III. LA THERMOLYSE89( * )
A. PRÉSENTATION
1. Description
La thermolyse est un procédé de traitement thermique des déchets en l'absence d'air. Les déchets ne sont pas brûlés, mais sont mis dans un four hermétique chauffé à moyenne température (450 à 750°). La chaleur et l'absence d'air entraînent une décomposition des matières organiques en deux parties : un composant solide (formé de cendres, de matières minérales et de carbone) et un gaz chaud.
a) Le composant solide
Le solide contient des cendres, des matières minérales qui n'ont pas été détruites par la chaleur du four (métaux ferreux et non ferreux, inertes ou infusibles, verre, céramiques, cailloux...), et surtout du carbone, composant fondamental de toute matière vivante végétale ou animale. Après séparation physique du verre et des métaux, on obtient un composant solide de thermolyse constitué de 30 à 40 % de cendres, qui s'apparente à un charbon de qualité médiocre. La thermolyse n'est, en fait, qu'une application adaptée aux déchets, de la technique ancestrale de la fabrication du charbon de bois 90( * ) .
b) Les gaz
Un
dégagement de gaz a lieu pendant la première phase de thermolyse,
c'est-à-dire avant que le carbone ne soit formé. Ce gaz est
constitué d'une fraction condensable, c'est-à-dire qui peut
être liquéfiée, se transformer en huile (vapeurs d'essence,
vapeurs d'eau) et d'une fraction non condensable, c'est-à-dire qui reste
à l'état gazeux (hydrogène, méthane, oxyde de
carbone, hydrocarbures...).
Le gaz qui s'échappe par le haut du four, mélangé aux
poussières, peut ensuite être traité de façon
classique : dépoussiérage et combustion. Dans certains cas,
le déchet doit être prétraité pour améliorer
la thermolyse : le déchet entrant est auparavant
séché, " déferraillé " et broyé
pour obtenir un déchet plus homogène. Ainsi, peut-on
décomposer le processus et le bilan matière comme suit.
Bilan matière de thermolyse d'ordures ménagères
Cas général 91( * ) |
Procédé Eddith de Thide 92( * ) |
Procédé Softer de Nexus 93( * ) |
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1 tonne entrant |
1 tonne entrant |
1 tonne entrant |
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Déferraillage : 40 kg |
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Inertes : 60 kg |
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200 kg eau - séchage |
Séchage : 200 kg |
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Déchets à traiter : 800 kg |
Déchets à traiter : 700 kg |
Déchets à traiter : 1000 kg |
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Solides carbonés : 400 kg |
Gaz de thermolyse : 400 kg |
Solides carbonés : 310 kg |
Gaz de thermolyse : 390 kg (13 MJ/kg) |
Solides carbonés : 360 kg |
Gaz de thermolyse : 640 kg (14 MJ/kg) |
Résidus solides minéraux 95 kg |
|
Résidus solides |
|
Métaux ferreux : 45 kg |
|
Métaux ferreux : 45 kg |
|
minéraux : 60 kg |
|
Métaux non ferreux : 5 kg |
|
Métaux non ferreux : 5 kg |
|
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Verre :70 kg |
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Inertes, verre, pierres : 45 kg |
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sels
(déchloration)
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Résidus carbonés : 255 kg dont 40 % de cendres (17/18/MJ/kg) |
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Résidus carbonés : 240 kg (18 MJ/kg) |
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Résidus carbonés : 240 kg (9,5 MJ/kg) dont 40 % de cendres |
|
Résidus ultimes (cendres) : 120 kg |
Résidus ultimes (cendres) : 120 kg |
Résidus ultimes (cendres) : 100 kg |
Nota : les chiffres en italique représentent le pouvoir calorifique des gaz et matières par kilo
2. Les traitements complémentaires
Chacun des sous-produits de la thermolyse est traité dans les conditions suivantes.
a) Le traitement des gaz
Les
différents procédés industriels se distinguent par le mode
de combustion et d'utilisation des gaz issus de la thermolyse. Il peut y avoir
une combustion seule, une combustion après
craquage
94(
*
)
, une combustion mixte (combustion
du gaz issu de la thermolyse et du gaz issu de la gazéification du
résidu carboné).
Dans le cas le plus simple (Thide), le gaz de thermolyse (environ 400 kg)
est caractérisé par un PCI
95(
*
)
de l'ordre de 13 MJ/kg, de sorte
qu'il correspond à un contenu énergétique d'environ 5.000
MJ/tonne de déchets entrants
96(
*
)
.
La combustion du gaz (à 1200/1400°) peut être utilisée
pour chauffer les parois du four à 550/600° (le chauffage du four
à cette température n'exige que 1.000 MJ par tonne de
déchets entrants). Les utilisations complémentaires concernent
les chaufferies annexes, le séchage des déchets ou des boues, et,
éventuellement, la co-génération...
b) Les premiers traitements du résidu carboné en fin de thermolyse
En
sortie de réacteur, apparaît un résidu carboné qui
doit subir un premier traitement constitué par un lavage qui
améliore la déchloration et un triage qui permet une valorisation
matière.
Lavage et refroidissement.
Le résidu sort du four à
450°, et doit être refroidi. Le refroidissement peut avoir lieu sous
azote ou, plus généralement, par l'eau. L'eau permet de capter
une partie du chlore. Le chlore peut à son tour être
aisément retiré (déchloration) par dissolution dans l'eau,
suivie d'une évaporation de l'eau. Une tonne de déchets entrants
donne dix kilogrammes de chlore en solution (chlorure de sodium et chlorure de
calcium) qui va, par la suite, en décharge de classe I. Une
valorisation serait encore théoriquement possible à ce stade
(utilisation en sel de déneigement...), mais dépend des
conditions locales (proximité...).
L'élimination du chlore en sortie de four n'est pas effectuée par
tous les procédés industriels. Les Japonais, par exemple,
brûlent le résidu, et éliminent le chlore dans les
fumées.
Tri et valorisation matière.
Après lavage, le
résidu est grossièrement trié pour éliminer les
éléments indésirables. Un premier tri, par grille, peut
être opéré pour éliminer le verre et les inertes
(graviers, céramiques). Le lavage permet de séparer le coke des
métaux et inertes. Le coke de carbone (ou semi-coke), léger,
reste en suspension dans l'eau, tandis que les inertes (graviers, verre,
céramique) et les métaux sont récupérés par
gravité. Un deuxième tri peut être retenu pour
améliorer la valorisation matière. En effet, les métaux
ferreux et non ferreux qui n'ont pas été brûlés
sortent de thermolyse non oxydés et, par conséquent, avec un
très grand degré de pureté. Ainsi les feuilles d'aluminium
ménager sont-elles récupérées pratiquement
intactes. Les procédés habituels de tri (tri magnétique
pour les métaux ferreux ou par courant de Foucault pour l'aluminium)
sont parfaitement adaptés, en fonction de l'importance du gisement (en
quantité et en qualité). Un mélange approprié de
déchets ménagers et de déchets industriels banals permet
d'obtenir des quantités suffisantes pour que le tri soit alors rentable.
Débarrassé d'une partie des matières minérales
(verre, cailloux) et des métaux, le résidu est uniquement
constitué de carbone et de cendres, et s'apparente à un charbon
de mauvaise qualité.
L'utilisation de ce résidu ultime carboné [appelé aussi
" semi-coke ", " combustible solide de thermolyse " (CST),
" char ", ou encore "
Carbor
", marque
déposée par Thide, ou "
Combuster
", marque
déposée par Nexus] fait toutefois l'objet d'un débat, car,
en dépit de son pouvoir énergétique réel, des
discussions sont en cours pour l'accepter comme combustible de substitution,
notamment en cimenterie (voir ci-après).
3. Les différents procédés
Plusieurs techniques ont été
développées
depuis quelques années par des sociétés allemandes (PKA,
Siemens, Thermoselect) ou françaises (Nexus, Thide, Traidec). Si le
principe est le même, les différences importantes portent sur la
conception, le fonctionnement, les modalités plus ou moins complexes
d'utilisation des gaz et du solide.
Les différences sur la conception et le fonctionnement.
Les
fours de thermolyse peuvent être fixes ou tournants. Dans le premier cas,
les déchets sont versés dans une sorte de wagonnet mobile de 15
m
3
qui avance à l'intérieur du four fixe, et en
ressort à l'issue de la thermolyse. Les durées de chauffage sont
plus longues afin que les températures soient atteintes et permettent
les réactions attendues dans les déchets qui se trouvent au
centre du tas (procédé
Softer
, en pilote en France,
à Châteaurenard. Ce procédé a été
choisi par le SITCOM de la Loupe à Digny en Eure-et-Loir). Dans le
second cas (four tournant), les déchets sont introduits dans un
réacteur tournant, horizontal ou légèrement
incliné, d'une vingtaine de mètres de long. La rotation et
l'effet de la chaleur font " avancer " les déchets. La
durée de réaction est inférieure à une heure. Le
four est " alimenté " en continu -procédés
Noell
,
PKA
,
Thermoselect
, en fonctionnement en Allemagne,
et procédé
Eddith
, en pilote en France à
Vernouillet-. Le procédé a de bonnes chances d'être retenu
par la communauté urbaine d'Arras.
Les différences sur l'utilisation des composants solides et
gazeux de thermolyse.
On distingue alors les " procédés
intégrés " et les procédés non
intégrés, ou " thermolyse simple ".
Dans la thermolyse seule, il n'y a pas de combustion immédiate du
résidu solide. Ce dernier est stocké pour une valorisation
ultérieure. On parle de " procédé
intégré " lorsque des procédés de combustion
ou de gazéification du résidu solide sont ajoutés
après la thermolyse, qui ne constitue qu'un traitement partiel du
déchet. On a vu en effet que la phase de thermolyse conduit à
deux produits à valeurs énergétiques distinctes. L'un
réel, et dont l'usage est obligatoire sur le site (le gaz ne peut
être stocké et doit être brûlé), l'autre,
potentiel, qui est le résidu carboné. On dit que l'usine est
intégrée lorsque le solide issu de thermolyse est
brûlé ou gazéifié dans l'usine, ce qui a pour effet
d'accroître sensiblement le rendement énergétique de
l'installation. Un premier procédé consiste dans la
gazéification du combustible solide (technologie Thermoselect, PKA
intégrée). Le résidu est introduit dans un four à
très haute température (1300/1500°), ce qui entraîne
une gazéification. A cette température, le résidu
(cendres) est vitrifié. Il peut aussi y avoir une combustion directe du
semi-coke, soit avec le gaz de thermolyse (Siemens), soit sans le gaz de
thermolyse (Nexus).
Les différences sur la nature des déchets
traités
Les unités de thermolyse peuvent traiter une très grande
variété de déchets, mais quelques sociétés
se sont spécialisées dans le traitement de déchets
spéciaux ou difficiles à traiter par les moyens conventionnels.
C'est notamment le cas de la société Traidec qui, avec son
procédé DTV (dissociation thermique et valorisation), traite
essentiellement les déchets animaux (produits d'équarrissage,
farines animales), les déchets hospitaliers (qui doivent subir des
traitements spécifiques, isolés des déchets
ménagers) et certains déchets industriels spéciaux
(déchets papetiers, pneumatiques...). Des perspectives s'ouvrent sur le
premier créneau, car les cendres produites peuvent être
valorisées en amendements agricoles, mais le second reste, en France,
encore inaccessible à la thermolyse, puisque la réglementation
impose de traiter les déchets hospitaliers à une
température minimum de 900°(soit une température
supérieure à celle de la thermolyse). La société
vient cependant d'emporter un marché en France sur les tissus
biologiques provenant de l'Institut Pasteur et sur les déchets d'un
hôpital au Mexique.
Présentation des différents procédés de thermolyse
|
Thide (Thermolyse seule) |
Softer (Thermolyse seule) |
PKA
|
PKA (Thermolyse intégrée) |
Siemens (Thermolyse intégrée) |
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Préparation |
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Séchage |
oui |
non |
non |
non |
non |
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Température |
450/600° |
450/600° |
450/600° |
450/600° |
450/600° |
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Durée |
30 mn/1 heure |
4 ou 5 heures |
1 heure |
1 heure |
1 heure |
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Utilisation des gaz |
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Masse |
390 kg |
640 kg |
650 kg |
650 kg |
650 kg |
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Mode de valorisation |
Combustion sur site |
Séparation huiles/gaz |
Cracking 1300° |
Cracking 1300° |
Combustion 1300° |
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Valorisation énergétique totale |
5.000 MJ |
|
7.600 MJ |
7.600 MJ |
|
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Résidu solide |
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Masse en sortie de four |
410 kg |
360 kg |
350 kg |
350 kg |
350 kg |
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Résidu carboné |
240 kg |
255 kg |
255 kg |
255 kg |
255 kg |
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Mode de valorisation |
Combustion hors site |
Mélange avec les huiles Combustion sur site |
|
Gazéification à 1300° mixage avec gaz |
Combustion avec gaz |
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Valorisation énergétique |
4000 MJ |
10.000 MJ |
4.000 MJ |
7.600 MJ |
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Source : Université libre de Bruxelles, sociétés correspondantes, Traitement OPECST |
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Les procédés français de thermolyse |
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Le procédé Softer |
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Le procédé Eddith |
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Société Nexus technologies |
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Société Thide Environnement |
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Constructeur
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Constructeur/Exploitant |
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Pilote à Châteaurenard (13) |
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Pilote à Vernouillet (28) |
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Prétraitement : déchiquetage/déferraillage/séchage |
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Thermolyse en four fixe |
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Thermolyse en four tournant |
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Gaz de thermolyse |
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Gaz de thermolyse |
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Résidu solide : le " Combuster " |
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Résidu solide : le " Carbor " |
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Combustion sur place |
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Vente du " Carbor " en cimenteries |
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Marché 1997 :
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Marché 1998 :
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Nouveau contrat en perspective pour fin 1999 |
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Perspectives : sélection sur appel d'offres 1999
d'Arras
(110/130 MF)
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