B. LA QUESTION DU RÔLE DU PRODUCTEUR DÉLÉGUÉ DANS LE FINANCEMENT DE LA PRODUCTION CINÉMATOGRAPHIQUE FRANÇAISE
•
S'il est manifeste que, tout au long de la période 1980-97, les
producteurs de cinéma français ont cherché à
limiter leur prise de risques, on peut s'interroger sur leur capacité
à faire autrement.
• En effet l'analyse faite plus haut montre que, sous la pression
d'influences économiques, culturelles, ou politiques, les producteurs
ont recherché les moyens de maintenir leur activité.
• Rappelons que les producteurs sont, en théorie, les derniers
à se rémunérer et donc ceux dont la position est la plus
fragile en cas de crise de la fréquentation. Pourtant, maîtres
d'oeuvre du cinéma français, leur rôle est essentiel.
• La détérioration du tissu économique du secteur, en
partie causée par la baisse de la fréquentation, a poussé
les producteurs à préserver leur capacité
financière par les moyens que leur offrait le système de soutien.
- La surestimation des budgets peut être analysée comme une
réponse à la crise, qui a allongé les durées
d'amortissement des films et diminué les revenus à court terme
des producteurs.
- Elle est aussi une réponse au risque de perte de la principale source
de financement que constituent les droits territoriaux sur le négatif,
face au danger d'acteurs puissants pouvant facilement intervenir en tant que
coproducteurs.
• Par ailleurs, le producteur a vu ses marges de manoeuvre se
réduire.
- La pratique culturelle européenne réserve le
final cut
au réalisateur ; elle contribue au développement du
cinéma d'auteurs, mais ne permet pas au producteur d'assumer son
rôle d'entrepreneur visant à fabriquer un produit adapté au
marché (voir le cas médiatisé de
Les amants du
Pont-Neuf
).
- Le versement de cachets de plus en plus élevés aux
interprètes principaux semble difficilement contournable, lorsque la
logique commerciale prévaut : aux yeux des bailleurs de fonds, la
notoriété des vedettes garantit un certain potentiel commercial.
- L'implication croissante des chaînes dans la production
cinématographique fragilise la trésorerie des producteurs, qui
ont du recourir de manière fréquente à l'emprunt.
- Le poids des chaînes dans l'économie de la production oblige les
producteurs à tenir compte des politiques éditoriales des
diffuseurs, même si elles éloignent le produit des attentes
propres au public des salles (qui sont différentes de celles des publics
des chaînes).
• L'influence de certains diffuseurs sur le scénario et le casting
des films commence à se faire sentir. TF1, dont l'objectif est de
financer des films qui pourront être diffusés en
prime time,
précise par contrat que toute modification de scénario devra
lui être soumise.
• La bagarre entre les diffuseurs pour les films qui
génèrent le plus d'audience les conduit à proposer des
packages aux producteurs, qui englobent la commercialisation du film à
l'étranger et garantissent un minimum pour les droits vidéo. Le
producteur se contente de contrôler la réalisation.
• Rappelons qu'un accord interprofessionnel entre les principaux
diffuseurs, le BLIC et l'ARP, signé en 1997, a pour objet de
protéger le cinéma indépendant contre la volonté
des chaînes de contrôler la production.