M. Jean-Pierre Plancade. J’avoue que je suis très sensible aux arguments de notre collègue Pierre Laurent, même si je conçois que le CSA ne soit pas le cadre adapté.
Je ne voudrais pas que le législateur crée une caste : être membre du CSA, ce n’est pas faire partie d’une caste au-dessus des lois, au-dessus de tout. C’est pourquoi, à titre de « compensation », les conseils d’administration doivent s’ouvrir à l’ensemble des forces productives de ce pays. L’engagement a été pris, et il doit être respecté.
Même si, pour la raison qui a été indiquée, je ne voterai pas cet amendement, l’analyse de fond de ses auteurs est juste et précise. Encore une fois, ne faisons pas du CSA une caste ; ses membres sont des citoyens comme vous et moi !
M. le président. La parole est à M. André Gattolin, pour explication de vote.
M. André Gattolin. En tant qu’écologiste, je suis très attaché à la représentation des téléspectateurs, puisque nous avons nous-mêmes initié un tel processus dans le cadre du projet de loi.
Cela étant, j’admets bien volontiers qu’un membre du CSA devient, suite à sa nomination, un expert. De fait, indépendamment des possibles conflits d’intérêts, un représentant des téléspectateurs n’y a pas sa place. Mieux vaut qu’il siège au sein des conseils d’administration des chaînes.
Nous avons beaucoup réfléchi au sujet. Cela a été l’occasion pour nous de prendre énormément de contacts. Même s’il existe quelques associations de téléspectateurs, elles ne sont pas représentatives de l’ensemble des téléspectateurs, contrairement à ce qui prévaut par exemple aux Pays-Bas, où de tels groupes peuvent compter jusqu’à plusieurs millions d’adhérents.
Pour notre part, nous avons retenu la solution de représentants d’associations de consommateurs agréées à la fois par le ministère de la justice et par le ministère de l’économie et des finances.
Aussi, et en dépit de la justesse des arguments développés par notre collègue Pierre Laurent, dont nous approuvons l’esprit sur le fond, nous ne voterons pas cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Nous reprendrons ce débat lors des nominations de membres du CSA.
En poursuivant la discussion, nous devrions alors définir les contours de la notion de « compétence ». On peut retenir une définition restrictive de ce mot, afin de ne prendre progressivement en considération qu’un certain type de profil de candidats, ceux qui peupleront le CSA ou toute autre autorité indépendante, et à écarter de fait quantité d’expériences et de compétences présentes au sein de la société française, dont nous avons tant besoin, dans ce domaine comme dans beaucoup d’autres. Car c’est justement grâce à de tels profils que le CSA pourrait émettre des avis en toute indépendance. Ses avis seraient ainsi l’émanation de la société dans sa diversité, et non pas d’un certain type d’experts qui s’imposent systématiquement, parfois à la majorité de la société, même quand elle pense différemment d’eux.
Notre proposition ne sera manifestement pas retenue, mais j’espère qu’elle pourra en tout cas nourrir la réflexion future sur la diversité des compétences au sein du CSA.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. David Assouline, rapporteur. Monsieur Plancade, vous demandez un engagement sur la représentation des téléspectateurs au sein des conseils d’administration des sociétés audiovisuelles publiques.
Ce matin, la commission a émis un avis favorable sur deux amendements de Pierre Laurent visant à assurer la représentation des associations de défense des consommateurs, agréées au niveau national, au sein des conseils d’administration de Radio France et de France Télévisions.
Sur le fond, la question des compétences dépasse effectivement le problème de l’usager. Si les deux assemblées doivent parvenir à un consensus dans la désignation des membres, elles porteront leur choix non pas sur des profils non pas politiques, mais techniques. Nous assisterions alors au règne d’acteurs dont les points de vue seraient « admissibles » car neutres, puisque techniques.
Mais la compétence n’est pas tout ! Lorsqu’il désignera différentes personnalités, y compris les présidents de chaîne, le CSA prendra bien sûr en compte leur compétence, leur expérience, mais il devra surtout apprécier leur implication, leur point de vue, leur aura, leur envergure intellectuelle, leur regard culturel, leur volonté de faire preuve de citoyenneté, d’esprit critique… Selon moi, tous ces critères participent de la compétence requise pour bien réguler l’audiovisuel ou pour présider une chaîne de l’audiovisuel public. La technicité que possède un bon chef d’entreprise ou une bonne connaissance de telle ou telle technique ne suffisent pas. Vous l’aurez compris, mes chers collègues, je ne suis pas partisan de ce seul critère.
Être compétent consiste aussi à être capable de traduire le point de vue du téléspectateur. À ce propos, et vous le savez d’ailleurs, tous les jours, le CSA reçoit des milliers de lettres ; celles-ci sont traitées par un service qui prend en compte leur contenu. Le CSA joue donc déjà aujourd’hui un rôle important en la matière.
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour explication de vote sur l'article.
M. Hervé Maurey. Je rappellerai tout d’abord que l’amendement que nous avons déposé tendant à aller plus loin en termes d’indépendance que le Gouvernement pour ce qui concerne l’élection du président du CSA a été repoussé.
D’ailleurs, monsieur le rapporteur, ce n’est pas parce que ce sujet de l’indépendance vous gêne qu’il faut travestir la réalité ! Lors du débat relatif au projet de loi portant sur l’audiovisuel de 2009, j’étais le porte-parole de mon groupe puisque Catherine Morin-Desailly en était rapporteur. Or je n’ai pas le souvenir d’avoir tenu la moindre parole complaisante à l’égard de ce texte.
M. David Assouline, rapporteur. Vous l’avez voté !
M. Hervé Maurey. Je vous invite à relire les propos que j’avais eus à l’époque et qui m’ont d’ailleurs valu d’être fortement sermonné – pour ne pas dire plus – par l’exécutif. Je fais partie de ces rares parlementaires dont le discours ne change pas selon qu’ils sont dans la majorité ou dans l’opposition. Je comprends que cela vous dérange fondamentalement…
Cela étant, je suis quelque peu amusé que vous-même, comme Mme la ministre, essayiez de nous expliquer que le président du CSA n’est pas quelqu’un de très important...
M. David Assouline, rapporteur. Mais si ! Il est nommé par le Président de la République !
M. Hervé Maurey. Le président du CSA ne serait qu’un membre parmi d’autres… Mais à qui allez-vous faire croire cela ?
De surcroît, cet argument est réversible : si cette personnalité n’est pas si importante, pourquoi alors est-elle nommée par le Président de la République ?
De plus, c’est incontestablement elle qui va organiser et mener les débats, préparer et exécuter les délibérations.
Je le répète, ce n’est pas parce que l’on n’est pas d’accord qu’il faut utiliser de mauvais arguments !
Pour toutes ces raisons, nous nous abstiendrons sur l’article 1er du projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Leleux, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Leleux. Les membres du groupe UMP auront la même position.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.
Mme Catherine Morin-Desailly. J’espère que le ton du présent débat ne va pas perdurer ! Je suis choquée des procès d’intention qui nous sont faits quand nous présentons un amendement. J’ai pour habitude de déposer des amendements par conviction. Je me sens responsable de mes propositions. J’aime en débattre avec mes collègues. Je ne prétends pas toujours détenir la vérité, mais je la recherche.
Je trouve parfaitement inadmissible de m’entendre dire que mes propositions sont banales, de posture, de circonstance et que je ne me sens pas responsable de leurs conséquences !
M. Hervé Maurey. C’est discourtois !
Mme Catherine Morin-Desailly. M. le rapporteur me semble en outre assez mal placé pour donner ce genre de leçons. Nous nous souvenons de nombreux débats lors de la mandature précédente au cours desquels il n’était pas forcément lui-même de totale bonne foi…
Je ne fais pas de procès d’intention, alors ne nous en faites pas ! Je ne suis pas agressive ; ne le soyez pas non plus !
J’espère que l’examen de l’ensemble des amendements se déroulera dans la tranquillité, la sérénité et le respect. C’est du reste l’esprit du Sénat. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
L’article 5 de la même loi est ainsi modifié :
1° A (nouveau) (Supprimé)
1° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Sous réserve des dispositions du code de la propriété intellectuelle, les membres du conseil ne peuvent, directement ou indirectement, exercer des fonctions, recevoir d’honoraires, sauf pour des services rendus avant leur entrée en fonction, détenir d’intérêt ou avoir un contrat de travail dans une entreprise de l’audiovisuel, du cinéma, de l’édition, de la presse, de la publicité ou des communications électroniques. Si, au moment de sa nomination, un membre du conseil détient des intérêts ou dispose d’un contrat de travail ou de prestation de services dans une telle entreprise, il dispose d’un délai de trois mois pour se mettre en conformité avec la loi. » ;
2° Le quatrième alinéa est ainsi modifié :
a) (nouveau) Après le mot : « alinéa », est insérée la référence : « ou au cinquième alinéa » ;
b) Les mots : « majorité des deux tiers » sont remplacés par le mot : « majorité » ;
2° bis (nouveau) Après le mot : « questions », la fin du cinquième alinéa est ainsi rédigée : « en cours d’examen. Les membres et anciens membres du conseil sont tenus de respecter le secret des délibérations. » ;
3° L’avant–dernier alinéa est ainsi modifié :
a) À la dernière phrase, les mots : « des deux tiers » sont supprimés ;
b) (nouveau) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée :
« Il cesse également, partiellement ou totalement, dans les mêmes conditions, en cas de manquement aux obligations résultant du cinquième alinéa. » – (Adopté.)
Article 2 bis (nouveau)
Le premier alinéa de l’article 17-1 de la même loi est ainsi modifié :
1° Les mots : « ou de télévision » sont remplacés par les mots : « , de télévision ou de médias audiovisuels à la demande » ;
2° Après les mots : « diversité de programmes, », sont insérés les mots : « des œuvres européennes et d’expression originale française et des offres éditoriales des services de médias audiovisuels à la demande » ;
3° Après les mots : « l’offre de programmes », sont insérés les mots : « et de services ».
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 7 est présenté par Mmes Morin-Desailly et Férat.
L'amendement n° 42 est présenté par MM. Leleux, Legendre, Bordier, Carle et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas et MM. Savin, Soilihi et Vendegou.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour présenter l’amendement n° 7.
Mme Catherine Morin-Desailly. L’article 2 bis confère au CSA un pouvoir de règlement des différends portant sur les services de médias audiovisuels à la demande entre éditeurs et distributeurs.
Or cette disposition fait précisément l’objet d’une question soumise à la consultation publique lancée par le ministère de la culture et de la communication jusqu’à la fin du présent mois pour préparer un projet de loi « exception culturelle 2 » faisant suite notamment aux travaux menés par la mission Lescure.
Sur la forme, à quoi bon recueillir les avis des parties prenantes sur un sujet si les décisions sont déjà prises et imposées par la loi ?
Sur le fond, une telle disposition préjuge les conclusions de cette consultation, en mettant en œuvre un régime juridique spécifique pour les SMAD nationaux à destination des distributeurs de services nationaux, alors que l’on sait bien que, dans ce domaine, les grands acteurs de la distribution sont internationaux, comme iTunes, Amazon, que vous connaissez tous. Ces derniers s’affranchissent par conséquent des règles nationales. Ils échapperont au règlement de différends. Une nouvelle fois, on augmente les contraintes spécifiques aux acteurs français du numérique tout en laissant le champ libre aux acteurs délocalisés.
Pour toutes ces raisons, il est nécessaire de supprimer l’article 2 bis.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Leleux, pour présenter l'amendement n° 42.
M. Jean-Pierre Leleux. Comme vient de le dire Catherine Morin-Desailly, cet article, qui élargit aux services de médias audiovisuels à la demande la compétence du CSA en matière de règlement des différends, anticipe sur la consultation en cours dont les résultats, que nous attendions à la fin de ce mois-ci, ne seront finalement connus que dans le courant du mois prochain.
Légiférer dès à présent semble donc précipité, eu égard aux enjeux de cette concertation et compte tenu du calendrier retenu pour le prochain projet de loi relatif à la création annoncé par le ministère.
En outre, cette disposition ayant été introduite lors des travaux de la commission au Sénat, l’Assemblée nationale ne pourra pas travailler sur ce sujet.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous estimons cette mesure prématurée. Nous en demandons donc la suppression.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. David Assouline, rapporteur. Tout d’abord, le Parlement ne doit pas forcément se sentir tenu par les consultations publiques lancées par le Gouvernement, notamment s’il est convaincu de l’intérêt d’avancer sur une question. C’est d’ailleurs pour cela que le pouvoir législatif est un pouvoir indépendant.
Sans vouloir heurter personne, mais il faut tout de même un minimum de débat et de contradiction, permettez-moi de faire part de deux étonnements sur la forme.
Madame Morin-Desailly, c’est la loi de 2009, dont vous étiez rapporteur, qui a introduit les SMAD dans notre législation et qui a confié au CSA un pouvoir de régulation sur ces services associé d’obligations et de sanctions. Le présent article, très attendu par le secteur, n’est que le prolongement très naturel de ces dispositions.
En outre, l’amendement n° 7 est d’autant plus étonnant que vous avez déposé un autre amendement visant à confier au CSA un très fort pouvoir de contrôle de la concurrence sur le marché des SMAD, sans respect cette fois-ci de la consultation publique lancée par le Gouvernement que vous venez d’évoquer.
Enfin, sur le fond, il me semble intéressant, au vu de l’envergure prise par ces services et de leur importance pour les citoyens, par exemple avec la télévision de rattrapage ou la vente à distance, qu’un principe d’accès non discriminatoire et objectif au marché de la distribution puisse être appliqué. Tel est l’objet du présent article. Sa suppression empêcherait l’expression d’une conviction commune.
Permettez-moi, mes chers collègues, de vous présenter d’ores et déjà l’amendement n° 70 qui tend à supprimer l’alinéa 3 de l’article 2 bis. La commission souhaite permettre au CSA d’étendre son pouvoir de règlement des différends aux SMAD.
Monsieur Leleux, je partage pour partie vos propos : le débat sur le champ de ce pouvoir peut être reporté à une loi ultérieure parce qu’il nécessite plus de précisions et d’échanges.
En revanche, le principe est attendu depuis longtemps. Il découle très naturellement des positions adoptées en 2009. À l’époque, ceux qui s’étaient alors investis dans le travail législatif lié aux nouveautés émergeant avec la révolution numérique ont voulu faire en sorte que le CSA ne soit pas complètement déconnecté. La loi de 2009 était une avancée. Nous nous efforçons de poursuivre en ce sens.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission est défavorable aux deux amendements identiques de suppression.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Aurélie Filippetti, ministre. Cette disposition introduite par la commission est une simple extension logique du pouvoir de régulation qui, à juste titre, avait été confié au mois de mars 2009 au CSA. À l’époque, le CSA ne s’était pas vu octroyer le pouvoir de médiation, de règlement des différends entre les éditeurs et les distributeurs des SMAD parce que l’on avait alors jugé que cette question n’était pas encore mûre. Au bout de quatre années, la maturité est atteinte, le marché existe.
Je rappelle en outre que le règlement des différends par le CSA a fait l’objet de deux rapports successifs : celui de Patrick Zelnick et celui de Sylvie Hubac sur le développement de l’offre légale en ligne. Nous sommes donc pleinement dans cette logique qui consiste à continuer d’améliorer l’offre légale en ligne. Il est par conséquent tout à fait opportun de vouloir étendre le pouvoir de règlement des litiges du CSA aux différends entre les éditeurs et les distributeurs des SMAD, ce qui permettra la poursuite du développement serein du marché.
Les précédents orateurs l’ont rappelé : depuis le 9 septembre dernier, une consultation publique relative à la distribution des services audiovisuels, menée sous l’égide du ministère de la culture et de la communication, est lancée. Or la disposition retenue par la commission n’en préjuge en rien les conclusions puisqu’elle ne remet nullement en cause l’équilibre entre les distributeurs et les éditeurs. Aucune contrainte nouvelle ne leur est imposée. Le dispositif de l’article 17-1 de la loi du 30 septembre 1986 reste inchangé. L’amendement n° 70, présenté par la commission, permet aussi de veiller à ce maintien.
En outre, puisque l’articulation des prérogatives entre l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, ou ARCEP, et le CSA est bien entendu maintenue, le CSA demeure l’arbitre des conflits entre les distributeurs, par exemple pour ce qui concerne les box des fournisseurs d’accès à Internet, et les éditeurs de services de communication audiovisuelle, et ne traitera en aucun cas des conflits qui peuvent être liés à l’accès des services à la demande au réseau Internet.
Par conséquent, la proposition du rapporteur est l’extension logique des compétences du CSA découlant d’une disposition de la loi de mars 2009 qui arrive maintenant à maturité. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 7 et 42.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 70, présenté par M. Assouline, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. le rapporteur.
M. David Assouline, rapporteur. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 2 bis, modifié.
(L'article 2 bis est adopté.)
Article 2 ter (nouveau)
Après l’article 17–1 de la même loi, il est inséré un article 17–2 ainsi rédigé :
« Art. 17–2. – En cas de litige et avec l’accord des parties, le Conseil supérieur de l’audiovisuel assure une mission de conciliation entre éditeurs de services et producteurs d’œuvres audiovisuelles ou leurs mandataires. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 71, présenté par M. Assouline, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Après le quatrième alinéa de l'article 3-1 de la même loi, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de litige et avec l’accord des parties, le Conseil supérieur de l’audiovisuel assure une mission de conciliation entre éditeurs de services et producteurs d’œuvres ou de programmes audiovisuels ou leurs mandataires, ou les organisations professionnelles qui les représentent. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. David Assouline, rapporteur. Le présent amendement a un triple objet.
Il tend d’abord à déplacer la nouvelle mission de conciliation du CSA prévue à l’article 2 ter du présent projet de loi de l’article 17-2 à l’article 3-1 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, afin d’insérer cette nouvelle mission au sein de l’article relatif aux missions générales du CSA.
Il vise ensuite à étendre le champ de la conciliation aux programmes autres que les œuvres audiovisuelles, c’est-à-dire aux programmes de flux tels les magazines ou les jeux.
Il a enfin pour objet de préciser qu’un syndicat de producteurs ou de distributeurs peut être partie au litige, ce qui répond aux inquiétudes des uns et des autres. J’ai déjà défendu cette mesure tout à l’heure et soutenu que des collectifs, des syndicats pouvaient solliciter le médiateur, et pas seulement les protagonistes individuellement, qu’ils soient producteurs ou éditeurs.
M. le président. L'amendement n° 43 rectifié, présenté par MM. Leleux, Legendre, Bordier, Carle et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas et MM. Savin, Soilihi, Vendegou et Béchu, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. 17-2. - En cas de litige et avec l'accord des parties, le rapporteur visé à l'article 42-7 propose les services d'un médiateur, indépendant des fonctions de sanction du conseil, entre professionnels du secteur : éditeurs de services, producteurs d'œuvres audiovisuelles ou leurs mandataires, distributeurs, ou les organisations professionnelles qui les représentent. »
La parole est à M. Jean-Pierre Leleux.
M. Jean-Pierre Leleux. L'article 2 ter adopté en commission constitue une avancée significative sur la difficile question de la circulation des œuvres. Comme l’avait fait au printemps dernier le rapport d’information du sénateur Jean-Pierre Plancade, est reconnue la nécessité d’institutionnaliser, pour lui donner force de loi, la fonction de médiateur pour la circulation des œuvres, instituée à titre expérimental en 2011.
Toutefois, le dispositif, tel qu’il nous est proposé, ne répond pas totalement à l’objectif affiché en commission. Ainsi la notion de « conciliation » est-elle différente de celle de « médiation » qui se situe, elle, en amont de toute procédure.
Confier cette mission au CSA pose un réel problème de compatibilité avec les préconisations de la Cour européenne de justice, qui impose une stricte séparation entre les fonctions d’instruction et de sanction. Or une conciliation menée par des services placés sous l’autorité hiérarchique du CSA ne peut pas être compatible, en cas d’échec, avec la procédure de sanction que la loi a confiée au Conseil. Il convient, en conséquence, de désigner un médiateur, rattaché administrativement au président du CSA, mais indépendant hiérarchiquement de la direction générale et des services. C’est ainsi qu’a d’ailleurs été menée l’expérimentation.
Un rapporteur indépendant étant chargé, par le présent projet de loi, de la fonction d'instruction, le déclenchement de cette procédure de médiation semble devoir lui revenir naturellement en amont de son instruction.
M. le président. L'amendement n° 2 rectifié, présenté par Mmes Morin-Desailly et Férat et M. J.L. Dupont, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après les mots :
Conseil supérieur de l’audiovisuel
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
propose les services d’un médiateur, indépendant des fonctions de sanction du conseil, entre professionnels du secteur, notamment les éditeurs de services de télévision, les producteurs d’œuvres audiovisuelles ou leurs mandataires et les distributeurs
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Je ne reviendrai pas sur les explications de M. Leleux, puisque j’ai largement exposé un point de vue identique lors de la discussion générale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 43 rectifié et 2 rectifié ?
M. David Assouline, rapporteur. Mon explication sera globale, d’autant que l’exposé des motifs de ces deux amendements est quasiment rédigé dans les mêmes termes. Auriez-vous mutualisé vos assistants, mes chers collègues ?... (Sourires.)
Dans son rapport d’information, Jean-Pierre Plancade évoquait l’institutionnalisation d’un médiateur de la circulation des œuvres, sans donner plus de précision. Nous soutenions cette proposition. Mais après consultation des différents acteurs, il paraît plus pertinent que les en cause questions soient portées à la connaissance du collège du CSA, plus à même d’avoir une vision d’ensemble et équilibrée de la problématique de circulation des œuvres qu’une seule personne. C’est également l’avis des producteurs eux-mêmes, selon lesquels la connaissance, par le collège, des pratiques des chaînes peut être intéressante pour l’exercice de ses autres missions.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements.
Je rappelle néanmoins que, sur cette question de la circulation des œuvres et des rapports entre éditeurs et producteurs, un relatif consensus s’est dégagé au sein de la commission afin que la situation évolue.
Au stade où nous en sommes, nous sommes parvenus à un bon équilibre. Mais beaucoup d’autres éléments devront figurer dans une future loi concernant ce sujet. Il ne faut pas octroyer à un médiateur un pouvoir qui est actuellement confié au CSA.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 71, 43 rectifié et 2 rectifié ?
Mme Aurélie Filippetti, ministre. La procédure de conciliation proposée ne pose aucune difficulté juridique au regard de la séparation des pouvoirs d’instruction et de sanction. En l’occurrence, le CSA n’imposera pas de sanction à la suite de cette conciliation ; son rôle consistera à inciter le dialogue entre les parties.
D’ailleurs, si la séparation des pouvoirs était en cause, j’aurais émis un avis favorable sur les amendements nos 43 rectifié et 2 rectifié sans autre condition, puisque l’objet du texte lui-même est d’instaurer une séparation des pouvoirs au sein du CSA en prévoyant un rapporteur indépendant.
En l’espèce, point n’est besoin d’un médiateur extérieur au CSA. Au contraire, la collégialité du Conseil est intéressante, dans la mesure où elle favorisera le dialogue entre les éditeurs et les producteurs ou leurs représentants, les syndicats, c’est-à-dire leurs mandataires. Évoquer ces derniers, à l’instar de M. le rapporteur dans son amendement, permet d’inclure les distributeurs sans qu’il soit nécessaire de les nommer.
De plus, l’amendement n°71 permet d’étendre la possibilité d’engager une conciliation, non plus seulement pour les différends qui peuvent naître sur les œuvres, mais également sur les émissions de flux, ce qui est extrêmement important.
Pour cette raison, je suis favorable à l’amendement n°71 et défavorable aux amendements nos 43 rectifié et 2 rectifié.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote sur l’amendement n° 71.