M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 22 rectifié ?
M. Olivier Véran, ministre. Si je m’autorise – vous noterez que je l’ai rarement fait depuis hier – à débattre avec le président Bas, alors que nous sommes lui et moi quasiment toujours d’accord, notamment sur les points juridiques, sur lesquels je le sais extrêmement érudit, c’est parce que je me dois d’insister.
En pratique, nous considérons que le recours au juge des libertés et de la détention n’est nécessaire qu’en cas de privation totale de liberté, lorsqu’une personne malade se voit appliquer une mesure d’isolement stricte et qu’elle ne peut sortir de chez elle.
La rédaction adoptée par la commission prévoit le recours systématique au juge des libertés et de la détention pour toutes les mesures privatives de liberté. Or je puis vous garantir que de nombreuses personnes ne seront que très partiellement privées de libertés.
À titre d’exemple, le cas contact d’une personne malade sera testé, en général le septième jour. Si son test est négatif, mais qu’il est un cas contact dit « à risques », la quatorzaine sera poursuivie, probablement selon des modalités allégées, avec des autorisations de sortie.
Si cette personne souhaite intenter un recours contre cette décision, le juge administratif me semble être le bon niveau, le plus classique. C’est en effet plus simple que de devoir en passer systématiquement par le juge des libertés et de la détention.
La quatorzaine allégée va certes entraîner un certain nombre de restrictions de libertés, mais celles-ci n’empêcheront nullement ceux qui estimeront que leurs droits sont bafoués de s’adresser à un juge administratif pour les faire valoir.
L’amendement n° 22 rectifié est quant à lui totalement satisfait. Les décisions de justice – c’est un principe général – sont motivées, y compris les ordonnances du juge des libertés et de la détention. Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrais un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Alain Richard, pour explication de vote.
M. Alain Richard. Ce sera un défi pour moi de dire ce que j’ai à dire en deux minutes et demie !
Monsieur le ministre, je suis de ceux qui veillent le plus intensément à la distinction entre les mesures limitatives ou restrictives de liberté et les mesures privatives de liberté, distinction qui a été très fortement discutée sur l’initiative, malencontreuse à mes yeux, du précédent Premier président de la Cour de cassation, et qui est toujours très discutée chez les professionnels du droit, en particulier chez les avocats ; à ce titre, je puis que nous sommes devant un sujet d’importance d’un point de vue constitutionnel.
Le Conseil constitutionnel a, selon moi de façon extrêmement judicieuse, fixé cette séparation plus de cinquante ans après la Constitution, dont l’article 66, il est vrai, pouvait prêter à débat. Il vaut mieux être très rigoureux sur ce sujet. Il a indiqué que doit être regardée comme privative de liberté une mesure qui entraîne l’impossibilité d’aller et venir plus de douze heures par jour.
Lorsque je vous écoute décrire les modalités de ces mesures, certes d’ordre médical, il me semble tout de même qu’elles relèvent du champ des mesures privatives de liberté.
Si nous voulons donc que les principes continuent d’être appliqués avec rigueur sans être trop discutés, je recommanderai, monsieur le ministre, et, à travers vous, c’est aux autorités les plus éminentes de l’État que je m’adresse – je pense au Secrétariat général du Gouvernement ! (Sourires.) – de maintenir l’unité de l’ensemble des mesures totalement ou majoritairement privatives de liberté.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de la Gontrie, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre de la Gontrie. Notre collègue Richard vient d’expliquer que certains d’entre nous pourront se pencher pendant des dizaines d’années avec intérêt sur une littérature juridique absolument passionnante, afin de savoir si la saisine du juge administrative était la bonne ou si, au contraire, il eût fallu saisir le juge judiciaire…
Néanmoins, plaçons-nous deux secondes du côté des personnes concernées, privées de liberté. La situation étant tout de même inédite – on l’a suffisamment dit – et, disons-le, désagréable, nous ferions œuvre utile en leur simplifiant la vie et en décidant qu’une seule juridiction sera compétente pour statuer sur leur recours.
Par ailleurs, voilà plusieurs semaines que l’on nous explique que l’on a le droit de sortir de chez soi une heure par jour. Peut-être n’est-ce pas là pour vous une mesure privative de liberté, mais, au sens commun, c’en est tout de même une.
Ne faisons donc pas de juridisme ou d’analyses excessivement fines. Pour des raisons pratiques, retirez cet amendement, monsieur le ministre. Il s’agit de simplifier la vie des Français qui se trouveront dans cette situation.
Nous voterons contre cet amendement si vous ne le retirez pas et nous serons favorables à l’amendement tendant à prévoir que l’ordonnance doit être motivée, quand bien même elle doit l’être en principe.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Véran, ministre. J’ai été totalement convaincu par les arguments du sénateur Alain Richard, mais je n’ai pas, moi, réussi à vous convaincre, madame la sénatrice, que la quatorzaine n’est pas une mesure privative de liberté. (Mme Marie-Pierre de la Gontrie s’exclame.)
Je suis également convaincu que l’on se penchera avec passion dans l’avenir sur notre débat, dont je ne nie pas l’intérêt, moi qui viens d’un tout autre milieu que le milieu juridique et qui me prends de passion pour ces questions, tout comme je suis convaincu que l’on aurait tort, moi le premier, de négliger leurs effets sur la vie des gens.
C’est pourquoi je pense qu’il est utile d’y consacrer un peu de temps, même si, vous le savez, mon temps est compté, tout comme le vôtre d’ailleurs. (Sourires.)
Monsieur le sénateur Alain Richard, la quatorzaine n’interdit pas de sortir de chez soi quatre fois par jour pour faire des courses. Si l’on se fonde sur le critère de l’impossibilité d’aller et venir plus de douze heures par jour, la quatorzaine n’est donc pas une mesure privative de liberté. Et c’est parce que vous m’avez convaincu et parce que je crois profondément à la vertu du Conseil constitutionnel que je ne voudrais pas que nous prenions le risque de déstabiliser tout le processus d’un point de vue juridique.
L’isolement est une mesure privative de liberté, les sorties pouvant être interdites. Dans ce cas, tout sera organisé au domicile.
La quatorzaine, et encore plus la quatorzaine dite « allégée », laquelle sera maintenue quelques jours, par précaution, lorsque le résultat de la PCR réalisée le septième jour sera négatif, permettront d’aller faire des courses, avec un masque, et même de sortir se promener avec ses enfants, dans certaines conditions évidemment. Le nombre de sorties ne sera pas limité. Je maintiens donc qu’il n’y a pas impossibilité de sortir pendant douze heures.
En toute rigueur, j’ai donc tendance à penser que le recours au juge administratif s’impose dans cette situation.
M. le président. L’amendement n° 91, présenté par MM. Sueur, Daudigny et Kanner, Mme Rossignol, MM. Jacques Bigot, Durain et Fichet, Mmes de la Gontrie et Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et Sutour, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin et Meunier, M. Tourenne, Mme Van Heghe, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mme Guillemot, MM. Houllegatte, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mme Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le juge des libertés et de la détention est saisi dans les quarante-huit heures suivant la notification de la mise en quarantaine ou du maintien en isolement de l’intéressé. Il statue dans les quarante-huit heures suivant sa saisine par ordonnance au siège du tribunal judiciaire dans le ressort duquel se situe le lieu de mise en quarantaine ou de maintien en isolement de l’intéressé après audition du représentant de l’administration et de l’intéressé ou de son conseil, s’il en a un. L’intéressé peut demander au juge des libertés et de la détention qu’il lui soit désigné un conseil d’office.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. L’article 3 du projet de loi vise à mettre en place, comme chacun le sait, de nouvelles mesures d’isolement et de mise en quarantaine.
Ce dispositif impose des mesures de privation de liberté très restrictives pour les personnes concernées. En effet, le placement à l’isolement ou la mise en quarantaine serait prononcé par le préfet, sur proposition de l’agence régionale de santé. Dans le dispositif proposé par le Gouvernement, aucun contrôle de cette privation de liberté n’est prévu.
C’est pourquoi nous vous proposons de prévoir une saisine automatique du juge des libertés et de la détention, qui sera ainsi appelé à statuer dans les quarante-huit heures sur un placement en isolement décidé par le préfet.
Je sais que cela peut apparaître contraignant, mais il s’agit, mes chers collègues, des libertés, et le Sénat, vous le savez, est très vétilleux – il a raison de l’être – sur ces questions.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Nous avons prévu de nombreuses garanties pour ce régime. L’amendement tend à en ajouter une qui ne paraît pas indispensable, puisque le juge des libertés et de la détention pourra intervenir dans les soixante-douze heures, à la demande de la personne placée à l’isolement ou en quarantaine.
J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 86, présenté par MM. Sueur, Daudigny et Kanner, Mme Rossignol, MM. Jacques Bigot, Durain et Fichet, Mmes de la Gontrie et Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et Sutour, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin et Meunier, M. Tourenne, Mme Van Heghe, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mme Guillemot, MM. Houllegatte, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mme Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 8
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les mesures de mise en quarantaine ou le placement et le maintien en isolement sont mises en œuvre sous la propre responsabilité de l’intéressé.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Lors de la présentation de la stratégie nationale de déconfinement devant l’Assemblée nationale, le mardi 28 avril 2020, M. Édouard Philippe a fait une déclaration sur laquelle je souhaite attirer votre attention, monsieur le ministre, car je ne doute pas qu’elle figure en bonne place sur la cheminée de votre bureau.
M. Jean-Pierre Sueur. Je la rappelle : « Notre politique repose, à cet égard, sur la responsabilité individuelle et la conscience que chacun doit avoir de ses devoirs à l’égard des autres. Nous prévoirons des dispositifs de contrôle, s’ils devaient être nécessaires, mais notre objectif est de nous reposer largement sur le civisme de chacun. »
Cet amendement vise à tirer les conséquences de cette déclaration, que nous jugeons particulièrement importante.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Je ne suis pas le meilleur exégète de la pensée du Premier ministre, mon cher collègue, mais vous avez vous-même lu une phrase dans laquelle, d’après ce que j’ai compris, le Gouvernement justifie le fait de prendre quelques mesures contraignantes : « Nous prévoirons des dispositifs de contrôle ».
Les quarantaines et l’isolement existent dans notre droit de la santé publique depuis bien avant la loi d’urgence sanitaire. La quarantaine est faite pour des gens dont on ignore s’ils sont atteints d’une affection contagieuse, mais qui pourraient l’être. L’isolement est destiné aux personnes que l’on sait contagieuses. Cette distinction a été consolidée en 2005 dans le règlement sanitaire international, préparé par l’Organisation mondiale de la santé en lien avec tous ses États membres.
La quarantaine et l’isolement, par nature, sont des régimes de contrainte, ce qui n’est pas le cas, par nature, du système de prescription médicale, qui vous invitera à vous mettre en quatorzaine si vous avez approché un porteur du virus.
Ce régime repose, comme l’a dit le Premier ministre, sur « la conscience que chacun doit avoir de ses devoirs à l’égard des autres ». En revanche, la quarantaine et l’isolement sont des régimes contraignants.
Votre proposition, si elle était adoptée, détruirait tout simplement le régime de la quarantaine, ce que vous pouvez d’ailleurs assumer. C’est la raison pour laquelle la commission des lois, tout comme la commission des affaires sociales, motivée par les connaissances qu’elle a des règles sanitaires – son président peut en attester –, ne peut accepter cet amendement.
Cela étant, peut-être voudrez-vous le retirer, monsieur Sueur ? C’est en tout cas ce que je vous prie de faire.
M. le président. Monsieur Sueur, l’amendement n° 86 est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Sueur. Quelquefois, nous cédons au plaisir de citer des déclarations importantes, mais il est vrai que, en l’espèce, ce que dit M. le rapporteur ne manque pas de pertinence.
C’est pourquoi nous retirons cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 86 est retiré.
L’amendement n° 202, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 9, au début
Insérer les mots :
Sauf si l’intéressé y consent,
La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Véran, ministre. Cet amendement vise à rétablir le texte initial du Gouvernement et à simplifier la procédure.
Lorsque la personne mise en quarantaine ou placée à l’isolement consent à la prolongation de la mesure au-delà d’un délai de quatorze jours, la saisine du juge des libertés et de la détention n’est pas systématique. Cela correspond à des situations vécues lors d’épidémies.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Défavorable.
M. le président. L’amendement n° 20 rectifié, présenté par Mmes M. Carrère, Costes, N. Delattre et Guillotin, M. Labbé, Mme Laborde, MM. Requier, Cabanel, Collin, Dantec, Gabouty, Gold et Guérini, Mmes Jouve et Pantel et MM. Roux et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Après les mots :
Lorsque la mesure
insérer les mots :
limite ou
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Cette proposition résulte également des observations de la Commission nationale consultative des droits des droits de l’Homme. Comme le souligne son président, « le juge des libertés et de la détention ne peut être saisi que dans le seul cas d’une privation absolue de la liberté », lorsque toute sortie est interdite, tandis qu’est supprimée toute possibilité de recours au juge administratif des référés, ce qui prive la personne de tout recours effectif.
Une telle situation ne nous paraît pas acceptable dans le cas de personnes placées en quarantaine pour lesquelles l’avis médical n’interviendrait qu’après quatorze jours.
Tel est l’objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Il est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 43 rectifié, présenté par MM. Reichardt, Paccaud, Morisset et Kennel, Mmes L. Darcos et Eustache-Brinio, MM. Cuypers et Pellevat, Mmes Thomas, Chain-Larché et Raimond-Pavero, MM. Pemezec, Frassa et Regnard, Mmes Duranton et Noël, M. Bonne, Mme Dumas, MM. Cardoux et Grosperrin, Mme Lavarde, MM. Brisson et de Nicolaÿ, Mmes Troendlé et Imbert, MM. Daubresse, Courtial, Charon, Danesi et Houpert, Mmes Ramond et Deromedi, M. Vaspart, Mme Lamure, MM. Kern, Chatillon, Savary, Gremillet, Bascher, Lefèvre et Vogel, Mmes Dindar et N. Goulet, M. H. Leroy et Mme Malet, est ainsi libellé :
Compléter cet article par trois alinéas ainsi rédigés :
…° Il est ajouté un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Le régime de police spéciale mis en place par la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19, telle que modifiée par la loi n° … du …. prorogeant l’état d’urgence et complétant ses dispositions, ne fait pas obstacle à la compétence du maire, au titre de ses pouvoirs de police administrative générale au sens des articles L. 2212-1 et L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales, pour adopter des mesures plus protectrices de la santé publique que celles adoptées sur l’ensemble du territoire national, dès lors qu’elles sont nécessaires au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques dans sa commune et justifiées par des circonstances locales particulières.
« Si, dans le cadre de la réouverture des établissements recevant du public, des établissements d’accueil des enfants, des établissements d’enseignement scolaire pour les classes maternelles et élémentaires et des services dont il a la responsabilité, les moyens matériels et humains dont dispose la commune sont insuffisants ou inadaptés pour pouvoir assurer la protection de la santé publique, faire respecter les règles de sécurité sanitaire et de distanciation sociale, le maire peut décider de refuser ou de reporter leur réouverture. »
La parole est à M. Olivier Paccaud.
M. Olivier Paccaud. L’ordre d’examen des amendements est parfois étonnant ! En effet, cette proposition de mon collègue André Reichardt ressemble comme deux gouttes d’eau à l’amendement de notre collègue Hervé Maurey, qu’a présenté Mme Gatel. Je suppose qu’elle connaîtra le même sort.
Ma présentation sera donc brève : cet amendement vise à donner aux maires le pouvoir d’ouvrir ou de fermer leurs écoles, compte tenu de la décision récente du Conseil d’État à cet égard.
Permettez-moi d’utiliser le temps de parole qui m’est alloué pour répondre à mes collègues qui, lors de l’examen de l’amendement d’Hervé Maurey, ont argué que l’ouverture des écoles est essentielle pour les enfants en situation difficile, qu’ils soient victimes de violences ou en décrochage.
Cette ouverture est évidemment essentielle. Cela étant, il serait très injuste de répartir les maires dans deux catégories : d’un côté, ceux qui ne veulent pas ouvrir les écoles et qui manqueraient de cœur, de l’autre, de l’autre, ceux qui les rouvriront et qui ont le monopole de la générosité. Ce n’est pas du tout le cas.
À cet égard, monsieur le ministre, je tiens à saluer le pragmatisme et la grande souplesse des services de l’État, en tout cas dans le département de l’Oise. Le préfet n’a en effet pas attaqué les maires qui prennent des arrêtés de maintien de la fermeture des écoles. De même, il ne voit aucun inconvénient à ce que la rentrée soit échelonnée sur plusieurs jours, comme le souhaitent certains maires.
Pour clore mon intervention, permettez-moi de vous lire, mes chers collègues, le courrier que Jean-Jacques Thomas, maire de Laboissière-en-Thelle, petite commune de l’Oise, a adressé ce matin à ses administrés pour justifier le maintien de la fermeture des écoles :
« Mesdames, messieurs, chers parents,
« Dans le cadre du plan de déconfinement, le Gouvernement a annoncé la réouverture des écoles maternelles et primaires le 11 mai.
« Pour la santé de nos enfants et du personnel enseignant, ce protocole est difficilement applicable, sachant que notre région est en zone rouge, que le conseil scientifique préconise une rentrée des élèves en septembre et que des cas graves chez les enfants apparaissent dans les hôpitaux limitrophes de notre département.
« Dans ces circonstances, sachant qu’un maire a un devoir de protéger sa population, j’ai pris ce jour la décision de maintenir la fermeture des écoles de notre commune au-delà du 11 mai, avec une réouverture à la rentrée de septembre 2020. Prenez bien soin de vous et de votre famille. »
Monsieur le rapporteur, j’ai bien compris que nous ne devions pas ouvrir la boîte de Pandore, car ce serait dangereux pour les maires. Néanmoins, il faut bien entendre leur voix.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Nous avons déjà eu un très long débat sur ce sujet lors de l’examen d’amendements connexes à celui-ci. La question a été tranchée.
Mes chers collègues, je ne puis donc que réitérer les arguments que j’ai exprimés concernant un amendement similaire et vous demander de bien vouloir rejeter cet amendement. Je vous en remercie d’avance.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Alain Richard, pour explication de vote.
M. Alain Richard. J’ai revérifié les textes : il y a, comme l’a dit M. Paccaud plus tôt dans le débat, une défectuosité dans le code de l’éducation. Le code repose sur le postulat que les écoles fonctionnent tout le temps et que personne n’a jamais à prendre de décision ni d’ouverture ni de fermeture.
M. Philippe Bas, rapporteur. Tout à fait !
M. Alain Richard. L’article L. 411-1 que le président-rapporteur a cité décrit la situation de fonctionnement de l’établissement scolaire, mais ne statue absolument pas sur l’hypothèse d’une fermeture et donc d’une réouverture. Il me semble donc, et nos collègues membres de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, dont la présidente est ici présente, retiendront cette idée, qu’il y a une réelle imperfection dans le code de l’éducation.
On a dû déduire des termes de l’article L. 411-1 que le pouvoir d’ouverture et de fermeture revenait aux directeurs d’école. Il me semble que les choses seraient plus rigoureuses si le texte était explicite.
M. Max Brisson. Le débat parlementaire fait évoluer les positions. En effet, alors que j’étais cosignataire de l’amendement de M. Richard, j’ai défendu une position tout à fait contraire lorsque nous avons débattu de l’amendement de M. Maurey, présenté par Françoise Gatel.
M. Richard a bien raison de dire que le code de l’éducation trouve ici ses limites. Il faut toute la finesse du président de la commission des lois pour interpréter, en s’appuyant sur la jurisprudence, l’article L. 411-1, qui, de mon point de vue, mériterait d’être retravaillé, afin de renforcer le rôle des directeurs d’école. Le Sénat pourrait ainsi faire une utile proposition.
Madame la présidente de la commission de la culture, les débats que nous menons depuis quarante-huit heures donnent tout son sens au groupe de travail que je coanime avec Françoise Laborde sur le rôle du directeur d’école.
Mme Catherine Morin-Desailly. Exactement !
M. Max Brisson. Nos débats montrent que nous devons poursuivre et conclure ces travaux.
M. Olivier Paccaud. Je retire l’amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 43 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’article 3, modifié.
(L’article 3 est adopté.)
Article 3 bis (nouveau)
Le code du travail est ainsi modifié :
1° La sous-section 2 de la section 3 du chapitre VI du titre II du livre II de la première partie est complétée par un article L. 1226-9-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 1226-9-1. – Les dispositions de la présente sous-section s’appliquent en cas de mise en quarantaine au sens du 3° de l’article L. 3131-15 du code de la santé publique. »
2° L’article L. 3314-5 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 3° Les périodes de mise en quarantaine au sens du 3° de l’article L. 3131-15 du code de la santé publique. » ;
3° L’article L. 3324-6 est complété un alinéa ainsi rédigé :
« 3° Les périodes de mise en quarantaine au sens du 3° de l’article L. 3131-15 du code de la santé publique. »
M. le président. L’amendement n° 197, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéas 3, 5 et 7
Après la référence :
3°
insérer la référence :
du I
La parole est à M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 3 bis, modifié.
(L’article 3 bis est adopté.)
Article 4
Au début de l’article L. 3131-18 du code de la santé publique, sont ajoutés les mots : « À l’exception des mesures mentionnées au premier alinéa du II de l’article L. 3131-17, ».
M. le président. L’amendement n° 122, présenté par MM. Leconte, Sueur, Daudigny et Kanner, Mme Rossignol, MM. Jacques Bigot, Durain et Fichet, Mmes de la Gontrie et Harribey, MM. Kerrouche, Marie et Sutour, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin et Meunier, M. Tourenne, Mme Van Heghe, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mme Guillemot, MM. Houllegatte, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mme Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Marie-Pierre de la Gontrie.