B. LA COLLECTE
1. Situation
a) Présentation générale
Il n'y a
pas de recyclage sans une bonne récupération des produits
à recycler, c'est-à-dire sans une collecte adaptée. Au
départ, les intérêts de chacun sont opposés.
L'intérêt du collecteur est d'aller au plus simple et au moins
coûteux. Les déchets sont collectés en vrac -" en
mélange "-, dans des sacs poubelles, par les services de ramassage
des ordures. L'intérêt des professionnels du recyclage est, dans
la plupart des cas, d'avoir des produits les plus " propres "
possible, et en tout cas, des produits mono-matériaux -le verre, le
papier, le métal...- si possible séparés. Naturellement,
la collecte de produits " purs " ou "
quasi
purs "
est impossible. Il n'y a pas de collecte séparative sans tri. Les
bouteilles en verre comprennent toujours du papier, de la colle, des
bouchons... Le papier contient de l'encre, des agrafes... Mais, plus le produit
est livré homogène, et plus la valorisation sera facile pour la
société. Il y a donc un équilibre à trouver, voire
un arbitrage à opérer entre le possible et le souhaitable
L'équilibre a été trouvé par la " collecte
sélective ". Ainsi, à côté de la collecte
traditionnelle des ordures en mélange, du porte à porte, il
existe plusieurs formes de collecte séparative :
la collecte séparative en
porte à porte
qui
récupère une sélection de produits recyclables, au premier
rang desquels les emballages ;
la collecte par "
apport volontaire
" dans des colonnes,
dans des conteneurs spécifiques, en ville, qui récupèrent
les produits recyclables directement liés aux ordures
ménagères ;
les
déchetteries
, éloignées des villes. Les
déchetteries reçoivent des déchets qui, pour la plupart,
ne seraient pas traités par les services de ramassage
traditionnels.
Les formes de collecte |
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Collecte en mélange " porte à porte " |
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Bacs individuels(un ou plusieurs bacs) |
Déchets ménagers |
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Collecte séparative " porte à porte " |
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Collecte séparative par apport volontaire (Colonnes) |
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Apport volontaire |
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Déchetteries |
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Dans tous les cas, les produits collectés doivent être regroupés (centres de transfert), puis triés (centres de tri), puis une nouvelle sélection des matériaux est opérée respectant une qualité minimum satisfaisant aux " prescriptions techniques minimales " (PTM), afin de pouvoir être utilisés par la suite dans des filières de recyclage.
b) La collecte séparative
Les
collectes séparatives consistent à collecter, dans un ou
plusieurs bacs ou conteneurs, les produits valorisables, en particulier les
emballages. Les collectes séparatives peuvent être en " porte
à porte " avec un ou plusieurs conteneurs individuels, ou en apport
volontaire, dans des " bennes " ou " colonnes "
situés à des emplacements étudiés en centre ville
ou en périphérie, de façon à permettre une desserte
satisfaisante de la population, sans avoir trop d'inconvénients. Les
collectes séparatives peuvent être à un, deux, trois,
quatre voire cinq flux. Un flux correspond en général à un
bac ou à un conteneur, mais deux opérations test ont
été lancées avec succès pour une collecte avec un
conteneur divisé en deux bacs, donc deux flux.
Dans la plupart des programmes de collecte sélective, la collecte peut
être en porte à porte (PAP), en apport volontaire (AV), ou en
mixte (avec un partage entre collecte PAP/AV, selon les zones desservies).
Encadré n° 6
Les
conteneurs
___
60 % de la population française est équipée de
conteneurs, soit 9 à 10 millions de conteneurs. En 1999, la France
comptera 27 millions de trieurs en collecte séparative, ce qui
représente 3,5 millions de conteneurs individuels et
70.000 conteneurs en " colonnes " d'apport volontaire.
Pour donner un ordre de grandeur, le prix des conteneurs est de 250 F pour un
bac de 120 litres, 280 F pour un bac de 280 litres, 1.300 F pour un bac de 660
litres.
Le marché des bacs, qui représente de l'ordre de 2,5 milliards
de francs, est partagé entre une douzaine d'industriels, dont les trois
principaux réalisent près de 90 % de l'ensemble (Plastic
Omnium 47 %, CITEC (filiale d'un groupe allemand) 25 %, Temaco
(filiale de SITA) 15 %).
Dans 70 % des cas, la collecte sélective en porte à porte a
lieu avec un bac unique, mais il existe aussi d'autres formules, soit sous
forme de petits bacs ou de caissettes individuelles (Cette formule, bien que
relativement dépassée, et ne facilitant pas la
mécanisation, existe dans le Sud de la France), soit sous forme de
conteneurs à deux compartiments (avec cloison séparative) :
un compartiment pour le verre, un compartiment pour les autres
" " propres et secs ". (Cette formule est testée avec
succès dans la communauté urbaine de Lille et dans le
périmètre du SITCOM de Rambouillet).
Sans nier l'intérêt de cette dernière formule qui donne
des résultats très encourageants, la collecte des recyclables
avec un bac unique donne également satisfaction. On peut même
considérer que la séparation interne a des coûts induits
qu'il ne faut pas négliger (camions spécifiques, entretien plus
complexe), sans éviter pour autant le tri ultérieur en centre de
tri.
Nous aurons par conséquent tendance à privilégier la
solution de facilité, avec collecte des produits recyclables hors verre
(collectés en apport volontaire), en bac unique, qui permet un geste
simple et, par conséquent, un message simple. Mais le dossier reste
ouvert, car l'important n'est évidemment pas le nombre de bacs, mais la
volonté de tous de s'en servir...
Les résultats en matière de collecte sont très directement
liés aux initiatives, aux efforts et aux soutiens financiers
apportés par les organismes agréés. Il faut saluer
particulièrement Éco-Emballages, qui a superbement fait
décoller la collecte sélective. Partant de rien en 1993, plus des
deux tiers de la population devrait être desservie dix ans plus tard en
2002. (voir aussi troisième partie)
Évolution de la population impliquée dans la collecte sélective (millions d'habitants) |
||||||||
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1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2002 |
Population sous contrat* |
0,3 |
14 |
17,3 |
22,3 |
25 |
32 |
38 |
52 |
Population desservie* |
-- |
2,8 |
4,9 |
9 |
12 |
19 |
27 |
40 |
Nota : La différence entre les deux notions s'explique par l'étalement de l'application des contrats dans le temps. |
||||||||
Source : Éco-Emballages |
Les produits ainsi collectés ne sont pas suffisamment homogènes et doivent faire l'objet d'un tri pour satisfaire aux " prescriptions techniques minimum " (PTM) imposées par les organismes agréés pour que les produits puissent être récupérés et valorisés par les filières correspondantes. On observera que cette étape est indispensable, même en cas de collecte séparative très fine (type 4 ou 5 flux). Cette opération s'opère en centres de tri. Le tri peut être " positif " ou " négatif ". L'opération de " tri négatif " consiste à extraire d'un flux les déchets indésirables pour ne conserver en fin de tri qu'une fraction résiduelle valorisable.
c) Les déchetteries
Présentation
Une déchetterie est un lieu d'apport de déchets, gardé,
ouvert aux particuliers et, éventuellement, aux artisans et
commerçants. Leur vocation est de recevoir des matériaux qui ne
peuvent être collectés par les services de ramassage courants,
à cause de leur nature (huiles), de leur taille (équipements
ménagers, coupes de bois...) et de leur quantité (gravats...). Le
nombre de déchets sélectionnés varie selon l'implantation
et l'importance de la déchetterie, mais la majorité comporte cinq
à sept bennes ou modules (avec, par ordre de priorité des
déchets sélectionnés triés, les métaux, le
papier carton, le verre, les déchets verts, les gravats, puis, loin
derrière, le bois, les pneus, les huiles...).
En 1996, la France comptait 1.438 déchetteries desservant
31,5 millions d'habitants. Depuis 1992, il s'ouvre plus de 200 nouvelles
déchetteries par an. Le parc a donc " explosé " en
quelques années, comme il est indiqué dans le tableau
ci-après :
Évolution du parc de déchetteries |
||
|
Nombre de déchetteries |
Population desservie (en millions d'habitants) |
1988 |
123 |
5,5 |
1989 |
171 |
6,8 |
1990 |
241 |
8,6 |
1991 |
360 |
11,4 |
1992 |
558 |
16,7 |
1993 |
752 |
20,6 |
1994 |
996 |
25,4 |
1995 |
1.234 |
28,6 |
1996 |
1.438 |
31,5 |
Source : ADEME, Les déchetteries en France , septembre 1998 |
En 1996,
les déchetteries ont collecté 3,8 millions de tonnes de
déchets. Le succès des déchetteries est lié :
à la
diversité de la formule
. La déchetterie
est un concept modulable en fonction de la localisation, des
caractéristiques et de l'importance de la population et des
déchets. Il faut bien connaître le flux des déchets avant
de s'engager dans un investissement, mais une fois le flux connu, il existe une
solution adaptée à chaque situation. Le coût d'une
déchetterie (investissement hors aide) est compris entre 240.000 F et
1,9 million de francs.
Coût d'investissement d'une déchetterie |
||
Mode |
Population desservie |
Coût |
Sans quai |
5.000 |
240.000 F |
Quai 4 modules |
5 - 10.000 |
600.000 F |
Quai 8 modules |
20 - 25.000 |
1.200.000 F |
Quai 12 modules |
30 - 40.000 |
1.900.000 F |
Source : ADEME |
à l'
adaptation à la demande
. Les
déchetteries répondent à un besoin latent de la part de la
population, totalement inassouvi jusque là. Que faire notamment des
gravats et des " monstres " (équipements
électroménagers hors d'usage) ? La déchetterie permet
un tri, et évite surtout, -hélas en partie seulement- les
décharges sauvages aussi nocives qu'affligeantes. A la condition qu'elle
soit accessible. Mais les règles de comportement sont aujourd'hui
parfaitement connues. (La notion de " population à 10 mn "
définit le rayon d'action de la déchetterie. On estime qu'au
delà, le particulier est peu incité à se déplacer.)
L'incidence sur l'emploi ne peut être oubliée. Le personnel est
indispensable à la bonne marche d'une déchetterie pour assurer la
surveillance, le nettoyage, le contrôle des déchets et
l'assistance aux particuliers, car la qualité du tri est très
importante. En 1996, les déchetteries employaient 2.176 personnes, soit
1.100 équivalents temps plein.
Les limites
Première limite.
En dépit d'une progression
constante, les
volumes
collectés restent
faibles
(3,8 millions de tonnes) et les fréquentations restent
occasionnelles : 0,8 visite par habitant et par an. Encore ne s'agit-il
que d'une moyenne, puisqu'on observe, une fois encore, un décalage
important entre les zones urbaines et les zones rurales. Les habitants des
zones rurales ont cinq fois plus de déchetteries que les habitants des
zones urbaines (0,5 visite par an et par habitant).
Le succès d'une déchetterie est également très
dépendant de sa situation et de son organisation. Encore plus que la
qualité, le gardiennage, la disponibilité du site est capitale au
succès d'une déchetterie qui peut tout simplement dépendre
des jours et heures d'ouverture, notamment en fin de semaine !...
Deuxième limite
. La déchetterie n'est pas
l'antichambre de la valorisation. Elle répond parfaitement à son
objectif prioritaire qui est de recevoir les matériaux non
collectés par ailleurs, mais près de la moitié des
déchets collectés vont en décharge. La fraction
valorisée n'est que de 40 %... Ces proportions sont logiques
puisque les gravats et inertes représentent à eux seuls
près du tiers des déchets collectés.
Composition et destination des déchets des déchetteries |
|||||
Composition |
Destination |
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|
Milliers de tonnes |
% |
|
Milliers de tonnes |
% |
Gravats et inertes |
1.221 |
32,2 |
Décharge |
1.783 |
47 |
Vrac |
844 |
22,2 |
Incinération ou valorisation énergétique |
114 |
3 |
Déchets verts |
726 |
19,1 |
Valorisation matière |
1.517 |
40 |
Autres |
1.002 |
26,5 |
Autres |
379 |
10 |
Total |
3.793 |
100 |
|
3.793 |
100 |
Source : ADEME - Traitement OPECST |
d) Indications de coûts
Les coûts de collecte proprement dits
Les coûts majeurs de collecte varient dans une fourchette large, comprise
entre 350 et 1.350 francs par tonne, selon le type d'habitat et les modes
de collecte.
Prix moyen de collecte (en francs par tonne) |
||
|
Habitat collectif |
Habitat individuel |
Collecte sélective propre et sec en porte à porte |
500 |
1.350 |
Collecte d'ordures ménagères résiduelles |
350 |
450 |
Encore, ne s'agit-il que de moyennes, les prix, là encore donnés à titre indicatif, dépendent surtout des modes de collecte sélective choisis (entre un flux, c'est-à-dire tous matériaux confondus, et quatre flux, chaque correspondant à un matériau déterminé).
Estimation des coûts de collecte selon les modes de collecte (en francs par tonne) |
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|
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|
Apport volontaire verre |
|
195 - 230 |
|
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|
|
|
Collecte sélective 1 flux |
Habitat individuel |
855 - 1.015 |
|
|
|
|
|
Collecte sélective 1 flux hors verre |
Habitat individuel |
1.250 - 1.485 |
|
|
|
|
|
Collecte sélective 2 flux verre / autres |
Habitat individuel |
1.100 - 1.290 |
|
|
|
|
|
Collecte sélective 2 flux hors verre / PCJM 1 / autres |
Habitat individuel |
1.505 - 1.770 |
|
|
|
|
|
Collecte sélective 3 flux |
Habitat individuel |
1.920 - 2.260 |
|
|
|
|
|
Ordures ménagères résiduelles |
Habitat individuel |
410 - 490 |
|
|
|
|
|
Collecte sélective 1 flux hors verre |
Habitat collectif |
850 - 1.015 |
|
|
|
|
|
Ordures ménagères résiduelles |
Habitat collectif |
290 - 425 |
|
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|
|
1 PCJM : papiers, cartons, journaux, magazines |
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|
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Source : Étude SOFRES/AMF/ADEME |
Les coûts de tri
Les produits collectés par collecte séparative doivent ensuite
être triés pour satisfaire une prescription technique minimum
(PTM) qui leur permette d'être ensuite repris et valorisés par les
différentes filières.
Les coûts de tri s'échelonnent entre 750 et 1.100 francs par
tonne. Ce coût est imputable pour 50 à 60 % aux
dépenses en personnel, 20 % aux investissements, 10 % à
la gestion des refus de tri, qui sont généralement
incinérés (coût moyen d'incinération :
560 F/tonne). Avant incinération, les déchets sont
également dirigés vers des centres ou plates-formes de
transferts, qui permettent de regrouper les déchets. Chaque étape
entre la collecte et le traitement final impose évidemment un coût
supplémentaire.
e) Comparaisons internationales
La
France a choisi une formule de collectes qui se caractérise par une
certaine diversité, une bonne intégration des équipements
dans le paysage urbain, l'absence de contraintes. D'autres systèmes sont
naturellement concevables. Chaque pays, chaque région doit s'adapter au
contexte local. La disponibilité des équipements est une
étape, mais ce sont les habitudes individuelles et les mentalités
des collectivités qui font le succès ou non des opérations.
Autres pays, autres moeurs, autres systèmes, comme en témoignent
les deux exemples qui suivent.
Le système américain
Au début des années 1990, les États-Unis se sont
engagés dans une politique volontariste de valorisation et de
réduction des déchets mis en décharge, conditionnée
par une collecte adaptée. En Californie, qui se veut un modèle
dans le domaine du recyclage, la collecte est semi-automatique. Selon les
villes, il existe deux, trois ou quatre poubelles séparées par
matériaux (avec une poubelle spécifique pour les journaux et
revues, compte tenu de l'importance et de la valeur du gisement). Elles sont
disposées sur le trottoir, à même la chaussée. Le
chargement est latéral et automatique (prise du bac par une griffe,
montée du bac par crémaillère ou système
hydraulique, déversement dans la benne de ramassage et repose). Les
opérations sont pilotées par les conducteurs de camions. Mais,
dans certaines villes, comme à San José, les déchets verts
sont déposés à même le sol, en vrac, sur la
chaussée. Ces méthodes ne sont possibles que grâce à
la largeur des voies, et ne sont guère transposables en France. Autre
différence, dès lors que la collecte est automatisée, les
bacs doivent être disposés d'une certaine façon pour
permettre le versement. Cela impose une discipline stricte et un système
de surveillance et de pénalités très strict. En cas
d'inobservation des règles par l'habitant, plusieurs procédures
peuvent être enclenchées : notice, lettre de rappel, rappel
téléphonique, voire amende, et même prison...
Quelle est l'incidence du passage d'une collecte manuelle à une collecte
automatique ?
Bien que cette transformation radicale ne soit guère possible en France,
ne serait-ce que pour des raisons de largeur de voies, il peut être
intéressant de tirer les conclusions des rares expériences dans
ce domaine. L'exemple choisi est la ville américaine de San Diego
(100.000 conteneurs en ramassage automatique).
Les avantages constatés par le passage à la collecte automatique
sont les suivants :
une forte augmentation de la productivité (+ 18 % en
tonnages collectés, + 32 % de maisons collectées par
rapport à un ramassage manuel) ;
une forte augmentation de la sécurité (moins de fatigue, de
problèmes musculaires,
quasi
disparition des blessures) ;
une diminution du nombre de camions ;
une diminution importante du nombre des personnels ;
un très haut degré de satisfaction des usagers ;
une économie substantielle en fonctionnement (de l'ordre de
20 % sur l'ensemble de la période). Ainsi, l'investissement de
départ est amorti à 90 % par l'économie
réalisée en dix ans sur le fonctionnement.
Économies de fonctionnement réalisées par l'automatisation de la collecte à San Diego (États-Unis) |
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1994 |
1999 |
2004 |
|
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|
Parc de camions |
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|
|
Hypothèse collecte manuelle |
121 |
126 |
131 |
Hypothèse collecte automatique |
120 |
102 |
105 |
|
|
|
|
Personnel |
|
|
|
Hypothèse collecte manuelle |
214 |
223 |
231 |
Hypothèse collecte automatique |
214 |
145 |
140 |
|
|
|
|
Coût de fonctionnement (millions de $) |
|
|
|
Hypothèse collecte manuelle |
14,6 |
17,3 |
20,4 |
Hypothèse collecte automatique |
14,7 |
12,8 |
14,3 |
|
|
|
|
Le système allemand
L'Allemagne est certainement l'un des pays à avoir le plus
développé des systèmes de collecte séparative.
Une grande partie de la politique environnementale de l'Allemagne est
axée sur le recyclage des déchets. La logistique mise en place a
redéfini l'usager, désormais " producteur-trieur " de
ses ordures ménagères. Le décret du 12 juin 1991 impose au
citoyen allemand de faire lui-même le tri de ses ordures
ménagères. Équipé de plusieurs poubelles
sélectives, il s'est facilement plié à cette nouvelle
contrainte, avec le civisme et la discipline qui caractérisent la
mentalité allemande. Les collectes selon le type de déchets
ménagers sont nombreuses.
Les modes de collecte en Allemagne |
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Matériau |
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Contenu |
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Collecte porte à porte |
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Collecte par conteneur apport volontaire |
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Papier carton |
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Papier carton journaux emballages |
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Poubelle bleue Sac bleu une fois/mois |
|
Conteneur bleu une fois/mois |
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Verre |
|
Verres tous types (sauf ampoules) hors bouchons |
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Trois conteneurs par couleur verre blanc, verre vert, verre brun une fois/mois |
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Emballages |
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Emballages légers, boites, capsules, sacs plastiques |
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Poubelle jaune sac jaune une fois/mois |
|
Conteneur jaune deux fois/mois |
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Déchets biodégradables |
|
Épluchures, déchets de jardin, coquilles... |
|
Poubelle verte toutes les deux semaines |
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Déchets résiduels |
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Restes de repas, cendres, autres... |
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Poubelle toutes les deux semaines |
|
Conteneur une fois/semaine |
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|
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|
Déchets encombrants |
|
Déchets encombrants (" monstres ") |
|
Poubelle petits encombrants toutes les deux semaines |
|
Conteneur gros encombrants une fois/semaine |
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|
Substances dangereuses |
|
Peintures, piles, batteries... |
|
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|
Conteneurs spécifiques une fois par mois |
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Source : Ambassade de France en Allemagne |
La collecte est la clé du recyclage et de la valorisation. Ces deux exemples ne sont pas choisis au hasard. C'est parce que la collecte était importante dans ces deux pays -États-Unis, Allemagne- que les entreprises de recyclage y sont souvent aussi les plus performantes et les plus novatrices.
2. Perspectives
a) Une poursuite de l'effort d'équipement
La poursuite de l'équipement des
collectivités locales en collecte séparative
Sans atteindre le taux de croissance record de ces dernières
années, la collecte séparative et l'équipement des
collectivités locales devraient croître jusqu'en 2002. De grandes
villes du sud-ouest ou de la région parisienne ne disposent pas de
conteneurs (ni en collecte mélangée, ni en collecte
sélective). Dans trois ans, le marché changera de nature, et
deviendra plus un marché de renouvellement que d'équipements.
Mais le marché restera tiré par la pratique individuelle :
3,5 millions de poubelles de collecte séparative pour
60 millions d'habitants. La marge de croissance reste large.
Selon une enquête de l'Association des Maires de France, les trois quarts
des maires ont répondu qu'ils augmenteraient leurs dépenses
d'investissements dans la gestion des déchets dans les cinq prochaines
années. Plus de 60 % d'entre eux se sont décidés en
faveur des collectes sélectives et des déchetteries,
préalables à la valorisation. La hiérarchie de choix est
donnée dans le tableau ci-après.
Les
investissements prioritaires
|
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Collecte sélective |
62 % |
|
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Déchetterie |
60 % |
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|
Résorption de décharges sauvages |
50 % |
|
|
|
|
Traitement de déchets toxiques |
42 % |
|
|
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|
Compostage |
33 % |
|
|
|
|
Gestion des déchets non ménagers |
28 % |
|
|
|
|
Centre d'enfouissement technique |
24 % |
|
|
|
|
Traitement des sols pollués |
23 % |
|
|
|
|
Incinération avec récupération d'énergie |
19 % |
|
|
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|
Collecte indifférenciée |
6 % |
|
|
|
|
Incinération sans récupération d'énergie |
6 % |
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|
|
1 Il s'agit de communes ayant un potentiel fiscal supérieur à 2.000 F par habitant. Les réponses des communes ayant un potentiel fiscal inférieur à 1.000 F par habitant sont en général inférieures, sauf pour le compostage, et l'incinération qui ont les faveurs des petites communes. La préférence des petites communes pour le compostage traduit un enracinement rural plus propice à ce genre d'action ; la préférence pour l'incinération, qui peut paraître curieuse (40 % des réponses, contre 25 % seulement pour les communes à potentiel fiscal plus élevé), s'explique surtout par le retard des petites communes dans ce domaine, les grandes communes étant pour la plupart déjà équipées. |
||
Source : BIPE, Ecoloc , 1998 |
Encadré n° 7
Question :
" Avez-vous l'intention de mettre
déjà en place une collecte sélective ? "
___
% de
réponses
Population
favorables
représentée
Le verre 96 %
98 %
Les journaux et magazines 74 %
89 %
Le carton 65 %
83 %
Le plastique 62 %
79 %
Les déchets ménagers toxiques 54 %
75 %
Les déchets ménagers fermentescibles 50 %
71 %
L'acier/l'aluminium 48 %
68 %
Nota
: Le pourcentage indiqué correspond au pourcentage des
collectivités locales qui, ayant préalablement indiqué
qu'elles augmenteraient leurs dépenses concernant les déchets, se
sont prononcées en faveur de l'équipement considéré.
Source : Enquête PANEL AMF sur les déchets, 1997. (Panel de 1188 communes)
La poursuite du maillage du territoire en
déchetteries
Même ralentie, l'augmentation du parc de déchetteries devrait se
poursuivre. Les inégalités entre régions, et plus encore
entre départements, sont excessives, et une amélioration est
indispensable. En 1996, ni la Corse, ni les DOM, à l'exception de la
Réunion, n'avaient de déchetterie. Pour un nombre d'habitants
comparable, la Seine-Saint-Denis compte dix-sept fois moins de
déchetteries que la Loire-Atlantique. Il y a autant de
déchetteries dans le Lot que dans les Hauts-de-Seine qui comptent dix
fois plus d'habitants. Les retards doivent être comblés.
C'est une situation de fait que les collectivités ont aujourd'hui
à gérer. Certaines ont engagé des réflexions afin
de valoriser ces " nouveaux " gisements (bois
déchiqueté, utilisé comme support pour amendement
organique, plâtre utilisé en substitution de gypse en
cimenteries...).
La déchetterie est en quelque sorte un outil de dialogue en direct entre
la collectivité et le citoyen qui permet de suivre et d'anticiper la
demande sociale.
b) Le (faux) débat " collecte porte à porte " ou " apport volontaire "
Les
collecteurs en apport volontaire, dit improprement " bornes " ou
" colonnes " ou " igloos " (au Canada) exigent une
démarche personnelle et un acte fort de volontariat (puisqu'il faut se
déplacer avec ses bouteilles vides...). Cette formule donne une collecte
faible, mais soignée (les matériaux sont bien triés). Le
coût est aujourd'hui accessible, mais les problèmes
d'environnement sont importants (inconvénient d'ordre esthétique,
odeurs, bruit, guêpes en été...). L'emplacement et la
propreté sont capitaux à la réussite de l'apport
volontaire.
L'avantage en termes de coûts,
a priori
plus limité que
l'apport volontaire (puisqu'il y a moins de bornes, donc moins d'arrêts),
doit cependant être nuancé par le fait que les nouvelles
propositions de bornes en apport volontaire sont beaucoup plus coûteuses
que les précédentes (une borne enterrée revient à
60.000 F, soit dix fois plus qu'une borne normale) et que, de plus en plus, le
coût d'investissement sera complété par des coûts
d'entretien.
La collecte séparative en porte à porte donne une collecte
importante, mais moins soignée (mélange des produits dans des
bacs prévus pour une autre affectation). Le geste est plus facile. Elle
est un complément simple à la poubelle classique et n'impose pas
d'effort particulier, sauf celui de mettre les bons matériaux dans les
bons bacs. Plusieurs questions se posent alors.
Première difficulté. Le nombre de conteneurs
différents
Faut-il un, deux, trois bacs différents (en sus de la poubelle
principale) ? Même si certains pays ont choisi d'avoir des collectes
sélectives très fines, il convient d'être prudent dans ces
choix. Il y a tout d'abord des problèmes de place. Dans les quartiers
anciens, les maisons et immeubles n'étaient pas conçus pour avoir
deux, trois ou quatre poubelles, et il n'est guère possible de
multiplier les bacs
31(
*
)
. Par
ailleurs, la diversité entraîne aussi la complexité et les
risques de se tromper. On estime qu'il est imprudent de dépasser trois
poubelles ou trois bacs différents.
Comme se le demande l'un de nos interlocuteurs,
" Combien
d'informations peuvent «digérer
»
les
gens ? "
.
A trois poubelles, on constate que beaucoup de
personnes s'interrogent encore pour savoir ce qu'il faut mettre dedans. Au
delà, on va au devant du risque de se tromper, le message est confus.
C'est pire encore lorsque les gens sont rappelés à l'ordre car,
alors, tout s'arrête. Le problème se pose notamment pour les
plastiques qui gênent le message sur la collecte. Les habitants ne
comprennent pas pourquoi ils doivent mettre une bouteille et pas un pot de
yaourt. Or, dès que le message est confus, cela bloque la participation
des gens. Ils sont souvent de bonne volonté, mais quand on leur dit
" Non, il ne faut pas mettre ça ! "
, alors, ils
arrêtent tout. "
Deuxième difficulté. L'arbitrage volume/tri
La collecte en porte à porte donne des volumes beaucoup plus importants
que la collecte en apport volontaire, mais les produits collectés
doivent impérativement être triés pour parvenir aux
prescriptions techniques minimum.
On peut aussi noter que des bornes d'apport volontaire bien placées
peuvent avoir des résultats très satisfaisants pour un moindre
coût. Les performances de collecte par mode de collecte qui sont
données dans le tableau ci-dessous, montrent que si, en moyenne, les
performances des bornes d'apport volontaire sont très inférieures
au porte à porte, les résultats obtenus par les 10 %
meilleurs de chaque catégorie ne sont plus très
éloignés.
Performances de collecte par mode de collecte (kg/habitant/an) |
||||
|
Moyenne |
10 % meilleurs |
||
|
Porte à porte |
Apport volontaire |
Porte à porte |
Apport volontaire |
Acier |
2,08 |
0,30 |
4,54 |
1,35 |
Aluminium |
0,09 |
0,018 |
0,62 |
0,10 |
Journaux magazines |
17,26 |
9,04 |
33,95 |
22,11 |
Emballages ménagers, papiers carton |
10,14 |
4,02 |
16,76 |
10,96 |
Flacons plastique |
3,47 |
1,41 |
5,59 |
3,30 |
Verre |
31,35 |
17,12 |
47,03 |
42,22 |
Source : Éco-Emballages, mars 1999 |
La
diversité des techniques permet de trouver une solution adaptée
à chaque situation. Car, en réalité, les choix ne sont pas
cloisonnés. En zone rurale, l'expérience montre que l'une des
meilleures formules consiste en bacs de regroupements avec apport volontaire
pour cinq ou six maisons : les produits collectés sont
équivalents à ceux qui résulteraient du vrai porte
à porte, mais le nombre d'arrêts est considérablement
réduit et les coûts sont allégés.
Dans tous les cas, le choix des collectivités doit s'appuyer sur une
étude fine de la composition et des volumes des déchets
collectés. Sur dix-neuf millions d'habitants desservis par des
systèmes de collecte sélective, 60 % sont en apport
volontaire, 40 % sont en collecte porte à porte. On
considère que les proportions devraient s'inverser dans les cinq
prochaines années.
Il ne faut pas oublier que les aides d'Éco-Emballages sont liées
à la performance de collecte (il n'y a pas de distinction entre les deux
systèmes), et, par conséquent, il existe des réserves
importantes de montée en puissance des collectes porte à porte,
qui permettent de collecter des tonnages supérieurs.
c) L'évolution des équipements
En
matière d'équipements des collectivités locales en
conteneurs, quatre évolutions sont attendues :
l'amélioration des services liés à la collecte en
apport volontaire,
l'amélioration des services liés à la collecte en
porte à porte,
le retour de la collecte en sacs,
la recherche d'une meilleure cohérence de la part des
collectivités locales.
L'amélioration des services liés à la collecte en
apport volontaire
Cette amélioration passe par la recherche d'une meilleur
intégration des bornes d'apport volontaire dans les sites.
Cette intégration peut passer tout d'abord par une
amélioration des colonnes
elles-mêmes : telles
l'inflammabilité, la solidité, la présentation. Les
projets les plus avancés concernent les conteneurs enterrés qui
éviteront les pollutions visuelles et sonores. Le coût est
cependant encore élevé : de l'ordre de 60.000 F par
implantation (travaux de génie civil compris), soit dix fois le prix
d'un conteneur normal.
L'amélioration peut également concerner des services
liés à l'entretien
. Il y a un lien direct entre les
performances de collecte et la propreté des sites d'apport volontaire.
Ceux-ci n'ont pas toujours bonne presse : on se plaint de nuisances
diverses (guêpes, notamment, en été). " Le sale attire
le sale ", et très vite le site devient un repoussoir. Chacun
connaît ces exemples de bennes ou de colonnes dégorgeantes de
déchets et de verres brisés. Le mauvais entretien, comme la
mauvaise implantation, sont des moyens radicaux de tuer les meilleures
initiatives et de dire, avant même de lui donner une chance, " La
collecte sélective ne marche pas ".
Le parc doit être régulièrement entretenu. De plus en plus
souvent les sociétés proposent à cet effet des contrats
d'entretien et de lavage. Nul doute que la propreté améliorerait
la productivité des collectes, et éviterait de basculer trop
rapidement d'un système de collecte partagée entre apport
volontaire et porte à porte, à un système tourné
quasi
exclusivement vers la collecte en porte à porte.
L'amélioration des techniques du porte à porte
" l'informatique embarquée "
Le dispositif consiste à doter les conteneurs individuels de
" puces " d'identification électroniques permettant, dans un
premier temps, une meilleure gestion du parc (comptage, étude de poids,
fréquence, entretien...). Le contrôle de la qualité de tri
par le " ripeur " est facilité, et peut entraîner des
réactions immédiates (sensibilisation par les " ambassadeurs
de tri "...).
Un tel système est aujourd'hui en vigueur dans plusieurs pays d'Europe,
aux Pays-Bas en totalité, dans quelques collectivités en
Allemagne, en Belgique, et prochainement, en Suède et en Italie.
Dans un second temps, l'identification électronique pourrait
également permettre une facturation individuelle, en fonction du poids
collecté. Bien qu'elle soit au fondement même du choix des
collectivités belge et allemande, cette idée ne paraît pas
" mûre " en France. Un certain nombre de risques ont
été évoqués. Tout d'abord, le système
paraît plus adapté en milieu rural qu'en milieu dense, où
il est difficile d'individualiser les conteneurs. Ensuite, les craintes sont
liées au risque de voir les habitants charger la poubelle de leur
voisin, afin d'éviter de payer le ramassage... Un tel risque
paraît largement surestimé, en revanche, il ne peut être
exclu que le système de facturation à la pesée ne bloque
le développement de la collecte sélective et n'ait pour
conséquence de " déplacer " les déchets dans les
fossés ou dans les squares...
Ces menaces, réelles ou virtuelles, illustrent surtout une
réserve d'ordre culturel à l'encontre d'un mouvement vers
l'individualisation des coûts, alors que la culture collective milite au
contraire en faveur d'un partage et d'une communautarisation des
dépenses. Nul doute que s'il entre un jour en vigueur, ce système
suscitera alors un débat intense dans le pays... La pesée
individuelle et la facturation personnalisée sont cependant en cours de
test en Alsace, dans une communauté de communes regroupant environ
10.000 habitants, et en Loire Atlantique dans une commune de
6.000 habitants.
Le retour de la collecte en sacs
Les collectivités locales ont longtemps préféré la
collecte sélective en bacs. Mais, face aux performances nettement
supérieures de la collecte en sacs (les taux de refus seraient
inférieurs de moitié avec un sac transparent par rapport à
la collecte en bacs), la collecte en sacs transparents , réservée
jusque là aux petites collectivités tend à se mettre en
place y compris dans les zones urbanisées. Le gain en termes de
coût d'investissement (en bacs) en entretien, et en qualité est
cependant compensé en partie par une opération
supplémentaire à l'arrivée en centre de tri puisqu'il faut
alors recourir à des "ouvre-sacs" en tête de chaîne de tri.
Deux opérations sont en cours de test : l'ouvreur laser, et le
crible à étoiles en test à Fouesnant. Le coût de la
machine est de 350 à 400.000 francs (53.000 à 61.000 euros).
La recherche d'une plus grande cohérence des comportements de
la part des collectivités locales
La société Plastic Omnium est le principal industriel
opérant dans le secteur des bacs de collecte. Quelques-unes de ses
déconvenues récentes méritent d'être
rappelées.
Le recyclage des matières plastiques.
Bien que
l'incorporation de matières plastiques recyclées ne soit ni
obligatoire, ni même avantageuse en termes de prix (au contraire, un bac
100 % recyclé coûte plus cher qu'un bac en matière
vierge), la société a choisi d'utiliser, pour des raisons
stratégiques, des matières plastiques recyclées pour la
fabrication de ses bacs.
Le plastique recyclé entre dans la composition des nouveaux bacs
à hauteur de 25/30 % en moyenne (c'est une moyenne, certains bacs
peuvent être fabriqués à 100 % en matière
recyclée, d'autres à 10/15 %). Ce recyclage est
réalisé par l'usine de Creuset qui représente un
investissement de 30 millions de francs : 6 à 7.000 tonnes de
PE et de PP sont ainsi utilisées chaque année. Le plastique
utilisé provient, pour l'essentiel, des fûts de l'industrie
chimique et des anciens bacs.
Pendant un moment, il y avait une communication spécifique sur ce sujet,
du type " bac contenant 25 % (voire 100 %) de produits
recyclés ". Les réactions des collectivités et des
particuliers étaient, dans l'ensemble, négatives. La pratique
s'est poursuivie, mais cette communication a été
abandonnée.
Les concurrences déloyales.
La société
est en concurrence avec d'autres sociétés françaises et
européennes pour fournir les bacs de collecte. Or, toutes les
sociétés ne respectent pas les mêmes règles. C'est
notamment le cas de l'utilisation du cadmium, qui est normalement interdite.
Hélas, les collectivités locales, bien que rien ne les y oblige,
choisissent de plus en plus en fonction du prix, et prennent parfois ces bacs
" illégaux ". La société Plastic Omnium est
alors en porte à faux, car ou bien elle perd des marchés contre
des sociétés qui ne respectent pas les normes IFNOR, ou bien elle
engage des procédures contre la collectivité qui n'a pas
respecté les normes. Mais, quand elle gagne, elle perd quand même
le client, et peut-être même d'autres clients potentiels voisins.
Le cas s'est produit à Pontoise. La société a
attaqué le syndicat. Celui-ci a perdu, et a réattribué le
marché ... à une autre société.
Il serait bon que les règles soient rappelées, et que les
mêmes règles soient appliquées par tous, du moins en France
(ce pourrait être le rôle de l'AMF de communiquer sur ce
point).
d) La multiplication des lieux de collecte
Quelques
collectivités locales ont depuis longtemps " donné
l'exemple " en mettant en place des collectes sélectives et leurs
efforts ont souvent été couronnés de succès. Le
mouvement est lancé et ne s'arrêtera pas. Déjà une
vingtaine de collectivités locales expérimentent la collecte
séparative sur les fermentescibles. Mais d'autres lieux et d'autres
institutions peuvent également être concernés. Si les
administrations dans leur ensemble ne sont guère performantes, en
dépit de gisements considérables (notamment les papiers),
quelques-unes ont choisi une autre attitude. C'est notamment le cas des
armées.
Encadré n° 8
La
collecte et le traitement des déchets ménagers
et des déchets industriels banals dans le port militaire de Brest
___
La
collecte sélective des déchets ménagers et des
déchets industriels banals dans les armées, et en particulier
dans la Marine, s'est accélérée depuis 1997. L'exemple
choisi est celui du port militaire de Brest.
Les déchets des navires
La Marine s'est engagée à appliquer la convention international
MARPOI de protection de l'environnement, bien que celle-ci ne s'applique pas
aux bâtiments militaires. Ainsi, pour toute sortie en mer de plus de 24
heures :
les déchets alimentaires sont broyés ("pulpeur") et
rejetés à la mer à plus de 12 nautiques des
côtes ;
les plastiques, les papiers cartons, le bois, les métaux sont
broyés, compactés et stockés (chaque matériau
séparément) ;
le verre est stocké.
A terre, les déchets sont déchargés,
déposés dans des conteneurs. Le verre, le carton, les bouteilles
plastique sont vidés périodiquement, et acheminés vers une
déchetterie de la communauté urbaine de Brest qui les accepte
à un tarif inférieur à celui de l'incinération.
Les déchets dans le port militaire
L'organisation est la suivante :
La direction des travaux maritimes est chargée de la collecte des
déchets ménagers et des déchets industriels banals. Elle
dispose, à cet effet, d'une déchetterie dédiée aux
déchets industriels banals, triés par catégorie (bois,
ferrailles, peinture et solvants, piles...).
Le commissariat est chargé de la collecte des hydrocarbures (eaux
noires...).
La direction de la construction navale est chargée de la collecte
des déchets industriels spéciaux (acides...).
Appréciation
Malgré une organisation complexe (trois services différents
selon la nature des déchets), ces initiatives témoignent d'une
évolution importante des attitudes et des états d'esprit.
Une fois triés, les produits collectés sont, soit enlevés
gratuitement -pour le bois par exemple, le collecteur récupère
une partie du gisement (1100 palettes par an) et réinsère les
palettes saines dans le circuit professionnel-, soit enlevées par un
récupérateur après paiement par la Marine (le
récupérateur ayant été choisi après appel
d'offre, et étant en général celui ayant proposé le
tarif le plus bas).
On observera toutefois que, pour un service et des produits identiques, la
Marine américaine,
au lieu de payer
pour l'enlèvement,
se fait payer
les produits triés. Ainsi, la base navale de San
Diego récupère-t-elle 50 types de métaux, dont 12 types
d'aluminium, sans compter les cartons, papiers, verre, palettes... Tous ces
matériaux sont
achetés
par les industriels de la
récupération -y compris les bidons d'huile usagée
(40 dollars la tonne)-. La base navale américaine a même
acquis une machine qui compresse les filtres d'huile. L'huile est
récupérée, et les filtres sont eux aussi vendus
(25 dollars la tonne).
Une situation encore un peu imaginable en France. Ainsi, la Marine nationale a
fait un grand pas, mais elle ne peut le faire seule. Ce n'est pas encore demain
qu'un industriel français réussira à vendre ses bidons
d'huile usagés. Il est déjà bien satisfait quand il
réussit à trouver quelqu'un qui l'en débarrasse
gratuitement. Dans une génération,
peut-être ?...
e) La réorganisation probable des structures de collecte
La
collecte des emballages est aujourd'hui partagée entre plusieurs
sociétés agrées : Éco-Emballages, Adelphe qui
ne fut longtemps compétente que sur le seul secteur du verre avant
d'étendre son champ à tous les types d'emballages, et
l'association Cyclamed, sur les médicaments. La façon dont
Éco-Emballages, notamment, a su encourager la mise en place de la
collecte sélective est exceptionnelle. Tous ces organismes ont rempli
leur mission et doivent donc être salués.
Quelques interrogations demeurent. Faut-il encourager chaque secteur
d'activité à avoir son propre organisme sa propre structure de
collecte et de soutien ? En d'autres termes après un
Éco-Emballages, un " Éco-verre " et un
" Éco-médicaments " aurons-nous un
" Éco-pneus ", un
" Éco-télévision ", un
" Éco-produits blancs " ?... Il y a là un risque
dont il faut être conscient.
Cette juxtaposition se justifie d'autant moins quand deux
sociétés se trouvent sur le même marché avec des
prix et des conditions de soutiens identiques, comme c'est le cas entre
Éco-Emballages et Adelphe. Adelphe a été
créée en réponse à une inquiétude face au
modèle allemand de récupération par consigne. La consigne
des bouteilles de vin par exemple aurait été ingérable
à traiter en France et il était impératif d'éviter
à tout prix un tel système. La réponse a donc
été Adelphe et un système souple identique à celui
d'Éco-Emballages. L'objectif a été atteint. La menace de
la consigne paraît définitivement exclue. Dès lors,
peut-être est-il temps de se demander si le maintien de deux
sociétés est toujours justifié alors qu'elles ont un but,
des modalités d'intervention et des prix identiques. Nous n'en sommes
pas convaincus. Éco-Emballages a prouvé sa maîtrise et ses
capacités, et s'il n'en fallait qu'un...
f) L'extension du champ des produits collectés
La
collecte organisée, soutenue par Éco-Emballages, est une
réussite. Elle présente, néanmoins, certains
inconvénients qui pourraient s'avérer être des handicaps
pour l'avenir de la valorisation.
Il faut, en effet, rappeler que la collecte séparative
d'Éco-Emballages est une collecte destinée aux emballages, et
financée par les fabricants d'emballages. Les fabricants cotisent, les
collectivités locales collectent (avec un soutien
d'Éco-Emballages), puis trient, afin de respecter des prescriptions
techniques minimum qui leur permettront de bénéficier du soutien
financier d'Éco-Emballages. Ce tri n'ayant pas d'autre objet que celui
de sélectionner des emballages... qui, parfois, retournent aux
fabricants. Ce système a deux inconvénients.
D'une part, il est
quasi
fermé aux autres collectes, c'est
à dire aux collectes de produits qui ne sont pas des emballages. Pour la
simple raison qu'Éco-Emballages perçoit des contributions sur les
fabricants et distributeurs d'emballages, et n'a, par conséquent, aucune
raison de collecter les autres produits pour lesquels elle n'a rien
perçu. Ainsi, à l'exception des journaux et magazines
collectés avec les emballages, Éco-Emballages n'a aucun
intérêt à s'occuper de produits qui ne sont pas de son
champ. C'est en particulier le cas de la fraction fermentescible des
déchets ménagers qui représentent pourtant une part
majeure des quantités de déchets, et pour lesquels les
potentialités de valorisation sont importantes (compostage et
méthanisation
32(
*
)
).
D'autre part, le système mis en place n'est que peu réceptif aux
innovations visant à valoriser autrement qu'en emballages. Le
système autocentré est conçu sur une règle
simple : " je paye et je récupère " (d'où
des PTM très stricts pour faciliter le réemploi). En faisant
éventuellement sortir l'emballage collecté de son usage
jugé prioritaire par le fabricant (refaire des emballages), le
producteur continue de payer, mais ne récupère plus rien. Il y a
bien sûr, là encore, des exceptions (recyclage des bouteilles
plastiques en fibres textiles). Mais, dans l'ensemble, on ne peut pas dire que
le système soit très porté à l'innovation externe
qui pourrait consister par exemple à alléger la PTM, utiliser des
plastiques (films, objets et non plus seulement bouteilles et flacons) pour
d'autres utilisations (matériaux de jardin, BTP...).
Éco-Emballages a été, et reste, une chance, car la
société a fait preuve de son dynamisme et de son
efficacité. On peut se demander néanmoins si, à l'avenir,
d'autres modes d'organisation ne sont pas envisageables. La collecte des
fermentescibles et la diversification de l'utilisation des produits
collectés seront les enjeux des prochaines années.