3. Les nouvelles responsabilités des collectivités territoriales
L'action extérieure des collectivités territoriales en faveur de l'aide au développement a connu un essor considérable au cours de la dernière décennie : ainsi, la part de l'Etat dévolue au cofinancement des collectivités s'élevait en 1986 à 5 millions de francs pour une cinquantaine de projets de coopération décentralisée ; elle représentait en 1998 56 millions de francs pour quelque 250 projets d'un montant total d'environ 193 millions de francs. Alors même que le développement urbain et la mise en place d'institutions locales démocratiques représentent deux priorités majeures pour nos partenaires, l'expérience des communes, départements ou régions se révèle particulièrement précieuse pour notre politique de coopération.
La place désormais reconnue à la coopération décentralisée appelle toutefois une double observation :
- D'abord, le foisonnement des initiatives mérite sans doute d'être mieux ordonné . Il incombe aux collectivités de chercher les voies et moyens d'agir de manière complémentaire et non redondante. L' échange d'information apparaît à cet égard un préalable. La Commission nationale de la coopération décentralisée 9 ( * ) a été chargée d'établir un tableau de la coopération décentralisée qui recense les opérations par types de collectivités, par pays ou domaines d'intervention. Aux yeux de vos rapporteurs, cet instrument pourrait être utilement complété par un réseau informatique permettant une connaissance actualisée des différents projets envisagés et mis en oeuvre par les collectivités.
- En second lieu, il importe que l'Etat, sous l'effet de la contrainte budgétaire, ne se défausse pas sur les collectivités de ses responsabilités en matière d'aide au développement. La recherche, nécessaire, des synergies ne doit pas se traduire par un transfert de charges. C'est pourquoi la part dévolue par l'Etat aux cofinancements, qu'il convient d'accroître, ne doit pas être financée sur la base de redéploiements de crédits au sein du budget de la coopération mais sur des ressources complémentaires.
4. La nécessité d'une reconnaissance plus affirmée du rôle crucial du secteur privé.
On ne doit jamais l'oublier, l'initiative privée constitue l'un des principaux facteurs de développement . Les investissements de nos entreprises contribuent à la création de richesses, d'emplois, à l'amélioration des conditions de vie et à l'émergence d'une classe moyenne. En outre, la présence des sociétés françaises peut contribuer à diffuser un modèle d'organisation -souci de la rentabilité, respect du droit du travail, de la fiscalité, etc- au sein de la société dans son ensemble et en tout cas agir comme un aiguillon pour une adaptation du cade juridique national. Il n'est pas inutile de le rappeler, quelque 1 300 filiales de sociétés françaises sont établies en Afrique (soit près de 65 % de l'ensemble des entreprises du continent).
Compte tenu de son rôle, le secteur privé s'impose ainsi comme un interlocuteur essentiel de la politique de coopération. Or, les responsables d'entreprises rencontrés par vos rapporteurs ont regretté l'insuffisance de dialogue et l' absence d'instances de concertation avec les représentants du secteur privé. De ce point de vue, la France leur apparaît même en retrait de l'Union européenne. Même si certains progrès ont été accomplis -ainsi le secteur privé a été associé à la Commission mixte franco-malgache chargée de définir en 2000 les grandes orientations de notre coopération avec ce pays- il reste en effet beaucoup à faire pour rapprocher l'administration et les entreprises privées. Du reste, au sein même des ambassades, les relations entre les services de coopération et les postes d'expansion économique apparaissent souvent trop distendues.
Par ailleurs, s'il appartient aux pays en développement de mettre en place un cadre institutionnel et juridique stable, indispensable à la confiance des acteurs économiques, il revient à notre pays d'apporter à nos ressortissants qui prennent le risque de s'expatrier et de parier sur des zones souvent instables certaines garanties . Or, les autorités n'ont pas toujours assumé leurs responsabilités en refusant notamment toute indemnisation pour nos compatriotes victimes d'événements dans lesquels ils n'ont aucune part et qui peuvent laisser certains d'entre eux ruinés.
* 9 La Commission nationale de la coopération décentralisée (CNCD) rassemble à parité élus représentants des collectivités territoriales et représentants de l'Etat.