Mme le président. La parole est à M. Édouard Courtial.
M. Édouard Courtial. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, à situation exceptionnelle, mesure exceptionnelle. Voilà en peu de mots les raisons qui ont présidé à l’adoption de l’article 7 de l’ordonnance du 20 mai 2020 qui nous occupe ce matin. En effet, ce dispositif est né de la crise et ne saurait, à ce stade, lui survivre.
Entrée en vigueur alors que la France sortait à peine de son premier confinement, l’ordonnance en question répondait à l’urgence de soutenir nos entreprises les plus en difficulté. Elle complétait celle du 27 mars 2020 afin de mieux prendre en compte les conséquences de la crise sanitaire et de faciliter ainsi la reprise de l’activité.
Souvenons-nous de notre sidération collective face à la situation inédite que nous vivions alors et qui se poursuit. Souvenons-nous des craintes et des incertitudes quant au redémarrage tant attendu et des espoirs timides de reprise. Souvenons-nous qu’il nous fallait être dans l’action pour éviter un effondrement de l’économie française.
C’est dans ce contexte que l’article 7 portant adaptation des règles relatives aux difficultés des entreprises et des exploitations agricoles aux conséquences de l’épidémie de covid-19 a été rédigé.
Cette mesure a donc assoupli, jusqu’au 31 décembre 2020, la procédure permettant aux dirigeants d’une entreprise en redressement ou en liquidation judiciaire, ou à leurs parents ou alliés, de présenter une offre d’achat partiel ou total de l’entreprise.
Néanmoins, l’objet de la proposition de loi sur laquelle nous sommes amenés à nous prononcer aujourd’hui n’est autre que l’abrogation de cet article 7. Alors que le temps législatif ne s’inscrit pas toujours dans le temps très court, nous pouvons légitimement nous étonner d’un tel texte, conscients de cette échéance.
Les auteurs de la proposition de loi arguent que certains chefs d’entreprise auraient profité de l’effet d’aubaine qu’offrait cet assouplissement de la procédure de reprise. Je ne peux que déplorer les quelques dérives qui sont très marginales.
Ainsi s’explique, sans doute, la volonté de supprimer le dispositif de l’article 7, alors même que la crise couve toujours. Nous en mesurons les conséquences quotidiennes dans nos territoires. Cependant, peut-être que les circonstances ont obscurci les jugements… Je n’ose croire qu’il s’agisse de voir dans tous les chefs d’entreprise des personnes sans scrupules, alors qu’ils sont les forces vives de notre économie.
Plutôt que de succomber à l’émotion ou à l’idéologie, engageons un débat constructif afin de nous approcher, le plus possible, de la réalité des faits.
Deux étapes se distinguent, à mon sens, en vue de suivre cette démarche.
La première consiste à rappeler les motifs qui justifient l’assouplissement prévu par l’ordonnance du 20 mai 2020. Deux raisons conjoncturelles ont été retenues par le ministère de la justice : d’ordre économique, d’une part, car le climat des affaires, très incertain, laisse craindre un manque de repreneurs potentiels ; d’ordre moral, d’autre part, car les dirigeants d’entreprises ont été mis en difficulté par une crise sanitaire, dont ils ne sont pas responsables. Il était de ce fait légitime de faciliter leurs offres de reprise.
La seconde consiste à évaluer la nature du dispositif et sa mise en œuvre.
Concernant sa nature, le dispositif est d’ordre procédural : il permet au débiteur ou à 1’administrateur de former lui-même une requête en vue d’une offre de rachat, sans exiger que le ministère public la reprenne à son compte. Il reste pour le moins très encadré. Outre que le jugement doit être spécialement motivé et rendu après avis des contrôleurs comme le droit commun l’exige, la présence du ministère public à l’audience est obligatoire. Ce dernier peut présenter, à cette occasion, ses observations et, le cas échéant, interjeter appel.
Concernant la mise en œuvre du dispositif, un examen attentif de la jurisprudence montre que les tribunaux ont fait un usage prudent de la possibilité qu’il offre. Il a été le plus souvent utilisé avec l’assentiment des organes de la procédure, des salariés et du parquet, toujours en prenant en compte les spécificités de chacun des cas, et avec parcimonie.
Il faut aussi rappeler que la majorité des dirigeants sont honnêtes ! Ils n’ont aucun plaisir à venir déposer le bilan de leur entreprise au greffe du tribunal de commerce, parce qu’une page de leur vie se tourne. Certains y voient même un déshonneur et garderont dans leur mémoire cet instant.
En conclusion, les deux étapes d’évaluation du dispositif d’assouplissement en montrent toute la cohérence : l’idée à l’origine du dispositif est légitime et sa mise en application demeure prudente et efficace.
Demain, le sort du tissu productif français, notamment des petites et moyennes entreprises qui font la richesse et le dynamisme de nos territoires, sera suspendu à ce type de mesure de soutien. J’ai une pensée pour nos restaurateurs et tous ces chefs d’entreprise qui ne peuvent toujours pas exercer leur activité à cause du maintien des mesures sanitaires.
Je suis pleinement en accord avec les conclusions du rapport de la commission des lois, dont je salue le sérieux, sur une éventuelle prorogation, voire une pérennisation du dispositif.
Enfin, permettez-moi de formuler un vœu, celui que le Gouvernement use de toutes les possibilités offertes par notre droit pour sauver les entreprises viables, mais fragilisées par la crise, et préserver ainsi des milliers d’emplois.
Mme le président. Il faut conclure.
M. Édouard Courtial. Si l’État a pris des mesures indispensables pour limiter l’impact économique de la crise sanitaire, lesquelles ont d’ailleurs donné des résultats, il faut permettre à toutes nos entreprises de se remettre en ordre de marche. Il y va de leur survie et de notre avenir.
Mme le président. La parole est à M. Cyril Pellevat.
M. Cyril Pellevat. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je peux aisément comprendre l’indignation de nos concitoyens lorsque les médias ont annoncé qu’il était désormais possible pour le dirigeant d’une entreprise ayant organisé son dépôt de bilan de faire une offre de rachat de sa propre entreprise.
Cela semble, au premier abord, aller complètement à l’encontre de la morale qui doit présider au monde des affaires, car la personne qui met en œuvre cette possibilité n’échappera pas au soupçon de vouloir contourner les lois applicables, notamment en matière de licenciement.
Toutefois, il n’en est rien, comme le souligne à juste titre le rapport de la commission des lois.
En effet, bien que la procédure ait été facilitée par ordonnance, le rachat d’une entreprise par son dirigeant était déjà autorisé par la loi, dans des conditions strictes et contrôlées par un juge. Ainsi, il est habituellement prévu que le ministère public demande que le rachat soit autorisé, et même lorsque cette faculté est employée, rien ne garantit que le juge y ouvre droit.
Cette possibilité, qui est par ailleurs très peu utilisée, est avantageuse lorsqu’il n’existe pas d’offre de rachat ou lorsque les offres sont insuffisantes pour permettre un apurement du passif, le maintien de l’activité et la préservation des emplois.
En outre, ni la procédure de sauvegarde, ni la liquidation judiciaire, ni la cession, qui peuvent déboucher sur un rachat, ne permettent de contourner les procédures, et les règles afférentes aux licenciements économiques restent de mise si des réductions d’emplois doivent avoir lieu.
Il s’agit donc d’une fausse polémique, résultant d’une désinformation, d’une méconnaissance du droit applicable, mais aussi de la diabolisation des chefs d’entreprise, lesquels chercheraient forcément à contourner la loi et à nuire à leurs employés. Je trouve cette vision extrêmement dommageable alors que la crise économique touche durement de nombreuses entreprises. Leurs dirigeants sont désemparés et préféreraient, j’en suis certain, ne pas avoir à vendre le fruit de longues années de travail.
J’estime naturel que le Gouvernement ait assoupli la procédure et supprimé jusqu’au 31 décembre 2020 la nécessité pour le ministère public de former une requête pour que le rachat par le dirigeant de l’entreprise puisse avoir lieu. Cet assouplissement vise uniquement à répondre aux nombreuses faillites qui interviennent et risquent d’intervenir, et dont les entreprises ne sont pas responsables. Ces faillites s’expliquent non par la mauvaise gestion du dirigeant, mais bien par la crise.
Devrions-nous laisser les chefs d’entreprise française tout perdre, au risque que leurs entreprises soient rachetées par des investisseurs étrangers ou, pis, qu’elles ne puissent être vendues et que tous leurs employés soient licenciés et viennent gonfler les chiffres du chômage, lesquels ne cessent de grimper ?
Je suis bien conscient que cette proposition de loi a été déposée dans le but de protéger les salariés des licenciements. Cependant, mes chers collègues, nous devons garder à l’esprit que cette protection n’est possible que si nous aidons également les entreprises. Ce sont elles qui créent de l’emploi, et il serait tout simplement contre-productif de leur mettre davantage de bâtons dans les roues en cette période difficile.
Bien évidemment, les largesses qui peuvent leur être accordées doivent être proportionnées et limitées dans le temps. C’est le cas du dispositif que nous examinons, car les tribunaux contrôlent très attentivement le respect de la procédure, et la souplesse consistant à ne plus rendre la requête du ministère public obligatoire prendra fin au 31 décembre 2020.
Passée cette date, la procédure habituelle reprendra. Le rachat par le dirigeant restera possible, comme cela est le cas depuis plusieurs années, mais dans des conditions plus strictes que celles qui ont pu avoir cours ces derniers mois.
Il ne me semble donc pas nécessaire, à quelques jours de l’échéance de ce dispositif, de l’abroger, pas plus qu’il ne semble utile de le prolonger.
Nous avons pour habitude de retravailler le droit, de l’améliorer, c’est l’un de nos rôles en tant que parlementaires. Cependant, n’oublions pas que le droit est souvent bien fait et qu’il n’est pas toujours nécessaire de le modifier. Faisons confiance aux juges pour l’appliquer correctement, pour faire preuve de prudence, mais aussi de justesse, ce qu’ils ont d’ailleurs fait à plusieurs reprises ces derniers mois lorsque des propositions de rachat ont été faites par le dirigeant de l’entreprise en vente.
La commission des lois a très justement remarqué dans son rapport que le droit applicable est efficace et que les modalités prévues en matière de rachats d’entreprises sont mieux connues des dirigeants, mais aussi des tribunaux, sensibilisés à la nécessité d’être souples en cette période. Elle a de ce fait estimé qu’il n’y avait pas besoin de modifier la loi et je partage pleinement son avis.
Je tiens à féliciter la commission des lois pour son travail encore une fois de qualité. Il démontre le sérieux et l’efficacité de la Haute Assemblée, qui ne s’engouffre pas, à la première porte ouverte, dans la polémique. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à M. Marc Laménie. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Marc Laménie. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je salue tout d’abord l’initiative de Mme Sophie Taillé-Polian et de ses collègues du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, qui nous permet d’aborder un sujet hautement sensible, lié aux entreprises et au monde économique. En effet, cette proposition de loi vise à supprimer la possibilité pour un dirigeant de racheter son entreprise après avoir déposé le bilan.
J’ai suivi avec beaucoup d’intérêt le travail de la commission des lois, madame la rapporteure, et les nombreuses auditions au cours desquelles se sont exprimés les questionnements des chefs d’entreprise et des représentants de salariés sur un sujet particulièrement sensible.
Certains de nos collègues ont évoqué un risque de dérive et ont rappelé les articles du code de commerce. À cet égard, je tiens à saluer également les travaux menés par la commission des affaires économiques et par la délégation aux entreprises que préside Serge Babary. En effet, le monde économique est fait de liens entre les entreprises, l’État et l’ensemble des collectivités territoriales, qui ont compétence en la matière.
Madame la ministre, vous avez rappelé qu’il convient de sauver le monde économique. Cette proposition de loi fait référence à la loi d’urgence du 23 mars 2020 pour faire face à l’épidémie de covid-19 et à l’ordonnance du 20 mai 2020 portant adaptation des règles relatives aux difficultés des entreprises et des exploitations agricoles aux conséquences de l’épidémie de covid-19.
L’objet de cette proposition de loi est de mettre un terme à une dérive qui provoque de nombreux scandales sociaux. Mes collègues en ont cité plusieurs exemples d’entreprises.
À cet égard, il faut rappeler le rôle des tribunaux de commerce, le partenariat entre l’État, les collectivités territoriales, mais aussi la Banque de France et l’Unédic, ainsi que l’assouplissement temporaire de la procédure prévue par l’ordonnance du 20 mai 2020. Mme la rapporteure préconise de mobiliser l’ensemble des possibilités offertes par notre droit pour sauver les entreprises viables, mais fragilisées par la crise, et préserver ainsi des milliers d’emplois.
Des dispositifs existent, comme nous avons récemment eu l’occasion de le rappeler, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2021 : loi de finance rectificative, prêts garantis par l’État, dont l’article 52 quinquies de la deuxième partie de la loi de finances limite l’encours total à 300 milliards d’euros, ce qui est énorme, fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise sanitaire, ou bien encore les différents dispositifs d’exonération de charges.
Compte tenu des arguments de la rapporteure de la commission des lois, notre groupe ne votera pas cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. La discussion générale est close.
La commission n’ayant pas élaboré de texte, nous passons à la discussion des articles de la proposition de loi initiale.
Article additionnel avant l’article 1er
Mme le président. L’amendement n° 1 rectifié quinquies, présenté par Mmes N. Goulet et Loisier, MM. Le Nay, Moga et Canevet, Mmes Dindar et Billon, M. Delahaye, Mme Doineau, M. Delcros et Mmes Vérien, Gatel et C. Fournier, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Jusqu’au 31 décembre 2021, la procédure de rétablissement professionnel sans liquidation prévue au chapitre V du titre IV du livre VI du code de commerce est ouverte, par dérogation au premier alinéa de l’article L. 645-1 du même code et sous les réserves prévues aux deuxième et troisième alinéas du même article L. 645-1 ainsi qu’à l’article L. 645-2 dudit code, à toute personne mentionnée au premier alinéa de l’article L. 640-2 du même code, en cessation de paiement et dont le redressement est manifestement impossible, qui n’a pas cessé son activité depuis plus d’un an et dont l’actif déclaré a une valeur inférieure à un montant fixé par décret en Conseil d’État.
Dans le cas où le débiteur a employé un ou plusieurs salariés au cours des six derniers mois, la procédure de rétablissement ne peut être ouverte que si toutes les créances salariales exigibles ont été payées à la date où le tribunal statue.
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Cette façon d’amender ce texte présenté par Mme Sophie Taillé-Polian et ses collègues est une procédure quelque peu cavalière, mais elle est aussi le moyen de faire passer un certain nombre d’idées et de propositions.
Ce premier amendement vise à étendre la procédure de rétablissement qui existe pour les TPE. Plus précisément, il s’agit d’en élargir le bénéfice aux entreprises de moins de dix salariés, ce qui permettrait à mon sens de sauver un certain nombre d’entre elles, victimes de la crise sanitaire.
Les créances salariales, mon cher collègue Fabien Gay, seront évidemment protégées, comme il est prévu dans le dispositif, de manière tout à fait légitime.
La Haute Assemblée gagnerait à adopter cette disposition.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Claudine Thomas, rapporteure. La commission a émis un avis de sagesse.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée. Cet amendement d’appel vise surtout à engager la discussion puisqu’on sait que le texte ne devrait pas prospérer outre mesure.
Sur le fond, la procédure de rétablissement professionnel doit permettre à des débiteurs, personnes physiques, de bénéficier d’un effacement de leurs dettes, tout en poursuivant leur activité. Il s’agit d’une procédure simplifiée, soumise à des conditions tenant notamment au montant de l’actif déclaré par le débiteur.
Il est important de rappeler que le Gouvernement a souhaité étendre la possibilité pour les petits débiteurs d’utiliser cette procédure en rehaussant la valeur de l’actif en deçà duquel le débiteur est éligible à cette procédure. C’est notamment ce que prévoit l’article 6 de l’ordonnance du 20 mai 2020.
Cette mesure, favorable à l’utilisation de la procédure de rétablissement professionnel, a été prolongée jusqu’au 31 décembre 2021 par la loi du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique. Elle permet donc à la personne physique de poursuivre et d’exercer une activité indépendante, malgré la cessation des paiements, sans restreindre son activité professionnelle à une activité salariée.
Le Gouvernement reste réticent à l’idée d’étendre le bénéfice de cette procédure aux personnes morales. En effet, cette ouverture présente des risques liés au contournement des règles applicables à la liquidation judiciaire et nécessite donc une étude d’impact approfondie.
On peut craindre que certains dirigeants, dont le comportement appellerait d’éventuelles sanctions, puissent contourner les règles applicables en demandant l’ouverture d’une procédure de rétablissement professionnel pour effacer les dettes de leur entreprise sans contrôle suffisant.
Ces quelques éléments de réponse permettront de nourrir une réflexion plus générale sur l’amélioration des procédures des tribunaux de commerce au service des entreprises en difficulté.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme le président. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.
M. André Reichardt. En tant qu’ancien directeur général d’une chambre de métiers et de l’artisanat, je tiens à dire tout l’intérêt de cet amendement. De mon point de vue, ce n’est pas un amendement d’appel. S’il était adopté, il permettrait à n’en pas douter d’améliorer la situation de nombreux artisans qui connaissent des difficultés en cette période de crise, sachant que cette dernière risque de durer.
Même si, comme l’a dit Mme la ministre, aucune étude d’impact n’a été réalisée, la procédure de rétablissement offre un certain nombre d’avantages. J’aurais aimé que nous puissions en discuter au sein de la Haute Assemblée et que nous puissions adopter l’amendement, le cas échéant, afin que l’Assemblée nationale et le Sénat aient un souvenir commun sur ce sujet, même si le texte n’est pas appelé à prospérer.
Mme le président. La parole est à M. Vincent Segouin, pour explication de vote.
M. Vincent Segouin. J’ai bien entendu ce que vient de dire André Reichardt. Je pense tout de même qu’une étude d’impact est nécessaire. Il faut en effet rappeler que les entreprises françaises comptent six salariés en moyenne. Adopter un tel amendement, même si son dispositif est assez protecteur, pourrait créer des difficultés majeures aux personnes morales. Ce problème mérite à mon sens que l’on aille plus loin dans la réflexion.
Mme le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, avant l’article 1er.
L’amendement n° 3 rectifié, présenté par Mmes N. Goulet, Vérien et C. Fournier, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le quatrième alinéa de l’article L. 144-1 du code monétaire et financier, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La Banque de France intègre dans ses enquêtes toutes les informations liées à l’application éventuelle des dispositifs pris dans le cadre de l’urgence sanitaire. »
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Dans la mesure où Mme la ministre a déjà répondu de nombreuses fois à cette proposition, je retire mon amendement.
Mme le président. L’amendement n° 3 rectifié est retiré.
Article 1er
L’ordonnance n° 2020-596 du 20 mai 2020 portant adaptation des règles relatives aux difficultés des entreprises et des exploitations agricoles aux conséquences de l’épidémie de covid-19 est ratifiée, sous réserve des modifications prévues à l’article 2 de la présente loi.
Mme le président. La parole est à M. Guy Benarroche, sur l’article.
M. Guy Benarroche. L’article 1er met en exergue l’immense problème que constitue l’accroissement du recours aux ordonnances par ce gouvernement : 115 ordonnances ont déjà été publiées en 2020 et 232 depuis le début de la législature. Tous les records vont être largement battus !
Cette inflation normative par le biais d’ordonnances sur des sujets qui sont de moins en moins techniques est problématique et révélatrice de la vision qu’a l’exécutif du législateur.
En outre, ce qui choque, c’est que ces ordonnances sont loin d’être toutes ratifiées : le Gouvernement fait voter au Parlement une habilitation à prendre par ordonnances des mesures sur des sujets de plus en plus importants, puis signe lesdites ordonnances et dépose les projets de loi de ratification ; mais, très souvent, il n’inscrit pas ces projets de loi à l’ordre du jour, alors qu’il en a pourtant la maîtrise.
Certes, il y a l’urgence sanitaire cette année, mais légiférer autant par ordonnances sans procéder à la ratification expresse de celles-ci inquiète sur la réalité du système de contrôle et d’équilibre des pouvoirs prévu par notre Constitution.
Notre assemblée s’est d’ailleurs saisie du problème via une délégation chargée du travail parlementaire, qui s’est vue logiquement confier la mission de contrôle et de suivi des ordonnances. Je trouve regrettable que les sénateurs doivent, comme aujourd’hui, prendre sur leur temps d’initiative parlementaire pour avoir une discussion avec le Gouvernement à ce sujet et disposer d’un temps d’échange, pourtant promis lors du vote de l’habilitation. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
Mme le président. La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Claudine Thomas, rapporteure. Je vous rappelle que la commission est défavorable à cet article, qui vise à ratifier l’intégralité de l’ordonnance du 20 mai 2020. Le Parlement ne saurait ratifier cette ordonnance sans un examen plus approfondi qui dépasse le cadre de cette proposition de loi.
L’ordonnance du 20 mai 2020 comprend de nombreuses dispositions, dont certaines ont appelé des réserves de la part de nos collègues François-Noël Buffet et Patrick Kanner, rapporteurs de la mission de suivi de la commission des lois sur la mise en œuvre de l’état d’urgence sanitaire.
Mme le président. Je mets aux voix l’article 1er.
(L’article 1er n’est pas adopté.)
Article additionnel après l’article 1er
Mme le président. L’amendement n° 2 rectifié quater, présenté par Mmes N. Goulet et Loisier, MM. Le Nay, Moga et Canevet, Mmes Férat, Dindar et Billon, M. Delahaye et Mmes Doineau, Vérien, Gatel et C. Fournier, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Jusqu’au 31 décembre 2021, le privilège du Trésor mentionné à l’article 1920 du code général des impôts, l’hypothèque légale mentionnée à l’article 1929 ter du même code ainsi que le privilège mentionné à l’article L. 243-4 du code de la sécurité sociale sont inefficaces, nonobstant leur inscription, en cas de liquidation judiciaire du redevable, lorsque celui-ci était éligible, à la date d’ouverture de la procédure, au fonds de solidarité prévu à l’article 1er de l’ordonnance n° 2020-317 du 25 mars 2020 portant création d’un fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation.
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
IV. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
V. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Je retire mon amendement.
Mme le président. L’amendement n° 2 rectifié quater est retiré.
Article 2
L’article 7 de l’ordonnance n° 2020-596 du 20 mai 2020 portant adaptation des règles relatives aux difficultés des entreprises et des exploitations agricoles aux conséquences de l’épidémie de covid-19 est abrogé.
Mme le président. Personne ne demande la parole ?…
Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 46 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 226 |
Pour l’adoption | 56 |
Contre | 170 |
Le Sénat n’a pas adopté.