Mme Catherine Morin-Desailly. Je trouve regrettable que soient seulement cités, dans l’amendement n°71, les conflits entre éditeurs et producteurs sans aucune autre précision. Or il peut exister des conflits entre éditeurs ou encore entre ceux-ci et les distributeurs et il me semble important que la loi le précise.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Leleux, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Leleux. Nous sommes tous d’accord sur cette mission de conciliation ou de médiation, tout en ayant à l’esprit la nuance qui peut exister entre ces deux notions. Mais nous préférons notre rédaction, dans la mesure où elle permet d’expliquer clairement que cette médiation fait partie de la mission du rapporteur en amont de son instruction du litige : le CSA ne doit pas considérer cette mission de conciliation en tant que futur sanctionneur ; il doit donner au rapporteur, qui sera créé à l’article suivant, la mission de confier une médiation à quelqu’un. Cette nuance nous paraît importante.
M. le président. En conséquence, l’article 2 ter est ainsi rédigé, et les amendements nos 43 rectifié et 2 rectifié n’ont plus d’objet.
Articles additionnels après l'article 2 ter
M. le président. L'amendement n° 28, présenté par M. P. Laurent, Mme Gonthier-Maurin, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 2 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La première phrase du 3° de l’article 27 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée est ainsi rédigée :
« La contribution des éditeurs de services au développement de la production indépendante telle que définie à l’article 71-1, d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles, ainsi que la part de cette contribution, dans la limite de 50 % du financement consacré à la production, ou le montant affectés à l’acquisition des droits de diffusion de ces œuvres sur les services qu’ils éditent, en fixant, le cas échéant, des règles différentes pour les œuvres cinématographiques et pour les œuvres audiovisuelles et en fonction de la nature des œuvres diffusées et des conditions d’exclusivité de leur diffusion. »
La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. Cet amendement tend à traduire dans la loi l’une des préconisations du rapport d’information n° 616 sur les relations entre les producteurs audiovisuels et les éditeurs de services de télévision que nous avons récemment adopté, élaboré sur l’initiative de Jean-Pierre Plancade. Nous avions soutenu la démarche de notre collègue et l’essentiel de ses recommandations.
La question de la part de financement consacrée à la production indépendante ainsi que celle des contreparties en termes de possession des droits sur cette production doivent être examinées. Les dispositions actuelles se révèlent inappropriées, voire dangereuses, pour l’audiovisuel public. Alors que ce constat semble largement partagé, la révision de ces dispositions tarde à venir.
C’est pourquoi, par le biais du présent amendement, nous essayons de faire avancer la situation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. David Assouline, rapporteur. Cette proposition n’a pas véritablement été envisagée dans le rapport de M. Plancade. A été évoquée l’idée d’abaisser le quota de production indépendante, mais non d’en fixer un pour la production dépendante.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin et M. Michel Le Scouarnec. Il n’a rien précisé !
M. David Assouline, rapporteur. Ce rapport, que j’ai lu, posait le problème de façon différente, même si l’on peut, en fixant ce qui relève de l’indépendance, déduire la production dépendante.
Par ailleurs, je connais bien le modèle de la BBC, pour avoir, avec d’autres membres de la commission, examiné son fonctionnement. Et, à notre retour, nous nous étions unanimement étonnés du fait que le modèle français soit quelque peu contradictoire, dans la mesure où le service public de l’audiovisuel, qui pourrait beaucoup investir dans des œuvres et autres productions, n’a aucune part dans cette production.
Je souligne à l’intention de M. Pierre Laurent que, lorsque l’on traite de ce sujet, il ne suffit pas de légiférer pour l’audiovisuel public. Les grands patrons de l’audiovisuel privé sont eux aussi attentifs à cette question ! Dans le conflit susceptible d’opposer producteurs et éditeurs, il faut que les pouvoirs publics, notamment le Parlement, incitent les uns et les autres à parcourir une partie du chemin, pour qu’ils puissent se rencontrer. Ainsi, l’ensemble des intérêts seront défendus.
En ouvrant ce débat, M. Plancade, a suscité un réel émoi. À nos yeux, il faut évoluer dans ce sens, mais au terme d’une concertation. Il faut garantir un donnant-donnant entre éditeurs et producteurs.
Mes chers collègues, je tiens surtout à dresser le constat suivant, car je sais que ce débat se prolongera à travers d’autres amendements : le rapport Plancade soulève des problèmes majeurs, au titre desquels une mission doit précisément remettre ses travaux à la fin du mois de novembre, pour que tout se passe au mieux en permettant à tous les acteurs d’avancer ensemble. On ne peut pas, via un simple amendement, anticiper les débats que susciteront les conclusions de cette mission, sans que l’Assemblée nationale se prononce ! Sur des débats de cette importance, les députés ont tout de même leur mot à dire ! Je rappelle que le présent projet de loi est examiné selon la procédure accélérée.
Il ne s’agit pas de repousser cette question de deux ans ou plus, en enterrant ainsi le rapport de M. Plancade et les travaux de la mission Vallet. Pas du tout ! Nous sommes tous déterminés à aller vite, Mme la ministre au premier chef. Dès le prochain véhicule législatif, il faut donc faire en sorte de présenter les propositions les plus apaisantes possible – même si l’accord ne sera sans doute pas unanime – pour l’ensemble des acteurs, éditeurs et producteurs compris.
Cette réponse vaut pour tous les amendements déposés à ce titre. En l’espèce, l’amendement de M. Pierre Laurent tend à mettre en œuvre une disposition assez maximaliste, même au regard des propositions renfermées dans le rapport !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Aurélie Filippetti, ministre. À l’heure actuelle, un travail confié à Laurent Vallet, directeur général de l’Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles, l’IFCIC, est effectivement en cours. Cette mission porte précisément sur les relations entre les producteurs et les chaînes de télévision. Elle permettra de travailler dans une large concertation avec l’ensemble des professionnels, sur le rapport entre, d’une part, les investissements des chaînes dans telle ou telle production et, de l’autre, les droits d’exploitation que lesdites chaînes détiennent sur ces œuvres.
Sur un sujet aussi sensible, il me semble sain que la chronologie de nos travaux respecte cette étude, qui doit s’achever avant la fin de cette année. Je le répète, ses conclusions nous permettront de travailler par la suite à ces bons équilibres. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement no 28.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Plancade, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Plancade. On parle fréquemment du « rapport Plancade ». Je souligne à cet égard que ce document ne se dénomme plus ainsi dans la mesure où il a été présenté puis adopté par la commission avec des modifications !
Monsieur le rapporteur, c’est vrai que je n’ai pas fixé un seuil à 50 %. Cela étant, le présent amendement a trait à un problème majeur pour le financement du service public. Il ne s’agit pas simplement de ce dernier, j’en conviens. Mais je parlerai avant tout de l’audiovisuel public, car c’est ce dernier qui m’intéresse avant tout.
Il faut tout de même expliquer ce qui se passe actuellement. L’amendement présenté par Pierre Laurent n’est pas tombé du ciel, par hasard. Il soulève un réel problème. Je le souligne, même si je ne suis pas d’accord avec le taux qu’il tend à instituer.
Mes chers collègues, quel est le véritable problème ? Chacun de nous le sait, mais il est tout de même préférable de l’expliquer. Aujourd’hui, lorsque le groupe France Télévisions commande une œuvre à un producteur, il lui en paye 80 %, voire 90 %, mais la réalisation ne lui appartient pas. Elle reste la propriété du producteur. France Télévisions prend le risque de la distribuer et d’en faire le succès, mais n’a que le droit de l’utiliser pendant deux ou trois ans.
M. André Gattolin. Très exactement quarante-deux mois !
M. Jean-Pierre Plancade. Merci, mon cher collègue, de cette précision.
En fait, cet argent, totalement public, ne sert qu’à financer un secteur privé. Ce dispositif a été nécessaire en son temps : je ne dénigre pas les mesures passées ! Nous n’en vivons pas moins dans une autre époque. Je ne comprendrais pas qu’à l’issue de nos débats – ce soir ou demain – nous quittions cet hémicycle sans nous être entendus sur un modus vivendi ou, tout au moins, sans avoir exprimé notre détermination face à la nécessité absolue de résoudre ce problème.
Madame la ministre, on nous dit d’attendre le rapport Vallet. On nous dit : « On réglera ce problème demain. » Or demain, c’est à proprement parler demain ! Je vous le fais observer on ne peut plus calmement : aujourd’hui, il est de notre responsabilité d’hommes politiques de garantir toute l’éthique nécessaire dans les pratiques à l’œuvre depuis vingt ans au sein du service public.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Voilà !
M. Jean-Pierre Plancade. Je ne voterai pas cet amendement, même si je comprends la position maximaliste défendue par Pierre Laurent et ne la condamne pas. À mon sens, sur toutes les travées de cet hémicycle, nous pouvons, d’ici à la fin de nos débats, adopter un amendement permettant sinon d’éradiquer définitivement les phénomènes aujourd’hui à l’œuvre, du moins de lutter contre eux. Ces derniers pénalisent le service public et, surtout, constituent un handicap à la création comme à la distribution de l’activité culturelle française.
M. David Assouline, rapporteur. N’allons pas trop loin !
M. Jean-Pierre Plancade. Quand on parle de l’exception culturelle française, il faut garder à l’esprit que les textes régissant aujourd’hui notre audiovisuel public ne sont pas en mesure de la garantir ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC. - M. André Gattolin applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Monsieur le rapporteur, vous affirmez que ce débat a suscité de l’émoi. Mais l’émoi était déjà là auparavant ! Le groupe France Télévisions consacre 20 % de son chiffre d’affaires au financement de productions au titre desquelles il n’a aucun retour en termes de droits. Il ne s’agit pas d’un petit problème pour l’avenir du service public !
Vous avancez que cet enjeu concerne également le secteur privé. Nous sommes d’accord. Mais les rapports actuels avec la petite production privée ne sont sains pour personne ! Il convient donc de revoir ce système dans la durée. Les grands éditeurs français eux-mêmes devraient se poser la question car, si rien n’est fait, toute la petite production que nous avons développée finira par être rachetée, et non par des éditeurs français. Dès lors, nous achèterons des programmes à des producteurs étrangers que nous avons nous-mêmes alimentés des années durant. (M. Michel Le Scouarnec acquiesce.)
La question de la défense de notre système productif audiovisuel est posée. Nous avons choisi un modèle voilà de nombreuses années, du temps de l’ORTF et des grandes chaînes. Mais nous avons abandonné la SFP, la Société française de production,…
M. David Assouline, rapporteur. On ne peut pas la reconstruire !
M. Pierre Laurent. … à l’issue d’un choix industriel, et nous avons opté pour un autre modèle que celui de la BBC.
Aujourd’hui, ce système nous met en difficulté. Il devient urgent de s’attaquer à ce problème global, qui touche particulièrement le service public. Peut-être le taux proposé via le présent amendement est-il maximaliste. J’en assume la responsabilité. Je suis prêt à débattre de ce sujet, à condition toutefois que nous discutions de propositions de substitution ! Il ne faut pas nous dire : « Il existe un problème très grave, et nous allons peut-être le traiter. » Si le taux que je propose n’est pas le bon, débattons d’autres seuils, d’autres systèmes, bref discutons sérieusement de ce problème et débouchons rapidement sur des solutions !
M. le président. La parole est à M. André Gattolin, pour explication de vote.
M. André Gattolin. Madame la ministre, je n’ai pas pour réputation d’être un grand ami des producteurs privés, et les auditions menées par notre commission l’ont confirmé.
Certes, le rapport Vallet est en cours d’élaboration. Toutefois, il ne faut pas qu’une commission d’experts annule le travail parlementaire accompli ! De fait, nous ne sommes pas allés cueillir les pâquerettes ! (Sourires.)
M. Jean-Pierre Plancade. Ça, c’est vrai !
M. André Gattolin. Nous avons mené un grand nombre d’auditions, et non des moindres. Certaines personnalités interrogées s’y sont exprimées pour la première fois. Plusieurs producteurs ont, notamment, énoncé des vérités que l’on tait généralement, de peur d’être ostracisés. C’est une réalité.
Je ne soutiendrai pas le présent amendement car, ainsi isolée, une telle disposition ne fait pas sens. Je suis d’accord avec tout ce qu’a dit Pierre Laurent, notamment pour ce qui concerne les producteurs privés. Néanmoins, M. le rapporteur l’a rappelé avec raison, il va falloir engager une négociation ! Si le service public dispose de droits sur les productions qu’il contribue à financer, il faut commencer à débattre de l’exclusivité des droits de production.
Aujourd’hui, avec des exclusivités qui durent quarante-deux mois, les productions sont parfois gelées par les chaînes.
M. David Assouline, rapporteur. Eh oui !
M. André Gattolin. Il faut bien l’avouer, on observe en la matière un problème de gouvernance et de gestion de la part de France Télévisions distribution. Cette filiale est censée vendre des programmes, mais elle affiche des pertes, elle ne vend rien ! Cette situation est surréaliste !
Il va falloir aboutir à un équilibre. J’espère que le rapport Vallet et les propositions qui en découleront ouvriront la voie à une véritable collaboration entre le Parlement et le Gouvernement. À cet égard, il ne faut pas avoir peur du lobby des producteurs privés. Ne le cachons pas : aujourd’hui, à travers les décrets Tasca, certains ont bénéficié d’un interstice né de l’effondrement de la Société française de production et du service public !
Dans le cadre des auditions menées sous l’égide de David Assouline, tous les producteurs des chaînes de télévision nous ont affirmé qu’il était aujourd’hui impossible de créer, pour les entreprises télévisuelles, une dynamique uniquement fondée sur la diffusion. Il faut être à la fois diffuseur et producteur de programmes. C’est le modèle qui fonctionne en Grande-Bretagne, aussi bien dans le public, avec la BBC, que dans le privé, avec ITV. Si l’on n’est pas fabricant, producteur et revendeur de ses propres programmes tout en étant diffuseur et vendeur de publicité ou d’abonnements, à terme, le modèle économique ne fonctionne pas.
Il nous faut débattre de cette question. Quoi qu’il en soit, nous ne nous contenterons pas des conclusions du beau rapport qui nous sera présenté par M. Vallet. Une discussion spécifique sera nécessaire, qui impliquera des concessions de part et d’autre. Dans ce cadre, le service public devra, lui aussi, être à la hauteur des exigences.
M. Jacques-Bernard Magner. Bravo !
M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot, pour explication de vote.
Mme Colette Mélot. Le système de régulation française a été régi par deux principes : d’une part, obliger les chaînes à investir dans la fiction – ce rappel a déjà été formulé – et, de l’autre, les empêcher d’être propriétaires desdites œuvres. Ce mécanisme était censé protéger les petits producteurs indépendants, à l’époque où la France ne comptait que quelques chaînes gratuites.
Or ce système a engendré des effets pervers. Il a favorisé des sociétés de production étrangères. Il a enrichi quelques gros producteurs. Cependant, il n’a ni servi la qualité des œuvres ni favorisé l’exception culturelle.
Pour ce qui concerne la création de marques de flux, la France finit bonne dernière. Il faut absolument y remédier. Cela étant, je ne voterai pas le présent amendement, car ce n’est pas au détour d’une telle discussion que nous pourrons traiter d’un sujet si important. Peut-être Mme la ministre pourra-t-elle émettre, à ce propos, un signal au cours de nos discussions… Ce problème pourra sans doute être examiné avec beaucoup plus de précision au cours des mois à venir.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. David Assouline, rapporteur. Je voudrais faire une clarification. J’ai porté à deux reprises ce sujet en place publique, devant les producteurs et les cinéastes, notamment à Biarritz, en provoquant un certain émoi. Je suis allé défendre cette idée devant ceux qui la trouvait désagréable. On ne peut donc pas diviser cette assemblée entre ceux qui chercheraient à bloquer cette évolution et les autres.
C’est à la suite de mes interventions qu’une mission a été confiée à M. Plancade, qui, dans son rapport, après un important travail, a émis certaines conclusions.
Le système ancien a eu ses avantages, que je rappelle pour ceux qui l’ignoreraient. Quand un terme a été mis à l’ORTF, on a pensé que la création audiovisuelle allait être encouragée par une multitude d’offres, autour des nombreuses sociétés de production qui se sont alors développées, et qu’il fallait favoriser ce processus, notamment par les décrets Tasca, afin que la diversité culturelle puisse prendre tout son essor.
Nous en sommes d’accord, ce dispositif trouve aujourd’hui ses limites. Non seulement des producteurs se sont « engraissés » grâce à l’argent public et ont refusé tout retour pour le service public ou les chaînes privées qui les financent. Mais encore, la contrepartie dont disposent les éditeurs, c'est-à-dire les chaînes, est le blocage de la circulation des œuvres. Or certes un auteur est rémunéré par la chaîne qui a acheté son œuvre, mais il a également envie que celle-ci soit regardée ; il ne comprend pas pourquoi France Télévisions, ou une chaîne, en vertu de ce pouvoir de blocage, fait en sorte qu’elle ne circule pas durant quarante-deux mois, avant de devenir obsolète.
Mon cher collègue, vous voulez permettre à l’audiovisuel public, c'est-à-dire aux chaînes, de recevoir une contrepartie à leur investissement, c’est louable, mais vous ne réglez qu’une partie du problème, car les producteurs et les auteurs, ceux qui créent, sont aussi confrontés à un éventuel blocage de leurs œuvres par les éditeurs.
Ne légiférons pas unilatéralement, à la va-vite, sans que l’Assemblée nationale en débatte. Encourageons la négociation qui nous offre une solution pour légiférer en tenant compte des intérêts des deux parties, dans une logique de donnant-donnant. Permettons aux éditeurs d’obtenir les parts de production, et aux producteurs, la circulation des œuvres.
Par ailleurs, d’aucuns soutiennent, alors que les décrets Tasca s’appliquent depuis longtemps, que si le système proposé n’est pas mis en place dans le mois, il ne le sera jamais. Non ! Nous avons lancé le débat public à Biarritz ; la commission a tout de suite mandaté M. Plancarde, dont le rapport fait consensus ; Mme le ministre a confirmé qu’il fallait aller dans ce sens et a immédiatement nommé M. Vallet en lui demandant de rendre ses conclusions à la fin du mois de novembre, afin que les conséquences en soient tirées dans le futur projet de loi portant sur la création, qui sera soumis à la fin du mois de décembre au conseil des ministres. Il s’agit donc de progresser sur ce sujet dans des délais rapides.
Dans l’intervalle, les deux parties, éditeurs et producteurs, doivent se mettre d’accord. Une fois la loi adoptée, des décrets d’application seront pris.
Continuons à progresser dans cette voie sans créer de déséquilibre en inscrivant tout de suite dans la loi une disposition qui ne concernerait que les producteurs. Respectons la logique du donnant-donnant. Je ne veux pas instaurer un désavantage à l’égard de l’une des parties lors de la négociation à venir.
Mon avis est par ailleurs indépendant de la question du taux. À ce sujet, le taux de 75 %, proposé par M. Plancade, me semble acceptable, car il est moins déstabilisant que celui de 50 %.
En conclusion, je suis donc d’accord sur le principe, mais je demande que le système ne soit pas mis en place au cours de l’examen d’un texte selon la procédure accélérée, avec une seule lecture au Sénat, avant que la mission rende ses conclusions. De surcroît, il convient d’évaluer les contreparties en matière de circulation des œuvres que les producteurs voudront obtenir pour prix de leur effort.
M. le président. Monsieur Laurent, l'amendement n° 28 est-il maintenu ?
M. Pierre Laurent. Eu égard aux arguments exposés sur le taux et la précipitation, je le retire, monsieur le président. Cependant, j’espère que les paroles prononcées dans cette enceinte faisant état de la volonté d’avancer rapidement sur cette question ne resteront pas que des mots…
M. Jean-Pierre Plancade. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 28 est retiré.
L'amendement n° 10 rectifié, présenté par Mme Morin-Desailly, est ainsi libellé :
Après l'article 2 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I- À la deuxième phrase du 5° bis de l’article 28 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, les mots : « à l'exception des messages publicitaires » sont supprimés.
II- Cette nouvelle application est à la charge des annonceurs.
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Tirant les conclusions de nos travaux en commission, j’ai amélioré la rédaction de mon amendement initial. Le présent amendement porte sur l’obligation de sous-titrage des messages publicitaires.
L’Association des agences-conseil en communication, l’AACC, a étudié, à la demande des associations, la possibilité de sous-titrer les messages publicitaires grâce aux nouvelles technologies. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel a reçu l’AACC en audition et approuvé cette initiative.
Il convient donc de supprimer du paragraphe 5 bis de l’article 28 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 l’exclusion de la publicité introduite dans ce texte à l’occasion de l’adoption de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.
Cette nouvelle application de la loi sera à la charge des annonceurs.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. David Assouline, rapporteur. Je constate que le débat en commission a porté ses fruits ! Nous avions bataillé sur le sujet très important du sous-titrage des émissions à destination des personnes handicapées. Un problème demeure : la publicité n’est pas concernée.
Certains, qui n’aiment pas trop la publicité, se réjouissent que certains publics soient épargnés par certains messages qui ne sont pas de très grande qualité culturelle. (Sourires. – Mme Sophie Primas s’exclame.)
Ce matin, madame Morin-Desailly, vous proposiez que le sous-titrage des messages publicitaires soit à la charge de l’audiovisuel public. Vous proposez maintenant, sur mon incitation, que les publicitaires assument cette dépense, ce qui me semble logique.
Certes, faire peser une telle obligation sur l’ensemble du secteur de l’audiovisuel ne me paraît pas scandaleux, mais formuler cette proposition tardivement me semble un peu cavalier, alors que personne n’en connaît l’impact, eu égard à l’état du marché, au cadre, aux contraintes, ni même le coût, que je n’ai pas évalué.
Je suis vraiment favorable à ce que les personnes handicapées disposent des mêmes possibilités de lecture de tous les messages. À mon sens, cependant, la priorité de cette assemblée n’est pas de leur permettre de déchiffrer des messages commerciaux à longueur d’onde. Je m’en remets donc à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Aurélie Filippetti, ministre. Bien entendu, les personnes handicapées ne doivent être victimes d’aucune discrimination. La loi de 2005 le rappelle d’ailleurs. À ce propos, nous travaillons sur l’accessibilité aux monuments historiques comme aux salles de cinéma, afin que tout soit prêt d’ici à 2015.
Cela étant, je ne suis pas sûre que ne pas avoir accès à la publicité soit constitutif d’une discrimination (Mme Sophie Primas s’exclame.), dans la mesure où les téléspectateurs n’ont pas pour désir premier, lorsqu’ils regardent la télévision, de prendre connaissance de la publicité, qu’ils subissent.
En outre, bien évidemment, les charges liées au sous-titrage ne devraient en aucun cas reposer sur le service public. Vous proposez, madame le sénateur, que les annonceurs les assument, alors que la conjoncture économique n’est pas facile.
Pour toutes ces raisons, je m’en remets également à la sagesse du Sénat.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Une personne handicapée est un consommateur comme un autre ; elle a le droit d’être également soumise à l’impact publicitaire. On peut considérer que ce n’est pas une chance, mais ce n’est pas à nous d’en décider ! Il ne nous revient pas de définir ce qui est bien et ce qui ne l’est pas. Peut-être d’ailleurs est-ce nous, personnes valides soumises à la publicité, qui sommes handicapées…
Ce registre n’est pas le bon. Il faut rendre accessible la publicité. Néanmoins, je m’abstiendrai lors du vote sur le présent amendement en raison d’un argument évoqué par M. le rapporteur et que je fais mien – vous voyez, tout arrive ! –, concernant les conséquences financières inconnues de cette mesure sur les annonceurs.
Je m’inscris en faux, cependant, sur un autre de vos commentaires, monsieur le rapporteur : une création publicitaire peut avoir une grande valeur artistique ; de grands metteurs en scène réalisent de très bons écrans publicitaires, qui peuvent aussi relever du domaine de l’art.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour explication de vote.
Mme Corinne Bouchoux. Je partage souvent le point de vue de Mme Morin-Desailly, mais s’agissant de la publicité, qui, pour notre famille politique, constitue une nuisance en soi, poussant à l’hyperconsommation, ce ne sera pas le cas.
Nous faisons traduire systématiquement toutes nos manifestations et toutes nos activités par des personnes pratiquant la langue des signes. Dieu sait si nous sommes attachés à la défense des droits de tous et hostiles à toute discrimination, mais faire de la publicité à la publicité en la sous-titrant, indépendamment de la question du coût, je ne peux pas m’y retrouver !
Vous comprendrez bien que les écologistes ne puissent pas cautionner une démarche d’apologie de la société de consommation. L’intention de lutter contre une discrimination est louable, mais le support ne nous convient pas.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote