B. UNE APPROCHE CRITIQUABLE

A partir d'une vision du jeu qui n'est que partielle (pour ne pas dire partiale), l'administration semble se satisfaire d'un maintien du statu-quo.

1. Une vision partielle

La vision du jeu qui est celle de l'Etat paraît incomplète et trop exclusivement inspirée par des considérations moralisatrices.

a) une vue incomplète...

Comme cela a été monté au chapitre précédent, les connaissances de l'Etat sur le jeu sont déficientes.

La population des joueurs et ses comportements (notamment pathologiques) ne semblent pas suffisamment étudiés par l'administration.

L'analyse économique du secteur paraît négligée au détriment de celle des règles juridiques et financières qui lui sont applicables (et ne sont pas toujours réformées pour autant comme elles le devraient).

La vision de l'Etat n'est pas assez panoramique et prospective (des phénomènes comme l'irruption des cyberjeux, notamment, ne semblent pas avoir été correctement anticipés).

b) ...marquée par des considérations moralisatrices

Ainsi qu'il a été indiqué, l'approche de l'administration (et du juge) demeure marquée par des principes moralisateurs hérités du XIX ème siècle. S'agit-il d'une analyse ou de préventions ? Doit-on continuer aujourd'hui à considérer le jeu comme une activité immorale, passible de prohibition sauf si elle finance des activités d'intérêt général ? Ou bien s'agit-il d'une distraction, nécessitant, certes, une surveillance particulière, mais profitable à l'économie, en même temps qu'au budget de l'Etat ?

Sans vouloir trancher cette question de société, votre rapporteur estime qu'elle mérite de faire l'objet d'un véritable débat politique devant le Parlement , à l'occasion d'une prochaine réforme de la législation applicable dans ce domaine.

Il observe que ce secteur, même si ses activités comportent des risques particuliers, est soumis à des contrôles rigoureux et se montre loin d'être le seul à avoir fait l'objet d'« affaires », (comme celle du casino d'Annemasse ). Qu'on pense aux banques et, notamment, à l'escroquerie du sentier, ou à la Bourse !

Les casinos, notamment, souffrent auprès d'une partie de la population d'une image sulfureuse, le plus souvent injustifiée et nourrie de fantasmes (voir première partie).

Il n'est pas certain que les Français, dont les deux tiers sont des joueurs occasionnels et un cinquième des joueurs réguliers, partagent ce point de vue. Un très faible pourcentage d'entre eux, au demeurant (de l'ordre de 1 % de la population) peut être considéré comme dépendant.

Les renseignements généraux constituent, finalement, la seule source d'informations exclusive et permanente de l'Etat (avec la comptabilité des recettes).

Le point de vue de celui-ci paraît donc au total trop exclusivement inspiré par des préoccupations d'ordre public et des principes moraux et pas assez fondé sur des analyses objectives ;

2. Un certain immobilisme

a) l'Etat censeur et rentier

Selon une conception minimaliste de son rôle, l'Etat peut se contenter de se comporter en censeur et rentier.

Il fait respecter d'un côté l' ordre public avec une efficacité qui ne lui est généralement pas contestée .

Il encaisse, par ailleurs, sans trop d'état d'âme, les recettes que les jeux lui procurent, auxquelles s'ajoutent, dans le cas de la Française des Jeux, ses dividendes d'actionnaire principal.

La logique juridique et financière prévaut. Les aspects économiques et concurrentiels sont négligés.

Le consommateur est doublement méprisé :


- d'une part, parce que la politique des jeux pratiquée est une politique de l'offre qui tient peu compte de la demande (sans laquelle, par exemple, les machines clandestines ne connaîtraient pas un tel succès...) ;

- d'autre part, car le problème de la pathologie des joueurs dépendants est méconnu et pas vraiment traité (limiter l'offre globale de jeux n'est pas une réponse adéquate).

b) un cadre légal et réglementaire archaïque et complexe

L'immobilisme et le minimalisme conduisent au maintien de dispositions désuètes et à l'absence de refonte globale du cadre juridique et financier dans lequel s'exercent les activités de jeux. Il en résulte une superposition de règles qui engendre une grande complexité.

Archaïsme : des dispositions de textes datant du XIX e siècle (1836 pour les loteries, 1891 pour les courses), sont encore en vigueur.

s'agissant des loteries : la dernière mesure réellement importante (lancement du loto sportif) date de 1985.

Le décret qui régit aujourd'hui l'organisation des jeux de loterie est celui du 9 novembre 1978 (il y a près de vingt-cinq ans). Il a été pris en application d'une loi de mai 1933 120( * ) dérogeant à la prohibition de principe, toujours en vigueur, prévue par le texte, précité de... 1836.

Ce cadre, pourtant très ancien, n'empêche pas, comme on l'a vu, une diversification dynamique, par la Française des jeux, de ses produits.

On notera, au passage, que le décret d'application d'une loi de décembre 1994 121( * ) autorisant l'exploitation par cette société « d'appareils de jeux individuels, portables et jetables » n'a jamais été publié. Pourquoi ne pas abroger cette disposition ?

Par ailleurs le lien entre les activités de la Française et le développement du sport auquel une partie de ses recettes se trouvent affectées 122( * ) paraît loin d'être aussi direct que l'exige l'article 21 de la nouvelle loi organique relative aux lois de finances 123( * ) .

La convention en vigueur entre l'Etat et la Française des jeux, arrive à expiration en 2008.

Le monopole des loteries doit-il être remis en cause à cette occasion ? La question mérite réflexion dès maintenant.

Déjà réduite, en 1979, de 49 % à 20 %, la part des émetteurs historiques 124( * ) , (qui bénéficient actuellement d'une véritable rente de situation) pourrait à cette occasion diminuer encore si l'Etat augmente le capital, voire être réduite à néant s'il y a liquidation ou nationalisation.

Concernant les casinos , votre rapporteur partage les conclusions de la Cour des comptes. Celle-ci juge le cadre législatif et réglementaire actuel de ces établissements « ancien et partiellement inadapté ».

Elle relève que « certaines dispositions sont devenues obsolètes ou n'ont jamais été appliquées » (telles l'article 4 de la loi du 15 juin qui prévoyait un prélèvement de 15 % au profit d'oeuvres d'assistance, de prévoyance, d'hygiène ou d'utilité publique).

Le critère de « station classée » (balnéaire, thermale ou climatique) exigé en ... 1907, pour l'implantation d'un casino, paraît aujourd'hui d'autant moins pertinent qu'il a été remis en case par l'amendement Chaban 125( * ) introduit dans la loi du 15 juin 1988.

La commission supérieure des jeux, chargée de donner un avis au ministre de l'intérieur sur les demandes d'autorisation de jeux, a été instituée par un décret du 6 novembre... 1934.

La cour critique le caractère à la fois flou et fluctuant des motivations de ses décisions auxquelles les professionnels concernés reprochent, de surcroît, d'être prises sans concertation, de manière arbitraire.

Enfin, le barème du prélèvement progressif, décrit dans un précédent chapitre, n'a pas été actualisé depuis 1986 ! En outre, cette dernière révision donne lieu à un « prélèvement à employer » (pour des investissements touristiques), calculé sur la base de l'avantage qui en a résulté pour les communes par rapport au précédent barème de 1981 ! Ce prélèvement ubuesque est parfois mal calculé, selon la Cour, et utilisé dans des conditions irrégulières.

Concernant le PMU , il s'agit d'une organisation commune à des sociétés de courses dont le statut date encore en partie de 1891. Toutefois un décret assez récent, du 5 mai 1997, est venu clarifier l'organisation des sociétés de courses et du pari mutuel. L'institution est structurée selon un système fédératif à plusieurs échelons, respectant la dualité trot-galop :

A la base 249 sociétés de courses

Puis des fédérations régionales

Ensuite, une fédération nationale et des sociétés 126( * ) mères (pour le trot et le galop).

Le décret de 1997 n'a pas remis en cause le statut de groupement d'intérêt économique (GIE) du PMU, ni celui d'association de la loi de 1901 des sociétés de courses (dont l'autorisation, accordée pour un an par le ministre de l'agriculture, demeure précaire et révocable).

Il était prévu initialement que :

- l'amélioration de la race chevaline constitue l'objet social exclusif des sociétés (loi de 1891) ;

- que l'autorisation accordée à certaines sociétés d'organiser le Pari-Mutuel hors des hippodromes soit subordonné à un prélèvement fixe en faveur des oeuvres locales de bienfaisance et de l'élevage.

Il en subsiste :

- une affectation, compatible avec la loi organique du 1 er août 2001, d'une partie des mises (plus de 80 M€ en 2002) à un Fonds national des courses et de l'élevage (cf. chapitre précédent) ;

- des versements d'une partie des gains non réclamés, ou du produit des arrondis des gains des parieurs au décime inférieur, au profit des régimes sociaux des personnels de l'institution.

Les courses contribuent, par ailleurs, tout comme la FDJ à alimenter

- le FNDS (ce qui peut se concevoir en raison de l'aspect sportif des courses qui sont cependant des compétitions à caractère professionnel et non pas amateur) ;

- le fonds de la vie associative (non dépourvue de tout lien avec l'activité des courses qui sont elles-mêmes des associations) et, enfin, ce qui semble vraiment incongru, le sous-compte consacré aux adductions d'eau au sein du fonds national de l'eau.

Le cadre juridique de l'institution des courses peut sembler anachronique dans un secteur qui risque de s'ouvrir de plus en plus à la concurrence . (la gestion du loto confiée auparavant à un GIE a été ensuite transférée une société d'économie mixte ad hoc).

Il n'en présente pas moins de nombreux avantages conduisant à préconiser aujourd'hui de le conserver :

- la structure de GIE permet d'associer à la gestion du PMU, les secteurs du trot et du galop et les sociétés membres ;

- le statut de l'association de la loi du 1901 assure à l'institution le concours désintéressé - ce qui est admirable à notre époque - de quelques 6.000 bénévoles motivés par une passion commune pour « la plus noble conquête de l'homme » (les fonctions de commissaires aux courses et de présidents des sociétés de courses, notamment, sont gratuites). Il lui en coûterait, autrement environ 6 milliards de francs.

complexité : l'immobilisme de l'Etat est source de complexité dans la mesure où il conduit, faute de rénovation de la législation et de la réglementation des jeux dans son ensemble, à l'empilement, par strates successives, de mesures partielles prises au gré des circonstances.

Concernant la Française des Jeux , la situation est pourtant relativement claire et simple d'un point de vue juridique et fiscal (diversification de l'offre compatible avec le maintien du monopole sur les loteries prohibées, cumul de prélèvements spécifique et de droit commun, ...).

Le fonctionnement du FNDS, alimenté, à la fois, par la FDJ et le PMU, a toutefois été critiqué dans un rapport de votre commission des Finances 127( * ) qui dénonçait la complexité et l'absence totale de transparence de la répartition de ses crédits 128( * ) .

S'agissant des casinos , la Cour des comptes rejoint les critiques formulées par votre rapporteur, dans la première partie de ce rapport sur la complication et la lourdeur du système de prélèvements . Ce système superpose, en effet, sans véritable vue d'ensemble :

- Deux prélèvements progressifs, assis sur le produit brut théorique des jeux (PBJ) des machines à sous (MAS) au profit, d'une part, de l'Etat et, d'autre part, des communes.

- Deux prélèvements proportionnels, l'un sur le produit des mêmes machines (de 2 %), l'autre (de 0,5 %), sur celui des jeux traditionnels.

- Un droit de timbre sur les cartes d'entrées dans les salles de jeux, variable selon leur durée de validité.

- Un prélèvement communal en application du cahier des charges.

- Enfin, des contributions sociales (CSG et CRDS) calculées selon un mécanisme compliqué.

Les facteurs de complexité résident dans :

- divers mécanismes de plafonnement des prélèvements au profit des communes 129( * ) . Ces derniers sont réduits si, avec ceux de l'Etat, ils conduisent à un taux d'imposition du PBJ supérieur à 80 %.

- des abattements de base, l'un, systématique de 25 % (pourquoi instaurer un barème progressif compliqué pour ne pas l'actualiser régulièrement et en fausser les effets par une telle mesure ?), les autres de 5 % au titre des investissements hôteliers 130( * ) et du déficit des manifestations artistiques.

- La différence (ou « glissement ») entre le produit théorique (qui sert d'assiette au PBJ) et le produit réel des MAS. Les explications de cet écart 131( * ) sont divergentes. Il s'explique, pour les casinotiers, par le comportement des joueurs, et, selon la Direction du Budget, par l'action des exploitants qui s'efforcent de l'accroître.

Il en résulte, quoiqu'il en soit, une diminution d'assiette évaluée à 2 milliards de francs pour la saison 1999-2000.

L'administration voudrait diminuer cet avantage. Mais il est question, selon les informations communiquées à votre rapporteur, de passer non pas au PBJ réel mais à un PBJ théorique rectifié (concession faite à la profession), calculé en retenant comme base le PBJ réel, auquel serait appliqué un coefficient de réfaction.

Le régime fiscal des casinos ne s'en trouvera pas simplifié !

- Enfin, un dernier élément de complexité réside dans le mode alambiqué de calcul de la CRDS et de la CSG 132( * ) .

Pour ce qui est enfin, de l' institution des courses , le schéma ci-après (simplifié !), de répartition des prélèvements sur les enjeux montre qu'il s'agit d'une « usine à gaz ». Mais celle-ci, une fois n'est pas coutume, fonctionne, semble-t-il, à la satisfaction des diverses parties prenantes. Chacune y trouve son compte !

Toutefois, contrairement à ce qui se passe pour les casinos, les collectivités locales, pourtant souvent sollicitées au titre de l'entretien de l'hippodrome, sont exclues de la manne.

FNCF : Fédération nationale des courses françaises

FCEC : Fonds commun de l'élevage et des courses

MAP : Ministère de l'Agriculture et de la pêche

FNHAH (ancien) : Fonds national des haras et des activités hippiques devenu Fonds national des courses et de l'élevage, la partie « haras » ayant été budgétisée.

FNDAE : Fonds national pour le développement des adductions d'eau

FNDVA : Fonds national pour le développement de la vie associative

FNDS : Fonds national pour le développement du sport

PMH : pari mutuel sur les hippodromes

FGNR : Fonds des gains non réclamés

AFASEC : Organisme de formation des personnels des écuries

ORPESC : Organisme de retraite et de prévoyance de l'institution.



Le prélèvement de 16,34 % de l'Etat se répartit en des affectations, déjà évoquées, à différents fonds et des prélèvements, qualifiés à tort de fiscaux par le tableau, au profit du budget de l'Etat.

Le secteur des courses bénéficie de sommes prélevées à la fois par l'Etat (via le Fonds national des courses et de l'élevage) et les sociétés de courses.

L'institution s'autofinance entièrement par ce système qui contribue aussi au financement d'une certaine part des activités de la filière équestre dans son ensemble.

Sa complexité est peut être excessive mais elle reflète, dans une mesure plus ou moins inévitable, la diversité du monde du cheval.

Il en va de même de la fiscalité applicable aux différentes catégories :

- de propriétaires ou copropriétaires (professionnels, indivisaires ou sociétaires, exploitants agricoles ou non)

- d'éleveurs (parfois en même temps propriétaires et entraîneurs, qui bénéficient généralement du régime agricole)

- d'entraîneurs (publics ou particuliers, exploitant agricole ou non).

Mais, dans ce cas, la nécessité d'une simplification, ou tout du moins d'un allègement des charges (y compris sociales) des intéressés, ne fait aucun doute (voir plus loin).

Le système de prélèvements des casinos paraît presque limpide en comparaison de celui, extraordinairement touffu, qui s'applique à l'amont des courses de chevaux.

S'abstenir de toute réforme en maintenant sans justification (sauf parfois pour l'institution des courses), le statut quo , c'est risquer d'entraver l'adaptation du secteur des jeux aux défis auxquels il est confronté, et de ne pas exploiter son potentiel de croissance et d'emploi.

3. De possibles effets indésirables

Un cadre législatif et réglementaire trop contraignant, ainsi que des charges excessivement lourdes peuvent conduire à des effets indésirables :

- sous exploitation du potentiel de croissance et d'emplois du secteur des jeux (et du gisement de ressources publiques qu'il constitue), d'une part,

- exercice clandestin ou expatriation des activités concernées, d'autre part,

a) un danger de sous exploitation des potentialités économiques et budgétaires des jeux

La croissance, décrite dans le chapitre précédent, du chiffre d'affaires des jeux et des recettes qu'elles procurent aux collectivités publiques témoigne du dynamisme de ce secteur (surtout dans le secteur des machines à sous...).

Le développement des machines clandestines procède de la même tendance (si ces appareils prolifèrent, ce n'est pas seulement du fait de la pègre, c'est d'abord parce qu'il y a une forte demande pour ce type de divertissements....).

La situation des jeux en France peut sembler satisfaisante puisque notre pays se situe :

- au deuxième rang mondial, selon la Cour des comptes, pour les casinos

- au cinquième, en ce qui concerne les loteries,

- en seconde position européenne, d'après la commission, en terme de volume de paris.

Cependant

- concernant les machines à sous, la loi très rigoureuse, du 16 décembre 1992 133( * ) , prohibe « la fabrication de tout appareil dont le fonctionnement repose sur le hasard et qui permet, éventuellement, par l'apparition de signes, de procurer moyennant enjeu un avantage direct ou indirect, de quelque nature que ce soit, même sous forme de parties gratuites. »

Il n'y a donc pas d'industrie nationale correspondante, malgré une demande, et donc des débouchés potentiels, importants.

Au sujet des machines autorisées par la loi du 5 mai 1987 dans les casinos, la Cour des comptes a souligné, dans son rapport public, le ralentissement sensible de leur croissance, depuis 1995, face à une progression exponentielle de la demande, du fait de la politique limitative des pouvoirs publics (les motivations de cette attitude restrictive, soi-disant justifiée par des impératifs de police « ne reposent pas -d'après la haute juridiction- sur des données objectives et mesurables, faute d'analyse et d'étude sur les effets du développement des jeux... »).

De fortes pressions ne manqueront pas de s'en suivre.

A l'appui de son refus actuel d'autoriser des machines à sous dites « douces » (à mises et gains limités) dans certains lieux publics (à déterminer, mais il semble que les débits de boisson soient les plus indiqués) l'administration invoque :

- les abus auxquels auraient donné lieu des assouplissements précédents

- l'impossibilité matérielle de mettre en place des contrôles suffisants.

Ces deux raisons ne paraissent pas pleinement recevables à votre rapporteur :

- les dérives constatées à la suite des dérogations à la loi de 1983, autorisées par le décret du 13 avril 1987, s'expliquent par une mauvaise conception des dispositions en cause, beaucoup plus que par un risque inhérent à toute libéralisation.

En effet, les « distributeurs de confiserie » concernés, dits « distributeurs alimentaires à prime », étaient mis en vente libre sans homologation préalable ni contrôle.

La mesure avait été préparée et prise sans concertation avec les professionnels intéressés.

- Concernant la difficulté, alléguée, d'assurer un contrôle efficace sur des jeux dispersés en une multitude de sites d'implantation, elle est réelle mais maîtrisable par l'administration.

En effet, le fonctionnement des quelques 15.000 machines à sous actuellement implantées dans environ 60 casinos paraît actuellement encadré de façon satisfaisante.

Les logiciels sont agréés (et inaccessibles aux opérateurs) de même que les sociétés de fourniture et de maintenance (SFM). Une même marque ne doit pas représenter plus de 50 % du parc d'appareils installés, sauf dans de petits établissements, et les ventes de machines d'occasion sont interdites.

Par ailleurs, 170.000 pompes à essence et 400.000 instruments de pesage sont bien vérifiés, aujourd'hui, par soixante organismes habilités à le faire, de façon déconcentrée, par les DRIRE 134( * ) .

La tâche ne semble donc pas insurmontable (il existe 65.000 débits de boissons titulaires d'une licence IV dont 40.000 exploitent environ 80.000 appareils).

En tout état de cause, l'étude précitée du MCC 135( * ) fait état d'un parc de machines, le plus souvent installées dans des cafés et tabacs de :

- 227.000 appareils en Allemagne

- 215.000 en Grande-Bretagne

- 252.000 en Espagne.

Cette estimation rejoint celle de la Cour qui évalue le nombre de machines à sous, dans les casinos ou autres lieux, à plus de 200.000 dans ces mêmes pays.

Cela n'y pose pas -que votre rapporteur sache !- de problèmes majeurs d'ordre public.

Il résulte de la prohibition française :

- une absence d'industrie nationale, un freinage, dans les casinos, de l'adaptation de l'offre à la demande (près d'une centaine d'établissements ne possèdent pas encore de machines), et le développement de pratiques clandestines, donc, au total, un déficit de croissance et d'emploi .

Dernier effet non désiré (sinon indésirable) :

La limitation de l'ouverture de nouveaux établissements et de celle, dans les casinos existants, de l'implantation de machines à sous 136( * ) ont conduit à accentuer la concentration du secteur, au détriment des petites entreprises familiales.

Les machines « douces » rapportaient en 1999, selon l'étude précitée du MCC, de 1,7 (Grande-Bretagne, Allemagne) à 5,6 milliards de francs (Espagne) de recettes publiques aux pays considérés. L'évasion fiscale due à l'interdiction de ces appareils en France est évaluée à environ 6 milliards de francs.

b) des risques d'exercice clandestin ou d'expatriation des activités concernées

• L'exercice clandestin d'activités trop rigoureusement prohibées n'est plus un risque, en ce qui concerne les machines à sous hors des casinos, c'est une réalité.

Le phénomène toucherait, on l'a vu, de 6.000 à 30.000 appareils non autorisés en France, provoquant, pour s'en assurer les profits, de sanglants affrontements (guerres territoriales, gagnant, à partir du midi, notamment la région parisienne et guerres de succession au sein de la pègre).

• Dans le secteur des casinos, qui se concentre et s'internationalise, l'essentiel, comme indiqué au chapitre premier, est que le solde des mouvements de capitaux entrant et sortant ne nous soit pas défavorable.

Or notre pays reste assez attractif pour des investisseurs étrangers en raison du potentiel de croissance des machines à sous et des perspectives ouvertes par l'amendement Chaban (ouverture d'établissements dans le cadre des grandes villes), même si le critère, désuet, des stations classées (thermales, balnéaires ou climatiques) est limitatif .

On pourrait, d'ailleurs, lui substituer celui de la fréquentation touristique.

L'interdiction des machines « douces » dans les lieux publics exerce aussi une influence favorable.

En revanche, un risque réel d'expatriation de compétences et de capitaux existe en ce qui concerne les cyberjeux .

« L'attribution de licence se fait en plus en plus rare dans les pays occidentaux, note Catherine Radiguer, analyste financière chez Détroyat Associés 137( * ) . Le rachat d'un autre établissement devient de plus en plus cher, d'où l'intérêt des acteurs traditionnels pour le Net ».

En l'absence de toute législation française dans ce domaine, ce n'est pas en France mais aux Bahamas qu'est hébergé, par une société tierce et moyennant une rémunération au pourcentage, le site de casino virtuel que vient d'ouvrir le groupe Partouche (casino-partouche.com).

Il résulterait naturellement d'une généralisation de ces pratiques une évasion de capitaux et de revenus préjudiciable à la France.

Ce risque concerne aussi les concepteurs de cybercasinos. Il a été évoqué, devant votre rapporteur, par M. François Brust, créateur d'une start up spécialisée dans ce domaine, « Blue winners S.A. ».

La législation française, a-t-il fait valoir, n'autorise pas les internautes français à pratiquer des jeux d'argent en ligne sur des sites hébergés sur notre territoire (sauf en ce qui concerne les loteries de la Française des jeux ou les paris du PMU).

Seuls sont autorisés des gains en nature (voyages, etc...) financés par la publicité. Les frais de connexion doivent être remboursés 138( * ) pour rester dans le cadre des loteries autorisés et ne pas rentrer dans celui des loteries prohibées.

M. Brust estime à 10.000 le nombre d'emplois liés aux cyberjeux en France.

Il a déclaré, lors de son audition, avoir réduit les effectifs de son entreprise et envisager de s'installer sous des cieux plus cléments, réglementairement et fiscalement.

• Les prélèvements sur les jeux en France paraissent être les plus élevés du monde 139( * ) .

Or, pour que l'activité prospère et soit attractive, il faut :

- un renouvellement de l'offre, pour lutter contre l'usure, inévitable, des produits anciens ;

- une espérance de gains, à la fois assez fréquents et relativement élevés, ce qui dépend du nombre 140( * ) de joueurs (pour les jeux de répartition) et du montant des mises ainsi que des retenues des pouvoirs publics.

Cependant, la situation des opérations est, actuellement, relativement florissante (ce qui ne saurait nécessairement perdurer, du fait de certains nouvelles formes de concurrence...).

• C'est, principalement, en amont des courses de chevaux que se posent les principaux problèmes.

Sans les propriétaires, les éleveurs et les entraîneurs, il n'y aurait pas de courses, donc pas de paris possibles. C'est pourquoi votre rapporteur considère que leurs activités rentrent dans le cadre de son étude.

Le régime agricole dont peuvent bénéficier les éleveurs exerce une assez forte attraction sur les autres professions de la filière et a fait l'objet d'une certaine extension consentie par l'administration 141( * ) .

En effet, les entraîneurs qui sont en même temps éleveurs, peuvent être placés sous ce régime à certaines conditions 142( * ) , alors qu'ils relèvent, normalement, de celui des bénéfices non commerciaux 143( * ) (BNC), de même que les propriétaires 144( * ) .

Concernant ces derniers, une instruction du 28 mai 1997 est venue préciser les conditions d'imposition des copropriétés d'étalons qui peuvent prendre la forme d'une indivision conventionnelle (dont les règles sont plus souples que celles d'une indivision légale) ou d'une société en participation.

La jouissance individuelle et personnelle des biens est l'objectif recherché par les indivisaires tandis que celui des sociétaires est le partage des bénéfices des activités concernées (saillies, cessions...).

L'instruction précitée comporte différentes « mesures de tempérament » tendant à ce que le caractère indivisaire d'une copropriété qui, selon l'institution des courses, doit en constituer le statut de droit commun, ne soit pas remis en cause par certaines opérations 145( * ) .

La qualification expresse en BIC (bénéfices industriels et commerciaux) des revenus des copropriétaires a été supprimée.

Dans le cas de sociétés en participation, les membres de la copropriété se sont trouvés imposés désormais suivant les règles de droit commun applicables aux revenus perçus par les associés d'une société de personnes.

Cependant, ces mesures , ainsi que d'autres 146( * ) , ne suffisent pas à éviter une certaine expatriation de capitaux, de compétences et d'activités , dans un secteur de plus en plus ouvert à la concurrence. Ainsi :

- la France abrite seulement 3 des meilleurs étalons mondiaux (dont les prix de saillie dépassent 100.000 F), l'Irlande 22, l'Angleterre 19 ;

- chaque année, 450 de nos meilleures juments partent se faire saillir à l'étranger ;

- les produits d'étalons français remportent moins d'un quart de nos propres épreuves de prestige et sont moins de 4 % à figurer dans le classement mondial ;

- en dix ans, le nombre de propriétaires de chevaux de galop a diminué d'un tiers dans notre pays 147( * ) ;

- 1 % seulement des yearlings (poulains de un an) vendu à Deauville en août 2001 a été acheté par des propriétaires français résidents.

Cette évolution, très préoccupante, affectait jusqu'à présent, dans une moindre mesure, les entraîneurs et l'institution des courses elle-même.

Mais les premiers, convenablement dotés 148( * ) , en ce qui concerne la répartition des gains des courses, sont en butte aux difficultés liées aux 35 heures (législation qui leur est particulièrement inadaptée). Et la seconde, si les compétitions françaises demeurent encore attractives aujourd'hui, est menacée, à terme, par la concurrence de pays à prélèvements inférieurs (notamment la Grande-Bretagne qui a considérablement allégé sa fiscalité en ce domaine).

Pour en revenir aux propriétaires de chevaux de course et d'étalons, l'Irlande, comme indiqué au chapitre premier, a une fiscalité incomparablement plus simple et plus légère que la nôtre.

Leur activité y étant considérée comme un loisir, les gains et primes reçus par les propriétaires à l'issue de courses hippiques échappent, là-bas, à l'impôt sur le revenu.

Il en va de même des bénéfices ou ressources relatifs aux saillies d'un étalon mis en pension dans ce pays, qui ne sont pas redevables non plus de l'impôt sur les sociétés, lorsque le propriétaire -ce qui est autorisé- est une société de capitaux 149( * ) .

Cet avantage est également accordé aux propriétaires non-résidents de même que l'exonération dont bénéficient les plus-values de cession.

Ainsi, comme le note très justement notre collègue sénateur Ambroise Dupont 150( * ) , la France est très pénalisée par sa fiscalité.

Sans se prononcer sur leurs aspects techniques, s'agissant d'une matière d'une complexité ahurissante, votre rapporteur voudrait faire état ici des principales difficultés rencontrées et suggestions émises :

- au sujet des syndicats d'étalon , les décrets relatifs aux statuts types et aux modalités de fonctionnement des sociétés en participation ne sont toujours pas parus (leur régime fiscal est plus rigoureux que celui des indivisions qui risquent, à leur détriment, d'être confondues avec elles...). Les syndicats attendent depuis plus de quatre ans une instruction sur la TVA, précisant notamment si les saillies individuelles doivent être prises en compte dans l'assiette de leur contribution ;

- une ambiguïté subsiste à propos des associations de carrière 151( * ) qui peuvent prendre la forme soit d'une indivision conventionnelle, soit d'une société en participation. La présence parmi les membres de l'association de personnes exerçant des activités professionnelles ne devrait plus remettre en cause le caractère indivisaire de l'exploitation du cheval dès lors qu'il n'y a pas révélation d'un affectio societatis ;

- tous les propriétaires relevant du régime des BNC pourraient imputer leurs pertes sur leur revenu global, même ceux considérés comme n'agissant pas à titre professionnel (dans la mesure où 40 % seulement des frais d'entraînement d'un cheval de courses sont couverts, en moyenne, par les gains) ;

- les propriétaires ou éleveurs « sans sol » 152( * ) bénéficieraient d'un abattement sur leurs plus-values imposables en cas de cession :

. de 15 % (au lieu de 30 %) pour les particuliers,
. de 50 % pour ceux relevant des BNC

en compensation des cumuls de pertes souvent importants enregistrés les années antérieures ou pour atténuer les effets de la réalisation de gains importants avant la vente 153( * ) ;

- il serait également bienvenu de préciser que les éleveurs sans sol, non intervenant 154( * ) , ne sont pas soumis à l'impôt sur le revenu (sauf pour leurs plus-values, en cas de revente).

Mais il n'est pas certain que ces mesures, raisonnables, suffisent à contrer les effets du dumping irlandais. Sans doute pourrait-on en concevoir de plus radicales telles que :

. l'exemption d'impôt sur les bénéfices de l'exploitation des étalons stationnés en France ;

. ou l'exonération d'impôt sur les plus-values remployées à l'achat de chevaux.

Il existe un certain paradoxe français : tandis que les sociétés de courses, qui sont des associations de la loi de 1901, ne payent pas l'impôt sur les sociétés 155( * ) , même si leurs activités sont rentables, certains propriétaires, qui ne sont pas des professionnels, tendent à être imposés comme tels, alors qu'ils essuient de lourdes pertes.

D'autre part, les prélèvements (non fiscaux) sur les mises, qui sont particulièrement lourds en France, contribuent à aider des activités, elles-mêmes taxées plus sévèrement aussi qu'ailleurs.

Le prélèvement nourrit ainsi l'impôt !

*

* *

Les différentes formes d'évasion, dans la clandestinité ou à l'étranger, d'activités soumises à un excès de contraintes, sont liées à une inadaptation aux profondes mutations du secteur d'une politique des jeux trop restrictive et trop figée.

4. Une adaptation insuffisante à de profondes mutations

a) de profondes mutations

Les mutations profondes que subit le secteur des jeux ont déjà été évoquées dans les chapitres précédents de cette partie du rapport. Elles tiennent :

- aux évolutions de la demande, et notamment à l'explosion de celle concernant les machines à sous, avec les nouvelles formes de dépendance qui les accompagnent ;

- aux possibilités offertes par le progrès des technologies qui permettent de contourner les législations nationales et d'offrir aux joueurs des possibilités et des sensations inédites ;

- enfin, aux formes originales de concurrence qui apparaissent et nécessitent une réaction de la part des opérateurs « historiques » : casinos et loteries en ligne, pression pour l'autorisation de machines douces dans les lieux publics, possibilité de parier en France sur des courses étrangères et tentation d'expatriation éprouvée par les acteurs de l'« amont » des courses de chevaux (propriétaires, éleveurs, entraîneurs...).

b) des réponses pas toujours adéquates

- La politique des jeux des pouvoirs publics est une politique de l'offre qui -on l'a vu- ne prend pas suffisamment en compte une demande qu'elle connaît mal parce qu'elle ne l'étudie pas assez.

De ce fait, l'Etat se replie sur une attitude restrictive, sans exercer pour autant, comme il conviendrait, ses fonctions régaliennes : la répression des machines clandestines (qu'il ne faut pas confondre avec les machines « douces » susceptibles d'être autorisées) n'est pas vraiment efficace. Les règles relatives à l'interdiction des jeux (concernant les mineurs et les adultes qui, le plus souvent, en ont fait eux-mêmes la demande) sont mal appliquées, notamment en ce qui concerne l'accès aux machines à sous des casinos. Comme l'a souligné la Cour des comptes au sujet de ces établissements, des contrôles, insuffisamment coordonnés et à certains égards trop tâtillons, ne se concentrent pas assez sur l'essentiel 156( * ) . La notion de groupe, notamment, n'est pas assez prise en compte, de même que l'intercommunalité dans le système de prélèvements publics.

- Les problèmes posés par le développement des cyberjeux n'ont pas été suffisamment anticipés. Il y a, dans ce domaine, un flou juridique (pas seulement en France 157( * ) ), et une absence, regrettable, de concertation internationale. Que faut-il essayer d'interdire ? Seulement l' offre à nos concitoyens, par des opérateurs français, de jeux interdits par notre législation ? Ou aussi la consommation de ces produits par des Français ? En d'autres termes, faut-il condamner seulement l' opérateur (qui peut proposer aux étrangers, hors de France, ce qu'il veut) ou aussi le joueur (dont on voit mal comment on pourrait le contraindre à respecter les monopoles français en l'empêchant d'accéder, sur des sites situés hors de notre territoire, à des jeux étrangers) ?

Il ne semble pas que l'administration, qui s'est contentée de créer un service de veille Internet 158( * ) chargé d'empêcher l'implantation de tels sites en France, soit en mesure de résoudre cet épineux problème.

Elle a du mal, au demeurant, à établir des règles de jeux équitables entre opérateurs français (voir plus loin).

Mais les nouvelles technologies doivent être considérées comme des moyens, pas seulement de contourner la législation, mais aussi, au contraire, de la faire respecter.

On peut imaginer, par exemple, le recours à des techniques d'identification d'empreintes digitales 159( * ) ou admettre que la CNIL 160( * ) autorise des croisements de fichiers informatiques entre le ministère de l'Intérieur et les casinos, afin de mieux faire respecter les interdictions de jeux. Peut-être des systèmes de limitations automatiques des mises à domicile pour les jeux en ligne sont-ils concevables (comme il en existe pour les retraits d'argent liquide par carte bancaire dans les distributeurs automatiques) ?

- Les nouvelles technologies introduisent des formes inédites de concurrence dans le secteur des jeux.

Or, l'Etat ne fait pas toujours en sorte que celle-ci soit équitable entre opérateurs français.

La Française des jeux et le PMU ont ainsi été autorisés à proposer des loteries ou paris en ligne, possibilité qui n'était pas offerte aux casinos (d'où l'initiative anticipée du groupe Partouche dont le site, semble-t-il, n'est cependant pas proposé depuis la France aux joueurs français...). Le monopole de la FDJ (à laquelle l'inspection des Finances a conseillé de réfléchir à une offre susceptible de contrer une éventuelle offensive en ligne de bookmakers étrangers) freine l'éclosion de nouveaux produits nationaux sur le Net.

Plus généralement, « on se doit -comme le fait la Cour des comptes- de relever l'ambivalence du rôle de l'Etat, à la fois acteur à travers la Française des jeux, et régulateur dans un domaine aussi sensible ».

Tout au long de ses lectures et de ses auditions, votre rapporteur a recueilli les doléances des différents opérateurs, les uns vis-à-vis des autres, preuve qu'il existe un véritable problème de concurrence dans le secteur (la jurisprudence, d'ailleurs, en témoigne) :

1. plaintes des créateurs de cyberjeux et des exploitants d'appareils automatiques à l'encontre du monopole de la FDJ ;

2. craintes des casinos menacés par des produits virtuels et par l'éventuelle autorisation de machines « douces » (que le PMU voudrait pouvoir installer dans les hippodromes) ;

3. dénonciation du caractère discrétionnaire des autorisations d'ouverture d'établissements données par le ministère de l'Intérieur, après avis d'une commission supérieure des jeux, elle aussi critiquée ;

4. jalousie, enfin, du PMU, à l'égard du budget publicitaire de la FDJ.

Tout ceci paraît devoir faire réfléchir à la création éventuelle d'une instance indépendante de régulation (voir plus loin).

Des trois principaux secteurs, celui des courses paraît à la fois le plus exposé à une réelle concurrence internationale (notamment dans l'amont) et le moins menacé par les cyberjeux : rien ne paraît devoir remplacer l'émotion que procure l'assistance en direct à une compétition entre des animaux bien réels (ou sa retransmission).

Le PMU semble aussi, à votre rapporteur, jouir d'une sorte de propension à l'organisation de pronostics. De ce point de vue, il était naturel que les paris sur les parties de pelote basque soient pris sur les hippodromes 161( * ) , mais il n'apparaissait pas rationnel d'avoir autorisé, en 1985, la Française des jeux à exploiter le Loto sportif.

L'institution des courses françaises apparaît doublement menacée :

- par les ambitions de la Grande-Bretagne qui, afin de faire de Londres l'une des capitales mondiales des paris, a supprimé les droits sur les enjeux, pour n'imposer (au taux de 15 %) que les bénéfices des participants ;

- par notre déficit en reproducteurs de qualité.

Notre patrimoine génétique, en effet, s'est considérablement appauvri de 1990 à 1998. Les rares syndications qui ont vu le jour depuis l'instruction, précitée, de mai 1997 (dissuasive, fiscalement, de toute participation étrangère) n'a malheureusement pas concerné le haut de gamme de l'étalonnage.

L'action des haras nationaux n'a pas suppléé sur ce plan, faute de moyens financiers, les déficiences de notre élevage (activité à caractère majoritairement privé en France).

Les activités liées aux courses souffrent d'une image brouillée de « passe-temps ou de fausse richesse 162( * ) » !, quand leur caractère agricole n'est pas carrément contesté.

Des avantages fiscaux substantiels ne sont-ils pas préférables à un système de primes (au propriétaire et à l'éleveur) ?

Le statut de l'association de la loi de 1901 survivrait-il à l'instauration, dans l'Union européenne, de la concurrence véritable (mais il n'y a pas encore de politique commune en la matière) que la commission semble juger inévitable ?

Le président du syndicats des propriétaires de chevaux de courses au galop, M. Aubry-Dumand, suggère de se préparer dès maintenant à une telle éventualité 163( * ) .

Les tenants du système actuel souligne qu'il n'empêche pas le PMU d'être géré comme une véritable entreprise et permet, grâce à l'appel au bénévolat, des économies substantielles.

*

* *

Ainsi, une appréciation davantage fondée sur des principes moralisateurs que sur une analyse objective et approfondie de la situation des jeux, conduit l'Etat à privilégier la maîtrise de l'offre et les aspects juridiques et financiers, au détriment d'une logique plus économique qui s'efforcerait, à la fois, de mieux prendre en compte la demande et d'assurer une concurrence plus équitable entre les opérateurs. Un cadre trop contraignant, fiscalement et réglementairement, complexe et archaïque, conduit à des comportements d'évasion (expatriations ou pratiques clandestines) ou à des réponses inadéquates aux profondes mutations en cours (notamment technologiques et concurrentielles). L'Etat, pour autant, n'assure pas parfaitement la protection de l'ordre public qui constitue sa priorité (notamment en ce qui concerne les mineurs, les interdits de jeu, les machines clandestines...).

Mais il exerce cependant sa mission, de ce point de vue, d'une façon, dans l'ensemble, plutôt efficace et satisfaisante.

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