4. Le rôle du CLEMI doit-il être revu ?
Aujourd'hui, les missions du CLEMI sont présentées, dans son bilan d'activité, selon quatre axes principaux :
- la formation des enseignants à la connaissance du système des médias d'information, à l'analyse et à la compréhension de leurs messages et à leur utilisation pédagogique en classe. Chaque année, le CLEMI forme effectivement entre 15 000 et 18 000 enseignants, soit dans des stages pour les futurs enseignants, soit en formation continue ;
- la mise en relation des enseignants et de leurs élèves avec les professionnels des médias d'information pour bâtir des projets communs et mettre en place des actions, ponctuellement ou pendant la Semaine de la Presse et des Médias dans l'École ;
- l'accompagnement de l'expression des élèves dans le cadre scolaire (journaux, radio, vidéo, Internet) pour les former aux circuits de l'information, à la liberté et à la responsabilité. Le CLEMI possède et exploite le fonds de journaux scolaires et lycéens le plus important d'Europe (plus de 45 000 journaux scolaires et lycéens) ;
- et enfin, la production et la diffusion des documents pédagogiques sous forme de livres, de brochures et de supports multimédias. Ces publications visent à susciter et à développer, dans les classes, travaux et réflexions autour de l'actualité, ce qui est le moyen de toucher un public plus vaste que celui des stages de formation.
La quasi-totalité des actions du CLEMI sont organisées en partenariat avec les professionnels des médias (techniciens, journalistes, responsables d'entreprises de la presse écrite et audiovisuelle). Le CLEMI, à l'initiative de nombreux projets, en négocie le contenu avec ses partenaires et en assure la coordination. Ces projets peuvent être ponctuels (une action de formation) ou se développer sur une plus grande échelle, comme la Semaine de la presse et des médias à l'école qui est l'opération phare du CLEMI à laquelle participent chaque année 4 millions d'élèves, 330 000 enseignants et plus de 1 000 médias (journaux magazines, radios, télévisions, agences de presse...). Le Centre s'appuie en outre sur des coordonnateurs académiques nommés par les recteurs, assurent un lien avec le terrain, enseignants et professionnels des médias.
Votre rapporteur, qui a auditionné Mmes France Renucci et Evelyne Bevort, est convaincu de l'importance de l'action du CLEMI. Toutefois, il a également constaté que des voies d'amélioration peuvent être dégagées , notamment s'agissant de l'utilisation des nouveaux médias.
Le rapport de l'IGEN précité évoque au demeurant les nombreuses difficultés rencontrées par le CLEMI. Il estime notamment que :
- les équipes académiques du CLEMI ont des tutelles institutionnelles trop diverses qui nuisent à un travail de fond ;
- le rattachement du CLEMI au bureau de la formation continue des enseignants risque de focaliser le CLEMI sur cette seule mission et lui faire perdre la diversité de ses activités, l'esprit d'innovation, par nature transversal et la souplesse sur le terrain ;
- ses moyens de fonctionnement sont en diminution depuis 1994 (406 000 euros contre 355 000 en 2007) ;
- ses nouveaux statuts 105 ( * ) ne règlent pas les problèmes qu'il rencontre. Le décret du 28 mars 2007 donne en effet au CLEMI un rôle de maître d'oeuvre dans l'ensemble du système scolaire pour ce qui concerne l'éducation aux médias. Mais, compte tenu du contexte actuel, caractérisé par la multiplication des supports médiatiques et par la montée en puissance des nouvelles technologies, les tâches du CLEMI risquent de devenir de plus en plus lourdes et complexes à mettre en oeuvre ;
- la semaine de la presse et des medias dans l'école, qui est une étape très intéressante pour faire connaître le CLEMI et la problématique d'éducation aux médias, est insuffisante. Sur cet aspect de la (re)connaissance du CLEMI et de ses actions, le rapport est sévère et mérite d'être cité substantiellement : « l'arbre ne doit pas cacher la forêt. S'il est vrai que les enjeux de l'éducation aux médias sont de mieux en mieux perçus par les responsables du système éducatif - par le biais, principalement, de la politique volontariste menée en matière d'utilisation des technologies de l'information et de la communication à l'école (TICE) - , le travail du CLEMI est loin de concerner la majorité des établissements , et les actions conduites, quels que soient leur intérêt et leur richesse, ne sont pas représentatives de ce qui se fait dans l'ensemble des académies, encore moins dans la plupart des classes ordinaires. Les logiques d'expérimentation et d'innovation restent prédominantes. On est loin du « changement d'échelle » préconisé. En dehors des milieux concernés - pour la plupart, comme on l'a vu, des enseignants militants ou bien ceux qui ont eu la chance de rencontrer une équipe qui les a convaincus du bien fondé de l'éducation aux médias dans la perspective de leur enseignement -, le travail du CLEMI est peu connu, voire totalement ignoré . Nombre d'IPR interrogés ne savent même pas qui est le correspondant académique dans le domaine ni en quoi consiste exactement sa mission. Le caractère événementiel et facultatif de la Semaine de la presse et des médias, malgré un succès incontestable et renouvelé, ne contribue pas à donner l'impression qu'il existe une obligation institutionnelle à aborder les médias dans le cadre des disciplines ».
Si l'échec de l'éducation aux médias n'est pas complet, force est donc de constater que ses différents acteurs ont peiné à faire vivre cet enseignement.
* 105 Décret n° 2007-474 du 28 mars 2007 modifiant le décret n° 93-718 du 25 mars 1993.