CHAPITRE V
DISPOSITIONS RELATIVES À
L'ENTRAIDE JUDICIAIRE
INTERNATIONALE
Article 21
(Articles 694, 695 et 696 nouveaux du code de
procédure pénale)
Entraide judiciaire
internationale
Cet
article tend à insérer un nouveau titre consacré à
l'entraide judiciaire internationale dans le livre quatrième du code de
procédure pénale, qui porte sur les procédures
particulières. Ce titre serait composé de trois articles.
• Le texte proposé pour l'
article 694
du code
de procédure pénale tend à prévoir que les demandes
d'entraide émanant des juridictions étrangères sont
exécutées, selon les cas, dans les formes prévues par le
code de procédure pénale pour l'enquête, l'instruction ou
le jugement. Il n'existe actuellement aucune disposition particulière
dans le code de procédure pénale en cette matière.
L'objectif de cette disposition est de faire en sorte que certains actes
puissent être accomplis en France à la demande d'autorités
étrangères en respectant le stade de la procédure
où se trouve l'affaire dans le pays étranger. D'après les
informations recueillies par votre rapporteur auprès de la Chancellerie,
il semble que la France reçoive depuis quelque temps des demandes visant
à l'interrogatoire d'un témoin, alors que l'affaire se trouve
déjà à la phase du jugement dans le pays demandeur
d'entraide. Il convient donc que l'interrogatoire puisse avoir lieu dans les
formes prévues pour le jugement. Rien ne l'interdit actuellement, mais
cette possibilité n'est pas utilisée.
Le texte proposé pour
l'
article 695
du code de
procédure pénale donne compétence au
procureur
général
du ressort pour transmettre les demandes d'entraide
auprès des autorités judiciaires compétentes et assurer le
retour des pièces d'exécution pour l'application de
l'article 53 de la convention d'application de l'accord de Schengen.
Article
53
de la convention d'application de l'accord de Schengen
signée
le 19 juin 1990
1. Les
demandes d'entraide judiciaire peuvent être faites directement entre les
autorités judiciaires et renvoyées par la même voie.
2. Le paragraphe 1 ne porte pas préjudice à la faculté de
l'envoi et du renvoi des demandes de ministère de la justice à
ministère de la justice ou par l'intermédiaire des bureaux
centraux nationaux de l'organisation internationale de police criminelle.
3. Les demandes de transfèrement temporaire ou de transit de personnes
qui sont en état d'arrestation provisoire ou de détention ou qui
sont l'objet d'une mesure privative de liberté, et l'échange
périodique ou occasionnel de données relatives au casier
judiciaire doivent se faire par l'intermédiaire des ministères de
la justice.
4. Au sens de la convention européenne d'entraide judiciaire en
matière pénale du 20 avril 1959, on entend par le
ministère de la justice, pour la république
fédérale d'Allemagne, le ministre fédéral de la
justice et les ministres ou sénateurs de la justice des Etats
fédérés.
5. Les dénonciations aux fins de poursuites pour des infractions
à la législation relative au temps de conduite et de repos,
effectuées conformément à l'article 21 de la
Convention européenne d'entraide judiciaire en matière
pénale du 20 avril 1959 ou à l'article 42 du
Traité Benelux d'extradition et d'entraide judiciaire en matière
pénale du 27 juin 1962 tel qu'il est modifié par le
Protocole du 11 mai 1974, peuvent être adressées par les
autorités judiciaires de la partie contractante requérante
directement aux autorités judiciaire de la partie contractante requise.
Actuellement, les demandes passent par le ministère de la justice, ce
qui alourdit la procédure à un moment où les demandes
d'entraide sont de plus en plus nombreuses.
Dans son rapport remis au Président de la République en juillet
1997, la commission de réflexion sur la justice a
considéré "
que la transmission directe des demandes
d'enquêtes d'autorité judiciaire à autorité
judicaire constituerait un progrès important dans le fonctionnement de
l'entraide judiciaire internationale notamment dans le cadre de
l'Europe
"
13(
*
)
.
Votre commission vous soumet un
amendement
rédactionnel.
• Le texte proposé pour
l'
article 696
du code
de procédure pénale tend également à confier au
procureur général du ressort certaines compétences pour
l'application de l'article 15 § 2 de la convention
européenne d'entraide judiciaire en matière pénale de
1959, dans les relations entre les autorités judiciaires
françaises et les autres Etats parties à la convention
d'application de l'accord de Schengen.
L'article 15 de la Convention européenne d'entraide judiciaire en
matière pénale, signée à Strasbourg le
20 avril 1959, prévoit dans son premier paragraphe que les
commissions rogatoires prévues par la Convention et les demandes de
transfert d'une personne détenue sont adressées par le
ministère de la justice de la partie requérante au
ministère de la justice de la partie requise. Le deuxième
paragraphe de cet article stipule qu'en cas d'urgence, les commissions
rogatoires peuvent être adressées directement "
par les
autorités judiciaires de la partie requérante aux
autorités judiciaires de la partie requise
". L'attribution par
le projet de loi de compétences au procureur général du
ressort en matière de demandes d'entraide précise utilement ce
dispositif et devrait accélérer les procédures et
faciliter la coopération judiciaire.
En mars dernier, en réponse à une question écrite de notre
collègue Emmanuel Hamel, Madame le Garde des Sceaux indiquait :
"
le projet de convention relative à l'entraide judiciaire en
matière pénale, actuellement en cours de négociation au
sein de l'Union européenne, retient que les demandes d'entraide seront
faites directement entre autorités judiciaires, sans condition
d'urgence, et surtout qu'il y sera répondu par la même
voie ".
Elle ajoutait
" les intérêts essentiels
de la France continueront à être préservés, dans la
mesure où le projet de convention considéré ne remet pas
en cause la faculté actuellement reconnue aux Etats parties de refuser
d'exécuter une demande d'entraide judiciaire lorsque son
exécution est de nature à porter atteinte notamment à la
souveraineté, à la sécurité ou à l'ordre
public de l'Etat requis "
14(
*
)
.
Sous la même réserve et à condition de ne pas en abuser,
votre rapporteur ne peut qu'approuver ces mesures destinées à
améliorer la coopération judiciaire, tout en constatant que cette
question mérite une réflexion d'ampleur et que
l'internationalisation du crime organisé nécessite une
réponse faite dans le cadre européen.
Votre rapporteur estime en effet indispensable d'envisager la création
d'un véritable espace judiciaire européen afin de lutter
efficacement contre certains formes de criminalité. Il souhaite rappeler
les propositions qu'il a formulées en 1997 dans un rapport adopté
par la délégation du Sénat pour l'Union
européenne : "
Face au danger commun grandissant,
l'instauration d'un commandement unique n'est pas moins nécessaire en ce
domaine qu'elle le fut au temps des conflits armés. A la
communautarisation du crime peut seule répondre la communautarisation de
la répression
.
"
A partir du moment où les nations européennes ont
décidé de s'unir, l'unité des règles de droit, de
la jurisprudence et de l'organisation judiciaire, dans les domaines où
le principe de subsidiarité entendu positivement le justifie, n'est-elle
pas la réponse la plus naturelle en même temps que la seule
efficace des " Etats de droit ?
"
15(
*
)
.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
ainsi modifié.