II. QUELLES SONT LES RÉPONSES DE LA FRANCE ET DE L'UNION EUROPÉENNE ?

Trois ans après la reprise de Kaboul par les talibans, la communauté internationale a condamné fermement les mesures « d'invisibilisation » des femmes afghanes.

Mais, tout comme l'ONU, les États sont partagés entre la volonté de conforter une politique ancienne de sanctions contre les talibans et celle de mettre en place un processus de dialogue politique avec eux, du fait des enjeux de lutte contre le terrorisme, de contrôle des flux migratoires et d'acheminement de l'aide humanitaire.

A. UNE CONDAMNATION DU SORT RÉSERVÉ AUX FEMMES PAR LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE

De fait, la politique des talibans bafoue volontairement les droits de l'Homme : exécutions extrajudiciaires, torture, châtiments corporels publics, entreprise « d'invisibilisation » systématique des femmes afghanes.

Dès septembre 2021, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe demandait aux talibans de « mettre fin à la violence », et de respecter les « avancées culturelles, sociales et juridiques réalisées ces vingt dernières années dans le domaine des droits humains et des libertés individuelles (...) ; notamment en ce qui concerne l'accès des filles à l'éducation, la liberté de circulation des femmes et leur accès au travail, aux soins et aux sports, et la représentation et la participation active des femmes (...) dans tous les domaines de la vie publique et politique. »19(*)

L'ONU, qui est présente sur place avec sa mission d'assistance à l'Afghanistan (MANUA), a mis l'Afghanistan « sous surveillance » depuis trois ans par ses diverses instances (rapporteur en charge des droits de l'Homme ; Haut-commissariat aux réfugiés ; ONUfemmes...).

Dans son rapport d'inspection de juillet 2022, la mission onusienne s'inquiétait de « l'impunité avec laquelle les membres des autorités de facto semblent avoir commis des violations des droits humains » et de « l'érosion » des droits fondamentaux des femmes.

Un an plus tard, elle exhortait les talibans à cesser de faire usage de la torture et à faire en sorte que les auteurs de ces actes rendent des comptes.

Enfin, le 9 septembre 2024, M. Volker Türk, haut-commissaire aux droits de l'Homme de l'ONU exprimait sa « répugnance » à l'égard de la dernière loi « de promotion de la vertu et de répression du vice » afghane, considérant qu'elle représentait une « répression sans équivalent » des femmes dans le monde.

Cette préoccupation est partagée par la France, qui apparaît parmi les pays les moins conciliants avec les talibans. Le 15 août dernier, le porte-parole du ministère des affaires étrangères rappelait ainsi les « violations graves et répétées » des droits de l'Homme du régime taliban et son refus de mettre en oeuvre les obligations claires qui lui ont été fixées par les résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU, et condamnait en conséquence, « les violences intolérables des droits des femmes et des filles par les talibans » en soulignant qu'« aucun retour à la normale (ne serait) envisageable sans l'arrêt des violences et des menaces... ».

Quant à l'Union européenne, elle a condamné elle aussi, par la voix de son Haut représentant, M. Josep Borrell, les diverses étapes de « l'effacement » en cours des femmes afghanes, telles que la décision des talibans de priver plus d'un million de filles afghanes d'enseignement secondaire20(*) ou les restrictions limitant la participation des femmes à la vie publique21(*).

Le 26 août dernier, exprimant sa consternation, le Haut représentant a dénoncé l'adoption de la nouvelle loi imposant aux femmes de se couvrir intégralement en public et leur interdisant de faire entendre leur voix, en ce qu'elle prive « effectivement les Afghanes de leur droit fondamental à la liberté d'expression ».

Pour l'Union européenne, qui « continue de se tenir aux côtés des femmes et des filles d'Afghanistan, ainsi que de tous ceux et toutes celles qui, en Afghanistan, sont menacés par les talibans », le régime taliban doit instamment « mettre un terme à ces abus systématiques et systémiques à l'encontre des femmes et des filles afghanes. »22(*)


* 19 Résolution 2403 « La situation en Afghanistan : conséquences pour l'Europe et la région », 30 septembre 2021.

* 20 Déclaration du 28 mars 2022.

* 21 Déclaration du 25 décembre 2022.

* 22 Déclaration du 26 août 2024.

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