M. le président. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, pour explication de vote.
M. Thani Mohamed Soilihi. Je vais dire à mon tour quelques mots au sujet de la réserve parlementaire, faute de quoi je serais bien le seul à ne pas m’être exprimé à ce propos cet après-midi. (Sourires.)
Mes chers collègues, vous vous attendez sans doute à ce que je vous dise que, comme dans tous les domaines, la réserve parlementaire, ce n’est pas du tout la même chose à Mayotte qu’ailleurs. Eh bien, pour la première fois, je vous l’affirme, c’est pareil ! Même opacité, mêmes difficultés pour la répartir, mêmes fantasmes : les communes et les citoyens s’imaginent que nous avons des millions à distribuer. Voilà pourquoi je suis tout à fait pour ces amendements, que je vais voter afin qu’il y ait plus de transparence et que ce dispositif suscite moins de polémiques.
Maintenir la réserve parlementaire est une nécessité face aux énormes difficultés auxquelles se heurtent les collectivités, notamment les communes de mon département. La supprimer serait à mon sens une erreur.
M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote.
M. Michel Mercier. Je dirai juste quelques mots.
Nous sommes tous d’accord pour voter ces amendements. Je rappelle simplement que les parlementaires ne « distribuent » rien : systématiquement, c’est un arrêté du ministre compétent qui attribue tels crédits à telle commune, à telle association ou à tel établissement public. Il est donc très facile de connaître les destinataires de la réserve parlementaire : il suffit de lire la loi de règlement !
M. Éric Doligé. Mais certains ont deux fois plus de crédits que les autres dans leur département !
M. Michel Mercier. À cet égard, je souscris aux propos de M. Richard : c’est dans la loi de règlement que doivent être publiés, en détail, tous les crédits attribués au titre de la réserve parlementaire.
Je me souviens avoir étudié, naguère, la réserve parlementaire, avec les collaborateurs qui travaillaient sur ce sujet au sein de la commission des finances du Sénat. À cette occasion, j’avais constaté que ces financements n’étaient pas tous consommés, quand bien même ils avaient été attribués. Il faut bien l’avoir à l’esprit ! On parle beaucoup de la réserve parlementaire, on se bat pour l’avoir, puis, bien souvent,…
M. Alain Richard. On la laisse passer !
M. Michel Mercier. … on oublie de la réclamer ! Il suffit de regarder la loi de règlement pour voir que ces fonds ne sont pas utilisés dans leur intégralité.
M. Roger Karoutchi. C’est vrai !
M. Michel Mercier. Bref, au sujet de ces amendements, je conclurai en disant que c’est très bien, mettons tout sur la table, et nous verrons bien si quelque chose change ! Mais essayons de ne pas nous faire trop peur avec cette affaire : il s’agit de petites sommes, attribuées ici ou là. Parfois, les travaux ne sont jamais menés – je me souviens du stade de Labattoir à Mayotte, par exemple, même s’il ne s’agissait pas en l’occurrence de la réserve parlementaire mais de crédits directs du ministre de l’outre-mer.
En tout état de cause, les parlementaires auront toujours la possibilité d’intervenir auprès des ministres compétents, notamment auprès du ministre de l’intérieur, pour obtenir une subvention au titre des travaux divers d’intérêt local. Ces dotations représentent des montants bien supérieurs à ceux de la réserve parlementaire !
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Hyest. On n’a pas encore épuisé le sujet ?
M. Claude Domeizel. Mes chers collègues, je serai très bref.
Premièrement, nous parlons depuis une bonne heure de fonds publics, dont l’attribution se fonde sur ces documents publics que sont les arrêtés.
M. Michel Mercier. Tout à fait !
M. Claude Domeizel. Il était bon de le rappeler.
M. Pierre Charon. Bien sûr !
M. Claude Domeizel. Deuxièmement, nos débats portent pour partie sur l’opportunité de la réserve parlementaire. Cette discussion est prématurée : elle devrait avoir lieu lors de l’examen du projet de budget.
M. Gérard Longuet. Très bien !
M. Claude Domeizel. Troisièmement, au terme d’un débat dont la hauteur est inversement proportionnelle à sa durée, il me semble que nous pouvons passer au vote !
Mme Catherine Tasca. Très bien !
M. le président. Madame Rossignol, après ces vingt-quatre explications de vote, retenez-vous la suggestion de M. Longuet et celle de M. Richard ?
Mme Laurence Rossignol. Monsieur le président, avant de répondre à cette question, je formulerai rapidement deux observations.
Tout d’abord, ces vingt-quatre interventions révèlent au moins une chose : après toutes ces années, il était nécessaire de parler de la réserve parlementaire. Nous nous sommes pour ainsi dire livrés à un exercice psychologique ! Le silence et l’omerta devaient être pesants pour chacun.
Ensuite, je souligne que je suis d’accord avec Éric Doligé sur un point : la réserve parlementaire ne fait pas l’élection. D’ailleurs, si tel était le cas, je ne serais pas en train de vous en parler et de défendre cet amendement.
M. Jean-Jacques Hyest. Non, c’est la proportionnelle qui fait l’élection !
M. Philippe Bas. Sans compter la parité !
Mme Laurence Rossignol. Pour ce qui concerne la suggestion de M. Longuet, j’exprimerai un doute. Je connais moins bien la réserve ministérielle et, pour avoir interrogé les uns et les autres autour de moi, les avis sont partagés quant à son existence et à son identification.
M. Gérard Longuet. Il y a des crédits ministériels !
Mme Laurence Rossignol. Certes, cher collègue, mais il s’agit des crédits qu’un ministre peut attribuer au titre de l’exercice normal de sa mission. Y a-t-il une opacité spécifique ? Je ne le crois pas.
M. Gérard Longuet. Comme pour la réserve parlementaire, il y a un arrêté !
Mme Nathalie Goulet. Ce sera l’objet d’un autre débat !
Mme Laurence Rossignol. Dans le doute, mieux vaut ne pas limiter l’efficacité législative et constitutionnelle de cet amendement en y introduisant des formules ambiguës.
Monsieur Longuet, si vous le voulez bien, travaillons d’abord sur la réserve parlementaire ; nous examinerons ensuite la question de la réserve ministérielle.
M. Gérard Longuet. Soit, voyons cela en loi de finances !
M. le président. Et en ce qui concerne la rectification proposée par M. Richard ?
M. Alain Richard. Monsieur le président, il me semble préférable de présenter en CMP la rectification que j’ai suggérée, compte tenu des modifications qu’elle implique, notamment dans les diverses numérotations.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur. Mes chers collègues, ce n’est pas par hasard que ces amendements ont été déposés dans le cadre du présent texte. Il y a une cohérence globale entre la transparence concernant le patrimoine et celle ayant trait aux activités des parlementaires.
M. Jean-Jacques Hyest. Ce n’est pas pareil !
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur. Monsieur Hyest, vous avez raison, il s’agit là de questions différentes. Toutefois, dans tous les cas, toute circonvolution, toute réticence n’est ni bien perçue ni bien vécue par nos concitoyens.
M. Roland Courteau. Absolument !
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur. Nous pourrions améliorer la rédaction de ces amendements et procéder aux ajustements nécessaires, qui ont été proposés à juste titre, mais nous devons, à mon sens, prendre dès à présent une position claire et nette.
Les Français ont besoin de positions claires et nettes.
M. Pierre-Yves Collombat. On a compris !
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur. Tout ce qui concerne l’argent public doit être transparent. La position de la commission est donc qu’il faut favoriser la clarté la plus totale quant à la publication de l’ensemble des éléments de cette dotation, ou réserve parlementaire. Ce sera, à mon sens, un utile pas en avant.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet.
M. Jean-Pierre Michel. On ne s’exprime pas après le président de la commission, tout de même, c’est un peu fort !
M. Gérard Longuet. En vingt secondes, je veux dire que je m’abstiendrai sur ces amendements, d’une part, parce que nous avons été invités par notre collègue Richard à renvoyer cette discussion au débat budgétaire et, d’autre part, parce que l’on fait ici deux poids deux mesures.
La transparence sur la réserve parlementaire ne me gêne absolument pas, mais je suis tout de même étonné de constater que l’on refuse aux électeurs le droit d’avoir connaissance des subventions versées par le ministre de l’intérieur à la demande d’un autre élu. (MM. Joël Guerriau et Hervé Maurey applaudissent.) J’aimerais que le ministre de l’intérieur puisse faire connaître ses interventions à l’ensemble des élus d’un département, afin que chacun d’entre eux puisse savoir dans quel esprit et au service de quelle politique elles interviennent ou puisse identifier une subvention surprenante et vraisemblablement appuyée sur autre chose qu’un programme départemental.
M. Pierre Charon. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 23 rectifié et 88 rectifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 311 :
Nombre de votants | 348 |
Nombre de suffrages exprimés | 345 |
Pour l’adoption | 345 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi organique, après l’article 4 bis.
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, vous avez annoncé 348 votants. Or M. Jean-Pierre Chevènement n’a pas participé au scrutin. Il y a donc une erreur !
M. Joël Guerriau. La transparence commence bien !
M. le président. Je vous remercie de votre vigilance, mon cher collègue. Nous procéderons à une vérification, dont le résultat figurera au Journal officiel. Cela étant, sur le résultat du scrutin, il n’y a pas photo comme l’on dit. (Sourires.)
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Le Gouvernement retire l’amendement n° 185 sur le projet de loi ordinaire.
Article 5
Les articles 1er et 2 de la présente loi sont applicables en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et en Nouvelle-Calédonie. – (Adopté.)
Article 6 (nouveau)
La loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie est ainsi modifiée :
1° Après le mot : « soumis », la fin du second alinéa de l’article 64, de l’article 114 et du dernier alinéa de l’article 161 est ainsi rédigée : « à l’obligation de dépôt d’une déclaration de situation patrimoniale et d’une déclaration d’intérêts, dans les conditions prévues, respectivement, aux 1° et 2° du I de l’article 10 de la loi n° … du … relative à la transparence de la vie publique. » ;
2° Le 1° du I de l’article 195 est abrogé.
M. le président. L'amendement n° 89 rectifié, présenté par MM. Sueur, Anziani et J.P. Michel, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
à l’obligation de dépôt d’une déclaration de situation patrimoniale et d’une déclaration d’intérêts, dans les conditions prévues
par les mots :
, dans les mêmes conditions, aux obligations de déclaration applicables aux personnes mentionnées
La parole est à M. Alain Anziani.
M. Alain Anziani. Il s’agit d’un amendement de coordination visant l’outre-mer.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 6, modifié.
(L'article 6 est adopté.)
Article 7 (nouveau)
La loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d’autonomie de la Polynésie française est ainsi modifiée :
1° Le 1° du I de l’article 109 est abrogé ;
2° Après le mot : « patrimoniale », la fin de l’article 160 est ainsi rédigée : « et une déclaration d’intérêts, dans les conditions prévues au 1° du I de l’article 10 de la loi n° … du … relative à la transparence de la vie publique, pour le président de la Polynésie française et le président de l’assemblée, et dans les conditions prévues au 2° du même I, pour les autres membres du gouvernement et de l’assemblée. »
M. le président. L'amendement n° 90 rectifié, présenté par MM. Sueur, Anziani et J.P. Michel, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :
2° L’article 160 est ainsi rédigé :
« Art. 160. - Le président et les autres membres du gouvernement de la Polynésie française sont soumis, dans les mêmes conditions, aux obligations de déclaration applicables aux personnes mentionnées, respectivement, aux 1° et 2° du I de l’article 10 de la loi n° … du … relative à la transparence de la vie publique.
« Le président et les autres représentants à l'assemblée de la Polynésie française sont soumis, dans les mêmes conditions, aux obligations de déclaration applicables aux personnes mentionnées, respectivement, aux 1° et 2° du I de l’article 10 de la loi n° … du … relative à la transparence de la vie publique. »
La parole est à M. Alain Anziani.
M. Alain Anziani. Il s’agit également d’un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 7, modifié.
(L'article 7 est adopté.)
Article 7 bis (nouveau)
Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Après le mot : « patrimoniale », la fin du dernier alinéa des articles L.O. 6221-1 et L.O. 6321-1 est ainsi rédigée : « et une déclaration d’intérêts, dans les conditions prévues, respectivement, aux 1° et 2° du I de l’article 10 de la loi n° … du … relative à la transparence de la vie publique. » ;
2° Après le mot : « déposer », la fin du dernier alinéa de l’article L.O. 6431-1 est ainsi rédigée : « une déclaration de situation patrimoniale et une déclaration d’intérêts, dans les conditions prévues, respectivement, aux 1° et 2° du I de l’article 10 de la loi n° … du … relative à la transparence de la vie publique. »
M. le président. L'amendement n° 91 rectifié, présenté par MM. Sueur, Anziani et J.P. Michel, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Après le mot : « sont », la fin du dernier alinéa des articles L.O. 6221-1, L.O. 6321-1 et L.O. 6431-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigée : « soumis, dans les mêmes conditions, aux obligations de déclaration applicables aux personnes mentionnées, respectivement, aux 1° et 2° du I de l’article 10 de la loi n° … du … relative à la transparence de la vie publique. »
La parole est à M. Alain Anziani.
M. Alain Anziani. Coordination.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, l'article 7 bis est ainsi rédigé.
Article 8 (nouveau)
Pour l’application de l’article 1er de la présente loi et des articles 4 et 5 de la loi n° … du … relative à la transparence de la vie publique, les références à l’administration fiscale s’entendent, dans les collectivités d’outre-mer et en Nouvelle-Calédonie, comme visant l’administration fiscale de ces collectivités d’outre-mer et l’administration fiscale de la Nouvelle-Calédonie et les références au livre des procédures fiscales s’entendent comme visant les dispositions équivalentes dans les législations applicables localement.
M. le président. L'amendement n° 92 rectifié, présenté par MM. Sueur, Anziani et J.P. Michel, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Pour l’application de la présente loi, les références à la législation et à la réglementation fiscales s’entendent, dans les collectivités d’outre-mer et en Nouvelle-Calédonie, comme visant la législation et la réglementation applicables localement.
L’administration fiscale compétente localement dans les collectivités d’outre-mer et en Nouvelle-Calédonie peut être sollicitée par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique dans les mêmes conditions que l’administration fiscale compétente au niveau national.
La parole est à M. Alain Anziani.
M. Alain Anziani. Coordination.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, l'article 8 est ainsi rédigé.
Articles additionnels après l'article 8
M. le président. L'amendement n° 37, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l'article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
...° Au deuxième alinéa de l’article L.O. 227-3, la référence : « n° 98-404 du 25 mai 1998 » est remplacée par la référence : « n° du relative à la transparence de la vie publique ».
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur. Cet amendement aborde une véritable question, celle de la résidence de rattachement des personnes sans domicile fixe de l’Union européenne pour les élections locales. Reste que cette disposition est sans rapport avec l’objet du texte. C’est donc un cavalier législatif. À ce titre, l’avis de la commission est défavorable, sans qu’elle néglige pour autant le sujet.
Mme Esther Benbassa. Dans ces conditions, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 37 est retiré.
L'amendement n° 113, présenté par MM. Mézard, Collombat, Alfonsi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les modalités d’application de la présente loi organique tiennent compte des spécificités du mandat des membres de chaque assemblée.
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Cet amendement se justifie par son texte même.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur. Cet amendement n’est pas rédigé avec précision. Sa formulation très générale apparaît donc dénuée d’effets législatifs clairs.
Sur ce point encore, il me semble qu’il convient de s’en remettre aux compétences du bureau des assemblées. Je suis donc au regret de ne pouvoir émettre d’avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. La sagesse voudrait que cet amendement soit retiré, faute de quoi l’avis du Gouvernement serait défavorable.
M. le président. Monsieur Collombat, l'amendement n° 113 est-il maintenu ?
M. Pierre-Yves Collombat. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi organique, je donne la parole à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi organique initial, chacun l’a bien compris, était une sorte de contre-feu, une opération de diversion dont l’objet était de détourner les regards du cercle de l’exécutif, où se trouve concentré l’essentiel du pouvoir politique, sur le Parlement, qui ne détient plus qu’un pouvoir résiduel, au stade où en est parvenue l’évolution de nos institutions. Puisque là est le pouvoir réel, là aussi résident les risques réels de dérapages, quelle que soit la vertu de ses titulaires. En effet, seul le pouvoir arrête le pouvoir, affirme la maxime, aussi souvent répétée que méconnue.
Pour faire simple, je dirai, un peu brutalement, qu’ayant constaté une fuite d’eau à l’Élysée, on envoie les plombiers réparer les canalisations du Sénat !
Nous voterons cependant ce texte dans la forme que lui ont donnée nos débats, parce que les dispositions retenues s’inscrivent dans la logique des mesures existantes de lutte contre les risques de dévoiement du pouvoir législatif et du dispositif qui les sanctionne, ce qui n’était pas le cas du projet de loi organique initial. Contrairement à ce qui se colporte, ces mesures existent bel et bien dans notre droit et ne sont ni anodines ni en retard par rapport à celles de nos voisins.
Nous voterons également ce texte, parce que les débats nous auront permis d’améliorer le projet initial. Je retiendrai deux exemples : la définition du conflit d’intérêts s’agissant des parlementaires, avec l’accent mis sur le conflit entre intérêt public et intérêt privé plutôt que la généralisation à toute sorte de conflits d’intérêts, publics ou privés, ainsi que l’introduction de l’intentionnalité pour caractériser ce qui ressemble à un délit de fausse déclaration.
Cela prouve que, malgré le surcroît de fatigue que cela nous a imposé, nous avons eu raison de renvoyer ce texte en commission. Que n’aurions-nous pas fait si nous avions eu le temps de travailler autrement que sur commande et dans la hâte ?
Pour le Gouvernement, comme pour une partie de cet hémicycle, je le sais, il manque l’essentiel à ce texte : la publicité tous azimuts des déclarations, censée garantir la transparence de la vie publique et, ainsi, la vertu.
Selon les défenseurs de ces dispositions, il y aurait, d’un côté, ceux qui sont pour la transparence et, de l’autre, ceux qui sont pour l’obscurité parce qu’ils ont quelque chose à cacher.
À cet égard, je rappelle que le RDSE a proposé une solution dans un amendement : la publication des seules évolutions inexpliquées de patrimoine, ce qui aurait permis de mettre l’accent et de jeter un coup de projecteur sur ce qui est véritablement important.
Plus généralement, je crains que les défenseurs de la transparence n’aient mal mesuré les effets réels et véritablement calamiteux à terme de leur remède.
À la suite des réformateurs du XVIIIe siècle – ce n’est pas un hasard si M. le ministre chargé des relations avec le Parlement a commencé mardi dernier son intervention liminaire en citant Le Contrat social –, ils comptent sur la transparence et l’opinion pour réguler le corps social et le corps politique, en oubliant que l’opinion, cela se fabrique.
Je pourrais me référer à Chomsky, mais je me contenterai de citer l’analyse du panoptique de Bentham établie par Michel Foucault, dont chacun ici connaît la lucidité des analyses sur les effets de pouvoir et les formes multiples qu’il sait prendre – : « C’est l’illusion de presque tous les réformateurs du XVIIIe siècle qui ont prêté à l’opinion une puissance considérable. L’opinion ne pouvant être que bonne puisqu’elle était la conscience immédiate du corps social tout entier, ils ont cru que les gens allaient devenir vertueux du fait qu’ils seraient regardés. L’opinion était pour eux comme la réactualisation spontanée du contrat. Ils méconnaissaient les conditions réelles de l’opinion, les médias, une matérialité qui est prise dans les mécanismes de l’économie et du pouvoir sous les formes de la presse, de l’édition, puis du cinéma et de la télévision.
« [Ils ont méconnu] que ces médias seraient nécessairement commandés par des intérêts économico-politiques. Ils n’ont pas perçu les composantes matérielles et économiques de l’opinion. Ils ont cru que l’opinion serait juste par nature, qu’elle allait se répandre de soi et qu’elle serait une sorte de surveillance démocratique. Au fond, c’est le journalisme – innovation capitale du XIXe siècle – qui a manifesté le caractère utopique de toute politique du regard. »
Pour conclure, je vous livre cette formule de Michel Foucault : « La perfection de la surveillance, c’est une somme de malveillance. » (Applaudissements sur les travées du RDSE. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, pour clore notre débat sur le projet de loi organique relatif à la transparence de la vie publique, permettez-moi, tout d’abord, de vous dire mon insatisfaction profonde.
Le groupe CRC est bien sûr favorable à la transparence dans la vie publique. Mais encore faudrait-il qu’elle soit aussi de mise dans nos débats !
Les conditions d’examen de ce texte ont été pour le moins laborieuses, voire ubuesques par certains aspects. Cela montre combien le sujet est sensible, au sens plein du terme.
Toutefois, mon insatisfaction tient surtout aux négociations, pour ne pas dire aux collusions, menées avec une partie de la droite centriste pour trouver une majorité, qui ont eu raison in fine de l’article 1er. Or celui-ci contenait, à notre sens, des dispositions essentielles en termes de publicité du patrimoine des élus. Nous regrettons cette situation, car ce sont, au final, nos citoyens qui en font les frais.
Chers collègues, nos débats auraient dû être marqués du sceau de la transparence, certes, mais également de celui de l’humilité, car nous en avons manqué. Figurez-vous que je connais nombre de nos concitoyens qui aimeraient que leur patrimoine soit publié : cela signifierait qu’ils en ont un !