M. Alain Richard, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à transposer aux visites domiciliaires fiscales les dispositions que nous venons d’examiner pour les visites domiciliaires douanières.
L’objectif reste d’assurer un équilibre entre le droit d’intervention des services de douane et leur capacité à pénétrer de manière très intrusive dans les documents et dans les lieux privés, d’une part, et la nécessité d’un encadrement judiciaire minimal, de l’autre.
Mme la présidente. L’amendement n° 76, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Alinéa 16, troisième phrase
Après le mot :
saisies
insérer les mots :
, à l’issue de ce téléchargement,
La parole est à M. le rapporteur.
Mme la présidente. L’amendement n° 69, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Au premier alinéa de l’article 1735 quater du code général des impôts, les mots : « au 4 bis » sont remplacés par les mots : « aux 4 et 4 bis ».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur les autres amendements en discussion commune.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur. L’amendement n° 69 est un amendement de coordination.
Je souscris aux propos d’Alain Richard concernant l’article 64 du code des douanes : sa version actuelle, avant l’examen par le Sénat, est longue et comporte de très nombreux alinéas. Il aurait mérité d’être réécrit, pour une meilleure lisibilité. Je rejoins donc le rapporteur pour avis de la commission des lois : cet article pourrait être mieux ordonné.
En revanche, les dispositions de l’amendement n° 49 rectifié vont au-delà de cette préoccupation : elles modifient les dispositions relatives à la visite domiciliaire en cas de flagrant délit.
Cette modification ne risque-t-elle pas d’alourdir excessivement la procédure, voire d’entraver l’action des douaniers ? Sur cette question opérationnelle, je sollicite l’avis du Gouvernement, qui possède sans doute une expérience pratique plus approfondie sur le déroulement des opérations douanières, en particulier les visites domiciliaires.
L’amendement n° 50 rectifié bis, quant à lui, tend à réécrire l’article L. 38 du livre des procédures fiscales, relatif aux visites domiciliaires des douaniers en matière fiscale.
Son adoption, à mon sens, remettrait en cause de manière significative les prérogatives des douanes dans leur travail de recherche d’infractions de nature fiscale, concernant notamment les contributions indirectes, qui relèvent de leurs compétences. Mes réserves portent en particulier sur la question des systèmes de données à distance, les serveurs – les clouds.
Le Gouvernement pourra peut-être nous apporter plus de précisions sur le déroulement pratique de ces visites domiciliaires.
Quoi qu’il en soit, je sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, mon avis serait défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Le sujet que nous abordons revêt une importance certaine, justifiant que nous prenions un moment pour en débattre.
Notre objectif commun est de répondre aux exigences du Conseil constitutionnel pour assurer la conformité de notre texte à la Constitution, tout en garantissant l’efficacité opérationnelle de nos douaniers, qui sont souvent appelés à agir en urgence et avec la plus grande efficacité possible. Pour autant, les débats sont légitimes.
Permettez-moi d’annoncer d’emblée mes avis sur les amendements en question, en précisant bien qu’ils ne reflètent pas une évolution de ma position politique et sont fondés seulement sur le contenu des dispositions proposées (Sourires.) : je suis favorable aux amendements déposés par Albéric de Montgolfier, mais défavorable à ceux d’Alain Richard.
En effet, l’amendement n° 49 rectifié vise à réécrire entièrement le dispositif. Indépendamment du sujet sur lequel je vais revenir, à savoir l’information du procureur de la République, je considère que certains aspects de cette réécriture – clarification accrue et création de subdivisions – sont utiles. Il serait profitable de les reprendre dans le cadre de la recodification que nous envisageons.
Cependant, cet amendement tend à prévoir que les visites domiciliaires à la suite d’un flagrant délit ne puissent être conduites qu’après information du procureur de la République, qui peut s’y opposer.
À mon sens, il s’agit là d’une évolution lourde, source de risques opérationnels pour les opérations douanières. La réécriture complète du texte suscite une forme d’insécurité si l’on ne vérifie pas immédiatement ses implications.
Rappelons que le flagrant délit, qu’il soit douanier ou non, requiert une action en urgence que l’adoption de cet amendement risque de fragiliser : l’information du procureur nécessite un délai pour lui permettre de s’y opposer.
À mon sens, une telle procédure est incompatible avec les situations concernées, dans lesquelles la rapidité d’action pour collecter les informations nécessaires à la caractérisation des faits est cruciale.
Cette obligation d’information en flagrance pourrait être une source d’encombrement inutile pour les services de traitement en temps réel des parquets. Ceux-ci recevront des appels ou des courriels pour les informer de cette visite domiciliaire, alors même qu’une mesure restrictive de liberté ne sera pas en cours et que la procédure douanière ne sera pas suffisamment avancée, dans de nombreux cas, pour caractériser une infraction justifiant l’ouverture d’une enquête pénale.
En outre, cette évolution n’est pas juridiquement nécessaire. La proportionnalité de la procédure n’est pas mise en péril, dès lors que l’article 64 du code des douanes dispose déjà qu’un officier de police judiciaire doit être présent ; que ladite procédure ne s’applique qu’à des délits douaniers passibles d’au moins trois ans d’emprisonnement ; que celle-ci ne peut être mise en œuvre que le jour même, ou le lendemain si le flagrant délit est commis après vingt et une heures ; enfin, que le principe du contradictoire – c’est-à-dire la présence de la personne concernée ou de deux témoins – est respecté.
Par conséquent, une telle évolution constituerait un frein opérationnel.
La pratique actuelle satisfait en outre largement les besoins d’encadrement : compte tenu des investigations à mener après la constatation d’un flagrant délit, les agents des douanes placent le plus souvent les infracteurs en retenue douanière, ce qui implique nécessairement l’information du procureur de la République dès le début de la mesure, par tout moyen.
Cet amendement tend donc à introduire un risque opérationnel, alors même que les préoccupations qui ont présidé à son dépôt me semblent déjà satisfaites par les dispositions actuelles.
Cette proposition aboutirait à un régime plus contraignant que celui de la procédure pénale ; l’introduction d’une information préalable du procureur de la République avant le déclenchement de la visite reviendrait en effet à introduire des garanties supérieures à celles qui existent dans le code de procédure pénale.
Nous avons eu de nombreux débats sur ce sujet, et vous êtes en désaccord avec ce point de vue, je le sais. Il n’en reste pas moins que les perquisitions effectuées pendant l’enquête de flagrance ne sont soumises à aucune information préalable du procureur.
De surcroît, la mise en place de cette procédure serait très complexe pour les agents des douanes. La visite domiciliaire en flagrance fait partie des prérogatives de contrôle auxquelles ceux-ci sont très attachés, en raison de son efficacité opérationnelle. Ils ne comprendraient pas qu’elle subisse une évolution restrictive et ils s’inquiètent déjà de la rédaction du droit de visite à la suite de l’examen parlementaire de ce texte.
Il m’a donc semblé important de préciser tous ces points.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Alain Richard, rapporteur pour avis. Il est utile de poursuivre cette discussion : nous légiférons à la suite d’une déclaration d’inconstitutionnalité relative à l’insuffisance de l’encadrement des capacités d’enquête et des mesures coercitives de la douane.
Monsieur le ministre, il semble discutable de considérer que la proposition formulée dans cet amendement par la commission des lois, tendant à imposer que le procureur soit avisé et puisse s’opposer à tout moment à la procédure, serait excessive comparativement à la procédure pénale.
En effet, le code de procédure pénale prévoit que le procureur contrôle l’ensemble des actes d’enquête et d’instruction menés par les officiers de police judiciaire, y compris la perquisition. Ainsi, en droit général, celle-ci est bel et bien soumise à l’autorisation et au contrôle du procureur.
Il serait à mon sens imprudent de laisser passer ce texte sans corriger le risque constitutionnel lié au droit de perquisition douanier. Il me paraît donc préférable de conserver une disposition permettant au procureur d’être informé des infractions poursuivies.
Monsieur le ministre, vous avez vous-même souligné que cela ne pouvait s’appliquer que dans le cadre d’infractions punissables d’au moins trois ans de prison. Il ne s’agit donc pas de dispositions banales !
Dès lors, il semble logique que le procureur exerce un contrôle minimal d’opportunité sur ces perquisitions, qui sont des mesures très intrusives dans la vie privée.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur. Nous sommes partagés entre deux positions : j’entends bien les problèmes que soulève Alain Richard, mais l’aspect opérationnel me préoccupe.
La saisie de marchandises, par exemple, est une opération courante ; la nécessité d’impliquer le procureur à chaque saisie pourrait entraver le travail des douanes.
La présence d’un officier de police judiciaire (OPJ) dans le cadre des douanes apporte déjà une première garantie ; lorsque l’on en vient à d’autres procédures, le procureur est informé par tous moyens.
Je ne souhaite donc pas qu’un changement révolutionnaire soit mis en œuvre, même si je n’en mesure pas bien le risque à ce stade. Je suis donc plus enclin à maintenir mon avis défavorable, suivant ainsi le Gouvernement. Mais M. le ministre pourrait sans doute nous apporter des précisions supplémentaires.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Pour répondre à M. Richard, ces sujets sont en effet importants, et il nous revient donc d’éclairer la décision du Sénat.
Dans le code de procédure pénale, il est spécifié que les perquisitions en flagrance sont placées sous le contrôle du procureur. Cela signifie non pas que celui-ci en est préalablement informé, mais qu’un officier de police judiciaire est présent durant l’opération et rend compte ensuite à la justice.
C’est également ce que prévoit le code des douanes : un officier judiciaire est présent, apportant les mêmes garanties, et rend des comptes au procureur et à la justice par la suite.
Mme la présidente. Monsieur le rapporteur pour avis, l’amendement n° 50 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Alain Richard, rapporteur pour avis. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 50 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 76.
(L’amendement est adopté.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Vincent Delahaye.)
PRÉSIDENCE DE M. Vincent Delahaye
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
11
Modification de l’ordre du jour
M. le président. Mes chers collègues, par lettre en date de ce jour, le Gouvernement demande l’inscription à l’ordre du jour du mercredi 7 juin, après la séance de questions d’actualité au Gouvernement, sous réserve de sa transmission, de la proposition de loi maintenant provisoirement un dispositif de plafonnement de revalorisation de la variation annuelle des indices locatifs.
Acte est donné de cette demande.
La commission des affaires économiques se réunira le mardi 6 juin, à neuf heures trente, pour l’examen du texte et du rapport.
Le délai limite pour le dépôt des amendements de séance serait fixé au mercredi 7 juin, à onze heures, et le délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale, au mardi 6 juin, à quinze heures.
Y a-t-il des observations ?…
Il en est ainsi décidé.
12
Douane
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. Nous reprenons l’examen du projet de loi visant à donner à la douane les moyens de faire face aux nouvelles menaces.
Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre Ier du titre II, à un amendement tendant à insérer un article additionnel après l’article 10.
TITRE II (suite)
MODERNISER LE CADRE D’EXERCICE DES POUVOIRS DOUANIERS
Chapitre Ier (suite)
Moderniser les capacités d’enquête
Après l’article 10
M. le président. L’amendement n° 40 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Capus et Malhuret, Mme Mélot et MM. Lagourgue, A. Marc, Chasseing, Grand et Guerriau, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre III du titre II du code des douanes est complété par un article 59… ainsi rédigé :
« Art. 59 … – Les agents des douanes et les agents placés sous l’autorité du ministre chargé de l’industrie ou du ministre des armées, ayant pour mission la mise en œuvre de la Convention de Paris du 13 janvier 1993 sur l’interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l’emploi des armes chimiques et sur leur destruction, ainsi que les personnels des entités agissant pour leur compte, ou les assistant, peuvent se communiquer, spontanément ou sur demande, tous les renseignements ou documents détenus ou recueillis dans l’exercice de leurs missions respectives. »
La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.
Mme Vanina Paoli-Gagin. Cet amendement vise à permettre les échanges de données entre les agents des douanes de Bercy et les agents du ministère de la défense, et cela afin d’éviter la prolifération des armes chimiques.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur de la commission des finances. La menace par arme chimique n’est pas nouvelle. Il me semble que des échanges d’informations avec les services douaniers sont d’ores et déjà possibles – peut-être M. le ministre pourra-t-il nous le confirmer.
En ce qui concerne cet amendement, je m’en remets donc à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gabriel Attal, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics. Cet amendement est utile, car il est nécessaire de permettre un tel échange d’informations pour mieux lutter contre les armes chimiques et identifier les entreprises qui seraient défaillantes au regard de leurs obligations déclaratives en matière de produits chimiques.
L’introduction de cet article additionnel permettra l’information réciproque des services chargés du contrôle de la convention du 13 janvier 1993 sur l’interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l’emploi des armes chimiques et sur leur destruction, y compris des personnels des entités qui les assistent, et des services douaniers.
La rédaction proposée prévoit en effet une dérogation – pour ce motif dont chacun conviendra qu’il est particulièrement sensible – au secret professionnel auquel sont soumis les agents des douanes.
Le Gouvernement émet donc un avis favorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10.
Article 10 bis (nouveau)
L’article 343 bis du code des douanes est ainsi rédigé :
« Art. 343 bis. – L’autorité judiciaire communique à l’administration des douanes toute information qu’elle recueille, à l’occasion de toute procédure judiciaire, de nature à faire présumer une infraction commise en matière douanière ou une manœuvre quelconque ayant eu pour objet ou pour résultat de frauder ou de compromettre le recouvrement de droits ou taxes prévus au présent code. » – (Adopté.)
Chapitre II
Moderniser les capacités d’action de la douane
Article 11
I. – À titre expérimental et pour une durée de trois ans à dater de l’entrée en vigueur du décret mentionné au III, pour la seule finalité de prévention et de constatation des infractions de contrebande, d’importation ou d’exportation commises en bande organisée, prévues et réprimées par le dernier alinéa de l’article 414 du code des douanes, ainsi que la constatation, lorsqu’elles portent sur des fonds provenant de ces mêmes infractions, de la réalisation ou de la tentative de réalisation des opérations financières définies à l’article 415 du même code et afin de permettre le rassemblement des preuves de ces infractions et la recherche de leurs auteurs, l’administration des douanes et des droits indirects peut exploiter les données collectées au titre de l’article L. 233-1 du code de la sécurité intérieure au moyen d’un traitement de données à caractère personnel destiné exclusivement à détecter des mouvements de véhicules ou les événements prédéterminés susceptibles de révéler les infractions précitées.
Ce traitement est soumis aux dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.
Dans le cadre de l’expérimentation, et par dérogation à l’article L. 233-2 du code de la sécurité intérieure, les données collectées sont conservées durant un délai maximum de quatre mois, sous réserve de la nécessité de leur conservation pour les besoins d’une procédure pénale ou douanière. L’expérimentation porte sur plusieurs durées de conservation des données, comprises entre deux et quatre mois, et dont l’efficacité est évaluée et comparée dans les conditions prévues au II du présent article.
La mise en œuvre du traitement est réservée aux seuls agents des douanes affectés au sein d’un service spécialisé de renseignement, individuellement désignés et spécialement habilités par le ministre chargé des douanes.
Ce traitement exclut toute exploitation de la photographie des occupants des véhicules.
Il ne peut procéder à aucune consultation d’autres traitements de données à caractère personnel que ceux visés à l’article L. 233-2 du même code.
Il procède exclusivement à un signalement d’attention, strictement limité à la détection des mouvements de véhicules précités ou d’événements prédéterminés qu’il a été programmé à détecter. Il ne peut fonder, par lui-même, aucune décision individuelle ni aucun acte de poursuite.
L’État assure la collecte, le traitement et la conservation des données à caractère personnel ainsi recueillies ; il assure la conception du traitement ou la confie à un tiers.
II. – L’expérimentation fait l’objet de rapports d’évaluation transmis au Parlement ainsi qu’à la Commission nationale de l’informatique et des libertés dans les délais suivants :
1° Un an à compter de l’entrée en vigueur du décret mentionné au III ;
2° Deux ans à compter de l’entrée en vigueur du même décret ;
3° Six mois avant le terme de l’expérimentation.
Ces rapports évaluent la pertinence des données utilisées dans le cadre du traitement décrit au I aux fins de détecter des mouvements de véhicules ou des événements prédéterminés. Ils établissent la liste des garanties mises en place pour assurer la protection des données personnelles et le respect de la vie privée et analysent leur effectivité. Ils évaluent l’efficacité de durées de conservation inférieures à quatre mois et présentent les éléments permettant d’apprécier le caractère proportionné des différentes durées retenues au cours de l’expérimentation ; à ce titre, ils intègrent des indications statistiques permettant notamment, pour chaque durée expérimentée, de rendre compte de la quantité totale de données collectées, de la quantité de données conservées au-delà du délai maximum expérimenté pour les besoins d’une procédure pénale ou douanière, du nombre de mouvements de véhicules ou d’événements prédéterminés détectés, ainsi que du nombre de procédures d’enquête engagées sur le fondement desdites détections.
Ils comportent des développements spécifiques, établis par les services du ministère de la justice, sur l’efficacité du traitement décrit au I en matière de répression pénale des infractions mentionnées au premier alinéa du même I.
III. – Par dérogation à l’article 31 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 précitée, un décret en Conseil d’État, pris après avis motivé de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, fixe les modalités de mise en œuvre du présent article. Il autorise le traitement et détermine notamment les critères de recherche utilisés par ce dernier, les catégories de données traitées, les mesures mises en œuvre pour écarter l’exploitation des photographies des véhicules et pour assurer la sécurité des données stockées, le nombre maximal de dispositifs de contrôle automatisé des données signalétiques des véhicules concernés, ainsi que les axes de circulation où ils sont installés sur le territoire.
Par dérogation au même article 31, la demande d’avis adressée à la Commission nationale de l’informatique et des libertés est accompagnée d’une analyse d’impact relative à la protection des données à caractère personnel conformément à l’article 90 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 précitée.
Ce décret n’est pas publié. Toutefois, le sens de l’avis émis par la Commission nationale de l’informatique et des libertés est rendu public.
M. le président. L’amendement n° 12, présenté par MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Éric Bocquet.
M. Éric Bocquet. Nous pensons que cet article important, présenté comme un outil de lutte contre les go fast, comporte un risque d’inconstitutionnalité. La Cnil l’a certes validé pour ce qui concerne les atteintes à la vie privée, mais elle ne peut se prononcer sur la constitutionnalité du dispositif.
Par ailleurs, la durée excessive de l’expérimentation, fixée à trois ans, la non-publication du décret qui précise les modalités encadrant celle-ci et la possibilité de confier à un acteur privé une partie de la conception de cette expérimentation renforcent les réserves du groupe communiste républicain citoyen et écologiste sur cet article.
J’en demande donc la suppression.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des lois ?
M. Alain Richard, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. La commission est convaincue de l’intérêt de cette expérimentation, dont elle a encadré les modalités. Je ne puis donc qu’être défavorable à cet amendement de suppression.
Je vous rappelle du reste, mon cher collègue, que le Conseil constitutionnel, pour apprécier la constitutionnalité d’un dispositif, prend en compte non seulement les risques et les limites que celui-ci emporte vis-à-vis des droits de la personne, mais aussi l’impératif constitutionnel de recherche des auteurs d’infractions.
J’émets donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Cette expérimentation est importante.
Les lecteurs automatisés de plaques d’immatriculation sont aujourd’hui très largement utilisés, et même plébiscités par nos douaniers. Lors de chacun de mes déplacements sur le terrain, ils me le confirment et me demandent bien souvent des lecteurs supplémentaires.
Ces dispositifs scannent les plaques d’immatriculation et déclenchent une alerte, par exemple lorsque le numéro correspond au véhicule d’une personne que l’on recherche ou qu’il s’agit d’un véhicule volé. Les données sont conservées quinze jours, mais cette durée peut être étendue à un mois lorsqu’une telle alerte est déclenchée.
Par cette expérimentation, nous portons la durée de conservation des données à quatre mois et nous ouvrons la possibilité d’effectuer des recherches multicritères qui permettront, par exemple, d’identifier deux véhicules circulant ensemble, car nous savons que le transport de stupéfiants ou de produits prohibés s’effectue souvent dans des convois constitués d’au moins deux véhicules, dont un véhicule « ouvreur ».
Nous pourrons ainsi évaluer l’utilité d’un tel dispositif au regard de la lutte contre les trafics, notamment de stupéfiants.
Je précise qu’il n’est question ni d’algorithme ni d’intelligence artificielle, puisqu’il s’agit simplement de conserver les données plus longtemps et d’effectuer des recherches multicritères pour identifier des plaques d’immatriculation qui circulent ensemble régulièrement.
Je précise également que cette expérimentation ne concerne que le service des douanes, à l’exclusion, par exemple, des services de la police nationale.
Je me suis rendu à la frontière avec l’Espagne, où des trafics nombreux, notamment de tabac, transitent par la route. La possibilité d’identifier de manière automatisée des véhicules qui circulent ensemble permettra à nos services d’être plus efficaces dans le cadre de la lutte contre ces trafics.
L’avis du Gouvernement est donc résolument défavorable sur cet amendement de suppression.
M. le président. Monsieur Bocquet, l’amendement n° 12 est-il maintenu ?
M. Éric Bocquet. Non, je le retire, monsieur le président.