectue toujours le même tour de passe-passe : donner à la Sécu ce qui était déjà à la Sécu !
Les quelques véritables compensations proviennent du budget de l'Etat, ce qui n'est pas plus acceptable : est-ce aux contribuables de payer à la place des patrons ?
M. Roland Muzeau. Non !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Votre seconde objection tient, je le pressens, monsieur le ministre, du dogme de la baisse des coûts du travail. Le Premier ministre le répète d'ailleurs partout : la baisse des charges est bien l'axe de sa politique de l'emploi. Vous persévérez ainsi dans l'erreur, ou plutôt, parfois, dans la tromperie.
L'absence de résultat sur l'emploi des baisses de cotisation depuis 1993, notamment sur les bas salaires, est notoire. Je me souviens que, voilà un an, les économistes que le Premier ministre avait lui-même désignés pour établir l'audit des comptes de la nation, MM. Nasse et Bonnet, m'avaient répondu en commission des finances qu'aucun économiste n'était en mesure de donner de chiffre précis quant aux effets sur l'emploi. Je constate, hélas, que le chômage reste à 9,3 %.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. La croissance aussi a changé !
M. Roland Muzeau. Oui, depuis que vous êtes arrivés au pouvoir !
Mme Marie-Claude Beaudeau. La plus « optimiste » des études sur le sujet, celle de l'INSEE de 2002, se hasarde à un chiffre : 400 000 créations d'emplois depuis 1993, soit 40 000 par an, pour 15 milliards d'euros de cadeaux au patronat !
Mes chers collègues, à ce prix-là, de 50 000 à 200 000 euros par an et par emploi créé, selon les estimations, il serait beaucoup plus efficace et beaucoup plus utile d'embaucher dix fois plus de fonctionnaires !
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Mme Beaudeau lit le rapport Vasselle : il faut l'arrêter, le document est bien trop long ! (Sourires.)
Mme Marie-Claude Beaudeau. C'est en considération de toutes ces observations, mes chers collègues, que je vous demande de voter notre amendement, qui vise à rendre ses ressources légitimes à la répartition et qui couvrirait, à lui seul, le quart des besoins de financement du régime général d'ici à 2020. (Applaudissements sur les travées du CRC.)
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ne pourriez-vous pas, plutôt, demander la suppression des 35 heures ? (Sourires.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur de la commission des affaires sociales. Je serai bref, car les exonérations de charges pourraient nous occuper toute la journée !
Nous en sommes tous convaincus, ces fameuses exonérations de charges permettent, dans un premier temps, de diminuer le coût du travail des salariés les plus modestes. Adopter un tel amendement reviendrait donc, là encore, à détériorer la situation de l'emploi peu qualifié dans notre pays.
Quant à vous, madame Beaudeau, qui insistez sur le fait que des recettes ont été ôtées à la sécurité sociale pour aller alimenter le FOREC, je vous rappelle que le gouvernement Jospin a usé du même subterfuge pour financer les 35 heures !
La commission est donc tout à fait défavorable à cet amendement.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Parfaitement ! Ce sont vos amis socialistes qu'il faut critiquer, madame Beaudeau !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, j'ai le sentiment d'être de trop : c'est un débat entre le groupe communiste et le groupe socialiste. (M. le président de la commission des affaires sociales applaudit.)
M. Claude Estier. Mais non !
M. François Fillon, ministre. Depuis que je suis arrivé au Gouvernement, monsieur Estier, il n'y pas un euro d'allègement des charges qui n'ait été intégralement compensé à la sécurité sociale, pas un euro ! Je vous mets au défi d'en trouver un seul !
Cela étant, il est vrai, je n'ai pas encore trouvé les moyens financiers de compenser les milliards d'euros dont vous et votre gouvernement avez amputé la sécurité sociale.
Donc, naturellement, mon avis est défavorable sur cet amendement.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Bravo !
M. Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 120.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin
n° 194
:
Nombre de votants | 318 |
Nombre de suffrages exprimés | 316 |
Pour | 111 |
Contre | 205 |
L'amendement n° 121, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article 4, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« En cas de condamnation pour une des infractions à l'interdiction du travail dissimulé ou pour travail illégal prévues aux articles L. 122-1, L. 122-1-1, L. 124-1, L. 124-2, L. 124-2-1, L. 125-1, L. 125-3 et L. 324-9 les cotisations patronales prévues par le code de la sécurité sociale sont majorées de 10 % pour une durée de trois ans. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Depuis le début de la discussion de ce projet de loi, les sénateurs du groupe CRC ne cessent de rappeler la nécessité d'aborder de manière globale la question des retraites en lien avec l'état de la société.
L'une des conditions premières pour garantir l'avenir des retraites consiste à rechercher le plein emploi. La lutte contre le travail illégal est l'un des aspects de cette recherche. En effet, mes chers collègues, comment ne pas constater que les dispositifs existants sont bien insuffisants pour éradiquer ce fléau social dont sont victimes les salariés, mais aussi les organismes de protection sociale et les entreprises qui respectent les règles ? Il convient donc d'adopter des mesures dissuasives, rapides et efficaces.
Je tiens à rappeler, monsieur le ministre, que des dispositions de ce type ont d'ores et déjà été prises dans la loi d'orientation pour l'outre-mer et contribuent, dans ces départements, à la lutte contre l'emploi non déclaré.
J'estime, mes chers collègues, que cet amendement devrait pouvoir largement rassembler sur ces travées tant ce débat est pleinement lié à la sauvegarde de notre système de retraite.
J'insiste d'autant plus sur cet aspect que la responsabilité du travail clandestin correspond à une vision libérale des rapports sociaux. Le travail illégal ne correspond-il pas à un stade ultime de la dérégulation du travail ? Le travailleur clandestin, aujourd'hui, ne se trouve-t-il pas dans la même situation que celui du xixe siècle dont la seule protection était l'éventuel et rarissime paternalisme ?
Le libéralisme, monsieur le ministre, porte en son sein l'affranchissement des protections sociales les plus élémentaires.
Il faut rappeler que les conquêtes sociales, d'où leur nom, ne sont pas tombées du ciel : c'est bien la lutte, et non le bon vouloir patronal, qui a permis ces progrès.
Mes chers collègues, la lutte contre le travail dissimulé et illégal est un impératif pour notre société. Les dispositifs existants semblent insuffisants pour éradiquer ce fléau social. Il convient donc d'adopter des mesures plus dissuasives, plus rapides et plus efficaces. Tel est le sens de notre amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Chère collègue, les cotisations sociales n'ont jamais eu vocation à être des amendes pénales.
Par ailleurs, le droit existant prévoit déjà toutes les sanctions nécessaires et, à titre indicatif, sans remonter jusqu'au xixe siècle, en 2001, les inspecteurs de l'URSSAF ont décelé plus de 18 000 salariés dissimulés pour un total de redressements de 30 millions d'euros. Peut-être est-il préférable, dans ces conditions, de renforcer les moyens de contrôle plutôt que de majorer les amendes.
La commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Nous avons là affaire à un bloc d'amendements que l'on retrouve de manière très constante à chaque débat - loi de modernisation sociale, 35 heures - et qui, naturellement, n'a pas de rapport direct avec le sujet qui nous occupe, sauf à imaginer que le financement des retraites soit fondé sur les amendes, comme vous le proposez ici. Une telle majoration des amendes n'a pas lieu d'être : le dispositif existant dans notre pays pour sanctionner le travail dissimulé ou le travail illégal est déjà tout à fait considérable.
Ainsi, une personne physique condamnée pour infraction à l'interdiction de travail dissimulé s'expose à une peine d'emprisonnement de trois ans et à 45 000 euros d'amende ; ces peines sont doublées en cas de récidive. La personne morale, quant à elle, s'expose à 220 000 euros d'amende, à l'interdiction d'exercer l'activité, à un placement sous surveillance judiciaire, voire à la fermeture.
De plus, l'employeur ayant introduit illégalement en France des salariés de nationalité étrangère peut être condamné à trois ans d'emprisonnement et à 3 805 euros d'amende ; l'amende est portée à 19 000 euros au cas où l'auteur de l'infraction est une personne morale.
Enfin, l'employeur personne physique s'étant rendu coupable de prêt de main-d'oeuvre à but lucratif s'expose à une peine de deux ans d'emprisonnement et à 30 443 euros d'amende ; l'amende est portée à 152 216 euros si l'employeur est une personne morale.
L'arsenal est donc tout à fait suffisant pour lutter contre le travail dissimulé et illégal. Il suffit de le mettre en oeuvre avec détermination, ce que nous faisons.
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote.
M. Roland Muzeau. Je voudrais réagir aux propos de M. le rapporteur et de M. le ministre.
Nous ne contestons pas le fait qu'il existe déjà des dispositions juridiques, financières ou pénales. Par cet amendement nous voulons mettre en exergue un aspect essentiel du débat : le travail illégal échappe à toute cotisation sociale - assurance vieillesse ou maladie - , ce qui contribue à la détérioration des comptes sociaux.
Le nombre des délits constatés, que vous avez cité, monsieur le ministre, ne représente que la partie émergée de l'iceberg. En réalité, on est très loin de combattre le travail clandestin. D'ailleurs, ce travail illégal n'est pas l'exclusivité de petits employeurs peu scrupuleux, contrairement à ce que l'on pensait à une certaine époque. C'est tout à fait faux. Il n'y a pas de travail clandestin uniquement dans la restauration, on le constate aussi dans de grandes entreprises, notamment du bâtiment et des travaux publics, qui ont donné lieu à quelques affaires retentissantes : de grands groupes de construction ont ainsi été pris la main dans le sac, en flagrant délit de travail dissimulé dans le cadre de sous-traitance de sous-traitance, parfois sur quatre niveaux. C'était l'un des aspects que nous avions traités dans la loi de modernisation sociale, qui a bien évidemment été balayée d'un revers de main par le nouveau gouvernement, dont vous êtes une pièce majeure, monsieur Fillon.
Vous estimez que le dispositif actuel est suffisant et vous déclarez que vous vous attachez à le mettre en oeuvre, mais n'oubliez pas qu'au-delà de l'URSSAF et des contrôles qui sont nécessaires se pose le problème de l'effectif des inspecteurs du travail. A cet égard, vous n'avez pas tenu les engagements que le gouvernement précédent avait pris à la suite de l'accident d'AZF à Toulouse : il s'agissait alors de recruter une centaine d'inspecteurs du travail. Mais vous avez supprimé les crédit afférents et, obligé d'intervenir sur ce dossier quelque temps plus tard, vous vous en êtes tenu à des déclarations d'intention, de sorte que la pénurie d'inspecteurs du travail est aujourd'hui incontestée.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, pour explication de vote.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Monsieur le ministre, vous nous faites injure en laissant penser que nous voudrions régler le problème du financement de la sécurité sociale par la lutte contre le travail clandestin. Vous savez bien que c'est inexact !
M. François Fillon, ministre. Je n'ai pas dit cela ! Je cherchais un rapport entre les deux !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Le rapport, c'est que certains employeurs se comportent comme de véritables négriers et n'accordent absolument aucune importance aux droits de l'homme ! Nous en connaissons, et vous aussi !
M. François Fillon, ministre. Cela n'a rien à voir !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Vous nous avez rappelé les textes ; certes, ils existent, que ce soit pour sanctionner ou pour pénaliser. Mais, comme l'a souligné mon collègue M. Roland Muzeau, ce qui manque, ce sont les moyens de contrôle de l'application de la loi.
Mme Odette Terrade. On manque d'inspecteurs du travail !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Au demeurant, nous aborderons de nouveau cette question de la création de postes d'inspecteur du travail lors de l'examen des crédits de votre ministère.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 121.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 122, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article 4, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Le 2° de l'article L. 122-1-1 du code du travail est abrogé. »
L'amendement n° 123, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article 4, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Le 2° de l'article L. 122-1-1 du code du travail est complété comme suit :
« Le nombre de salariés occupés en contrat de travail à durée déterminée ou mis à disposition par une entreprise de travail temporaire pour ce motif ne peut excéder 5 % de l'effectif total de l'entreprise. Le nombre obtenu est arrondi à l'unité supérieure. En cas de dépassement de ce taux, les contrats de travail excédentaires et par ordre d'ancienneté dans l'entreprise sont réputés être conclus pour une durée indéterminée ; pour les salariés mis à disposition par une entreprise de travail temporaire, les contrats de travail sont réputés être conclus avec l'entreprise utilisatrice. »
La parole est à Mme Odette Terrade, pour présenter l'amendement n° 122.
Mme Odette Terrade. Avec le chômage, l'emploi précaire est la cause principale d'exclusion des jeunes. Les fins de CDD et d'intérim sont la première cause d'inscription à l'ANPE. L'emploi précaire rend la vie précaire, il interdit tout projet de vie de famille, il est un frein à l'accès au crédit et au logement. La précarité est un facteur de déstabilisation sociale qui doit être combattu avec force par des mesures radicales.
Toutes les mesures législatives antérieures ont échoué malgré l'action des services du ministère du travail et des tribunaux. Des centaines de milliers de précaires devraient légalement être requalifiés en contrats à durée indéterminée. Leurs employeurs tombent sous le coup du travail illégal. Les CDD et intérims ne sont admissibles que pour les remplacements d'absents et pour les activités saisonnières.
Cet amendement vise donc à supprimer le recours aux CDD pour accroissement temporaire d'activité de l'entreprise, compte tenu de l'abus qui est fait de cette notion. Il est donc en cohérence avec l'un de nos amendements précédents visant à limiter ce type de recours.
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour présenter l'amendement n° 123.
M. Roland Muzeau. A n'en pas douter, et nous avons eu l'occasion de le dénoncer, le projet Fillon, en allongeant la durée de cotisation requise pour ouvrir droit à une retraite à taux plein, pénalisera les salariés qui subissent les formes atypiques d'emploi et qui, faute de pouvoir valider en trimestres complets les heures de travail pourtant effectuées, n'acquièrent pas de droits sociaux pleins.
Comme nous l'avons également noté, la bataille pour l'emploi nécessite des mesures volontaristes fortes. Monsieur le ministre, vous souhaitez réhabiliter la place du travail en France - à supposer que le travail ait perdu de sa valeur ! - et nous partageons votre souci. Pourquoi ne vous attachez-vous pas à améliorer les conditions de travail et de santé des salariés et à sécuriser leur trajet d'emploi, comme vient de le préconiser le Conseil économique et social ?
Les salariés sont de plus en plus jeunes. Fatigués, usés par le chômage, par les petits boulots successifs, par l'absence de perspectives liée aux CDD, ils souffrent des excès de la mobilité, de l'adaptabilité, de leur mise en concurrence, du travail précaire, du « toujours plus » qui leur est demandé sans aucune garantie de sécurité.
Le présent amendement a pour objet de limiter strictement le recours aux CDD pour éviter qu'ils ne servent à pourvoir des emplois permanents et à permettre à chaque entreprise de se constituer un volant constant de « quasi-permanents intérimaires » qu'elle garderait en réserve. Nous invitons donc les entreprises à recruter selon une norme d'emploi de droit commun, c'est-à-dire en CDI, les salariés auxquels elles ont fait appel.
En dernier lieu, nous prévoyons de sanctionner les entreprises qui détournent manifestement le CDD de son objet. Le conflit des intermittents, depuis plusieurs semaines, montre bien que nous sommes là au coeur du débat sur l'utilisation abusive et frauduleuse d'un certain type de modalités d'embauche.
Tel est le contenu de nos propositions, qui concernent certains aspects de l'organisation de la vie au travail et qui ont naturellement un rapport avec la retraite, contrairement à ce que vous affirmez, monsieur le ministre.
La disposition que nous vous soumettons mérite d'être adoptée.
M. le président. Quel est l'avis de la commission.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Monsieur Muzeau, vous affirmez que nous sommes là au coeur du sujet. La commission pense cependant que ces amendements n'ont rien à voir avec le texte. Viser à restreindre les cas autorisés de recours aux CDD en en excluant celui de l'augmentation temporaire d'activité pourrait, au contraire, diminuer le niveau de l'emploi dans les entreprises concernées.
C'est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Même avis que la commission.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 122.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 123.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 124, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article 4, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est inséré après le premier alinéa de l'article L. 122-14-4 du code du travail un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le licenciement est prononcé pour une cause non réelle ou sérieuse ou sans respect des procédures prévues légalement ou conventionnellement, le tribunal, si un salarié en fait la demande, prononce la nullité du licenciement et ordonne la poursuite du contrat de travail sous astreinte de la valeur de deux jours de travail par jour de retard. »
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Qu'il me soit permis, pour illustrer le bien-fondé de l'amendement n° 124 visant à sanctionner un licenciement abusif légalement constaté par le juge par la réintégration du salarié concerné, de prendre un exemple.
La société Feudor a été condamnée par la cour d'appel de Lyon, au début du mois de juillet, à verser 1,43 million d'euros à soixante-quatorze de ses anciens salariés licenciés en 1999, au motif que ces licenciements n'étaient fondés ni sur des difficultés économiques ni sur les nécessités de la sauvegarde de la compétitivité. Bien que constatant que les dégraissages étaient liés à une délocalisation et qu'ils étaient donc dépourvus de cause réelle et sérieuse, le juge n'a pas pu, au regard de la législation actuelle, en tirer toutes les conséquences et prononcer la nullité des licenciements. Il n'a pu envisager autre chose que des dommages et intérêts, c'est-à-dire le rétablissement des salariés dans leurs droits et dans leur emploi.
La jurisprudence de la Cour de cassation limite à des cas précis cette possibilité de réintégration du salarié victime d'un licenciement irrégulier et abusif. En fait partie le cas du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement. Le code du travail prévoit par ailleurs un droit à réintégration pour les représentants du personnel.
Nous n'envisageons rien d'autre que de généraliser cette possibilité, bien évidemment à la demande des salariés.
Comment gagnerons-nous la bataille du plein emploi, comment assurerons-nous l'effectivité du droit à l'emploi figurant dans le préambule de la Constitution si nous ne cherchons pas à responsabiliser les employeurs ?
Et sur le fond, et sur la forme, notre proposition a toute sa place dans le présent débat sur les retraites. Je remarque en passant que l'Assemblée nationale s'est permis d'ajouter dans le projet de loi des dispositions modifiant le code du travail et visant à lutter contre les discriminations à l'embauche. Il est par conséquent juste que nous débattions des moyens d'éviter les destructions d'emplois.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Là encore, la commission pense que cet amendement est sans lien avec le texte.
Ce sujet a été abordé, à juste titre, dans le cadre de l'examen du projet de loi de modernisation sociale. L'amendement n° 124 concerne le droit du licenciement et vise à prévoir que, en cas de nullité du licenciement, la réintégration du salarié pourrait se faire en lieu et place de dommages et intérêts. Or je vous rappelle que les partenaires sociaux mènent actuellement des négociations sur le droit du licenciement.
Dans ces conditions, l'avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 124.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 125, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article 4, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Après le 1 de l'article L. 212-4-2 du code du travail, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le nombre de salariés employés à temps partiel ne peut excéder 10 % de l'effectif total de l'entreprise. Ce taux est arrondi à l'unité supérieure. Le contrat de travail des salariés à temps partiel excédant ce taux, et par ordre d'ancienneté dans l'entreprise, est réputé être conclu sur la base de la durée légale du travail. Les salariés concernés peuvent toutefois refuser la qualification de leurs contrats qui sont alors maintenus en l'état, dans ce cas, l'entreprise ne peut, tant qu'elle dépasse le taux de 10 %, recruter de nouveaux salariés à temps partiel. »
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Comme ceux que nous venons de présenter, cet amendement est très important, notamment parce que toutes les études montrent que la majorité des salariés qui travaillent à temps partiel n'ont pas choisi cette forme d'emploi, cette forme de chômage qui, pour des raisons de rentabilité, naît de l'intensification du travail.
Les grands groupes de la distribution et de l'entretien des locaux ont fait de ce travail à temps partiel une stratégie qui les a rapidement éloignés des raisons invoquées lors de l'élaboration de la loi de 1973.
Vous le répétez depuis quelques jours, monsieur le ministre : l'économie a changé. Mais la loi de 1973 est toujours en vigueur, même si elle a été modifiée à plusieurs reprises.
Il s'agit donc, par cet amendement, de combattre les abus du recours au temps partiel tout en permettant à celles et à ceux qui le souhaitent vraiment - ils sont moins nombreux qu'on ne veut bien le dire ! - de choisir cette forme d'emploi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Une fois encore, cet amendement n'a aucun rapport avec le projet de loi, et la solution proposée n'est pas forcément celle qui permettra le mieux de lutter contre les recours abusifs au temps partiel : elle apparaît trop automatique et, dans certaines entreprises, pourrait empêcher les salariés qui le souhaiteraient de demander un temps partiel.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. Roland Muzeau. Vous avez mal lu l'amendement, monsieur le rapporteur !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Même avis, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, pour explication de vote.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Comme l'a souligné mon collègue Roland Muzeau, nous considérons, contrairement à M. le rapporteur, que le présent amendement s'inscrit pleinement dans le débat sur l'avenir de nos régimes de retraite.
Tout d'abord, vous le savez bien, la situation de l'emploi conditionne largement le devenir de notre système de protection sociale. Faut-il que nous insistions encore sur le fait qu'un chômeur ou un travailleur précaire de moins représente un supplément de cotisation pour les caisses de retraite ? Dois-je vous rappeler qu'un million d'emplois créés représentent une recette supplémentaire de 20 milliards d'euros pour les caisses de la protection sociale ?
Ensuite, le temps partiel subi est majoritairement supporté par les femmes, qui occupent 80 % des postes de ce type. Il s'agit, vous le savez, d'une source de précarité au quotidien et, naturellement, d'insécurité au moment de la retraite.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous avons présenté cet amendement au projet de loi de réforme des retraites. Cette dernière figeant des inégalités de carrière, notre amendement ne nous semble pas dénué d'intérêt au moment où le Gouvernement modifie les conditions de la préparation de la retraite pour l'ensemble des Français.
A celles qui, entre 60 et 65 ans, n'ont pas validé 160 trimestres de cotisation - ce sont tout de même 25 % des femmes -, votre Gouvernement, monsieur le ministre, propose de continuer d'être payées au minimum pendant plus longtemps encore pour percevoir, à la fin, une retraite qui ne sera pas digne de ce nom, les dispositions concernant l'objectif de garantie d'un minimum de pension ne s'appliquant qu'aux salariés à temps complet.
Monsieur le ministre, toutes ces femmes travaillent, je dirai même, pour employer un verbe beaucoup plus dur, qu'elles triment dans la grande distribution, dans les sociétés de nettoyage, dans les hôtels - rappelons-nous, voilà quelques semaines, la lutte des salariées de la chaîne Arcade -, dans toutes ces entreprises de services. Toutes ces femmes jonglent entre les problèmes de l'accueil de leurs enfants et leurs horaires décalés, irréguliers. Or vous ne proposez rien pour améliorer la situation, monsieur le ministre, excepté celle des patrons, qui peuvent, depuis que vous êtes installé rue de Grenelle, cumuler l'exonération des cotisations sociales sur les bas salaires avec celle des cotisations sur le temps partiel.
Monsieur le ministre, il faut travailler sur le plein emploi des femmes. Six femmes au foyer sur dix souhaiteraient trouver un emploi.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est sûr !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Il faut donc chercher les pistes qui mèneraient à un plus grand bien-être social de tous, mais aussi, bien entendu - c'est ce qui nous intéresse aujourd'hui -, qui permettraient de percevoir des cotisations supplémentaires pour financer les retraites. Vous le constatez, nous nous inscrivons dans un cercle vertueux.
Ceux - et surtout celles - qui travaillent à temps partiel l'ont rarement choisi. Mais, faute d'un travail à temps complet, elles - et ils - acceptent cette situation. Nous voulons combattre les abus des patrons qui utilisent ces contrats pour payer moins de charges et pour rendre encore plus taillables et corvéables ces hommes et ces femmes.
La discussion de cet amendement pourrait être l'occasion d'un débat sur l'accueil des jeunes enfants de ces couples qui ont des horaires décalés ou irréguliers. Je connais pour ma part des femmes qui, dans la région d'Ile-de-France, où les problèmes de transport sont importants, quittent leur banlieue à 18 heures pour aller faire quelques heures de ménage à l'autre bout de la région parisienne.
Mme Odette Terrade. Absolument !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Une telle situation est honteuse et exige d'être revue. C'est pourquoi nous souhaitons, en adoptant cet amendement, faire en sorte que seulement 10 % des effectifs d'une entreprise soient employés à temps partiel. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 125.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 126, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article 4, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 212-5-2 du code du travail, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - Les heures supplémentaires ne peuvent être effectuées qu'après l'accord du comité d'entreprise ou, le cas échéant, des délégués du personnel et du salarié.
« Les heures supplémentaires ne peuvent être accomplies qu'au cas où l'entreprise ne peut recruter le personnel nécessaire pour faire face au surcroît d'activité, notamment lorsqu'il n'existe pas de candidat pour le travail proposé. »
La parole est à M. Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Cet amendement concerne les heures supplémentaire, et vise à prévoir que celles-ci « ne peuvent être accomplies qu'au cas où l'entreprise ne peut recruter le personnel nécessaire pour faire face au surcroît d'activité ».
En effet, la destination première des heures supplémentaires est de répondre aux à-coups et aux fluctuations de l'activité des entreprises. Or, dans une grande majorité des cas, elles sont utilisées par les employeurs de manière structurelle, ce qui pénalise le développement de l'emploi sans pour autant permettre aux salariés, qui ne sont pas toujours demandeurs, loin s'en faut, d'augmenter leur salaire.
Les heures supplémentaires doivent selon nous - et c'est l'objet de l'amendement n° 126 - être mieux encadrées. Dans la mesure où il vous était difficile, monsieur le ministre, d'en finir officiellement avec la loi des 35 heures, loi que vous qualifiez de « scélérate » et qui, selon vous, est responsable de tous les maux, de la dévalorisation du travail, de la perte de compétitivité des entreprises... , vous avez, par divers moyens détournés, permis aux entreprises d'allonger la durée effective du temps de travail. Mais vous ne vous êtes jamais préoccupé des conséquences que cela pouvait avoir tant sur les conditions de travail que sur les conditions de vie des salariés concernés, qui, comme le rappelait à l'instant fort justement ma collègue et amie Mme Marie-Claude Beaudeau, perdent ainsi, notamment, des droits à repos.
Sous couvert d'assouplir notre législation, mais aussi afin de permettre à ceux qui le veulent de travailler davantage, vous vous êtes attaqué, monsieur le ministre, au régime légal des heures supplémentaires. Vous l'avez unifié, vous avez relevé le seuil de déclenchement du repos compensateur et diminué la rémunération des heures supplémentaires dans les entreprises de moins de vingt salariés.
Pour ne pas entraver le développement de l'emploi et pour préserver la santé des salariés, nous pensons à l'inverse qu'il convient, d'une part, de mieux définir les conditions dans lesquelles l'employeur peut recourir aux heures supplémentaires et, d'autre part, de donner aux salariés la possibilité de les accepter librement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. L'amendement n° 126 concerne le régime des heures supplémentaires.
Vous le savez, nous avons évoqué et repoussé cette question lors du débat sur la loi du 17 janvier 2003 relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Avis défavorable, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 126.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 127, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article 4, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Le premier alinéa de l'article L. 321-1 du code du travail est ainsi rédigé :
« Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement rendu inévitable par un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié, résultant soit d'une suppression ou d'une transformation d'emploi ou d'une modification du contrat de travail dues à des difficultés économiques qui n'ont pu être surmontées par tout autre moyen que la réduction des coûts salariaux, soit à des mutations technologiques indispensables à la pérennité de l'entreprise. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Le licenciement doit être le moyen ultime de résolution des difficultés économiques et c'est pourquoi nous vous proposons une nouvelle définition du licenciement économique.
Il ne se passe pas un jour sans que l'on apprenne que telle entreprise est mise en liquidation judiciaire, que tel grand groupe annonce un projet de restructuration et que, en conséquence, des milliers de salariés sont laissés sur le carreau.
Pour arrêter ces hémorragies d'emplois et éviter des drames humains, le précédent Gouvernement s'était attaché à renforcer les dispositions législatives ayant trait à la prévention des licenciements économiques.
Après avoir mis à mal la loi relative aux 35 heures, comme le demandait impérativement le MEDEF, ce gouvernement a entrepris de mettre entre parenthèses les dispositions les plus intéressantes pour les salariés, car protectrices du droit à l'emploi, du volet antilicenciement de la loi de modernisation sociale.
Comme à chaque fois, les arguments tels que ceux de la rigidité de notre droit social, de l'insécurité juridique, contrariant l'emploi et l'investissement étranger, ont servi à justifier que vous reveniez sur la définition équilibrée des licenciements économiques intégrant dans la loi les avancées jurisprudentielles.
Aujourd'hui, nous pensons qu'à nouveau se pose l'exigence de renforcer les garanties offertes aux salariés.
Si nous voulons lutter contre le chômage, attaquons-nous en amont à ses causes, aux licenciements qui n'ont d'autre justification que l'augmentation de la rentabilité du capital. Je vous avais d'ailleurs interrogé à ce sujet, monsieur le ministre, concernant l'entreprise Hewlett-Packard à Ebin, mais je n'ai pas vraiment obtenu de réponse...
Je sais, mes chers collègues, que ces propositions vous font bondir, attachés que vous êtes à préserver les intérêts des actionnaires.
Je considère toutefois qu'il est du rôle du législateur de rendre impossibles, voire risqués, les licenciements, de les sanctionner si nécessaire, et qu'il importe désormais d'aller au-delà de l'accompagnement en cas d'abus.
Pour sécuriser l'emploi, je vous invite, mes chers collègues, à voter le présent amendement, qui, je le précise pour ceux qui en auraient fait une lecture rapide, donne une définition du licenciement économique différente, mais non moins précise, que celle qui avaient été retoquée par le Conseil constitutionnel.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. La nouvelle définition du licenciement économique que vous proposez ne nous fait pas bondir, madame David, mais, vous le savez, elle a déjà été déclarée inconstitutionnelle dans la décision du 12 janvier 2002 sur la loi de modernisation sociale.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 127.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin
n° 195
:
Nombre de votants | 291 |
Nombre de suffrages exprimés | 289 |
Contre | 178 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 128, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article 4, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 321-4-1 du code du travail, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - Le salarié licencié pour motif économique, qui estime que son employeur ne s'est pas acquitté loyalement ou de façon complète de son obligation de reclassement, peut porter l'affaire devant le bureau de jugement du conseil des prud'hommes qui doit statuer au fond dans le délai d'un mois suivant sa saisine. Lorsque le juge constate l'insuffisance des efforts de reclassement réalisés par l'employeur, il prononce la nullité du licenciement et ordonne, au choix du salarié, la poursuite de son contrat de travail ou l'attribution d'une indemnité ne pouvant être inférieure à six mois de salaire brut. La décision du conseil des prud'hommes est exécutoire de plein droit. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet amendement vise à sanctionner de nullité un licenciement lorsque l'employeur a manqué à son obligation de reclassement du salarié.
Pour illustrer mon propos, je prendrai un exemple : Celatex, entreprise de textile, annonçait il y a un an un plan social important. Aujourd'hui, le bilan dressé concernant le devenir professionnel des salariés me pousse à penser que notre législation relative aux licenciements économiques doit être, non pas simplifiée dans le sens où vous l'entendez, c'est-à-dire allégée, mais plutôt renforcée, rendue plus impérative en termes de résultat.
Seul le tiers des salariés touchés a été reclassé.
J'ai déjà évoqué Hewlett-Packard, je pourrais aussi citer Atofina et bien d'autres exemples, qui, tous, reflèteraient malheureusement la même réalité, à savoir que l'obligation incombant à l'employeur qui envisage un licenciement de rechercher les possibilités de reclassement des salariés concernés lorsque la suppression des emplois ne peut être évitée, reste de l'ordre d'une obligation de moyens.
Le juge, actuellement, vérifie, mais a posteriori seulement, la pertinence des mesures contenues dans le plan social.
Depuis 1993, grâce à l'adoption d'un amendement communiste, l'insuffisance de plan social entraîne la nullité de la procédure. En vertu de la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation, les licenciements eux-mêmes sont nuls en l'absence de plan social et, dans certains cas, cette nullité peut être sanctionnée par la réintégration des salariés.
Nous n'envisageons donc rien de très nouveau, à travers cet amendement, si ce n'est, d'une part, de mettre en place une grille de lecture du contenu de l'obligation de reclassement, qui doit s'apprécier au regard des moyens dont dispose l'entreprise et qui ne saurait être effective que dans la mesure où l'intéressé est reclassé sur un emploi relevant de la même catégorie, et, d'autre part, de consacrer législativement le droit à réintégration des salariés lorsque l'entreprise n'a pas satisfait à son obligation de reclassement et d'accompagnement.
Chacun l'aura compris, cet amendement qui touche à la question de l'emploi comme vecteur essentiel de la question du financement des retraites mérite d'être adopté.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. La commission estime que cet amendement n'a pas de lien avec le texte que nous examinons. Elle émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Hors sujet !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 128.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 129, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article 4, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 321-4-1 du code du travail, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - Afin de promouvoir les projets alternatifs aux compressions d'effectifs prévus au neuvième alinéa de l'article précédent, et au deuxième alinéa de l'article L. 432-1, les délégués du personnel ou le comité d'entreprise qui constatent que les licenciements économiques envisagés par l'employeur ne sont pas pourvus d'un motif conforme à l'article L. 321-1 peuvent exercer un droit d'opposition à la rupture du ou des contrats de travail.
« Il s'ensuit que la procédure de licenciement est suspendue et que ses effets sont nuls jusqu'à ce que le conseil des prud'hommes ait statué sur la conformité du motif invoqué par l'employeur à l'article L. 321-1.
« Lorsque les représentants du personnel exercent leur droit d'opposition, celui-ci doit être notifié par écrit à l'employeur au plus tard lors de la dernière réunion de consultation prévue aux articles L. 422-1 et L. 321-3.
« Une fois que l'opposition lui a été notifiée, l'employeur peut saisir le conseil des prud'hommes après avoir informé les salariés concernés de la suspension de la procédure de licenciement.
« A compter de la saisine du conseil des prud'hommes, ce dernier doit statuer conformément au deuxième alinéa du présent article dans un délai d'un mois.
« S'il juge que les licenciements visés par l'opposition sont pourvus d'un motif économique au sens de l'article L. 321-1, le conseil des prud'hommes met fin à la suspension de la procédure, laquelle peut produire tous ses effets, sans préjudice des dispositions de l'article L. 321-4-2.
« S'il juge que le motif des licenciements visés par l'opposition n'est pas conforme à l'article L. 321-1, la procédure et toute rupture consécutive des contrats de travail sont nulles. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Cet amendement confère un droit nouveau aux représentants du personnel et du comité d'entreprise afin qu'ils puissent s'opposer et faire annuler les lincenciements dont le motif économique est injustifiable.
Les licenciements qui n'ont pas un motif économique admis par la loi, tels ceux qui sont destinés exclusivement à la valorisation des actions, ne doivent pas avoir lieu.
Afin que le représentants du personnel et du comité d'entreprise puissent s'y opposer efficacement, la loi doit leur conférer un véritable pouvoir de contrôle et de contestation.
La seule augmentation du coût des licenciements ne suffira pas, nous le savons, à dissuader les sociétés qui spéculent sur la compression des effectifs. D'ailleurs, le prix à payer pour licencier est maintenant complètement intégré dans la gestion des entreprises.
Inspiré du droit allemand, le présent amendement vise à donner aux représentants des salariés un droit nouveau qui, sans être une interdiction des licenciements, crée les conditions d'une véritable concertation en instaurant une sanction éventuelle en amont de la rupture des contrats de travail.
Lorsque la motivation invoquée par l'employeur n'est pas conforme à la loi, les délégués du personnel et le comité d'entreprise pourront en effet s'opposer aux licenciements jusqu'à ce que le juge se prononce sur leur justification.
Dans l'hypothèse où le juge constate à son tour l'irrégularité des motifs de licenciements, il pourra définitivement confirmer l'opposition et annuler toutes décisions contraires.
Le droit d'opposition est en outre un instrument efficace afin de promouvoir les projets économiques proposés par les représentants du personnel comme alternative à la décision de licencier.
Tous, dans nos régions, nous assistons à des licenciements qui tombent comme un couperet, et souvent sans que l'avis des hommes et des femmes qui se sont investis dans l'entreprise soit pris en compte. Si le licenciement n'était plus considéré comme la seule solution pour sortir l'entreprise des difficultés, nous disposerions de plus de temps et pourrions lutter beaucoup plus efficacement en faveur de l'emploi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. C'est encore un amendement hors sujet, et la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Même avis que la commission.
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote.
M. Roland Muzeau. Ce n'est pas sérieux de dire que cet amendement n'a rien à voir avec l'objet du débat, car cela revient à considérer que les créations d'emploi n'ont pas d'effet positif sur les comptes sociaux.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. C'est hors sujet !
M. Roland Muzeau. Comment nier que la création d'un million d'emplois dans les années qui ont précédé votre arrivée au pouvoir a permis de rétablir les comptes sociaux ? On les a fait repasser dans le vert et, vous, vous les « replombez », et ils sont à nouveau dans le rouge !
Je me souviens d'ailleurs de l'effet désatreux sur l'économie nationale des prélèvements supplémentaires que vous avez imposés - de mémoire, ils étaient de l'ordre de 120 milliards de francs - lorsque vous êtes arrivés au pouvoir.
M. François Fillon, ministre. C'était pour payer vos dettes !
M. Roland Muzeau. Je considère donc qu'un amendement qui, comme celui-ci, conduit à une amélioration sensible des comptes sociaux - quels qu'ils soient - relève non seulement du bon sens, mais aussi de la salubrité publique. Il faut une politique de l'emploi - vous n'en avez pas -, et cette politique doit viser à réduire la masse de chômeurs, indemnisés ou non.
A ce propos, parlons du nombre de chômeurs indemnisés, mais parlons aussi du nombre de chômeurs non indemnisés, et profitons-en pour revenir parfois aux normes du Bureau international du travail : les comparaisons n'en seront que plus pertinentes !
Je soutiens donc totalement l'amendement n° 129, car il est décisif pour l'équilibre de nos comptes sociaux, et je conteste formellement l'appréciation que M. le rapporteur vient d'en faire.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 129.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 132 est présenté par MM. Fischer, Bret et Coquelle, Mmes David, Didier et Luc et M. Renar.
L'amendement n° 133 est présenté par Mmes Demessine, Beaufils et Beaudeau, M. Foucaud, Mme Mathon, MM. Le Cam et Biarnès.
L'amendement n° 134 est présenté par Mme Borvo, M. Muzeau, Mme Bidard-Reydet, M. Ralite, Mme Terrade et M. Loridant.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
« Avant l'article 4, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 321-15 du code du travail, il est ajouté un article ainsi rédigé :
« Art. ... - Lorsque le total du nombre de salariés employés en contrat de travail à durée déterminée ou mis à disposition par une entreprise de travail temporaire sous le motif de surcroît d'activité ou mis à disposition par une entreprise extérieure sous le couvert d'un contrat de sous-traitance ou de service excède 5 % de l'effectif de l'entreprise, le non-renouvellement des contrats de travail des salariés employés dans ces conditions est réputé être un licenciement opéré par l'entreprise utilisatrice, il est soumis aux règles relatives aux licenciements prévues par les livres Ier et III du code du travail.
« Le taux de 5 % est apprécié en rapportant la moyenne mensuelle des salariés employés dans les conditions susdites au cours des douze mois précédant l'annonce du projet de licenciement ou de non-renouvellement des contrats à l'effectif moyen de l'entreprise au cours de la même période. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet amendement porte sur la question du travail précaire.
Nous avons déjà eu l'occasion de défendre un certain nombre d'amendements sur les conditions de travail et la qualité de l'emploi, mais nous sommes évidemment amenés à en reparler.
Le fait est que l'on gère aujourd'hui l'emploi comme une marchandise que l'on manipule à flux tendu, comme les denrées périssables ou les matières premières, et, dans de nombreux secteurs, le recours au travail précaire a carrément été érigé en mode de gestion courante de l'activité.
Pourquoi les entreprises exercent-elles un tel recours aux emplois précaires et aux contrats à durée déterminée ? Il y a une raison essentielle à ce choix : assurer au mieux la rentabilité du capital.
Dans tous les cas de figure, le recours au travail à temps partiel et au travail intérimaire est, en effet, d'abord et avant tout un moyen de gérer au plus près le coût du travail, en échange d'une productivité intensive de chacun des salariés concernés.
Ce mode de gestion des ressources humaines atteint parfois un niveau particulièrement spectaculaire dans des secteurs comme le bâtiment et les travaux publics, dans le secteur de la restauration et de l'hôtellerie, dans le domaine des services commerciaux, ou encore dans certains segments de la métallurgie.
Dans cet amendement, nous proposons que la législation sociale évolue de manière significative.
Il s'agit de considérer comme salariés à temps plein dans l'entreprise qui les emploie les travailleurs précaires et les travailleurs intérimaires, et de considérer qu'ils sont licenciés par l'entreprise utilisatrice chaque fois que le volant de main-d'oeuvre concerné est diminué.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Demessine, pour présenter l'amendement n° 133.
Mme Michelle Demessine. Les salariés précaires, le plus souvent employés dans des conditions illégales, sont ceux qui subissent le plus les effets des décisions de suppression d'emplois prises par les chefs d'entreprise. Il s'agit de salariés dont les contrats devraient le plus souvent être requalifiés, mais, espérant toujours l'embauche, ils n'engagent pas les procédures à cette fin. Par ailleurs, il est parfaitement hypocrite de compter sur l'action administrative, quels que soient les efforts fournis par les fonctionnaires concernés, pour régler un mal qui est devenu endémique.
Une modification de la législation est donc impérative.
Nous devons, pour répondre aux objections, apporter par avance trois précisions.
Tout d'abord, cet amendement ne vise que la précarité motivée par de prétendus surcroîts d'activité : il laisse intactes les possibilités de remplacer les absents et de recourir aux saisonniers.
Ensuite, il s'agit de la moyenne annuelle : il reste possible de recourir à un taux supérieur sur une période limitée.
Enfin, il ne s'agit pas d'un droit à occuper 5 % de précaires, mais d'un maximum : les autres conditions demeurent.
Il s'agit en fait d'une proposition permettant d'atteindre les objectifs fixés par la législation actuelle, qui n'est pas respectée et est complètement détournée de son objet par les grandes entreprises.
A ce sujet, je voudrais exposer au Sénat la situation spécifique de l'entreprise Rateau, importante usine métallurgique implantée à La Courneuve, en Seine-Saint-Denis. Voilà trente ans, elle comptait plus de 3000 salariés, tous employés directement par la société Rateau. A l'époque, les premières menaces sur l'emploi avaient entraîné un mouvement social de l'ensemble des salariés conduisant, entre autres actions, à l'occupation de l'établissement.
Où en est-on aujourd'hui ? Filiale d'Alstom, l'entreprise a connu, depuis trente ans, une importante augmentation de la productivité du travail. Sa forme juridique a évolué. En particulier, la propriété immobilière, la propriété des machines et l'activité d'exploitation et de production stricto sensu ont été séparées. De surcroît, une part importante des processus de production est aujourd'hui assurée par des entreprises sous-traitantes, par le biais de contrats divers. C'est là, à vrai dire, un exemple typique de ce qui se pratique aujourd'hui dans un grand nombre d'entreprises de ce pays ; chacun d'entre nous pourrait en témoigner.
Je vous ferai grâce, mes chers collègues, de l'analyse comptable et économique, notamment fiscale, des incidences de ces choix de gestion, qu'il s'agisse du moindre coût du travail, de la disparition du paramètre de l'ancienneté pour la rémunération, de la récupération de la TVA sur les prestations de services des entreprises de travail temporaire. Toutes ces économies de gestion réalisées sur le dos des salariés sont loin d'être négligeables, mais cela n'empêche pas les directions des entreprises, celle d'Alstom en particulier, de mettre en place des plans d'ajustement des effectifs strictement inspirés par les impératifs de rentabilité.
En outre, lorsque les entreprises ont épuisé les possibilités offertes par les dispositifs de préretraite, elles passent à la seconde phase, celle de la non-reconduction des contrats de travail intérimaire et de la dénonciation des contrats de sous-traitance. Cela s'apparente, au fond, à un véritable plan social ; les victimes, en termes d'emploi, sont aussi nombreuses, mais le coût est souvent bien moindre.
Telle est la démarche suivie par l'entreprise Rateau, laquelle dispose pourtant de compétences et de capacités particulières, qui risquent fort d'être dilapidées au seul et unique motif qu'il faut assurer la rentabilité du capital.
Sous le bénéfice de ces observations, nous vous invitons, mes chers collègues, à adopter l'amendement n° 133.
M. le président. La parole est à Mme Danielle Bidard-Reydet, pour présenter l'amendement n° 134.
Mme Danielle Bidard-Reydet. Cet amendement soulève une nouvelle fois la question de la place du travail précaire dans l'activité économique du pays.
Dans certains secteurs d'activité, le recours au travail précaire est particulièrement important. Depuis plusieurs semaines, notamment depuis la discussion du projet de loi autorisant le Gouvernement à légiférer par ordonnances dans un certain nombre de domaines, nous sommes confrontés à la question de la réforme du code des marchés publics par la voie réglementaire.
Comme on le sait, les seuils d'application de la publicité des appels d'offres de services et de travaux des collectivités publiques ont été sensiblement relevés par le décret portant sur la loi relative aux nouvelles régulations économiques. Pour les contrats de BTP, il est ainsi proposé de faire passer ce seuil à 6,2 millions d'euros, alors qu'il était de 45 000 euros voilà moins de dix ans.
Adopter une telle démarche est le plus sûr moyen d'encourager, dans la discrétion des contrats passés de gré à gré, le développement du travail précaire et du travail temporaire ou le recours aux contrats à durée déterminée.
On sait, en effet, comment les choses peuvent se passer : un grand groupe de BTP obtient un marché, moyennant parfois quelques menues compensations pour les cocontractants, puis il répartit les différentes tranches du chantier entre de nombreux sous-traitants, souvent peu regardants sur les conditions de travail et de rémunération de leurs employés. Pour peu que le chantier prenne un peu de retard, on procède discrètement à la dénonciation du contrat entre donneur d'ordre et sous-traitant.
C'est pour empêcher ce recours systématique à l'ajustement des politiques d'emploi des entreprises que j'invite le Sénat à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Ces trois amendements sont strictement identiques, même s'ils ont été défendus avec des argumentaires différents,...
M. Roland Muzeau. Complémentaires !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. ... évoquant toute l'organisation du travail en France, en passant par les plus importantes mesures sociales. Entre parenthèses, vous avez d'ailleurs oublié de financer certaines d'entre elles en totalité, en particulier l'APA, la CMU et les 35 heures.
De plus, ces trois amendements étant similaires à l'amendement n° 123, que la commission a déjà déclaré hors sujet, je ne puis, au nom de cette même commission, qu'émettre un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 132, 133 et 134.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 1070, présenté par Mmes Beaudeau et Demessine, MM. Muzeau, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article 4, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 322-4-6 du code du travail est supprimé. »
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet amendement a pour objet de rendre à la sécurité sociale, en particulier à notre régime solidaire de retraite, les ressources naturelles que les exonérations de cotisations sociales patronales inscrites dans la loi du 29 août 2002 portant création d'un dispositif de soutien à l'emploi des jeunes en entreprise lui ont retirées. Ce texte et la loi du 17 janvier 2003 relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi constituent les deux dispositifs instaurés jusqu'à présent dans le cadre du processus, que nous avons déjà dénoncé, visant à exonérer toujours davantage les entreprises du financement de la sécurité sociale.
Je rappelle que les contrats jeunes en entreprise, d'une durée de trois ans, concernent les jeunes sans qualification âgés de 16 ans à 22 ans. Les entreprises contractantes, quelle que soit leur taille, bénéficient d'une exonération totale de cotisations sociales, y compris pour l'assurance chômage, même quand il s'agit d'emplois à temps partiel.
Le montant des exonérations accordées au titre des contrats jeunes en entreprise représente, en année pleine, 600 millions d'euros, soit un préjudice équivalent pour la sécurité sociale, l'UNEDIC...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales, et M. François Fillon, ministre. Mais non !
Mme Marie-Claude Beaudeau. ... ou le budget de l'Etat.
M. François Fillon, ministre. Rayez les deux premières mentions, et gardez la troisième !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est le budget de l'Etat !
Mme Marie-Claude Beaudeau. En effet, comment cette mesure a-t-elle été financée ?
Monsieur le ministre, je vous ai posé, le 3 octobre 2002, une question écrite, à laquelle vous n'avez toujours pas répondu à ce jour, pour vous le demander et pour vous interroger sur les conséquences de la mise en place du dispositif des contrats jeunes en entreprise pour les comptes sociaux, notamment en ce qui concerne l'UNEDIC.
Les exonérations sont-elles prises en charge par l'Etat ? L'ont-elles été en 2002 ? Où figurent les crédits correspondants dans le budget de votre ministère ? Les caisses d'assurance sociale ont-elles avancé de l'argent à l'Etat au titre des contrats jeunes en entreprise, et si oui, à hauteur de quel montant ? Je souhaiterais que vous nous répondiez, mais je souligne que la prise en charge des cotisations patronales par les contribuables, c'est-à-dire, à 90 %, par les salariés, ne saurait nous satisfaire.
Le préjudice indirect que subissent les comptes sociaux, notamment l'assurance vieillesse, du fait de l'instauration des contrats jeunes en entreprise est également élevé, en raison même de l'inefficacité, voire de la nocivité pour l'emploi et les salaires, de cette mesure, dont nous proposons, par notre amendement, la suppression.
Les contrats jeunes créent ce que l'on appelle un effet d'aubaine, incitant les employeurs à remplacer par ce biais des jeunes d'un niveau égal ou supérieur au baccalauréat ou des salariés un peu plus âgés par des jeunes non qualifiés et moins coûteux, ce qui tire vers le bas l'ensemble de la grille salariale.
Afin d'être plus concrète,...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ce serait peut-être utile !
Mme Marie-Claude Beaudeau. ... je vous propose, mes chers collègues, de considérer le cas d'une entreprise qui emploie nombre de jeunes : McDonald's.
McDonald's compte 25 000 salariés en France, âgés en moyenne de 22 ans. On peut estimer qu'au moins 10 000 d'entre eux sont éligibles aux contrats jeunes. La direction de l'entreprise n'a certainement pas manqué de les inciter à s'engager dans cette voie. Faisons les comptes : 10 000 fois 225 euros d'aide par mois, cela fait 2,25 millions d'euros par mois, soit 27 millions d'euros par an au bas mot !
Ainsi, grâce à votre mesure, monsieur le ministre, une entreprise comme McDonald's peut se voir subventionnée à hauteur de 27 millions d'euros par an, aux frais de la sécurité sociale et de l'Etat et sans créer d'emplois !
M. François Fillon, ministre. C'est du délire !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Certains d'entre vous, mes chers collègues, auront pu lire dans la presse quelles sont les conditions de rémunération de ces jeunes salariés. Pour une grande partie d'entre eux, c'est presque de l'esclavage ! Et quand ils résistent à la politique imposée par McDonald's, ils se retrouvent devant les tribunaux !
Mme Odette Terrade. Eh oui ! Absolument !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Il est tout à fait scandaleux que puissent exister dans notre société de telles conditions de rémunération et de travail !
Tels sont les véritables effets de votre dispositif des contrats jeunes en entreprise, monsieur le ministre ! Son incidence sur le chômage est, elle, insignifiante. Les premiers chiffres disponibles, à défaut d'un bilan officiel, le confirment : plus de la moitié des jeunes ayant signé un contrat jeunes occupaient déjà un emploi auparavant, souvent d'ailleurs dans la même entreprise.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Mais pas chez McDonald's !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Que l'on me permette, en conclusion, de faire part au Sénat de l'analyse d'un conseiller de l'enseignement technologique sur les contrats jeunes en entreprise et la formation hôtelière :
« Il manque, dans ce contrat, un volet obligatoire de formation professionnelle. L'exonération des charges sociales de l'employeur devrait le conduire à prendre un jeune non qualifié au détriment d'un diplômé. Ce nouveau contrat ne permet sans doute pas de recruter des jeunes réellement motivés, ce qui est contraire à la valorisation des métiers de l'hôtellerie-restauration. Sans une formation initiale, le jeune risque de demeurer au stade de manoeuvre toute sa vie, car il n'est pas acquis que l'employeur ait la possibilité d'assurer ultérieurement sa formation et son évolution de carrière. »
Pour sauvegarder le niveau et la qualité des emplois, les salaires, la formation, donc le financement des retraites, je vous demande, mes chers collègues, de voter notre amendement visant à supprimer l'article du code du travail instituant les contrats jeunes en entreprise. Nous demandons qu'il soit mis au voix par scrutin public.
M. Roland Muzeau. Très bien !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Que de contrevérités !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Par les amendements précédents, le groupe CRC critiquait le recours à l'emploi précaire. Maintenant, il demande la suppression des contrats jeunes, qui sont des contrats à durée indéterminée !
Or, après seulement une année d'existence, ce dispositif a déjà profité à plus de 80 000 jeunes non qualifiés âgés de 16 ans à 22 ans. Vous le savez très bien ! La suppression des contrats jeunes ne me paraît donc pas de nature à favoriser l'insertion de cette catégorie sociale dans le monde du travail.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Bien que cet amendement n'ait aucun rapport avec le projet de loi que nous examinons, je vais répondre à toutes les questions de Mme Beaudeau, parce qu'elle a franchi toutes les limites dans la caricature !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Oui !
M. François Fillon, ministre. Je suis d'ailleurs heureux que Mme Beaudeau ait demandé un scrutin public sur cet amendement. Chacun devra ainsi prendre ses responsabilités, et les Français sauront qui aura voté en faveur de la suppression des contrats jeunes en entreprise.
M. Roland Muzeau. Ce n'est pas un problème !
M. François Fillon, ministre. Premier point : le dispositif des contrats jeunes en entreprise aurait une incidence sur les comptes sociaux. C'est complètement faux ! Faut-il que je me mette à chanter pour vous convaincre ? (Rires sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.) Mieux vaudrait le demander à M. le président de la commission des affaires sociales, qui a beaucoup plus de talent que moi ! (Sourires.)
M. Gilbert Chabroux. Il chante bien l'Internationale !
M. François Fillon, ministre. Les contrats jeunes ne donnent pas lieu à exonération de cotisations sociales. Les entreprises concernées, vous le savez, madame Beaudeau, acquittent normalement les cotisations sociales et perçoivent une compensation financée par l'Etat.
M. Roland Muzeau. Voilà !
Mme Nicole Borvo. C'est l'Etat qui paie !
M. François Fillon, ministre. Cela n'a rien à voir avec les comptes sociaux ! Les crédits correspondant au financement intégral de ces compensations, s'agissant aussi bien des cotisations de sécurité sociale que de l'UNEDIC, sont inscrits au chapitre 44-70 du projet de loi de finances pour 2003. Le dispositif des contrats jeunes n'affecte donc nullement les comptes sociaux, au contraire des mesures plus anciennes que vous avez promues. Je pense notamment ici aux 35 heures, qui ont coûté plusieurs milliards d'euros aux comptes sociaux. (M. Marcel Debarge proteste.)
On ne peut s'exonérer de sa responsabilité ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Deuxième point : les contrats jeunes susciteraient un effet d'aubaine et entraîneraient l'éviction des salariés qualifiés au profit de jeunes sans qualification.
Au passage, veut-on signifier que les jeunes non qualifiés n'ont qu'à rester au chômage ? On leur propose, avec les contrats jeunes en entreprise, des contrats à durée indéterminée. Un tel dispositif ne concerne donc pratiquement jamais McDonald's, car les contrats à durée indéterminée sur un temps plein sont assez rares dans cette entreprise, comme vous l'avez vous-même indiqué, madame Beaudeau. Je suis en train de faire procéder à des recherches, mais je ne suis même pas sûr qu'un seul contrat jeunes en entreprise ait été signé chez McDonald's.
La vérité, c'est que ce contrat concerne essentiellement les petites et moyennes entreprises et profite aujourd'hui à 88 000 jeunes, des jeunes qui n'avaient aucune formation, qui se trouvaient en situation d'échec scolaire et ne pouvaient s'insérer dans le monde du travail. Ils bénéficient maintenant d'un contrat à durée indéterminée, c'est-à-dire d'un vrai travail, avec un vrai salaire. Il n'y a plus l'épée de Damoclès qui menaçait les titulaires d'emplois aidés dans les autres systèmes, où il s'agissait de dispositifs limités dans le temps.
Nous sommes extrêmement fiers d'avoir mis en oeuvre ces contrats jeunes, et je me réjouis, je le répète, qu'un scrutin public permette de montrer qui, dans ce pays, soutient réellement l'emploi des plus défavorisés. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1070.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin
n° 196
:
Nombre de votants | 318 |
Nombre de suffrages exprimés | 316 |
Pour | 111 |
Contre | 205 |
L'amendement n° 131, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article 4, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 322-4-6-1 du code du travail est complété par un 4° ainsi rédigé :
« 4° L'employeur s'engage à assurer au jeune l'acquisition d'une formation professionnelle initiale ou complémentaire entrant dans le champ d'application de l'article 8 de la loi n° 71-577 du 16 juillet 1971 d'orientation sur l'enseignement technologique ou une remise à niveau scolaire permettant l'accès ultérieur à une formation professionnelle dans le cadre d'une convention conclue avec un établissement d'enseignement public ou privé ou un organisme de formation public ou privé mentionné à l'article L. 920-4 et approuvée par l'autorité administrative. Ces actions de formation ou de remise à niveau scolaire sont au minimum de 1 200 heures réparties sur les deux premières années du contrat. »
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Cet amendement est important, puisqu'il traite des questions de l'acquisition, par les jeunes, d'une formation professionnelle initiale ou complémentaire.
La question de l'emploi de ces jeunes est, aussi étrange que cela puisse paraître au premier abord, au centre du débat sur l'avenir de notre régime de retraite par répartition. En effet, plus le nombre de jeunes privés d'emploi ou de jeunes ne disposant que de contrats de travail précaires est élevé, plus la source de financement de nos régimes de retraite est asphyxiée. Outre le fait que cette situation pose des problèmes sérieux aux jeunes pour se construire une vie digne de ce nom et de notre époque, elle finit par poser problème à la régularité des ressources de la protection sociale.
Dans notre pays, nous souffrons d'un chômage particulièrement important chez les moins de vingt-cinq ans, qui provient de deux facteurs essentiels : d'une part, les problèmes de formation et de qualification des jeunes ; d'autre part, la réticence de nombreux employeurs à embaucher des jeunes dans leur entreprise. J'en veux pour preuve, monsieur le ministre, la révolte de centaines de milliers de parents qui voient que les offres d'emploi dans la presse demandent une expérience minimale de trois ans. C'est tout à fait terrible.
M. François Fillon, ministre. C'est pour cela que j'ai créé les contrats-jeunes !
M. Roland Muzeau. Des mesures ont été prises depuis plus de vingt ans pour que les jeunes puissent être embauchés dans les entreprises.
Vous me permettrez, une fois encore, de regretter que vous vous soyez empressé de supprimer les emplois-jeunes. Vous venez d'indiquer que 88 000 contrats-jeunes ont été conclus. Or, 350 000 emplois-jeunes ont été supprimés. Vous n'y avez donc pas substitué le moindre dispositif efficace, ce qui a pour effet d'envoyer ces mêmes jeunes à l'ANPE.
Cela étant dit, le dispositif de l'article L. 322-4-6 du code du travail, qui est l'une des mesures incitatives en cette matière, souffre d'une légère insuffisance. C'est donc pour ces motifs que nous vous proposons, compte tenu du public auquel s'adresse ce dispositif, à savoir les jeunes sans qualification, de prévoir une obligation de formation pour les jeunes embauchés sous contrat, et que nous vous demandons d'adopter l'amendement n° 131 du groupe communiste républicain et citoyen.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Nous allons consacrer de nouveau quelques instants à cette question, car, monsieur Muzeau, vous nous avez dit que cet amendement est important.
Vous avez employé des mots assez forts : « Les aides publiques sans contrepartie ont fait la preuve depuis vingt ans de leur inefficacité. » Je suis donc tenté de vous demander pour quelles raisons vous déposez aujourd'hui l'amendement n° 131, alors que vous avez eu, au cours des dernières années, des possibilités beaucoup plus fortes et efficaces pour agir.
Mme Nicole Borvo. On l'a fait !
M. Jean-Luc Miraux. Cela vous gêne !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Cet amendement est important, mais nous avons déjà discuté de ce problème.
Et la réponse était à mon avis plus importante encore que la question. Lorsque nous avons examiné le cas de ces jeunes en échec scolaire, et que nous leur avons offert la chance de bénéficier d'un contrat à durée indéterminée, nous n'avons pas voulu les replacer dans une situation traditionnelle de formation qui aurait été de nature à les faire fuir ce nouvel emploi. Il était donc, préférable, à l'issue d'une phase d'adaptation, d'apprentissage de l'emploi, de la vie sociale et du monde du travail, de les encourager petit à petit à reprendre une formation, plutôt que de la leur imposer dès le début.
Nous ne sommes pas hostiles à la formation, mais elle doit être dispensée dans le cadre traditionnel de l'entreprise et ne pas être spécifique à ces jeunes qui a priori ne peuvent pas l'aborder sereinement, car ils sont en échec scolaire.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Je profite de l'occasion qui m'est donnée pour solliciter une rectification du compte rendu analytique, car je ne voudrais pas que M. Loridant me poursuive de sa vindicte dans quelques instants.
En effet, hier soir, tard, après que M. Loridant nous a exposé les conditions de départ à la retraite de son épouse, je me suis permis de dire qu'il serait dommage que Mme Loridant parte à la retraite, car elle est très jeune. Sans doute, ai-je été confus dans mon explication, car, dans le compte rendu, mon observation devient la suivante : « Il serait dommage que M. Loridant parte à la retraite, car sa femme est très jeune. » (Rires.)
M. Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis. La lecture du compte rendu analytique était réjouissante !
M. le président. Monsieur le ministre, acte nous est donné de votre rectification.
La parole est à M. Paul Dubrule, pour explication de vote sur l'amendement n° 131.
M. Paul Dubrule. Je suis abasourdi par tout ce que j'entends.
En l'occurrence, Arcade, c'est une entreprise de nettoyage. Il ne faut pas confondre !
J'entends dire que, plutôt que de réduire les charges sur les bas salaires, il serait préférable d'embaucher des fonctionnaires.
Mme Nicole Borvo. Des fonctionnaires ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Surtout pas !
M. Paul Dubrule. S'agissant de la formation, nous nous rejoignons tous, bien sûr, pour en reconnaître la nécessité. Je constate que, si les grandes entreprises privées consacrent aujourd'hui - vous vérifierez les statistiques, car je ne suis pas sûr qu'elles soient exactes, mais elles donnent un ordre de grandeur - près de 5 % de la masse salariale à la formation, la fonction publique, que vous aimez tant, y consacre au maximum 2,5 %. Vous avez l'impérialisme de la loi. (M. Roland Muzeau sourit.) En effet, vous voulez graver dans le marbre des textes qui imposerait la formation. Mais, dans le secteur privé, quand vous n'êtes pas obligés de le faire, vous le faites.
M. Roland Mazeau. Pas toujours !
M. Paul Dubrule. En revanche, dans la fonction publique, quand vous n'êtes pas obligés de le faire, vous ne le faites pas.
Mme Odette Terrade. Nous, si !
Mme Nicole Borvo. La fonction publique, ce n'est pas nous ! Adressez-vous au ministre !
M. Paul Dubrule. Alors, pourquoi vouloir embaucher des fonctionnaires ?
Il n'est pas sain ni honnête d'attaquer des entreprises comme McDonald's. En effet, cette entreprise fait des efforts considérables pour insérer des jeunes non qualifiés et essayer de leur donner une première formation.
Certes, les salaires versés ne sont pas très élevés, mais ces entreprises investissent dans la formation. La formation a un coût. Quand une entreprise dépense pour former des jeunes, pour leur donner une chance d'accéder à un métier, elle effectue un travail concret. Elle leur permet de gravir, marche après marche, ce que nous appelons l'escalier social.
Vous voulez vous donner bonne conscience en inscrivant dans une loi une obligation de formation. Vous pourrez vous en prévaloir auprès de vos électeurs. Mais ensuite, il ne se passera rien. Cela coûtera plus cher à l'Etat. Il n'y aura pas de résultats, mais vous êtes contents. Pour ma part, je ne suis pas content ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
Mme Nicole Borvo. Cela ne nous explique pas grand-chose !
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Monsieur le rapporteur, vous exagérez, ou alors vous avez subitement perdu la mémoire. Si nous affirmons que, depuis vingt ans, les aides publiques n'ont pas fait la preuve de leur efficacité, ce n'est pas parce que vous êtes arrivés au pouvoir !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Non !
M. Roland Muzeau. Ayez au moins l'honnêteté de reconnaître que, quand nous avons participé au gouvernement précédent, nous avons toujours gardé notre indépendance de langage et de proposition.
Ainsi, sur ces questions d'allégements de cotisations sociales, nous avions fait connaître notre position. Nous n'avons jamais été dans une UMP avant l'heure.
M. François Fillon, ministre. Vous avez été complices !
M. Roland Muzeau. Vous, vous êtes tous formatés, le petit doigt sur la couture du pantalon, pour n'avoir plus qu'un seul avis. (Mme Nelly Olin s'exclame.) C'est votre problème, même si, intellectuellement, c'est un peu court. Nous, quand nous étions en désaccord, nous le disions et quand nous étions d'accord, nous le disions aussi. C'est tout de même une très grande différence !
M. François Fillon, ministre. Vous étiez au gouver-nement !
M. Roland Muzeau. S'agissant de la gestion duconflit des intermittents du spectacle, la déclaration de M. Bayrou, parue dans la presse, doit probablement mettre le Gouvernement mal à l'aise. Cette déclaration de l'UDF me semble, sous nombre d'aspects, assez pertinente.
Donc, ne venez pas nous faire la leçon sur ce que nous n'aurions pas dit s'agissant des politiques d'exonérations de charges sociales. Nous nous sommes exprimés à plusieurs reprises. Nos déclarations sont gravées dans le marbre du Journal officiel.
Je reviens à l'intervention, fort intéressante, de M. Paul Dubrule. Je ne suis pas de ceux qui disent qu'il ne se passe rien en matière de formation professionnelle dans les entreprises. Ma collègue Mme Marie-Claude Beaudeau ne l'a jamais dit. Nous savons que certaines entreprises font plus de formation que d'autres. Je ne veux pas focaliser mon propos sur McDonald's, car le problème de la précarité va bien au-delà du secteur du commerce et de la distribution, il se pose également dans l'industrie. La précarité est partout.
M. Paul Dubrule a dit que les entreprises consacrent 5 % pour la formation. Je sais que cela existe. C'était le cas dans l'entreprise dans laquelle je travaillais. Mais il faut décliner cet effort budgétaire. En effet, 90 % du budget de formation s'adresse aux cadres supérieurs, le reste est éparpillé entre les agents de fabrication, les employés et les techniciens. Il faut aussi prendre en compte cet élément. (Mme Gisèle Printz opine.) Quand on entre ouvrier spécialisé dans une entreprise pour en sortir quarante ans après toujours ouvrier spécialisé, croyez-vous que la formation ait un sens ? Non, c'est l'adaptabilité payée sur les contingents de formation. Cela n'a rien à voir avec de la formation. N'y a-t-il pas un effort particulier à mener, notamment en ce qui concerne l'alphabétisation ?
Très sincèrement, vous nous faites un mauvais procès, monsieur le rapporteur, ou alors vous n'avez pas trèsbien saisi l'objet de notre intervention. (M. le rapporteur sourit.)
Mme Odette Terrade. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, pour explication de vote.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Depuis que nous examinons les amendements tendant à insérer des articles additionnels avant l'article 4, notre débat me paraît très intéressant.
En effet, nos collègues Paul Dubrule et Roland Muzeau ont abordé les conditions de travail d'un nombre important de jeunes, de femmes, de personnels non qualifiés, que l'on retrouve - c'est ainsi - dans la grande distribution, dans des entreprises de sous-traitance dont parlait M. Dubrule et qui, la plupart du temps, sont chargés de l'entretien des grands hôtels. Nous retrouvons aussi ces personnels dans les chaînes hôtelières et dans la restauration. A ce sujet, je rappelle que notre collègue Mme Demessine, lorsqu'elle était secrétaire d'Etat au tourisme, avait proposé un plan pour améliorer les conditions de travail des saisonniers, qui se met difficilement en place. Quelques efforts ont été faits en matière de logement, mais ce n'est pas suffisant.
Les exonérations de charges sociales qui existaient sous le gouvernement précédent et qui sont reprises aujourd'hui par le Gouvernement concernent toutes ces catégories de personnels. Notre collègue M. Dubrule parlait de formation. Des entreprises organisent en effet des formations, parce qu'elles ont besoin de personnels qualifiés pour fonctionner. Toutes les entreprises ne forment pas leur personnel, et je pense aux grandes chaînes de restauration et aux grandes entreprises de sous-traitance de nettoyage.
Mme Gisèle Printz. Tout à fait !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Elles connaissent un fort turn over. En effet, la rotation du personnel est liée aux exonérations de cotisations sociales. Vous ne pouvez pas le nier. D'ailleurs, toutes les statistiques le démontrent. Dans ces entreprises, les conditions de travail sont extrêmement dures.
Cette catégorie de personnels n'existait pas il y a dix ou quinze ans. C'est une nouvelle forme de personnel sans statut qui apparaît dans notre pays. Et les exonérations de charges sociales n'y sont pas pour rien. Il serait très intéressant que nous ayons un jour un débat, peut-être préparé par la commission des affaires sociales, sur les conditions de travail et la rémunération de ces personnels. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et sur plusieurs travées du groupe socialiste.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 131.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 135, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article 4, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 432-3-2 du code du travail, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. ... - Le comité d'entreprise peut s'opposer à toute décision du chef d'entreprise concernant les suppressions d'emploi, le recours aux formes précaires d'emploi, le recours à toute forme de sous-traitance, d'externalisation ou de cession des productions et services assurés par l'entreprise.
« La décision du comité d'entreprise doit reposer sur des motifs réels et sérieux, elle doit permettre la pérennité de l'entreprise, le développement de l'activité de l'entreprise, les mutations technologiques, l'adaptation à la conjoncture.
« Le chef d'entreprise peut contester la décision du comité d'entreprise devant le tribunal de grande instance qui statue dans le délai de trente jours. »
La parole est à M. Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Par cet amendement, les salariés doivent être associés à la gestion de l'entreprise, notamment sur les aspects qui touchent à l'emploi. Les règles actuelles qui limitent le rôle des élus à un simple avis, d'ailleurs rarement suivi, ne sont pas suffisamment efficaces et sont inadaptées aux besoins de notre époque.
Nous pensons aussi que l'élargissement des droits des salariés dans l'entreprise serait un vrai signe de modernité de notre économie. Bien des désastres économiques ou des gâchis préjudiciables à tous pourraient être évités si l'on écoutait davantage les salariés, au travers de leurs organisations syndicales, sur les choix de gestion, qui ne relèvent pas toujours de l'efficacité économique.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 135, qui est similaire à l'amendement n° 129, voire encore plus contraignant !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 135.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 138, présenté par Mmes Demessine, Beaufils et Beaudeau, M. Foucaud, Mme Mathon, MM. Le Cam et Biarnès, est ainsi libellé :
« Avant l'article 4, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Au septième alinéa de l'article L. 432-3 du code du travail, les mots : "donne son avis sur le plan de formation de l'entreprise dans les conditions prévues à l'article L. 933-3", sont remplacés par les mots : ", le plan de formation est soumis à son approbation préalable avant de pouvoir être mis en oeuvre". »
La parole est à M. Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Par cet amendement le plan de formation sera soumis à l'approbation préalable du comité d'entreprise et non plus pour avis.
En effet, la formation professionnelle fait partie des outils qui permettent de lutter contre le chômage en facilitant parfois la reconversion ou l'amélioration des compétences des salariés en vue de leur éviter de subir les processus d'exclusion que nous connaissons souvent à la suite des plans sociaux. Elle peut notamment être utilisée comme outil permettant d'éviter la mise en inactivité des salariés les plus âgés, ce qui correspond d'ailleurs, monsieur le ministre, aux objectifs de votre projet de loi portant réforme des retraites.
Dans ce cadre, le plan de formation négocié dans les entreprises peut constituer un outil pour atteindre ces objectifs de prévention des licenciements, de formation et d'optimisation des compétences.
Les entreprises n'ont, me semble-t-il, rien à craindre à soumettre à l'approbation du comité d'entreprise leur plan de formation, si j'en crois le débat que nous venons d'avoir. Au contraire, il ne peut, à cette occasion, que s'enrichir.
Pour toutes ces raisons, nous vous proposons d'adopter cet amendement, dont le fondement est de faire de l'avis du comité d'entreprise en matière de formation professionnelle un passage obligé pour en faciliter la mise en oeuvre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Une négociation a lieu actuellement entre les partenaires sociaux sur ce sujet. Faites-leur confiance !
La commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Défavorable.
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote.
M. Roland Muzeau. Je soutiens à fond cet amendement.
Il est précieux de faire partager ce type de préocccupation aux organisations de salariés au travers des comités d'entreprise. Dans les entreprises, les budgets de formation existent, mais leur utilisation est, pour le moins, assez étonnante. Par ailleurs, dans certaines d'entre elles, plus de 90 % du budget de formation est consacré à la hiérarchie. Il s'agit certes là de formations indispensables !
Il n'est pas normal de réduire le budget consacré à l'ensemble des personnels d'exécution, de fabrication ou aux employés administratifs à la portion congrue. Au bout du compte, une telle dichotomie ne peut engender des résultats appréciables.
Il faut prendre en compte cette dimension de la formation tout au long de la vie des salariés parce qu'elle est essentielle. Elle leur permet de se préparer à des reclassements professionnels, d'évoluer dans des carrières ou dans des métiers.
Si l'on ne prend pas en compte la problématique du partage de la décision, on continuera de tourner en rond et de constater, au travers de rapports multiples, que le système ne fonctionne pas et que, lors des plans d'épuration ou de fermeture complète de très nombreux salariés ont un mal de chien à retrouver un emploi.
Les exemples de Celatex et de Moulinex sont dramatiques. Un tiers seulement des salariés ont retrouvé un emploi, c'est terrible ! Il convient donc d'améliorer le dispositif.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 138.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 885, présenté par MM. Estier, Domeizel et Chabroux, Mme Printz, M. Krattinger, Mmes Campion et Blandin, M. Godefroy, Mmes San Vicente et Pourtaud, MM. Lagauche et Vantomme, Mme Herviaux, M. Frimat, Mme Cerisier-ben Guiga, M. Mano et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Avant l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« La négociation sur les conditions de liquidation des retraites doit porter notamment sur les conditions de mise en place d'un taux de remplacement au moins égal à 75 % du dernier revenu d'activité. »
La parole est à M. Gilbert Chabroux.
M. Gilbert Chabroux. Par cet amendement, nous voudrions que le taux de remplacement soit au moins égal à 75 % du dernier revenu d'activité. Il va en effet diminuer, puisqu'il ne serait plus, en moyenne, en 2040, que de 58 % pour un cadre et de 67 % pour un non-cadre, dégradation qui pose de très graves problèmes.
Je souhaiterais appeler votre attention sur le fait que le montant de la plupart des pensions ne dépasse pas 1 000 euros et est même souvent inférieur.
Nous avons déjà eu l'occasion de dire que votre réforme est particulièrement dure pour les salariés et pour les retraités, monsieur le ministre. Avec notamment l'allongement de la durée de cotisations, la décote, vous faites porter 91 % de l'effort sur les salariés. Il faudrait, me semble-t-il, faire preuve d'humanité et nous devrions pouvoir le faire ici.
Certains disent que les sénateurs, qui ne prennent jamais leur retraite, ne sont pas très bien placés pour légiférer sur les retraites !
M. Nicolas About, président de la commision des affaires sociales. Il faut la prendre !
M. Gilbert Chabroux. Je sais ce que j'ai à faire, monsieur About !
M. Jean-Pierre Schosteck. Et les autres ?
M. Gilbert Chabroux. Je parle là de retraite politique, qu'il ne faut pas confondre avec la retraite professionnelle !
Nous devrions faire preuve d'humanité, disais-je, et rendre ce projet de réforme plus supportable, plus humain.
Je lisais dans Le Monde ce titre : « Les députés s'emparent du thème de la rémunération des patrons ». Et si l'on pouvait lire ce titre : « Les sénateurs s'emparent du thème des pensions des plus modestes de nos concitoyens !»
M. Roland Muzeau. Très bien !
M. Gilbert Chabroux. Ce serait un choc, mais ce serait bien !
Je ne veux pas faire une comparaison mal placée, mais si nous considérons la rémunération des patrons dont l'entreprise est cotée au CAC 40, nous pouvons constater qu'elle est passée, en un an, de 1,8 million d'euros à 2,7 millions d'euros en moyenne, hors stock-options. Plus de la moitié de ces patrons ont vu leur rémunération croître alors que leurs entreprises ont enregisté des pertes qui se sont élevées à plus de 20 milliards d'euros.
Selon le président du MEDEF, Ernest-Antoine Seillière « les questions de rémunération sont l'affaire des actionnaires (Naturellement ! sur les travées de l'UMP), des conseils d'administration et des directions. Il n'appartient pas au pouvoir politique de statuer sur la rémunération des patrons ». (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Il y a tout de même eu des députés pour dire que ces rémunérations sont scandaleuses en période de tension sociale. Mais le président du comité d'éthique du MEDEF a répondu : « La question de la rémunération des patrons est un problème compliqué sur lequel il ne faut pas légiférer à tour de bras. » (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)
Mes chers collègues, bornons-nous à légiférer à tour de bras sur les retraites des plus modestes de nos concitoyens ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Monsieur Chabroux, je vous ai écouté avec attention. Vous venez de prendre des éléments forts des débats des jours derniers relatifs aux premiers articles de la loi.
Pour ma part, je m'en tiendrai à vos propositions : 75 % du dernier revenu d'activité.
Les uns et les autres, nous avons connaissance - nous en parlerons lors de l'examen de l'article suivant - des données du COR.
Dans la fonction publique, le dernier salaire est pris en compte. En revanche, dans le secteur privé, l'évolution des salaires étant souvent en cloche, nous proposons de prendre en compte les 25 dernières années.
Vous avez évoqué par ailleurs les plus basses pensions, et nous vous avons écouté avec attention. Comme vous le savez, nous en avons débattu lors de l'examen de l'article 4. Des propositions concrètes qui vont dans le sens que vous souhaitez, et même bien au-delà, sont inscrites dans le projet de loi.
Je ne puis donc qu'émettre un avis défavorable sur l'amendement n° 885.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. S'agissant de la question des très hautes rémunérations, je ne suis pas loin de penser comme M. Chabroux. Tous ceux qui donnent des conseils de modération salariale devraient se les appliquer à eux-mêmes. (M. Gilbert Chabroux approuve).
Mme Nicole Borvo. Ce n'est pas ce que vous avez dit hier !
M. François Fillon, ministre. Monsieur Chabroux, sur ce sujet, il faut regarder non seulement les patrons, mais aussi l'ensemble de ceux qui, aujourd'hui, dans notre pays, ont des rémunérations considérables. Je pense à certaines « icônes » des médias ou du monde du sport.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis. Très bien !
M. François Fillon, ministre. N'ayant jamais été sénateur...
M. Michel Sergent. Cela viendra !
M. François Fillon, ministre. ... je laisse à M. Chabroux la responsabilité de ses propos sur la retraite des sénateurs.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement car il serait tout à fait injuste. Vous avez, en effet, adopté un article qui, pour les plus bas revenus, fixe le taux de remplacement à 85 %.
Notre système de retraite a toujours été bâti sur des taux de remplacement plus élevés pour les bas salaires que pour les hauts salaires. Il n'est pas anormal qu'un cadre qui a un salaire élevé ait un taux de remplacement moins élevé qu'un salarié dont la rémunération est proche du SMIC.
Vouloir faire bénéficier tout le monde d'une pension égale à 75 % du montant du dernier revenu n'est pas conforme à l'esprit de notre régime de retraite par répartition. Ce n'est pas juste. De plus, cela irait contre les intérêts des salariés les plus modestes.
M. le président. La parole est à M. Paul Dubrule, pour explication de vote.
M. Paul Dubrule. Le salaire des patrons, dont il faut parler, relève de la compétence du conseil d'administration et des actionnaires. Cela étant, je reconnais qu'il est totalement inconvenant qu'un patron se voit octroyer des augmentations quand les bénéfices de sa société sont en baisse.
Mais, s'agissant des salariés les plus modestes, je pense qu'il faut leur donner avant tout la possibilité d'acquérir une compétence et un métier : c'est beaucoup plus important que la question du salaire. (Très bien et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que certaines travées du RDSE.)
Mme Nicole Borvo. Il y a un bon consensus à propos du salaire des patrons, monsieur le ministre ! Cela devrait produire des effets !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 885.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Articles additionnels après l'article 4 (priorité)
M. le président. L'amendement n° 39, présenté par M. Franchis, est ainsi libellé :
« Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 351-8 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le montant de la pension n'atteint pas, pour les bénéficiaires qui remplissent les conditions d'âge prévues au 1° , tous régimes confondus, le montant minimal garanti, en application de l'article 4 de la loi n° ... du ... portant réforme des retraites, sont prises en compte en tant que de besoin les cotisations de rachat fixées dans des conditions définies par décret qui auront été versées pour ouvrir droit à ce montant minimal.
La parole est à M. Serge Franchis.
M. Serge Franchis. L'objet de cet amendement s'inscrit dans l'esprit de justice sociale qui inspire votre projet de loi, monsieur le ministre, et dans la logique des termes de l'amendement n° 1094 rectifié de Mme Olin, tendant à rédiger l'article 2 du projet de loi : « Tout retraité a droit à une pension en rapport avec les revenus qu'il a tirés de son activité, améliorée le cas échéant au titre de mécanismes de solidarité. »
Le mécanisme prévu par l'amendement consiste à éviter autant que faire se peut que les salariés - et pas seulement ceux qui sont rémunérés au SMIC - qui ont été victimes de la situation de l'emploi ou d'autres aléas de l'existence, ne soient pas une seconde fois pénalisés, voire écartés du bénéfice du montant minimal de retraite.
Plusieurs dispositions du projet de loi prévoient que chaque assuré recevra communication de l'estimation du montant de la pension à laquelle il aura droit, le point étant fait, au plus tard, au mois de décembre de l'année qui précédera son cinquantième anniversaire. Cette information ne remplirait pas son objet si l'intéressé était placé dans l'impossibilité de réagir.
Il lui sera peut-être possible de prolonger de quelques années la durée de son activité professionnelle. Mais, dans la plupart des cas, cette faculté ne saurait suffire à compenser les annuités manquantes, tant certains salariés auront été privés d'emploi pendant de longues périodes.
Le présent amendement tend à autoriser le salarié concerné à utiliser tous autres moyens qu'il aurait capacité à réunir - des économies, l'aide de sa famille, le produit d'un héritage - pour procéder s'il le veut, et s'il le peut, au rachat de cotisations lui permettant ainsi la liquidation de sa retraite à hauteur du montant minimal égal à 87 % du SMIC, si l'on s'en tient aux termes de l'article 4.
Certes, dans cette hypothèse, la personne pourrait aussi recourir à une formule d'épargne retraite. Mais rares sont les foyers qui disposent de sommes suffisantes pour acquérir en quelques années, si le point se fait entre 55 et 60 ans, le bénéfice d'une rente viagère d'un montant significatif.
Je souhaiterais que tout puisse être mis en oeuvre pour que le montant minimal de retraite ait bien le caractère d'un seuil en dessous duquel on ne puisse descendre pour quelque raison que ce soit.
Voilà pourquoi je sollicite l'adoption de cet amendement n° 39.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Vos propos sont tout à fait pertinents, monsieur Franchis. Beaucoup de nos concitoyens n'imaginent pas, en effet, que la date choisie pour partir en retraite puisse avoir des répercussions sur le montant de leur pension.
Dans la fonction publique, le calcul est relativement facile : un certain nombre d'années multiplié par 2 % égale le montant de la pension. Mais même cette règle simple n'est pas connue de tous.
Quant aux travailleurs du secteur privé, ils ne savent pas forcément qu'existe déjà aujourd'hui un système de décote.
Une orientation du texte que nous examinons, l'une des grandeurs de notre projet, c'est de permettre à chacun de construire sa retraite avec une plus grande souplesse et une grande liberté de choix. C'est la raison pour laquelle l'article qui prévoit une meilleure information est particulièrement important.
Si chacun veut choisir, il faut qu'il sache quelles sont les conséquences, en fonction de la durée d'assurance, des systèmes de décote et de surcote qui sont tout à fait nouveaux, et de rachats.
La commission, consciente de la pertinence de vos propos, souhaite connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement partage le souci de M. Franchis. Je tiens à le rassurer : l'objectif visé par cet amendement est déjà atteint avec la rédaction actuelle du projet de loi.
En effet, l'article 18 du projet de loi qui constitue, je le rappelle, le dispositif d'application du principe posé à l'article 4 prend en compte son souci. Les années rachetées seront, au regard du minimum contributif réformé, traitées comme des périodes ayant donné lieu à cotisation à la charge de l'assuré. Elles ouvriront droit, comme les autres périodes cotisées, à une revalorisation significative de 9,3 % nette d'inflation, en quatre ans, de la pension minimale. Je rappelle que cette mesure permet, à elle seule, d'atteindre l'objectif de 85 % du SMIC à l'horizon 2008.
Par ailleurs, nous aurons l'occasion de revenir sur le droit à l'information, lors de l'examen de l'article 8 du projet de loi.
Il me semble que, sous le bénéfice de ces explications, M. Franchis pourrait retirer son amendement.
M. le président. L'amendement est-il maintenu, monsieur Franchis.
M. Serge Franchis. Ce que je souhaite éviter, monsieur le ministre, c'est que les personnes qui, au moment de la liquidation de leur retraite, seraient dans l'impossibilité d'obtenir le minimum de 85 % du montant du SMIC à l'horizon 2008, ne se trouvent pas rejetées dans la cohorte des exclus. Certes, me direz-vous, il y a des mécanismes d'aide sociale pour les plus défavorisés. Mais bénéficier de l'aide sociale constitue toujours une atteinte à la dignité de l'individu, alors que percevoir une retraite d'un montant suffisant pour répondre à ses besoins est ressenti comme un droit.
Mon souci, monsieur le ministre, est de veiller à ce que le seuil de 85 % du SMIC soit atteint dans toutes les situations. Une formule de rachat la plus large possible, non limitée, à quelques annuités, pourrait à mon sens résoudre le cas de ceux qui, au moment de la liquidation de leur retraite, disposeraient de moyens d'améliorer cette dernière.
J'ai connu un commerçant qui s'était retiré des affaires avec quelques économies avant la guerre de 1914. Il était toujours vivant après 1945, mais se trouvait alors dans la plus grande détresse. J'ai connu d'ailleurs de nombreux cas similaires de personnes qui, après avoir fait un effort d'épargne entre les deux guerres, se sont trouvées ensuite en fort mauvaise situation.
Je me résignerais bien à retirer mon amendement si le Gouvernement s'engageait à examiner la situation que j'ai évoquée dans les textes d'application.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre. Monsieur Franchis, le Gouvernement est naturellement très soucieux de trouver des solutions pour l'ensemble de nos concitoyens. Mais il est aussi très soucieux de maintenir le lien entre le travail et la retraite : on ne peut pas déconnecter complètement le montant des pensions de la durée de cotisation.
La question soulevée par votre amendement est résolue par le texte : le rachat des années pour obtenir 85 % du SMIC est possible.
Au demeurant, votre souhait de voir garanti 85 % du SMIC à tout le monde est excessif. Le Gouvernement ne peut satisfaire une telle demande, qui ferait peser sur nos régimes de retraite une charge considérable, que nous ne sommes pas en mesure d'assumer.
M. le président. Monsieur Franchis, que décidez-vous ?
M. Serge Franchis. Je fais confiance à M. le ministre et au Gouvernement pour qu'un effort soit accompli dans le sens que je souhaite. Il y va de la dignité de certains de nos concitoyens.
M. le président. L'amendement n° 39 est retiré.
L'amendement n° 1031, présenté par M. Gouteyron, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
« Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans un délai de cinq ans après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remettra au Parlement un rapport sur l'état d'avancement de l'application des dispositions de l'article 4, et notamment sur l'existence de négociations entre les partenaires sociaux chargés de la gestion des régimes complémentaires de retraite, en vue d'adapter le dispositif des retraites complémentaires de manière à assurer en 2008 à un salarié ayant travaillé à temps complet et disposant de la durée d'assurance nécessaire pour bénéficier du taux plein un montant total de pension, lors de la liquidation, au moins égal à 85 % du SMIC net lorsqu'il a cotisé pendant cette durée sur la base du salaire minimum de croissance. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à demander au Gouvernement de remettre un rapport. La commission des finances n'aime pas beaucoup les rapports ou, si elle les a aimés un jour, ce n'est plus le cas, car elle considère que c'est le rôle du Parlement de contrôler directement, par les voies et moyens qui sont les siens, l'application des lois.
Toutefois, nous avons souhaité marquer notre intérêt pour l'article 4, dont l'importance sociale est évident. Surtout, monsieur le ministre, nous savons que l'objectif de 85 % du salaire minimum de croissance ne peut être atteint qu'avec l'engagement des partenaires sociaux, qui gèrent les régimes complémentaires. (M. le ministre fait un signe de dénégation.)
Monsieur le ministre, j'aimerais être sûr que cet objectif sera atteint. Je me souviens qu'avant 1999 les taux de cotisation n'étaient pas identiques. Ils variaient entre 4 % et 6 %, me semble-t-il. Cela montre bien que les régimes complémentaires auront à s'engager pour atteindre l'objectif visé.
Monsieur le ministre, si vous me dites que cet objectif sera atteint et que nous aurons les moyens de contrôler de quelle façon il le sera, je retirerai l'amendement.
Je souhaite, quoi qu'il en soit, obtenir du Gouvernement des éclaircissements sur ce sujet. Telle est la mission que m'a confiée la commission des finances.
J'ai d'ailleurs noté que, dans son rapport, la commission des affaires sociales avait relevé que l'objectif ne pouvait être atteint que si les partenaires sociaux participaient à l'effort.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rappporteur. M. le rapporteur pour avis a demandé qu'un rapport soit remis dans un délai de cinq ans après la promulgation de la loi. Pourquoi pas à mi-parcours, monsieur Gouteyron ?
Nous partageons votre préoccupation, mon cher collègue, et nous avons examiné votre amendement avec bienveillance, mais, avant de me prononcer, je souhaiterais connaître l'avis du Gouvernement sur votre proposition.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Je répète que l'objectif de 85 % du SMIC sera atteint sans effort supplémentaire des régimes complémentaires.
En effet, l'accord que nous avons passé avec les partenaires sociaux, le 15 mai dernier, prévoit trois revalorisations, de 3 % chacune du minimum contributif, devant intervenir respectivement au 1er janvier 2004, au 1er janvier 2006 et au 1er janvier 2008. Cette revalorisation ne dépend donc que du régime général et cet effort est suffisant pour atteindre, en 2008, l'obectif de 85 % du SMIC net pour un salarié ayant travaillé à temps complet à ce niveau de rémunération pendant quarante ans, contre 81 % aujourd'hui. Aucun effort supplémentaire n'est demandé à l'AGIRC ou à l'ARRCO.
La seule question qu'on peut se poser est celle de savoir si l'AGIRC et l'ARRCO ne risquent pas de baisser le taux de remplacement. Naturellement, sur ce point, le législateur ne peut pas se substituer aux partenaires sociaux ; il ne peut pas leur dicter leur conduite. Je voudrais toutefois vous livrer trois informations qui devraient être de nature à vous rassurer.
D'abord, les partenaires sociaux qui gèrent l'AGIRC et l'ARRCO sont justement ceux qui ont soutenu l'accord du 15 mai dernier. Je les considère donc - je le leur ai dit à plusieurs reprises - comme engagés par cet accord.
Ensuite, le projet de loi prévoit que le Parlement sera informé en 2008, à travers le rapport qui est prévu à l'article 5, des principales données relatives au régime obligatoire, au nombre desquelles figure, évidemment, le montant des pensions minimales.
Enfin, il est tout à fait dans le rôle du COR, tel que le prévoit l'article 6 du projet de loi, de suivre les indications relatives à l'évolution des régimes de retraite et à l'évolution du taux de remplacement.
L'article consacré au Conseil d'orientation des retraites, dans son alinéa 5, prévoit que celui-ci doit : « suivre la mise en oeuvre des principes communs aux régimes de retraite et l'évolution des niveaux de vie des actifs et des retraités ainsi que l'ensemble des indicateurs des régimes de retraite, dont les taux de remplacement. »
Bref, monsieur le sénateur, votre préoccupation, qui est parfaitement légitime, étant satisfaite par les dispositions du projet de loi, comme par l'accord du 15 mai dernier, je crois que toutes les conditions sont réunies pour que vous retiriez votre amendement.
M. le président. Monsieur Gouteyron, l'amendement n° 1031 est-il maintenu ?
M. Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 1031 est retiré.
L'amendement n° 33 rectifié, présenté par M. Mercier et les membres du groupe de l'Union centriste et M. Mouly, est ainsi libellé :
« Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Avant le 31 décembre 2004, le Gouvernement déposera sur le bureau de l'Assemblée nationale et sur celui du Sénat un rapport prévoyant l'harmonisation des régimes de retraite des enseignants du secteur privé et du secteur public. »
La parole est à M. Jean Boyer.
M. Jean Boyer. Cet amendement a pour objet de prévoir l'harmonisation des régimes de retraite des enseignants du secteur privé et du secteur public.
L'équité est un des axes les plus importants de la présente réforme de notre système de retraite. Cette équité doit être déclinée le plus possible. Il est, par exemple, particulièrement choquant que les enseignants des écoles privées sous contrat, qui exercent le même métier que leurs homologues du public, se trouvent, face à la retraite dans une situation bien plus défavorable.
Le présent amendement vise à rétablir dans ce système une dose d'équité.
Pour ce faire, son ambition n'est pas grande. Il n'est question que de tirer toutes les conclusions qu'impose la loi Guermeur de 1977.
En vertu de cette loi, les enseignants salariés du privé peuvent partir à la retraite dans les mêmes conditions que leurs homologues du public. Ainsi, depuis cette date, ils bénéficient de la possibilité de prendre leur retraite à 55 ans. De 55 à 60 ans, l'Etat prend en charge le versement de leur pension. A 60 ans, le régime dont ils sont ressortissants prend le relais.
Cependant, cet aligement implique que les conditions menant à la retraite à 55 ans soient en tous points les mêmes.
Or il continue d'exister un décalage, que l'on peut qualifier d'incroyable entre le niveau des cotisations acquittées par un enseignant fonctionnaire sur son traitement et celui des cotisations acquittées par un enseignant du privé sur son salaire. Tandis que, dans le privé, le taux de cotisation des enseignants atteint presque 13 %, il s'élève à 7,85 % dans le public. A l'échelle d'une carrière, la différence représente en moyenne 60 000 euros.
Tandis que l'enseignant du public se constitue des droits à la retraite et dispose d'une économie, l'enseignant du privé ne fait que se constituer des droits à la retraite qui, en tout état de cause, seront inférieurs à ceux de son homologue du public.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Mon cher collègue, la commission a bien entendu votre appel, mais on ne peut pas prévoir un rapport visant à une harmonisation ; un tel rapport ne peut être relatif qu'à un bilan.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. M. Boyer met l'accent sur un sujet difficile, que je connais bien en tant qu'élu de l'ouest de la France. (Murmures sur les travées du groupe CRC.)
M. Jean-Pierre Masseret. La laïcité !
M. François Fillon, ministre. A quoi riment ces remarques ?
Le problème que vous posez, monsieur Boyer, est un problème difficile, on ne peut le résoudre de la manière que vous suggérez.
En effet, les taux de cotisations des enseignants du privé sont ceux du secteur privé, ces enseignants étant des salariés de droit privé. Leurs taux de cotisations sont donc supérieurs à ceux du secteur public, alors même qu'il y a bien parité de rémunération brute. Les règles relatives à la constitution des droits à pension ne sont pas non plus les mêmes et des différences significatives subsisteront après le vote de la loi, même si la convergence des principes essentiels est désormais acquise.
En pratique, s'il fallait assurer la neutralité pour les rémunérations nettes, il faudrait que l'Etat assume, pour le compte des enseignants du privé, la prise en charge d'une partie des cotisations salariales, de l'ordre de 270 millions d'euros par an.
Au-delà du problème budgétaire - qui est loin d'être négligeable - d'autres questions de principe se poseraient. En effet, à ce jour, l'Etat n'a jamais accepté de prendre en charge des cotisations salariales et, s'il le faisait pour les enseignants du privé, il devrait naturellement le faire pour d'autres professionnels ayant des homologues dans le secteur public.
Au demeurant, les enseignants du secteur privé ne réclament pas de devenir fonctionnaires, et je ne sache pas que les fonctionnaires souhaitent dépendre du régime général. Par conséquent, même après la réforme que nous proposons, il existera toujours des différences entre les régimes, et notamment une dualité dans le système éducatif.
Ce n'est pas dire pour autant que le Gouvernement ne souhaite pas, dans une concertation élargie avec l'éducation nationale, rechercher les moyens de rapprocher les statuts. En tout cas, nous ne pouvons pas le faire aujourd'hui dans le cadre de cette réforme.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis. Cet amendement pose un problème extrêmement important, dont M. le ministre nous a rappelé les données. Ce problème découle du statut particulier de ces enseignants qui, tout en étant des salariés de droit privé remplissent une mission de service public, en l'espèce le service public de l'éducation.
L'article 15 que la loi Germeur a ajouté à la loi Debré de 1959 fixe les règles générales qui déterminent les conditions de service et de cessation d'activité des maîtres titulaires de l'enseignement public, étant entendu que ces règles sont également applicables aux maîtres exerçant des fonctions de même niveau dans les établissements privés liés à l'Etat par contrat.
Or, ainsi que l'a dit Jean Boyer, les enseignants du privé constatent des écarts très importants entre le sort qui leur est fait et celui que connaissent les enseignants du public.
Monsieur le ministre, vous avez dit que le Gouvernement allait s'atteler à ce délicat problème et étudier les moyens qui permettraient d'assurer le respect du principe d'égalité de traitement posé par les lois précitées. Je m'en félicite. Mais il faut que ce soit là un véritable engagement de votre part ; les enseignants du privé ne comprendraient pas qu'il en soit autrement.
Cela étant précisé, je crois que le temps où l'on opposait le privé et le public est révolu. Aujourd'hui, on voit bien les deux types d'établissements, ils ne sont plus en concurrence l'un par rapport à l'autre : il s'agit bien plutôt d'une situation d'émulation réciproque, au bénéfice des familles, qui peuvent ainsi faire un choix. C'est dans cet esprit qu'il convient, me semble-t-il, d'aborder le problème ici posé.
Bien sûr, celui-ci est trop complexe pour que nous puissions espérer le résoudre dans le cadre du présent texte, mais au moins savons-nous désormais que le Gouvernement est décidé à le traiter.
M. le président. Monsieur Boyer, avant de vous interroger sur le sort que vous entendez réserver à votre amendement, je vais donner la parole à ceux qui me l'ont déjà demandée pour explication de vote, de manière que les différents points de vue puissent s'exprimer.
La parole est donc à M. Domeizel, pour explication de vote sur l'amendement n° 33 rectifié.
M. Claude Domeizel. En vérité, je suis un peu surpris que cette question, qui est tout à fait réelle, ne soit soulevée qu'au sujet des enseignants. On pourrait évoquer aussi, par exemple, le cas des infirmières : celles qui travaillent dans le public n'ont pas - j'anticipe là sur le débat que nous aurons lorsque nous aborderons les articles 24 et suivants - les mêmes retraites que celles qui travaillent dans le privé. L'infirmière libérale qui vient traiter les patients à domicile n'aura pas la même retraite que l'infirmière d'hôpital.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis. Ce n'est pas du tout la même situation !
M. Claude Domeizel. Mais si !
En fait, dans vos discours, vous essayez d'opposer le public et le privé. Vous essayez d'opposer les syndicats.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis. Absolument pas !
M. Jean Chérioux. Vous avez cent ans de retard, monsieur Domeizel !
M. Claude Domeizel. Vous essayez même de diviser l'opposition.
Et puis voilà que, tout à coup, vous voulez rapprocher le public et le privé ! C'est tout de même assez surprenant. Je serais très heureux que nous ayons ce débat.
Les fonctionnaires ont peut-être des avantages, mais ils ont aussi de nombreuses obligations. Ils ont, en particulier, l'obligation de se dévouer totalement à la fonction publique à partir du jour où ils y entrent. Ils n'ont pas le droit de cumuler des emplois.
Quoi qu'il en soit, pourquoi aborder ce problème uniquement à propos des enseignants ? Je suis moi-même un enseignant retraité de l'éducation nationale et j'ai toujours eu beaucoup de respect pour mes collègues de l'enseignement privé, tout simplement parce qu'ils exercent le même métier que celui qui a été le mien. Mais le problème n'est pas là.
En tout cas, on ne peut pas traiter par le biais d'un simple amendement ce problème très complexe.
M. le président. La parole est à à Mme Nicole Borvo, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo. Il est effectivement assez curieux qu'on se préoccupe soudainement d'harmoniser de cette façon le privé et le public, après avoir opposé l'un à l'autre.
Jusqu'à présent, s'agissant des retraites, vous vous êtes acharnés à aligner le public sur le privé. Et voilà que maintenant vous proposer d'aligner le privé sur le public ! Je vous laisse la responsabilité de vos contradictions !
Cela étant, je suis plutôt d'accord, en l'occurrence, avec M. le ministre. Allez-vous, dans la foulée de cet amendement, nous proposer l'unification du service de l'éducation ? Allez-vous nous proposer de considérer que les établissements sous contrat doivent être intégrés au service public national de l'éducation ? Allez-vous nous proposer de fonctionnariser les enseignants du privé ?
On nous reproche en permanence de vouloir fonctionnariser tout le monde, mais, là, vous êtes en pleine contradiction !
Mme Nelly Olin. Vous allez peut-être un peu loin !
Mme Nicole Borvo. Il s'agit donc d'un débat qui dépasse de loin le cadre de la discussion d'un simple amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean Chérioux, pour explication de vote.
M. Jean Chérioux. Il n'est évidemment pas possible de régler ce problème aujourd'hui, vous avez raison, monsieur le ministre, et vous aussi, madame Borvo.
Mme Nicole Borvo. Merci !
M. Jean Chérioux. Il reste que nos collègues ont proféré quelques inexactitudes. Il n'est pas question de fonctionnariser les professeurs et les maîtres d'enseignement libre... ou plutôt de l'enseignement privé.
Mme Nicole Borvo. Lapsus révélateur !
M. Jean Chérioux. Il y a un régime qui est ce qu'il est, il doit rester ce qu'il est !
Cependant, à l'occasion d'un débat où, en permanence, a été mise en avant la notion d'équité, il n'était pas anormal que notre collègue Jean Boyer soulève un tel problème.
Mme Nicole Borvo. Vous l'avez renversée, l'équité !
M. Jean Chérioux. Je veux par ailleurs répondre à notre collègue Domeizel que le problème des infirmières n'a rien à voir avec celui des enseignants.
M. Claude Domeizel. Si !
M. Jean Chérioux. Non, parce que l'enseignement privé a un statut spécifique qui est défini par la loi et aux termes duquel les rémunérations sont à la charge de l'Etat. Les deux situations ne sont donc pas comparables.
Il est évident que nous ne pouvons pas régler aujourd'hui ce problème d'équité, mais M. le ministre a clairement indiqué qu'il serait examiné par le Gouvernement. (M. le rapporteur applaudit.)
M. le président. Ceux qui souhaitaient s'exprimer l'ayant fait, je peux maintenant vous interroger monsieur Boyer : l'amendement n° 33 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean Boyer. Je suis un peu navré que cet amendement réveille des polémiques passées, et du reste bien inutiles.
Mme Nicole Borvo. Et pour cause !
M. Jean Boyer. Cet amendement visait simplement à présenter un état des lieux. Adrien Gouteyron, qui est, d'une manière générale, un spécialiste des questions d'enseignement, connaît d'autant mieux ce problème particulier que l'enseignement privé tient une place importante dans le département dont nous sommes tous deux les élus et où nous avons vécu des affrontements tout à fait stériles, l'essentiel étant d'apporter à la jeunesse d'aujourd'hui l'épanouissement nécessaire pour qu'elle puisse demain travailler et prospérer.
Compte tenu des éléments que vous avez apportés, monsieur le ministre, je retire l'amendement n° 33 rectifié.
M. le président. L'amendement n° 33 rectifié est retiré.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Conformément à la feuille de route que nous avons établie, je demande la réserve des amendements n°s 152, 889, 198, 899, 293, 294, 199, 295 rectifié, 900 et 901, qui tendent à insérer des articles additionnels avant l'article 5, après l'article 5 ou avant l'article 6, jusqu'après l'examen de l'article 13 bis, de telle manière que nous puissions examiner l'article 6 dès la reprise de la séance.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de réserve ?
M. François Fillon, ministre. Favorable.
M. le président. La réserve est ordonnée.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures quinze.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures dix, est reprise à quinze heures quinze, sous la présidence de M. Bernard Angels.)
PRÉSIDENCE DE M. BERNARD ANGELS
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
RAPPELS AU RÈGLEMENT
M. le président. La parole est à M. Jack Ralite.
M. Jack Ralite. Monsieur le ministre, je vous ai interpellé mardi dernier au sujet des intermittents du spectacle. Je renouvelle aujourd'hui mon propos, renforcé dans ma démarche par d'importants débats auxquels, depuis, j'ai pris part. Ainsi hier, j'ai participé à Avignon, pendant deux heures et demie, à une émission sur France Culture avec une trentaine d'artistes et de techniciens et, ce matin, j'étais au Forum des images de Paris, avec deux cents techniciens et artistes. Dans les deux cas, par-delà la douleur d'avoir dû en certains lieux arrêter le spectacle, un calme, une unité, une détermination se sont manifestés, syndicat CGT et Coordination des intermittents mêlés.
Au passage, je ne pense pas qu'il soit bon pour le ministre de la culture d'attaquer le syndicat CGT, qui est, il le sait bien, son principal interlocuteur au cours des négociations.
M. Jean-Pierre Schosteck. Ce n'est pas sûr !
M. Jack Ralite. Pour toutes ces femmes et hommes, jeunes et moins jeunes, le texte du 26 juin, modifié mardi, ne résiste pas à l'examen. Il a été, dans ces deux débats, épluché calmement mais avec précision. Les termes de l'accord disparaissaient au fur et à mesure, d'autant que les abus sont toujours là.
Monsieur le ministre, vous abordez d'ailleurs cette question dans une interview parue aujourd'hui dans Le Monde. Mais je ne comprends pas bien. Supprimez les abus que vous constatez et que vous dénoncez comme nous. Ensuite, un examen plus réaliste pourrait être fait. Monsieur le ministre, pourquoi toucher aux droits avant de toucher aux abus ? On comprend que ce soit la position du MEDEF, mais comment peut-elle être la vôtre ? Ce n'est pas compréhensible !
Je suis sûr que vous vous félicitez, comme moi, de l'unanimité sauvegardée en Europe et qui s'est exprimée hier à Bruxelles, encore qu'il faille être vigilant sur la rédaction proposée.
M. Jean Chérioux. Grâce à qui ?
M. Jack Ralite. Mais l'exception culturelle vise précisément à ce que la culture et l'art ne soient pas considérés comme une charge pour la société.
Jean Vilar parlait d'un « mariage cruel entre pouvoir et artistes ». Mais précisément, il appelait à ne pas céder ! Et un autre fondateur du festival d'Avignon, René Char, disait : « La réalité pour être franchie doit être soulevée. » C'est ce que font les artistes et les techniciens !
Le Président de la République, Jacques Chirac, avait annoncé sa candidature précisément en Avignon et, depuis, il a beaucoup dit en faveur de la culture. Mais je crois que, tout de suite, vous-même, monsieur le ministre, avant le 14 Juillet où, comme nous l'attendons, le Président de la République passera éventuellement aux actes, vous devriez entendre concrètement les intermittents. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. Monsieur Ralite, je vous donne acte de votre rappel au règlement.
La parole est à M. Claude Domeizel, pour un rappel au règlement.
M. Claude Domeizel. Monsieur le président, mon rappel au règlement a trait aux méthodes de travail retenues pour l'examen de ce projet de loi.
Hier, il a été décidé de reporter à plus tard l'examen des amendements portant articles additionnels avant l'article 5 pour discuter en priorité de l'article 5. Aujourd'hui, on décide d'examiner par priorité les amendements portant articles additionnels avant et après l'article 4. Puis, juste avant la suspension, au moment où j'allais vous présenter un amendement portant article additionnel avant l'article 5, il a été décidé que l'article 6 serait examiné en priorité à la reprise de l'après-midi. Nous sommes dans une situation totalement absurde !
M. Jean Chérioux. Vous vous y êtes mis vous-même ! C'est l'arroseur arrosé !
M. Claude Domeizel. Mais non, ce n'est pas l'arroseur arrosé !
Lorsque nous présentons un amendement, monsieur le président de la commission des affaires sociales, par exemple avant l'article 5, c'est parce que nous voulons exposer les principes généraux qui sous-tendent les dispositions contenues dans l'article.
M. Jean Chérioux. C'est votre problème !
M. Claude Domeizel. Cela nous permet de préparer la discussion de l'article 5. Monsieur le président de la commission,... (M. le président de la commission des affaires sociales s'entretient avec M. le rapporteur pour avis) il n'écoute pas mais cela ne fait rien...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Mais si, je vous écoute !
M. Claude Domeizel. C'est comme cela qu'on en vient à ne plus se comprendre ! Quand vous êtes interpellé, vous n'écoutez pas !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Mais bien sûr que si ! Je vous écoute, mot à mot !
M. Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Nous étions justement en train de commenter vos propos !
M. Claude Domeizel. Monsieur About, lorsque l'on dépose des amendements portant articles additionnels avant ou après tel article, ce n'est pas neutre. Si nous avons déposé un amendement portant article additionnel avant l'article 5, c'est parce que nous voulions mettre en lumière les points les plus importants avant d'aborder l'examen de l'article 5.
M. Jean-Pierre Schosteck. C'est votre problème !
M. Claude Domeizel. Mais non, ce n'est pas mon problème ! Monsieur About, écoutez-moi bien : nous laisser défendre, comme nous l'avons demandé, cet amendement portant article additionnel avant l'article 5 peut permettre d'alléger la discussion de l'article 5 !
M. Jean-Pierre Schosteck. Chiche !
M. Jean Chérioux. C'est du chantage !
M. Claude Domeizel. Cela aurait pu éventuellement nous inciter à retirer certains amendements.
On a débattu durant toute la journée d'hier de l'article 5 : je vais donc être obligé de maintenir cet amendement, alors que, si l'on avait suivi l'ordre prévu pour cette discussion, on aurait pu progresser beaucoup plus rapidement, et c'est d'ailleurs, me semble-t-il, ce que vous souhaitez, sans amputer en quoi que ce soit le débat. Je souhaiterais que, désormais, l'on s'en tienne, pour le déroulement de nos travaux, à l'ordre initialement prévu.
M. Jean Chérioux. C'est le service de la séance qui décide, ce n'est pas vous !
M. Claude Domeizel. Cela ne pourra que faciliter nos travaux en permettant une meilleure compréhension.
Mme Nelly Olin. J'en doute !
M. le président. Monsieur Domeizel, je vous donne acte de votre rappel au règlement. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Monsieur Domeizel, soyons raisonnables. A chaque fois, depuis le début de l'examen de ce texte sur les retraites, que le rapporteur a exprimé son avis sur les amendements portant articles additionnels, il a été obligé de reconnaître que ceux-ci n'avaient rien à voir avec les articles dont nous débattions. Vous affirmez tout d'un coup que les amendements à venir ont un lien certain avec les articles avant lesquels ils sont placés.
M. Claude Domeizel. Mais bien sûr !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Si vous avez effectivement changé de logique, on étudiera cela. En tout cas, il n'est pas question, en cet instant, de modifier la priorité qui a été demandée ce matin. (Très bien ! et applaudissements sur certaines travées de l'UMP.)
M. Claude Domeizel. C'est fort regrettable. Je ne comprends pas cet entêtement !
M. Jean Chérioux. Nous ne comprenons pas le vôtre !
RÉFORME DES RETRAITES
Suite de la discussion
d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant réforme des retraites.
Dans la discussion des articles, le Sénat en est parvenu à l'article 6, qui a fait l'objet d'une demande de priorité.
M. le président. « Art. 6. - I. - L'article L. 114-1-1 du code de la sécurité sociale devient l'article L. 114-3.
« II. - Le chapitre IV du titre Ier du livre Ier du même code est complété par une section 4 ainsi rédigée :
« Section 4
« Conseil d'orientation des retraites »
« Art. L. 114-2. - Le Conseil d'orientation des retraites a pour missions :
« 1° De décrire les évolutions et les perpectives à moyen et long terme des différents régimes de retraite, compte tenu des évolutions économiques, sociales et démographiques et d'élaborer, au moins tous les cinq ans, des projections de leur situation financière ;
« 2° D'apprécier les conditions requises pour assurer la viabilité financière à terme de ces régimes ;
« 3° De mener une réflexion sur le financement des régimes de retraite et de suivre son évolution ;
« 3° bis (nouveau) D'étudier les possibilités d'évolution de l'assiette des cotisations ;
« 4° De participer à l'information sur le système de retraite et les effets des réformes conduites pour garantir son financement ;
« 5° De suivre la mise en oeuvre des principes communs aux régimes de retraite et l'évolution des niveaux de vie des actifs et des retraités, ainsi que de l'ensemble des indicateurs des régimes de retraite, dont les taux de remplacement.
« Le conseil formule toutes recommandations ou propositions de réforme qui lui paraissent de nature à répondre aux objectifs précédemment définis.
« Le Conseil d'orientation des retraites est composé, outre son président nommé en Conseil des ministres, notamment de représentants des assemblées parlementaires, des organisations professionnelles, syndicales, familiales et sociales les plus représentatives et des départements ministériels intéressés, ainsi que de personnalités qualifiées.
« Les administrations de l'Etat, les établissements publics de l'Etat et les organismes chargés de la gestion d'un régime de retraite légalement obligatoire ou du régime d'assurance chômage sont tenus de communiquer au Conseil d'orientation des retraites les éléments d'information et les études dont ils disposent et qui sont nécessaires au conseil pour l'exercice de ses missions. Le conseil fait connaître ses besoins afin qu'ils soient pris en compte dans les programmes de travaux statistiques et d'études de ces administrations et établissements.
« Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret. »
La parole est à M. Guy Fischer, sur l'article.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous abordons, avec l'article 6, le Conseil d'orientation des retraites, autrement dit le COR.
Créé initialement par un décret du 10 mai 2000, le COR se trouve consacré par son inscription dans la loi.
Nous nous félicitons évidemment que les dispositions relatives au COR, qui figuraient dans le décret précité, soient élevées au rang législatif. Chacun reconnaît, en effet, la qualité des travaux du COR ainsi que la légitimité et l'efficacité de cette instance.
Toutefois, nous estimons que certaines critiques peuvent lui être adressées, de même qu'il peut encore faire l'objet d'améliorations sur lesquelles mon groupe reviendra plus en détail lors de l'examen de nos amendements.
Je regrette vivement que la composition du COR soit renvoyée à un décret.
Je rappelle qu'actuellement les groupes parlementaires du Sénat et de l'Assemblée nationale ne sont pas tous représentés dans cette instance.
Malgré le débat qui s'est déroulé à l'Assemblée nationale et l'engagement pris par le Gouvernement et le rapporteur devant la représentation nationale concernant la garantie du pluralisme au sein du COR, nous estimons qu'il est indispensable d'en inscrire clairement le principe dans la loi.
Il a été indiqué, à cet égard, que le décret prévoirait quatre membres pour chaque assemblée au lieu de trois actuellement. Dont acte ! Mais pourquoi donc ne pas l'écrire noir sur blanc dans la loi ? Nous connaissons tous ici, en effet, les délais dans lesquels sont pris les décrets, quand ils sont effectivement pris...
Par ailleurs, les modifications apportées par la commission des affaires sociales du Sénat ne sont pas pour nous rassurer en ce qui concerne les missions du COR.
Si la commission admet la nécessité de légaliser, par exemple, la mission d'information du COR, en revanche, elle s'empresse aussitôt de préciser que cette mission n'épuise pas la compétence générale que détient le ministre en charge de la sécurité sociale mais qu'elle s'exerce en toute indépendance. Est-ce à dire que le ministre concerné ne serait finalement pas lié par les réflexions du COR ? C'est une autre interrogation.
D'autre part, la commission limite par amendement le champ de compétence de cette instance aux régimes de retraites légalement obligatoires.
Cet article, dans sa rédaction initiale, me faisait déjà craindre que les missions du Conseil ne soient limitées et que cet instrument essentiel ne soit par conséquent privé de son rôle fondamental pour imaginer des alternatives concernant la retraite.
Nous sommes au contraire plutôt favorables à l'élargissement du nombre et du contenu de ses missions. En effet, si le COR a su jouer un tel rôle, c'est à n'en pas douter parce qu'il s'agit d'une instance vraiment pluraliste, associant des parlementaires, des représentants des associations familiales, des retraités et des personnes âgées, des experts et des représentants de l'Etat.
Mais, pour que le COR fonctionne mieux, plus, il convient de lui affecter des moyens matériels, humains et financiers en conséquence. Or, apparemment, les moyens sont quasiment constants.
Par ailleurs, nous nous interrogeons sur un autre point : le COR ne fera-t-il pas double emploi avec la Commission de garantie des pensions ? Je ne le pense pas, mais il peut y avoir un débat sur ce point.
En effet, dans le rapport de la commission des affaires sociales, il est précisé que le rôle de la Commission de garantie « est d'intervenir dans la procédure d'allongement de la durée de cotisation sous la forme d'un avis public, parallèle à celui qui est formulé par le COR ».
Je souhaite, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, que des précisions nous soient apportées sur les questions que je viens brièvement de soulever.
M. le président. La parole est à M. Gilbert Chabroux, sur l'article.
M. Gilbert Chabroux. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'ai indiqué dans la discussion générale que vous disposiez au départ d'atouts importants pour mener à bien une réforme des retraites. Le Conseil d'orientation des retraites, créé par le gouvernement précédent, faisait partie des atouts. Nous nous réjouissons de voir que son rôle est reconnu, inscrit dans la loi.
Je rappelle que le COR a effectué un remarquable travail préparatoire. Au départ, pourtant, le climat était particulièrement tendu. Nous nous souvenons du traumatisme causé par le plan Jupé de 1995 qui avait mis des millions de personnes dans la rue. Vous aviez eu le temps de tirer les leçons de cet échec cinglant. Il convenait, après 1995, de rasséréner le climat. Il a fallu quelques années pour y parvenir. Le COR a parfaitement tenu sa place, il a déminé le dossier et établi un diagnostic partagé par la plupart des acteurs concernés. Seul le MEDEF n'a pas participé à ses travaux.
L'opinion, en partie grâce aux travaux du COR, a bien compris qu'une réforme des retraites était inéluctable. Elle s'y préparait et les sept principales organisations syndicales, dans leur déclaration commune du 6 janvier 2003, affirmaient la nécessité d'une réforme et définissaient les priorités devant y figurer.
Vous aviez une opportunité exceptionnelle de mettre en pratique le dialogue social, la négociation collective ; vous aviez aussi une responsabilité particulière, si l'on se réfère, comme le fait volontiers M. le Premier ministre, à l'esprit de mai.
Nous savons ce qu'il en est résulté, à travers la réforme que vous présentez. A cet égard, je m'élève avec force contre votre tentative de récupération des travaux du COR en laissant croire qu'il cautionne le choix politique de l'allongement de la durée de cotisation ; ce n'est pas convenable.
Le COR n'a pas fait de choix politique. Il a fait un diagnostic, il a examiné plusieurs hypothèses. Le choix politique, c'est celui du Gouvernement et, pour ma part, je ne comprends pas que l'on puisse présenter votre réforme comme étant celle du COR.
Le Premier ministre, dans sa propagande aux Français, en a abusé. Il a caricaturé à des fins purement politiciennes et démagogiques les conclusions du COR, dans une démarche qui n'a pas été très respectueuse des principes élémentaires de la démocratie. Vous aurez dépensé 20 millions d'euros pour cette incroyable campagne de propagande sur un simple projet que nous n'avions pas encore voté. Nous n'avions jamais vu cela dans notre pays !
En outre, il est regrettable, je le répète, que le MEDEF ait toujours refusé de siéger au COR. Qu'avait-il à craindre ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Il a accepté de venir !
M. Gilbert Chabroux. C'est un scoop ! Nous sommes très heureux d'entendre cette information.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Cela figurait dans la presse hier !
Mme Michelle Demessine. Le MEDEF peut venir, il a eu satisfaction !
M. Gilbert Chabroux. Le COR va peut-être pouvoir poursuivre ses travaux dans le cadre de la loi, avec la participation du MEDEF. C'est bien, mais sans doute le MEDEF n'a-t-il plus rien à craindre. Il redoutait que les cotisations patronales puissent faire l'objet d'une révision, d'une augmentation...
M. François Fillon, ministre. Cela va pourtant être le cas !
M. Gilbert Chabroux. ... au lieu de demeurer au taux de 8,2 %, identique depuis vingt-cinq ans. Maintenant que vous lui promettez de ne pas toucher à la cotisation patronale (M. le ministre fait un signe de dénégation) peut-être participera-t-il effectivement aux travaux du COR.
M. François Fillon, ministre. On ne peut pas débattre avec ces gens-là !
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, sur l'article.
M. Claude Domeizel. Monsieur le ministre, mon collègue et ami Gilbert Chabroux a exprimé l'essentiel de ma position sur ce sujet. Je voulais néanmoins vous faire part de ma satisfaction de constater que le Conseil d'orientation des retraites va être reconnu par tout le monde.
En effet, je me souviens que, dans cette enceinte, alors que je défendais la création de cette instance, vous étiez nombreux, et M. Leclerc n'était pas le dernier, à qualifier le Conseil d'orientation des retraites de « gadget » destiné à botter en touche ! J'éprouve donc une grande satisfaction à ce qu'il soit reconnu. (Mme Nelly Olin s'exclame.)
Je suis également satisfait que le MEDEF accepte de siéger dans ce conseil. En effet, il a toujours boudé cette instance et n'y a pas siégé une seule fois ! Il manquait donc une partie. Il est vrai que, maintenant qu'il vous a fixé la feuille de route, le MEDEF peut venir !
Mme Nicole Borvo. Le dialogue social, ce n'est pas le fort du MEDEF !
M. Claude Domeizel. Je tiens à signaler que le COR est aujourd'hui reconnu pour le travail sérieux qu'il accomplit, sous l'autorité d'une présidence efficace. Son premier rapport - mais il y en aura d'autres, puisque le conseil est pérenne - a alimenté non seulement la réflexion du Gouvernement, du Parlement, mais aussi celle de nos partenaires, qui participent à cette instance avec beaucoup d'assiduité, afin que nous trouvions tous ensemble une solution satisfaisante pour réformer notre système de retraite.
Il est dommage, je le souligne de nouveau, que vous fassiez preuve d'une telle précipitation et que vous ne repreniez pas la concertation pour aboutir à une véritable réforme qui tiendrait compte de l'avis du Conseil d'orientation des retraites et de tous les partenaires sociaux présents à la table des négociations. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Vous me permettrez de répondre sur cette question, car je représente effectivement le Sénat, avec mon collègue Claude Domeizel, au Conseil d'orientation des retraites. A cet égard, j'aimerais que l'on ne me fasse pas dire ce que je n'ai jamais dit, à savoir que le COR serait un « gadget ». Sachez que je ne me serais jamais permis d'utiliser ce qualificatif péjoratif !
Par ailleurs, vous prétendez que nous sommes en train de débattre de la réforme des retraites proposée par le COR.
M. Claude Domeizel. Mais non !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Je suis abasourdi, mais je laisse à M. le ministre le soin de vous dire que nous discutons aujourd'hui d'un projet présenté par le Gouvernement de M. Raffarin...
Mme Nicole Borvo. Tout à fait !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. ... lequel, dès sa prise de fonctions, a affirmé qu'il s'agissait d'une priorité essentielle et qu'il se donnait le temps de l'information, de la concertation et de la négociation avant que le Parlement ne statue.
Mes chers collègues, les réflexions que je me suis permis de faire au sujet du COR sont les suivantes. Il faut revenir, j'en suis désolé, au Livre blanc de 1991, auquel ont succédé les rapports Charpin et Briet, dont l'un contenait la proposition de porter le nombre de trimestres de cotisation à 170 ; ils ont beaucoup contribué à la réflexion. Je ne me réfère pas au rapport Teulade, élaboré au nom du CES, qui prenait tellement le contre-pied des autres rapports qu'il s'est en quelque sorte discrédité et que vous-mêmes n'osez l'évoquer !
Je voudrais ajouter, et on le voit très bien à travers les mesures de solidarité que le Gouvernement propose, que l'on ne peut réformer que dans la générosité ! Or, il est des moments où il est plus facile d'être généreux qu'à d'autres : quand la croissance était porteuse, que les problèmes étaient connus par une multiplicité de rapports, c'était plus facile ! C'est cette démarche que j'ai dénoncée et, sur ce point, je ne change pas d'avis. Je n'ai pas fait de reproches directs au COR. Le COR est resté à sa place, et j'aurai l'occasion de revenir tout à l'heure sur l'importance de ce conseil.
Aujourd'hui, malgré le retournement de la conjoncture - qui ne touche malheureusement pas notre seul pays -, le Gouvernement a continué à faire preuve de certaines générosités envers des populations qui souffrent, des populations défavorisées.
Mme Nicole Borvo. Ce n'est pas de la générosité, c'est de la justice sociale !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. C'est pour cette raison que nous défendons son projet, mais reconnaissez que c'est beaucoup plus difficile aujourd'hui !
Mme Nicole Borvo. Les salariés ne font pas la mendicité !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Par ailleurs, la multiplicité des rapports a montré qu'il était impérieux - et l'unanimité se fait sur ce point - de réformer les retraites. Le gouvernement Jospin a laissé passer l'occasion.
Mme Nicole Borvo. C'est une chose, mais nous en sommes maintenant à votre projet !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. La démographie est un élément essentiel de la solidarité entre les générations. Aujourd'hui, 500 000 de nos concitoyens partent chaque année à la retraite, ils seront 800 000 demain !
A l'époque du gouvernement Jospin, les classes creuses de la guerre arrivaient à la retraite. Vous aviez donc tous les éléments pour engager une réforme ! Alors, je suis désolé de vous le dire, mais je le pense profondément, et je ne changerai jamais d'avis,...
Mme Nicole Borvo. Il ne change jamais d'avis !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. ... en politique, il faut être courageux ! (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Aujourd'hui, le Gouvernement dont notre ministre fait partie a pris ses responsabilités et c'est pour cela que nous le soutenons ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.) Nous le soutenons non pas seulement parce qu'il est l'émanation de notre majorité, mais parce qu'enfin le politique se réconcilie avec sa mission, c'est-à-dire assumer !
M. le président de la commission des affaires sociales l'a évoqué, nous avons adopté quatre articles, certes essentiels, mais chaque fois vous refaites le débat de la France sociale ! Pourquoi n'avez-vous pas parlé du logement, du déplacement, de l'urbanisme ? (Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. Jean Chérioux. Ils le feraient !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Au point où nous en étions, mes chers collègues, nous pouvions le faire !
Mme Nicole Borvo. Nous ne sommes pas dans un meeting politique !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Je vais vous donner un dernier argument : nous sommes, les uns et les autres, pénétrés de notre mission.
Mme Gisèle Printz. Non !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Je veux, pour ma part, être en phase avec les personnes qui m'ont fait confiance, qui m'ont porté ici.
J'ai découvert en consultant mon site internet, que la séance de ce matin était télévisée. Les habitants de mon département n'ont absolument rien compris à nos travaux tant nos propos étaient éloignés de la réalité des articles ! (Protestations sur les travées socialistes.)
Mme Nelly Olin. C'est normal !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Depuis quelques jours, je passe mon temps à essayer de vous convaincre de revenir à l'essentiel de la loi. J'expliquais, ce matin, qu'il y a des points de divergence entre nous. C'est normal.
Vous contestez l'allongement de la durée de cotisation. Parlons-en ! Vous contestez la décote et la surcote. Parlons-en aussi ! Mais cessons de discuter, alors que nous sommes tous responsables de certains errements de notre société, des intermittents du spectacle, du salaire des grands patrons, etc. Revenons à l'essentiel !
En ce qui concerne le COR, j'ai dit dans mon propos liminaire, qu'il avait été un moyen de botter en touche, et je le maintiens. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Là réside la différence entre vous et nous. Le COR a en effet été pour vous l'occasion de repousser l'échéance après les élections législatives.
Le COR remplit son rôle, c'est-à-dire qu'il a fait un constat, qui est d'ailleurs partagé ; nous le disons tous, il faut absolument réformer le système des retraites, sinon il faudra soit augmenter la durée de cotisation, soit accepter une diminution drastique du montant des pensions ou une augmentation, elle aussi insupportable, du taux des cotisations. (Mme Nicole Borvo fait des signes de dénégation.)
Face à trois scénarios aussi impossibles les uns que les autres, le rôle du COR n'était pas de proposer une solution. Ce rôle incombe aux hommes politiques.
M. Claude Domeizel. Vous n'en proposez qu'une !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Aujourd'hui, des hommes politiques courageux vous proposent une réforme !
Mais le COR a eu un avantage : il a permis qu'une réflexion soit menée. Alors, monsieur Domeizel, mettons les points sur les i, et je suis très à l'aise pour le faire. Le COR a permis à chacun des partenaires sociaux...
M. Claude Domeizel. Au MEDEF !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. ... d'entendre l'autre. Cette phase a été très importante. Mais où s'est déroulée la phase principale ? Dans l'opinion publique !
M. Claude Domeizel. Dans la rue !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Mais non, pas dans la rue ; c'est trop facile ! Je suis désolé de vous le dire, monsieur Domeizel, je vais à la rencontre de nos concitoyens,...
M. Claude Domeizel. Oh non !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. ... et, depuis que le Gouvernement s'est installé, il a réaffirmé haut et fort qu'il fallait réformer les retraites. C'est devenu une évidence.
M. Claude Domeizel. Voyez ce qu'en disent les médias !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Parlons-en des médias ! Il n'y a pas eu une semaine sans qu'un hebdomadaire, un quotidien ou la télévision ne consacrent une émission à la question des retraites. Puis le Premier ministre a envoyé une lettre à tous les Français, qui ont alors commencé à comprendre qu'un problème se posait.
M. Marcel Debarge. Ils sont partis en vacances !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Pour rester honnête, je l'ai dit ce matin, certains Français partant à la retraite ne connaissent pas les tenants et les aboutissants du problème. Ils découvrent, pour la plupart, leur situation. Ils ne savent pas qu'il y a une décote. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)
Aujourd'hui, nous avons des obligations : celle de la transparence - elle figurera dans le texte - et celle de la responsabilité.
M. Claude Domeizel. Les Français sont maintenant en vacances, et vous en profitez !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. C'est pourquoi nous sommes derrière le gouvernement de M. Raffarin et nous le soutenons ; c'est notre démarche d'élus responsables !
Mme Paulette Brisepierre. Très bien !
Mme Michelle Demessine. Tout le monde est responsable !
M. le président. La parole est à M. Jean Chérioux, sur l'article.
M. Jean Chérioux. Après avoir entendu notre collègue Domeizel, je suis obligé de faire part de mon étonnement et de ma consternation.
M. Claude Domeizel. Comme d'habitude ! (Rires sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jean Chérioux. M. Domeizel nous a dit que nous venions de découvrir le COR. Les bras m'en tombent ! Ou M. Domeizel a une mémoire sélective ; ou il n'a pas du tout fait attention au long débat que nous avons eu en commission. Nous y avons entendu, notamment, tous les représentants des syndicats. J'ai constaté - ce que j'ai trouvé remarquable - que même ceux qui combattaient notre projet étaient d'accord sur le diagnostic établi par le COR.
Nous avons souvent eu l'occasion de reconnaître les qualités et l'utilité du COR. Nous ne nous réveillons pas aujourd'hui pour le constater, et vous n'avez pas à insinuer de tels propos, monsieur Domeizel !
Par ailleurs, je suis consterné lorsque M. Domeizel, sénateur de la République, fait référence à ce qui se passe dans la rue.
Mme Nicole Borvo. C'est bien normal !
M. Jean Chérioux. Pour moi, la rue ne compte pas ! (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.) Ce qui compte, c'est ce qui se décide ici ! C'est ça le système représentatif et c'est cela l'honneur de ce système ! (Exclamations prolongées sur les mêmes travées.)
Ce qui est encore plus consternant, c'est que M. Domeizel se permette d'affirmer - je le prends pour une insulte - que nous avons reçu notre feuille de route du MEDEF.
M. Claude Domeizel. Mais si !
M. Jean Chérioux. Moi, je ne reçois ma feuille de route de personne ! (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC). Je ne dépends que de ma conscience et du sentiment que j'ai de l'intérêt général. Qu'un sénateur de la République puisse tenir de tels propos est tout à fait scandaleux ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, nous avons bien débattu de cet article 6 ! (Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
J'ai donc l'honneur de vous demander la clôture de la discussion, et je souhaite que le Sénat se prononce sur ce point par scrutin public.
M. Jean-Pierre Masseret. Vérifions aussi le quorum !
M. Marcel Debarge. Ils sont minoritaires !
M. le président. En application de l'article 38 du règlement, je suis saisi d'une demande de clôture de la discussion de l'article 6.
Je vous rappelle qu'en application de l'alinéa 1 de l'article 38 la clôture peut être proposée par le président ou tout membre du Sénat lorsque au moins deux orateurs d'avis contraire sont intervenus sur l'ensemble d'un article.
En application de l'alinéa 2 de l'article 38, cette demande de clôture n'ouvre droit à aucun débat.
Je vais consulter le Sénat à main levée.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Non, monsieur le président, j'ai demandé un scrutin public !
M. le président. Je regrette, monsieur About, mais la consultation du Sénat a lieu à main levée pour une demande de clôture.
Conformément à l'article 38, alinéa 4, je consulte donc le Sénat à main levée sur la demande de clôture de l'article 6.
Plusieurs sénateurs du groupe socialiste et du groupe CRC. Il y a égalité !
M. le président. La clôture n'est pas prononcée. (Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. On peut s'amuser à utiliser ce genre de procédure. (Protestations sur les mêmes travées.)
M. Marcel Debarge. Qui l'a demandée ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Le sujet est important, mais ce qui est important aussi, c'est que nous fassions avancer le débat et que nos travaux ne soient pas bloqués. J'annonce dès à présent que nous travaillerons donc demain, dans la journée, mais aussi dans la soirée.
M. Marcel Debarge. Soyez présents !
M. Jean-Pierre Masseret. Ce sont des menaces ?
Un sénateur du groupe socialiste. Cela ne vous ressemble pas !
M. le président. En tant que président de séance, je ne fais qu'appliquer le règlement en cas d'égalité des votants.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je n'ai pas dit le contraire !
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo.
Mme Nicole Borvo. Depuis le début de la discussion, vous nous expliquez que nous faisons durer le débat. Mais j'observe que deux membres de votre majorité se sont livrés à un véritable meeting politique, en comité restreint bien évidemment.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Vous êtes nombreux depuis le premier jour !
Mme Nicole Borvo. Permettez que nous ne l'acceptions pas ! Si vous voulez faire un rappel à l'ordre, faites-le, mais pas à l'encontre des sénateurs de l'opposition !
M. Gilbert Chabroux. D'autant qu'on n'avait rien dit !
Mme Nicole Borvo. M. le rapporteur nous a d'abord dit qu'il ne changerait jamais d'avis. En matière de dogmatisme, on ne fait pas mieux !
Il nous a dit ensuite que les Français ne comprenaient rien à nos débats. Vous avez consacré beaucoup de temps et beaucoup d'argent à leur expliquer qu'il fallait réformer, pour le sauver, le système de retraite par répartition, et que la seule réforme possible était celle de votre projet. Mais il se trouve que d'autres - dont nous d'ailleurs, mais pas seulement - leur ont expliqué que votre réforme avait quand même pour corollaire l'obligation de cotiser davantage pour une pension inférieure et de souscrire des fonds de pension, ce qui ne leur avait pas été bien précisé !
M. François Fillon, ministre. Parce que c'est faux !
Mme Nicole Borvo. Pourtant, cela ressort du texte !
M. François Fillon, ministre. C'est un mensonge éhonté !
Mme Nicole Borvo. Non ! Ce n'est pas du tout un mensonge éhonté. On vous a expliqué...
M. François Fillon, ministre. Vous n'expliquez rien du tout, vous affirmez sans rien démontrer !
Mme Nicole Borvo. ... que, la part de la retraite légale fondant comme neige au soleil, bien évidemment seuls ceux qui ont de l'argent peuvent compléter leur retraite légale par de l'épargne personnelle.
M. François Fillon, ministre. Ce n'est même plus de la caricature, c'est n'importe quoi !
Mme Nicole Borvo. Appelez cela comme vous voulez, mais ce sont bien des fonds de pension !
M. François Fillon, ministre. C'est honteux !
Mme Nicole Borvo. Ce n'est quand même pas ce qui ressortait des analyses du COR ou des différents rapports. Je suis bien d'accord avec vous, monsieur le rapporteur, il s'agit d'une décision politique.
Vous nous avez dit encore que la période n'était pas propice à la générosité. Mais en matière de retraite, comme en matière de protection sociale, nous n'en sommes pas à faire l'aumône ! Nous établissons un projet pour les retraites,...
M. Jean Chérioux. Vous n'établissez rien du tout ! C'est nous qui l'établissons !
Mme Nicole Borvo. ... c'est-à-dire un élément important de la protection sociale. Il n'est nullement question de générosité ou d'aumône ! Ce que nous défendons, nous, c'est la justice sociale et une juste répartition des richesses. Voilà ce que demandent nos concitoyens !
M. le président. La parole est à Mme Nelly Olin.
M. Jean-Pierre Maseret. Elle demande la clôture ?
Mme Michelle Demessine. Ou la vérification du quorum !
Mme Nelly Olin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à cause de la fatigue qui commence à se faire sentir et de l'embarras que certains éprouvent, nous entendons des propos qui dépassent l'entendement !
M. Claude Estier. Ceux de M. About, par exemple !
Plusieurs sénateurs du groupe socialiste. Ce n'est pas vrai pour nous !
Mme Nelly Olin. Chaque gouvernement doit assumer ses responsabilités, de même que chacun des membres du Sénat, quelle que soit son appartenance politique.
Voilà deux jours, nous avons examiné vingt amendements en cinq heures ! On ne pourra donc pas dire que l'opposition ne s'est pas exprimée ! Mais, aujourd'hui, nous sommes en train de montrer aux Français un visage absolument négatif.
M. Claude Estier. Ils ne nous regardent pas !
M. Jean Chéroux. C'est pour cela que vous vous conduisez comme vous le faites !
Mme Nelly Olin. Je ne vous ai pas interrompu, monsieur Estier, alors vous pourriez être plus correct, vous qui faites l'apologie des femmes ! Que vous soyez d'accord ou non avec lui, ce gouvernement assume ses responsabilités. Certes, nous pouvons comprendre que vous ne le souteniez pas, mais vous pourriez tout de même vous exprimer d'une manière courtoise, ce qui n'a pas toujours été le cas puisque vos propos ont quelquefois été quelque peu insolents, voire insultants. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
En outre, puisque vous avez décidé de faire durer le débat, ayez au moins la décence de reconnaître que des avancées significatives sont réalisées. On peut comprendre que vous ne partagiez pas cet avis puisque vous n'avez rien fait, mais, aujourd'hui, le Gouvernement a un devoir, celui de sauver les retraites pour l'avenir de notre pays,...
M. Jean-Pierre Masseret. Nous aussi !
Mme Nelly Olin. ... pour l'avenir de nos enfants et de nos petits-enfants.
Si chacun, dans cette assemblée, pouvait au moins avoir la correction de s'exprimer posément, cela n'enlèverait rien au débat, et nous pourrions le poursuivre d'une façon sereine à défaut d'être constructive. Une telle agressivité n'ajoute rien au débat ! Voilà ce que je tenais à dire, monsieur le président. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme Nicole Borvo. Vous n'avez pas entendu M. Leclerc, madame Olin !
M. le président. Sur l'article 6, je suis saisi de trente et un amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune. Pour la clarté du débat, je les appellerai successivement.
L'amendement n° 296, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Les travaux du Conseil d'orientation des retraites ont mis en avant plusieurs analyses essentielles pour aborder sérieusement notre débat relatif à la réforme des retraites. Nous avons dit par ailleurs, et en diverses occasions, tout le bien que nous pensons du COR et, une fois de plus, nous soulignons la qualité de ses travaux.
Le COR a su en effet apporter un éclairage précieux sur les différents enjeux d'une réforme nécessaire de notre système de retraite, afin de garantir les fondements de ses principes fondamentaux. Il a su mettre à disposition, sous forme largement accessible, les principales données, analyses et propositions des partenaires sociaux et de la société civile.
C'est la première fois qu'est trouvé un vrai lieu d'échange pluridisciplinaire et pluraliste. Le Conseil dispose de moyens importants, travaille en parfaite collaboration avec les différents services de l'Etat, qui ont mis à sa disposition toutes les données qui n'avaient jamais été rassemblées jusqu'à ce jour. Elles ont été exploitées et ont permis d'opérer une grande clarification, qui a été bien utile pour notre débat, s'agissant notamment des conséquences de la réforme Balladur.
Le Conseil d'orientation des retraites a été conduit à travailler la question des retraites sous différents angles : la situation actuelle du régime d'assurance vieillesse en France, les projections relatives à son équilibre futur, les éléments principaux du débat sur son avenir, mais aussi un aperçu des évolutions en cours à l'étranger. Aussi, nous nous félicitons de voir que ce Conseil est reconnu par le législateur et consacré dans cet article 6.
Toutefois, nous regrettons que les missions qui lui ont été confiées ne soient pas toutes retranscrites.
Certes, vous maintenez, à juste titre, certaines de ses prérogatives : premièrement, la mission de décrire les évolutions et les perspectives à moyen et long terme des différents régimes de retraite, compte tenu des évolutions économiques, sociales et démographiques, et d'élaborer, au moins tous les cinq ans, des projections de leur situation financière ; deuxièmement, la mission d'apprécier les conditions requises pour assurer la viabilité financière à terme de ces régimes ; troisièmement, la mission de mener une réflexion sur le financement des régimes de retraite et de suivre son évolution ; quatrièmement, la mission de participer à l'information sur le système de retraite et les effets des réformes conduites pour garantir son financement ; enfin, cinquièmement, la mission de suivre la mise en oeuvre des principes communs aux régimes de retraite et l'évolution des niveaux de vie des actifs et des retraités, ainsi que de l'ensemble des indicateurs de régimes de retraite, dont les taux de remplacement.
Malheureusement, vous omettez une prérogative, à nos yeux capitale, celle qui consiste à veiller sur la cohésion du système de retraite par répartition, en assurant la solidarité entre les régimes et le respect de l'équité, tant entre les retraités qu'entre les différentes générations.
Par ailleurs, l'ampleur du travail d'analyse et de prospective effectué par le Conseil a montré que, si les inégalités devant la retraite demeurent, celle-ci est devenue une promesse d'un nombre significatif d'années « libérées » pour le plus grand nombre.
L'espérance de vie à 60 ans, d'une quinzaine d'années en moyenne en 1932, est passée aujourd'hui à une vingtaine d'années pour les hommes et à près de vingt-cinq ans pour les femmes. Les régimes de retraite garantissent désormais l'indépendance financière des personnes âgées, leur assurant un niveau de vie moyen comparable à celui des actifs. Cela témoigne de la réussite du système de retraite par répartition mis en place après 1945 et qui est peu à peu monté en charge au cours des trente glorieuses. Il doit, lui aussi, être garanti.
Les travaux du COR ont permis de mettre en lumière également le besoin de financement. Il a fourni des données, proposé des orientations, présenté des choix possibles, ce qui relevait clairement de sa mission d'étude et de concertation.
C'est pourquoi nous sommes attachés à la poursuite de ses travaux et souhaitons que lui soit donné le moyen de jouer tout son rôle pour nous éclairer encore sur les améliorations à apporter.
C'est également la raison pour laquelle nous proposons la suppression de cet article, qui ampute le Conseil d'orientation des retraites de ses fonctions et de ses moyens...
M. François Fillon, ministre. Quoi !
Mme Michelle Demessine. ... tels qu'ils sont définis par le décret fondateur qui l'a vu naître.
M. François Fillon, ministre. C'est n'importe quoi ! La disposition a été votée à l'unanimité par l'Assemblée nationale !
Mme Michelle Demessine. Par conséquent, en l'état, cet article ne nous convient pas et nous ferons des propositions au cours du débat pour élargir le champ des missions du COR.
M. François Fillon, ministre. On amputerait le Conseil d'orientation des retraites de ses missions ! C'est du délire !
M. le président. L'amendement n° 205, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Au I de cet article, remplacer la référence : "L. 114-3" par la référence : "L. 114-5". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. L'amendement n° 306, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans le second alinéa (1°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, après le verbe : "décrire", insérer les mots : "et d'analyser". »
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Créé par un décret du 10 mai 2000, le Conseil d'orientation des retraites est une structure pluraliste et permanente de concertation associant des parlementaires, des représentants des partenaires sociaux, du secteur public comme du secteur privé, des représentants des associations familiales, des retraités et des personnes âgées, des experts et des représentants de l'Etat. Il a pour mission essentielle de suivre régulièrement la situation de notre système d'assurance vieillesse, d'établir des diagnostics et de faire des recommandations ou des propositions de réforme de nature à répondre aux objectifs de solidité financière et de solidarité.
A ce titre, il est un instrument de réflexion et de débat au service de la préparation des évolutions des régimes de retraite. Par conséquent, nous nous félicitons qu'il soit consacré par la loi.
Toutefois, les dispositions contenues dans l'article 6 semblent justement partiellement ignorer l'importance de cette réflexion. En effet, parmi les missions que vous souhaitez confier au COR, il n'est prévu, au 1° du II de cet article, qu'une mission de description concernant « les évolutions et les perspectives à moyen et long terme des différents régimes de retraite, compte tenu des évolutions économiques, sociales et démographiques, et d'élaborer, au moins tous les cinq ans, des projections de leur situation financière ».
Or l'essentiel de la description doit pouvoir permettre d'élaborer une analyse justifiée et pertinente de cette évolution, afin d'apporter les éléments de propositions de mutation et de réforme efficiente de notre système de retraite par répartition. En effet, si, comme vous l'avez répété jusqu'à plus soif, le temps des rapports est révolu et qu'il est temps de faire place à l'action, cette action ne doit pas conduire la France et nos concitoyens dans le mur. Afin d'éviter ce risque inutile, sauf à considérer que l'objectif est déjà défini avant même la description de la situation et son analyse, le législateur et le pouvoir exécutif, ainsi que l'ensemble des partenaires sociaux, doivent pouvoir se reposer sur l'ensemble des analyses de la situation.
Ce travail d'analyse, compte tenu de l'excellence des travaux fournis par le COR, nous proposons de le faire réaliser par les services de ce Conseil. A ce titre, nous suggérons d'ajouter, après le mot « décrire » du 1° du II de l'article 6, les mots « et d'analyser ».
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est pas mal ! C'est un bon amendement !
M. Roland Muzeau. Cet amendement de précision des prérogatives du COR est, nous semble-t-il, fort utile pour ne pas faire de ce conseil un simple organe d'information, comme il en existe déjà d'autres, dont les activités ont été instructives quant à la réforme des retraites que vous portez ici devant nous. C'est pourquoi je vous demande d'émettre un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 206, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Dans le deuxième alinéa (1°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, remplacer les mots : "différents régimes de retraites, compte tenu" par les mots : "régimes de retraites légalement obligatoires, au regard". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision.
Le Conseil doit avoir un champ de compétences clairement défini. La commission a estimé que le COR devait, en effet, concentrer son attention sur les régimes de retraite obligatoires, qu'ils soient de base ou complémentaires.
D'ailleurs, la fin du texte proposé par cet article suggère de retenir ce domaine de compétences, puisqu'il prévoit des échanges institutionnels d'information entre le Conseil et les régimes de base et les régimes complémentaires.
D'un point de vue pratique, la mission relative à la description de la situation et à l'analyse des perspectives des régimes ne peut être remplie que si elle ne concerne qu'un nombre limite d'entre eux, et non une myriade d'intervenants du secteur supplémentaire.
Toutefois soyez rassurés, rien n'interdira au Conseil de dresser un tableau général de la situation des régimes facultatifs. A ce titre, la commission a maintenu en tant que mission du Conseil une compétence générale d'information sur le système d'assurance vieillesse.
M. le président. L'amendement n° 297, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le troisième alinéa (2°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« 2° bis De veiller à la cohésion du système de retraite par répartition, en assurant la solidarité entre les régimes et le respect de l'équité, tant entre les retraités qu'entre les différentes générations. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet amendement tend à élargir les missions du COR et à lui redonner une mission qui a été supprimée par le projet de loi. En effet, il reprend les termes du décret fondateur du Conseil d'orientation des retraites dans son article 2, troisième alinéa.
Le texte proposé par le Gouvernement nous semble restrictif par rapport aux missions qui sont actuellement dévolues au Conseil d'orientation des retraites.
Le Conseil d'orientation des retraites doit porter un regard sur la viabilité financière, certes, mais il n'aura plus comme mission de veiller à la cohésion du système de retraite par répartition, au respect de l'équité entre les différentes générations. Pourtant, les Français ont montré, ces derniers temps, à quel point ils étaient attachés à ce système fondé sur la solidarité.
Si le Gouvernement, comme il l'affirme, souhaite sauver le système par répartition, il n'y a aucune raison qu'il ne continue pas à demander au COR de travailler autour de cette question essentielle. C'est pourquoi, nous proposons de réintégrer cet alinéa dans le projet de loi.
M. le président. L'amendement n° 207, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Au quatrième alinéa (3°) du texte proposé par cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, remplacer les mots : "et de suivre son évolution" par les mots : "susmentionnés et de suivre l'évolution de ce financement". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionel.
M. le président. L'amendement n° 298, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
« Après le quatrième alinéa (3°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ... ° - De mener une réflexion sur la situation comparée des hommes et des femmes ayant à charge ou ayant eu à charge un enfant ou un adulte handicapé ou invalide au regard de la constitution de leur droit à la retraite. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Notre amendement tend à inviter le COR à mener une réflexion sur la situation comparée des hommes et des femmes ayant à charge ou ayant eu à charge un enfant ou un adulte handicapé ou invalide au regard de la constitution de leur droit à la retraite.
Savez-vous qu'aujourd'hui, d'après une enquête menée par l'INSEE à la fin de l'année 1999, environ 2,3 millions de personnes, vivant à leur domicile, perçoivent une allocation, une pension ou un autre revenu en raison d'un handicap ou d'un problème de santé ? Mais ce n'est pas tout : plus de 5 millions de personnes bénéficient d'une aide régulière pour accomplir certaines tâches de la vie quotidienne, pour les mêmes raisons. Ce qui devrait interpeller le législateur, c'est que, pour toutes ces personnes, près de deux fois sur trois, l'aide est apportée par l'entourage proche.
Les incapacités dues au handicap se traduisent par des limitations d'activité. Dans le domaine de la mobilité, elles vont du besoin d'aide pour sortir du domicile au confinement au lit ou au fauteuil, en passant par l'incapacité à se laver ou à s'habiller seul.
L'aide de l'entourage proche est primordiale et moins d'une personne aidée sur cinq ne l'est que par des professionnels.
Tous ces chiffres sont éloquents et montrent combien, pour les proches d'enfants et d'adultes handicapés, l'investissement en temps et en énergie ne peut qu'interférer avec l'exercice de sa propre activité professionnelle.
Combien doit-on recenser de temps partiels, d'interruptions temporaires ou définitives d'activité professionnelle, de freins au déroulement de sa carrière, parce que l'on se doit d'aider, tout simplement, ces personnes handicapées à vivre ?
Il est de notre devoir, aujourd'hui, de rendre hommage à la disponibilité et au dévouement de ces hommes et de ces femmes. Un outil d'observation pour rendre compte de la constitution de leur droit à la retraite est un pas nécessaire pour pouvoir évaluer les inégalités, donc les ajustements de demain. Tel est le sens de notre amendement.
M. le président. L'amendement n° 299, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
« Après le quatrième alinéa (3°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ... ° - De mener une réflexion sur la réforme des cotisations sociales prenant en compte la valeur ajoutée globale. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Cet amendement se justifie par son texte même.
M. le président. L'amendement n° 208, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le cinquième alinéa (3° bis) du texte proposé par cet article pour l'article L. 144-2 du Code de la sécurité sociale :
« 3° bis - De formuler les avis prévus aux III et IV de l'article 5 de la loi du portant réforme des retraites ; ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination avec l'article 5 : il prévoit que le COR a pour mission de formuler les avis qui sont prévus à l'article 5. Ce faisant, il tend à supprimer la précision apportée par l'Assemblée nationale selon laquelle le COR mène une réflexion sur le financement des régimes de retraite.
Il est utile de préciser qu'une réflexion sur l'évolution du financement de l'assurance vieillesse ne saurait écarter a priori une réflexion sur l'évolution de l'assiette de cotisation, laquelle est d'ailleurs largement entamée par les rapports Chadelat et Malinvaud, le précédent gouvernement n'ayant pas tranché entre leurs analyses opposées.
Ce rappel ayant été fait, l'inscription de cette précision dans la loi devient superfétatoire. A l'évidence, le COR a toute latitude pour étudier des modalités de financement des régimes des retraites.
M. le président. L'amendement n° 1096, présenté par Mme Olin, MM. Trucy, Plasait, Murat, Courtois, Hérisson, Nachbar, Cantegrit, Hyest, Braye et Schosteck, est ainsi libellé :
« Dans le 6e alinéa (4°), du texte proposé par cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, après les mots : "de participer", insérer les mots : ", en toute indépendance,". »
La parole est à Mme Nelly Olin.
Mme Nelly Olin. Cet amendement a pour objet de réaffirmer l'indépendance du Conseil d'orientation des retraités.
M. le président. L'amendement n° 305, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par le II de cet article pour le sixième alinéa (4°) de l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, après les mots : "pour garantir", insérer les mots : "et assurer". »
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. L'article 6 reprend certaines des prérogatives du COR qui sont édictées dans son décret fondateur.
Notre amendement a pour objet de préciser encore les missions qu'assure le COR et qui sont intéressantes. Toujours est-il que le COR doit également participer à l'information sur le système de retraite et sur les effets des réformes conduites pour garantir son financement, question centrale.
Rester frileux sur ce sujet reviendrait à enterrer la retraite par répartition. Et renvoyer à l'incertitude du lendemain n'est pas raisonnable.
C'est pourquoi il convient non seulement de garantir le financement, mais également de l'assurer. La simple garantie ne suffit pas : affirmer le principe du financement ne veut pas dire l'assurer. C'est pourquoi je vous invite à adopter cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 300, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« 5° bis De présenter un rapport au Parlement avant 2008 notamment sur l'égalité devant les retraites en fonction de la pénibilité du travail. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Nous avons déjà, à plusieurs reprises, soulevé la question de la pénibilité du travail dans le cadre de ce débat sur les retraites.
Il est évident qu'au-delà de la solidarité intergénérationnelle se pose, en matière de retraite, la question de la solidarité interprofessionnelle.
Nous ne serions pas choqués que quelques efforts soient accomplis pour que la pénibilité des conditions de travail soit prise en compte en termes de droits acquis à pension.
Sous le bénéfice de ces observations, nous vous invitons à adopter cet amendement qui prévoit d'ajouter au contenu des missions du COR la faculté d'informer le Parlement des effets de la pénibilité du travail sur la durée de perception des retraites.
M. le président. L'amendement n° 307, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« De mener une réflexion sur le retour pour tous les assurés à 37,5 années de cotisation. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Nous avons une position de principe sur la durée de cotisation : nous défendons le retour pour tous les assurés à 37,5 années de cotisation. Bien sûr, les points de vue sont très différents à cet égard.
Cet amendement tend à compléter les missions de réflexion du COR.
La réforme des retraites dont nous débattons repose sur un équilibre très précis. Cet équilibre est celui de l'harmonisation des régimes par répartition, qu'il s'agisse du régime général, du régime de la fonction publique, du régime agricole, du régime des commerçants et artisans ou du régime des professions libérales.
Il nous paraît donc nécessaire que le COR vérifie la faisabilité de tout cela. C'est la raison pour laquelle nous souhaiterions que, parmi les missions de réflexion qui sont confiées au COR, figure l'étude de l'impact de la réduction de la durée de cotisation des salariés du secteur privé, comme des non-salariés.
M. le président. L'amendement n° 308, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« De mener une réflexion sur l'indexation des pensions de retraites sur les salaires. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Cet amendement concerne le périmètre des missions accomplies par le COR en matière d'information. Quand on y réfléchit, on peut penser que le COR a la possibilité, dans le cadre de ses travaux, de fournir une information de qualité au travers de ses différents rapports annuels à venir. Il peut devenir un outil d'aide à la réflexion, sans avoir pour autant le rôle de caution scientifique du recul social que l'on semble vouloir lui faire jouer.
Le COR doit donc se poser les bonnes questions, en particulier celle du pouvoir d'achat des retraites, qui est au coeur du devenir de nos retraites par répartition.
Par conséquent, sans nous départir de notre position de principe, nous estimons que l'on doit réfléchir aux incidences d'un relèvement du niveau des pensions et à l'adoption d'un mode d'indexation plus en rapport avec les exigences de notre temps.
Vous me direz que nous connaissons déjà une partie de la réponse à la question posée. La réforme Balladur a indexé les retraites du secteur privé sur l'évolution des prix hors tabac, ce qui eu a des conséquences remarquables sur la situation de nombreux retraités. Ce sont en effet quelque 16 milliards d'euros de pouvoir d'achat dont les retraités du secteur privé ont été privés. A première vue, cela fait peur, bien évidemment, quand bien même on ne peut oublier quelques vérités d'évidence.
Une vérité d'évidence, c'est que ces sommes qui ont été ainsi prises dans la poche des retraités ne sont rien d'autre que du pouvoir d'achat qui leur a été confisqué. Et, lorsque l'article 2 du projet de loi prévoit que tous les assurés sont en droit d'obtenir une pension en rapport avec les revenus qu'ils ont tirés de leur activité, nous nous permettons de considérer que la non-indexation sur les salaires est le plus sûr moyen de ne pas respecter ce principe.
Seconde observation, ne pas permettre aux retraités de percevoir 16 milliards d'euros de revenus est une décision qui ne manque pas d'avoir certaines conséquences pour l'Etat. Cela coûte environ 600 millions d'euros à la protection sociale au titre de la CSG ; cela coûte, au bas mot, 1 milliard d'euros au titre de l'impôt sur le revenu. Et il n'est pas interdit de penser que ce sont 1,5 à 2 milliards d'euros qui ne reviennent pas sous forme de produits de TVA, produits qui sont attachés à la consommation populaire.
On peut donc se demander si la désindexation des retraites sur les salaires n'a pas eu comme conséquence de créer les conditions d'une dynamique récessive fondée sur l'absence de revenus. Ce sont précisément ces problèmes qu'il faut confier à l'expertise du COR. N'oublions jamais, mes chers collègues, que les retaites ne sont pas qu'un coût, qu'elles ont aussi le caractère d'un revenu.
C'est donc sous le bénéfice de ces observations que je vous invite à adopter cet amendement n° 308 étendant le champ d'expertise systémique du Conseil d'orientation des retraites au nom de l'aide que cette expertise peut apporter à la réflexion de la représentation nationale.
M. le président. L'amendement n° 309, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« De mener une réflexion sur la validation gracieuse des périodes de formation. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement s'inscrit dans la lignée des précédents, qui visent à élargir les missions assignées au COR. Nous proposons donc de mener une réflexion - elle a d'ailleurs été, au cours de ces premières journées, au coeur de nos débats -, sur la validation gracieuse des périodes de formation.
L'allongement de la durée des études et l'âge de plus en plus tardif d'entrée dans un emploi salarié stable nécessitent la prise en compte pour la retraite de ces années de formation et d'études.
Ces bénéfices d'études devraient être accordés quelle que soit la situation professionnelle ultérieure - un certain nombre d'amendements tendent à le préciser -, qu'elle se déroule dans le secteur public ou dans le secteur privé. Cela suppose de réfléchir aux interconnextions entre les différents régimes de retraite, afin de garantir l'égalité des droits pour des parcours professionnels équivalents, quels que soient les secteurs d'activité.
Voilà une mission supplémentaire pour le COR.
M. le président. L'amendement n° 310, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« De mener une réflexion sur la suppression de la contribution sociale généralisée sur les pensions de retraite. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Toujours pour élargir les missions du COR, nous proposons de poser quelques questions sur les effets de certaines cotisations sociales prélevées sur tous les revenus.
Depuis dix ans, les retraités ont été victimes de l'accroissement des prélèvements sociaux et fiscaux. Ce mouvement a été engagé avec l'instauration autoritaire de la contribution pour le remboursement de la dette sociale, la CRDS, et amplifié par le plafonnement de la déduction fiscale de 10 % et plus. Cette année, il s'est trouvé, dans cette assemblée et dans ce gouvernement, des gens pour concevoir et pour voter une remise en cause de l'allocation spécifique dépendance, plaçant ainsi, de fait, des centaines de milliers de retraités dans des situations particulièrement difficiles.
C'est dans ce contexte que nous proposons que le Conseil d'orientation des retraites se penche sur la question de la suppression de la contribution sociale généralisée.
Nombre de retraités dont les ressources sont plus que modestes sont aujourd'hui exonérés de cette contribution.
Cette situation ne nous dérange pas l'espace de cinq minutes.
Pour les autres, comme, de manière générale, ils sont loin de rouler sur l'or, il s'agira de leur rendre un peu de pouvoir d'achat.
C'est sous le bénéfice de ces observations que je vous invite à adopter cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 311, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« De mener une réflexion sur les moyens permettant d'assurer la possibilité de départ immédiat anticipé avant 60 ans et dès 40 annuités pour les assurés qui justifient de ces conditions. »
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement concerne la mission confiée au COR d'engager une réflexion sur les moyens permettant d'assurer la possibilité du départ immédiat anticipé avant l'âge de 60 ans et dès 40 annuités.
Cela concerne essentiellement les personnes ayant intégré jeunes le monde du travail, notamment celles qui ont travaillé dans des conditions pénibles ou de pénibilité accrue.
Si l'on se réfère aux dernières enquêtes portant sur les conditions de travail, la pénibilité physique n'est nullement en régression, alors que les facteurs de pénibilité mentale et psychologique connaissent une augmentation générale.
Cela pose d'ailleurs le problème de l'amélioration des conditions de travail, que les membres du groupe CRC évoquent d'ailleurs souvent ici.
Dans le monde du bien-être, de la recherche d'une vie saine et équilibrée, devant les principes de vie assénés jour et nuit à la télévision et dans les magazines, on pourrait aisément croire que ces préceptes ont valeur de modèle et d'absolu pour tout un chacun. Pourtant, une deuxième vie existe, notamment pour les 800 000 salariés qui subissent actuellement des contraintes de pénibilité ou d'astreinte dans les entreprises.
A croire qu'il existerait des modes de vie différents selon qu'il s'agisse du lieu de travail ou du domicile. A croire que l'être humain serait capable d'accepter la dureté de son emploi, de ses conditions salariales et n'aurait comme exutoire que les moments passés dans sa sphère privée, le soir, le week-end et lors des vacances.
Cette conception du passage de l'homme sur terre est cependant fausse. Vivre est un tout, et chacun est en droit de vouloir mener une existence sereine sans se voir infliger des contraintes supplémentaires dans son environnement de travail, contraintes qui, d'ailleurs, pourraient être diminuées. Un certain nombre d'inégalités pourraient de même être évitées.
Le temps où la dureté du travail était associée au travail manuel et physique est révolu.
J'en veux pour preuve et pour exemple le développement du secteur des services, qui a vu l'émergence de difficultés nouvelles dans les entreprises.
Aux personnes qui ont commencé très jeune - entre 14 ans et 16 ans - dans la vie active et qui souffrent bien souvent de la pénibilité dans leur emploi, vous accordez, certes, la possibilité d'un départ en retraite anticipé. Mais, pour ce faire, vous posez comme base de départ les 42 annuités de cotisation. Or, sous couvert d'une mesure prétendument favorable, vous appliquez insidieusement à cette catégorie de salariés votre réforme injuste et allongez de deux ans leur durée de cotisation. Voilà l'exemple même d'un cadeau empoisonné ! Dans ce domaine aussi, les inégalités se creusent, ce qui illustre, s'il en était besoin, le caractère déséquilibré de votre plan.
Je le réaffirme ici, monsieur le ministre, vous ne prenez pas en compte la globalité du problème posé, laissant le champ libre à d'éventuelles négociations collectives au sein des entreprises.
Cet amendement vise donc à éviter que ne se creusent les inégalités. Il présente l'intérêt de placer le COR au coeur du débat sur les départs anticipés à la retraite.
M. le président. L'amendement n° 312, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« De mener une réflexion sur l'évolution des profits et bénéfices des grandes entreprises et la part consacrée à l'investissement, l'emploi et la formation. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Après avoir mis l'évolution démographique et donc le financement de nos pensions de retraite en relation avec le niveau, si vous me le permettez, du « gâteau produit », il faut achever l'analyse et lier ce niveau avec le partage. Car la question essentielle est bien celle-ci : quelle répartition de la valeur ajoutée créée par le travail doit-on mettre en oeuvre pour une véritable réforme de notre système ?
Le MEDEF et votre gouvernement veulent faire oublier que les conditions de ce partage se sont considérablement dégradées au cours des vingt dernières années : 150 milliards d'euros perdus chaque année soit presque autant que le montant total des retraites versées, qui s'élève à 180 milliards d'euros.
L'importance de ce transfert des revenus des salariés vers le profit, qui sera amplifié par votre réforme, est à mettre en parallèle avec le coût pour le moins réduit - 0,3 point de PIB - que coûterait, à l'horizon 2040, le retour de tous les salariés à 37,5 annuités calculé par le COR.
Si l'on ne veut pas voir cette tendance s'accentuer au fur et à mesure que le PIB augmentera, il faut impérativement inverser la tendance à la régression de la part des salaires, quelle que soit la forme que peut prendre cette part, depuis les salaires jusqu'à la réduction du temps de travail en passant par le temps et la pension des retraites.
Il y a là un gisement de ressources actuellement accaparé par les détenteurs de capitaux et dont il faudrait organiser une autre affectation pour l'avenir. Le rééquilibrage de la masse salariale dans la valeur ajoutée donnerait ainsi une latitude plus grande pour financer les retraites.
Quelle forme cependant donner à l'inversion de la tendance ? Plusieurs méthodes existent et ont été proposées, non seulement par notre groupe mais aussi par d'autres organisations syndicales et associations nationales. Parfois complémentaires, parfois contradictoires, nous aurons certainement l'occasion d'y revenir ; toutes ces méthodes ont pour trait commun de se résumer à une modification de la répartition de la valeur ajoutée.
Rappelons clairement les chiffres. En l'espace de vingt ans seulement, la part des salaires dans la valeur ajoutée a diminué de dix points, passant de 70 % au début des années quatre-vingt à 63 % aujourd'hui. Dans le même temps, la part du capital a, quant à elle, augmenté dans la même proportion, passant de 30 % environ à près de 40 % de la valeur ajoutée.
Cette dégradation de la répartition au détriment des salaires prend plusieurs formes dont les plus apparentes sont la généralisation de la flexibilité de l'emploi et de la précarité du travail et des revenus.
Dans ces conditions, on peut expliquer facilement les difficultés que rencontre notre système de retraite par répartition, confronté à la perspective d'une raréfaction de ses ressources afin de financer les pensions des retraités.
C'est pourquoi nous voulons, à travers cet amendement, souligner l'importance d'une réflexion sur l'évolution des profits et bénéfices des entreprises et la part consacrée à l'investissement, l'emploi et la formation.
M. le président. L'amendement n° 313, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« De mener une réflexion sur l'évolution de l'emploi à temps partiel, de l'emploi des jeunes et des emplois en contrat à durée déterminée et des modes de recours à ces emplois. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Toujours dans le même esprit, nous souhaitons confier une mission de réflexion supplémentaire au COR.
Le dernier rapport du Conseil d'analyse économique, qui vient d'être rendu public, montre que, du point de vue de la compétitivité et de l'attractivité de ses territoires, la France est bien placée sur le plan international ; pour les investissements internationaux, elle viendrait au deuxième rang, tout de suite après la Grande-Bretagne.
Le Gouvernement continue sur sa voie et tire l'ensemble des coûts salariaux vers le bas. Il y a là des différences de philosophie qui nous opposent au Gouvernement, mais cela ne date pas d'aujourd'hui. Nous constatons que cela nous mène tout droit vers la déflation, à travers une politique sans répit de baisse des charges sociales.
S'agissant de l'emploi, la hausse du chômage de ces derniers mois, qui vient de se confirmer une nouvelle fois, la multiplication des plans sociaux et des licenciements, sont pourtant révélatrices, somme toute, de l'inefficacité d'une telle politique.
Il est donc légitime de se demander au bénéfice de qui est menée une telle politique de diminution des contributions qui permettaient d'alimenter financièrement notre système de protection sociale.
Le phénomène le plus nouveau ces derniers temps est, non sans contradiction, d'ailleurs, l'explosion des inégalités, l'explosion de la précarité, l'émergence chaque jour confortée de la grande pauvreté et une exclusion contre laquelle il est de plus en plus difficile de lutter. Ainsi la France aura plusieurs visages...
Il est donc urgent de mener une réflexion sur l'évolution de l'emploi à temps partiel, de l'emploi des jeunes et des emplois en contrat à durée déterminée ainsi que sur les modes de recours à ces formes d'emplois.
Et il faut parler aussi des salaires. En effet, nous nous sommes fixé comme objectif en matière de retraite de garantir une sorte de minimum déterminé par référence au SMIC ; nous avons ainsi pu parler de 85 % du SMIC. Or nous constatons que de plus en plus de Françaises et de Français ont des rémunérations inférieures au SMIC.
Donc, il nous semble qu'une étude détaillée de l'impact de la flexibilité du travail sur notre système de protection sociale s'imposerait.
M. le président. L'amendement n° 314, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« De mener une réflexion sur l'évolution des durées d'assurance ou de services, des durées moyennes de bénéfices des pensions de retraites selon les branches d'activités et les niveaux socio-professionnels. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Nous devons disposer, grâce au COR, et si nous nous y prenons bien, de toutes les informations possibles pour savoir exactement comment la situation évoluera pour les retraités.
La réforme dont nous débattons depuis quelques jours affiche, en effet, un certain nombre d'objectifs, mais elle en a également d'autres inavoués, un peu moins honorables, qui sont bel et bien là malgré tout.
Il est évident que les durées d'assurance sont en moyenne relativement différentes d'un secteur professionnel à l'autre, comme les durées pendant lesquelles les assurés percevront effectivement une pension ou une retraite.
On sait, par exemple, qu'il y a cinq à dix ans d'écart dans la durée de perception d'une pension selon que l'on est agriculteur, ouvrier sidérurgiste ou que l'on a passé sa vie comme patron de l'industrie et du commerce ou cadre supérieur.
Dans ce contexte, nous devons nous demander comment les choses évolueront sur la durée.
Nous ne croyons pas en réalité que l'allongement de la durée de cotisation constitue la solution aux problèmes qui se posent à nous en matière de retraites.
Nous pensons, en revanche, que la hausse tendancielle de l'âge de départ à la retraite conduira non pas à figer, mais à réduire la période durant laquelle les assurés pourront bénéficier du versement de leur pension ou de leur retraite.
Nous ne pouvons donc nous priver d'une analyse critique des effets des différentes mesures contenues dans le présent projet de loi, quant aux durées effectives d'assurance et aux durées de perception des retraites.
M. le président. L'amendement n° 315, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« De mener une réflexion sur l'évolution du nombre d'assurés en activité au moment de la liquidation de leur pension de retraite. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. A l'heure actuelle, moins de la moitié des salariés du secteur privé sont encore en activité au moment de la liquidation de leur retraite.
A titre d'exemple, le premier pic de cessation d'emploi pour les hommes se situe à l'âge de 58 ans, soit deux ans avant l'âge pivot de 60 ans.
Cet amendement vise donc à donner au COR le pouvoir de mener une réflexion approfondie sur l'évolution du nombre d'assurés en activité au moment de la liquidation de leur pension de retraite.
Bien entendu, il aurait été plus logique, et opportun, monsieur le ministre, qu'une telle réflexion s'engage au sein du COR avant même la présentation de votre projet de loi. Il ne fait aucun doute que cela nous aurait permis d'avoir à notre disposition, et de mettre à la disposition des Françaises et des Français, un document élaboré au sein d'un établissement pluraliste à vocation impartiale.
Cela aurait également permis d'éviter que ne figurent dans le projet de loi des dispositions injustes et pénalisantes pour les salariés, notamment au regard de la situation de l'emploi et des aménagements qu'il convient de lui apporter.
Vous parlez, monsieur le rapporteur, d'un « scénario volontariste de baisse du chômage ». Or à aucun moment, le II de l'article 6 ne fait référence à l'emploi des femmes - nous aurons l'occasion d'y revenir -, bien que je m'interroge fortement sur le volontarisme que vous semblez vouloir afficher.
Vous nous parlez de l'évolution démographique et de l'apparition d'une pénurie de main-d'oeuvre. Sans doute oubliez-vous que cet état de fait n'est pas nouveau et que rien n'est fait pour y remédier au fond. Regardez ce qui se passe dans les hôpitaux ou encore dans l'hôtellerie-restauration, pour ne prendre que ces deux exemples !
S'agissant du taux de l'emploi des seniors, les mesures que vous proposez n'ont d'autre objet que de liquider le principe du départ à la retraite à 60 ans. En contrepartie, vous vous contentez de lancer un appel aux patrons pour qu'ils fassent preuve de bonne volonté - et l'on sait s'ils en ont ! - et embauchent des salariés âgés de plus de 50 ans.
L'étude qui pourrait être menée par le COR, si cet amendement était adopté, permettrait précisément d'établir un comparatif et une analyse de l'évolution de l'emploi pour les personnes qui approchent de la retraite. C'est pourquoi je vous demande, mes chers collègues, de voter cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 316, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« De mener une réflexion sur l'âge moyen des assurés demandant la liquidation de leur pension de retraite. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. L'amendement que je présente maintenant, et qui est au coeur de la discussion des questions soulevées par le présent projet de loi, porte sur la nécessité de mener une réflexion sur l'âge moyen des assurés demandant la liquidation de leur pension de retraite.
En effet, deux problèmes se posent : d'une part, l'entrée des jeunes sur le marché de l'emploi et, d'autre part, la cessation prématurée d'activité des salariés entre 50 ans et 60 ans.
L'âge moyen des assurés demandant la liquidation de leur pension est une question importante qu'il conviendra que traitent les rapports fournis par le Conseil d'orientation des retraites, qui a déjà apporté des éléments très sérieux.
Si l'on en croit certains des objectifs affichés dans le projet de réforme, il s'agit notamment de faire en sorte que les seniors puissent exercer plus longtemps une activité professionnelle. M. le ministre a rappelé que, si l'on pouvait, par le biais de ce projet de loi, obtenir que l'âge moyen du départ à la retraite passe de 57 ans et demi à 59 ans, ce serait un premier pas, et le texte que nous discutons vise à encourager la remontée du taux d'activité des personnes âgées de 55 ans à 60 ans.
Nous avons déjà eu un débat contradictoire sur ce point. Mais, en ce qui concerne les préretraites, les entreprises ne sont pas prêtes à modifier leur attitude. L'actualité est plus que jamais faite des plans de restructuration, c'est-à-dire des licenciements massifs de personnes qui ont un savoir-faire. Cet état de fait aura des conséquences graves sur le fonctionnement des entreprises, qui, de toute évidence, seront en difficulté lorsque, pour honorer des commandes éventuelles, elles devront former des salariés plus jeunes. De plus, si les plans de restructuration se font plus vigoureux que jamais, les départs pour cause de pénibilité seront massifs.
L'âge moyen de 59 ans pour la fin d'activité apparaît donc comme un objectif qui, de toute évidence, mérite que l'on s'y attarde, et nous souhaitons vivement que la question soit approfondie pour que l'on puisse, notamment, avoir une vision exacte des modifications.
Ce problème sera certainement très difficile à traiter tout au moins ne pourrons-nous en attendre de résultats qu'à moyen terme, car il faudra préalablement mettre en place une politique de formation initiale, certes, mais aussi une politique de formation continue qui porte sur l'ensemble du cursus professionnel et ne soit pas la traduction d'un engagement du bout des lèvres de la part de nombreuses entreprises. On sait notamment que, dans les PME, il est très difficile d'assurer cette formation professionnelle.
M. le président. L'amendement n° 301, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Il donne son avis sur tout projet du Gouvernement concernant notre système de retraites. Cet avis donne lieu à un débat au Parlement. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Comme mes collègues, je continue à faire des propositions concernant les missions du COR.
L'amendement n° 301 vise, dans un souci de démocratie, à favoriser l'information, la concertation et le débat en matière de réforme des retraites en donnant au COR une dimension supplémentaire.
En effet, le Conseil d'orientation des retraites trouve sa raison d'être dans un rôle essentiel, celui d'éclairer le législateur dans son travail de réforme de notre système de retraite pour assurer la consolidation du système par répartition.
C'est pourquoi le texte portant création du COR assigne trois missions principales à cette institution : décrire la situation financière actuelle et les perspectives des différents régimes en tenant compte du dernier état des évolutions économiques, sociales et démographiques ; apprécier les conditions requises pour assurer la viabilité financière à terme des régimes ; veiller à la cohésion du système de retraite par répartition en assurant la solidarité entre les régimes et le respect de l'équité tant entre les retraités qu'entre les différentes générations.
Le Conseil est là pour veiller à ce que les évolutions se déroulent dans une cohérence d'ensemble et dans la continuité. Il est attentif à ce qu'elles soient conformes à ce que les conditions générales autorisent, je pense en particulier à la situation de l'emploi. On a vu en effet que l'intégration de l'hypothèse d'un retour au plein emploi, si elle ne résolvait pas véritablement les difficultés dans le long terme, pouvait à court et moyen terme apporter des éléments de jugement différents.
Le COR veille donc à ce que chacun contribue aux efforts et en bénéficie équitablement. Son rôle est également d'assurer la transparence des évolutions engagées, et ce non seulement à l'égard des acteurs immédiatement concernés, les partenaires sociaux ou les responsables publics amenés à prendre des décisions, mais surtout à l'égard de nos concitoyens, qui doivent pouvoir disposer d'une information librement et largement débattue.
Dans l'accomplissement de cette mission, la composition et la place institutionnelle du Conseil d'orientation des retraites sont ses premiers atouts : de par les mandats et l'expérience professionnelle de ses membres, il est habilité à parler au nom tant du secteur privé que du secteur public, ce qui le met en mesure de veiller à préserver la cohérence d'ensemble du système par répartition.
En effet, sa composition permet au Conseil d'orientation des retraites de représenter l'ensemble des acteurs dont les discussions, les négociations ou les décisions contribueront à garantir l'avenir de notre système de retraite.
Le COR doit donc assurer un rôle de vigie et aura à cette fin une vue d'ensemble sur les perspectives attendues, vision globale qui favorisera la cohérence de la démarche engagée. C'est pourquoi il est important que le COR émette un avis sur les projets de réforme du Gouvernement et que cet avis soit transmis au Parlement.
M. le président. L'amendement n° 317, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les missions du Conseil donnent lieu à des rapports transmis aux présidents de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan de l'Assemblée nationale, aux présidents de la commission des affaires sociales et de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation du Sénat, aux présidents des groupes parlementaires de l'Assemblée nationale et du Sénat. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement vise, dans un souci d'information, à prévoir que les travaux du COR seront portés à la connaissance du plus grand nombre, notamment des parlementaires. Cela doit être particulièrement vrai des travaux portant : sur les conditions requises pour assurer la viabilité financière à terme de ces régimes ; sur la réflexion sur le financement des régimes de retraite et sur le suivi de son évolution ; sur l'information sur le système de retraite et sur les effets des réformes conduites pour garantir son financement ; enfin, sur le suivi de la mise en oeuvre des principes communs aux régimes de retraite et sur l'évolution tant du niveau de vie des actifs et des retraités que de l'ensemble des indicateurs des régimes de retraite, parmi lesquels les taux de remplacement.
La rédaction de l'amendement me paraît suffisament explicite pour que je ne m'attarde pas. (Sourires sur les travées de l'UMP.)
M. Jean-Pierre Fourcade. Très bien !
M. Guy Fischer. Comme vous l'avez noté, j'ai synthétisé mes développements !
M. Jean-Pierre Fourcade. C'était parfaitement clair !
M. Guy Fischer. Vous l'avez remarqué, monsieur Fourcade et je vous en remercie. J'ai pris exemple sur vous ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 318, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le septième alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Ses recommandations ou propositions sont transmises aux présidents de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan de l'Assemblée nationale, aux présidents de la commission des affaires sociales et de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation du Sénat, aux présidents des groupes parlementaires de l'Assemblée nationale et du Sénat. »
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Je vais essayer d'imiter mon ami et camarade Guy Fischer ! (Approbation sur les travées de l'UMP.)
Monsieur le ministre, vous qui parlez de dialogue social, de transparence, de souci de la concertation et de l'échange, vous devriez accepter notre amendement.
Plusieurs axes d'étude et d'analyse doivent être suivis par le COR. Ainsi celui-ci doit notamment décrire les évolutions et les perspectives à moyen et à long terme des différents régimes de retraite, compte tenu des évolutions économiques, sociales et démographiques ; apprécier les conditions requises pour assurer la viabilité financière à terme de ces régimes ; mener une réflexion sur le financement des régimes de retraite et suivre son évolution ; participer à l'information sur le système de retraite et les effets des réformes conduites pour garantir son financement ; suivre la mise en oeuvre des principes communs aux régimes de retraite et l'évolution du niveau de vie des actifs et des retraités.
Nous proposons donc que ces études donnent lieu à des rapports et à des comptes rendus qui soient transmis « aux présidents de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan de l'Assemblée nationale », comme « aux présidents de la commission des affaires sociales et de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation du Sénat ».
Enfin, pour être complets, nous proposons que les parlementaires soient récipiendaires de ces rapports par le biais des présidents de groupe.
Je ne comprendrais pas, monsieur le ministre, que vous opposiez un refus à cet amendement, qui vise à prendre en compte le statut législatif du Conseil d'orientation des retraites tout en précisant, bien sûr, ses missions.
M. le président. L'amendement n° 209, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Dans le huitième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, remplacer les mots : "répondre aux objectifs précédemment définis" par les mots : "faciliter la mise en oeuvre des objectifs et principes énoncés aux articles 1 à 5 de la loi n° ... du ... portant réforme des retraites ainsi qu'aux trois premiers alinéas de l'article L. 161-17". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Le texte actuel de l'article 6 prévoit que le Conseil peut formuler toute proposition permettant de répondre « aux objectifs précédemment définis », rédaction qui fait référence aux missions du Conseil.
La commission, afin de respecter l'esprit de la compétence générale du COR, a tenu à préciser que celui-ci peut formuler toute proposition de nature à faciliter la mise en oeuvre des principes et objectifs essentiels prévus dans la réforme et qui figurent dans le présent projet de loi.
Ce sont, à l'article 1er, la sauvegarde de la retraite par répartition ; à l'article 2, le principe de contributivité et de solidarité ; à l'article 3, l'équité entre les assurés ; à l'article 4, la garantie d'une pension minimale ; à l'article 5, la préservation du temps de travail et des temps de retraite ; enfin, inscrit à l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale, le droit à l'information des assurés.
M. le président. L'amendement n° 319 rectifié, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le troisième alinéa du 5° du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Il s'agit d'un amendement de coordination. L'amendement n° 302, présenté par M. Vergès et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans le neuvième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, après le mot : "parlementaires", ajouter les mots : "dont un ou plusieurs élus de l'outre-mer". »
La parole est à Mme Nicole Borvo.
Mme Nicole Borvo. M. Paul Vergès étant malheureusement absent, je défendrai cet amendement, qui porte sur l'outre-mer.
M. Vergès est intervenu dans la discussion générale et a déjà présenté un amendement pour attirer l'attention sur les craintes que suscite outre-mer le projet de réforme, en particulier dans l'île de la Réunion.
En effet, comme il l'a expliqué, au contraire du déséquilibre prévisible en France métropolitaine, d'ici à 2030, entre le nombre des actifs cotisants et celui des retraités, de nombreuses régions d'outre-mer, l'île de la Réunion en particulier, connaîtront une augmentation très importante de leur population active.
Si la population active devait s'accroître dans les mêmes proportions en France métropolitaine et à la Réunion, comment feriez-vous, monsieur le ministre pour justifier votre réforme ? Il faut se mettre à la place des Réunionnais, à qui l'on va expliquer que le vieillissement de la population et la baisse du nombre des actifs imposent la modification des régimes de retraite alors qu'ils connaissent une situation démographique exactement inverse !
Monsieur le ministre, je ne suis pas fédéraliste, et je pense comme vous que la solidarité s'exerce à l'échelle de l'ensembre de la communauté nationale. Néanmoins, il me paraît intéressant, voire indispensable que la spécificité de la situation démographique d'outre-mer soit prise en compte par le Conseil d'orientation des retraites.
L'amendement de M. Vergès, qui vise à élargir la composition du Conseil d'orientation des retraites aux élus d'outre-mer, a un objet très modeste, et je ne pense pas que vous puissiez vous y opposer.
M. le président. L'amendement n° 303, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'antépénultième alinéa, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le Conseil d'orientation des retraites est assisté par un secrétaire général nommé par le Premier ministre. Le secrétaire général assure, sous l'autorité du président, l'organisation des travaux du Conseil ainsi que l'établissement de ses rapports. »
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Les missions essentielles du COR consistent dans le suivi régulier de notre système d'assurance vieillesse, dans l'établissement, par exemple, de diagnostics, dans la formulation de recommandations et, bien sûr, de propositions de réforme.
L'excellence du travail qu'il a accompli depuis sa création est reconnue de tous. Dans son premier rapport, remis en décembre 2001, il a su démontrer qu'une réflexion sur les retraites ne pouvait pas ne pas être étroitement associée à une autre réflexion portant sur le travail et sur l'emploi.
Le COR est donc un socle qui, loin d'avoir une existence précaire, peut servir de base à notre réflexion et la nourrir dans le long terme, à la condition bien sûr qu'il soit doté de moyens, son efficacité reposant certes sur sa pérennité, mais aussi sur le renforcement de son rôle de laboratoire d'idées.
Il semble donc cohérent, il semble même souhaitable de lui donner les moyens d'assurer ses missions, et tel est l'objet de l'amendement n° 303.
M. le président. L'amendement n° 304, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'antépénultième alinéa, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les crédits nécessaires au fonctionnement du Conseil d'orientation des retraites sont inscrits au budget des services du Premier ministre. »
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Nous nous félicitons de la méthode de fonctionnement du Conseil d'orientation des retraites, que ses membres eux-mêmes ont déterminée dès leur première réunion plénière, le 3 juillet 2000.
Rendue possible par un important travail en réseau, la mobilisation des administrations et autres organismes, par exemple des caisses de retraite ou de la Caisse des dépôts et consignations, est essentielle, car elle contribue largement à alimenter la réflexion du Conseil et à l'identification des thématiques principales autour desquelles ses travaux se sont organisés.
Après la publication de son premier rapport, les travaux du Conseil ont été préparés, tout au long de l'année 2002, par deux groupes de travail, portant l'un sur le thème « Age et travail », l'autre sur le thème « Prospectives et inégalités ».
L'excellence du travail fourni par cette institution, que vous légitimez par la loi, monsieur le ministre - ce que nous approuvons -, suppose malgré tout que les financements soient à la hauteur des investissements matériels et humains et de l'énergie qu'elle consacre à la réalisation des missions qui lui sont confiées.
Nous proposons donc que la logique de financement qui a prévalu à sa naissance soit maintenue : créé par le Premier ministre de la dernière législature, le Conseil d'orientation des retraites a été financé sur les budgets des services du Premier ministre. Inscrivons ce point dans la loi !
M. le président. L'amendement n° 210, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Dans la seconde phrase du dixième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale, après les mots : "de ces administrations", insérer le mot : ", organismes". »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 210 et donner l'avis de la commission sur l'ensemble des amendements.
M. Dominique Leclerc. L'amendement n° 210 est un amendement de précision.
Il est prévu à l'article 6 du projet de loi d'officialiser les relations de travail entre le Conseil et les différents régimes de retraite, tant il est vrai que, si ces relations existent déjà de service à service, la communication institutionnelle d'informations n'était pas inscrite dans la loi.
L'article 6 a donc pour objet d'introduire pour les régimes de retraite et pour l'UNEDIC l'obligation légale de fournir au COR les informations, essentiellement d'ordre statistique, pour lesquelles celui-ci leur adresse une demande. En revanche, il limite aux seules administrations de l'Etat et aux services des pensions le champ des organismes auxquels le COR peut faire connaître préalablement ses besoins en matière statistique.
Il serait bien évidemment dommage que le COR ne puisse communiquer aux caisses des régimes concernés un état prévisionnel des données statistiques dont il pourrait avoir besoin. Le présent amendement vise donc à donner compétence au COR pour faire connaître à l'avance ses besoins aux organismes mentionnés, afin que ceux-ci puissent les intégrer dans leurs études statistiques.
J'en viens à l'avis de la commission sur les amendements qui n'émanent pas d'elle.
Après vous être félicités des bienfaits du COR, dès le premier amendement, vous en demandez la suppression,...
Mme Nicole Borvo. Nous demandons la suppression de l'article, pas celle du COR !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. ... vous l'enterrez !
Vous comprendrez donc que la commission émette un avis défavorable sur l'amendement n° 296.
Malgré tout, après avoir enterré le COR, vous le réanimez à l'amendement n° 306, qui apporte des précisions quant à ses missions.
La commission est favorable à votre suggestion.
Elle est en revanche défavorable à l'amendement n° 297.
Le COR est un organisme d'études ou de propositions. Il n'a pas pour fonction de garantir ou de veiller sur le système de retraite.
L'amendement n° 298 introduit des dispositions trop précises qui font perdre son caractère général à la loi. La commission y est donc défavorable.
En ce qui concerne l'amendement n° 299, la commission est défavorable à la prise en compte de la valeur ajoutée dans les cotisations sociales. Elle a estimé en outre que l'objectif de l'amendement était satisfait par le texte, puisque le COR a une compétence globale de réflexion sur l'ensemble des possibilités de financement des régimes de retraite. Elle s'oppose donc à ce que le conseil devienne un organisme de réflexion sur la réforme des cotisations sociales en général, c'est-à-dire les cotisations familiales, maladie, etc.
L'amendement n° 1096 a été accepté par la commission, car la précision qu'il introduit est intéressante.
L'information générale en matière d'assurance vieillesse est une compétence du ministère des affaires sociales aux termes de l'article R. 112-2 du code de sécurité sociale, qui prévoit que ce ministère prend toutes mesures utiles afin d'assurer l'information générale des assurés sociaux avec le concours des organismes de sécurité sociale. Bien évidemment, la mission du COR s'exerce parallèlement à l'action du ministre. Le COR ne reçoit à ce titre aucune instruction. Cet organisme créé, je le répète, afin de servir d'alibi au gouvernement Jospin, gagne ainsi son indépendance.
La commission est défavorable à l'amendement n° 305, car elle estime qu'il s'agit d'une redondance.
S'agissant de l'amendement n° 300, la commission a estimé qu'il pouvait être intéressant de prévoir dans la loi que le COR rédige un rapport périodique, ce à quoi tend l'amendement n° 317. En revanche, elle ne souhaite pas que le conseil rédige un rapport spécifiquement dédié à l'égalité en fonction de la pénibilité au travail.
Elle a donc émis un avis défavorable sur l'amendement n° 300.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 307, car le COR s'est déjà prononcé.
Quant à l'amendement n° 308, il est satisfait par le 5° de l'article 6, qui prévoit le suivi de l'évolution des niveaux de vie des actifs et des retraités.
La commission a donc émis un avis défavorable sur l'amendement n° 308, comme sur l'amendement n° 309, qui, lui, est satisfait par le 3° de l'article 6.
Sur l'amendement n° 310, la commission émet également un avis défavorable, car le texte prévoit la faculté pour le COR, s'il le souhaite, d'étudier cette piste, à laquelle la commission est par ailleurs fondamentalement hostile.
S'agissant de l'amendement n° 311, rien n'empêche, là encore, le COR de réfléchir sur ce thème. La commission y est donc défavorable.
Les amendements n°s 312 et 313 sont totalement étrangers aux missions du conseil : avis défavorable.
De même, la commission est défavorable à l'amendement n° 314, car rien n'empêche le COR de réfléchir sur ce sujet.
La rédaction de l'amendement n° 315 n'étant, de même que son objet, pas claire, la commission a émis un avis défavorable.
L'amendement n° 316 est satisfait par le 1° de l'article 6 ; la commission a émis un avis défavorable.
Elle a également émis un avis défavorable sur l'amendement n° 301 en raison de son caractère très lourd. Tout projet de loi touchant au système de retraite devrait en effet être préalablement examiné par le COR. Ainsi, il faudrait soumettre les projets de loi de financement de la sécurité sociale à l'avis du COR puisqu'ils comportent un volet sur l'assurance vieillesse.
En revanche, la commission serait prête à accepter l'amendement n° 317, sous réserve d'une rectification : au lieu de la transmission aux présidents des commissions et des groupes des deux assemblées ne serait plus prévue que la transmission au « Parlement », terme plus général.
La commission n'a pas retenu l'amendement n° 318, qu'elle estime superfétatoire. En effet, le COR établit des rapports qui sont transmis au Parlement. En outre, ses avis sont rendus publics.
La commission n'a pas non plus retenu l'amendement n° 302 de notre collègue Paul Vergès, d'une part, parce que, par principe, les parlementaires représentent l'intégralité de la collectivité nationale, qui inclut évidemment l'outre-mer, d'autre part, parce que le distinguo introduit est dangereux, puisqu'il justifierait à l'avenir une représentation à part, dans tous les organismes extraparlementaires, des départements et territoires d'outre-mer.
L'amendement n° 303 relève du décret : l'avis de la commission est défavorable.
Quant à la nomenclature budgétaire, elle ne relève pas du présent projet de loi. La commission est donc défavorable à l'amendement n° 304.
Enfin, elle est défavorable à l'amendement n° 319 rectifié.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le COR a fait un très bon travail...
M. Claude Domeizel. Ah !
M. François Fillon, ministre. ... en permettant notamment l'établissement de ce constat partagé qui n'existait pas il y a quelques années et qui a certainement facilité l'acceptabilité de la réforme.
Le Gouvernement l'admet d'ailleurs depuis le début, et je crois que cela démontre que nous ne sommes pas dogmatiques : nous sommes prêts, nous, à reconnaître ce que nos prédécesseurs ont fait de positif et à l'intégrer dans notre projet.
M. Claude Domeizel. Très bien !
M. François Fillon, ministre. J'ai en revanche souvent le sentiment que l'opposition dénigre l'ensemble de nos propositions alors même qu'elle aurait présenté dans les mêmes termes nombre d'entre elles si elle avait été au pouvoir.
Je crois d'ailleurs que c'est aussi ce qui explique que nous réussissions aujourd'hui à présenter cette réforme sans provoquer, contrairement à ce qui se dit en permanence sur les travées de la gauche, un rejet global de la part de l'opposition.
Mme Nicole Borvo. C'est absolument faux !
M. François Fillon, ministre. Le mouvement social auquel nous avons assisté était certes important, et le Gouvernement le respecte, mais il était strictement limité au secteur public, ce qui est naturel puisque davantage d'efforts lui étaient demandés du fait qu'il n'avait pas connu de réforme depuis très longtemps. Or on sait très bien que si le mouvement s'était généralisé à l'ensemble du secteur privé le Gouvernement n'aurait pas pu conduire la réforme !
Je dis depuis le début que, si nous avons pu obtenir ce résultat, c'est aussi parce que, depuis le Livre blanc de Michel Rocard, en passant par la réforme d'Edouard Balladur, par la tentative ratée de 1995 et par les initiatives prises par le gouvernement de Lionel Jospin, chacun à sa façon a permis - même si certains l'on fait de manière plus significative que d'autres - que ce dossier avance.
La réforme n'est pas celle du COR, et jamais le Gouvernement n'a prétendu que le COR avait proposé un projet clés en main, car ce n'est pas son rôle. En revanche, la réforme s'inspire très largement des orientations du COR. Ce n'est d'ailleurs pas moi qui le dis, c'est la présidente du COR elle-même, Mme Yannick Moreau, qui déclarait à l'AFP, le 2 juin 2003, que « les orientations qui ont été décidées à l'unanimité par le Conseil d'orientation des retraites se retrouvent très largement dans le projet gouvernemental de réforme des retraites », et Mme Moreau citait notamment l'emploi des salariés âgés.
L'article 6 ne revient en rien sur les compétences du COR, bien au contraire, puisque celui-ci continuera non seulement à accomplir les missions pour lesquelles il a été créé, mais aussi à bénéficier de crédits de fonctionnement, et c'est toujours un secrétaire général qui, sous l'autorité de la présidente, assurera l'établissement des rapports.
Toutes les craintes qui viennent d'être évoquées sur l'amputation des compétences du COR n'ont donc strictement aucun sens, mais je voudrais surtout faire remarquer au Sénat que cet article 6 a été voté à l'unanimité par l'Assemblée nationale.
M. Claude Domeizel. C'est vrai !
M. François Fillon, ministre. Or, ici, depuis deux heures, on répète inlassablement sur certaines travées que l'article 6 vise à amputer les compétences du COR : c'est à n'y rien comprendre !
Je souhaite que le COR poursuive sa mission. Je souhaite qu'il soit renforcé par l'arrivée du MEDEF, arrivée que le MEDEF vient d'ailleurs d'annoncer, et je m'en réjouis, car elle permettra à l'ensemble des partenaires sociaux de participer désormais à cette mission.
En conséquence, mesdames, messieurs les sénateurs, dans la mesure où, compte tenu du fait que cet article a été adopté à l'unanimité à l'Assemblée nationale et compte tenu des éléments que je viens d'évoquer, je ne comprends pas qu'autant d'amendements, notamment de suppressions, aient été déposés, je vais vous demander, en vertu de l'article 42, alinéa 7, du règlement du Sénat, de vous prononcer par un seul vote sur l'article 6, en ne retenant que les amendements de la commission, à savoir les amendements n°s 205, 206, 207, 208, 209 et 210.
Mme Nicole Borvo. C'est incroyable !
M. Guy Fischer. Et les nôtres, vous ne les retenez pas ?
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo.
Mme Nicole Borvo. Monsieur le président, compte tenu de ce que vient de dire M. le ministre, non pas sur l'adoption à l'unanimité de l'article 6 à l'Assemblée nationale, mais sur nos amendements, je vous demande une suspension de séance de cinq minutes.
M. le président. Si cela peut assurer ensuite la sérénité des débats, je vous l'accorde avec plaisir, madame Borvo.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures quinze, est reprise à dix-sept heures vingt.)
M. le président. La séance est reprise.
La parole est à M. Jean-Pierre Schosteck, pour explication de vote sur l'article 6, modifié par les amendements n°s 205, 206, 207, 208, 209 et 210.
M. Jean-Pierre Schosteck. Je voudrais dire, au nom de mon groupe, que la demande de vote bloqué formulée par M. le ministre nous paraît tout à fait bienvenue. Voilà plus de deux heures que nous débattons d'un article qui, je le rappelle, a fait l'objet d'un vote unanime à l'Assemblée nationale. Il serait dommage que le Sénat ne suive pas ce bel exemple, alors que, souvent, nous sommes des précurseurs.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis. Très bien !
M. le président. La parole est M. Claude Domeizel, pour explication de vote.
M. Claude Domeizel. Je me suis exprimé tout à l'heure sur la création et le fonctionnement du Conseil d'orientation des retraites. J'ai même, à cette occasion, interpellé M. Leclerc, provoquant son ire, ainsi que celle, mémorable, de M. Chérioux !
M. Jean Chérioux. Ce n'est pas l'interpellation qui m'a mis en colère, c'est ce que vous vous êtes permis de dire !
M. Claude Domeizel. Le 13 novembre 2001, lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale, M. Leclerc avait tenu les propos suivants :
« Après avoir annoncé, à l'automne 1999, des "décisions" du Premier ministre et parce que ces "décisions" se sont transformées en "orientations", il a fallu se résoudre à créer une commission, le Conseil d'orientation des retraites, le COR. Dès lors, le discours tourne en boucle, la concertation des années 2000-2001 succède à la concertation des années 1998-1999. »
Voilà comment M. Leclerc percevait le COR, à l'époque ! (M. le rapporteur s'esclaffe.) Il poursuivait en ces termes :
« Du reste, le rôle que doit jouer cet organisme reste flou : s'agit-il de poser un diagnostic, d'engager un dialogue ou d'élaborer des décisions ? Le rapport annexé au projet de loi utilise l'expression "diagnostic partagé". »
Quand il s'exprimait ainsi à la tribune, M. Leclerc connaissait la teneur du décret créant le Conseil d'orientation des retraites. Or l'article 6 ne fait que reprendre celui-ci ! Je me réjouis qu'il ait changé d'avis depuis 1999, et que la majorité sénatoriale encense aujourd'hui ce qu'elle dénigrait hier !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Nous avons été convaincus par le rapport !
M. Claude Domeizel. J'ai déjà indiqué, au nom du groupe socialiste, quelle était notre position s'agissant du COR. Cette instance nous semble devoir jouer un rôle indispensable au regard de l'évolution future de notre système de retraites, et nous voterons donc sans hésitation l'article 6. (M. Jean-Pierre Schosteck rit.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Je ne voudrais pas allonger le débat, mais nous devons nous mettre d'accord. M. Domeizel a rappelé des propos que j'ai tenus voilà quelques années.
M. Claude Domeizel. Vous étiez dans l'opposition, à l'époque !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Monsieur Domeizel, j'ai eu la courtoisie de vous écouter sans vous interrompre. Il me serait agréable que vous adoptiez la même attitude !
Quoi qu'on en dise, la création du COR a tout de même servi d'alibi au gouvernement d'alors et à sa majorité. J'ai expliqué pourquoi.
Cela étant, on ne peut nous accuser d'immobilisme. Mme Borvo, tout à l'heure, m'a reproché de façon très cinglante de faire preuve d'un dogmatisme effrayant et d'être incapable de changer d'avis.
Mme Nicole Borvo. C'est vous qui avez dit que vous ne changiez jamais d'avis ! Ce n'est pas moi !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Le mot « dogmatisme », de sa part, m'a paru succulent !
Les choses ont évolué, mes chers collègues. Les rapports, les avis sur le COR ont été suivis d'une réforme, et je vous invite, à cet égard, à vous référer à la page 34 de mon rapport :
« A bien des égards, le COR a pu être considéré à l'origine comme une nouvelle commission destinée à justifier une absence de décision. Mais, à l'évidence, il a acquis au fil du temps une véritable crédibilité. » (M. Claude Domeizel approuve.)
Nous avons entendu exprimer des opinions différentes, parfois opposées, et ces confrontations, dans le bon sens du terme, ont permis une certaine maturation. Aujourd'hui, le courage et le sens des responsabilités du Gouvernement permettent à celui-ci de présenter un projet de réforme qui, somme toute, satisfait l'ensemble des membres de la majorité de cette assemblée. Nous avons tout de même le droit de le dire et de voter en conséquence ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - M. le président de la commission des affaires sociales applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo. Monsieur le rapporteur, vous vous contredisez, mais je m'en félicite. Alors que vous aviez affirmé tout à l'heure que vous ne changiez jamais d'avis, vous venez précisément de le faire sur cette question. Dont acte !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Les circonstances ont changé !
Mme Nicole Borvo. Je déplore vraiment que le Gouvernement ait demandé un vote bloqué sur l'article 6.
Pour notre part, nous considérons que la rédaction de cet article restait en deçà de la teneur du décret portant création du COR. Nous pensions d'ailleurs qu'il serait souhaitable d'étendre les compétences de cet organisme, et avons donc formulé des propositions en ce sens, ce qui est bien légitime.
A cet égard, j'observe que M. le rapporteur a émis un avis favorable sur les amendements n°s 306 et 317, qui visent précisément à élargir les compétences du COR. Je regrette toutefois qu'il n'ait pas retenu notre proposition de faire siéger un élu d'outre-mer au sein de ce dernier. En tout état de cause, M. Leclerc nous a quelque peu rassurés en nous affirmant que, en définitive, le COR serait doté des compétences que nous souhaitions lui voir attribuer.
Cela étant, je regrette que M. le ministre, afin sans doute d'accélérer le débat, ait demandé un vote bloqué, sans même retenir les amendements n°s 306 et 317, que M. le rapporteur avait pourtant approuvés. Cela ne correspond pas à ma conception du débat.
Par conséquent, quel qu'ait pu être le vote à l'Assemblée nationale, nous nous abstiendrons, pour notre part, sur l'article 6.
M. Roland Muzeau. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix, par un seul vote, l'article 6, modifié par les amendements n°s 205, 206, 207, 208, 209 et 210.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin
n° 197
:
Nombre de votants | 318 |
Nombre de suffrages exprimés | 295 |
Pour | 295 |
Le Sénat a adopté à l'unanimité.
Article additionnel après l'article 6 (priorité)
M. le président. L'amendement n° 902, présenté par MM. Estier, Domeizel et Chabroux, Mme Printz, M. Krattinger, Mmes Campion et Blandin, M. Godefroy, Mmes San Vicente et Pourtaud, MM. Lagauche et Vantomme, Mme Herviaux, M. Frimat, Mme Cerisier-ben Guiga, M. Mano et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Un rapport est présenté au parlement tous les 5 ans, sur l'égalité devant les retraites en fonction de la pénibilité du travail. »
La parole est à M. Gilbert Chabroux.
M. Gilbert Chabroux. Nous souhaiterions qu'un rapport sur l'égalité devant la retraite en fonction de la pénibilité du travail soit présenté au Parlement tous les cinq ans.
Tous les salariés doivent pouvoir bénéficier d'un traitement équitable au regard de l'espérance de vie et de la retraite, sachant que la pénibilité du travail a une incidence sur l'espérance de vie. Nous voudrions donc que cette notion d'équité soit étudiée de façon plus complète, en prenant en compte les conditions de travail.
Je tiens, à cet instant, à faire état d'une information qui me paraît inquiétante. Je lisais hier dans un grand quotidien que la France régresse en matière de développement humain : alors que la France était créditée du deuxième rang mondial sur ce plan en 1998, elle n'apparaît plus aujourd'hui qu'à la dix-septième place sur 175 pays étudiés.
M. François Fillon, ministre. Oui !
M. Gilbert Chabroux. Monsieur le ministre, vous avez sans doute des réponses, mais je voudrais tout de même développer quelque peu mon propos et exprimer mon inquiétude. (M. le ministre sourit.)
J'évoque en l'occurrence le rapport de 2003 du programme des Nations unies pour le développement. L'indicateur du développement humain retenu par ce programme est fondé sur des paramètres économiques et sociaux : les niveaux atteints en termes d'espérance de vie, d'instruction et de revenu réel corrigé. L'espérance de vie est donc bien prise en compte.
Or votre projet, monsieur le ministre, repose sur un allongement de la durée de cotisation lié au progrès de l'espérance de vie, et notre pays, je le répète, régresse à cet égard. Le haut du classement auquel je faisais référence est dominé, sans surprise, par les pays nordiques, la Norvège, l'Islande et la Suède occupant les trois premières places. Les Etats-Unis sont classés très largement devant nous, à la septième place, ce qui nous paraît un peu plus étonnant, de même que le Japon, qui figure au neuvième rang. Ces deux pays sont devancés par l'Australie, quatrième, et la Belgique, sixième. Même la Grande-Bretagne est mieux classée que nous, au treizième rang.
Par conséquent, monsieur le ministre, je souhaiterais connaître votre réaction devant cette situation, d'autant que, je le rappelle, la France est plutôt mal classée, en termes de conditions de travail, au sein de l'Union européenne. Il me semble que cet état de choses doit nous amener à nous interroger et à tenir beaucoup plus compte, dans ce projet de réforme des retraites, des hypothèques qui pèsent sur l'allongement de l'espérance de vie, ainsi que de la pénibilité du travail.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Votre amendement est satisfait par la rédaction actuelle de l'article 16 ter du projet de loi. En outre, un amendement adopté en commission et qui sera examiné ultérieurement tend à prévoir l'établissement d'un bilan de la prise en compte de la pénibilité du travail au-delà de la seule question des retraites. Il sera dressé sur le fondement d'un rapport de la Commission nationale de la négociation collective.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement demande au Sénat de rejeter cet amendement, pour la raison que M. le rapporteur vient d'indiquer. La rédaction actuelle du projet de loi satisfait en effet l'exigence de M. Chabroux d'une information sur les travaux relatifs à la pénibilité menés par les partenaires sociaux.
Cela étant dit, M. Chabroux m'offre l'occasion d'évoquer un sujet qui est effectivement extrêmement préoccupant et qui transparaît dans le rapport de 2003 du programme des Nations unies pour le développement.
Celui-ci indique que notre pays a reculé au classement relatif à ce que l'on appelle le développement humain sur au moins trois critères : l'allongement de la durée de la vie, l'instruction et le revenu réel.
Ce rapport est fondé sur des données relatives à l'année 2001. En 1998, la France était au deuxième rang...
M. Gilbert Chabroux. C'est la faute du gouvernement de l'époque ! (Sourires.)
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ne concluez pas trop vite !
M. François Fillon, ministre. Je n'ai pas dit cela, monsieur Chabroux, je ne vais pas jusque-là ! Je constate simplement que les données nous classent au dix-septième rang pour 2001.
Qu'est-ce que cela signifie ? Je ne pense pas que nous ayons régressé en termes d'espérance de vie ou de revenu réel ; ce recul signifie que les autres pays progressent plus vite que nous. S'il en est ainsi, c'est à mon sens parce qu'ils sont plus courageux que nous dans les réformes de structure visant à adapter le modèle social. La vérité, c'est que notre modèle social est en train de craquer de toutes parts parce qu'il n'a pas été suffisamment adapté ces vingt dernières années.
Le rapport que M. Chabroux a cité montre que des pays qui sont parfois stigmatisés, sur certaines travées, comme des bastions d'un réformisme et d'un libéralisme sauvages, sont finalement mieux placés que nous, quand on examine les choses de façon objective, en matière de niveau de vie, de richesse par habitant, de satisfaction des besoins collectifs.
Cela doit nous interpeller, non pas pour nous conduire à copier les exemples, mais pour nous forcer à engager les réformes nécessaires afin d'adapter notre modèle social. C'est exactement ce que le Gouvernement vous demande de faire avec ce projet de loi sur les retraites. (Applaudissements sur plusieurs travées de l'UMP.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 902.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. « Art. 7. - I. - L'article L. 134-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La commission de compensation est consultée pour avis sur tout projet de modification des règles affectant les mécanismes de compensation entre régimes de sécurité sociale. Ces avis sont rendus publics. »
« II. - Dans l'avant-dernier alinéa de l'article L. 134-5 du même code, les mots : "par le dernier" sont remplacés par les mots : "à l'avant-dernier".
« III. - A la fin de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 134-5-1 du même code, les mots : "par le dernier alinéa de l'article L. 134-1" sont remplacés par les mots : "à l'avant-dernier alinéa de l'article L. 134-1". »
La parole est à Mme Michelle Demessine, sur l'article.
Mme Michelle Demessine. La compensation est un principe que nous défendons puisqu'il est au coeur de l'idée de solidarité qui, elle-même, est le fondement de notre système de protection sociale. Elle permet, en effet, de répondre de manière juste aux évolutions inégales des différents régimes de retraites. Mais elle peut aussi ouvrir la voie à toutes les facilités, et donc à tous les abus.
La Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, la CNRACL, a souvent été mise à contribution alors que ce régime démographique était assez favorable.
Si la compensation est un mécanisme justifié, la surcompensation relève du hold-up.
Dans ce cadre, je tiens à souligner que le projet de décentralisation qui organise le transfert de personnels aux collectivités locales ne sera pas sans conséquences sur leurs régimes de retraite. Il inquiète d'ailleurs beaucoup les élus, car il chargera d'autant plus la barque des collectivités locales.
Nous ne remettons pas en cause la compensation, mais elle aurait tout à gagner à s'effectuer dans la plus grande transparence. Lui donner le maximum de publicité permettrait d'éviter les abus et de renforcer la solidarité, valeur qui doit être maîtrisée par tous nos concitoyens. Source de justice, la solidarité est légitime et s'impose à tous. Personne ne peut la contester parce qu'elle est à la base d'une vie commune en société.
A l'inverse, ne pas vouloir donner un maximum de publicité à des choix de compensation entre différents régimes de retraite, s'ils sont légitimes, risque d'introduire le doute et la confusion dans l'esprit des salariés concernés.
En outre, restreindre les dispositifs de compensation à un échange d'experts permet de limiter le débat à des cercles de spécialistes et de technocrates. La solidarité n'est pas une affaire de spécialistes. Elle doit être accessible parce qu'elle est au centre de notre organisation sociale.
La compensation doit donc s'accompagner d'une véritable transparence. La rédaction de cet article n'est pas satisfaisante dans la mesure où le Parlement n'est pas saisi pour débat sur l'avis rendu par la commission de compensation.
Veut-on vraiment développer le sens de la solidarité chez nos concitoyens ou veut-on effectuer, dans le secret des cabinets, des transferts entre différents régimes ? Un débat au Parlement sur les choix de compensation opérés serait pourtant la manière de témoigner de votre véritable attachement à la solidarité.
C'est pourquoi, à notre sens, la consultation de la commission de compensation n'est pas suffisante pour légitimer les choix qui seront faits. Ces derniers manqueront de transparence. Un débat au Parlement donnerait tout à la fois la transparence réelle et l'autorité requise à ces mécanismes de la solidarité. Nous ne pouvons donc nous satisfaire de cette disposition en l'état.
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, sur l'article.
M. Claude Domeizel. Personne ne comprendrait que je n'intervienne pas sur l'article 7, qui prévoit la disparition de la surcompensation. Or, cette surcompensation touche particulièrement non pas la CNRACL, mais les finances des collectivités locales. En effet, la CNRACL n'est pas autre chose que la caisse des agents des collectivités locales, c'est-à-dire les communes, les départements, les régions, ainsi que des établissements publics et des hôpitaux.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Vous parlez de l'article 7 bis, monsieur Domeizel, mais vous pouvez le faire dès à présent !
M. Gilbert Chabroux. Cela nous fera gagner du temps ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
M. Claude Domeizel. La CNRACL a servi très souvent de variable d'ajustement dans des situations difficiles. Cela a commencé en 1980, quand les hôpitaux ont connu des difficultés de financement. Le moyen qui a été trouvé, M. Fourcade doit s'en souvenir, a consisté, compte tenu des réserves importantes de la CNRACL, à diminuer de 18 % à 6 % la cotisation patronale des hôpitaux et des collectivités locales. Cela a été une première manière d'affaiblir les réserves de la CNRACL.
En 1985, a été créée, pour un an, une surcompensation entre les régimes spéciaux, moyen habile pour puiser des sommes importantes dans les réserves de la CNRACL au profit de l'Etat. Chaque année, depuis, les finances des collectivités locales et des hôpitaux versent indirectement, par le biais de la CNRACL, près de 9 milliards de francs pour la seule surcompensation, auxquels, je le souligne au passage, il faut ajouter 9 milliards de francs au titre de la compensation généralisée.
Cette mesure, instituée par la loi de finances pour 1986, a été reconduite par tous les gouvernements qui se sont succédé. Depuis des années, le conseil d'administration de la CNRACL, au nom des hôpitaux et des collectivités locales, demande la suppression de cette surcompensation, qui met cette caisse dans des difficultés insurmontables. A la suite des prélèvements considérables opérés - je rappelle qu'ils sont décidés par décrets, et non par le Parlement - la CNRACL est obligée aujourd'hui d'emprunter pour équilibrer son propre budget, ainsi que sa trésorerie.
Je suis certain de parler au nom tant du conseil d'administration de la CNRACL, que de tous les responsables d'hôpitaux, de tous les maires et de tous les présidents de conseil général ou de conseil régional de notre pays, en me réjouissant de l'abrogation de la surcompensation.
La suppression de cette surcompensation doit intervenir le plus rapidement possible. Il est en effet urgent que cette surcompensation disparaisse, même si, on le sait, cette disparition se serait produite compte tenu de l'évolution démographique. J'aurai l'occasion d'intervenir plus tard pour demander d'appuyer un peu sur l'accélérateur.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, sur l'article.
M. Jean-Pierre Fourcade. M. Claude Domeizel est intervenu sur l'article 7 bis, qui vise à supprimer progressivement la surcompensation. Je n'ai rien à ajouter, sinon pour rappeler que c'est un gouvernement socialiste, dans lequel l'un de nos collègues était alors ministre du budget, qui a très fortement majoré le taux de la surcompensation. Puisque nous sommes en train d'échanger un certain nombre de souvenirs historiques, il faut le rappeler, car tous les gouvernements depuis 1985 ont usé et abusé de la surcompensation.
M. Claude Domeizel. Je l'ai dit !
M. Jean-Pierre Fourcade. S'agissant de la compensation, je souhaite formuler une observation, qui me paraît essentielle à ce stade du débat. Il est tout à fait naturel qu'une compensation démographique intervienne entre les régimes qui couvrent une large population et ceux qui sont en perte de population, comme le régime des invalides de la marine et le régime des mines. Il est normal que, comme vous le souhaitez, monsieur le ministre, une commission suive l'évolution de ces différents régimes.
Mais ce que Mme Demessine a oublié de dire tout à l'heure - et qu'il est important de dire car, en l'occurrence, il faut un débat sur la vérité, et non pas sur les mythes ou sur les souvenirs historiques -, c'est que le vrai problème de la compensation vient des bénéficiaires des régimes spéciaux, notamment ceux de la SNCF et de la RATP, dont les personnels sont descendus dans la rue et ont bloqué les transports pendant un certain nombre de semaines. En effet, les avantages et les prestations dont ils bénéficient et qui sont supérieurs à ceux du régime général sont financés par l'ensemble de la collectivité.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Bien sûr !
M. Jean-Pierre Fourcade. Aussi, je formulerai deux souhaits, monsieur le ministre.
D'abord, je souhaite que la commission de compensation établisse un tableau simple permettant de savoir quelles sont les recettes et les dépenses et quels sont les systèmes de couverture des différents régimes qui bénéficient de la compensation ou la surcompensation.
Ensuite, je souhaite que l'on compare les prestations versées par les différents régimes. A mon avis, il faudrait commencer par harmoniser les prestations avant de traiter les problèmes de compensation. Mais on ne peut pas, dans cette assemblée, parler des problèmes de compensation ou de surcompensation en omettant le fait que les régimes les plus coûteux à l'heure actuelle sont des régimes d'entreprises publiques fortement syndicalisées et qui passent très rapidement à l'action pour protéger leur système de retraite.
Telle est la question que devrait examiner en priorité la commission prévue à l'article 7.
M. Max Marest. Il faut refaire une nuit du 4 août !
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 211, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit cet article :
« I. - Le chapitre IV du titre Ier du livre Ier du code de la sécurité sociale est complété d'une section 5 ainsi rédigée :
« Section 5
« Commission de compensation
« Art. L. 114-3. - Il est institué auprès du ministre en charge de la sécurité sociale une commission de compensation, présidée par un magistrat désigné par le premier président de la Cour des comptes, comprenant des représentants des régimes de sécurité sociale et des représentants des ministres en charge de la sécurité sociale et du budget.
« La commission de compensation est consultée pour avis préalablement au versement des acomptes et à la fixation des soldes de la compensation prévue à l'article L. 134-1.
« Elle valide les informations quantitatives fournies par les régimes pour servir de base aux calculs.
« Tout projet de modifications des règles affectant les mécanismes de compensation entre régimes de sécurité sociale fait l'objet d'un avis de la commission, qui est transmis au Parlement.
« Un décret détermine les modalités d'application du présent article. »
« II. - En conséquence, dans le dernier alinéa de l'article L. 134-1 du code de la sécurité sociale, les mots : "d'une commission présidée par un magistrat désigné par le premier président de la Cour des comptes et comprenant notamment des représentants des régimes de sécurité sociale" sont remplacés par les mots : "de la commission de compensation prévue à l'article L. 114-3". »
Le sous-amendement n° 1123, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Au deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 211 pour l'article L. 114-3 du code de la sécurité sociale, après les mots : "consultée pour avis préalablement", supprimer les mots : "au versement des acomptes et". »
Le sous-amendement n° 1124, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Au troisième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 211 pour l'article L. 114-3 du code de la sécurité sociale, remplacer le mot : "valide" par le mot : "examine". »
L'amendement n° 903, présenté par MM. Estier, Domeizel et Chabroux, Mme Printz, M. Krattinger, Mmes Campion et Blandin, M. Godefroy, Mmes San Vicente et Pourtaud, MM. Lagauche et Vantomme, Mme Herviaux, M. Frimat, Mme Cerisier-ben Guiga, M. Mano et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit cet article :
« L'article L. 134-1 du code de la sécurité sociale est complété par les dispositions suivantes :
« La compensation spécifique entre régimes spéciaux de retraite sera supprimée progressivement, avant le 1er janvier 2005, selon un dispositif défini par le COR.
« Les modalités d'équilibre financier jusqu'ici assurées par le mécanisme de la surcompensation seront intégrées dans la compensation généralisée dont les règles seront révisées par le COR. Outre les évolutions démographiques, elles prendront en compte, pour chaque régime : l'état des réserves financières, le patrimoine immobilier, la suppression des transferts financiers liés aux transferts des droits des assurés changeant de régime en cours de carrière, lorsqu'ils sont prévus par les règles de coordination inter-régimes.
« Pour la mise en oeuvre de ces dispositions, la commission de compensation sera consultée et son avis publié. De même, elle le sera pour avis sur tout projet à venir de modification des règles de compensation. Ces avis seront rendus publics. »
L'amendement n° 320, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit la dernière phrase du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 134-1 du code de la sécurité sociale :
« Ces avis sont rendus publics, transmis au Parlement et donnent lieu à un débat en son sein. »
L'amendement n° 321, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Compléter in fine le I de cet article par les mots suivants : ", transmis par son Président au Parlement et donnent lieu à un débat en son sein". »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 211.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Deux de nos collègues viennent de s'exprimer recpectivement sur la surcompensation et la compensation. Après avoir auditionné le président de la commission de compensation, nous nous sommes rendu compte que notre système de solidarité tenait notamment par ces mécanismes.
La compensation démographique demande aux régimes près de 12 milliards d'euros au titre de la solidarité, alors que les règles de cotisations et de prestations de ces régimes sont totalement différentes. Cela conduira à deux actions : il faut une convergence, au nom de la justice sociale ; en attendant, la commission de compensation doit faire preuve de plus de transparence et doit disposer de moyens accrus pour améliorer, modifier ces mécanismes de compensation, afin de prendre en compte de plus en plus ces critères. C'est pourquoi je vous invite à relire la page 82 du rapport écrit. Surtout, après avoir constaté ces disparités, la commission des affaires sociales propose, par cet amendement n° 211, une rédaction plus réaliste.
L'échec de l'instauration d'un régime unique de retraite pour tous - et cela aurait été l'idéal - a rendu nécessaire au fil du temps que des compensations financières viennent assurer le financement des régimes à démographie favorable en provenance de régimes à démographie favorable « jeunes ». Au fil du temps, l'augmentation du nombre de pensionnés par rapport au nombre de cotisants rendait difficile la survie de certains régimes - vous venez de le dire -, au premier chef celui des exploitants agricoles.
L'article 7 prévoit de renforcer le rôle de la commission de compensation. Ce renforcement s'est avéré nécessaire du fait des critiques récurrentes entourant les mécanismes de détermination des règles de calcul et des montants versés. La commission a toutefois estimé que ce renforcement méritait d'être complété car la compensation est, c'est évident, indispensable à la survie des régimes. Les transferts financiers de compensation qui sont supérieurs à 11,5 milliards d'euros doivent préserver leur légitimité, et donc être entourés de garanties sérieuses.
L'amendement prévoit de renforcer la commission de compensation dont le rôle aujourd'hui est minime, cette commission ne se prononçant que sur les soldes résultant des opérations. Pour cela, il est proposé de prévoir que les modifications des règles de la compensation devront recevoir son aval, d'assurer la qualité des informations servant de base au calcul des transferts, qui n'ont aujourd'hui qu'un caractère rétrospectif, et de fournir une base légale au versement des acomptes, qui en est aujourd'hui dépourvu.
La compensation, mécanisme qu'il est nécessaire de préserver, tout en le simplifiant, doit être réformée en accord avec le régime. L'article 7 et le présent amendement devraient faciliter une telle réforme.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour présenter les sous-amendements n°s 1123 et 1124.
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement souhaite modifier l'amendement de la commission sur deux points.
D'abord, au deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement de la commission pour l'article L. 114-3 du code de la sécurité sociale, il propose de supprimer les mots « au versement des acomptes ». En effet, il ne semble pas réaliste de demander une consultation préalable de la commission de compensation avant chaque versement d'acompte. Autant la consultation de la commission de compensation s'impose sur les modifications des règles servant de base de calcul, autant l'avis automatique préalable au versement des acomptes paraît peu opérationnel.
Ensuite, au troisième alinéa du texte proposé par l'amendement de la commission pour l'article L. 114-3 du code de la sécurité sociale, qui prévoit que la commission de compensation valide les informations quantitatives fournies par les régimes pour servir de base au calcul, le Gouvernement propose de remplacer le mot « valide » par le mot « examine ». En effet, il n'est pas juridiquement de la compétence de la commission de compensation de valider les données ; il lui appartient simplement de les examiner.
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, pour présenter l'amendement n° 903.
M. Claude Domeizel. Cet amendement a pour objet de supprimer la surcompensation avant le 1er janvier 2005, afin d'éviter les difficultés que j'ai évoquées tout à l'heure et qui s'aggravent d'année en année.
Outre les évolutions démographiques, il faudrait bien sûr prendre en compte, pour chaque régime, l'état des réserves financières, le patrimoine immobilier et la suppression des transferts financiers liés aux transferts des droits des assurés changeant de régime en cours de carrière, lorsqu'ils sont prévus par les règles de coordination interrégimes. En effet, certains régimes qui bénéficient de la surcompensation détiennent des patrimoines immobiliers. Il est logique d'en tenir compte ; cela n'a pas été le cas juqu'à présent.
De même, il faut tenir compte des transferts qui peuvent intervenir pour régulariser les situations lorsque les assurés changent de régime en cours de carrière, ce qui rejoint l'idée qui sous-tend la notion de durée de carrière. La commission de compensation serait consultée, bien sûr, pour la mise en oeuvre de la suppression de la surcompensation.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Demessine, pour présenter l'amendement n° 320.
Mme Michelle Demessine. Mes chers collègues, il est dangereux, sur le plan démocratique, d'accepter la réduction des pouvoirs du Parlement. Nous proposons donc que les avis rendus par la commission de compensation sur tous projets de modification des règles affectant les mécanismes de compensation entre régimes de sécurité sociale soient non seulement rendus publics, comme le prévoit cet article 7 du projet de loi, mais également transmis au Parlement afin de donner lieu à un débat en son sein.
Si j'ai bien compris l'esprit et la lettre du rapport présenté par notre collègue M. Dominique Leclerc, la majorité sénatoriale partage notre souci d'aller plus loin dans la transparence des travaux de la commission de compensation.
Vous indiquez, monsieur Leclerc, que cette absence de transparence est apparue très nettement à l'occasion de la réflexion engagée à l'automne par l'administration sur la pertinence de la compensation en cours.
Vous soulignez également que « la procédure fut conduite par l'administration avec une vélocité qui souleva de nombreuses protestations des différents protagonistes ».
Vous ajoutez, monsieur le rapporteur, et c'est particulièrement intéressant : « Si la proposition faite par le présent article constitue une volonté louable de transparence, votre rapporteur constate néanmoins qu'elle ne répond pas, dans son ampleur, à l'enjeu que constitue aujourd'hui le système des compensations, à savoir des transferts financiers s'élevant à 11,5 milliards d'euros.
« Du fait de leur nature réglementaire, ils n'apparaissent à aucun moment dans la discussion par le Parlement en loi de financement des budgets des organismes de sécurité sociale. En effet, les modifications précitées, considérées comme "réglementaires" par nature, avaient été traitées en "tendancielles" par le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale. »
Il est, selon vous, un moyen de donner une traduction institutionnelle à votre inquiétude.
Notre amendement permet que le Parlement puisse débattre de cette importante question qu'est la compensation.
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour défendre l'amendement n° 321.
M. Thierry Foucaud. Nous souhaitons une nouvelle fois améliorer la transparence des travaux de la commission de compensation et, par là même, le débat démocratique sur ceux-ci. Nous estimons également que le fait de saisir le Parlement de ces travaux renforcera les compétences de la commission de compensation.
Dans son rapport, M. le rapporteur évoque le mépris avec lequel l'administration, le Gouvernement traitent la commission de compensation.
Je me permets de citer la lettre de Bernard Zuber, président de ladite commission, écrite le 26 septembre dernier au directeur du budget :
« J'ai pris connaissance, de manière incidente, des dispositions qui ont été arrêtées, dans le cadre de la préparation du projet de loi de finances initial pour 2003, visant à tenir compte de l'ensemble des transferts en provenance du fonds de solidarité vieillesse pour déterminer les flux de compensation entre les divers régimes de retraite.
« Je suis particulièrement surpris que des mesures aussi importantes n'aient donné lieu à aucune information préalable et donc à aucune discussion sur le fond entre vos services et la commission de compensation ou, pour le moins, avec son président.
« La commission de compensation se réunissant le 8 octobre prochain pour se prononcer sur les premiers calculs de la compensation 2001, je l'informerai, bien entendu, de la situation ainsi créée et vous ferai part des réactions enregistrées.
« Sur le fond, je vous rappelle la position constante de la commission : elle estime que, dans son principe, la compensation ne peut fonctionner dans la durée et en équité qu'en tenant compte d'une prestation de référence définie comme la prestation moyenne des régimes concernés, excluant les éléments pris en charge financièrement par un tiers au profit d'une partie de ces régimes. En particulier, les versements remboursés par le FSV au titre des majorations pour enfants doivent donc en être exclus.
« Concernant la décision évoquée, qui conduira à tenir compte de l'ensemble des transferts en provenance du FSV, celle-ci comporte, selon les indications dont je dispose actuellement, des répercussions particulièrement lourdes sur le régime général, obérant gravement les résultats de la Caisse nationale d'assurance vieillesse. Elle affectera donc le montant des versements annuels revenant actuellement au fonds de réserve de retraite.
« L'audit des mécanismes de compensation que j'ai fait entreprendre n'est pas encore achevé, Toutefois, les propositions d'aménagement ou de réforme, appuyées sur des simulations financières, en cours de préparation, en liaison avec le conseil d'orientation des retraites, devraient être disponibles d'ici à la fin de l'année.
« Comme je l'ai déjà indiqué dans un précédent courrier à propos d'une modification de portée bien plus modeste, il aurait été préférable que ces propositions puissent être examinées et discutées dans un climat entièrement serein.
« Je regrette que la décision prise puisse être analysée comme donnant un caractère unilatéral et discriminatoire au réglage des mécanismes complexes de la compensation dont la pérennité, souhaitée par la plupart des parties prenantes, paraît mise en doute. »
La lecture de cette lettre me permet de faire l'économie d'une démonstration pour justifier cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. En ce qui concerne les deux sous-amendements, la commission des affaires sociales a bien entendu la demande du Gouvernement.
A propos des acomptes, qui n'ont pas de base légale aujourd'hui, je comprends qu'il soit difficile d'assurer une consultation préalable.
Il me semble par ailleurs nécessaire de donner à la commission un pouvoir de contrôle sur ces fameuses données servant de base au calcul.
Je rectifie donc l'amendement n° 211 de la commission en ce sens.
M. le président. Je suis donc saisi de l'amendement n° 211 rectifié, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, et ainsi libellé :
« Rédiger comme suit l'article 7 :
« I. - Le chapitre IV du titre premier du livre premier du code de la sécurité sociale, est complété d'une section 5 ainsi rédigée :
« Section 5
« Commission de compensation
« Art. 114-3. - Il est institué auprès du ministre en charge de la sécurité sociale une commission de compensation, présidée par un magistrat désigné par le premier président de la Cour des comptes, comprenant des représentants des régimes de sécurité sociale et des représentants des ministres en charge de la sécurité sociale et du budget.
« La commission de compensation est consultée pour avis sur le versement des acomptes et la fixation des soldes de la compensation prévue à l'article L. 134-1.
« Elle contrôle les informations quantitatives fournies par les régimes pour servir de base aux calculs.
« Tout projet de modification des règles affectant les mécanismes de compensation entre régimes de sécurité sociale fait l'objet d'un avis de la commission, qui est transmis au Parlement.
« Un décret détermine les modalités d'application du présent article. »
« II. - Dans le dernier alinéa de l'article L. 134-1 du code de la sécurité sociale, les mots : "d'une commission présidée par un magistrat désigné par le premier président de la Cour des comptes et comprenant notamment des représentants des régimes de sécurité sociale", sont remplacés par les mots : "de la commission de compensation prévue à l'article L. 114-3. »
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. L'amendement n° 903 tend à rédiger l'article 7 d'une manière qui est incompatible avec l'amendement de la commission.
Mme Demessine et M. Foucaud ont rappelé, dans leur argumentaire, la position exprimée par la commission qui figure aux pages 102 et 103 du rapport. L'amendement n° 211 rectifié répond pleinement, me semble-t-il, aux observations que vous avez formulées : la commission de compensation joue son rôle, l'administration fiscale aussi, tout comme le Gouvernement et le Parlement.
Vous l'aurez compris au travers notamment des interventions de MM. Domeizel et Fourcade, il importe aujourd'hui de crédibiliser plus encore le rôle de compensation de cette commission, de lui donner certains moyens et aussi organiser son fonctionnement pour que, au vu des événements passés, nous ne soyons pas confrontés aux problèmes que nous avons connus.
La commission est donc défavorable à l'amendement n° 903.
Quant aux amendements n°s 320 et 321, ils sont satisfaits.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement accepte bien volontiers de retirer ses deux sous-amendements au profit de l'amendement n° 211 rectifié de la commission.
S'agissant de l'amendement n° 903, le Gouvernement n'y est pas favorable.
M. Domeizel connaît trop bien ce sujet pour ne pas savoir que, après tant d'années d'hésitation, tenir l'engagement de supprimer la surcompensation constitue un pas considérable, qu'il n'a pas été facile de franchir, d'ailleurs.
Il n'est évidemment pas possible de supprimer cette surcompensation avant le 1er janvier 2005. C'est totalement irréaliste et je sais gré à M. Domeizel d'avoir usé d'une grande modération pour présenter l'amendement n° 903, car cela m'évite de lui opposer l'argumentaire que je me préparais à faire.
Le Gouvernement ne peut pas être favorable à l'amendement n° 320 pour deux raisons.
Tout d'abord, c'est la première fois que la transparence est instaurée dans ce domaine complexe de la compensation entre les régimes de sécurité sociale et, à cet égard, l'amendement n'apporte rien de plus.
Ensuite, le Parlement débattra bien évidemment chaque année de la situation des régimes de sécurité sociale concernés par la compensation à l'occasion de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Je considère que la demande exprimée par les auteurs de cet amendement est satisfaite. Je souhaite donc que ce texte soit retiré ou, à défaut, qu'il ne soit pas adopté.
La même argumentation vaut pour l'amendement n° 321.
M. le président. Les sous-amendements n°s 1123 et 1124 sont retirés.
Je mets aux voix l'amendement n° 211 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 7 est ainsi rédigé et les amendements n°s 903, 320 et 321 n'ont plus d'objet.
Article additionnel après l'article 7 (priorité)
M. le président. L'amendement n° 212, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les intérêts financiers produits au 31 décembre 2003 par les sommes versées par les régimes de retraite au titre des compensations prévues à l'article L. 134-1 du code de la sécurité sociale et consignés sur un compte de la Caisse des dépôts et consignations sont versés au fonds mentionné à l'article L. 135-6 dudit code. »
« II. - L'article L. 135-7 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 11° Les versements effectués par la Caisse des dépôts et consignations en application du I de l'article... de la loi... du... portant réforme des retraites. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Toujours le thème de la compensation, les sommes qui sont versées par les régimes créditeurs pour compenser les régimes débiteurs sont consignées auprès de la Caisse des dépôts et consignations et produisent des intérêts.
Nous nous sommes interrogés sur le propriétaire de ces produits financiers qui, aujourd'hui, s'élèvent à environ 60 millions d'euros. En principe, ces fonds étaient la propriété des régimes. Aujourd'hui, la commission propose qu'ils soient versés au fonds de réserve pour les retraites. Tel est le sens de l'amendement n° 212.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement est favorable à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 212.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 7.
M. le président. « Art. 7 bis. - Les dispositions des deuxième et troisième alinéas de l'article L. 134-1 du code de la sécurité sociale cessent d'être applicables au titre des exercices postérieurs au 1er janvier 2012. Les versements effectués à partir de l'exercice 2003 sont progressivement réduits à cette fin dans des conditions prévues par décret. »
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, sur l'article.
Mme Marie-Claude Beaudeau. L'article 7 bis nouveau a été introduit à l'Assemblée nationale à l'unanimité. Il prévoit l'extinction progressive du système de la compensation spécifique.
En ce qui nous concerne, nous qui avons inlassablement dénoncé le scandale que représente ce dispositif communément dénommé « surcompensation », instauré dans la loi de finances de 1986, cet article 7 bis nous contente en partie.
Le rythme d'extinction retenu par l'Assemblée nationale limite grandement notre enthousiasme. L'article 7 bis ne prévoit en effet la suppression totale de la surcompensation que pour 2013 et il laisse à un décret le soin de fixer la réduction annuelle du taux de surcompensation qui est actuellement de 30 %. Si j'ai bien compris, le rapporteur de l'Assemblée nationale a suggéré une diminution de 3 % par an.
En fait, monsieur le ministre, l'article 7 bis n'est que le résultat d'un constat réaliste de la majorité gouvernementale : la CNRACL, qui est la véritable « vache à lait » de la surcompensation, ne pourra bientôt plus être ponctionnée de la même façon qu'aujourd'hui du fait de la dégradation prévisible de son équilibre démographique,
En 2009, le solde entre les cotisations qu'elle perçoit et les prestations qu'elle verse devrait même devenir négatif. Mais notre collègue M. Domeizel reviendra certainement sur cette question.
D'ici là, monsieur le ministre, de grâce ! cessez le pillage des ressources de la CNRACL, c'est-à-dire de l'hôpital public et des collectivités locales.
M. François Fillon, ministre. Je vous remercie du conseil, mais c'est nous qui le faisons !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je rappelle que la surcompensation est un mécanisme de transferts s'effectuant uniquement entre les régimes particuliers sur la base de règles de calcul présentées par la commission des affaires sociales elle-même dans son rapport comme « contestables ».
La surcompensation ne suit en rien un principe de solidarité comme le reconnaît la commission. Selon le rapport, la surcompensation est « un artifice permettant la captation des réserves de la CNRACL au profit d'autres régimes », ce qui permet bien entendu à l'Etat de « réaliser une économie sur le montant de la subvention d'équilible qu'il verse à ces régimes. »
Je me félicite de lire ces lignes dans vos écrits, chers collègues de la majorité. Vous ne nous répondiez pas ainsi autrefois !
Je précise toutefois que, depuis 1992, ce sont, non pas seulement les réserves de la CNRACL qui ont été vidées par ce prélèvement, mais l'ensemble des excédents de cette caisse. Le prélèvement s'est élevé à 1,3 milliard d'euros en 2002, s'ajoutant, d'ailleurs, à une ponction de même niveau au titre de la compensation simple, dont on pourrait discuter la légitimité, notamment à l'égard des régimes des non-salariés.
Cette situation contraint la CNRACL, depuis trois ans, à recourir à l'emprunt (M. Claude Domeizel approuve), c'est-à-dire à payer des intérêts au profit des marchés financiers, pour assurer le versement des pensions, ce qui est, avouez-le, tout à fait scandaleux, d'autant que l'excédent de cotisation de ce régime atteint 2 milliards d'euros.
En bref, ce sont les fonctionnaires hospitaliers et territoriaux, c'est-à-dire les hôpitaux et l'assurance maladie, les collectivités locales et les contribuables locaux, qui payent à la place de l'Etat, voire, si les mécanismes de compensation simple étaient plus justes, à la place des régimes privés et du patronat.
Nous connaissons tous la situation financière très difficile des hôpitaux et de nombreuses collectivités territoriales. Je rappelle que la surcompensation coûte 800 millions d'euros par an à l'hôpital public.
Le maintien de la surcompensation est inacceptable, inacceptable évidemment dès 2003 et pas seulement pour 2012.
Malgré tout, chers collègues, nous voterons l'article 7 bis.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Ah !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Ce sera d'ailleurs peut-être l'un des seuls articles du projet de loi que nous voterons.
Quoi qu'il en soit, monsieur le ministre, nous serions heureux que vous nous indiquiez vos intentions quant au rythme d'extinction de la surcompensation. Pour notre part, nous continuons à demander la suppression immédiate de ce mécanisme profondément injuste.
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, pour explication de vote sur l'article.
M. Claude Domeizel. L'article 7 bis vise à faire en sorte que la surcompensation soit supprimée d'ici à 2012. Pour notre part, nous proposons que cette suppression intervienne d'ici à 2005. En conséquence, étant d'accord sur le principe, mais trouvant que son application sera trop lointaine, nous nous abstiendrons.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Vous êtes très exigeant, vous souhaitez mettre fin immédiatement à un mécanisme qui existe depuis dix-huit ans.
Faut-il rappeler que ce sont MM. Emmanuelli et Le Garrec qui ont institué la surcompensation en 1985 ? Il faut reconnaître qu'un de nos collègues en poste de 1991 à 1994 a réussi l'exploit de doubler le montant de la compensation qui, depuis cette époque-là, est stable.
Il est proposé une décroissance de 3 % étalée sur une dizaine d'années. Je crois que c'est une solution raisonnable et je pense qu'il serait intéressant de connaître l'avis de M. le ministre sur le sujet.
M. Jean Chérioux. Cela aurait fait un bon usage pour la cagnotte !
M. Claude Estier. Il n'y a jamais eu de cagnotte !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre. En effet, le Gouvernement souhaite bien abaisser progressivement, sur un rythme de l'ordre de 3 % par an, le taux de la surcompensation. Ce processus est déjà engagé, puisque, en 2003, le taux a été abaissé à 27 %, et que, pour 2004, le décret qui est en préparation fixera 24 %. Cela constitue déjà une avancée considérable par rapport à la situation qui prévalait ; chacun ne peut que s'en réjouir.
Mme Nelly Olin. Très bien dit !
M. le président. Je mets aux voix l'article 7 bis.
(L'article 7 bis est adopté.)
Article additionnel après l'article 7 bis (priorité)
M. le président. L'amendement n° 904 rectifié, présenté par MM. Estier, Domeizel et Chabroux, Mme Printz, M. Krattinger, Mmes Campion et Blandin, M. Godefroy, Mmes San Vicente et Pourtaud, MM. Lagauche et Vantomme, Mme Herviaux, M. Frimat, Mme Cerisier-ben Guiga, M. Mano et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Après l'article 7 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'Etat s'engage à publier, avant le 26 septembre 2003, les décrets relatifs aux compensations inter-régimes liés à l'exécution du plan d'équilibre financier de la CNRACL. »
La parole est à M. Claude Domeizel.
M. Claude Domeizel. Avant d'en venir à l'amendement lui-même, permettez-moi, monsieur le président, de dire quelques mots sur l'article 7 bis, au nom de tous les chefs d'établissements hospitaliers, de tous les maires, de tous les présidents de conseils généraux et de conseils régionaux.
L'historique qui a été fait par M. le président de la commission des affaires sociales est exact. Si vous voulez, mes chers collègues, je peux citer les noms de tous les ministres du budget qui se sont succédé.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Chiche !
M. Alain Fischer. Ce serait très intéressant !
M. Claude Domeizel. C'est en 1985, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 1986, que la surcompensation a été créée pour un an. Elle a ensuite été reconduite par tous les gouvernements. En 1986, d'ailleurs, ce n'était plus M. Emmanuelli...
M. Jean Chérioux. C'est quand même lui qui a commencé !
Un sénateur de l'UMP. C'était M. Juppé.
M. Claude Domeizel. Oui, c'était M. Juppé. Il y eut ensuite M. Charasse, M. Malvy, M. Sarkozy. Je les ai presque tous rencontrés.
La responsabilité est largement partagée !
Lorsque je dis qu'il faut supprimer la surcompensation immédiatement, je le dis, je le répète, au nom de tous les maires, de tous les conseillers généraux...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Bien sûr !
M. Claude Domeizel. En tout cas, ils sauront que vous voulez attendre 2012.
J'en viens à l'amendement n° 904 rectifié.
Le 26 septembre 2002, le Gouvernement a annoncé des mesures remettant en cause la compensation et la surcompensation.
Pour équilibrer les comptes de la CNRACL, qui est en difficulté parce qu'on lui prélève un tiers de ses ressources en faveur des autres régimes, trois mesures ont été envisagées.
La première est d'augmenter de 0,5 % par an le taux de cotisation que versent les communes, les départements, les régions et les hôpitaux.
La deuxième consiste à diminuer le taux de la surcompensation de 0,4 %.
La troisième mesure consiste à introduire dans le calcul de la compensation les chômeurs qui ne comptaient pas auparavant, et, pour cela, on a, d'une part, chargé la contribution de la CNAV et, d'autre part, diminué la contribution de l'Etat et celle de la CNRACL.
La première mesure a déjà été mise en application : un décret a été pris, aux termes duquel les cotisations ont augmenté de 0,5 %. En revanche, pour les deux autres mesures, les décrets d'application ne sont toujours pas prêts ; tout le monde attend.
Ce qui est certain, c'est que, si ces décrets ne sont pas pris au 31 décembre 2003, la CNRACL mettra pour ainsi dire la clé sous la porte. Rassurez-vous, elle paiera les pensions de ses ressortissants, mais elle ne paiera pas la surcompensation et la compensation parce qu'elle sera dans l'incapacité de le faire, à moins que quelqu'un n'ait l'idée saugrenue de la faire emprunter.
Notre amendement vise donc tout simplement à inscrire dans la loi que les décrets en cause doivent être publiés. Comme l'engagement du Gouvernement datait du 26 septembre 2002, j'ai proposé, comme terme à la parution de ces décrets, le 22 septembre 2003. Dans ces conditions, le Gouvernement disposerait d'environ deux mois pour prendre ses dispositions.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Cet amendement constituant une véritable injonction au Gouvernement, la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. La jurisprudence du Conseil constitutionnel est tout à fait constante à cet égard : le législateur ne peut pas faire d'injonction au Gouvernement. Je demande donc le rejet de cet amendement.
Cela étant, les décrets attendus par M. Domeizel paraîtront très rapidement ; ils sont en préparation.
Je voudrais insister sur le fait que le meilleur moyen d'assurer la pérennité de la CNRACL est de mettre en oeuvre la réforme que nous proposons. En effet, l'allongement de la durée de cotisation va permettre de sécuriser la CNRACL, en réglant sur le long terme les problèmes qui se posaient aux collectivités locales et aux hôpitaux.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. Cet amendement a suscité une discussion intéressante sur une question que tout le monde considère comme importante.
Parlant sous le contrôle du président de la CNRACL et du président du comité des finances locales, je peux dire que le problème des transferts entre les régimes obligatoires d'assurance vieillesse est un problème récurrent depuis de nombreuses années. Depuis l'instauration de ce processus, il n'a fait que croître et embellir.
En fait, un régime de retraite, celui de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, a été particulièrement mis à contribution sous tous les gouvernements successifs pour venir au secours de régimes dont on organisait la dégradation au travers de suppressions massives d'emplois ou d'activités.
L'effet s'est immédiatement fait sentir sur les comptes de la CNRACL, comme l'ont montré les multiples débats que nous avons eus sur ce sujet, dans cet hémicycle, depuis de nombreuses années.
Une part non négligeable de la hausse des impôts locaux est due à cette progression constante de la surcompensation, dont le niveau a atteint près de 2 milliards d'euros tant pour les collectivités locales que pour les établissements hospitaliers.
Il est vrai que la CNRACL était une victime toute désignée pour combler les difficulté ou du moins y faire face.
Il faut reconnaître que les effets de la décentralisation de 1982-1983 ont induit une sensible augmentation des effectifs de salariés en activité au sein des équipes des collectivités locales. C'était aussi l'époque du boom démographique. D'ailleurs, on peut parler d'un véritable développement de l'emploi local.
Il y a aujourd'hui plus de 1,8 million de fonctionnaires dans les collectivités locales et ces fonctionnaires ne partiront à la retraite qu'à partir des années 2015-2020.
En fait, le ratio démographique du régime, qui était particulièrement bon, s'est progressivement dégradé. La montée en puissance des transferts de compétences, d'une part, et des frais de personnel, d'autre part - dont la surcompensation est un exemple typique - ont occasionné les plus grandes difficultés au régime.
Il était inéluctable que la situation financière de la CNRACL soit désormais marquée par des insuffisances chroniques de trésorerie, mettant en péril l'équilibre durable du régime.
Si l'on ajoute aux difficultés financières celles qui proviennent de la lenteur mise dans la prise des décisions réglementaires indispensable - mais M. le ministre vient de nous rassurer à cet égard -, on ne peut s'attendre qu'à une détérioration supplémentaire de la situation.
Pour ces raisons, nous voterons l'amendement n° 904 rectifié.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Fourcade. Puisqu'on a fait allusion à mes fonctions, je ne puis rester muet. Je vais donc formuler trois brèves observations.
Premièrement, je félicite le Gouvernement d'avoir eu le courage d'engager progressivement la réduction de la surcompensation.
Bien des gouvernements ont en effet « calé » devant cette difficulté, et il faut savoir gré à M. le ministre des affaires sociales d'avoir obtenu un arbitrage favorable à cette opération.
Deuxièmement, il va de soi que je ne voterai pas l'amendement n° 904 rectifié, car il ne nous est pas permis de donner d'injonction au Gouvernement et qu'en outre les décrets seront publiés.
Troisièmement, je voudrais faire part de mon étonnement. Il est en effet un peu curieux de voir ceux-là mêmes qui demandent la suppression immédiate de la surcompensation pour que la CNRACL soit remise à flot soutenir les revendications des ressortissants des régimes subventionnés par la CNRACL.
Le bons sens républicain commande, selon moi, que l'on s'occupe d'abord de la remise en équilibre des régimes subventionnés.
Tous ceux qui s'occupent de finances locales connaissent le coût élevé de la CNRACL. Ce que nous réclamons, c'est que l'on s'attaque surtout aux régimes budgétivores qui consomment les crédits de la CNRACL et que personne n'a cités explicitement.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. Jean-Pierre Fourcade. Il serait logique d'avoir une position équilibrée sur la réduction des prélèvements de la CNRACL et sur la remise en état des régimes de nos amis des transports.
Mme Michelle Demessine. Lesquels ? (Sourires.)
M. Jean-Pierre Fourcade. J'y viens : de la RATP et de la SNCF. On ne peut, mes chers collègues, défendre une chose et son contraire ! (M. le président de la commission des affaires sociales applaudit.) C'est cela qui altère la crédibilité de l'action politique aux yeux de l'opinion publique.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 904 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. « Art. 8. - L'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 161-17. - Toute personne a le droit d'obtenir, dans des conditions précisées par décret, un relevé de sa situation individuelle au regard de l'ensemble des droits qu'elle s'est constitués dans les régimes légalement obligatoires de retraite.
« Les régimes et les services de l'Etat chargés de la liquidation des pensions sont tenus d'adresser tous les cinq ans un relevé de la situation individuelle de l'assuré au regard de l'ensemble des droits qu'il s'est constitués dans les régimes légalement obligatoires de retraite. Les conditions d'application du présent alinéa sont définies par décret.
« Dans des conditions fixées par décret, à partir d'un certain âge et aux étapes importantes de sa vie active, chaque personne reçoit communication d'une estimation globale du montant des pensions de retraite auxquelles les durées d'assurance ou les points qu'elle totalise lui donnent droit, à la date à laquelle la liquidation pourra intervenir, eu égard aux dispositions législatives, réglementaires et conventionnelles en vigueur.
« Afin d'assurer ce service aux futurs retraités, il est institué un groupement d'intérêt public doté de la personnalité morale et de l'autonomie financière composé de l'ensemble des organismes assurant la gestion des régimes mentionnés au premier alinéa ainsi que des services de l'Etat chargés de la liquidation des pensions en application du code des pensions civiles et militaires de retraite. Les dispositions de l'article 21 de la loi n° 82-610 du 15 juillet 1982 d'orientation et de programmation pour la recherche et le développement technologique de la France sont applicables à ce groupement d'intérêt public. La mise en oeuvre progressive des obligations définies par le présent article sera effectuée selon un calendrier défini par décret en Conseil d'Etat.
« Pour la mise en oeuvre des droits prévus aux trois premiers alinéas, les membres du groupement mettent notamment à la disposition de celui-ci, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat, les durées d'assurance et périodes correspondantes, les salaires ou revenus non salariés et le nombre de points pris en compte pour la détermination des droits à pension de la personne intéressée.
« Pour assurer les services définis au présent article, les organismes mentionnés au présent article sont autorisés à collecter et conserver le numéro d'inscription au répertoire national d'identification des personnes physiques des personnes concernées, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. »
La parole est à Mme Brigitte Luypaert, sur l'article.
Mme Brigitte Luypaert. Le système actuel de nos retraites souffre d'un déficit de transparence. Le débat qui s'est déroulé depuis plusieurs mois sur les retraites a dévoilé que les Français connaissaient peu ou pas la réalité de leurs droits à la retraite.
Aussi cet article reconnaît-il aux assurés le droit de connaître de manière globale leurs droits au regard de l'ensemble des régimes de retraite obligatoires, de base et complémentaires, et éventuellement d'en obtenir la rectification.
Il prévoit en outre l'élargissement aux régimes complémentaires du pré-calcul de la pension actuellement circonscit au régime de base. Un groupement d'intérêt public rassemblant l'ensemble des régimes permettra d'assurer, avec toute la souplesse nécessaire, la mise en oeuvre du droit à l'information.
Cet article va dans le sens d'une plus grande transparence. Aussi, le groupe UMP le votera. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Annie David, sur l'article.
Mme Annie David. L'article 8 est relatif au « droit des assurés à l'information », qu'il a, nous dit-on, pour ambition de renforcer.
Qui pourrait être hostile à une extension de ce droit ? Toutefois, celui-ci s'avère largement théorique. En effet, aux termes d'une jurisprudence très restrictive de la Cour de cassation, le droit à l'information, consacré depuis 1978 par l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale, est considéré comme satisfait dès lors qu'une information d'ordre général, y compris par voie de journal interne, est délivrée.
Cette situation est évidemment préjudiciable aux salariés. L'information apparaît d'autant plus nécessaire que, au contraire de ce qu'une communication spécieuse martèle depuis des semaines, le présent projet de loi induit une régression des droits à la retraite en France. Une réelle information des salariés leur permettrait évidemment de mesurer les dangers que fait planer ce projet.
En vérité, ce droit à l'information est un droit conditionné puisqu'il dépend d'une action de l'assuré lui-même, et il y a là une régression par rapport au texte actuellement en vigueur.
On sait que, en fait d'information, il s'agit d'inciter le salarié à s'engager dans une démarche d'adhésion à des fonds de pension ou de capitalisation.
Car tel est le véritable objectif de l'information préalable, qui n'aura d'ailleurs, si l'on se réfère à la rédaction proposée par la commission des affaires sociales, qu'une valeur de renseignement. Les masques tombent, au Sénat !
Le rapport de la commission est en effet particulièrement instructif : notre rapporteur regrette que l'information soit devenue un droit dans le texte de l'Assemblée nationale, déplorant particulièrement qu'elle aboutisse dans l'avenir à réduire le champ d'intervention des compagnies privées chargées d'opérer des reconstitutions de carrière aux fins, bien sûr, de proposer des produits d'épargne complémentaires.
Nous voilà fixés sur les intentions !
Mais cela n'est guère de nature à nous étonner quand on se souvient que le débat à l'Assemblée nationale avait fait la joie des compagnies d'assurance, qui sont intervenues de façon assez choquante, à grand renfort de publicité, pour vanter leurs produits en matière de retraite complémentaire.
Si l'on se rappelle en outre la récente dépêche de l'AFP dans laquelle la CFE-CGC met en garde contre l'épargne retraite mise en place par le texte de l'Assemblée nationale, qui aboutit à « mettre la main dans l'engrenage des fonds de pension », les dispositions de cet article ne peuvent décidément plus faire illusion.
C'est pourquoi les sénateurs de mon groupe sont hostiles à cet article, qui n'est nullement destiné à défendre les droits des salariés, mais qui vise plutôt à soutenir les intérêts des assurances privées.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Masseret, sur l'article.
M. Jean-Pierre Masseret. Cet article traite du droit à l'information pour les assurés. Chaque assuré pourra désormais obtenir, s'il le demande, un relevé de ses droits à la retraite de base ainsi qu'à la retraite complémentaire.
Afin que les assurés bénéficient d'une information rapide et de qualité sur les paramètres des différents régimes de retraite, un groupement d'intérêt public, composé de l'ensemble des régimes de retraite, est institué.
Sur le principe de l'information, on ne peut qu'être favorable. Il s'agit d'ailleurs d'une disposition qui fait suite aux conclusions d'un groupe de travail du COR. Elle constitue en outre la reconnaissance législative d'une pratique en usage dans les caisses du régime général et dans les régimes spéciaux.
En fait, le premier instrument d'une bonne information aurait pu être la lettre que M. le Premier ministre a adressée à tous nos concitoyens. A ce sujet, nous avons déjà fait part de notre sentiment : cette missive relève davantage de la propagande que de l'information.
Ce qui nous a fait particulièrement bondir, à la lecture de ce « courrier », c'est l'emploi qui y est fait du mot « équité ». A vrai dire, il ne paraît pas recouvrir la même réalité selon qu'il est employé par nous ou par des représentants de la majorité actuelle. Cela n'a, au demeurant, rien de surprenant, car on touche finalement là au coeur de la différence entre la droite et la gauche.
En effet, quand l'équité est évoquée dans ce texte, il faut plutôt entendre « sacrifices imposés toujours aux mêmes ». Pour nos concitoyens les mieux traités, le mot « équité » signifie la plupart de temps allégements fiscaux, qu'il s'agisse de l'impôt sur le revenu ou de l'ISF.
J'en reviens à l'article 8. Le principe de l'information est bon, je l'ai dit, mais il ne faut pas que la recherche de cette information soit à la charge de l'assuré. En effet, on le sait bien, les citoyens n'ont pas toujours les moyens de l'obtenir.
Certes, selon l'adage bien connu, « nul n'est censé ignorer la loi ». Mais, vu le nombre de lois qui sont votées par le Parlement et de décrets qui sont pris par le Gouvernement, il faudrait plutôt dire désormais : « nul n'est capable de connaître la loi » !
Nous considérons par conséquent qu'il convient de rendre cette information automatique, à l'instar de ce que fait l'IRCANTEC, le régime de retraite des agents non titulaires de l'Etat. Si ce droit à l'information était ainsi généralisé, il ne s'agirait plus seulement d'un beau principe ; ce serait une réalité. Cela permettrait aux salariés de connaître le montant de leur pension de retraite, de mesurer les points qu'ils devront racheter pour espérer bénéficier d'une pension correcte.
Vous vous félicitez de cette avancée, monsieur le ministre. A cet égard, vous avez même accepté que la transmission de l'information sur la situation individuelle au regard des droits à pension se fasse de façon quinquennale. De même, un amendement voté par les socialistes à l'Assemblée nationale impose le précalcul aux étapes importantes de la vie active.
Bref, quand on entre un peu dans le détail, on constate que, si les principes sont bons, une lecture politique de chacun des articles de cette réforme montre que celle-ci les vide de leur portée.
Nous craignons que ce qui est mis en oeuvre aujourd'hui, au-delà des discours, n'ouvre mécaniquement la voie à la capitalisation. C'est une illustration de la formule : « Y penser toujours, n'en parler jamais ». La méthode est habile !
D'ailleurs, monsieur le ministre, à l'Assemblée nationale, lors de la discussion sur l'amendement n° 4618, vous avez bien précisé : « L'article 8 offre aux Français une plus grande liberté quant au choix de retraite et leur propose d'avancer un peu plus vers la retraite à la carte. »
Mais comment faut-il comprendre, finalement, cette « retraite à la carte » ? Notre crainte est que cette notion ne débouche, obligatoirement ou mécaniquement, sur la retraite par capitalisation.
Le Gouvernement donne à croire qu'il va se préoccuper du sort qui sera fait aux seniors alors même que la réforme, nous l'avons suffisamment répété depuis le début de l'examen de ce texte, leur est défavorable. Ne serait-il pas plus efficace d'imposer au MEDEF une charte ou un code de bonne conduite vis-à-vis des plus âgés ?
J'évoque ici le sous-amendement proposé par le ministre et qui vise à poser le principe d'une conférence annuelle tripartite pour les plus de cinquante-cinq ans, ainsi que le principe d'un rapport gouvernemental dans cinq ans, sur les mesures mises en oeuvre pour les plus de cinquante ans. A travers ce sous-amendement, le Gouvernement n'hésite pas à expliquer aux plus anciens qu'ils coûtent cher à leur entreprise, qu'ils sont moins productifs.
En résumé, cette réforme est hautement critiquable et doit être, par conséquent, rejetée.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Je n'avais pas du tout prévu d'intervenir à ce moment du débat, mais je viens d'entendre certaines choses que je ne peux laisser passer sans réagir.
Monsieur Masseret, vous mettez sur le même plan le droit à l'information des assurés que cet article vise à améliorer et la lettre que le Premier ministre a adressée à tous les Français. Cela n'a rien à voir !
Par cette lettre, le Premier ministre a voulu informer le pays quant au contenu de l'ensemble de la réforme que le Gouvernement propose. Il était normal qu'il en situe bien les enjeux avant que cette réforme soit soumise au Parlement.
Vous nous expliquez ensuite qu'il convient de faire une lecture politique de cet article. Or, ce qui est ici en question, c'est le droit personnel, dont chaque assuré peut se prévaloir vis-à-vis de l'organisme dont il dépend, de savoir en toute transparence, alors qu'il approche la fin de sa vie active, quelles seront les conditions exactes de sa retraite. De grâce, ne cherchez pas à introduire de la politique là-dedans !
Quant à Mme David, elle a affirmé que l'information allait être confiée au secteur marchand. Relisez le rapport, ma chère collègue ! A la page 113, il est indiqué : « En effet, dès lors que l'information globale des assurés figure au nombre des prestations dues par les régimes légaux, la fourniture de ces prestations contre rémunération ne saurait être légale. » C'est clair et net ! N'insinuez donc pas le contraire !
Ce service sera gratuit, mais il y a, bien sûr, des délais de mise en oeuvre du dispositif. La mise en place du groupement d'intérêt public perdra du temps.
Il ne faut pas oublier non plus que les différentes caisses ont déjà des modalités d'information assez différentes. Les informations que délivre la caisse nationale d'assurance vieillesse des proofessions libérales, par exemple, sont extrêmement précises.
Laissons donc les choses se mettre graduellement en place et ne faisons pas, d'entrée de jeu, une lecture politique de cet article. Je pense que nous devons tous avoir les mêmes lunettes pour le lire ! Le rapport de la commission tout comme l'engagement du Gouvernement me semblent clairs en la matière.
Il s'agit de créer une obligation générale pour le régime de base et pour les régimes complémentaires, chacun étant libre ensuite de donner éventuellement plus d'informations.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, sur l'article.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Le rapporteur de l'Assemblée nationale, commentant cet article, estimait qu'il devait permettre aux assurés de « prendre à temps les décisions nécessaires afin de préparer leur retraite en toute connaissance de cause ». On peut traduire ce propos ainsi : avoir un aperçu de leur bas niveau de retraite pour qu'ils soient incités à constituer des fonds de pension.
Au-delà de cet élément déjà évoqué par mes collègues du groupe CRC, je souhaite attirer votre attention, monsieur le ministre, sur la question du cumul de la pension de réversion et de la rente accordée au titre des accidents du travail, dont bénéficient certaines veuves de victimes du travail. Les modalités de cumul de cette pension et de cette rente, qui évoluent suivant l'âge de la veuve concernée, soulèvent en effet directement et de façon très problématique la question de l'information des assurés.
A plusieurs reprises, et depuis plusieurs années, j'ai été saisie, probablement comme d'autres collègues, par des veuves de victimes de l'amiante, bénéficiaires d'une rente accidents du travail et d'une pension de réversion, servie, entre autres, par le Fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'Etat.
L'article 31 du décret du 24 septembre 1965, modifié par un décret du 18 décembre 1986, prévoit que le cumul d'une pension d'invalidité et d'une rente accidents du travail est autorisé dans la limite de 100 % des émoluments de base lorsque la pension est accordée en raisons d'infirmités ou de maladies résultant de l'accident ayant donné lieu à la rente. Il s'agit, vous l'avez compris, de salariés qui meurent alors qu'ils sont encore en activité.
Lorsque la veuve est âgée de 55 ans, le montant de la rente qu'elle perçoit passe de 30 % à 50 % du salaire de son époux, entraînant une minoration de sa pension et de son éventuelle majoration pour enfants.
Or la régularisation de sa situation intervient le plus souvent au bout de plusieurs mois, en général près d'un an, donnant lieu au versement d'un trop-perçu dont le remboursement est ensuite réclamé à la veuve.
Pour ces veuves de victimes de l'amiante, il s'agit dès lors de reverser à l'organisme qui, pendant plusieurs mois, n'a pas baissé le niveau de leur pension comme il l'aurait dû, une somme s'élevant souvent à plusieurs milliers d'euros.
Pour ces femmes, dont les époux sont si précocement et brutalement décédés, c'est une nouvelle difficulté, s'ajoutant à leur peine, à celle de leurs enfants, mais aussi aux problèmes financiers importants que la mort de leur mari a entraînés.
Si nul n'est censé ignorer la loi, nul organisme public n'est non plus censé agir dans l'illégalité plusieurs mois durant et demander ensuite aux assurés de payer pour ses erreurs. Monsieur le ministre, il n'est pas décent de demander à ces veuves le remboursement de débets d'une telle ampleur, dont ces femmes ne sont en rien responsables. Leur bonne foi ne peut être mise en cause. Il s'agit d'une lenteur très préjudiciable dans le traitement et la régularisation de leur dossier.
M. le médiateur de la République, à qui j'ai soumis plusieurs dossiers, travaille depuis de nombreux mois au règlement de ces situations. Il m'a confirmé leur caractère récurrent. Ainsi, les services de M. Stasi sont-ils saisis de très nombreux dossiers de ce type, dans lesquels on demande aux veuves - celles de travailleurs victimes de l'amiante, mais aussi d'autres - de payer en raison d'un problème de traitement trop lent de leur dossier par l'administration.
Il n'est pas normal que la lenteur de certaines administrations dans l'harmonisation de leurs informations sur ces situations entraîne de graves difficultés financières pour ces personnes, dont, je le répète, la bonne foi ne peut être mise en cause.
Monsieur le ministre, je ne vous demande évidemment pas de m'apporter une réponse aujourd'hui, mais je souhaite que vos services examinent de près cette affaire. Je sais d'ailleurs que M. le médiateur de la République vous en a saisi.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. En quoi cela concerne-t-il l'article 8 du projet de loi ?
M. le président. Je suis saisi de neuf amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune, mais pour la clarté du débat, je les rappellerai successivement.
L'amendement n° 323, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
La parole est Mme Annie David.
Mme Annie David. J'ai, en fait, déjà défendu cet amendement en intervenant sur l'article, mais je souhaite répondre à M. le rapporteur.
Vous me dites, monsieur Leclerc, qu'il sera illégal de faire payer les informations données aux assurés. Soit, mais rien n'empêchera ces sociétés privées d'en profiter pour faire la promotion des services qu'ils proposent à titre onéreux, voire de proposer aux assurés, surtout aux plus jeunes, d'adhérer à tel fonds de pension ou à tel organisme de capitalisation qu'elles contrôlent.
M. François Fillon, ministre. Et alors ?
M. le président. L'amendement n° 324, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale :
« Le groupement d'intérêt public mentionné au troisième alinéa de cet article est tenu d'adresser périodiquement, à titre de renseignement, à ses ressortissants, les informations nécessaires à la vérification de leur situation au regard des régimes dont ils relèvent. La périodicité de cette information devra être, en tout état de cause, de durée inférieure au délai de prescription des créances afférentes aux cotisations sociales. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Cet amendement vise à maintenir, tout en tenant compte des modifications apportées par le projet de loi, l'information en direction des assurés sans attendre que ceux-ci se manifestent.
« Les caisses et services gestionnaires de l'assurance vieillesse sont tenus d'adresser périodiquement, à titre de renseignement, à leur ressortissants, les informations nécessaires à la vérification de leur situation au regard des régimes dont ils relèvent. La périodicité de cette information devra être, en tout état de cause, de durée inférieure au délai de prescription des créances afférentes aux cotisations sociales ».
Tel est le texte actuel de l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale que l'article 8 tend à modifier dans un sens, nous dit-on, favorable aux assurés.
Aux termes de la rédaction qui a été approuvée par l'Assemblée nationale, il est désormais prévu au premier alinéa de cet article que « toute personne a le droit d'obtenir, dans des conditions précisées par décret, un relevé de sa situation individuelle au regard de l'ensemble des droits qu'elle s'est constitués dans les régimes légalement obligatoires de retraite ».
Cette rédaction pose problème. En effet, elle implique que l'information est délivrée non pas spontanément, mais à la demande du salarié lui-même. Ce faisant, on risque d'introduire une réelle inégalité entre les salariés. En effet, dans un contexte où la déshumanisation et l'individualisation de l'accès aux documents et aux services publics pénalisent les personnes qui ont le plus besoin de renseignements sur l'étendue de leurs droits, on peut craindre que ce droit à l'information ne reste que largement théorique pour nombre de personnes.
De plus, il faudrait que la dimension pédagogique de cette information soit garantie, que l'information soit claire et accessible, sans nécessiter des décryptages complexes, pour ne pas renforcer cette inégalité.
Il convient donc, en le précisant dès le début de l'article 8, d'envisager une information automatique, et non pas sur demande du salarié, de la situation de celui-ci au regard de ses droits à la retraite.
Notre amendement vise à obliger le GIP, dont le Gouvernement propose la création, à « adresser périodiquement, à titre de renseignement, à ses ressortissants, les informations nécessaires à la vérification de leur situation au regard des régimes dont ils relèvent ».
Avec une telle rédaction, nous préservons la pratique des caisses de retraites qui informent par anticipation et de façon automatique les salariés de leurs droits.
Nous prévoyons, en outre, une périodicité régulière, qui soit inférieure au délai de prescription des créances afférentes aux cotisations sociales, afin que cette information repose sur des bases renouvelées permettant une information régulière et réelle sur les droits à la retraite.
Tel est le sens de l'amendement que le groupe communiste républicain et citoyen vous demande d'adopter, compte tenu de l'amélioration réelle qu'il apporterait au regard de la consécration d'un droit effectif à l'information.
M. le président. Les amendements n°s 213 et 214 sont présentés par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 213 est ainsi libellé :
« A la fin du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale remplacer les mots : "les régimes légalement obligatoires de retraite" par les mots : "les régimes de retraite légalement obligatoires". »
L'amendement n° 214 est ainsi libellé :
« A. - Au début de la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale, avant les mots : "et les services de l'Etat", insérer les mots : "de retraite légalement obligatoires". »
« B. - Dans la même phrase du même alinéa, remplacer les mots : "tous les 5 ans", par les mots : "périodiquement, à titre de renseignement,". »
« C. - A la fin de la même phrase du même alinéa, remplacer les mots : "dans les régimes légalement obligatoires de retraite" par les mots : "dans ces régimes". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Au préalable, monsieur le président, je voudrais faire lecture à Mme David de l'article L. 377-2 du code de la sécurité sociale : « Sera puni d'une amende de 3 750 euros et, en cas de récidive dans le délai d'un an, d'une amende de 7 500 euros, tout intermédiaire convaincu d'avoir offert ou fait offrir ses services moyennant émoluments convenus à l'avance à un assuré social en vue de lui faire obtenir le bénéfice des prestations qui peuvent lui être dues. » Sans commentaire.
Mme Annie David. Cet article n'a aucun rapport avec ce que j'ai dit !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. J'en viens à la présentation des amendements.
L'amendement n° 213 vise à une coordination, et l'amendement n° 214, à une précision.
M. le président. L'amendement n° 905, présenté par MM. Estier, Domeizel et Chabroux, Mme Printz, M. Krattinger, Mmes Campion et Blandin, M. Godefroy, Mmes San Vicente et Pourtaud, MM. Lagauche et Vantomme, Mme Herviaux, M. Frimat, Mme Cerisier-ben Guiga, M. Mano et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Dans le troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale, remplacer les mots : "à partir d'un certain âge", par les mots : "à compter de 50 ans". »
La parole est à M. Jean-Pierre Masseret.
M. Jean-Pierre Masseret. M. le rapporteur m'a reproché de faire un amalgame entre le droit à l'information prévu à l'article 8 et la démarche de communication décidée par M. le Premier ministre. Or il n'y a pas d'ambiguïté dans mon esprit.
L'article 8 vise effectivement le droit à l'information de l'assuré social, mais à travers le mot « information », mon esprit a dérivé vers l'initiative du Premier ministre. Les deux choses sont effectivement indépendantes politiquement et juridiquement, mais j'ai éprouvé le besoin de qualifier de « communication » ce qui n'était pas une information.
Pour bien comprendre l'amendement n° 905, il faut se reporter au texte de l'article 8 adopté par l'Assemblée nationale, notamment au troisième alinéa du texte proposé pour l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale, où l'on peut lire : « Dans des conditions fixées par décret, à partir d'un certain âge et aux étapes importantes de sa vie active, chaque personne reçoit communication d'une estimation globale du montant des pensions... »
L'expression « à partir d'un certain âge » dans un texte normatif nous choque. Pour évoquer l'humour auvergnat, cela me rappelle furieusement l'histoire que racontait Fernand Raynaud dans laquelle un adjudant demandait combien de temps il fallait pour refroidir le fût du canon. Deux jours, une heure, trois quarts d'heure, répondait-on, et, à la fin, Fernand Raynaud disait : « Mais non, un certain temps ! » Cela faisait rire tout le monde.
Il ne faudrait donc pas qu'avec cette expression nous fassions rire tout lecteur de ce texte normatif. Peut-être l'Assemblée nationale n'acceptera-t-elle pas de prendre en compte cet amendement, et je peux le comprendre ; mais de grâce, n'acceptez pas cette expression qui n'a aucun sens dans un texte normatif.
Nous proposons 50 ans, mais nous aurions pu proposer 51 ans ou 52 ans et développer sur ce thème un certain nombre d'amendements. Retenez quand même un âge de référence, car ce sera utile pour tout le monde.
M. Jean-Pierre Fourcade. Et un âge certain ?
M. Jean-Pierre Masseret. C'est l'âge de ceux qui connaissaient l'histoire de Fernand Raynaud ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 215, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Dans le troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale, remplacer les mots : "aux étapes importantes de sa vie active" par les mots : "selon une périodicité déterminée par le décret susmentionné". »
L'amendement n° 216 rectifié, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« A. - Dans le troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale, remplacer les mots : "communication d'une estimation" par les mots : ", d'un des régimes auquel elle est ou a été affiliée, une estimation indicative". »
« B. - Dans le même alinéa, après les mots : "durées d'assurance", insérer les mots : ", de services". »
L'amendement n° 217, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Au début de la première phrase du quatrième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale, remplacer les mots : "ce service" par le mot : "les droits prévus aux trois premiers alinéas". »
L'amendement n° 218, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Dans ce cinquième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale, après les mots : "décret en Conseil d'Etat", insérer les mots : "après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés". »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter les amendements n°s 215, 216 rectifié, 217, 218 et pour donner l'avis de la commission sur les amendements n°s 323, 324 et 905.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. L'amendement n° 215 est un amendement de précision.
L'amendement n° 216 rectifié apporte certaines précisions qui ne figurent pas dans l'article 8 et qui ont trait à la nature de l'organisme qui transmet l'information et à la procédure retenue.
Cet amendement pose donc le principe d'une demande de l'assuré aux régimes. Il n'apparaît en effet pas pertinent de prendre à contre-pied les efforts de proximité réalisés par les régimes. De ce fait, le GIP servira de portail commun où les régimes pourront puiser l'information nécessaire et la communiquer à leurs assurés. Cette communication est automatique. Elle est effectuée, dans ce sens, par le régime de base auquel l'assuré est affilié.
La nature de l'information ne saurait juridiquement lier ni les régimes de base ni les régimes complémentaires obligatoires, ces derniers n'étant de surcroît que des régimes à prestations garanties. Ainsi l'amendement précise-t-il, et c'est important, que les informations ne sont qu'indicatives et n'engagent pas ces régimes.
Enfin, le texte laisse entendre que le droit à l'information ne concerne pas les fonctionnaires pour lesquels la référence à la durée de service reste nécessaire.
L'amendement n° 217 est un amendement de coordination.
Enfin, l'amendement n° 218 prévoit l'intervention de la CNIL pour l'édiction du décret relatif à la mise à la disposition du GIP d'informations qui, elles, ont un caractère nominatif.
Par ailleurs, la commission est défavorable à l'amendement n° 323. Elle est également défavorable à l'amendement n° 324. Elle n'a en effet pas souhaité que le GIP donne lui-même l'information. Je viens de rappeler, en exposant mon amendement, les efforts des régimes dans ce sens.
Enfin, on ne peut qu'être défavorable à l'amendement n° 905. L'âge doit être progressivement abaissé, d'où la nécessité de recourir à un décret.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. L'article 8 est très important. Il constitue une réelle avancée. Il fut difficile à élaborer tant les habitudes et la complexité de nos systèmes de retraite rendent difficiles la convergence des informations, puis la diffusion de celles-ci vers un même organisme et ensuite vers tous les Français.
D'ailleurs, je dois reconnaître que cet article ne va pas tout à fait aussi loin que je l'aurais souhaité, mais il engage un processus qui permettra, à terme, d'obtenir une information aussi complète que celle dont disposent les Suédois, notamment, qui leur permet de donner une réalité au principe de la « retraite à la carte ».
La retraite à la carte, c'est d'abord la possibilité de choisir l'âge de départ à la retraite en tenant compte de l'ensemble des paramètres, qui sont plus nombreux aujourd'hui avec la décote et la surcote. Il y a, suivant les situations de chacun, les possibilités de rachat d'années, des décisions personnelles à prendre dans ce domaine. Il y a les possibilités de retraite progressive et de cumul entre la retraite et un emploi.
C'est dire si la retraite à la carte n'est pas seulement la question de l'épargne retraite. C'est, avant tout, la question du choix de la date et du choix d'un départ complet, d'une rupture totale avec le travail ou d'une retraite progressive, permettant de passer en douceur du « tout travail » au « tout retraite ».
L'amendement n° 323 visant à supprimer l'article 8, le Gouvernement y est évidemment défavorable.
L'amendement n° 324 prévoit l'obligation pour le GIP d'informer ses membres, au plus tous les trois ans, sur leur situation en matière de retraite. J'y suis défavorable, puisque les bénéficiaires du droit à l'information sont les affiliés aux régimes de retraite et non les membres du groupement d'intérêt public. De plus, l'article 8 prévoit une information complète des assurés, tant sur les droits qu'ils ont acquis que sur l'estimation de leur future pension.
Enfin, la périodicité selon laquelle cette information doit être assurée sera fixée par décret dans des conditions aussi souples et adaptées aux demandes des intéressés que possible.
Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 213, qui est une simple coordination rédactionnelle, ainsi qu'à l'amendement n° 214.
L'amendement n° 905 vise à introduire dans la loi un âge précis : 50 ans. Le Gouvernement y est défavorable, parce qu'il pense que cette situation sera évolutive et qu'il faut laisser au décret le soin de fixer cet âge.
Le Gouvernement est favorable aux amendements n°s 215, 216 rectifié et 217.
En revanche, le Gouvernement souhaite le retrait de l'amendement n° 218, qui est satisfait par le texte du projet de loi.
Le Gouvernement partage le souci de la commission de garantir la confidentialité et la fiabilité des échanges d'informations nominatives entre les régimes de retraite nécessaires à l'exercice du droit à l'information sur la retraite. C'est d'ailleurs pourquoi le dernier alinéa de l'article 8 prévoit l'intervention d'un décret en Conseil d'Etat, après avis de la CNIL, pour l'utilisation du numéro d'identification au répertoire des personnes physiques lors de ces échanges.
M. le président. L'amendement n° 218 est-il maintenu, monsieur le rapporteur ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Je le retire.
M. le président. L'amendement n° 218 est retiré.
La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote sur l'amendement n° 323.
M. Roland Muzeau. Je tiens à développer brièvement les raisons pour lesquelles je voterai cet amendement qui vise à supprimer l'article 8, dont l'objet affiché est d'améliorer le droit à l'information des assurés.
Comprenons-nous bien, il n'est évidemment pas question de nier ou de restreindre le droit à l'information des salariés - nous passons notre temps à essayer d'introduire dans la loi ce type de dispositions que vous refusez systématiquement - au regard des droits qui sont ou seront les leurs au moment de la retraite pour les régimes de base et les régimes complémentaires.
Ce droit est d'autant plus nécessaire que la présente réforme - qui n'est qu'une étape -, en faisant de l'allongement de la durée de cotisation un outil permanent d'ajustement, change les règles de calcul des droits à la retraire et aura une incidence significative sur le montant des pensions.
Notre démarche est tout autre. Il s'agit de ne pas se satisfaire d'un pseudo-droit à l'information servant d'alibi aux organismes spécialisés qui pourraient se voir confier cette mission, alors que, par ailleurs, ces mêmes organismes proposent des produits d'assurance ou d'épargne.
Le COR, dans les orientations qu'il a définies et les propositions qu'il a faites pour éclairer le débat sur l'avenir de notre système de retraite, a consacré de longs développements au contenu qu'il convient de donner au droit à l'information, ainsi qu'aux objectifs qu'il lui assigne.
A priori, une nouvelle fois, le Gouvernement a pris ses aises avec ce rapport.
Je ne vois pas ce qui, dans le dispositif envisagé, est de nature à assurer la qualité et la précocité de l'information.
Les observations formulées par le rapporteur de la commission des affaires sociales concernant l'articulation entre le régime d'information prévu et les prestations déjà fournies par des intervenants privés me confortent dans l'idée que, compte tenu des énormes enjeux financiers, la marge de « choix » personnel que le texte entend donner aux salariés et les mesures utilisées ne permettront pas aux régimes de retraite de s'acquitter de leur mission. De facto, cette information délivrée à titre gracieux sera réalisée par ceux qui ont intérêt au développement de la capitalisation.
Monsieur le rapporteur, vous avez le droit de jouer les naïfs, mais il est inutile de nous citer un article du code que nous connaissons parfaitement. Vous savez très bien que, là où l'information va être délivrée et là où des produits financiers adaptés à la situation existent, les affaires risquent de se conclure.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 323.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote sur l'amendement n° 324.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement est intéressant, dans la mesure où il pose une réelle obligation d'information à la charge des caisses et services gestionnaires de l'assurance vieillesse.
Dans les développements consacrés au droit à l'information, droit qui se révèle d'autant plus nécessaire que l'effet des mesures adoptées en 1993, ajouté aux présentes dispositions, rend difficile le calcul spécifique des droits individuels, le COR s'est attaché à préciser quels étaient les efforts à réaliser pour informer convenablement les personnes concernées.
Il convient, selon lui, de simplifier au maximum les démarches de l'assuré et d'informer celui-ci assez tôt pour qu'il puisse pallier certains inconvénients propres à sa situation.
Prenant l'exemple des conditions de rachat de cotisation dans les régimes de la fonction publique, le COR indique « qu'il est de la responsabilité des organismes de retraite d'entreprendre auprès de l'assuré une démarche que celui-ci, l'expérience le montre, n'entreprend spontanément que dans les années qui précèdent sa retraite ».
Je considère effectivement qu'il est préférable d'aller vers les assurés sociaux, en instituant le principe d'une information automatique et périodique de ces derniers concernant leur situation personnelle.
On ne saurait d'ailleurs se satisfaire, en ce domaine, du pendant de l'obligation d'information, à savoir l'obligation de s'informer.
C'est pourquoi je voterai l'amendement n° 324, sur lequel mon groupe a demandé un scrutin public.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 324.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin
n° 198
:
Nombre de votants | 313 |
Nombre de suffrages exprimés | 311 |
Pour | 111 |
Contre | 200 |
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 213.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 214.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 905.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 215.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 216 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 217.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 8, modifié.
(L'article 8 est adopté.)
Article additionnel après l'article 8 (priorité)
M. le président. L'amendement n° 906, présenté par MM. Estier, Domeizel et Chabroux, Mme Printz, M. Krattinger, Mmes Campion et Blandin, M. Godefroy, Mmes San Vicente et Pourtaud, MM. Lagauche et Vantomme, Mme Herviaux, M. Frimat, Mme Cerisier-ben Guiga, M. Mano et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Après l'article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans un délai de deux mois après la publication de la présente loi, M. le ministre fera parvenir à toutes les Françaises et à tous les Français une note de synthèse sur les principales dispositions de la présente loi. »
La parole est à M. Claude Domeizel.
M. Claude Domeizel. Samedi dernier, alors que je dépouillais exceptionnellement le courrier - heureusement, parce que mon épouse a l'habitude de jeter à la poubelle toutes les publicités - j'ai trouvé une lettre du Premier ministre ! Je l'ai lue et j'ai été édifié par son contenu : le rapport démographique est mauvais, il y a de plus en plus de retraités, de moins en moins d'actifs. Nous allons réformer le système, mais, soyez tranquilles, vous toucherez la même pension !
Mmes Nicole Borvo et Odette Terrade. Voilà !
M. Claude Domeizel. Je l'ai relue, parce que cela m'a surpris. En effet, cette lettre du Premier ministre, qui est en fait une propagande aux frais du contribuable, ne porte que sur le projet. Je me suis senti un peu vexé, car si l'on informe tous les Français d'un projet, à quoi servent les parlementaires dont je suis ?
Mme Nicole Borvo. C'est un précédent !
M. Claude Domeizel. Par parallélisme, je demande que M. le Premier ministre informe les Français, dans les deux mois qui suivront la publication de la présente loi. Mais il faut que l'information soit complète, avec toutes les conséquences.
Je prends un exemple. La femme fonctionnaire qui pourrait partir à la retraite dès cette année ou l'année prochaine doit savoir, suivant le choix qu'elle fera, si elle bénéficiera ou non des bonifications. Il me paraît normal que la future retraitée puisse interroger sa caisse de retraite afin de savoir si elle a intérêt à attendre ou non la nouvelle loi. Il est donc normal que les Français soient informés du contenu définitif de la loi.
On m'a fait remarquer que, dans mon amendement, il n'aurait pas fallu écrire « M. le Premier ministre », mais « le Gouvernement ». Je ne sais pas s'il s'agit du Premier ministre, du ministre des affaires sociales ou du ministre de l'intérieur, mais je suis prêt à apporter cette modification !
Pour l'information de nos actifs, je souhaite vivement que cet amendement soit adopté.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement est évidemment défavorable à cet amendement, car il ne peut pas recevoir ainsi l'injonction d'envoyer des informations que, rassurez-vous, il enverra à tous les Français pour les informer de l'ensemble des dispositions qui auront été prises et de leur évolution dans le temps.
M. le président. La parole est à M. Max Marest, pour explication de vote sur l'amendement n° 906.
M. Max Marest. En réponse aux observations de notre collègue sur les dépenses dispendieuses liées à l'envoi à chaque concitoyen d'informations, je voudrais dire que, sauf erreur de ma part, quand François Mitterrand a adressé ses 101 propositions aux Français, il n'a pas fait autrement.
M. Jean-Pierre Masseret. C'était en période électorale !
M. Max Marest. Il n'était pas en période électorale, il était déjà président de la République. C'était donc aux frais de nos concitoyens. (« Non ! » sur les travées du groupe socialiste.) Par conséquent, un peu de pudeur, s'il vous plaît ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 906.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin
n° 199
:
Nombre de votants | 318 |
Nombre de suffrages exprimés | 316 |
Pour | 111 |
Contre | 205 |
M. le président. « Art. 8 bis. - Après la première phrase du premier alinéa de l'article L. 132-27 du code du travail, il est inséré une phrase ainsi rédigée : "Cette négociation porte également sur la question de l'emploi des salariés de plus de cinquante ans, sur leur accès à la formation professionnelle ainsi que sur les aménagements possibles de fin de carrière". »
L'amendement n° 219, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit cet article :
« L'article L. 132-27 du code du travail est ainsi modifié :
« I. - Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le champ de cette négociation est étendu, tous les trois ans, aux questions de l'accès et du maintien dans l'emploi des salariés âgés et de leur accès à la formation professionnelle. »
« II. - Au début du deuxième alinéa, les mots : "à l'alinéa précédent", sont remplacés par les mots : "au premier alinéa". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Cet amendement vise à porter de un à trois ans la périodicité de la négociation obligatoire dans l'entreprise sur le thème de l'emploi des salariés âgés, introduite à l'Assemblée nationale, et à en préciser l'objet.
Une obligation de négociation annuelle risque de rester largement virtuelle. Pour être préparée sérieusement, une telle négociation exige en effet un investissement important des partenaires sociaux passant notamment par une réflexion approfondie sur l'organisation du travail dans l'entreprise. Un tel travail ne peut se répéter tous les ans. A défaut une telle négociation risquerait de devenir rapidement une négociation institutionnalisée sur les préretraites, ce qui n'est pas, loin s'en faut, l'objectif recherché.
Par ailleurs, afin de prendre en compte les spécificités des entreprises, il semble souhaitable de ne pas figer dans la loi le seuil de cinquante ans. Celui-ci peut s'avérer parfois trop précoce, parfois trop tardif pour apprécier la réalité du vieillissement au travail. Il est donc préférable de laisser aux partenaires sociaux le soin de retenir eux-mêmes un éventuel critère d'âge.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. L'argumentation du rapporteur est solide, donc le Gouvernement s'en remet donc à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 219.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires sociales.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin
n° 200
:
Nombre de votants | 318 |
Nombre de suffrages exprimés | 318 |
Pour | 213 |
Contre | 105 |
En conséquence, l'article 8 bis est ainsi rédigé.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant réforme des retraites.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'examen de l'amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 8 bis.
Article additionnel après l'article 8 bis (priorité)
M. le président. L'amendement n° 220, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Après l'article 8 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article L. 132-12 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les organisations visées au premier alinéa se réunissent, au moins une fois tous les cinq ans, pour négocier sur les conditions de travail et la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences des salariés âgés et sur la prise en compte de la pénibilité au travail. »
« II. - Un bilan des négociations visées au dernier alinéa de l'article L. 132-12 du code du travail est établi, dans les trois ans suivant la publication de la présente loi, par la commission nationale de la négociation collective mentionnée à l'article L. 136-1 du même code. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Cet amendement tend à reprendre les dispositions de l'article 16 ter relatif aux négociations sur la pénibilité pour les replacer, dans un souci de cohérence et de lisibilité, dans la partie du projet de loi qui traite de l'âge au travail et de la pénibilité.
Il prévoit toutefois plusieurs aménagements.
Tout d'abord, il porte de trois ans à au moins une fois tous les cinq ans la périodicité de la négociation, afin de la calquer sur celle de la négociation de branche en matière de formation professionnelle. Il importe, en effet, d'articuler ces deux négociations, car l'accès et le maintien dans l'emploi des salariés âgés dépendront, en définitive, très largement de leur possibilité d'accès effectif à la formation.
Ensuite, il élargit le champ de la négociation sur la pénibilité. Celle-ci ne peut se limiter à la seule question de la cessation d'activité des salariés ayant exercé des travaux pénibles. Elle doit aussi porter sur la définition de la pénibilité et sa prise en compte tout au long de la carrière et sur les moyens de la limiter.
Enfin, il étend le champ du bilan demandé à la commission nationale de la négociation collective : il doit en effet porter, au-delà de la seule pénibilité, sur les conditions de travail et d'emploi des salariés âgés.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Favorable.
M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, pour explication de vote.
Mme Odette Terrade. Là encore, comme avec l'amendement n° 219 que nous avons examiné avant la suspension de séance, rien ne permet de considérer que la proposition qui nous est faite apporte quoi que ce soit à la législation existante.
En effet, aux termes de l'article L. 132-12 du code du travail, la négociation de branche porte déjà largement sur la question de l'emploi et des conditions de travail.
Je cite le texte de cet article : « Les organisations qui sont liées par des accords de branche ou, à défaut, par des accords professionnels se réunissent, au moins une fois par an, pour négocier sur les salaires et, au moins une fois tous les cinq ans, sur la nécessité de réviser les classifications.
« La négociation sur les salaires est l'occasion, au moins une fois par an, d'un examen, par les parties, de l'évolution économique et de la situation de l'emploi dans la branche, de son évolution et des prévisions annuelles ou pluriannuelles établies, notamment pour ce qui concerne les contrats à durée déterminée et les missions de travail temporaire, ainsi que des actions éventuelles de prévention envisagées compte tenu de ces prévisions ainsi que de l'évolution des salaires effectifs, moyens par catégories professionnelles et par sexe, au regard, le cas échéant, des salaires minima hiérarchiques. »
Même si c'est un peu long, je cite également le troisième alinéa de cet article :
« Les organisations visées au premier alinéa se réunissent pour négocier tous les trois ans sur les mesures tendant à assurer l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes et sur les mesures de rattrapage tendant à remédier aux inégalités constatées. La négociation porte notamment sur les points suivants :
« - les conditions d'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelle ;
« - les conditions de travail et d'emploi. »
A nos yeux, l'amendement n° 220 n'ajoute pas une précision utile, car il n'est pas nécessaire de spécifier l'emploi des salariés dits « âgés ». La question du droit à la formation des salariés âgés n'est-elle pas prise en compte, par exemple, dans la négociation annuelle du plan de formation prévue par l'article L. 933-3 du même code du travail ? Nous pouvons faire confiance aux organisations syndicales pour que tout soit traité comme il convient dans le cadre de ces négociations.
Cet amendement n'apportant pas de précisions ni au code du travail ni aux droits des salariés, nous ne le voterons pas.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 220.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 8 bis.
M. le président. « Art. 8 ter. - L'article L. 173-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les caisses et services gestionnaires des régimes de base d'assurance vieillesse ont l'obligation de se transmettre directement ou indirectement, lorsque ces informations sont nécessaires à la liquidation des pensions, les données relatives à la carrière de leur ressortissants et notamment les périodes prises en compte, la durée d'assurance et la nature des trimestres validés au plus tard en décembre de l'année qui précède le cinquante-sixième anniversaire de l'assuré puis, en cas de modification, en décembre de chaque année suivante. » - (Adopté).
M. le président. « Art. 8 quater. - Dans un délai de cinq ans, le Gouvernement remettra un rapport au Parlement présentant les mesures législatives et réglementaires prises pour favoriser le maintien en activité des salariés âgés. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 221, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
L'amendement n° 907, présenté par MM. Estier, Domeizel et Chabroux, Mme Printz, M. Krattinger, Mmes Campion et Blandin, M. Godefroy, Mmes San Vicente et Pourtaud, MM. Lagauche et Vantomme, Mme Herviaux, M. Frimat, Mme Cerisier-ben Guiga, M. Mano et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Remplacer les mots : "des salariés âgés" par les mots : "des salariés de plus de cinquante ans". »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 221.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de suppression : pourquoi créer un rapport de plus ?
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, pour présenter l'amendement n° 907.
M. Claude Domeizel. J'ai entendu M. le rapporteur faire référence, à plusieurs reprises, à l'âge de cinquante ans. C'est la raison pour laquelle nous proposons, à l'article 8 quater, de remplacer l'expression plutôt vague « les salariés âgés » par les mots : « les salariés de plus de cinquante ans ». Ce sera plus clair !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Cet amendement est incompatible avec l'amendement de suppression de la commission.
Par conséquent, j'émets un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. En ce qui concerne l'amendement n° 221, je m'en remets à la sagesse du Sénat.
S'agissant de l'amendement n° 907, j'y suis défavorable, puisque j'ai indiqué, tout à l'heure, que le dispositif était évolutif et qu'il ne fallait pas figer les âges dans la loi.
M. Jean Chérioux. Ce n'est pas très aimable pour les personnes de cinquante ans de remplacer le terme : « agés » par les mots : « plus de cinquante ans » !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 221.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 8 quater est supprimé et l'amendement n° 907 n'a plus d'objet.
Article additionnel après l'article 8 quater (priorité)
M. le président. L'amendement n° 1098 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Après l'article 8 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 161-17-1 du code de la sécurité sociale est modifié comme suit :
« I. - Au premier alinéa de cet article, après les mots : "en matière de service des prestations", sont insérés les mots : "notamment au regard des cotisations et contributions sociales".
« II. - Au deuxième alinéa de cet article, les mots : "à l'organisme chargé par décret de la gestion technique du répertoire" sont remplacés par les mots : "à la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés" et les mots : "et le montant" sont supprimés. »
La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre. Cet amendement vise à aménager le répertoire national des retraites et des pensions de façon à l'inscrire en cohérence avec la démarche entreprise par l'article 8 du présent projet de loi relatif à l'amélioration de l'information des assurés.
Il apparaît en effet nécessaire de préciser que la coordination entre les régimes de retraite inclut la prise en compte des conditions d'assujettissement des prestations, afin que chaque assuré bénéficie d'un traitement identique au regard des cotisations et contributions sociales dans l'ensemble des régimes dont il relève. Cela permettra d'éviter à l'assuré d'avoir à présenter les mêmes justificatifs auprès des différents régimes qui lui servent une prestation.
Par ailleurs, utiliser le répertoire national des retraites et des pensions comme un moyen de faciliter la coordination entre les régimes n'implique pas forcément la transmission des données relatives au montant des avantages servis, les procédures d'échange rapide des informations entre les régimes pouvant y pourvoir.
Il importe enfin de désigner clairement la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés comme gestionnaire du répertoire.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1098 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 8 quater.
M. le président. « Art. 9. - I. - L'article L. 161-22 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa, après les mots : "une activité non salariée", sont insérés les mots : "relevant du ou desdits régimes" ;
« 2° Après le premier alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Les dispositions du premier alinéa ne font pas obstacle à la reprise d'une activité procurant des revenus qui, ajoutés aux pensions servies par les régimes mentionnés au premier alinéa ainsi que par les régimes complémentaires légalement obligatoires régis par le livre IX, sont inférieurs au dernier salaire d'activité perçu avant la liquidation de la ou desdites pensions et sous réserve que cette reprise d'activité, lorsqu'elle a lieu chez le dernier employeur, intervienne au plus tôt six mois après la date d'entrée en jouissance de la pension.
« Lorsque l'assuré reprend une activité lui procurant des revenus qui, ajoutés aux pensions servies par les régimes mentionnés au premier alinéa ainsi que par les régimes complémentaires légalement obligatoires régis par le livre IX, sont supérieurs au plafond mentionné à l'alinéa précédent, il en informe la ou les caisses compétentes et le service de ces pensions est suspendu. » ;
« 3° Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
« Les dispositions du premier alinéa ne sont pas opposables à l'assuré qui demande le bénéfice d'une pension au titre d'une retraite progressive prévue par des dispositions législatives ou réglementaires, notamment par les articles L. 351-15 du présent code et L. 732-29 du code rural. »
« II. - L'article L. 634-6 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 634-6. - Le service d'une pension de vieillesse liquidée au titre des régimes d'assurance vieillesse des professions artisanales, industrielles et commerciales et dont l'entrée en jouissance intervient à compter d'un âge fixé par décret en Conseil d'Etat est subordonné à la cessation définitive des activités relevant du ou desdits régimes.
« Les dispositions du premier alinéa ne font pas obstacle à l'exercice par l'assuré d'une activité procurant des revenus inférieurs à des seuils adaptés selon les zones géographiques concernées et déterminés dans des conditions fixées par décret.
« Lorsque l'assuré reprend une activité lui procurant des revenus supérieurs à ceux prévus à l'alinéa précédent, il en informe la caisse compétente et le service de la pension est suspendu.
« Les dispositions du premier alinéa ne sont pas opposables à l'assuré qui demande le bénéfice de sa pension au titre de l'article L. 634-3-1. »
« III. - Les dispositions du présent article sont applicables aux pensions prenant effet à compter du 1er janvier 2004. »
La parole est à Mme Annie David, sur l'article.
Mme Annie David. Cet article, au prétexte de simplifier et d'harmoniser les règles relatives à la limitation du cumul d'une activité salariée et de la perception d'une retraite nous paraît particulièrement inquiétant.
On nous explique, dans le rapport, que les règles relatives à la poursuite d'une activité professionnelle postérieure à la liquidation d'une pension de retraite sont aujourd'hui complexes. Nous avons toujours pensé que la réglementation, pour complexe qu'elle soit, visait ainsi à protéger les salariés contre tout abus et pouvoir arbitraire qui pourrait être exercé à leur encontre.
Nous demeurons donc prudents dans cette période où l'on multiplie les prétextes pour déréguler l'organisation du travail, supprimer de nos codes les dispositions qui, précisément, protègent les salariés.
Nous ne voyons donc rien de bon dans la modification de l'article L. 161-22 du code de la sécurité sociale qui subordonnait la liquidation et la perception d'une pension de retraite à la rupture définitive de tout lien professionnel avec l'employeur ou à la cessation de l'activité. Le rapporteur précise d'ailleurs que cette règle de principe avait été confirmée par l'article 38 de la loi de financement de la sécurité sociale.
Déjà, à l'époque, un assouplissement de ces règles avait été recherché, mais sans que les propositions alors formulées n'aboutissent.
Nous observons par ailleurs que de nombreuses exceptions à cette règle de principe existent, qui déjà donnent une certaine souplesse et rendent possible, dans plusieurs cas, le cumul emploi-retraite. Ces exceptions permettent ainsi aux personnes exerçant des activités artistiques, littéraires ou scientifiques, de cumuler un emploi et une retraite dans des conditions restrictives, qui permettent d'éviter les abus de toutes sortes en la matière.
Sont aussi concernées, comme le fait observer le rapport de notre collègue Dominique Leclerc, par les exceptions à la règle de principe, des personnes participant à des activités juridictionnelles, à des jurys ou à des instances délibératoires ou consultatives, des personnes se livrant à certaines activités occasionnelles et de faible importance, des personnes ouvrant certaines activités d'hébergement en milieu rural, notamment celles qui sont liées aux gîtes ruraux.
D'autres exceptions existent - je n'en développe pas la liste - qui sont également soumises à des conditions restrictives.
On observe donc que la réglementation actuelle prévoit, dans certains cas, la possibilité de cumuler un emploi avec la retraite, tout en fixant des frontières strictes entre l'activité et la retraite. Assouplir ces frontières, les rendre plus floues, ne constitue pas, pour nous, un progrès social, bien au contraire !
Les dispositions de cet article, sous prétexte de simplifier la législation, comportent en réalité de graves risques d'éclatement des formes d'emploi et d'accroissement de la précarisation.
De telles mesures sont également très paradoxales à l'heure où les entreprises licencient des salariés âgés de plus de 50 ans qui ne peuvent pas bénéficier de leur retraite et se retrouvent dans des situations extrêmement précaires.
Nous savons les raisons pour lesquelles on les licencie : ils coûtent trop cher aux entreprises.
Cette politique a aujourd'hui les conséquences néfastes que l'on connaît sur le dynamisme de notre économie, puisqu'elle prive les entreprises de la possibilité de transférer aux jeunes générations les savoir-faire.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous avons déposé des amendements visant à supprimer cet article.
Je suis saisi de sept amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les trois premiers sont identiques.
L'amendement n° 325 est présenté par MM. Fischer, Bret et Coquelle, Mmes David, Didier et Luc et M. Renar.
L'amendement n° 326 est présenté par Mmes Demessine, Beaufils et Beaudeau, M. Foucaud, Mme Mathon, M. Le Cam et M. Biarnès.
L'amendement n° 327 est présenté par Mme Borvo, M. Muzeau, Mme Bidard-Reydet, M. Ralite, Mme Terrade et M. Loridant.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer cet article. »
L'amendement n° 328, présenté par Mme Demessine, M. Ficher, M. Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le I de cet article. »
L'amendement n° 42, présenté par M. Cantegrit, est ainsi libellé :
« Compléter le I de cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
« Avant le dernier alinéa, il est inséré un 8° ainsi rédigé :
« 8° Activités professionnelles exercées hors des départements métropolitains et d'outre-mer de la République française. »
L'amendement n° 329, présenté par Mme Demessine, M. Fischer, M. Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le II de cet article. »
L'amendement n° 330, présenté par Mme Demessine, M. Fischer, M. Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le III de cet article. »
La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 325.
Mme Annie David. Monsieur le ministre, nous avons déjà eu l'occasion de souligner combien vous faisiez fausse route en menant une politique cherchant toujours plus à diminuer le coût du travail.
Une telle politique ne peut que nuire à la création d'emplois en pesant sur la consommation, en remettant en cause les revenus de transfert, en diminuant les recettes dont nous avons besoin pour corriger les inégalités sociales qui ne cesse de se creuser.
Or, alors que précisément 160 000 chômeurs de plus sont venus gonfler les rangs des sans-emploi, faisant grimper le taux de chômage à 9,6 % à la fin de l'année, le dispositif prévu par cet article, vise, contre tout bon sens, à faciliter le cumul emploi-retraite.
Chercherait-on à augmenter le chômage que l'on ne s'y prendrait pas autrement !
Mais, au final, ces dispositions sont tout à fait cohérentes avec l'ensemble de ce projet de loi. Avec votre réforme, monsieur le ministre, de nombreux salariés ne pourront bénéficier de leur retraite à taux plein qu'à condition de prolonger leur activité au-delà de 65 ans. Il est difficilement pensable, en effet, que les foyers modestes puissent capitaliser pour leurs vieux jours.
Le cumul emploi-retraite permettra à ces personnes, dont la pension sera bien insuffisante pour leur assurer des conditions de vie décentes à l'âge de la retraite, de bénéficier d'un complément « salarial ».
Les effets négatifs sur l'emploi des jeunes que ces dispositions impliquent sont évidents. Pourquoi voudriez-vous qu'un chef d'entreprise embauche un jeune alors qu'il pourra bénéficier d'une main-d'oeuvre ayant une longue expérience professionnelle, un savoir et un savoir-faire accumulés au cours de toute une vie professionnelle, une main-d'oeuvre qualifiée, donc, mais à « bon marché » ou, pour le dire autrement, rémunérée en deçà des conditions actuelles du marché ?
Il s'agit là, monsieur le ministre, d'une disposition qui favorise le développement d'une concurrence déloyale entre les jeunes et les moins jeunes !
La conséquence inévitable de ce dispositif particulièrement inquiétant consistera à tirer l'ensemble des salaires vers le bas et, à terme, se traduira par un appauvrissement généralisé ! Ce n'est donc favorable ni à l'emploi de notre jeunesse ni à notre croissance économique.
Nous ne pouvons accepter que l'on présente des dispositions aussi négatives simplement comme un article qui n'aurait pour seul but que de « simplifier et d'harmoniser les règles de limitation du cumul entre l'emploi et la retraite ».
Dans une situation de plein emploi requérant la mobilisation de toute la main-d'oeuvre disponible, cela pourrait se comprendre, encore que ce soit très contestable.
Dans un contexte où le taux de chômage atteint presque 10 %, de telles dispositions revêtent un caractère particulièrement indécent ! Si, au moins, un tel dispositif avait pour conséquence d'éviter l'exclusion des actifs de plus de 50 ans, qui sont souvent les victimes des licenciements... Ce n'est évidemment pas son but, puisqu'il banalise au contraire les mécanismes mêmes qui produisent la précarisation des carrières et qui renforcent le caractère hérité des vies professionnelles.
Seule une politique plus ambitieuse et plus contraignante du point de vue de la gestion de la main-d'oeuvre par les entreprises permettrait d'éviter que plus de la moitié des salariés du secteur privé, selon le COR, ne soient encore en activité au moment où ils liquident leur retraite.
Quel type de société nous préparez-vous, monsieur le ministre ? D'un côté, les jeunes ont beaucoup de difficultés à trouver un emploi, y compris ceux qui, aujourd'hui, ont un niveau de qualification élevé, et, de l'autre, les plus de 50 ans sont nombreux à connaître des situations précaires, de chômage ou de préretraite.
L'emploi des uns devrait-il se faire au détriment des autres, qui plus est par l'exercice d'une activité moins rémunérée que ce que les compétences et l'expérience professionnelle exigeraient !
L'histoire montre que l'on s'est efforcé de ne pas laisser faire le marché en matière de régulation du travail.
Après la crise des années trente - on sait malheureusement où elle a conduit -, des normes en matière de fixation du salaire et de temps de travail ont progressivement été introduites. Toutes ces réglementations participaient surtout du souci et de la volonté de réduire le chômage. Elles étaient aussi porteuses d'avancées sociales qui ont contribué à assurer une croissance stable. Comme quoi, ce que vous appelez « rigidité » peut être particulièrement efficace sur les plans économique et social !
Le contenu d'un tel article, au contraire, nous fait faire un grand bond en arrière, et c'est la raison pour laquelle nous souhaitons sa suppression.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Demessine, pour présenter l'amendement n° 326.
Mme Michelle Demessine. Par cet article, vous proposez d'alléger la réglementation concernant le cumul retraite-emploi. Cet allégement constitue une véritable régression sociale.
Loin de réfléchir aux raisons pour lesquelles de nombreux salariés de plus de 50 ans sont licenciés, se trouvent dans des situations extrêmement précaires et sont contraints, la plupart du temps, à prendre leur pré-retraite, loin d'en analyser réellement les causes et d'essayer d'envisager des solutions pour éviter la généralisation de ces situations, vous préférez entériner cette évolution défavorable au maintien dans leur emploi des personnes de plus de 50 ans.
Vous donnez l'occasion aux employeurs d'embaucher à des taux de rémunération très faibles des personnes qui bénéficient d'une retraite trop modeste parce que, précisément, elles ont traversé des périodes de chômage après leurs 50 ans.
On nous explique que cet article aurait pour objet de relever de façon significative le taux d'emploi des séniors dans notre pays et d'empêcher la dégradation de l'employabilité de ces salariés !
On nous explique encore que cet article participerait de l'exercice du libre choix du retraité : aucune contrainte ne devrait peser sur un retraité qui souhaiterait reprendre une activité, chez son ancien employeur ou chez un autre. Ainsi, en assouplissant la réglementation actuelle concernant le cumul emploi-retraite, cet article répondrait aux exigences de la liberté de choix !
Je suis, quant à moi, convaincue que cette disposition constitue un moyen de tirer, une fois de plus, les salaires vers le bas, en permettant aux entreprises de réembaucher certains de leurs anciens salariés dont les compétences sont avérées et que les nécessités de la vie obligent, malgré leur âge, à reprendre une activité !
L'assouplissement de la loi ne va guère dans le sens du progrès social. Au contraire, au prétexte d'un libre choix individuel, elle rétablit l'arbitraire patronal en matière de gestion de la main-d'oeuvre et de fixation des rémunérations, en l'occurrence, en deçà des normes salariales actuelles !
Comme le disait à juste titre Lacordaire, « Entre le faible et le fort, c'est la loi qui libère et la liberté qui opprime. »
Cet article constitue, à n'en pas douter, une remise en cause du salariat et des droits en matière de sécurité sociale qui, au sens large, lui sont intrinsèquement attachés !
Nous savons bien que, avec la réforme que vous engagez, nombre d'hommes et de femmes ne pourront plus bénéficier d'une retraite à taux plein digne de ce nom. Ils n'auront donc d'autre choix que de rechercher un « petit boulot » pour compléter leurs retraites trop modestes.
Leur ancien employeur pourra, à sa guise, puiser dans ce gisement de compétences, que l'on rémunérera alors plus faiblement qu'hier.
Faire remonter de cette façon le taux d'employabilité des séniors, c'est banaliser la situation de sous-emploi actuel en rendant la main-d'oeuvre encore plus malléable.
C'est mettre en concurrence les jeunes à la recherche d'un emploi avec ces séniors, qui devraient bénéficier d'un digne et mérité repos.
C'est encore faire diminuer l'employabilité des personnes peu ou faiblement qualifiées, parmi lesquelles figurent de nombreux jeunes.
Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression d'un article qui vise plus à nous adapter à une situation de chômage durable qu'à nous donner de réels moyens de retrouver la voie du plein emploi.
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour présenter l'amendement n° 327.
M. Roland Muzeau. Cet amendement vise également à supprimer l'article 9, qui comporte des dispositions particulièrement défavorables à l'emploi, notamment l'emploi des jeunes, et, plus globalement, à la dynamique de la croissance.
Cet article, qui est permissif en ce qu'il autorise le cumul de la retraite et d'un emploi, constitue une véritable régression sociale. Son principal objet est, en effet, de permettre le cumul des pensions avec des revenus d'activité, à condition que le revenu tiré de ce cumul soit inférieur au montant du dernier salaire perçu et intervienne après un délai de six mois entre la date d'entrée en jouissance de la pension et la reprise d'activité, lorsque celle-ci a lieu chez le dernier employeur.
Autrement dit, cet article permettra à des hommes et à des femmes ayant travaillé entre 37 et 42 ans de reprendre une activité pour compléter leur retraite insuffisante et pour s'assurer des conditions de vie décentes ! Alors que vous supprimez les emplois-jeunes, monsieur le ministre, vous invitez des personnes dont l'âge est compris entre 60 et 70 ans à reprendre une activité, alors qu'elles avaient droit à bénéficier pleinement d'une retraite pour se consacrer à des loisirs et prendre un repos bien mérité !
Au profit de qui se réalise une telle politique si ce n'est au bénéfice exclusif du patronat, qui aura tout loisir d'embaucher à des salaires de misère des employés dont la plupart avaient été licenciés à l'âge de 52 ou 53 ans !
Le contenu de cet article est particulièrement dangereux tant il vise à banaliser le recours à une main-d'oeuvre bon marché pour effectuer des « petits boulots ».
Ce que vous proposez témoigne, une fois de plus, du manque de volontarisme politique de votre gouvernement, qui se refuse à orienter positivement notre économie sur un sentier de croissance vertueux.
Nous ne pouvons nous satisfaire du fatalisme ambiant qui voudrait que l'on accepte sans mot dire une croissance toujours plus faible, frôlant de plus en plus la déflation et suscitant toujours plus d'inégalités.
Nous continuons de penser que des moyens financiers existent et peuvent être mis à contribution pour assurer aux plus de 60 ans une retraite digne, leur permettant, après avoir contribué au développement économique de notre pays, de participer à animer la vie de la cité, comme certains le font dans le cadre, par exemple, d'associations.
Si la mise à contribution des revenus financiers, sous une forme ou sous une autre, fait actuellement débat au sein de la communauté des économistes, elle aurait, au moins, l'avantage de pénaliser la spéculation financière et de progressivement mettre un terme à l'expansion continue des marchés financiers.
Les marchés financiers exercent de telles pressions de rentabilité sur l'économie réelle, monsieur le ministre, ils captent une telle part sur les richesses créées, qu'ils nous condamnent au ralentissement et à l'essoufflement de notre croissance, donc à l'augmentation du chômage.
Dans le même temps, ce poids grandissant de la finance, autrement dit la domination qu'exercent les banquiers, les financiers, ou encore les rentiers et actionnaires sur notre économie, constitue un puissant facteur d'accroissement des inégalités.
C'est bien cette dérive de financiarisation qui nous prive des financements nécessaires pour notre protection sociale et nous fait socialement régresser !
Sans en analyser réellement les conséquences, vous prenez des mesures qui ne sont pas à la hauteur de ce que la situation exigerait. Ainsi en est-il du contenu de cet article, qui nous fait faire un véritable bond en arrière.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous souhaitons la suppression de cet article 9.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour défendre l'amendement n° 328.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec cet amendement nous entrons un peu plus dans le détail puisque nous souhaitons supprimer cette fois, le paragraphe I de l'article 9.
Nous avons eu l'occasion de souligner les raisons pour lesquelles nous voulions supprimer l'ensemble de cet article au contenu extrêmement inquiétant, article qui fait tomber un pan important de notre législation sociale en grignotant, notamment, les règles afférentes au statut de salarié.
Je voudrais maintenant insister sur les conséquences que pourront avoir plus particulièrement sur le monde rural certaines dispositions du paragraphe I de cet article qui généralisent aux actifs agricoles le principe du cumul emploi-retraite.
Nous savons combien les retraites des agricultrices et des agriculteurs sont modestes et qu'elles figurent parmi les plus faibles de toutes les catégories socioprofessionnelles.
En ce qui concerne les pensions de conjoints d'exploitants agricoles qui, dans la majorité des cas, sont des femmes, les inégalités sont encore plus criantes, le montant des pensions perçues étant, selon la Confédération nationale des syndicats d'exploitations familiales, « inférieur de 30 % à 50 % à celui des chefs d'exploitation ».
Or, il nous semble que, loin de répondre aux besoins du secteur agricole en matière de retraite, votre réforme confirmera la grande pauvreté de nos retraités paysans et d'une majorité des actifs du monde agricole, qui devront cotiser davantage pour bénéficier d'une retraire décente, avec la retraite complémentaire qui a été rendue obligatoire il y a très peu de temps.
L'augmentation de la durée de cotisation, que vous faites passer de 150 à 160 trimestres par un alignement sur le secteur privé, constitue ainsi un recul social important pour cette catégorie de la population que vous pénalisez par le montant des pensions à toucher.
En effet, dans la majorité des cas, les jeunes chefs d'exploitation ont travaillé pendant plusieurs années comme aides-familiaux sans percevoir de rémunération avant de reprendre l'exploitation de leurs parents entre 28 ans et 30 ans. Pour ces jeunes qui acquerront relativement tard le statut de chef d'exploitation, le cumul moyen à 60 ans est de 120 trimestres, auxquels s'ajoutent entre 30 à 40 trimestres de travail en tant qu'aide-familial activité dont le rendement est cependant trop faible pour assurer une retraite correcte.
Comment ne pas souligner aussi qu'il paraît particulièrement difficile d'envisager de continuer à exercer une activité après 60 ans tant, dans cette profession, les conditions de travail sont généralement pénibles et usantes ?
Pour cette catégorie sociale qui, il faut le souligner, aura permis à la France d'accéder en quelques décennies à l'autosuffisance alimentaire et de devenir la deuxième puissance exportatrice de produits agroalimentaires, la solidarité nationale devrait jouer pleinement pour corriger ces inégalités de fait et cette grande injustice sociale qui condamne nos paysans à des retraites de misère.
L'insuffisance des retraites est d'autant plus pénalisante pour la majorité de nos agriculteurs que les revenus issus de leur activité sont faibles. En effet, 40 % des exploitations agricoles dégagent un revenu par actif familial à temps complet inférieur au SMIC.
Pour ces catégories socioprofessionnelles, il semble évident que compléter les retraites par une épargne par capitalisation sera impossible.
C'est la solidarité nationale qui doit prendre le relais. En même temps, il faut réduire les marges exorbitantes que la grande distribution et l'ensemble de l'aval de la filière agroalimentaire réalisent au détriment d'une rémunération correcte du travail de nos paysans.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Cantegrit, pour défendre l'amendement n° 42.
M. Jean-Pierre Cantegrit. Actuellement, le droit à pension est lié à la cessation d'activité, mais certaines exceptions - énumérées limitativement - peuvent néanmoins continuer à être exercées, selon l'article L. 161-22 du code de la sécurité sociale. La poursuite d'une activité à l'étranger ne fait pas partie de ces exceptions, même si elle a été admise par circulaire.
Dans le cadre du présent projet de loi, l'article 9 harmonise les règles du cumul emploi-retraite en les assouplissant. Il paraît donc souhaitable d'introduire formellement dans la loi une exception communément admise auparavant, mais non légalisée, au profit des Français résidant à l'étranger, titulaires d'une retraite française et qui continuent à travailler à l'étranger.
Autrement dit, le projet de loi assouplit la règle actuelle et autorisera, sous certaines conditions, un cumul de la pension et d'une activité. Il serait donc juste que l'exception admise actuellement pour les Français de l'étranger soit prévue par le présent texte.
M. Jacques Pelletier. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, pour défendre l'amendement n° 329.
Mme Odette Terrade. Nous avons déjà eu l'occasion de souligner combien les dispositions de l'article 9 nous inquiétaient.
Nous avons de bonnes raisons de considérer cet article avec méfiance, car il ouvre la voie au cumul d'une activité salariée et d'une retraite, rendant ainsi plus floues les frontières qui, jusqu'à maintenant, séparaient l'activité de la retraite, considérée alors comme un juste repos.
Il pourrait, de notre point de vue, constituer une première étape sur la voie de la banalisation de ce genre de pratique visant le cumul d'une activité avec la retraite, comme l'a rappelé ma collègue Annie David, dans son intervention sur l'article.
Nos inquiétudes sont d'ailleurs tout à fait légitimes. M. le rapporteur nous explique, en effet, que certaines dispositions de l'article 9 constituent une réponse à la désertification commerciale en zone rurale, en accroissant la souplesse du dispositif actuel concernant le cumul emploi-retraite.
Pour les raisons que nous vous avons indiquées, nous ne sommes absolument pas convaincus que cela aura un réel effet sur la déprise commerciale en zone rurale. Cela exigerait des mesures beaucoup plus volontaristes que celles qui consistent à inciter les personnes âgées de plus de 60 ans à reprendre une activité.
Cette disposition revêt également un caractère quelque peu indécent lorsque l'on sait la faiblesse des revenus que tirent les petits commerçants de leur activité.
En réalité, vous ne leur proposeriez rien sinon de travaillez plus longtemps pour pallier l'insuffiance de leurs revenus et la faiblesse de leur retraite.
Nous ne pouvons nous satisfaire d'une telle mesure présentée comme une solution en faveur des petits commerçants résidant dans les zones rurales.
Notre groupe avait formulé des propositions beaucoup plus volontaristes qui visaient à favoriser aussi l'embauche des jeunes : c'est là une condition sine qua non de la revitalisation des zones rurales, qui sont de plus en plus exclues du développement économique et marginalisées.
Nos propositions étaient réalistes, et de nombreux élus, y compris des élus appartenant à votre majorité, en avaient approuvé le contenu. Elles s'attaquaient aux vraies causes de la désertification rurale en faisant contribuer, par l'intermédiaire de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat, la TACA, la grande distribution, qui exerce une concurrence déloyale à l'égard des petits commerces.
Outre qu'elle revêt un caractère de régression sociale en reculant au-delà de 60 ans l'âge jusqu'auquel l'activité est possible, la mesure que vous envisagez n'empêchera pas, à terme, la fermeture des petits commerces. Elle ne peut donc constituer une solution durable au problème de la désertification de nos campagnes.
C'est notamment pour cette raison que nous avons déposé cet amendement visant à la suppression des dispositions figurant à l'article 9.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Demessine, pour présenter l'amendement n° 330.
Mme Michelle Demessine. Il s'agit d'un amendement de cohérence avec ceux que nous avons déposés sur cet article, sur le caractère particulièrement dangereux duquel je souhaite revenir.
Introduire le cumul emploi-retraite alors que le chômage ne cesse d'augmenter nous semble contrevenir au bon sens même. Permettre aux plus âgés d'entre nous de continuer d'exercer une activité alors même qu'une partie de la population est sans emploi, alors que nos jeunes ont du mal à trouver un emploi, constitue en soi un facteur de développement du chômage.
Je m'interroge donc sur les motivations réelles qui ont conduit à introduire un tel article dans un projet de loi concernant la réforme des retraites.
Je constate une fois de plus que, loin de répondre de manière pertinente aux difficultés que traversent ceux qui sont actuellement privés d'emploi, les dispositions de cet article vont au contraire banaliser les situations de précarisation.
Au fond, cet article dévoile bien votre conception de la société telle que vous la préparez et qui, à n'en pas douter, sera une société plus individualiste dans laquelle se briseront progressivement les liens traditionnels de la solidarité entre les générations.
Dans les années à venir, les retraites versées au titre de la répartition seront de plus en plus faibles, et c'est cette faiblesse même qui contraindra la partie la plus pauvre de notre population à reprendre une activité. Des travailleurs pauvres et âgés de plus de 60 ans, voire de plus de 65 ans : quelle avancée sociale ! Cela fait frémir, à l'heure où les nouvelles technologies permettent précisément de libérer davantage de temps libre et où l'espérance de vie croît.
Tout cela est d'autant plus inquiétant que les conditions restreignant le recours à ce dispositif, dont l'application doit demeurer limitée, sont suffisamment floues pour que le risque soit réel.
Le dispositif s'appliquerait, notamment, dans certaines zones qui ne sont pas clairement définies. S'agira-t-il des zones d'exclusion sociale, des zones où se forment des poches de pauvreté, des zones rurales ?
Nous avons par ailleurs de bonnes raisons de croire qu'il pourra avoir des conséquences négatives sur l'emploi des jeunes en permettant à certaines professions le cumul de revenus.
En soi, cette disposition qui permet de cumuler un emploi avec une retraite est particulièrement choquante et constitue un véritable recul social.
Pour toutes ces raisons, nous souhaitons la suppressiuon du paragraphe III de cet article.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Les amendements n°s 325, 326 et 327 sont identiques et tendent à supprimer cet article. Nous y sommes donc défavorables. Vous pouvez en effet comprendre, mes chers collègues, que la réforme du cumul emploi-retraite nous paraît nécessaire dans la mesure où elle introduira une plus grande souplesse au bénéfice des assurés et permettra d'assurer une harmonisation progressive avec les règles qui sont prévues pour le régime complémentaire.
L'amendement n° 328 vise à supprimer le I, qui est l'un des éléments les plus importants de l'article 9. Nous y sommes donc également défavorables.
M. Cantegrit a exposé dans toute sa technicité l'amendement n° 42, dont l'objet est de permettre l'extension du cumul aux activités professionnelles exercées « hors des départements métropolitains et d'outre-mer de la République française » ; la commission y est favorable.
En revanche, elle est défavorable à l'amendement n° 329, qui tend à la suppression du II de l'article 9, et à l'amendement n° 330, qui vise à supprimer le III, relatif à la date d'application de la nouvelle mesure concernant le cumul emploi-retraite, ce que nous ne pouvons concevoir.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement est défavorable à tous les amendements qui visent à supprimer, totalement ou partiellement, cet article.
Il faut en effet que nous sortions des politiques malthusiennes de l'emploi qui sont conduites dans notre pays depuis vingt ans et qui ont abouti au résultat que l'on sait, c'est-à-dire au taux de chômage des jeunes le plus élevé et au taux d'activité des anciens le plus bas.
Je m'étonne, au demeurant, que cette évidence ne finisse pas par s'imposer à la réflexion, notamment, des membres du groupe CRC, qui continuent de raisonner comme si un départ à la retraite libérait un emploi pour un jeune, alors même que nos résultats en matière de chômage global, malgré des politiques très ambitieuses comme la réduction du temps de travail, sont parmi les plus mauvais d'Europe.
Je suis donc défavorable aux amendements identiques n°s 325, 326 et 327, ainsi qu'à l'amendement n° 328.
Je suis en revanche favorable à l'amendement n° 42 de M. Cantegrit, même si je pense qu'il est, pour une large part, déjà satisfait par les textes existants.
Enfin, je suis défavorable aux amendements n°s 329 et 330.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, je demande le vote par priorité de l'amendement n° 42.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?
M. François Fillon, ministre. Favorable.
M. le président. La priorité est ordonnée.
La parole est à M. Hubert Durand-Chastel, pour explication de vote sur l'amendement n° 42.
M. Hubert Durand-Chastel. Je voterai cet amendement n° 42, car il vise à faire figurer expressément dans le code de la sécurité sociale une coutume toujours admise et validée jusqu'à présent par une simple circulaire.
Elle concerne les Français de l'étranger, qui, bien souvent, ne perçoivent que des retraites partielles qu'ils ont obtenues pour le temps où ils ont travaillé en France, en général au début de leur carrière, et qu'ils souhaitent compléter par une activité à l'étranger, lorsqu'ils y résident.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 42.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, les amendements identiques n°s 325, 326, 327 et l'amendement n° 328 n'ont plus d'objet.
Je mets aux voix l'amendement n° 329.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote sur l'amendement n° 330.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le ministre, si vous croyez que, à travers l'article 9, vous allez permettre à des personnes âgées de 50 à 60 ans qui se trouvent au chômage de retrouver un emploi, je dois vous dire que vous vous trompez : de telles mesures n'auront pas pour effet d'augmenter l'employabilité de ces personnes, bien au contraire.
Le cumul emploi-retraite va donner à des personnes qui ont une faible retraite - et elles seront plus nombreuses, avec l'application de votre réforme - la possibilité d'exercer des petits boulots sous-payés. C'est d'ailleurs très intéressant pour le patronat, qui pourra ainsi bénéficier d'une main-d'oeuvre rémunérée plus faiblement que dans les conditions normales.
Par l'article 9, vous montrez à quel point vous êtes éloigné de l'idée de sauvegarder notre système par répartition - mais j'y reviendrai -, puisque vous anticipez la baisse des pensions à laquelle conduit votre réforme en permettant à nos concitoyens de compenser l'insuffisance de leurs revenus par la reprise d'une activité.
Par ailleurs, c'est au moment même où la situation économique se dégrade, et où le chômage des jeunes devient de plus en plus préoccupant que vous prenez une telle mesure. Or, nous savons bien que la diminution du chômage serait aussi un moyen de trouver les financements dont ont besoin nos régimes de retraite.
Mais, loin de remettre en cause votre politique libérale et de faire réellement preuve d'un plus grand volontarisme politique en explorant toutes les voies qui nous permettraient de retrouver une situation de plein emploi, vous prenez des mesures pour que l'on s'adapte à une situation de chômage durable.
Peut-être faut-il rappeler, en reprenant les informations et les recommandations du COR - que l'on soit ou non d'accord (Sourires) -, que, avec un taux de chômage à 4,5 %, puisque le COR estime que c'est celui qui correspond au plein emploi, le besoin de financement serait, à partir de 2010, de l'ordre de quatre points du PIB ? Par ailleurs, entre 1959 et 2000, la part du PIB consacrée aux retraites est passée de 5,4 % à 12,6 %, connaissant une augmentation de plus de 7 points. Une telle évolution met en cause la sécurisation des retraites !
Le contenu de l'article 9 participe donc de cette problématique. A écouter vos discours, vos discours alarmistes, nous devrions sacrifier notre protection sociale, allonger la durée du travail et nous satisfaire d'une situation qui sécrète ceux que Robert Castel qualifie d'« inutiles au monde », de « surnuméraires ». C'est à cela que conduit votre politique !
Voilà pourquoi, bien évidemment, nous ne partageons pas les choix de société que vous préconisez ; voilà pourquoi, aussi, nous avons déposé un certain nombre d'amendements à l'article 9 : nous nous opposons à sa rédaction actuelle, confirmant ainsi l'importance cruciale pour le système des retraites par répartition que revêtent à nos yeux les politiques favorables à l'emploi et qui visent à faire reculer durablement le chômage.
L'orientation de l'article 9 n'est pas la nôtre. C'est pourquoi nous voterons l'amendement n° 330.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 330.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, pour explication de vote sur l'article 9.
M. Claude Domeizel. Cet article traite du cumul entre emploi et retraite.
Ainsi, à compter du 1er janvier 2004, tout retraité, sauf s'il bénéficie d'une retraite progressive, pourra percevoir des revenus d'une activité dès lors que ces derniers, ajoutés aux pensions perçues, resteront inférieurs aux derniers revenus ou, pour certaines professions, à un seuil fixé par décret. Au-delà d'une certaine somme, le service de la pension sera suspendu.
Mes chers collègues de la droite, vous voulez faciliter le cumul d'un emploi et d'une retraite alors même que nous vivons une nouvelle crise du marché de l'emploi - elle semble d'ailleurs correspondre à votre arrivée au pouvoir ! - et que les prévisions du nombre de chômeurs sont à la hausse : certains parlent de 160 000 demandeurs d'emploi supplémentaires et, les chiffres annoncés ces derniers jours le prouvent, nous les dépassons même puisque nous atteignons 200 000 chômeurs supplémentaires.
En adoptant l'article 9, vous allez faire la démonstration que votre réforme est mauvaise. Vous expliquez aux Français qu'il faut allonger la durée de cotisation pour sauver les régimes de retraite, mais vous leur permettez de cumuler une pension de retraite avec les revenus résultant du fruit d'un travail. Bref, vous êtes pédagogues et préparez les Français à la paupérisation des retraités ! C'est très clair ! Et comme vous savez qu'ils n'auront guère les moyens de capitaliser ni d'acheter des points de retraite, vous les invitez, pour qu'ils puissent mieux vivre et vieillir dans la dignité et le bien-être, à se constituer un complément de revenus. Et comment ? En travaillant !
Et puis, arrêtez de nous tenir le discours : « On s'épanouit dans le travail » ! Je ne suis pas certain que ceux qui nous disent cela aient bien connu tous les travaux que je citais : le maçon qui travaille au soleil, le marin, etc. (Protestations sur les travées de l'UMP.)
Vous voulez que je recommence ? Non ?
Mme Nelly Olin. Oh non ! Epargnez-nous ! (Sourires.)
M. Claude Domeizel. N'avez-vous toujours pas compris que le financement des retraites ne se fera pas sans une politique volontariste de l'emploi ? Expliquerez-vous aux jeunes qui essaient, autant que c'est possible, de se faire une place sur le marché du travail qu'ils seront victimes de votre réforme ?
Somme toute, cette disposition est stupide, car elle ne permettra pas à ceux qui veulent travailler de le faire mais obligera à continuer de travailler ceux qui souhaitent arrêter. Finalement, vous préparez un conflit des générations !
Et comme vous ne faites pas les choses à moitié, vous organisez la reprise d'activité chez le dernier employeur au plus tôt six mois après la date d'entrée en jouissance de la pension. Une fois encore - je sais que cela va vous faire bondir - le MEDEF pourra vous remercier des faveurs que vous lui faites ! (Protestations sur les travées de l'UMP.)
Par cette mesure, vous encouragez le licenciement des plus anciens tout en sachant que, six mois plus tard, ils constitueront une main-d'oeuvre à bon marché parce que la loi leur permettra le cumul, mais à des conditions particulières de non-dépassement du dernier salaire d'activité. Evidemment, cette disposition s'adressera aux plus modestes, et plus particulièrement aux femmes, qui, souvent, ont travaillé à temps partiel.
Mme Odette Terrade. Absolument !
M. Claude Domeizel. Je le répète : nous sommes contre votre réforme. Elle n'est que poudre aux yeux et va créer chez les Français un sentiment d'angoisse face aux réformes. Pourtant, toutes ne sont pas prétextes à régression sociale !
Finalement, monsieur le ministre, votre ami Alain Juppé, en 1995, était un enfant de choeur !
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Fourcade. On ne peut pas passer des jours et des jours à entendre proférer des énormités !
M. Domeizel parlait de stupidité. Qu'y a-t-il de plus stupide ? Est-ce d'essayer d'assouplir le régime du cumul emploi-retraite pour permettre aux personnes qui ont 55, 56 ou 57 ans de travailler un ou deux ans de plus, de manière à améliorer le financement de notre régime de retraite, ou bien est-ce d'avoir engagé, sous prétexte de mener une politique active de l'emploi, des dizaines de milliers de jeunes dans des emplois d'une durée limitée à cinq ans sans se préoccuper de la sortie du dispositif, sans se préoccuper de la formation, et en sachant parfaitement que ces jeunes seraient de nouveau sur le marché au bout de cinq ans ?
Je vous demande, mes chers collègues, ce qui est le plus stupide ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. Dominique Braye. C'est réglé !
M. le président. Je mets aux voix l'article 9, modifié.
(L'article 9 est adopté.)
M. le président. « Art. 10. - Le troisième alinéa de l'article L. 122-14-13 du code du travail est ainsi rédigé :
« La mise à la retraite s'entend par la possibilité donnée à l'entreprise de rompre le contrat de travail d'un salarié ayant atteint l'âge prévu au 1° de l'article L. 351-8 du code de la sécurité sociale. Si les conditions de mise à la retraite ne sont pas remplies, la rupture du contrat de travail par l'employeur constitue un licenciement. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Comme j'ai pris l'habitude de le faire, je voudrais, au début de l'examen de cet article, en resituer l'importance.
Aujourd'hui, l'employeur peut mettre un salarié à la retraite d'office si celui-ci a 60 ans et peut bénéficier d'une pension à taux plein. L'article 10 porte cet âge de 60 ans à 65 ans.
Pour nous, deux raisons motivent cette mesure. D'abord, une mise à la retraite à 60 ans est incompatible avec notre objectif d'augmenter le taux d'emploi des salariés âgés. Surtout, elle s'articule mal avec la philosophie du projet de loi, qui vise aussi à renforcer la liberté de choix et la souplesse dans les retraites.
La retraite ne doit plus être considérée comme un couperet. Ceux qui veulent travailler plus longtemps doivent pouvoir le faire, et c'est d'autant plus nécessaire que le maintien à 60 ans de l'âge de la mise à la retraite d'office pourrait empêcher un grand nombre de salariés de bénéficier de la surcote.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Demessine, sur l'article.
Mme Michelle Demessine. Les entreprises ont, depuis la loi du 30 juillet 1987, l'opportunité de se séparer de leurs salariés âgés, lorsque ces derniers peuvent prétendre à une pension de retraite à taux plein et remplissent les conditions d'âge de mise en retraite. Plutôt que par un licenciement, cette séparation s'exécute au moyen d'une mise en retraite d'office dès l'âge de 60 ans.
L'article 10 du présent projet de loi allonge de cinq années l'âge de mise en retraite d'office de ces salariés âgés. Dorénavant, les salariés répondant aux conditions de la loi du 30 juillet 1987 ne pourront être mis en retraite d'office par leurs employeurs qu'à l'âge de 65 ans.
En l'occurrence, il ne s'agit pas d'aller à l'encontre de la volonté des salariés âgés qui souhaiteraient rester dans l'emploi, et surtout pas d'accompagner la politique discriminatoire du patronat à l'encontre de cette catégorie de salariés. Il s'agit plutôt de lutter contre une disposition qui entérine l'allongement de la durée de vie active à 65 ans.
Sous couvert d'instituer un dispositif d'ordre social plus restrictif que la loi du 30 juillet 1987, vous obligez nos concitoyens à faire un bond en arrière de plus de vingt ans dans l'histoire sociale de notre pays. Cet article, qui prétend porter à 65 ans l'âge de mise à la retraite d'office d'un salarié, a, au fond, l'ambition, non pas de favoriser le maintien des salariés âgés dans l'emploi, comme le sous-entend le rapport de la commission des affaires sociales, mais plutôt de recourir à un moyen supplémentaire pour faire sauter l'âge pivot des 60 ans pour le départ à la retraite. A ce titre, il s'agit bien d'un recul historique notoire !
Depuis sa constitution, l'ordre social public n'a cessé d'évoluer vers une meilleure protection du salarié. Au fil des luttes sociales, le droit du travail a su fixer des limites à l'exploitation des femmes et des hommes de notre pays. Il a notamment introduit une limite fondamentale, celle des 60 ans pour âge limite de temps de travail dans l'existence d'un individu. Avec la mise en place de notre système de sécurité sociale, il a fourni les moyens financiers de sa pérennisation. Mais, aujourd'hui, vous forcez la représentation nationale à reculer cet âge limite à 65 ans, sous le prétexte fallacieux de préserver notre système de retraite par répartition et d'ouvrir le bénéfice de la surcote.
Vous le savez, monsieur le ministre, en aucun cas le recul de cinq ans de la limite d'âge pour la mise à la retraite d'office ne constitue une contrainte imposée aux entreprises pour conserver dans l'emploi les salariés âgés.
D'une part, parce que l'âge moyen de cessation d'activité est aujourd'hui de 57,5 ans, soit un âge largement inférieur à la limite des 60 ans. L'allongement de cinq années de cette limite ne fera qu'accroître le différentiel entre cet âge moyen et l'âge théorique que vous instituez.
D'autre part, parce que les stratégies managériales des entreprises n'ont que faire d'une disposition législative qui ne change qu'à la marge le coût financier d'une exclusion des salariés âgés de l'entreprise. En effet, la procédure de mise à la retraite d'office prévoit des contraintes imposées aux entreprises identiques à celles qui concernent une procédure de licenciement.
Ce n'est certainement pas de cette façon que vous inciterez les entreprises à conserver dans l'emploi les salariés âgés de plus de 60 ans. En revanche, c'est, à n'en pas douter, de cette façon que vous obligez les actifs âgés à travailler cinq années de plus pour bénéficier d'une retraite à taux plein ou à accepter une diminution du niveau de leur pension s'ils ne le font pas.
Vous voulez lancer un défi aux entreprises dont les victimes potentielles sont les salariés ! A d'autres moments, nous aurions appelé cela une prise en otage !
Aussi, vous le comprendrez, nous ne pouvons accepter un article qui masque aussi clairement ses intentions de faire porter le poids d'une réforme par les actifs, quand bien même la disposition qu'il envisage s'adresse aux entreprises.
Mme Odette Terrade. Très bien !
M. le président. Je suis saisi de sept amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 331, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
L'amendement n° 2, présenté par MM. Pelletier, Delfau et les membres du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, est ainsi libellé :
« I. - Remplacer le texte proposé par cet article pour le troisième alinéa de l'article L. 122-14-13 du code du travail par deux alinéas ainsi rédigés :
« La mise à la retraite s'entend de la possibilité donnée à l'employeur de rompre le contrat de travail d'un salarié ayant atteint l'âge visé au 1° de l'article L. 351-8 du code de la sécurité sociale. Dans le cadre d'une convention ou accord collectif étendu, fixant des contreparties en termes d'emploi ou de formation professionnelle, ou en cas de cessation d'activité en application d'un accord professionnel mentionné à l'article L. 352-3 ou d'une convention conclue en application du 3° du deuxième alinéa de l'article L. 322-4, un âge inférieur peut être fixé, dès lors que le salarié peut bénéficier d'une pension de vieillesse à taux plein au sens du code de la sécurité sociale.
« Si les conditions de mise à la retraite ne sont pas réunies, la rupture du contrat de travail par l'employeur constitue un licenciement.
« II. - En conséquence, à la fin du premier alinéa de cet article, remplacer les mots : "ainsi rédigé", par les mots : "remplacé par deux alinéas ainsi rédigés". »
Le sous-amendement n° 1129, présenté par M. Schosteck, est ainsi libellé :
« Dans la seconde phrase du deuxième alinéa du I de l'amendement n° 2, après les mots "accord collectif étendu", insérer les mots : "conclu avant le 1er janvier 2008". »
Le sous-amendement n° 1130, présenté par M. Schosteck, est ainsi libellé :
« Dans la seconde phrase du deuxième alinéa du I de l'amendement n° 2, après les mots : "du 3° du deuxième alinéa de l'article L. 322-4", insérer les mots : "ou dans le cadre du bénéfice de tout autre avantage de préretraite défini antérieurement à la date de publication de la présente loi". »
L'amendement n° 332, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par cet article pour le troisième alinéa de l'article L. 122-14-13 du code du travail, remplacer les mots : "1° de l'article L. 351-8" par les mots : "1er alinéa de l'article L. 351-1". »
L'amendement n° 222, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« A. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« II. - Si un salarié perçoit un avantage de préretraite défini antérieurement à la date de publication de la présente loi, sa mise à la retraite est possible dès qu'il peut bénéficier d'une pension de vieillesse à taux plein au sens du chapitre premier du titre V du livre III du code de la sécurité sociale et qu'il remplit les conditions d'ouverture du droit à la pension de vieillesse ou, si elles existent, les conditions d'âge prévues par la convention ou l'accord collectif, ou le contrat de travail.
« B. - En conséquence, faire précéder le début de cet article de la mention : "I. -". »
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 1032 est présenté par M. Gouteyron, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° 1055 est présenté par MM. Gournac et Chérioux.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« A. - Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
« II. - Les dispositions de l'alinéa précédent s'appliquent à compter du 1er janvier 2008.
« Avant cette date, à titre transitoire, à compter respectivement du 1er janvier 2004, du 1er janvier 2005, du 1er janvier 2006, du 1er janvier 2007, la mise à la retraite s'entend par la possibilité donnée à l'entreprise de rompre le contrat de travail d'un salarié respectivement un an, deux ans, trois ans, quatre ans au plus tôt après la date à laquelle le salarié peut bénéficier d'une retraite à taux plein, au sens du chapitre Ier du titre V du livre III du code de la sécurité sociale. Le salarié ne peut être mis à la retraite que sous réserve qu'il remplisse les conditions d'ouverture à la pension de vieillesse ou, si elles existent, les conditions d'âge prévues par la convention ou l'accord collectif, ou le contrat de travail. Si les conditions de mise à la retraite ne sont pas remplies, la rupture du contrat constitue un licenciement.
« Pendant la période transitoire définie à l'alinéa précédent, l'employeur peut toutefois procéder à la mise à la retraite d'un salarié ayant atteint l'âge prévu au 1° de l'article L. 351-8 du code de la sécurité sociale.
« Pour les personnes n'ayant pas atteint cet âge et ne pouvant percevoir qu'une pension de vieillesse à taux plein calculée sur une durée d'assurance inférieure à la limite mentionnée au 3e alinéa de l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale, la mise à la retraite ne peut intervenir avant que la durée d'assurance accomplie tant dans le régime général que dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires atteigne la limite précitée, ni avant qu'elles puissent faire liquider au taux plein l'ensemble des pensions auxquelles elles peuvent prétendre.
« III. - Au deuxième alinéa de l'article L. 351-19 du code du travail, les mots : "sur une durée de cotisation inférieure à 150 trimestres" sont remplacés par les mots : "sur une durée d'assurance inférieure à la limite mentionnée au 3e alinéa de l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale". »
« B. - En conséquence faire précéder le début de cet article de la mention : "I. -". »
L'amendement n° 1054, présenté par MM. Gournac et Chérioux, est ainsi libellé :
« A. - Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« II. - Les dispositions du troisième alinéa de l'article L. 122-14-13 du code du travail restent applicables, dans leur rédaction antérieure à celle issue de la présente loi, pour les salariés nés en 1943 ayant atteint l'âge de 61 ans, pour les salariés nés en 1944 ayant atteint l'âge de 62 ans, pour les salariés nés en 1945 ayant atteint l'âge de 63 ans et pour les salariés nés en 1946 ayant atteint l'âge de 64 ans.
« B. - En conséquence, faire précéder le début de cet article de la mention : "I. -". »
La parole est à Mme Michelle Demessine, pour présenter l'amendement n° 331.
Mme Michelle Demessine. J'ai défendu cet amendement lorsque je me suis exprimée sur l'article.
M. le président. La parole est à M. Jacques Pelletier, pour présenter l'amendement n° 2.
M. Jacques Pelletier. Cet amendement, qui a été signé par l'ensemble de mes collègues du RDSE, vise à donner plus de souplesse, plus de liberté dans le choix du départ à la retraite. Nous avons toujours été pour une certaine souplesse et une certaine liberté dans ce choix de la date de la retraite.
Il est vrai que certaines personnes sont fatiguées à soixante ans et ont besoin de prendre leur retraite à cet âge, quelquefois même plus tôt quand les métiers sont très pénibles. Mais il existe aussi des personnes qui, à soixante-cinq ans ou plus, sont encore en pleine forme et souhaitent continuer à travailler. Il faut leur laisser la liberté.
Aujourd'hui, dans la vie des entreprises, une majorité des salariés qui ont plus de soixante ans et qui ont toutes les années de cotisation nécessaires à une retraite pleine souhaitent prendre leur retraite. S'ils le font de leur initiative, ils partent avec une indemnité de départ inférieure à celle qu'ils recevraient si l'entreprise prenait l'initiative de les mettre en retraite. En outre, cette indemnité est chargée socialement et fiscalisée, à l'exception des 3 050 premiers euros, alors que l'indemnité de mise à la retraite sur l'initiative de l'entreprise n'est ni chargée socialement ni fiscalisée.
L'article 10 aboutit à une anomalie : un salarié de plus de soixante ans ayant acquis tous ses droits ne pourrait plus prendre sa retraite qu'à son initiative et serait donc pénalisé par rapport au système antérieur dans lequel l'entreprise lui demandait de prendre sa retraite.
Ce point n'a, au fond, que peu à voir avec le système de la surcote. Depuis toujours, en effet, le salarié qui reste plus longtemps dans l'entreprise acquiert, au titre des régimes ARRCO et AGIRC, des points supplémentaires. Cela ne change en rien son attitude à l'égard de sa date de retraite dès lors qu'il a bien toutes les années de cotisation nécessaires pour une retraite pleine.
Il faut donc laisser aux partenaires sociaux, par accord collectif, le soin de déterminer ce qui est bon pour eux, plutôt que de le faire décider par la loi. D'où notre amendement, fondé du reste sur une expérience réussie dans la métallurgie. Cette branche dispose, en effet, depuis trois ans, d'un accord qui maintient le système de la mise à la retraite par l'employeur avant soixante-cinq ans quand le salarié de plus de soixante ans a acquis tous ses droits mais qui conditionne cette possibilité à des contreparties d'emploi ou de formation professionnelle, ce qui est important.
Une telle disposition peut parfaitement être adoptée dans d'autres secteurs qui n'ont pas un tel accord collectif, en le faisant soit branche par branche, soit sous la forme d'un accord interprofessionnel.
Nous sommes très partisans des accords entre les partenaires sociaux, qui, à l'évidence, donnent plus de souplesse au système. Je me tourne vers M. le ministre et M. le rapporteur de la commission des affaires sociales qui, tous deux, sont très favorables aux accords entre les partenaires sociaux. Je souhaite vivement qu'ils émettent un avis favorable sur cet amendement. (M. Max Marest applaudit.)
M. Jean-Pierre Cantegrit. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Schosteck, pour présenter les sous-amendements n°s 1129 et 1130.
M. Jean-Pierre Schosteck. L'amendement présenté par M. Pelletier vise en effet à apporter une solution équilibrée au problème de la mise à la retraite par l'employeur et tend à introduire une progressivité dans sa mise en oeuvre. La souplesse dans la fixation de l'âge minimal est en effet justifiée si elle repose sur la négociation. Cependant il ne paraît pas utile d'ouvrir indéfiniment cette fenêtre de négociation. C'est la raison pour laquelle je vous propose, par le sous-amendement n° 1129, de définir strictement la période ouverte à la négociation tout en garantissant le caractère pérenne des accords qui auront été conclus. Cette période se terminera le 1er janvier 2008, c'est-à-dire précisément au moment où le Gouvernement aura fait un bilan de l'allongement de la durée d'activité des salariés expérimentés.
J'en viens au sous-amendement n° 1130. L'amendement présenté par M. Pelletier a permis de maintenir la possibilité d'une mise à la retraite avant 65 ans dans un certain nombre de situations, notamment lorsque le salarié bénéficie d'une préretraite au titre du dispositif de cessation d'activité de certains travailleurs salariés, le CATS, ou bien au titre du dispositif des préretraites progressives. Le sous-amendement n° 1130 vise à élargir le maintien de cette possibilité d'une mise à la retraite avant 65 ans dans le cadre de tout autre dispositif de préretraite dont le bénéfice aurait été acquis avant la date de publication de la loi. Il s'agit ainsi, vous l'avez compris, de sécuriser notamment les entreprises qui ont mis en place avant l'adoption de la loi des dispositifs de préretraite d'entreprise auxquels des salariés ont adhéré sur la base du volontariat.
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour présenter l'amendement n° 332.
M. Roland Muzeau. Au moment où le Gouvernement veut inciter les salariés du secteur privé à travailler plus longtemps, 41 ans en 2012 et 42 ans en 2020, les entreprises continuent de recourir massivement aux départs anticipés dans les processus connus de restructuration et de plans sociaux.
Face à ce que vous appelez « le choc démographique », « les entreprises vont se retrouver en position de demandeur pour attirer et fidéliser des jeunes de moins en moins nombreux sur le marché du travail », souligne M. Michel de Virville, secrétaire général de Renault.
A moins, comme toujours et malgré certains discours, de recourir à l'immigration ou de délocaliser une partie de leurs activités, « les entreprises vont, spontanément, être tentées de vouloir garder leurs salariés plus longtemps, jusqu'à 60 ans et au-delà », ajoute M. Michel de Virville.
Mais, cela signifierait un changement radical d'organisation des méthodes de travail : les gestionnaires d'entreprises devraient adapter leur système de rendement, en particulier de robotisation, au vieillissement de leurs effectifs ; les salariés devraient bénéficier d'une formation continue tout au long de leur carrière, assortie de perspectives d'évolution de leur vie professionnelle.
Nombre d'entreprises comptent dorénavant sur l'expérience des anciens pour transférer, sous la forme de tutorat, un savoir-faire et la culture d'entreprise, et on les comprend !
Le Gouvernement a averti les entreprises que si, en 2008, les salariés, dans leur majorité, ne sont pas en poste jusqu'à l'âge légal de 60 ans, il faudra augmenter les cotisations.
Mais il est impossible de fixer un allongement de la durée de cotisation si on n'organise pas le maintien au travail des plus de 50 ans.
Or il est peu vraisemblable de rompre avec les fins de carrière anticipées puisque les raisons économiques qui fondent le mode de gestion de la main-d'oeuvre - et je dirai vos raisons économiques qui fondent vos modes de gestion - ne changent pas.
Qu'il s'agisse des rémunérations, de l'organisation du travail, du développement de la formation continue et de la gestion des carrières, l'allongement de la vie professionnelle représente un coût que peu d'entreprises envisagent d'évaluer.
Il faudra des années pour restaurer « le plein emploi des salariés âgés » - formule qui me déplaît fortement -, même si vous prévoyez, pour le patronat, un soutien de l'Etat au maintien dans l'emploi des 50-60 ans et plus !
Tout cela m'apparaît comme une incohérence, pour ne pas dire comme un mensonge par omission : en travaillant au-delà de 60 ans et en cotisant plus, le salarié âgé entre dans « l'armée de réserve de main-d'oeuvre docilisée par la précarisation, qui isole, atomise, individualise, démobilise, désolidarise », comme le décrit si bien Pierre Bourdieu.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Remarquable !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 222.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Cet amendement aménage le régime de mise à la retraite pour les salariés en préretraite. Dans un souci de sécurité juridique, il convient de maintenir les conditions actuelles de mise à la retraite, au moins pour les conventions de CATS et de préretraites conclues avant la promulgation de la loi.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 1032.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Cet amendement a le même objectif que l'amendement présenté par M. Jacques Pelletier. Pour dire la vérité, je me suis longuement interrogé sur la formulation que j'allais retenir pour atteindre cet objectif. Finalement, je me suis rallié à une formulation différente, qui est plus rigide, monsieur le ministre, mais qui, à mes yeux, présente l'avantage d'être claire et de poser des étapes préalablement définies et qui doivent conduire avec sûreté à l'objectif que l'on veut atteindre.
Je sais bien que des expériences ont été menées ; on a cité l'Union des industries et métiers de la métallurgie, l'UIMM. Je n'ignorais pas ces expériences, mais il m'a semblé qu'il fallait voir les choses plus largement. J'ai donc, en fin de compte, préféré une formulation progressive.
J'ajoute que cet amendement a un autre avantage, qui n'est d'ailleurs pas accessoire. Il permet de ne pas pénaliser les assurés qui ont des périodes reconnues équivalentes. Je pense en particulier aux Français établis hors de France.
Mme Paulette Brisepierre. Merci !
M. Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis. Monsieur le ministre, lors de votre propos liminaire, vous nous avez dit que le Gouvernement est parfaitement conscient du fait qu'il faut, pour que la réforme réussise, obtenir que les comportements changent à l'égard du travail. Cet amendement y tend, et ce de manière progressive et suffisamment incitative. Voila pourquoi je le présente avec un peu d'insistance mais, surtout, avec beaucoup de conviction.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Alain Gournac, pour défendre l'amendement n° 1055.
M. Alain Gournac. Je salue le souci du Gouvernement d'essayer de maintenir au travail les personnes âgées de plus de 60 ans. Mais ce dispositif doit être mis en oeuvre en une seule fois, dès la promulgation de la loi. N'est-il pas possible, au contraire, de l'appliquer progressivement, tout en respectant, bien sûr, l'échéance de 2008 ?
Par ailleurs, les périodes reconnues équivalentes correspondant à des périodes particulières pendant lesquelles l'assuré n'a pas cotisé sont néanmoins prises en compte pour réaliser le calcul du taux : périodes d'activité à l'étranger accomplies avant 1983, activités d'aide familiale ou agricole exercées, selon le cas, avant 1976 ou 1983.
M. le président. Monsieur Gournac, je vous donne de nouveau la parole, pour défendre l'amendement n° 1054.
M. Alain Gournac. Si le report à 65 ans de l'âge autorisant la mise à la retraite par l'employeur est de nature à favoriser le relèvement du taux d'emploi des salariés âgés, il importe d'organiser la mise en oeuvre de ce report de manière progressive, comme c'est le cas pour les autres dispositions du projet de loi.
Aussi, et sans préjudice des résultats des futures négociations des partenaires sociaux sur le thème de l'âge au travail, cet amendement vise à prévoir une telle période transitoire.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. S'agissant des amendements n°s 331 et 332, présentés par Mme Demessine et visant à supprimer de l'article 10, vous comprendrez, mes chers collègues, que la commission y soit défavorable. Viennent ensuite, plusieurs amendements qui ont le même objectif.
Pour ma part, j'ai tenu, au début de la discussion des articles, à dire quelles étaient les intentions de la commissions et ses priorités concernant cet article 10.
Il s'agit d'un article intéressant qui porte de 60 à 65 ans l'âge possible de départ à la retraite. Nous pensons qu'il répond totalement à l'objectif consistant à favoriser un meilleur taux d'emploi des salariés âgés. Par ailleurs, il laisse une plus grande liberté de choix quant à l'âge du départ à la retraite entre 60 et 65 ans.
On dit que la retraite serait considérée comme un couperet, mais cet article prouve le contraire.
Enfin, autre élément fort de ce projet de loi et toujours dans le même esprit, cet article donne la possibilité aux salariés qui poursuivent leur activité au-delà de la durée nécessaire pour bénéficier du taux plein d'avoir droit à une surcote afin d'améliorer leur pension.
Pour ce qui est de la proposition de la commission des finances défendue par M. Gouteyron qui prévoit une progressivité que je qualifierai d'arithmétique de la mise en place de la mesure transitoire ou d'une autre proposition un peu plus souple, je dirai que ce qui nous paraît essentiel pour respecter l'esprit de la loi, c'est de considérer l'année 2008 comme une année pivot.
Il convient par ailleurs que les partenaires sociaux soient associés à la mise en place de ce dispositif transitoire.
Le dispositif transitoire doit comporter une limite, sinon l'esprit de la loi serait dénaturé. Telles sont les recommandations de la commission des affaires sociales.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Cet article est important, car il assure la cohérence de la législation actuelle avec l'objectif principal de ce texte qui est de convaincre nos concitoyens de travailler plus longtemps.
La philosophie du projet de loi est, par toute une série de moyens - la sucrote, la décote, l'allongement de la durée de cotisation, le cumul emploi-retraite notamment - de convaincre nos concitoyens que, pour améliorer leur retraite, mais aussi pour donner à notre pays les moyens de sa croissance, alors même que nous allons vers une réduction du nombre d'actifs du fait de la démographie, il faut travailler plus longtemps.
Je ne vois pas comment on pourrait inciter nos concitoyens à travailler plus longtemps tout en laissant entre les mains des chefs d'entreprise une arme qui leur permettrait de licencier les salariés à 60 ans, quand bien même ceux-ci voudraient continuer à travailler plus longtemps.
Je suis donc particulièrement hostile à toute sorte d'amendements qui viendraient soit supprimer cet article, soit introduire un certain nombre de dérogations qui, finalement, le videraient de son sens.
Je comprends bien, compte tenu du nombre d'amendements déposés sur ce sujet, que cette disposition pose quelques difficultés de mise en oeuvre et qu'il faut une certaine progressivité. Mais je n'y suis pas franchement favorable parce que la surcote s'applique dès aujourd'hui et qu'il est nécessaire d'envoyer des signaux clairs et forts, aussi bien aux chefs d'entreprise qu'aux salariés.
Si le Sénat devait introduire un peu de progressivité, il faudrait au minimum que cela se fasse au terme d'un dialogue social et d'un accord de branche. Telle est, globalement, la position du Gouvernement sur ce sujet.
S'agissant de l'amendement n° 331, qui est un amendement de suppression de l'article, j'ai affirmé à l'Assemblée nationale que je rendais service au groupe communiste et républicain en demandant à la majorité de le repousser.
Si la majorité votait votre amendement de suppression ce qui pourrait tenter certains, compte tenu des difficultés de mise en oeuvre que je viens d'évoquer, le groupe communiste républicain et citoyen serait responsable d'une règle qui permettrait aux chefs d'entreprise de continuer à licencier les salariés à 60 ans, même s'ils veulent continuer à travailler. (Rires et exclamations sur les travées du groupe CRC.)
M. Guy Fischer. C'est la meilleure !
M. François Fillon, ministre. C'est la réalité de l'amendement que vous avez déposé. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Roland Muzeau. Allez raconter cela aux travailleurs d'Alstom ! (M. Jean Chérioux proteste.)
M. François Fillon, ministre. Pour vous éviter d'être ridicules, je demande donc à la majorité de repousser l'amendement n° 331.
S'agissant de l'amendement n° 2 de M. Pelletier et des membres du groupe du RDSE, c'est celui qui paraît le plus acceptable dans la liste des amendements qui sont proposés, puisqu'il introduit l'idée de progressivité à la suite d'un accord de branche.
Cela dit, il faudrait impérativement, si le Sénat voulait adopter cet amendement, qu'il adopte également les sous-amendements n°s 1129 et 1130 présentés par M. Schosteck, le premier pour mettre un terme en 2008 à cette procédure parce qu'il n'y a pas de raison pour qu'elle continue indéfiniment lorsque les efforts ont été faits pour augmenter le taux d'activité et alors même que la durée de cotisation commencera à s'allonger, et le second parce qu'il permet de régler à la fois la question des CATS et le problème soulevé par M. le rapporteur et qui l'a conduit à déposer un amendement.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 332.
Concernant l'amendement n° 222, je considère qu'il serait satisfait si le Sénat adoptait l'amendement de M. Pelletier, modifié par les sous-amendements de M. Schosteck.
Pour ce qui est de l'amendement n° 1032 que M. Gouteyron a défendu avec beaucoup de passion, je crois que son objectif peut être atteint par l'amendement de M. Pelletier qui présente l'avantage de fixer des limites, notamment la nécessité pour les chefs d'entreprise et les organisations syndicales d'entamer dès maintenant un dialogue sur l'ensemble de ces sujets.
Seul le dialogue social permettra de lancer une vraie dynamique s'agissant des changements de comportement au regard des salariés les plus âgés. Si tel n'est pas le cas, nous allons vers de graves difficultés en 2008. Si l'on ne progresse pas sur cette question des salariés âgés, l'essentiel de cette réforme, c'est-à-dire l'allongement de la durée de cotisation, ne pourra pas être mis en oeuvre.
Je suis donc défavorable à l'amendement n° 1032, de même qu'aux amendements n°s 1055 et 1054, pour les mêmes raisons.
En résumé, le Gouvernement est défavorable à l'ensemble des amendements qui ont été déposés, mais il s'en remettra à la sagesse, sur l'amendement n° 2 de M. Pelletier modifié par les sous-amendements n°s 1129 et 1130 de M. Schosteck.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l'amendement n° 331.
Mme Annie David. Monsieur le ministre, le dispositif que vous proposez avec cet article 10 démontre bien la logique de votre réforme.
M. le rapporteur nous a dit que cet article reflétait la philosophie de votre texte, il a parlé d'une plus grande liberté de choix, et affirmé qu'il ne fallait pas considérer la retraite comme un couperet.
Pour notre part, nous faisons un constat : les salariés cotiseront plus et travailleront au-delà de 60 ans. Pour cela, vous repoussez à 65 ans l'âge de référence, l'âge pivot à partir duquel il peut être mis fin au contrat de travail d'un salarié.
Votre raisonnement ne masque pas le véritable fondement de la réforme : vous faites comme si le désemploi des seniors n'était dû qu'à la législation, qui empêcherait ceux qui le veulent de travailler.
C'est rarement le cas alors que, selon l'OCDE, la France a un des taux d'emploi des 55-65 ans les plus faibles : 36 % contre 48 % en moyenne.
On sait que deux actifs sur trois sont déjà exclus du marché du travail avant d'être officiellement retraités.
On sait également que les dispositifs de préretraite ont pleinement été utilisés par les employeurs, avec la bénédiction de l'Etat, mais aussi avec l'accord des salariés poussés vers la sortie pour laisser place aux jeunes dans un objectif de régulation de l'emploi.
C'est ainsi que la volonté d'élargir le bas de la pyramide des âges a fait de la préretraite une « aide démographique aux entreprises » s'ajoutant en réalité aux autres processus d'exclusion du marché du travail des salariés vieillissants.
Dès lors, en posant la question de la préretraite indépendamment de toute vision générale sur l'emploi, vous occultez les vrais termes du débat. Vous faites pression sur les salariés pour qu'ils travaillent plus sans vous occuper des fausses incitations à l'emploi que sont les exonérations fiscales, sans dire un mot des conditions de travail, qui sont pourtant un élément fondamental de « l'employabilité » - j'insiste sur ce mot barbare - des plus de 50 ans.
Il n'y a rien non plus sur la formation, alors que le MEDEF, qui se lamente de l'absence de personnel qualifié, est en train de saborder la formation.
Le débat est ainsi complètement faussé, ce que révèle bien la réponse que vous aviez faite, monsieur le ministre, à nos collègues députés : « Il suffirait que je donne un avis favorable à cet amendement, que je suggère à la majorité de le voter, pour que nous réussissions l'exploit de permettre aux, chefs d'entreprise de licencier à 60 ans leurs salariés alors même que l'allongement de la durée de cotisation aura été décidé. »
Dites-le aux salariés d'Alsthom, aux salariés de Hewlett-Packard, qui vont partir à 52 ans, en pleine force de l'âge, aux salariés d'Atofina, qui partiront eux aussi à 52 ans, alors qu'ils ont respiré tout leur vie de l'amiante.
M. Dominique Braye. Si vous n'aviez pas été là pendant cinq ans, cela n'aurait pas été le cas !
M. Roland Muzeau. C'est cela le monde de l'entreprise !
M. Jean Chérioux. Il n'y a pas que vous qui le connaissez !
Mme Annie David. Tout est dit, mes chers collègues ! Gardons notre calme. Nous avons réussi à rester sereins jusqu'à maintenant, continuons !
Pas de politique de lutte contre les licenciements, travail forcé pour les plus de 60 ans, consécration des retraites incomplètes : voilà un bel exemple de liberté et de garantie pour les salariés.
Je demande un scrutin public sur cet amendement.
M. François Fillon, ministre. C'est formidable, le meilleur défenseur du patronat, c'est le parti communiste !
M. le président. La parole est à M. Jean Chérioux, pour explication de vote.
M. Jean Chérioux. Comme M. le ministre, je suis étonné de la réaction de la gauche par rapport à ces dispositions.
C'est vrai qu'il y a des salariés qui sont fatigués à 55 ans ou 56 ans du fait de la pénibilité de leur travail et qu'ils aspirent à prendre leur retraite.
Mais ce que vous oubliez, ou que vous ne voulez pas reconnaître, c'est que certaines personnes trouvent parfois dans le travail une dignité, un accomplissement.
Or, face à ce problème du travail à un certain âge, qui doit décider, qui doit choisir, sinon le travailleur lui-même ?
Mme Nelly Olin. C'est vrai !
M. Jean Chérioux. Il est totalement inadmissible que vous considériez que c'est à l'employeur de décider si le salarié est encore en état de travailler ou de ne pas travailler.
M. Dominique Braye. Ils en sont encore au stalinisme ! (vives protestations sur les travées du groupe CRC.)
M. Jean Chérioux. Je trouve choquant qu'un patron puisse se permettre de dire à un employé qu'il n'a plus besoin de lui du fait de son âge. (Vives exclamations sur les travées du groupe CRC.)
Même s'il a un problème de santé, c'est le travailleur lui-même qui doit décider, et certainement pas le patron.
La position prise par M. le ministre est certainement la plus digne sur le plan humain. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Protestations sur les travées du groupe CRC.)
M. Dominique Braye. Ils en sont encore au stalinisme !
M. Roland Muzeau. Ah ! Cela faisait longtemps !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre. Je me réjouis que le groupe CRC ait demandé un scrutin public.
Nous voulons retirer au chef d'entreprise le droit de mettre fin au contrat de travail avant 65 ans, et cela avec l'accord des organisations syndicales unanimes.
Vous prenez vos responsabilités ! Il y a un scrutin public, chacun saura qui est cohérent et qui ne l'est pas. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 331.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin
n° 201
:
Nombre de votants | 318 |
Nombre de suffrages exprimés | 316 |
Pour | 29 |
Contre | 287 |
La parole est à M. Jacques Pelletier, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 1129.
M. Jacques Pelletier. Je remercie M. Schosteck d'avoir présenté ces deux sous-amendements, qui me paraissent compléter utilement l'amendement que j'ai déposé avec M. Delfeu et mes collègues du groupe du RDSE. En effet, un délai de quatre ans et demi pour conclure un accord de branche est suffisant. Si des accords de branche ne sont pas conclus dans les quatre ans et demi, c'est qu'ils ne le seront probablement jamais.
La date du 1er janvier 2008 me semble d'autant plus judicieuse que le Gouvernement doit déposer, autour de cette même date, un rapport sur l'évolution du taux d'activité des personnes de plus de 50 ans.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis. Tout le monde l'a bien compris : entre ma proposition et celle qui va être maintenant soumise à nos votes, les intentions sont les mêmes, la volonté la même, c'est la méthode qui diffère.
Pardonnez-moi de vous le dire, monsieur le ministre, dans l'avis que vous avez exprimé tout à l'heure, je n'ai pas retrouvé la clarté qui vous est coutumière.
Je suis certes pour la souplesse et pour les contrats, mais je suis aussi pour la volonté. Quand on se donne un objectif, il est nécessaire de fixer des étapes. C'est pourquoi j'ai déposé l'amendement n° 1032.
Vous avez, monsieur le ministre, approuvé le sous-amendement de mon ami Jean-Pierre Schosteck et je comprends bien pourquoi : il introduit la date du 1er janvier 2008.
Cependant, s'il est adopté et que l'amendement n° 2 l'est également, les accords devront certes être conclus avant 2008, mais ils pourront continuer à s'appliquer au-delà.
Autrement dit, vous donnerez tout de même un petit coup de canif - j'essaie de ne pas employer des termes trop vigoureux ! - à la mesure que vous avez initalement fait figurer dans le texte.
Je persiste à penser que la méthode proposée dans l'amendement que j'ai déposé au nom de la commission des finances, pour être plus rigoureuse, est aussi plus sûre que le dispositif prévu par le président Pelletier - qu'il veuille bien me pardonner ! -, M. Delfau et les membres du RDSE, assorti des sous-amendements de M. Schosteck.
Qu'il y ait des aménagements à apporter, je veux bien l'admettre, mais, pour l'instant, je m'en tiens à ma position.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre. Puisque je n'ai pas été assez clair, je tiens à mettre les choses au point.
La différence fondamentale entre la proposition de M. Gouteyron et celle de M. Pelletier, c'est que, dans un cas on demande leur avis aux partenaires sociaux, et pas dans l'autre. Dans un cas, c'est automatique, et c'est donc le chef d'entreprise qui a entre les mains ce droit de mettre fin au contrat de manière progressive...
M. Jean Chérioux. Absolument !
M. François Fillon, ministre. ... alors que dans l'autre cas, on demande aux partenaires sociaux de se mettre autour de la table, branche par branche, pour décider des conditions dans lesquelles cette progressivité pourra être acquise.
Chacun voit bien l'intérêt qu'il y a à engager les partenaires sociaux, par toutes sortes de moyens, à discuter de la question du maintien au travail des salariés de plus de 55 ans. Cela va être une affaire très difficile, tout le monde le fait remarquer depuis le début de ce débat, car des habitudes ont été prises dans notre pays. C'est une sorte de confort, finalement, que d'utiliser des salariés pendant la période où ils sont les plus productifs, c'est-à-dire quand ils ont déjà de l'expérience, mais où ils ne sont pas encore trop avancés en âge. Il va falloir changer tout cela !
Ce sera vraiment difficile parce qu'il s'agit de mettre fin à une pratique qui est inscrite dans la culture de notre pays depuis de nombreuses années.
Tout ce qui incitera les partenaires sociaux à se mettre autour de la table est donc extrêmement positif. Les chefs d'entreprise seront, en quelque sorte, mis dans l'obligation d'engager le dialogue. S'ils veulent de la souplesse dans l'application de cette mesure pendant quelques années, il faut qu'il y ait un accord avec les partenaires sociaux.
Moi, j'aime bien que les textes soient équilibrés ; j'aime bien qu'il y ait des incitations des deux côtés, du côté des organisations syndicales, certes, mais aussi du côté des organisations patronales. C'est pourquoi la rédaction proposée par le Gouvernement me semblait la plus simple et la meilleure. Cela étant, la proposition de M. Pelletier est acceptable parce qu'elle renvoie aux partenaires sociaux, alors que la progressivité automatique me paraît gênante. Je maintiens donc un avis défavorable sur la proposition de la commission des finances.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Cantegrit, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Cantegrit. J'apprécie l'amendement qui a été déposé par M. le président Pelletier et par M. Delfau. Mais je souhaite dire aussi à M. Gouteyron et à M. Gournac que j'ai été sensible au fait qu'ils aient bien voulu évoquer les Français de l'étranger et faire en sorte que la situation de nos compatriotes expatriés, notamment dans les autres pays de l'Union européenne, soit prise en compte dans leurs amendements.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 1129.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte le sous-amendement.)
M. le président. La parole est à M. Jean Chérioux, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 1130.
M. Jean Chérioux. Je souhaite intervenir pour deux raisons.
En premier lieu, l'amendement n° 2 est beaucoup plus conforme à l'esprit du texte que nous examinons. En effet, la réforme qui nous est proposée part d'un accord syndical, ce qui signifie qu'elle a été élaborée dans le cadre d'une négociation avec les syndicats. Or cet amendement présente l'avantage de se référer à la négociation entre les partenaires sociaux.
En second lieu, je considère, à titre personnel, que cet amendement correspond plus à l'esprit de participation, qui vise à la libération du salarié par rapport à son entreprise. (M. le ministre fait un signe d'approbation.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis. Je vais retirer l'amendement n° 1032, qui n'a plus de sens après l'adoption du sous-amendement n° 1129. Mais je ne peux laisser dire que l'amendement n° 2 est plus conforme à l'esprit de participation.
M. Jean Chérioux. C'est mon avis ! J'ai le droit d'avoir une opinion !
M. Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis. Bien sûr, mais je dis amicalement que je ne partage pas ce point de vue !
Je constate simplement que ce sous-amendement tend à prolonger au-delà de 2008, à condition qu'il y ait accord de branche, la possibilité de fixer un âge inférieur.
Je retire donc mon amendement de bonne grâce, sans amertume, monsieur le ministre, mais sans enthousiasme excessif ! (Sourires et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. L'amendement n° 1032 est retiré.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 1130.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2, modifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, les amendements n°s 332 et 222 n'ont plus d'objet.
Monsieur Gournac, les amendements n°s 1055 et 1054 sont-ils maintenus ?
M. Alain Gournac. Je les retire, monsieur le président.
M. le président. Les amendements n°s 1055 et 1054 sont retirés.
La parole est à Mme Claire-Lise Campion, pour explication de vote sur l'article 10.
Mme Claire-Lise Campion. L'existence d'une décote très sévère, les nouvelles règles de calcul de la retraite ainsi que le passage prévu à quarante-deux annuités condamnent la majorité des salariés à travailler au-delà de 60 ans. Encore faut-il que les employeurs et le marché du travail leur laissent une telle opportunité. Or nous savons qu'il est très difficile de parachever une carrière complète au-delà de 60 ans.
La principale solution que vous proposez pour favoriser l'emploi des seniors repose sur la décote. Il eût été préférable d'inciter les entreprises à maintenir les salariés de plus de 55 ans en activité, plutôt que de pénaliser ces derniers, exclus du marché du travail contre leur gré.
Plus qu'une simple mesure d'accompagnement, il eût fallu mettre en place une grande politique nationale de l'emploi et en faire un volet essentiel de la politique des retraites. L'article 10 ne suffira pas à lui seul à pérenniser l'emploi des plus de 50 ans, nous le savons.
Par ailleurs, nous émettons des réserves quant à la fiabilité de votre partenaire, le MEDEF, dans l'application de cet article. Vous comptez sur le patronat pour prolonger l'action du Gouvernement et, pour l'heure, le MEDEF compte sur vous pour se conformer à ses desiderata. La majorité n'a pas manqué de s'en faire l'écho pour revenir sur cet article.
Dans ces conditions, et compte tenu des modifications qui y ont été apportées, nous ne pouvons pas soutenir un tel article. Celui-ci n'est plus qu'une pâle copie de celui que nos collègues de l'Assemblée nationale avaient adopté.
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote.
M. Roland Muzeau. L'article 10 vise à maintenir à 60 ans l'âge ouvrant la possibilité pour l'employeur de mettre fin au contrat de travail sans que cette rupture soit considérée comme un licenciement. En introduisant la référence à l'âge mentionné au 1° de l'article L. 351-8 du code de la sécurité sociale, vous portez à 65 ans cette possibilité.
Pour notre part, nous sommes résolument opposés au fait d'imposer aux travailleurs une obligation de travail jusqu'à 65 ans pour pouvoir bénéficier d'une retraite décente.
Chacun ici mesure-t-il bien ce que cela signifie pour les travailleurs qui effectuent des travaux particulièrement pénibles, comme c'est souvent le cas dans le bâtiment et les travaux publics, mais également dans tout ce qui relève du travail posté ? Que penser également de l'allongement de la durée d'activité dans le domaine du transport public ou scolaire ?
Il y a là une vraie question d'humanité qui ne devrait pas laisser aussi indifférent. Sommes-nous devenus individualistes au point de ne pas en tenir compte ? La question ne devrait-elle pas interpeller un ministre qui a en charge, selon son titre même, la solidarité ?
A mesure que l'examen de ce texte progresse, sans que la droite manifeste le moins du monde la volonté de prendre en compte l'avis des autres, de ceux qui ont manifesté, par exemple, même s'ils expriment la volonté de la très grande majorité des Français, il me vient à l'esprit que cette année marquera la fin des Lumières. Les Lumières, en effet, c'était la croyance dans un progrès humain, dans un progrès scientifique et technique au service de l'homme avec, pour principes de base, la liberté et l'égalité.
Nous entrons aujourd'hui, je crois, dans une période de déclin progressif de ces principes qui ont pourtant fait le rayonnement de la France.
Rappelons-nous le message que nous envoyaient les révolutionnaires de 1789 : « Les Représentants du Peuple Français, constitués en Assemblée nationale, considérant que l'ignorance, l'oubli ou le mépris des Droits de l'Homme sont les seules causes des malheurs publics...
M. Dominique Braye. Comment osez-vous, vous parlez de cela ?
M. Roland Muzeau. ... et de la corruption des gouvernements, ont résolu d'exposer dans une Déclaration solennelle, les Droits naturels, inaliénables et sacrés de l'Homme afin que cette Déclaration, constamment présente à tous les membres du corps social, leur rappelle sans cesse leurs droits et leurs devoirs ; afin que les actes du Pouvoir législatif et ceux du Pouvoir exécutif, pouvant être à chaque instant comparés avec le but de toute institution politique, en soient plus respectés ; afin que les réclamations des citoyens, fondées désormais sur des principes simples et incontestables, tournent toujours au maintien de la Constitution et au bonheur de tous. »
L'article Ier affirmait : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les disctinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune. »
M. Dominique Braye. Sur ce chapitre, vous feriez mieux de vous taire !
M. Roland Muzeau. Plus près de nous, c'est la vision progressiste du préambule de 1946, dans lequel il est affirmé que « chacun a le devoir de travailler et le droit d'obtenir un emploi » et, plus loin, que la nation « garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence. »
Avec le présent texte, on est bien loin des idées généreuses d'après-guerre ! Les sénateurs communistes républicains et citoyens refusent, quant à eux, de transiger sur de tels principes. C'est pourquoi ils considèrent que nous devons maintenir dans notre système de retraite le droit à une retraite décente pour tous dès l'âge de 60 ans.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Fourcade. Je tiens à dire que l'article 10 est un article essentiel du texte. Lors de la discussion générale - rappelez-vous, c'était au début de la semaine ! -, j'ai expliqué que le texte que vous nous présentiez, monsieur le ministre, était équilibré, ce qui signifie qu'il comporte des avantages pour certains, mais qu'ils sont répartis.
J'ai dit aussi que, l'objectif étant de sauver - tout le monde l'a oublié, aujourd'hui ! - le système des retraites par répartition, il fallait bien allonger la durée de cotisation, mais que cela devait se traduire par un certain nombre de changements dans la culture des entreprises.
Vous avez vous-même évoqué, monsieur le ministre, cette idée fausse selon laquelle il faut faire partir les vieux pour embaucher les jeunes. Or cette idée n'a jamais été développée qu'en France.
M. Dominique Braye. Les communistes continuent à la défendre !
M. Jean-Pierre Fourcade. Effectivement !
Partout ailleurs, on a compris que l'emploi des jeunes passait par la formation, par la compétitivité des entreprises, et non par une espèce de jeu de taquin dans lequel on renvoie les uns pour prendre les autres.
L'article 10, au contraire, apporte aux salariés et aux organisations syndicales qui ont signé le protocole avec le Gouvernement la garantie que la « retraite couperet » à 60 ans disparaît. D'ailleurs, nous avons tous reçu un certain nombre d'appels téléphoniques ou de courriers émanant de chefs d'entreprise qui n'étaient pas favorables à cette mesure. C'est la raison pour laquelle j'ai été foncièrement étonné de voir le groupe CRC demander un scrutin public sur cette disposition que le MEDEF conteste. Il la conteste parce qu'il est beaucoup plus commode pour lui d'avoir un système de « retraite couperet » à 60 ans.
C'est donc un texte équilibré, et l'adoption de l'amendement n° 2 assorti des sous-amendements de M. Schosteck va donner à la négociation sociale un certain nombre de points précis d'application.
M. Roland Muzeau. Il faut croire au père Noël !
M. Jean-Pierre Fourcade. Il est en effet important de renvoyer, dans le texte que nous allons finalement voter - je ne sais pas quand, mais nous finirons bien par le voter ! -, à la négociation collective, de manière que ses dispositions puissent s'adapter à des circonstances différentes.
On a parlé de pénibilité. Elle figure dans le texte puisqu'il en est question à l'article 16 ter.
Enfin, avant de voter l'article 10, je souhaiterais parler de ceux qui sont descendus dans la rue pour manifester.
Je rappellerai quelques chiffres : la population active dans notre pays compte 23 millions de personnes. Sur ces 23 millions, 14 millions sont des salariés du secteur privé, 6 millions des salariés du secteur public et 3 millions sont des travailleurs indépendants. Telles sont les masses pour lesquelles nous légiférons. Ce n'est pas parce que quelques centaines de milliers de salariés du secteur public sur les 6 millions que compte ce secteur sont venus manifester que nous devons sans cesse nous référer à la rue. (Protestations sur les travées du groupe CRC.) C'est à la réalité qu'il faut se référer ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme Odette Terrade. C'est scandaleux !
M. Dominique Braye. Ils ne représentent que 3,6 % des votants !
M. Roland Muzeau. Vous 19 % ! Et 49,8 % en Corse !
M. Jean-Pierre Fourcade. L'article 10 est, à mes yeux, un article d'équilibre qui permet de relancer la négociation sociale. C'est donc un article très important et je suis heureux que le Gouvernement ait accepté la solution proposée par M. Pelletier qui paraît plus souple que celle qui figurait dans le texte adopté par l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 10, modifié.
(L'article 10 est adopté.)
M. le président. « Art. 11. - Le chapitre VII du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale est complété par une section 4 ainsi rédigée :
« Section 4
« Contribution
sur les avantages de préretraite d'entreprise
« Art. L. 137-10. - I. - Il est institué, à la charge des employeurs et au profit du Fonds de réserve pour les retraites mentionné à l'article L. 135-6, une contribution sur les avantages de préretraite ou de cessation anticipée d'activité versés, sous quelque forme que ce soit, à d'anciens salariés directement par l'employeur, ou pour son compte, par l'intermédiaire d'un tiers, en vertu d'une convention, d'un accord collectif, du contrat de travail ou d'une décision unilatérale de l'employeur.
« II. - Le taux de cette contribution est égal à la somme des taux des cotisations, à la charge de l'employeur et du salarié, prévues aux deuxième et quatrième alinéas de l'article L. 241-3 du présent code ou au II de l'article L. 741-9 du code rural pour les employeurs relevant du régime agricole et du taux de cotisation, à la charge de l'employeur et du salarié, sous plafond du régime complémentaire conventionnel légalement obligatoire régi par le livre IX.
« III. - Les dispositions des articles L. 137-3 et L. 137-4 sont applicables s'agissant de la présente contribution.
« IV. - Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux contributions des employeurs mentionnées au dernier alinéa de l'article L. 322-4 du code du travail, ni aux allocations et contributions des employeurs mentionnées au quatrième alinéa de l'article L. 352-3 du même code. »
II. - L'article L. 135-6 du même code est complété par un 10° ainsi rédigé :
« 10° Le produit de la contribution instituée à l'article L. 137-10. »
« III. - Les dispositions du I sont applicables aux avantages versés en vertu soit d'une convention, d'un accord collectif ou d'un avenant au contrat de travail conclu après le 27 mai 2003, soit d'une décision unilatérale de l'employeur postérieure à cette même date.
« IV. - Le taux visé au II de l'article L. 137-10 du code de la sécurité sociale est réduit dans des conditions fixées par décret jusqu'au 31 mai 2008 pour les avantages versés dans le cadre d'un dispositif de préretraite qui prévoit l'adhésion obligatoire à l'assurance volontaire invalidité, vieillesse et veuvage jusqu'à l'obtention du taux plein du régime général de la sécurité sociale et le maintien des cotisations aux régimes de retraite complémentaire mentionnés au chapitre Ier du titre II du livre IX du même code sur la base du salaire qu'aurait perçu le bénéficiaire s'il était resté en activité lorsque le financement de ces couvertures est assuré en tout ou partie par l'employeur aux termes d'un accord répondant aux conditions prévues par l'article L. 911-1 du même code, pour un montant au moins équivalent à celui de la taxe prévue à l'article L. 137-10 du même code. »
La parole est à M. Guy Fischer, sur l'article.
M. Guy Fischer. L'article 11 institue une contribution spécifique à la charge des employeurs sur les préretraites ou cessations anticipées d'activité. Il prévoit aussi que le produit de cette contribution sera affecté au Fonds de réserve pour les retraites.
Selon une étude récente de la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques, la DARES, citée dans le rapport de la commission des affaires sociales, ces dispositifs « ne sont mis en place que dans les très grands établissements ». Les préretraites d'entreprise représentent plus du tiers des départs anticipés dans les établissements de plus de 500 salariés.
Dans le cas où le contrat de travail est non pas suspendu, mais rompu, les employeurs ne sont, pour leur part, redevables d'aucune cotisation ou contribution sur les allocations versées. Ces situations représentent la moitié des préretraites d'entreprise, puisque, pour l'autre moitié, le contrat n'est que suspendu.
Il peut donc sembler a priori positif que le paragraphe I de l'article 11 du projet de loi prévoie une contribution de l'employeur ; ce n'est pas tous les jours que le Gouvernement propose de taxer le grand patronat ! Et quand c'est nous qui le proposons, nous entendons hurler M. Braye et d'autres collègues de la droite parlementaire ! Pourquoi donc, dans le cadre de la réforme des retraites, prévoir une telle contribution ? Nous y reviendrons.
Quant au paragraphe II, il précise que le taux de cette contribution sera égale aux taux des cotisations salariales et patronales de la cotisation d'assurance vieillesse du régime patronal de la cotisation plafonnée du régime complémentaire ARRCO, soit 23,85 %.
Dans une situation différente de celle qui prévaut aujourd'hui, une situation de croissance, de plein emploi, d'embauches, une telle contribution pourrait être envisagée.
Le problème est que la situation actuelle et les perspectives ne correspondent en rien à cela. M. Raffarin a beau jeu d'affirmer que les conditions d'un retour à la croissance sont réunies ; les experts, les économistes s'accordent à dire le contraire et sont beaucoup plus nuancés.
L'exposé des motifs précise que le Gouvernement veut recentrer « les préretraites autour de deux dispositifs : un dispositif "pénibilité" autour des cessations progressives d'activité des travailleurs salariés et un dispositif "plans sociaux", qui est aujourd'hui nécessaire ». C'est bien la preuve que les plans sociaux ne sont pas voués à disparaître de sitôt. D'ailleurs, depuis un an, leur nombre explose.
Aujourd'hui, l'âge moyen de cessation d'activité est de 57,5 ans, celui de la liquidation de la retraite est de 60,5 ans et le taux d'emploi des personnes âgées de 55 à 64 ans d'environ 33 %.
Les grandes entreprises continuent à utiliser les préretraites pour favoriser leurs restructurations et se débarrasser des plus de 50 ans qu'elles considèrent peu adaptables à leurs critères de rentabilité toujours accrue.
Selon deux enquêtes identiques de la DARES effectuées auprès de chefs d'entreprise, la moitié d'entre eux hésitent ou refusent d'embaucher des salariés âgés, même dans l'hypothèse où il y aurait pénurie de main-d'oeuvre ; un établissement sur deux n'envisage pas d'embaucher de salariés âgés, là encore, même en cas de difficultés de recrutement. Selon un tiers des chefs d'entreprise interrogés, ces travailleurs, en raison de leur ancienneté, coûteraient trop cher et auraient une productivité moindre. Bel aveu ! Ainsi, alors que les rédacteurs de l'article 11 ont pour objectif avoué de dissuader les chefs d'entreprise de laisser partir les salariés âgés, ceux-ci avouent sans pudeur ne pas vouloir de ces travailleurs qui leur coûteraient trop cher !
Ne doutons pas une seconde qu'entre une contribution comme celle qui est proposée et le versement de salaires plus faibles à de plus jeunes ou, le plus souvent, la décision de ne pas recruter, leur choix sera vite fait. Les salariés âgés seront purement et simplement licenciés et ne retrouveront pas de travail.
Vous n'aurez donc rien réglé s'agissant de l'accroissement du travail des plus âgés ou de l'allongement des durées de cotisation.
En revanche, les salariés concernés risquent de se retrouver dans une situation bien plus défavorable que s'ils partaient en préretraite et ils toucheront une pension amoindrie. Voilà certainement une réponse à ma question : pourquoi une telle contribution ? Nous n'accepterons pas, pour notre part, le sort qui leur est ainsi fait.
M. Dominique Braye. Cela ne changera rien !
M. le président. La parole est à Mme Odette Herviaux.
Mme Odette Herviaux. La disposition prévue à l'article 11 permet d'assujettir les entreprises qui usent de la préretraite à une contribution spécifique, dont le taux serait égal à la somme des taux de cotisations à la charge des employeurs, soit 23,85 %, et qui serait versée au Fonds de réserve pour les retraites, créé en 1999.
Ce mécanisme, qui permet à un employeur de se séparer d'un salarié, est composé de plusieurs types de préretraites.
La préretraite publique, dite aussi progressive, s'adresse aux salariés âgés de 55 à 65 ans qui acceptent de réduire leur temps de travail. L'indemnité de départ est financée par le Fonds national pour l'emploi.
La préretraite FNE s'adresse aux salariés de moins de 57 ans. L'allocation est, dans le système, financée par l'Etat, par l'entreprise, voire par le préretraité.
La préretraite d'entreprise ou « préretraite maison » est conclue dans l'entreprise par un accord, et s'adresse aux salariés de moins de 65 ans. L'entreprise verse soit une indemnité de départ, soit une allocation pendant une durée déterminée. Notons tout de même que l'article 11 ne s'adresse qu'à ces préretraites maison.
Enfin, la préretraite contre embauche s'adresse aux salariés de moins de 58 ans répondant à des conditions précises. Ces derniers perçoivent 65 % de leur salaire brut à titre d'allocation.
Depuis les années « chômage » - cela dure donc depuis plus de vingt-cinq ans ! - il est tentant de demander aux seniors de partir plus tôt. Alors, pourquoi demander aussi aux salariés qui se trouvent dans ce cas de faire des efforts supplémentaires ?
La discrimination envers les seniors reste forte dans les entreprises, voire plus forte encore qu'envers les jeunes, et la pratique de la préretraite n'est pas prête de cesser !
Du reste, ce qui m'étonne, c'est le silence du MEDEF sur cet article 11. Cette disposition coûterait-elle moins cher que de garder des seniors avec les obligations inhérentes à la formation ou au reclassement ?
Cette contribution, qui s'élève à 65 millions d'euros, ne suffirait pas à financer le fonds de réserve qui doit être de 154 milliards d'euros d'ici à 2020.
Permettez-moi aussi, monsieur le ministre, de vous rappeler que, lors de l'arrivée au pouvoir du gouvernement auquel vous appartenez, le fonds de réserve s'élevait à 12,8 milliards d'euros. J'ai quelques craintes pour les années qui viennent, même si nous nous devons de reconnaître que, cette année, il est prévu de le porter de 12,8 milliards à 16,5 milliards d'euros. Mais, entre 2001 et 2002, le fonds de réserve a connu une hausse de ses recettes de plus de 50 %.
En 2002, les recettes de privatisation et de souscriptions à l'UMTS ont permis de verser 5,8 milliards d'euros, mais ce n'est pas suffisant. J'ai entendu souvent reprocher au gouvernement de Lionel Jospin de ne pas avoir financé la totalité de ce qui était prévu ! Devons-nous vous rappeler que la législature ayant pris fin, il appartenait à la nouvelle majorité d'abonder ce fonds.
M. François Fillon, ministre. On en a mis autant que lui !
M. Claude Domeizel. Evidemment, la législature était finie !
Mme Odette Herviaux. De même, je préfère tout de suite déjouer l'argument facile du financement des 35 heures ponctionné sur ce fonds de réserve. Ce ne sont pas les 35 heures qui ont amputé le fonds mais votre absence de politique de l'emploi, qui a provoqué depuis une hausse de 160 000 chômeurs, alors même que le gouvernement précédent vous avait laissé des outils permettant une reprise. Alors, un peu de modestie serait parfois bienvenue.
M. Dominique Braye. Quel culot !
Mme Odette Herviaux. Il semblerait, à la lecture de votre projet, que cette contribution spécifique soit votre seul financement. Pourquoi ne souhaitez-vous pas reprendre à votre compte notre proposition de porter à 6 % les prélèvements sur les revenus du capital de façon progressive jusqu'à 2020 ? Et il est faux de dire, comme on l'a entendu lors des débats à l'Assemblée nationale, que la France est de tous les pays européens celui qui taxe le plus le capital. Je rappellerai simplement qu'en Suède le taux d'imposition du capital est de 54,1 % du PIB, qu'il est de 49,8 % au Danemark ; viennent ensuite la Finlande et la Belgique et toujours pas la France !
Monsieur le ministre, vous vous référez souvent au COR ; alors n'hésitez plus à l'écouter lorsqu'il vous dit que d'autres financements sont nécessaires...
M. le président. Je suis saisi de six amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 333, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
L'amendement n° 909, présenté par MM. Estier, Domeizel et Chabroux, Mme Printz, M. Krattinger, Mmes Campion et Blandin, M. Godefroy, Mmes San Vicente et Pourtaud, MM. Lagauche et Vantomme, Mme Herviaux, M. Frimat, Mme Cerisier-ben Guiga, M. Mano et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi cet article :
« I. - Au I de l'article L. 245-16 du code de la sécurité sociale, le chiffre "2 %" est remplacé par le chiffre "6 %".
« II. - Au II de l'article L. 245-16 du code de la sécurité sociale, les chiffres "20 %", "50 %" et "30 %" sont respectivement remplacés par les chiffres "6,66 %", "83,34 %" et "10 %".
« III. - Au 4° de l'article L. 245-16 du code de la sécurité sociale, le chiffre "50 %" est remplacé par le chiffre "83 %". »
Les amendements n° 223, 224 et 225 sont présentés par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 223 est ainsi libellé :
« A. - Dans le texte proposé par le I de cet article pour le I de l'article L. 137-10 du code de la sécurité sociale, remplacer les mots : "fonds de réserve pour les retraites mentionné à l'article L. 135-6", par les mots : "fonds de solidarité vieillesse mentionné à l'article L. 135-1".
« B. - En conséquence, rédiger comme suit le II de cet article :
« Avant le dernier alinéa de l'article L. 135-3 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 8° Le produit de la contribution instituée à l'article L. 137-10. »
L'amendement n° 224 est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par le I de cet article pour le I de l'article L. 137-10 du code de la sécurité sociale, remplacer les mots : "du contrat de travail" par les mots : "de toute autre stipulation contractuelle". »
L'amendement n° 225 est ainsi libellé :
« Au III de cet article, remplacer les mots : "d'un avenant au contrat de travail" par les mots : "de toute autre stipulation contractuelle". »
L'amendement n° 908, présenté par MM. Estier, Domeizel et Chabroux, Mme Printz, M. Krattinger, Mmes Campion et Blandin, M. Godefroy, Mmes San Vicente et Pourtaud, MM. Lagauche et Vantomme, Mme Herviaux, M. Frimat, Mme Cerisier-ben Guiga, M. Mano et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Compléter cet article par un paragraphe V ainsi rédigé :
« Il est institué une cotisation patronale vieillesse spécifique si l'entreprise de plus de 20 salariés n'a pas négocié de plan de formation continue. »
La parole est à Mme Odette Terrade, pour présenter l'amendement n° 333.
Mme Odette Terrade. Cet amendement vise à supprimer l'article 11, qui crée une contribution assise sur les allocations de préretraite et qui sera affectée au fonds de réserve pour les retraites, cotisation à la charge, chose rare, des employeurs.
Lors de son audition par la commission des affaires sociales, M. Guillaume Sarkozy, au nom du MEDEF, s'est ému du fait que « la durée de travail des salariés aurait diminué dans des proportions trop importantes. La réduction du temps de travail au cours de la vie est probablement allée trop loin », a-t-il dit. Et il a ajouté : « Il n'est pas dramatique de penser que nous travaillerons deux à trois années supplémentaires dans vingt ans, il ne faut donc pas tomber dans les hystéries collectives qui traversent notre pays. »
Les « hystériques » sont nombreux puisqu'ils représentent les deux tiers de la population française qui rejettent votre projet ainsi que les deux tiers des retraités qui déclarent ne pas souhaiter poursuivre leur activité professionnelle un an de plus.
M. Guillaume Sarkozy avoue, lui, sa passion pour son travail et son absence de désir de partir à 60 ans. C'est merveilleux ! Il admet cependant que tout le monde n'a pas la chance d'être intéressé par son travail. Il souligne que c'est à partir de 45 ans qu'il faut se poser la question de la seconde partie de carrière et mettre en place des requalifications. Autrement dit, il faudrait adapter les salariés les plus âgés à l'entreprise pour qu'ils restent rentables le plus longtemps possible.
Mais pourquoi les entreprises ne favorisent-elles pas la formation continue, si ce n'est parce qu'elles la considèrent depuis longtemps comme trop chère ? Pourquoi imposent-elles trop souvent des conditions de travail difficiles, stressantes, des activités mal rémunérées et mal considérées, auxquelles s'ajoutent les atteintes répétées aux droits des salariés, voire une véritable criminalisation de l'action de ceux qui remettent en cause de telles conditions sur leur lieu de travail ? Parce que la seule chose qui intéresse ces entreprises, c'est de tirer un maximum de profit du travail de leurs salariés !
Heureusement, le rapport que vient d'élaborer le Conseil économique et social à propos de la place du travail dans la société remet un peu les pendules à l'heure ! Non, nos concitoyens n'ont pas perdu de vue la valeur du travail. Non, la réduction du temps de travail ne déprécie pas sa valeur. En revanche, le travail est malmené par la mondialisation, le chômage et la flexibilité, et il importe d'en renouveler l'approche.
Le malaise au travail touche d'ailleurs toutes les catégories, y compris les cadres. Leur défiance à l'égard de l'entreprise s'explique par la priorité donnée à des logiques financières à court terme. Dans cette atmosphère de doute, ne soyons pas surpris que le souhait de pouvoir partir à la retraite rapidement soit de plus en plus vif.
Vous le voyez bien, monsieur le ministre, il est grand temps de changer l'attitude des entreprises à l'égard de leurs salariés. Ce ne sont pas les dispositions que vous proposez qui vont y contribuer, bien au contraire, et c'est pourquoi nous demandons la suppression de l'article 11.
M. le président. La parole est à M. Claude Estier, pour présenter l'amendement n° 909.
M. Claude Estier. Toujours dans le souci qui est le nôtre d'alimenter le fonds de réserve pour les retraites et dans l'esprit qu'exposait Mme Herviaux à l'instant, nous proposons, par cet amendement, une augmentation du taux d'imposition des revenus du patrimoine de 2 à 6 %.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter les amendements n°s 223, 224 et 225.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. L'amendement n° 223 vise à affecter le produit de la nouvelle contribution sur certaines préretraites d'entreprise non pas au fonds de réserve pour les retraites, mais au fonds de solidarité vieillesse, le FSV.
En effet, le FSV a notamment pour mission de compenser le manque à gagner en cotisations pour les régimes de base d'assurance vieillesse des bénéficiaires de préretraites financées sur fonds publics. Il y aurait donc une certaine logique à affecter le produit de la taxe sur les « préretraites maison » au financement des surcoûts induits par les préretraites financées sur fonds publics pour les régimes d'assurance vieillesse. En quelque sorte, les préretraites financeraient alors d'autres préretraites.
On rappellera également que le FSV devrait connaître, selon la commission des comptes de la sécurité sociale, un déficit de 580 millions d'euros en 2003 et un déficit cumulé de 703 millions d'euros. Il semble de meilleure politique d'affecter la nouvelle recette au comblement partiel de ce déficit plutôt que de la mettre en réserve pour lisser les déficits ultérieurs de nos régimes de retraite.
L'amendement n° 224 est un amendement de précision. Comme cela a déjà été dit, les préretraites d'entreprise visées par le présent article sont celles pour lesquelles le contrat de travail a été rompu. Leur mise en place ne passe pas toujours par un avenant au contrat de travail, lequel est d'ailleurs caduc à partir de l'entrée dans le dispositif.
L'amendement n° 225 est un amendement de coordination.
M. le président. La parole est à M. Claude Estier, pour présenter l'amendement n° 908.
M. Claude Estier. Cet amendement vise à compléter cet article par un paragraphe V ainsi rédigé : « Il est institué une cotisation patronale vieillesse spécifique si l'entreprise de plus de 20 salariés n'a pas négocié de plan de formation continue. »
Il nous paraît en effet indispensable, afin de permettre aux travailleurs âgés de se maintenir dans l'entreprise, qu'ils soient formés afin de suivre les évolutions de l'emploi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. La commission est défavorable aux amendements n°s 333, 909 et 908.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. L'amendement n° 333 tend donc, une nouvelle fois, à supprimer une contrainte visant à dissuader les entreprises d'utiliser les préretraites.
Chaque fois que le Gouvernement propose une mesure un peu coercitive à l'égard des entreprises, le groupe CRC s'y oppose. Naturellement, je vous demande de ne pas le suivre.
L'amendement n° 909 vise à augmenter de 2 % à 6 % le taux du prélèvement social sur les revenus du patrimoine et les revenus de placement. Monsieur Estier, nous respectons les décisions du gouvernement précédent ; si le gouvernement de Lionel Jospin a retenu un taux de 2 % sur les revenus du patrimoine c'est qu'il avait de bonnes raisons de le faire. Je souhaite donc que l'on s'en tienne à ce taux.
Je voudrais revenir sur l'intervention de Mme la sénatrice à propos du COR, car je ne peux pas laisser sans réponse de telles inexactitudes.
J'ai eu l'occasion, à plusieurs reprises, de vous indiquer que le Gouvernement avait apporté 8 milliards d'euros de financement au fonds de réserve pour les retraites en un an, contre 8,5 milliards d'euros en trois ans pour le gouvernement précédent. Par conséquent, ne venez pas nous expliquer que vous seuls avez abondé le fonds de réserve !
En réalité, le fonds de réserve est abondé de manière automatique par un certain nombre de ressources ; vous y avez mis un peu d'UMTS ; nous y avons mis quelques produits de privatisation. Nous vous proposons d'apporter une nouvelle ressource dont je conviens qu'elle est purement symbolique. En fait, cette mesure est destinée à dissuader les entreprises d'utiliser les préretraites en augmentant le taux des cotisations. Tel est essentiellement l'objectif de cette mesure.
Permettez-moi d'intervenir brièvement sur la question de l'UMTS, qui n'a pas constitué une opération extrêmement rentable. Vous avez pris à France Télécom quelques milliards d'euros pour abonder le fonds de réserve, mais, quelques mois plus tard, l'Etat a dû investir beaucoup de milliards pour sauver cette entreprise qui était au bord de la faillite. Je ne crois donc pas qu'il faille se vanter de cette opération.
Que vous ayez détourné les excédents du fonds de solidarité vieillesse pour financer les 35 heures, c'est un fait ! Vous aviez prévu d'alimenter le fonds de réserve pour les retraites avec les excédents du FSV, vous les avez détournés pour financer les 35 heures, c'est un choix politique. Mais ne venez pas prétendre ensuite que cela n'existe pas !
La réalité aujourd'hui, c'est que le FSV n'a plus d'excédent, qu'il est en déficit et qu'il n'y a évidemment plus rien à en attendre pour financer le fonds de réserve.
L'amendement n° 223 de la commission, démontre bien que ces solutions pour financer nos régimes de retraite ne peuvent pas, comme je l'ai dit hier, être centrales. On peut certes mettre de l'argent sur le fonds de réserve pour les retraites. Toutefois, quand le budget de l'Etat lui-même est considérablement en déficit, on peut s'interroger sur la philosophie qui consiste à affecter certaines ressources à tel déficit plutôt qu'à tel autre.
En l'occurrence, la commission propose d'affecter au fonds de solidarité vieillesse la contribution sur les préretraites. Compte tenu de son montant assez symbolique au regard des déficits du FSV ou du fonds de réserve, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
Sur l'amendement n° 224, le Gouvernement émet un avis favorable. Il émet également un avis favorable sur l'amendement n° 225.
Quant à l'amendement n° 908, qui vise à soumettre à une cotisation patronale spécifique les entreprises de plus de vingt salariés qui n'auront pas négocié les actions de formation pour les salariés âgés, il y a là une vraie différence de philosophie entre le Gouvernement, la majorité, et les auteurs de cet amendement.
Nous, nous faisons confiance aux partenaires sociaux et nous souhaitons qu'ils trouvent ensemble les moyens d'assurer notamment la formation professionnelle des salariés les plus âgés. Vous, vous voulez, avant même que cette négociation ait abouti, prévoir déjà les sanctions pour le cas où elle n'aboutirait pas ! Je crois que c'est tout a fait prématuré. (Très bien ! sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l'amendement n° 333.
Mme Annie David. L'objectif affiché de l'article 11 est de favoriser l'activité des salariés âgés. Pour ce faire, il cherche à rendre moins attractif le recours aux dispositifs de préretraite.
Il est vrai que les allocations de préretraite d'entreprise constituent un régime social très avantageux, les employeurs n'étant redevables d'aucune cotisation ou contribution sur les allocations qu'ils sont tenus de verser en application des différents dispositifs concernés.
Avec la disposition que vous proposez, les employeurs préféreront payer la contribution demandée ; cela leur reviendra bien moins cher que de conserver les salariés concernés. Selon une récente enquête, trois décideurs sur cinq considèrent que le vieillissement aura des inconvénients qui neutraliseront les avantages liés au fait que les salariés plus âgés sont plus expérimentés. Finalement, la disposition que vous proposez sera nuisible pour les salariés, et elle le sera plus encore pour les femmes, dont les carrières sont plus amputées que celles des hommes.
Or que faites-vous pour les protéger du licenciement ? Vous ne faites rien ! Bien au contraire, l'une des premières mesures prises par la majorité parlementaire pour faire plaisir au MEDEF a été de suspendre les dispositions qui, dans la loi de modernisation sociale, représentaient des obstacles aux licenciements. De plus, l'ensemble de la politique du Gouvernement favorise l'augmentation du chômage et les plans sociaux.
Comment allez-vous continuer à expliquer que la croissance est une réalité tangible à court terme, alors que c'est déjà ce que vous nous avez dit lors de l'élaboration du budget de la nation pour 2003 et que nous avons constaté l'inverse ? Pour ne prendre qu'un seul exemple, dans la lettre de l'Observatoire français des conjonctures économiques - l'OFCE -, des économistes écrivent : « Le retournement conjoncturel et l'incapacité des politiques économiques européennes à soutenir la croissance font de nouveau craindre que l'Europe demeure une zone de chômage de masse. Ceci décrédibilise fortement la réforme présentée aujourd'hui. » Cette dernière remarque est pour le moins éclairante sur la réalité de vos affirmations.
Il aurait bien mieux valu autoriser l'application du dispositif que nous avons proposé, à savoir une modulation des cotisations en fonction des efforts de l'entreprise en direction de l'emploi, des salaires, de la formation. La pénalisation des entreprises qui licencient aurait été beaucoup plus dissuasive, et la moindre contribution de celles qui embauchent ou offrent des salaires plus élevés aurait été incitative.
Quant au fonds de réserve, il semble qu'on veuille lui donner un rôle qu'il n'a jamais eu. Il n'était pas destiné à régler la question des retraites, mais à en permettre le lissage. En outre, le produit de la contribution, estimé à 65 millions d'euros en année pleine, représente bien peu. Ce n'est pas avec cela que l'on va atteindre l'objectif initialement prévu.
J'ajoute que, principalement constitué par les recettes des privatisations, son abondement ne saurait recevoir notre agrément. Nous avons toujours proposé un autre financement pour ce fonds.
C'est par ailleurs au moment où la bulle financière explose, en raison de la spéculation, qu'on vient nous affirmer que le résultat pour le fonds de réserve sera de 260 milliards d'euros de profits financiers.
Mais tous ces éléments, monsieur le ministre, ne vous font pas dévier de votre refus de toucher à l'assiette des cotisations. C'est pourtant ainsi que l'on pourra régler durablement la question du financement des retraites. Mais votre objectif est-il de régler le financement des retraites ou bien de démanteler tout notre système de protection sociale pour construire la société libérale que vous appelez de vos voeux ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 333.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 909.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 223.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 224.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 225.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 908.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 11, modifié.
(L'article 11 est adopté.)
M. le président. « Art. 12. - I. - Le 3° de l'article L. 322-4 du code du travail est abrogé à compter du 1er janvier 2005. Les conventions signées en application de ce 3° antérieurement à cette date continuent à produire leurs effets jusqu'à leur terme.
« II. - Supprimé.
« III. - Dans le premier alinéa de l'article L.131-2 du code de la sécurité sociale, les mots : "sixième (4°), septième (5°) et huitième" sont remplacés par les mots : "cinquième (4°), sixième (5°) et septième".
« IV. - Le dernier alinéa de l'article L. 352-3 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque cette indemnisation vise à permettre à certains salariés de bénéficier d'un avantage de préretraite, elle doit, pour ouvrir droit au bénéfice de ces dispositions, être mise en oeuvre dans le respect de conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, liées à l'âge et aux caractéristiques, notamment à la pénibilité, de l'activité des bénéficiaires. »
« V. - Les dispositions du IV sont applicables à compter de la date d'entrée en vigueur du décret prévu au dernier alinéa de l'article L. 352-3 du code du travail et au plus tard à l'expiration du douzième mois suivant la publication de la présente loi. Les conventions conclues antérieurement à cette date dans le cadre d'accords professionnels nationaux visés à l'article L. 352-3 du même code ayant pour objet de permettre à certains salariés de bénéficier d'un avantage de préretraite continuent à produire leurs effets jusqu'à leur terme.
« VI. - L'article L. 412-10 du code de la sécurité sociale et l'article L. 751-2 du code rural sont abrogés à compter de la date mentionnée au I. »
La parole est à Mme Nelly Olin, sur l'article.
Mme Nelly Olin. La France s'illustre par un taux d'activité des seniors particulièrement bas. Or tous les experts préconisent un relèvement de ce taux et tous les pays d'Europe qui ont réformé leurs systèmes de retraite ont effectivement accru ce taux d'activité.
Le Gouvernement a fait, à juste titre, une priorité du maintien en activité des salariés âgés. Une telle politique passe nécessairement par un encadrement plus restrictif du recours aux mesures d'âge par les entreprises. Or les préretraites concernent aujourd'hui encore plus de 150 000 personnes dans le secteur privé.
Dans cette perspective, l'article 12 supprime les préretraites progressives et recentre les dispositifs de cessation anticipée de certains travailleurs salariés sur les seuls salariés ayant exercé des activités pénibles.
Cet article s'inscrit dans la logique du texte et rejoint l'objectif fixé par plusieurs dispositions telles que l'assouplissement des règles de cumul emploi-retraite et l'amélioration de l'accès à la formation professionnelle pour les plus de 50 ans.
Pour toutes ces raisons, notre groupe votera cet article. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Alain Gournac. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, sur l'article.
Mme Odette Terrade. L'article 12 a pour objet la suppression de l'allocation de préretraite progressive, et donc limite le champ d'application de la cessation progressive d'activité, ce qui n'est pas acceptable. Qui plus est, cette disposition met en danger l'avenir des salariés qui ont le plus de difficultés à se maintenir sur le marché du travail.
Le déclin de l'activité des salariés de plus de 55 ans est un sérieux problème auquel sont confrontés tous les pays industrialisés ; la France est plus particulièrement touchée par cet inquiétant phénomène qui ne cesse de se développer.
Permettez-moi d'illustrer mon propos par quelques chiffres. Si, en 1970, la proportion des actifs âgés de 60 à 64 ans était de 70 %, elle est en revanche descendue en 1983 à 35 %, pour se stabiliser au milieu des années quatre-vingt-dix aux alentours de 17 %. Ainsi, en trente ans, le poids des hommes actifs dans la tranche d'âge des 55-59 ans est passé de 83 % à 68 %.
Si cette tendance à la baisse de l'activité des travailleurs les plus âgés s'explique en partie par le développement des systèmes de retraite, c'est vraisemblablement la montée du chômage, au cours des trente dernières années, qui a contribué à l'accentuer.
En effet, même si la détérioration du marché du travail touche l'ensemble des salariés, force est de reconnaître que ce sont les plus âgés d'entre eux qui sont les premiers concernés. C'est ainsi que, depuis la fin des années soixante-dix, on a pu noter que de nombreux travailleurs cessaient leur activité bien avant de pouvoir prétendre à leurs droits à la retraite.
En France - c'est également vrai pour la plupart des pays industrialisés - des dispositifs d'accompagnement ont été mis en place pour faciliter les départs anticipés.
Entre 1990 et 2000, on a évalué de 460 000 à 500 000 le nombre de personnes âgées de plus de 55 ans bénéficiant de préretraites ou dispensées de rechercher un emploi.
Force est de constater que la vie active se concentre aujourd'hui essentiellement entre 25 et 54 ans. Cette évolution s'explique globalement par les gains de productivité et par le développement des systèmes de retraite, d'une part, et par l'allongement de la période de formation et les sorties précoces d'activité des salariés les plus âgés, plus difficilement adaptables aux changements technologiques, d'autre part.
Rappelons que, jusque dans les années quatre-vingt-dix, les dispositifs de cessation anticipée d'emploi agréaient l'ensemble des acteurs sociaux. Chacun y trouvait son compte : les entreprises qui considéraient le départ anticipé des salariés âgés comme une solution pour restructurer les modes de production, alléger la masse salariale et rajeunir la pyramide des âges ; les salariés pour qui c'était un moyen de sortir de la vie active dans de bonnes conditions sur le plan financier ; l'Etat, enfin, qui voyait dans ces dispositifs un moyen de lutter contre le chômage.
Par conséquent, nous ne comprenons pas pourquoi vous persistez à vouloir remettre en cause les dispositifs de préretraite qui ont montré leur efficacité.
Telles sont les remarques que je tenais à formuler sur cet article 12, sur lequel nous aurons l'occasion de revenir lors de l'examen des amendements que nous avons déposés pour exprimer notre opposition de fond à toute remise en cause de la cessation progressive d'activité.
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, sur l'article.
M. Claude Domeizel. En 1982, Jean Le Garrec avait mis sur pied le dispositif dit de préretraite progressive. Le Gouvernement, à travers cet article, entend le supprimer, ce qui est proprement inacceptable.
Dans l'ensemble des pays industrialisés, le taux d'activité des salariés de plus de 55 ans est de moins en moins élevé. Le développement des retraites à certes joué un rôle important dans cette modification progressive, il reste que le moteur le plus puissant est, depuis plus de 30 ans, le chômage et les ravages économiques et sociaux qu'il crée. Ainsi, alors que notre pays enregistrait, pour la tranche d'âge de 60 ans à 64 ans, un taux d'activité voisin de 70 % en 1970, ce dernier n'était plus que de 35 % en 1983, puis de 17 % depuis une décennie. Pour les hommes âgés de 55 ans à 59 ans, ce même taux est passé de 83 % à 68 % en l'espace de trois décennies.
Désormais, la vie professionnelle est hypercentrée sur la tranche de vie comprise entre 25 ans et 50 ans. Les gains de productivité liés au développement des systèmes de retraite ont entraîné une réduction de la période de vie consacrée au travail salarié. Tel est en quelques mots le contexte dans lequel vous voulez supprimer le dispositif de préretraite progressive.
Or, nous le savons tous, les dispositifs de cessation anticipée d'activité ont été et demeurent, dans des situations dramatiques, la moins mauvaise des solutions pour des milliers de nos concitoyens. Si, en 1984, le nombre de bénéficiaires de ces dispositifs dépassaient 700 000 personnes, désormais il oscille entre 460 000 et 500 000, alors que plus de 60 % des effectifs sont dispensés de recherche d'emploi.
Ajoutons que ces dispositifs ont permis à des milliers d'entreprises de rajeunir leur pyramide des âges, - c'est important -, de restructurer leurs modes et leurs moyens de production et d'alléger la masse salariale tout en bénéficiant, il faut le dire, de financements publics.
Au demeurant, la cessation anticipée d'activité répondait bien souvent aux désirs légitimes de salariés qu'une vie professionnelle intense avait usés prématurément. Enfin, ces dispositifs étaient fréquemment perçus comme un moyen performant de lutter, ces dernières années, contre un taux de chômage particulièrement élevé.
Ce dispositif a en outre de grandes vertus puisqu'il permet aux salariés de quitter l'entreprise de façon progressive, favorisant de fait les actions de tutorat et de formation en son sein.
Par ailleurs, des contreparties en termes d'emploi étaient exigées. Cette dimension essentielle a permis à de nombreux jeunes d'intégrer le monde de l'entreprise et de l'activité, ce qui n'est pas sans importance compte tenu de l'état actuel du marché du travail.
D'ores et déjà, nous pouvons affirmer que cette suppression aura de graves conséquences pour les entreprises et les salariés. Qui plus est, les traductions en termes budgétaires se feront rapidement jour au sein des comptes ASSEDIC, alors que les licenciements prévisibles viendront dégrader un peu plus leur situation financière.
Supprimer les préretraites progressives, c'est porter atteinte aux salariés, mais aussi aux entreprises. Cette mesure, je le répète, est un moyen de transmettre les compétences et les savoirs par l'embauche de jeunes en contrepartie.
Je ne manquerai pas de rappeler certains chiffres : durant les années quatre-vingt-dix, le nombre de bénéficiaires de préretraite a atteint 500 000 personnes. Chacun des partenaires trouvait cette pratique intéressante : l'Etat, qui considérait que c'était un moyen de lutter contre le chômage ; les entreprises, à qui ce dispositif permettait de mieux gérer la pyramide des âges, les salariés, enfin, qui partaient dans des conditions honorables.
Avec cette disposition, vous niez le monde du travail. Vous expliquez qu'une personne de 55 ans n'est pas vieille. J'en conviens, mais vous oubliez la pénibilité des tâches auxquelles elle a dû faire face, et ce même si cette pénibilité n'est plus la même que voilà cinquante ans. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Je suis saisi de neuf amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 335, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
L'amendement n° 336, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le paragraphe I de cet article. »
L'amendement n° 338, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le paragraphe III de cet article. »
L'amendement n° 1113, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Au début du III de cet article, ajouter les mots : "A compter du 1er janvier 2005". »
L'amendement n° 339 rectifié, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le paragraphe IV de cet article. »
L'amendement n° 1084 rectifié, présenté par MM. Delfau, A. Boyer et Collin, est ainsi libellé :
« Au IV de l'article 12, après les mots : "liées à l'âge", insérer les mots : ", à la durée des études, au congé parental". »
L'amendement n° 340, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le paragraphe V de cet article. »
L'amendement n° 227, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« A la fin de la première phrase du V de cet article, supprimer les mots : "et au plus tard à l'expiration du douzième mois suivant la publication de la présente loi". »
L'amendement n° 228, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Compléter la dernière phrase du V de cet article par les mots : "dans les conditions applicables à la date de leur conclusion". »
La parole est à Mme Michelle Demessine, pour défendre l'amendement n° 335.
Mme Michelle Demessine. Cet article 12 est particulièrement inacceptable.
Passant outre la réalité du chômage dans ce pays, notamment chez les jeunes, et la situation professionnelle de nos seniors, vous supprimez les préretraites progressives et limitez les avantages liés aux dispositifs de cessation anticipée d'activité de certains travailleurs salariés.
Selon la dernière enquête « emploi » de l'INSEE, il s'avère que le chômage de longue durée, après trois années de repli, est reparti à la hausse avec 1,1 million de personnes concernées, soit plus 160 000 en un an.
Cette étude confirme que le chômage touche particulièrement les salariés de plus de 50 ans. Elle révèle, en effet, que 67 % des chômeurs de plus de 50 ans sont à la recherche d'un emploi depuis plus d'un an.
Mais il y a plus grave : il s'agit du chômage de très longue durée, c'est-à-dire d'une durée supérieure à deux ans, qui est particulièrement répandu chez les chômeurs âgés : quatre chômeurs de plus de 50 ans sur dix, soit 200 000 personnes, sont à la recherche d'un emploi depuis plus de deux ans !
Le taux de chômage global, pour sa part, a dû être revu à la hausse pour cette année : plus 0,2 point.
Entre le premier trimestre 2002 et le premier trimestre 2003, le chômage a fortement augmenté, avec 200 000 personnes concernées de plus.
Au premier trimestre de cette année, on comptait 2 865 000 chômeurs.
Et vous voulez, dans un tel contexte, maintenir en activité les plus de 50 ans, alors qu'ils sont bien souvent en tête de liste des plans sociaux, qu'ils ont les plus grandes difficultés à se réinsérer dans la vie professionnelle et que, de leur côté, les jeunes ont du mal à entrer dans la vie active.
N'oublions pas que les départs progressifs à la retraite ont l'avantage, à la fois, de rajeunir les effectifs des entreprises et d'assurer une transmission des savoirs entre la génération qui part à la retraite et celle qui arrive sur le marché du travail.
Pour toutes ces raisons, nous sommes opposés à cet article 12.
Mme Annie David. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour défendre l'amendement n° 336.
M. Roland Muzeau. A l'occasion de cet amendement, je souhaite évoquer les difficultés rencontrées par les actifs âgés quant à leur réinsertion sur le marché du travail.
Chacun sait ici combien il est difficile pour les actifs âgés au chômage de retrouver un emploi en raison de leur faible mobilité et flexibilité, d'une part, et de leurs prétentions salariales dites trop élevées, d'autre part.
Si l'ancienneté est reconnue au sein de l'entreprise, en revanche, c'est rarement le cas à l'extérieur.
Croyez-vous vraiment qu'une entreprise déciderait de recourir à un senior qu'elle devra payer plus cher qu'un jeune, d'autant que le salarié, expérimenté mais plus âgé, ne restera pas assez longtemps dans l'entreprise pour amortir de tels coûts ?
C'est la raison pour laquelle la plupart des salariés âgés touchés par le chômage sont exclus de la vie professionnelle.
Différents facteurs peuvent entrer en ligne de compte dans leur situation : leur santé, le montant des retraites personnelles et d'allocation vieillesse, l'existence de dispositifs de départ en préretraite, voire le chômage lui-même qui les met en échec d'emploi.
A cela peut s'ajouter un décalage entre l'offre et la demande, qui est plus prégnant chez les actifs âgés.
Il convient, par ailleurs, de prendre en considération les modifications qui sont intervenues dans le déroulement des fins de carrière. En effet, 15 % des retraités actuellement âgés de 60 à 64 ans ont été en préretraite, dont une majorité pour une durée supérieure à trois ans.
Je rappelle également qu'en 2002 un licenciement économique sur trois a concerné un salarié de plus de 50 ans.
C'est pourquoi, compte tenu de tous ces éléments qui montrent les difficultés des séniors à se maintenir sur le marché du travail au-delà de 55 ans, nous estimons aberrante votre persistance à vouloir supprimer la préretraite progressive et à limiter le champ du dispositif de la cessation anticipée d'activité.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, pour défendre l'amendement n° 338.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet amendement de suppression du III de l'article 12 est la conséquence des deux amendements précédents. Il témoigne de nos interrogations quant aux choix du Gouvernement de programmer l'extinction des préretraites progressives pour maintenir en activité les seniors.
Instituées dans un contexte économique et social particulier pour faire baisser les chiffres du chômage, les préretraites progressives, comme les autres dispositifs de pré-retraite, ont été considérées comme prioritaires par les politiques publiques de l'emploi et ont eu pour conséquence de faire baisser le taux d'emploi des seniors. Elles ont été largement utilisées par les entreprises comme une alternative au licenciement ou, devrais-je plutôt dire, comme un moyen déguisé de licencier à moindre coût, sauf, bien sûr, pour la collectivité, monsieur le ministre, qui prend en charge 90 % du coût de l'allocation de cessation d'activité. Pour avoir un ordre d'idée, 119 millions d'euros ont été inscrits à ce titre dans la loi de finances de 2003.
Les entreprises ont également eu recours à ces mesures d'âge pour rajeunir leur pyramide des âges et augmenter ainsi la productivité du travail.
Monsieur le rapporteur, vous tentez de nous convaincre, en citant des travaux récents de l'IRES ou de la DARES, du fait que la préretraite progressive est une mesure appréciée par les salariés, mais sans enjeux majeur, pour les dirigeants d'entreprise. Nous pensons, quant à nous, que la situation que vit aujourd'hui la France incombe en grande partie aux employeurs.
Certes, les salariés sont eux aussi demandeurs, mais il est facile de comprendre leurs raisons. Fort justement, l'enquête de l'IRES, dénommée « pénibilité et retraites », d'avril 2003, relève que « dans la plupart des entreprises, en particulier dans les plus petites, la préretraite progressive s'interprète aussi en creux comme une réponse à l'absence d'emplois alternatifs, moins pénibles par exemple ». Eh oui ! Nous touchons là à une quesion essentielle ! Si, demain, on souhaite que les quinquagénaires continent à prendre toute leur place sur le marché du travail, encore faut-il que l'emploi soit plus dynamique, mais aussi que les conditions de travail le leur permettent.
Monsieur le ministre, dans la mesure où votre politique en ce domaine se réduit à un simple appel à la responsabilité des entreprises, vous comprendrez que, en l'état, par défaut, bien que nous contestions le détournement des mesures d'âge par les entreprises qui se restructurent, nous ne pouvons accepter la suppression brutale d'une disposition qui concerne tout de même 48 139 allocataires, dont le nombre est amené à croître dans les prochains mois si rien n'est fait pour arrêter les licenciements.
En conséquence, mes chers collègues, je vous invite à adopter notre amendement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 1113.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. C'est un amendement de coordination.
M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, pour présenter l'amendement n° 339 rectifié.
Mme Odette Terrade. Le présent amendement a pour objet de supprimer le paragraphe IV de l'article 12.
Je souhaiterais m'arrêter un instant sur la question de l'inactivité des salariés âgés.
Sont classés dans la catégorie de la population inactive, selon le Bureau international du travail, toutes les personnes qui n'ont pas d'emploi et qui ne sont pas au chômage. Il faut savoir qu'au-delà de 50 ans 40 % des inactifs qui, après avoir perdu leur emploi, n'ont bénéficié ni de la retraite ni de la préretraite sont des hommes, et 68 % ont été licenciés en fin de carrière.
La décision de ne plus retravailler est souvent liée à l'approche de l'âge de la retraite.
Elle peut être prise aussi après une période de recherche d'emploi soit infructueuse, soit à des conditions d'embauche insatisfaisantes.
Il faut noter que les anciens ouvriers sont surreprésentés parmi ceux qui ont quitté leur dernier emploi pour des raisons de santé. Quelle que soit la cause de leurs problèmes de santé - qu'ils soient consécutifs ou non à l'exercice de leur métier -, ils se trouvent néanmoins dans l'incapacité de continuer à exercer une quelconque activité professionnelle, qui plus est si celle-ci est physiquement difficile.
Si, globalement, les inactifs sont plus âgés que les actifs, chômeurs compris, parmi ces inactifs ce sont les anciens ouvriers qui sont les plus âgés, puisque près des deux tiers ont plus de 50 ans.
La grande majorité de ces ouvriers inactifs assurent ne plus souhaiter travailler.
Il faut noter, par ailleurs, que c'est la seule catégorie d'inactifs dans laquelle il y a autant d'hommes que de femmes, alors que, tout au long de nos débats, nous n'avons cessé de noter les inégalités entre les hommes et les femmes face à la retraite.
Compte tenu de ces observations, vous comprendrez pourquoi nous sommes favorables au maintien des dispositifs de préretraite pour les plus de 55 ans, et la raison pour laquelle nous proposons cet amendement de suppression.
M. le président. L'amendement n° 1084 rectifié n'est pas soutenu.
La parole est à M. Guy Fischer, pour présenter l'amendement n° 340.
M. Guy Fischer. Cet amendement vise à supprimer les mesures de l'article 12 prévoyant de recentrer les dispositifs de cessation d'activité de certains travailleurs salariés, les « CATS », sur les salariés ayant exercé des activités pénibles.
Je m'explique, car ce positionnement pourrait être mal interprété.
Il est vrai que ces dispositifs qui, initialement, concernaient en premier lieu les salariés ayant des métiers postés ou en continu, notamment dans le secteur automobile, ont été largement ouverts à d'autres salariés. Les salariés des branches de la métallurgie, de la chimie, du textile, de la banque, du BTP, de la presse, l'utilisent désormais.
Par conséquent, il peut être légitime de s'interroger sur le recentrage des préretraites dans la mesure où, je le rappelle quand même, la signature d'une telle convention « CATS » ouvre droit à une exonération de cotisations sociales et à une prise en charge partielle de l'allocation par l'Etat.
Est-ce à l'Etat, à la collectivité, par conséquent aux salariés et aux chômeurs, de payer les politiques de management d'ajustement des effectifs des entreprises ? Sûrement pas !
Pour autant, il convient, là encore, de s'interroger sur les raisons motivant les salariés à vouloir partir le plus tôt possible : l'usure, la fatigue du travail, le stress des rapports au travail. Tant que les chefs d'entreprise ne se saisiront pas de la question du contenu du travail, de l'amélioration des conditions de travail, de la sécurisation des parcours professionnels des salariés, donc de la formation professionnelle, ces dispositifs auront lieu d'être.
Deuxième observation : le V de cet article a été complété à l'Assemblée nationale, sur l'initiative du Gouvernement, afin de préciser la portée de ces nouvelles dispositions sur les conventions « CATS » déjà conclues. Ces accords prévoient un peu plus de 47 000 départs d'ici à 2007, soit 75 000 personnes. Ne craignez-vous pas, monsieur le ministre, que les entreprises cherchent à accélérer le recours à ces préretraites avant que votre système n'entre pleinement en application ?
Dernière observation : nous ne savons pas si les conditions portant sur les entreprises, conditions nécessaires pour que l'Etat prenne en charge l'allocation versée aux salariés, seront, elles aussi, revues à la suite du recentrage prévu par le décret du 9 février 2000.
Par défaut, une nouvelle fois, puisque rien de précis n'est envisagé concernant les salariés exposés aux travaux pénibles pour leur permettre de partir avant 60 ans à la retraite, nous proposons le maintien des dispositions actuelles.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter les amendements n°s 227 et 228 et pour donner l'avis de la commission sur les amendements n°s 335, 336, 338, 339 rectifié et 340.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. L'amendement n° 227 vise à préciser les conditions d'entrée en vigueur de la réforme des dispositifs relatifs aux CATS. Son application est subordonnée à la publication d'un décret, mais en l'absence de décret, cette réforme serait effective un an après la publication de la loi. Ainsi semble-t-il préférable de supprimer purement et simplement le délai limite qui, en définitive, pose plus de problèmes qu'il n'en résout.
L'amendement n° 228 est un amendement de sécurité juridique.
Par ailleurs, la commission émet un avis défavorable sur les amendements n°s 335, 336, 338, 339 rectifié et 340, qui sont des amendements de suppression.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 335, qui vise à supprimer l'article.
Il faut savoir ce que l'on veut ! En effet, depuis le début de ce débat, tout le monde a, semble-t-il, approuvé l'objectif du Gouvernement d'augmenter le taux d'activité des seniors. On peut douter, ici ou là, des mécanismes qui sont mis en oeuvre, mais un certain consensus se dessine sur cet objectif.
On ne peut pas à la fois vouloir augmenter le taux d'activité des seniors et laisser ouvert le robinet des préretraites et des cessations progressives d'activité. Le Gouvernement souhaite donc le rejet de l'amendement n° 335.
Il est également défavorable aux amendements n°s 336, 338, 339 rectifié et 340.
En revanche, il est favorable à l'amendement n° 1113, qui est un amendement d'ordre rédactionnel, ainsi qu'aux amendements n°s 227 et 228.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, je demande le vote par priorité de l'amendement n° 1113.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?
M. François Fillon, ministre. Favorable.
M. le président. La priorité est ordonnée.
Je mets aux voix l'amendement n° 1113.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, les amendements n°s 335 et 338 n'ont plus d'objet.
Je mets aux voix l'amendement n° 336.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 339 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 340.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 227.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 228.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, pour explication de vote sur l'article 12.
Mme Marie-Claude Beaudeau. L'article 12 supprime la préretraite progressive et limite le champ du dispositif de la cessation anticipée d'activité aux salariés ayant exercé des activités pénibles. Cependant, cet article vise, en fait, bien plus à décourager le recours aux préretraites d'entreprises et ne contient aucune mesure ferme pour encourager et élargir la cessation anticipée d'activité à tous les salariés concernés par la pénibilité.
Ainsi, monsieur le ministre, vous avez précisé dans l'exposé des motifs de l'article 12 que « les partenaires sociaux seront incités à négocier sur la pénibilité du travail, à la fois pour définir les métiers pénibles justifiant d'une cessation anticipée et pour s'efforcer de réduire la pénibilité ». Non seulement vous ne précisez pas les modalités « d'incitation » des partenaires sociaux dans ce sens, mais, de plus, à l'instar des négociations sur d'autres points, le risque est grand que celle-ci ne se prolonge inutilement dans le temps et ne soit pas engagée dans le sens d'avancées véritables pour les salariés.
Lors de la séance du 23 juin à l'Assemblée nationale, vous avez estimé, monsieur le ministre, que « aujourd'hui, à 55 ans, on n'est pas vieux, on n'est pas usé ». Vous avez même, pour illustrer votre propos, posé la question suivante : « Qu'y a-t-il de commun, dans le secteur de la métallurgie, entre l'ouvrier qui travaillait directement sur les pièces et celui qui, aujourd'hui, programme des automates qui font le travail à sa place ? »
La réponse est simple et tient en deux temps.
En premier lieu, tous les ouvriers de la métallurgie ne « programment » pas des « automates qui font le travail à leur place » : votre vision de ce secteur d'activité aujourd'hui me paraît un peu surréaliste, décalée, et bien improbable ! C'est un monde du travail sans peine que vous présentez, mais ce monde-là n'est pas encore advenu, et surtout pas dans la métallurgie !
En second lieu, la différence entre un ouvrier de la métallurgie d'il y a quelques années ou quelques décennies et un ouvrier d'aujourd'hui ne réside pas dans son état de santé, physique comme psychique.
Vous n'ignorez pas, mes chers collègues, que la métallurgie détient de bien tristes records : premier secteur en matière de maladies professionnelles ; deuxième secteur pour l'obligation faite d'utiliser des équipements de protection individuelle ; quatrième secteur en nombre d'accidents mortels ; septième secteur en matière de fréquence des accidents du travail, selon une enquête de la direction de l'animation, de la recherche et de la statistique, la DARES, sur les conditions de travail de 1998 ; enquête qui répertorie trente-six secteurs d'activité.
De même, 55 % des salariés de ce secteur sont exposés à des agents chimiques très toxiques ; 30 % sont soumis à des horaires alternants ; 58 % à de fortes nuisances sonores, selon une enquête du SUMER de 1994.
Au-delà du secteur de la métallurgie, mesurez-vous bien le caractère massif et dangereux de l'exposition de salariés à des travaux pénibles, et qui se renforce avec l'âge ? Les enquêtes SUMER et DARES précitées montrent bien la réalité de la nature difficile, précocement usante, pathogène du travail pour nombre de salariés, y compris au-delà de 50 ans. Ainsi, un salarié sur cinq âgés de plus de 50 ans est soumis à un effort physique pouvant comporter un risque pour sa santé, port de charges, postures difficiles, vibrations, contraintes articulaires. De même, 20 % au moins des salariés âgés de 50 ans ou plus travaillent dans un environnement pénible, que ce soit avec des produits cancérigènes ou dans les intempéries, la chaleur, le bruit, notamment.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est vrai !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Les plus exposés à ces conditions de travail sont les ouvriers, puis les employés, les professions intermédiaires et, enfin, les cadres. Le rapport de M. Yves Struillou, cité par M. le rapporteur, qui avait été remis au COR sur le thème « Pénibilité et travail » en avril 2003, détaille ainsi que 80 % des ouvriers sont soumis à trois ou plus des dix critères établis par l'auteur pour caractériser la pénibilité.
M. Alain Gournac. Pas tous !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Parmi les cadres, 10 % entrent dans cette catégorie de « trois critères au moins ». Or, nous savons tous que les moins aptes financièrement à choisir une cessation d'activité avant échéance normale sont les ouvriers qui, sinon, verraient leurs pensions subir une décote trop importante pour leur permettre de bénéficier d'une retraite suffisante. Il est donc tout à fait nécessaire de permettre à tous les salariés exposés à un travail pénible, usant, posté, dangereux, de nuit, pathogène, de partir en préretraite sans en être financièrement pénalisés.
Un tel dispositif existe, depuis peu, d'ailleurs, pour les victimes de l'amiante, mais ses modalités de fonctionnement ne permettent pas qu'en bénéficient tous les salariés qui devraient pouvoir partir en retraite anticipée du fait de leur exposition à l'amiante.
Vous vous souvenez de la longue lutte des femmes salariés d'Amisol, débutée en 1974, concernant l'amiante. Beaucoup de ces femmes sont mortes, depuis.
L'action dont elles ont pris l'initiative, refusant de choisir entre « le chèque et la justice » selon l'expression de leur présidente, Josette Roudaire, ancienne d'Amisol et présidente du comité anti-amiante, a permis de lancer une campagne de lutte - encore loin d'être achevée - visant à faire reconnaître la responsabilité du patronat et de l'Etat dans la catastrophe de l'amiante. L'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, l'ACAATA, créée pour permettre aux victimes de l'amiante de partir en retraite anticipée connaît aujourd'hui un champ trop restrictif pour que tous les salariés concernés puissent en bénéficier.
En refusant d'inscrire dans le champ du dispositif de nombreuses entreprises et secteurs concernés, vous refusez du même coup un départ anticipé, pourtant capital pour ces personnes. (Marques d'impatience sur les travées de l'UMP.)
De même, les montants de l'ACAATA sont insuffisants. (Rires sur les mêmes travées.)
Chers collègues, je ne trouve pas cela drôle, c'est même très triste.
Mme Odette Terrade. Les conditions de travail ne les intéressent pas !
M. Max Marest. C'est long !
M. Alain Gournac. C'est à côté de la question !
M. le président. Concluez, madame Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Donc, les montants de l'ACAATA sont insuffisants, car ils sont limités à 65 % du salaire.
M. Max Marest. Lisez-nous la Bible, plutôt !
Mme Marie-Claude Beaudeau. C'est ainsi que plusieurs anciennes employées d'Amisol expliquent qu'elles ne peuvent pas partir en retraite anticipée, parce qu'elles n'ont pas les moyens de vivre avec 65 % du SMIC, alors qu'elles savent que leur vie est en danger les années qui viennent.
Les travaux pénibles, contraignants, postés, non seulement vieillissent et usent prématurément, mais induisent également des années de retraite souvente courtes, difficiles et douloureuses.
Les affections, troubles de la vue ou de l'ouïe, les TMS - troubles musculosquelettiques -, les lombalgies, les difficultés respiratoires viennent s'ajouter aux difficultés naturelles qui peuvent se poser lorsque tout être humain vieillit.
M. Dominique Braye. La chute des cheveux aussi !
Mme Marie-Claude Beaudeau. A ce propos, je termine mon intervention, monsieur le président, en citant cette phrase de Yannick Moreau, en avant-propos du rapport de M. Striullou, tout à fait représentative du cadre général dans lequel nous demandons cette retraite anticipée : « Il va de soi que la prise en charge de la pénibilité pour la retraite ne saurait dispenser d'une vigoureuse action d'amélioration des conditions de travail. »
M. François Fillon, ministre. C'est pour cela que nous proposons la « préretraite pénibilité » !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Et je trouve curieux, monsieur Braye, que vous ne m'ayez pas écoutée avec plus d'émotion. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 12, modifié.
(L'article 12 est adopté.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, par courtoisie, j'indique au Sénat que je demanderai, demain matin, la priorité pour les articles 14, 15 et 16, après l'article 13 bis.
M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
TEXTE SOUMIS AU SÉNAT
EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4
DE LA CONSTITUTION
M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Lettre de la Commission européenne du 9 juillet 2003 relative à une demande de dérogation fiscale présentée par l'Irlande en application de l'article 27 paragraphe 2 de la sixième directive du Conseil, du 17 mai 1977, en matière de TVA d'une mesure dérogatoire à cette directive.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-2333 et distribué.
ORDRE DU JOUR
M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, samedi 12 juillet 2003, à neuf heures quarante-cinq, à quinze heures et, éventuellement, le soir :
Suite de la discussion du projet de loi (n° 378, 2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant réforme des retraites.
Rapport (n° 382, 2002-2003) fait par M. Dominique Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales.
Avis (n° 383, 2002-2003) de M. Adrien Gouteyron, fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
Délais limites pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements
Sous réserve de sa transmission, projet de loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine (AN, n° 950) (urgence déclarée) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 16 juillet 2003, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : jeudi 17 juillet 2003, à dix heures.
Pour chacun des textes inscrits à l'ordre du jour de la session extraordinaire, à l'exception du projet de loi portant réforme des retraites et du projet de loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, la conférence des présidents a fixé le délai limite pour le dépôt des amendements à dix-sept heures, la veille de la discussion du texte.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée le samedi 12 juillet 2003, à zéro heure quarante-cinq.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD
NOMINATION D'UN RAPPORTEUR
Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale :
M. Jean-Patrick Courtois a été nommé rapporteur du projet de loi n° 396 (2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France, dont la commission des lois est saisie au fond.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON
ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du vendredi 11 juillet 2003
SCRUTIN (n° 194)
sur l'amendement n° 120, présenté par M. Roland Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, tendant à insérer un article additionnel avant l'article 4 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant réforme des retraites (exonération de charges patronales).
Nombre de votants : 318
Nombre de suffrages
exprimés : 316
Pour : 111
Contre : 205
Le Sénat n'a pas adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (23) :
Pour : 22.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Guy Fischer, qui présidait la séance.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (27) :
Contre : 27.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (17) :
Pour : 6. _ MM. Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Gérard Delfau, François Fortassin et Dominique Larifla.
Contre : 9.
Abstentions : 2. _ MM. Nicolas Alfonsi et Rodolphe Désiré.
GROUPE SOCIALISTE (83) :
Pour : 83.
GROUPE DE L'UNION POUR UN MOUVEMENT POPULAIRE (166) :
Contre : 164.
N'ont pas pris part au vote : 2. _ MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Emmanuel Hamel.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (5) :
Contre : 5.
Ont voté pour
Michèle André
Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Marie-France Beaufils
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marie-Christine Blandin
Nicole Borvo
Didier Boulaud
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Claire-Lise Campion
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Yvon Collin
Gérard Collomb
Yves Coquelle
Raymond Courrière
Roland Courteau
Yves Dauge
Annie David
Marcel Debarge
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Evelyne Didier
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
François Fortassin
Thierry Foucaud
Jean-Claude Frécon
Bernard Frimat
Charles Gautier
Jean-Pierre Godefroy
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Odette Herviaux
Alain Journet
Yves Krattinger
André Labarrère
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
André Lejeune
Louis Le Pensec
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Josiane Mathon
Pierre Mauroy
Louis Mermaz
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Roland Muzeau
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Daniel Raoul
Paul Raoult
Daniel Reiner
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Michèle San Vicente
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Jean-Pierre Sueur
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Jean-Marc Todeschini
Pierre-Yvon Tremel
André Vantomme
Paul Vergès
André Vézinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Ont voté contre
Nicolas About
Philippe Adnot
Jean-Paul Alduy
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
Gérard Bailly
José Balarello
Gilbert Barbier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Daniel Bernardet
Roger Besse
Laurent Béteille
Joël Billard
Claude Biwer
Jean Bizet
Jacques Blanc
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
Didier Borotra
Joël Bourdin
Brigitte Bout
Jean Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Ernest Cartigny
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cléach
Jean Clouet
Christian Cointat
Gérard Cornu
Jean-Patrick Courtois
Philippe Darniche
Robert Del Picchia
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Dériot
Sylvie Desmarescaux
Yves Détraigne
Eric Doligé
Jacques Dominati
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Louis Duvernois
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Jean-Claude Etienne
Pierre Fauchon
Jean Faure
Françoise Férat
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Alain Fouché
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Christian Gaudin
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Gisèle Gautier
Patrice Gélard
André Geoffroy
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Jacqueline Gourault
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Charles Guené
Michel Guerry
Hubert Haenel
Françoise Henneron
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Daniel Hoeffel
Jean-François Humbert
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Bernard Joly
Jean-Marc Juilhard
Roger Karoutchi
Joseph Kerguéris
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
André Lardeux
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
René-Georges Laurin
Jean-René Lecerf
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Jean-François Le Grand
Serge Lepeltier
Philippe Leroy
Marcel Lesbros
Valérie Létard
Gérard Longuet
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Brigitte Luypaert
Max Marest
Philippe Marini
Pierre Martin
Jean-Louis Masson
Serge Mathieu
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Dominique Mortemousque
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Monique Papon
Anne-Marie Payet
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Josselin de Rohan
Roger Romani
Janine Rozier
Bernard Saugey
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Bruno Sido
Daniel Soulage
Louis Souvet
Michel Thiollière
Henri Torre
René Trégouët
André Trillard
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Jean-Marie Vanlerenberghe
Alain Vasselle
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Jean-Paul Virapoullé
François Zocchetto
Abstentions
Nicolas Alfonsi et Rodolphe Désiré.
N'ont pas pris part au vote
Emmanuel Hamel, Christian Poncelet, président du Sénat, et Guy Fischer, qui présidait la séance.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 318
Nombre de suffrages
exprimés : 316
Majorité absolue des suffrages exprimés : 159
Pour :
112
Contre : 204
Mais, après vérification, ces nombres ont été
rectifiés conformément à la liste ci-dessus.
SCRUTIN (n° 195)
sur l'amendement n° 127, présenté par M. Roland Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, tendant à insérer un article additionnel au projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant réforme des retraites (nouvelle définition du licenciement économique).
Nombre de votants : 291
Nombre de suffrages
exprimés : 289
Pour : 111
Contre : 178
Le Sénat n'a pas adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (23) :
Pour : 22.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Guy Fischer, qui présidait la séance.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (27)* :
N'ont pas pris part au vote : 27.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (17) :
Pour : 6. _ MM. Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Gérard Delfau, François Fortassin et Dominique Larifla.
Contre : 9
Abstentions : 2. _ MM. Nicolas Alfonsi et Rodolphe Désiré.
GROUPE SOCIALISTE (83) :
Pour : 83.
GROUPE DE L'UNION POUR UN MOUVEMENT POPULAIRE (166) :
Contre : 164.
N'ont pas pris part au vote : 2. _ MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Emmanuel Hamel.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (5) :
Contre : 5.
Le groupe de l'Union centriste aurait souhaité voter « contre ».
Ont voté pour
Michèle André
Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Marie-France Beaufils
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marie-Christine Blandin
Nicole Borvo
Didier Boulaud
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Claire-Lise Campion
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
MoniqueCerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Yvon Collin
Gérard Collomb
Yves Coquelle
Raymond Courrière
Roland Courteau
Yves Dauge
Annie David
Marcel Debarge
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Evelyne Didier
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
François Fortassin
Thierry Foucaud
Jean-Claude Frécon
Bernard Frimat
Charles Gautier
Jean-Pierre Godefroy
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Odette Herviaux
Alain Journet
Yves Krattinger
André Labarrère
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
André Lejeune
Louis Le Pensec
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Josiane Mathon
Pierre Mauroy
Louis Mermaz
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Roland Muzeau
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Daniel Raoul
Paul Raoult
Daniel Reiner
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Michèle San Vicente
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Jean-Pierre Sueur
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Jean-Marc Todeschini
Pierre-Yvon Tremel
André Vantomme
Paul Vergès
André Vézinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Ont voté contre
Nicolas About
Philippe Adnot
Jean-Paul Alduy
Pierre André
Gérard Bailly
José Balarello
Gilbert Barbier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Daniel Bernardet
Roger Besse
Laurent Béteille
Joël Billard
Jean Bizet
Jacques Blanc
Paul Blanc
Joël Bourdin
Brigitte Bout
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Ernest Cartigny
Auguste Cazalet
CharlesCeccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cléach
Jean Clouet
Christian Cointat
Gérard Cornu
Jean-Patrick Courtois
Philippe Darniche
Robert Del Picchia
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Gérard Dériot
Sylvie Desmarescaux
Eric Doligé
Jacques Dominati
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Louis Duvernois
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Jean-Claude Etienne
Jean Faure
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Alain Fouché
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
André Geoffroy
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Charles Guené
Michel Guerry
Hubert Haenel
Françoise Henneron
Pierre Hérisson
Daniel Hoeffel
Jean-François Humbert
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Bernard Joly
Jean-Marc Juilhard
Roger Karoutchi
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
André Lardeux
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
René-Georges Laurin
Jean-René Lecerf
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Jean-François Le Grand
Serge Lepeltier
Philippe Leroy
Marcel Lesbros
Gérard Longuet
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Brigitte Luypaert
Max Marest
Philippe Marini
Pierre Martin
Jean-Louis Masson
Serge Mathieu
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Dominique Mortemousque
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Nelly Olin
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Monique Papon
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Josselin de Rohan
Roger Romani
Janine Rozier
Bernard Saugey
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Bruno Sido
Louis Souvet
Michel Thiollière
Henri Torre
René Trégouët
André Trillard
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Jean-Paul Virapoullé
Abstentions
Nicolas Alfonsi et Rodolphe Désiré.
N'ont pas pris part au vote
Jean-Paul Amoudry, Philippe Arnaud, Jean Arthuis, Denis Badré, Claude Biwer, Maurice Blin, Annick Bocandé, Didier Borotra, Jean Boyer, Marcel Deneux, Yves Détraigne, Jean-Léonce Dupont, Pierre Fauchon, Françoise Férat, Christian Gaudin, Gisèle Gautier, Jacqueline Gourault, Emmanuel Hamel, Marcel Henry, Joseph Kerguéris, Valérie Létard, Michel Mercier, Louis Moinard, Philippe Nogrix, Anne-Marie Payet, Daniel Soulage, Jean-Marie Vanlerenberghe, François Zocchetto, Christian Poncelet, président du Sénat, et Guy Fischer, qui présidait la séance. Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 292
Nombre de suffrages
exprimés : 290
Majorité absolue des suffrages exprimés : 146
Pour :
112
Contre : 178
Mais, après vérification, ces nombres ont été
rectifiés conformément à la liste ci-dessus.
SCRUTIN (n° 196)
sur l'amendement n° 1070 présenté par Mme Marie-Claude Beaudeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, tendant à insérer un article additionnel avant l'article 4 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant réforme des retraites (évolution du taux d'activité des hommes et des femmes de plus de 50 ans).
Nombre de votants : 318
Nombre de suffrages
exprimés : 316
Pour : 111
Contre : 205
Le Sénat n'a pas adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (23) :
Pour : 22.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Guy Fischer, qui présidait la séance.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (27) :
Contre : 27.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (17) :
Pour : 6. _ MM. Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Gérard Delfau, François Fortassin et Dominique Larifla.
Contre : 9.
Abstentions : 2. _ MM. Nicolas Alfonsi et Rodolphe Désiré.
GROUPE SOCIALISTE (83) :
Pour : 83.
GROUPE DE L'UNION POUR UN MOUVEMENT POPULAIRE (166) :
Contre : 164.
N'ont pas pris part au vote : 2. _ MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Emmanuel Hamel.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (5) :
Contre : 5.
Ont voté pour
Michèle André
Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Marie-France Beaufils
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marie-Christine Blandin
Nicole Borvo
Didier Boulaud
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Claire-Lise Campion
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
MoniqueCerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Yvon Collin
Gérard Collomb
Yves Coquelle
Raymond Courrière
Roland Courteau
Yves Dauge
Annie David
Marcel Debarge
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Evelyne Didier
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
François Fortassin
Thierry Foucaud
Jean-Claude Frécon
Bernard Frimat
Charles Gautier
Jean-Pierre Godefroy
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Odette Herviaux
Alain Journet
Yves Krattinger
André Labarrère
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
André Lejeune
Louis Le Pensec
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Josiane Mathon
Pierre Mauroy
Louis Mermaz
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Roland Muzeau
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Daniel Raoul
Paul Raoult
Daniel Reiner
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Michèle San Vicente
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Jean-Pierre Sueur
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Jean-Marc Todeschini
Pierre-Yvon Tremel
André Vantomme
Paul Vergès
André Vézinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Ont voté contre
Nicolas About
Philippe Adnot
Jean-Paul Alduy
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
Gérard Bailly
José Balarello
Gilbert Barbier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Daniel Bernardet
Roger Besse
Laurent Béteille
Joël Billard
Claude Biwer
Jean Bizet
Jacques Blanc
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
Didier Borotra
Joël Bourdin
Brigitte Bout
Jean Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Ernest Cartigny
Auguste Cazalet
CharlesCeccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cléach
Jean Clouet
Christian Cointat
Gérard Cornu
Jean-Patrick Courtois
Philippe Darniche
Robert Del Picchia
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Dériot
Sylvie Desmarescaux
Yves Détraigne
Eric Doligé
Jacques Dominati
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Louis Duvernois
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Jean-Claude Etienne
Pierre Fauchon
Jean Faure
Françoise Férat
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Alain Fouché
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Christian Gaudin
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Gisèle Gautier
Patrice Gélard
André Geoffroy
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Jacqueline Gourault
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Charles Guené
Michel Guerry
Hubert Haenel
Françoise Henneron
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Daniel Hoeffel
Jean-François Humbert
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Bernard Joly
Jean-Marc Juilhard
Roger Karoutchi
Joseph Kerguéris
Christiande La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
André Lardeux
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
René-Georges Laurin
Jean-René Lecerf
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Jean-François Le Grand
Serge Lepeltier
Philippe Leroy
Marcel Lesbros
Valérie Létard
Gérard Longuet
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Brigitte Luypaert
Max Marest
Philippe Marini
Pierre Martin
Jean-Louis Masson
Serge Mathieu
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Dominique Mortemousque
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Monique Papon
Anne-Marie Payet
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Josselin de Rohan
Roger Romani
Janine Rozier
Bernard Saugey
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Bruno Sido
Daniel Soulage
Louis Souvet
Michel Thiollière
Henri Torre
René Trégouët
André Trillard
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Jean-Marie Vanlerenberghe
Alain Vasselle
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Jean-Paul Virapoullé
François Zocchetto
Abstentions
Nicolas Alfonsi et Rodolphe Désiré.
N'ont pas pris part au vote
Emmanuel Hamel, Christian Poncelet, président du Sénat, et Guy Fischer, qui présidait la séance.
Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification, conformes à la liste de scrutin ci-dessus.
SCRUTIN (n° 197)
sur l'article 6 modifié par les amendements n° 205 à 210 de la commission des affaires sociales à l'exclusion de tout autre amendement au projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant réforme des retraites (conseil d'orientation des retraites).
Nombre de votants : 318
Nombre de suffrages
exprimés : 295
Pour : 295
Contre : 0
Le Sénat a adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (23) :
Abstentions : 23.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (27) :
Pour : 27.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (17) :
Pour : 17.
GROUPE SOCIALISTE (83) :
Pour : 82.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Bernard Angels, qui présidait la séance.
GROUPE DE L'UNION POUR UN MOUVEMENT POPULAIRE (166) :
Pour : 164.
N'ont pas pris part au vote : 2. _ MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Emmanuel Hamel.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (5) :
Pour : 5.
Ont voté pour
Nicolas About
Philippe Adnot
Jean-Paul Alduy
Nicolas Alfonsi
Jean-Paul Amoudry
Michèle André
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
Robert Badinter
Denis Badré
Gérard Bailly
José Balarello
Gilbert Barbier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Jean-Michel Baylet
Michel Bécot
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Claude Belot
Maryse Bergé-Lavigne
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jean Besson
Laurent Béteille
Joël Billard
Claude Biwer
Jean Bizet
Jacques Blanc
Paul Blanc
Marie-Christine Blandin
Maurice Blin
Annick Bocandé
Didier Borotra
Didier Boulaud
Joël Bourdin
Brigitte Bout
André Boyer
Jean Boyer
Yolande Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Claire-Lise Campion
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Jean-Louis Carrère
Ernest Cartigny
Auguste Cazalet
Bernard Cazeau
CharlesCeccaldi-Raynaud
MoniqueCerisier-ben Guiga
Gérard César
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cléach
Jean Clouet
Christian Cointat
Yvon Collin
Gérard Collomb
Gérard Cornu
Raymond Courrière
Roland Courteau
Jean-Patrick Courtois
Philippe Darniche
Yves Dauge
Marcel Debarge
Robert Del Picchia
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Dériot
Rodolphe Désiré
Sylvie Desmarescaux
Yves Détraigne
Eric Doligé
Claude Domeizel
Jacques Dominati
Michel Doublet
Michel Dreyfus-Schmidt
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Louis Duvernois
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Claude Estier
Jean-Claude Etienne
Pierre Fauchon
Jean Faure
Françoise Férat
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
François Fortassin
Alain Fouché
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Jean-Claude Frécon
Yves Fréville
Bernard Frimat
Yann Gaillard
René Garrec
Christian Gaudin
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Charles Gautier
Gisèle Gautier
Patrice Gélard
André Geoffroy
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Jean-Pierre Godefroy
Daniel Goulet
Jacqueline Gourault
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Charles Guené
Jean-Noël Guérini
Michel Guerry
Hubert Haenel
Claude Haut
Françoise Henneron
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Odette Herviaux
Daniel Hoeffel
Jean-François Humbert
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Bernard Joly
Alain Journet
Jean-Marc Juilhard
Roger Karoutchi
Joseph Kerguéris
Yves Krattinger
Christian de La Malène
André Labarrère
Philippe Labeyrie
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
André Lardeux
Dominique Larifla
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
René-Georges Laurin
Jean-René Lecerf
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Jean-FrançoisLe Grand
André Lejeune
Serge Lepeltier
Louis Le Pensec
Philippe Leroy
Marcel Lesbros
Valérie Létard
Claude Lise
Gérard Longuet
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Brigitte Luypaert
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Max Marest
Philippe Marini
Pierre Martin
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Jean-Louis Masson
Serge Mathieu
Pierre Mauroy
Michel Mercier
Louis Mermaz
Lucette Michaux-Chevry
Gérard Miquel
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Michel Moreigne
Dominique Mortemousque
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Monique Papon
Jean-Marc Pastor
Anne-Marie Payet
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Guy Penne
Jean Pépin
Daniel Percheron
Jacques Peyrat
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Xavier Pintat
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jean Puech
Henri de Raincourt
Daniel Raoul
Paul Raoult
Daniel Reiner
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Roger Rinchet
Yves Rispat
Josselin de Rohan
Roger Romani
Gérard Roujas
André Rouvière
Janine Rozier
Michèle San Vicente
Bernard Saugey
Claude Saunier
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Michel Sergent
Bruno Sido
René-Pierre Signé
Daniel Soulage
Louis Souvet
Jean-Pierre Sueur
Simon Sutour
Michel Teston
Michel Thiollière
Jean-Marc Todeschini
Henri Torre
René Trégouët
Pierre-Yvon Tremel
André Trillard
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Jean-Marie Vanlerenberghe
André Vantomme
Alain Vasselle
André Vézinhet
Jean-Pierre Vial
Marcel Vidal
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Jean-Paul Virapoullé
Henri Weber
François Zocchetto
Abstentions
François Autain
Jean-Yves Autexier
Marie-Claude Beaudeau
Marie-France Beaufils
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Nicole Borvo
Robert Bret
Yves Coquelle
Annie David
Michelle Demessine
Evelyne Didier
Guy Fischer
Thierry Foucaud
Gérard Le Cam
Paul Loridant
Hélène Luc
Josiane Mathon
Roland Muzeau
Jack Ralite
Ivan Renar
Odette Terrade
Paul Vergès
N'ont pas pris part au vote
Christian Poncelet, président du Sénat, Bernard Angels, qui présidait la séance, et Emmanuel Hamel.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 319
Nombre de suffrages
exprimés : 296
Majorité absolue des suffrages exprimés : 149
Pour :
296
Contre : 0
Mais, après vérification, ces nombres ont été
rectifiés conformément à la liste ci-dessus.
SCRUTIN (n° 198)
sur l'amendement n° 324, présenté par Mme Michelle Demessine et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, à l'article 8 du projet de loi adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant réforme des retraites (information des assurés par le groupement d'intérêt public).
Nombre de votants : 313
Nombre de suffrages
exprimés : 311
Pour : 111
Contre : 200
Le Sénat n'a pas adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (23) :
Pour : 23.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (27) :
Contre : 27.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (17) :
Pour : 6. _ MM. Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Gérard Delfau, François Fortassin et Dominique Larifla.
Contre : 9.
Abstentions : 2. _ MM. Nicolas Alfonsi et Rodolphe Désiré.
GROUPE SOCIALISTE (83) :
Pour : 82.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Bernard Angels, qui présidait la séance.
GROUPE DE L'UNION POUR UN MOUVEMENT POPULAIRE (166) :
Contre : 164.
N'ont pas pris part au vote : 2. _ MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Emmanuel Hamel.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (5) :
N'ont pas pris part au vote : 5.
Ont voté pour
Michèle André
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Marie-France Beaufils
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marie-Christine Blandin
Nicole Borvo
Didier Boulaud
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Claire-Lise Campion
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
MoniqueCerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Yvon Collin
Gérard Collomb
Yves Coquelle
Raymond Courrière
Roland Courteau
Yves Dauge
Annie David
Marcel Debarge
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Evelyne Didier
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Guy Fischer
François Fortassin
Thierry Foucaud
Jean-Claude Frécon
Bernard Frimat
Charles Gautier
Jean-Pierre Godefroy
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Odette Herviaux
Alain Journet
Yves Krattinger
André Labarrère
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
André Lejeune
Louis Le Pensec
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Josiane Mathon
Pierre Mauroy
Louis Mermaz
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Roland Muzeau
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Daniel Raoul
Paul Raoult
Daniel Reiner
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Michèle San Vicente
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Jean-Pierre Sueur
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Jean-Marc Todeschini
Pierre-Yvon Tremel
André Vantomme
Paul Vergès
André Vézinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Ont voté contre
Nicolas About
Jean-Paul Alduy
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
Gérard Bailly
José Balarello
Gilbert Barbier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Daniel Bernardet
Roger Besse
Laurent Béteille
Joël Billard
Claude Biwer
Jean Bizet
Jacques Blanc
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
Didier Borotra
Joël Bourdin
Brigitte Bout
Jean Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Ernest Cartigny
Auguste Cazalet
CharlesCeccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cléach
Jean Clouet
Christian Cointat
Gérard Cornu
Jean-Patrick Courtois
Robert Del Picchia
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Dériot
Yves Détraigne
Eric Doligé
Jacques Dominati
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Louis Duvernois
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Jean-Claude Etienne
Pierre Fauchon
Jean Faure
Françoise Férat
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Alain Fouché
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Christian Gaudin
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Gisèle Gautier
Patrice Gélard
André Geoffroy
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Jacqueline Gourault
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Charles Guené
Michel Guerry
Hubert Haenel
Françoise Henneron
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Daniel Hoeffel
Jean-François Humbert
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Bernard Joly
Jean-Marc Juilhard
Roger Karoutchi
Joseph Kerguéris
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
André Lardeux
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
René-Georges Laurin
Jean-René Lecerf
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Jean-François Le Grand
Serge Lepeltier
Philippe Leroy
Marcel Lesbros
Valérie Létard
Gérard Longuet
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Brigitte Luypaert
Max Marest
Philippe Marini
Pierre Martin
Jean-Louis Masson
Serge Mathieu
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Dominique Mortemousque
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Monique Papon
Anne-Marie Payet
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Josselin de Rohan
Roger Romani
Janine Rozier
Bernard Saugey
Jean-Pierre Schosteck
Bruno Sido
Daniel Soulage
Louis Souvet
Michel Thiollière
Henri Torre
René Trégouët
André Trillard
François Trucy
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Jean-Marie Vanlerenberghe
Alain Vasselle
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Jean-Paul Virapoullé
François Zocchetto
Abstentions
Nicolas Alfonsi et Rodolphe Désiré.
N'ont pas pris part au vote
Christian Poncelet, président du Sénat, Bernard Angels, qui présidait la séance, Philippe Adnot, Philippe Darniche, Sylvie Desmarescaux, Emmanuel Hamel, Bernard Seillier et Alex Turk.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 287
Nombre de suffrages
exprimés : 285
Majorité absolue des suffrages exprimés : 143
Pour :
112
Contre : 173
Mais, après vérification, ces nombres ont été
rectifiés conformément à la liste ci-dessus.
SCRUTIN (n° 199)
sur l'amendement n° 906, présenté par M. Claude Estier et les membres du groupe socialiste et apparenté, tendant à insérer un article additionnel après l'article 8 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant réforme des retraites (diffusion à tout Français des dispositions de la présente loi).
Nombre de votants : 318
Nombre de suffrages
exprimés : 316
Pour : 111
Contre : 205
Le Sénat n'a pas adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (23) :
Pour : 23.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (27) :
Contre : 27.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (17) :
Pour : 6. _ MM. Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Gérard Delfau, François Fortassin et Dominique Larifla.
Contre : 9.
Abstentions : 2. _ MM. Nicolas Alfonsi et Rodolphe Désiré.
GROUPE SOCIALISTE (83) :
Pour : 82.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Bernard Angels, qui présidait la séance.
GROUPE UNION POUR UN MOUVEMENT POPULAIRE (166) :
Contre : 164.
N'ont pas pris part au vote : 2. _ MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Emmanuel Hamel.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (5) :
Contre : 5.
Ont voté pour
Michèle André
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Marie-France Beaufils
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marie-Christine Blandin
Nicole Borvo
Didier Boulaud
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Claire-Lise Campion
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
MoniqueCerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Yvon Collin
Gérard Collomb
Yves Coquelle
Raymond Courrière
Roland Courteau
Yves Dauge
Annie David
Marcel Debarge
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Evelyne Didier
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Guy Fischer
François Fortassin
Thierry Foucaud
Jean-Claude Frécon
Bernard Frimat
Charles Gautier
Jean-Pierre Godefroy
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Odette Herviaux
Alain Journet
Yves Krattinger
André Labarrère
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
André Lejeune
Louis Le Pensec
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Josiane Mathon
Pierre Mauroy
Louis Mermaz
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Roland Muzeau
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Daniel Raoul
Paul Raoult
Daniel Reiner
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Michèle San Vicente
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Jean-Pierre Sueur
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Jean-Marc Todeschini
Pierre-Yvon Tremel
André Vantomme
Paul Vergès
André Vézinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Ont voté contre
Nicolas About
Philippe Adnot
Jean-Paul Alduy
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
Gérard Bailly
José Balarello
Gilbert Barbier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Daniel Bernardet
Roger Besse
Laurent Béteille
Joël Billard
Claude Biwer
Jean Bizet
Jacques Blanc
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
Didier Borotra
Joël Bourdin
Brigitte Bout
Jean Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Ernest Cartigny
Auguste Cazalet
CharlesCeccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cléach
Jean Clouet
Christian Cointat
Gérard Cornu
Jean-Patrick Courtois
Philippe Darniche
Robert Del Picchia
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Dériot
Sylvie Desmarescaux
Yves Détraigne
Eric Doligé
Jacques Dominati
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Louis Duvernois
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Jean-Claude Etienne
Pierre Fauchon
Jean Faure
Françoise Férat
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Alain Fouché
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Christian Gaudin
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Gisèle Gautier
Patrice Gélard
André Geoffroy
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Jacqueline Gourault
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Charles Guené
Michel Guerry
Hubert Haenel
Françoise Henneron
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Daniel Hoeffel
Jean-François Humbert
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Bernard Joly
Jean-Marc Juilhard
Roger Karoutchi
Joseph Kerguéris
Christiande La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
André Lardeux
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
René-Georges Laurin
Jean-René Lecerf
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Jean-François Le Grand
Serge Lepeltier
Philippe Leroy
Marcel Lesbros
Valérie Létard
Gérard Longuet
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Brigitte Luypaert
Max Marest
Philippe Marini
Pierre Martin
Jean-Louis Masson
Serge Mathieu
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Dominique Mortemousque
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Monique Papon
Anne-Marie Payet
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Josselin de Rohan
Roger Romani
Janine Rozier
Bernard Saugey
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Bruno Sido
Daniel Soulage
Louis Souvet
Michel Thiollière
Henri Torre
René Trégouët
André Trillard
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Jean-Marie Vanlerenberghe
Alain Vasselle
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Jean-Paul Virapoullé
François Zocchetto
Abstentions
Nicolas Alfonsi et Rodolphe Désiré.
N'ont pas pris part au vote
Christian Poncelet, président du Sénat, Bernard Angels, qui présidait la séance, et Emmanuel Hamel.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 319
Nombre de suffrages
exprimés : 317
Majorité absolue des suffrages exprimés : 159
Pour :
112
Contre : 205
Mais, après vérification, ces nombres ont été
rectifiés conformément à la liste ci-dessus.
SCRUTIN (n° 200)
sur l'amendement n° 219 présenté par M. Dominique Leclerc au nom de la commission des affaires sociales, à l'article 8 bis du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant réforme des retraites (emploi des salariés de plus de 50 ans).
Nombre de votants : 318
Nombre de suffrages
exprimés : 318
Pour : 213
Contre : 105
Le Sénat a adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (23) :
Contre : 23.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (27) :
Pour : 27.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (17) :
Pour : 17.
GROUPE SOCIALISTE (83) :
Contre : 82.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Bernard Angels, qui présidait la séance.
GROUPE DE L'UNION POUR UN MOUVEMENT POPULAIRE (166) :
Pour : 164.
N'ont pas pris part au vote : 2. _ MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Emmanuel Hamel.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (5) :
Pour : 5.
Ont voté pour
Nicolas About
Philippe Adnot
Jean-Paul Alduy
Nicolas Alfonsi
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
Gérard Bailly
José Balarello
Gilbert Barbier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Jean-Michel Baylet
Michel Bécot
Claude Belot
Daniel Bernardet
Roger Besse
Laurent Béteille
Joël Billard
Claude Biwer
Jean Bizet
Jacques Blanc
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
Didier Borotra
Joël Bourdin
Brigitte Bout
André Boyer
Jean Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Ernest Cartigny
Auguste Cazalet
CharlesCeccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cléach
Jean Clouet
Christian Cointat
Yvon Collin
Gérard Cornu
Jean-Patrick Courtois
Philippe Darniche
Robert Del Picchia
Gérard Delfau
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Dériot
Rodolphe Désiré
Sylvie Desmarescaux
Yves Détraigne
Eric Doligé
Jacques Dominati
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Louis Duvernois
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Jean-Claude Etienne
Pierre Fauchon
Jean Faure
Françoise Férat
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
François Fortassin
Alain Fouché
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Christian Gaudin
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Gisèle Gautier
Patrice Gélard
André Geoffroy
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Jacqueline Gourault
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Charles Guené
Michel Guerry
Hubert Haenel
Françoise Henneron
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Daniel Hoeffel
Jean-François Humbert
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Bernard Joly
Jean-Marc Juilhard
Roger Karoutchi
Joseph Kerguéris
Christiande La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
André Lardeux
Dominique Larifla
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
René-Georges Laurin
Jean-René Lecerf
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Jean-François Le Grand
Serge Lepeltier
Philippe Leroy
Marcel Lesbros
Valérie Létard
Gérard Longuet
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Brigitte Luypaert
Max Marest
Philippe Marini
Pierre Martin
Jean-Louis Masson
Serge Mathieu
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Dominique Mortemousque
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Monique Papon
Anne-Marie Payet
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Josselin de Rohan
Roger Romani
Janine Rozier
Bernard Saugey
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Bruno Sido
Daniel Soulage
Louis Souvet
Michel Thiollière
Henri Torre
René Trégouët
André Trillard
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Jean-Marie Vanlerenberghe
Alain Vasselle
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Jean-Paul Virapoullé
François Zocchetto
Ont voté contre
Michèle André
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Marie-Claude Beaudeau
Marie-France Beaufils
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marie-Christine Blandin
Nicole Borvo
Didier Boulaud
Yolande Boyer
Robert Bret
Claire-Lise Campion
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
MoniqueCerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Gérard Collomb
Yves Coquelle
Raymond Courrière
Roland Courteau
Yves Dauge
Annie David
Marcel Debarge
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Evelyne Didier
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Guy Fischer
Thierry Foucaud
Jean-Claude Frécon
Bernard Frimat
Charles Gautier
Jean-Pierre Godefroy
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Odette Herviaux
Alain Journet
Yves Krattinger
André Labarrère
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Gérard Le Cam
André Lejeune
Louis Le Pensec
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Josiane Mathon
Pierre Mauroy
Louis Mermaz
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Roland Muzeau
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Daniel Raoul
Paul Raoult
Daniel Reiner
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Michèle San Vicente
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Jean-Pierre Sueur
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Jean-Marc Todeschini
Pierre-Yvon Tremel
André Vantomme
Paul Vergès
André Vézinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
N'ont pas pris part au vote
Christian Poncelet, président du Sénat, Bernard Angels, qui présidait la séance, et Emmanuel Hamel.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 318
Nombre de suffrages
exprimés : 318
Majorité absolue des suffrages exprimés : 160
Pour :
212
Contre : 106
Mais, après vérification, ces nombres ont été
rectifiés conformément à la liste ci-dessus.
SCRUTIN (n° 201)
sur l'amendement n° 331, présenté par Mme Michelle Demessine et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, tendant à supprimer l'article 10 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant réforme des retraites (mise à la retraite d'office des salariés).
Nombre de votants : 318
Nombre de suffrages
exprimés : 316
Pour : 29
Contre : 287
Le Sénat n'a pas adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (23) :
Pour : 23.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (27) :
Contre : 27.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (17) :
Pour : 6. _ MM. Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Gérard Delfau, François Fortassin et Dominique Larifla.
Contre : 9.
Abstentions : 2. _ MM. Nicolas Alfonsi et Rodolphe Désiré.
GROUPE SOCIALISTE (83) :
Contre : 82.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Bernard Angels, qui présidait la séance.
GROUPE DE L'UNION POUR UN MOUVEMENT POPULAIRE (166) :
Contre : 164.
N'ont pas pris part au vote : 2. _ MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Emmanuel Hamel.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (5) :
Contre : 5.
Ont voté pour
François Autain
Jean-Yves Autexier
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Marie-France Beaufils
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Nicole Borvo
André Boyer
Robert Bret
Yvon Collin
Yves Coquelle
Annie David
Gérard Delfau
Michelle Demessine
Evelyne Didier
Guy Fischer
François Fortassin
Thierry Foucaud
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
Paul Loridant
Hélène Luc
Josiane Mathon
Roland Muzeau
Jack Ralite
Ivan Renar
Odette Terrade
Paul Vergès
Ont voté contre
Nicolas About
Philippe Adnot
Jean-Paul Alduy
Jean-Paul Amoudry
Michèle André
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
Robert Badinter
Denis Badré
Gérard Bailly
José Balarello
Gilbert Barbier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Claude Belot
Maryse Bergé-Lavigne
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jean Besson
Laurent Béteille
Joël Billard
Claude Biwer
Jean Bizet
Jacques Blanc
Paul Blanc
Marie-Christine Blandin
Maurice Blin
Annick Bocandé
Didier Borotra
Didier Boulaud
Joël Bourdin
Brigitte Bout
Jean Boyer
Yolande Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Claire-Lise Campion
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Jean-Louis Carrère
Ernest Cartigny
Auguste Cazalet
Bernard Cazeau
CharlesCeccaldi-Raynaud
MoniqueCerisier-ben Guiga
Gérard César
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cléach
Jean Clouet
Christian Cointat
Gérard Collomb
Gérard Cornu
Raymond Courrière
Roland Courteau
Jean-Patrick Courtois
Philippe Darniche
Yves Dauge
Marcel Debarge
Robert Del Picchia
Jean-Pierre Demerliat
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Dériot
Sylvie Desmarescaux
Yves Détraigne
Eric Doligé
Claude Domeizel
Jacques Dominati
Michel Doublet
Michel Dreyfus-Schmidt
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Louis Duvernois
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Claude Estier
Jean-Claude Etienne
Pierre Fauchon
Jean Faure
Françoise Férat
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Alain Fouché
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Jean-Claude Frécon
Yves Fréville
Bernard Frimat
Yann Gaillard
René Garrec
Christian Gaudin
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Charles Gautier
Gisèle Gautier
Patrice Gélard
André Geoffroy
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Jean-Pierre Godefroy
Daniel Goulet
Jacqueline Gourault
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Charles Guené
Jean-Noël Guérini
Michel Guerry
Hubert Haenel
Claude Haut
Françoise Henneron
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Odette Herviaux
Daniel Hoeffel
Jean-François Humbert
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Bernard Joly
Alain Journet
Jean-Marc Juilhard
Roger Karoutchi
Joseph Kerguéris
Yves Krattinger
Christiande La Malène
André Labarrère
Philippe Labeyrie
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
André Lardeux
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
René-Georges Laurin
Jean-René Lecerf
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Jean-François Le Grand
André Lejeune
Serge Lepeltier
Louis Le Pensec
Philippe Leroy
Marcel Lesbros
Valérie Létard
Claude Lise
Gérard Longuet
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Brigitte Luypaert
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Max Marest
Philippe Marini
Pierre Martin
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Jean-Louis Masson
Serge Mathieu
Pierre Mauroy
Michel Mercier
Louis Mermaz
Lucette Michaux-Chevry
Gérard Miquel
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Michel Moreigne
Dominique Mortemousque
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Monique Papon
Jean-Marc Pastor
Anne-Marie Payet
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Guy Penne
Jean Pépin
Daniel Percheron
Jacques Peyrat
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Xavier Pintat
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jean Puech
Henri de Raincourt
Daniel Raoul
Paul Raoult
Daniel Reiner
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Roger Rinchet
Yves Rispat
Josselin de Rohan
Roger Romani
Gérard Roujas
André Rouvière
Janine Rozier
Michèle San Vicente
Bernard Saugey
Claude Saunier
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Michel Sergent
Bruno Sido
René-Pierre Signé
Daniel Soulage
Louis Souvet
Jean-Pierre Sueur
Simon Sutour
Michel Teston
Michel Thiollière
Jean-Marc Todeschini
Henri Torre
René Trégouët
Pierre-Yvon Tremel
André Trillard
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Jean-Marie Vanlerenberghe
André Vantomme
Alain Vasselle
André Vézinhet
Jean-Pierre Vial
Marcel Vidal
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Jean-Paul Virapoullé
Henri Weber
François Zocchetto
Abstentions
Nicolas Alfonsi et Rodolphe Désiré.
N'ont pas pris part au vote
Christian Poncelet, président du Sénat, Bernard Angels, qui présidait la séance, et Emmanuel Hamel.
Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification, conformes à la liste de scrutin ci-dessus.