SECTION 2
Dispositions concernant le déroulement de l'instruction
Article 9
(Article 80 du code de procédure
pénale)
Faits nouveaux en cours
d'instruction
L'article 9 a pour objet de modifier l'article 80 du
code
de procédure pénale, qui porte sur les liens entre le juge
d'instruction et le procureur de la République. Cet article, dans sa
rédaction actuelle, précise tout d'abord que je juge
d'instruction ne peut informer qu'en vertu d'un réquisitoire du
procureur de la République. Il précise en outre que lorsque des
faits, non visés aux réquisitoires, sont portés à
la connaissance du juge d'instruction, celui-ci doit immédiatement
communiquer au procureur de la République les plaintes ou les
procès-verbaux qui les constatent.
Le premier paragraphe de l'article 9 tend à
indiquer
explicitement les possibilités qui s'offrent alors au procureur de la
République
, afin de clarifier l'article 80 du code de
procédure pénale. Il s'agit donc de préciser que le
procureur de la République peut "
soit requérir du juge
d'instruction , par réquisitoire supplétif, qu'il informe sur ces
nouveaux faits, soit requérir l'ouverture d'une information distincte,
soit saisir la juridiction de jugement, soit ordonner une enquête, soit
décider d'un classement sans suite ou de procéder à l'une
des mesures prévues aux articles 41-1 et 41-2 (
mesures
d'alternatives aux poursuites et de compensation judiciaire dont le projet de
loi propose la création
), soit transmettre les plaintes ou les
procès-verbaux au procureur de la République territorialement
compétent
".
La modification proposée a donc pour objet de codifier la pratique
actuelle, le procureur de la République pouvant d'ores et
déjà utiliser les différentes possibilités
mentionnées.
Cette énumération des possibilités offertes au procureur
serait complétée par la précision que s'il requiert
l'ouverture d'une information distincte, celle-ci peut être
confiée au même juge d'instruction. Une telle précision
peut paraître inutile ; elle n'est cependant pas neutre.
L'objectif recherché est manifestement d'inciter les procureurs
à recourir à la voie de l'ouverture d'une nouvelle information
distincte plutôt qu'à celle du réquisitoire
supplétif.
Comme l'indique l'exposé des motifs du projet de
loi, "
il est (...) utile d'éviter, autant que possible, la
délivrance de réquisitoires supplétifs, qui ont pour
conséquence de rendre plus complexe l'information déjà
ouverte, et risquent d'en retarder la date d'achèvement. Pour autant, il
peut être très opportun que ce soit le même juge qui
instruise sur les faits nouveaux, découverts à l'occasion d'une
procédure dont il était saisi
".
En définitive, la modification proposée tend à inscrire
dans le code de procédure pénale les possibilités qui
s'offrent au procureur lorsque des faits nouveaux sont découverts, tout
en marquant une préférence pour le recours à l'ouverte
d'une nouvelle information, le cas échéant confiée au
même juge d'instruction.
Le second paragraphe de l'article 9 a pour objet d'apporter certaines
précisions en ce qui concerne le régime applicable lorsque des
faits nouveaux sont dénoncés au juge d'instruction par la partie
civile en cours d'information. Actuellement, l'article 80 du code de
procédure pénale précise simplement : "
En
cas de plainte avec constitution de partie civile, il est procédé
comme il est dit à l'article 86
".
L'article 86 définit la procédure applicable en cas de
plainte avec constitution de partie civile. Il prévoit notamment que le
procureur de la République ne peut saisir le juge d'instruction de
réquisitions de non-informer que si, "
pour ces causes affectant
l'action publique elle-même, les faits ne peuvent légalement
comporter une poursuite ou si, à supposer ces faits
démontrés, ils ne peuvent admettre aucune qualification
pénale
".
En l'absence de précision sur ce point, la Cour de cassation
considère que lorsque des faits nouveaux sont dénoncés au
juge d'instruction par la partie civile en cours d'information, la saisine du
juge est automatiquement étendue à ces faits nouveaux
. Elle a
ainsi estimé dans un arrêt du 4 juin 1996 que "
les
juridictions d'instruction doivent statuer sur tous les chefs d'inculpation
régulièrement dénoncés par la partie civile,
même en l'absence de réquisitoire supplétif du procureur de
la République
"
9(
*
)
.
Une telle situation conduit en quelque sorte les parties civiles à
pouvoir
délivrer elles-mêmes des réquisitoires
supplétifs
, ce qui paraît très contestable et peut
rendre difficile l'achèvement d'une procédure
d'instruction ; tel est d'ailleurs bien souvent l'objectif
recherché.
Comme l'indique l'étude d'impact jointe au projet de loi "
la
solution actuelle (...) a le plus souvent pour conséquence dommageable
de différer le règlement d'une instance civile (par exemple une
instance prud'homale). Il n'est pas rare en effet que la constitution de partie
civile ait pour seul objectif de retarder l'achèvement d'une
procédure contentieuse (par exemple, une employeur accuse faussement de
vol un employé qu'il a licencié, et qui demande réparation
aux prud'hommes, puis voyant que l'instruction va se terminer par un non-lieu,
signale d'autres infractions, tout aussi imaginaires, au juge
d'instruction)
".
L'article 9 du projet de loi tend donc à prévoir que la
même procédure sera applicable en cas de dénonciation de
faits nouveaux, que cette dénonciation soit le fait de la partie civile
ou non.
Le juge d'instruction devra communiquer le dossier au parquet et le
procureur appréciera la suite à donner à ces
éléments
. Si la partie civile n'est pas satisfaite de la
décision prise, elle pourra déposer une seconde plainte avec
constitution de partie civile concernant ces nouveaux faits.
Votre commission vous soumet un
amendement
de coordination et vous
propose d'adopter cet article
ainsi modifié
.