3. Le Conseil de sécurité et la définition du crime d'agression
L'article 5 du Statut, qui énumère les crimes
relevant
de la compétence de la Cour, précise à son paragraphe 2,
que la Cour ne sera en fait compétente à l'égard du crime
d'agression que lorsqu'un avenant au Statut -sous forme d'une nouvelle
convention- aura défini ce crime. Le texte précise que
" cette disposition devra être compatible avec les dispositions
pertinentes de la Charte des Nations unies ".
Il n'existe pas en effet, aujourd'hui, d'instrument international normatif
à vocation universelle définissant l'agression. Trois textes, de
portée bien différente, étaient à la disposition
des négociateurs de Rome :
- le Statut de Nuremberg qui, dans son article 6 (a) définit les crimes
contre la paix comme
" la direction, la préparation, le
déclenchement ou la poursuite d'une guerre d'agression ou d'une guerre
en violation des traités, assurances ou accords internationaux, ou la
participation à un plan concerté ou à un complot pour
l'accomplissement de l'un quelconque des actes qui
précèdent ".
- la définition de l'agression annexée à la
résolution 3314 de l'Assemblée générale des Nations
unies en date du 14 décembre 1974
16(
*
)
. Elle a été
adoptée par consensus mais n'a pas de valeur normative. Elle ne donne au
demeurant qu'une définition très vague qui relève de
l'évidence :
" l'agression est l'emploi de la force
armée par un Etat
17(
*
)
contre la souveraineté, l'intégrité territoriale ou
l'indépendance politique d'un autre Etat, ou de toute autre
manière incompatible avec la Charte des Nations unies "(...).
- enfin l'article 16 du projet de code des crimes contre l'humanité,
adopté par la Commission du Droit international des Nations unies et qui
est à l'heure actuelle soumis à l'examen des Etats.
Les Etats disposeront donc, en vertu de l'article 5 du Statut et à
travers la
Commission préparatoire pour la CPI,
de sept ans de
réflexion pour aboutir, dans le cadre de l'Assemblée des Etats
parties, à une définition claire du crime d'agression.
La France défend, à juste titre, sur ce point une conception qui
tend à
préserver les prérogatives du Conseil de
sécurité,
premier responsable, en vertu de l'article 39 du
chapitre VII de la Charte des Nations unies, pour déterminer l'existence
d'un acte d'agression. Cette détermination par le Conseil de
sécurité serait une condition préalable et
nécessaire au renvoi d'une situation devant la Cour. Une fois ce
préalable éventuellement acquis, il serait alors de la
compétence de la Cour d'apprécier s'il y a eu ou non, dans le
cadre de
l'acte d'agression
reconnu par le Conseil, commission d'un
crime d'agression.
La position française actuelle -pour cette négociation qui
débutera au cours de l'année 1999- tend à éviter
que la Cour ne devienne une nouvelle instance, qui serait alors concurrente du
Conseil de sécurité, devant laquelle les Etats viendraient porter
leurs différends politico-militaires, ce qui nuirait à
l'efficacité et à la crédibilité de la CPI.