B. L'ÉTAT ACTUEL DU TRAFIC AÉRIEN

1. Usage commercial, militaire et privé

Le transport commercial de passagers représente 71 % de la consommation de carburant de l'aviation. En 2019, en France, l'avion était utilisé pour 9 % de l'ensemble des voyages et 79 % des voyages de 900 kilomètres ou plus4(*).

Le fret aérien consomme 17 % du carburant d'aviation au niveau mondial. Ce mode de transport présente de nombreux avantages : il permet d'éviter certaines frontières, de se rendre dans des endroits inaccessibles autrement ; il est rapide et sûr. Cependant, il reste très onéreux, si bien qu'il est réservé au transport de marchandises à haute valeur ajoutée (équipement électronique, oeuvres d'art, produits de luxe, etc.). Il représente 35 % des échanges de marchandises en valeur mais seulement 1 % en volume.

L'aviation militaire contribue à 8 % de la consommation de kérosène mondiale. En France, les forces armées disposent d'une composante aérienne (armée de l'air), et des avions militaires sont également affectés à la force marine, dotée d'une aéronautique navale.

L'aviation d'affaires, qui consomme 4 % du carburant d'aviation, recouvre l'utilisation d'avions par des entreprises et des individus pour le transport privé, à des fins commerciales ou personnelles, en dehors des services aériens commerciaux réguliers. Sauf exception, ces avions comportent moins de vingt sièges. En 2021, environ 70 % des trajets en jets privés en Europe ont été effectués pour des motifs professionnels5(*).

L'aviation d'affaires permet un accès direct à des destinations multiples et souvent moins accessibles, offrant ainsi un avantage significatif en termes de gain de temps, de flexibilité et d'efficacité pour les affaires. La France est le premier marché d'Europe en termes de mouvements de jets privés. Les États-Unis et l'Europe drainent 90 % de l'activité du marché mondial et exploitent 77 % de la flotte mondiale de jets privés.

Source :S. Gössling et A. Humpe, « The global scale, distribution and growth of aviation : Implications for climate change », Global Environmental Change, novembre 2020

2. Trajets en avion : régional, court, moyen, long-courrier ; domestique ou international

Les compagnies aériennes proposent une gamme variée de services aériens, organisés selon des critères géographiques et de distance. Ces services se déclinent principalement en trois catégories : le transport domestique, caractérisé par des opérations aériennes au sein des frontières nationales, le transport régional, qui vise à connecter des passagers de petites et moyennes agglomérations à des hubs aéroportuaires majeurs dans un rayon de 100 à 400 kilomètres, et le transport international, qui établit des liaisons entre différents pays, voire continents.

La classification des vols en court, moyen et long-courrier est sujette à des variations, en l'absence de critères standardisés. En général, les vols court-courriers couvrent des distances n'excédant pas 500 kilomètres, les vols moyen-courriers s'étendent entre 500 et 5 000 kilomètres et les vols long-courriers excèdent cette distance. La définition précise de ces catégories peut varier selon les compagnies aériennes et les types d'appareils. Le record mondial du plus long vol commercial est détenu depuis le 15 mai 2020 par la compagnie aérienne française French Bee reliant Papeete à Paris sans escale sur 16 129 kilomètres en 16 heures et 45 minutes. La liaison directe envisagée entre Londres et Sydney, couvrant une distance de 18 000 kilomètres en environ 20 heures, illustre la capacité d'extension des opérations aériennes long-courrier.

Au niveau mondial, les vols commerciaux se répartissent entre un tiers de vols domestiques et deux tiers de vols internationaux. En France métropolitaine, les vols internationaux représentent le segment le plus dynamique : 74 % du trafic passager est international, mais seulement 38 % s'effectue en dehors de la zone Schengen.

Source : Union des Aéroports Français (UAF), 2022

Les aéroports de Paris (Paris-Charles de Gaulle et Paris-Orly) accueillent respectivement 57 millions et 29 millions de passagers par an. Ils représentent 53 % du trafic de passagers en France métropolitaine. 34 % de ce trafic s'effectue vers ou depuis des destinations situées en dehors de la zone Schengen.

Les grands aéroports régionaux reçoivent plus de 5 millions de passagers chaque année. Il s'agit des aéroports Bâle-Mulhouse, Bordeaux-Mérignac, Lyon-Saint-Exupéry, Marseille-Provence, Nantes-Atlantique, Nice-Côte d'Azur et Toulouse-Blagnac. D'autres aéroports régionaux accueillent annuellement entre 1 et 5 millions de passagers : Paris-Beauvais, Lille-Lesquin, Montpellier, Ajaccio-Napoléon Bonaparte et Bastia-Poretta. Enfin, des aéroports de proximité accueillent entre 100 000 et 1 million de passagers : Biarritz, Strasbourg, Brest, Rennes, etc.

Plus les aéroports sont petits, plus le trafic domestique est important. Il représente 54,6 % du trafic pour les aéroports de proximité, 51,6 % pour les aéroports régionaux et 35,1 % pour les grands aéroports régionaux. Les lignes domestiques françaises les plus utilisées sont : Paris-Toulouse (3,2 millions de passagers par an), Paris-Nice (idem), Paris-Marseille (1,6 million), Paris-Bordeaux (1,2 million).

3. Les différents types de voyageurs : des inégalités d'usage

Par rapport au transport ferroviaire ou routier, l'avion est un moyen de transport peu démocratisé : 40 % des Français n'ont jamais pris l'avion6(*) (environ 80 % des personnes au niveau mondial), alors que 36 % le prennent au moins une fois par an7(*). En France, en 2017, le secteur aérien représentait seulement 0,1 % des trajets, 1 % du temps de transport et 16 % des kilomètres parcourus, en incluant les voyages à l'étranger 8(*).

Source : Pouvoir voler en 2050, The Shift Project, 2021

Part de la population prenant l'avion au moins une fois par an en fonction du niveau de revenus9(*)

 

Population

Population qui vole au moins une fois dans l'année a

Nombre de passagers b

 

(en millions)

(en millions)

(en % de la population)

(en millions)

(en % de la population)

Très faibles revenus

705

5

0,7 %

23

3%

Faibles revenus

3023

91

3 %

454

15%

Revenus élevés

2656

266

10 %

1313

49%

Revenus très élevés

1210

484

40 %

2442

202%

Ensemble

7594

845

11 %

4233

56%

(a) un individu qui prend 2 fois l'avion dans l'année compte pour 1
(b) un individu qui prend 2 fois l'avion dans l'année compte pour 2

Source : S. Gössling et A. Humpe, « The global scale, distribution and growth of aviation : Implications for climate change », Global Environmental Change, novembre 2020

4. Évolution du trafic de passagers et du fret

En 2019, 180 millions de passagers ont voyagé sur 1,57 million de vols domestiques et internationaux au départ de la France, ce qui représente une multiplication par cinq du nombre de passagers par rapport à 1980, principalement du fait de l'augmentation des vols internationaux.

Cette croissance est similaire au niveau mondial : le nombre de passagers a été multiplié par huit, passant de 310 millions à 4,5 milliards entre 1970 et 2019. L'évolution a été rapide : de 5 à 6 % par an entre 2012 et 2019, avec une croissance plus forte dans les pays émergents (Asie du Sud et du Sud-Est, Émirats Arabes Unis).

Concernant le fret, en 2019, 2,2 millions de tonnes de marchandises ont été transportées en 55 900 mouvements au départ de la France, et 57,6 millions de tonnes au niveau mondial. Le fret a connu un essor important depuis une cinquantaine d'années : le trafic de marchandises (la masse transportée multipliée par la distance parcourue, en tonnes.kilomètres) a été multiplié par 14 entre 1970 et 2019, passant de 15,5 millions de t.km à 221 millions de t.km.

Source : UAF 2022 (unité = tonnes.km ; « M » = « millions »)

La crise de la Covid-19 a conduit à une baisse de 60 % du trafic de passagers entre 2019 et 2020, entraînant des pertes économiques historiques pour les compagnies aériennes et les aéroports ainsi que, dans une moindre mesure, pour les constructeurs aéronautiques. Le niveau de trafic de 2019 n'a été à nouveau atteint que trois ans plus tard, en mai 2023. Ainsi, l'indicateur de redressement du trafic aérien en France atteint le taux de 99,6 % en référence à 2019 et le trafic international représente 101,6 % de celui de mai 2019. En 2022, la demande de fret aérien avait quasiment retrouvé son niveau de 2019, mais l'Association du transport aérien international (IATA)10(*) tablait sur une baisse de volume de 5,6 % à l'échelle mondiale en 2023, principalement liée à la baisse des crédits des transporteurs.

D'après les projections du Groupe d'action du transport aérien (ATAG)11(*), la croissance globale du trafic de passagers devrait se poursuivre à un rythme annuel moyen de 3,1 % sur la période 2021-2025. Elle devrait être plus forte en Asie-Pacifique et au Moyen Orient qu'en Europe et en Amérique du Nord.

Source : ATAG 2021

Source : ATAG 2021

5. Le secteur aéronautique, atout majeur pour la France

À l'échelle mondiale, le transport aérien permet le développement des échanges économiques, le tourisme international et des liaisons entre territoires irréalisables autrement.

La France occupe une place particulière dans l'écosystème aérien. Positionnée comme première destination touristique mondiale, avec environ 90 millions de visiteurs par an, elle abrite l'aéroport Paris-Charles de Gaulle, premier aéroport français et neuvième aéroport mondial en termes de passagers (76 millions par an). Cet aéroport est le hub de deux sociétés internationales de transport de marchandises de premier plan : Fedex et DHL, ainsi que de la compagnie Air France. Dans le secteur de l'industrie, l'avionneur Airbus fournit 50 % des avions de ligne mondiaux et le motoriste Safran produit 70 % des moteurs d'avions court- et moyen-courriers.

En France, le transport aérien a joué un rôle prépondérant dans le désenclavement des territoires ultramarins, avec des vols entre l'Outre-mer et la métropole et des vols internes aux outre-mers comportant des communes insulaires. Dans un rapport du Sénat sur les Outre-Mer publié en 2009, le secteur aérien est qualifié d'essentiel pour le développement économique des territoires12(*). En 2019, un autre rapport du Sénat sur la contribution du transport aérien au désenclavement et à la cohésion des territoires considère l'avion comme un outil pertinent pour rejoindre Paris dès lors que le temps de trajet en train ou en voiture nécessite plus de quatre heures.

Par ailleurs, le secteur aérien représente une source d'emplois très importante ainsi qu'un levier de croissance pour l'économie nationale. Le chiffre d'affaires généré en 2018 par l'ensemble du secteur aérien en France s'élevait à 100 milliards d'euros, équivalent à 4,3 % du produit intérieur brut. En agrégeant emplois directs et indirects, ce secteur emploie 342 000 personnes13(*). Il représente 7 % de l'activité industrielle française14(*) et se place au deuxième rang mondial, juste derrière les États-Unis et devant la Chine, avec un chiffre d'affaires de 58 milliards d'euros en 201815(*).

Le transport aérien et les activités aéroportuaires comptaient 85 000 emplois directs en France en 202216(*). Les aéroports ont de nombreux impacts immédiats sur le développement des territoires, en termes d'emploi, de commande locale de biens et de services ou encore de fiscalité, par leurs activités propres (gestion, maintenance, sécurité, commerces, etc.) et les activités directement liées (maintenance aéronautique, chaînes logistiques, tourisme, etc.).

Enfin, transport aérien et développement économique s'influencent mutuellement de manière positive, le premier permettant le déplacement des salariés, des clients et des touristes et le second l'implantation des infrastructures. En outre, l'accroissement des capacités aéroportuaires rétroagit sur l'emploi : on estime qu'un million de passagers annuels ou cent mille tonnes de fret supplémentaires créent plus de trois mille emplois directs et indirects17(*).


* 4 La mobilité locale et longue distance des Français - Enquête nationale sur la mobilité des personnes en 2019, Service des données et études statistiques (SDES), avril 2023.

* 5 Yearbook 2021, European Business Aviation Association (EBAA).

* 6 Pouvoir voler en 2050  : quelle aviation dans un monde contraint ?, The Shift Project, 3 mars 2021

* 7 Elite Status : Global inequalities in flying, Possible, mars 2021

* 8 Elaboration de scénarios de transition écologique du secteur aérien, ADEME, septembre 2022.

* 9 S. Gössling et A. Humpe, « The global scale, distribution and growth of aviation : Implications for climate change », Global Environmental Change, novembre 2020

* 10 L'IATA, en anglais International Air Transport Association, est l'organisation professionnelle mondiale des compagnies aériennes.

* 11 L'ATAG, en anglais Air Transport Action Group, est un groupe d'experts de l'industrie aéronautique, qui réfléchissent aux problèmes de développement durable dans ce secteur.

* 12 Rapport d'information n° 519, déposé le 7 juillet 2009, Les DOM, défi pour la République, chance pour la France, 100 propositions pour fonder l'avenir, S. Larcher et E. Doligé

* 13 Élaboration de scénarios de transition écologique du secteur aérien, ADEME, septembre 2022

* 14 Les chiffres clés de l'industrie manufacturière en bref, BPI France, 22 novembre 2018

* 15 Plan de soutien à l'aéronautique, 9 juin 2020

* 16 Rapport d'activité 2023-2024, Fédération nationale de l'aviation et des métiers (FNAM)

* 17 Les-aeroports-au-coeur-de-la-competitivite-des-territoires, ESSEC - Union Nationale des Services Publics Industriels et Commerciaux (UNSPIC), janvier 2023

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