IV. L'ACCORD DE TAËF: LA REMISE EN CAUSE DE LA SUPRÉMATIE DES MARONITES DANS LA DEUXIÈME RÉPUBLIQUE
Le " Document d'entente nationale ",
ratifié
dans la ville saoudienne de Taëf par les députés libanais en
novembre 1989 a pour origine un plan en sept points élaboré par
un comité tripartite arabe réunissant l'Algérie, le Maroc
et l'Arabie Saoudite.
L'accord de Taëf qui est défini comme " le pacte de la
coexistence ", préconisait la fin des hostilités, une
nouvelle formule de partage du pouvoir, le retrait des troupes syriennes
jusqu'à la Bekaa et l'élection d'un nouveau président.
Le Député maronite du Nord, M. René Moawad, est élu
Président par les députés libanais le
13 novembre 1989 au cours d'une séance qui se tient à
l'aérodrome de Qoubaiyat (Liban-Nord). Le nouveau Président est
assassiné le 22 novembre 1989, jour de la fête nationale
commémorant l'indépendance du Liban et remplacé le
25 novembre par M. Elias Hraoui.
Le conflit libanais s'achève un mois plus tard avec l'assaut contre le
Palais Présidentiel et le Ministère de la Défense
mené par l'armée syrienne secondée par des unités
de l'armée libanaise fidèles à M. Hraoui.
A. LES PRINCIPES GÉNÉRAUX DE L'ACCORD : LA RÉAFFIRMATION DE L'IDENTITÉ LIBANAISE
L'accord de Taëf réaffirme en premier lieu
l'unité, la liberté et l'indépendance du Liban.
Par delà son caractère multiconfessionnel, l'Etat libanais est
unitaire, ce qui exclut de le transformer en une confédération ou
une fédération de communautés confessionnelles. Sur la
base de l'appartenance à telle ou telle confession, il ne saurait y
avoir ni répartition de population ni partition du pays. C'est le rejet
de la " cantonnisation " du Liban.
Le Liban est un " pays arabe, d'appartenance et d'identité "
dont les frontières sont internationalement reconnues, ce qui devrait
exclure toute annexion de tout ou partie de son territoire par l'un de ses
voisins, la Syrie et a fortiori Israël. Néanmoins, l'accord de
Taëf consacre un paragraphe spécifique aux relations
libano-syriennes : le Liban entretient avec la Syrie "
des
relations
privilégiées qui tirent leur force du voisinage, de l'Histoire et
des intérêts fraternels communs
". Sur la base de cette
déclaration de principe, les deux pays ont signé le
22 mai 1991 un traité de fraternité, de
coopération et de coordination qui est allé jusqu'à la
création d'un Conseil Supérieur composé des plus hautes
autorités constitutionnelles des deux pays.
L'accord de Taëf préconise également le retour à
l'Etat de droit en présentant le Liban comme une
"
République démocratique parlementaire fondée sur
le principe du respect des libertés publiques et en premier lieu de la
liberté d'opinion et de croyance
". Le libéralisme
politique trouve un prolongement dans le domaine économique, puisque
l'accord de Taëf réaffirme avec force que le système
économique est libéral et garantit comme tel l'initiative
individuelle et la propriété privée.
Les autres mesures prévues par l'accord vont dans le sens du
rétablissement de l'Etat de droit : dissolution des milices avec remise
des armes à l'Etat libanais, renforcement des forces de
sécurité intérieure, droit pour chaque Libanais
déplacé de regagner le lieu de sa résidence d'origine.