III. CETTE POLITIQUE SUPPOSE UN RENFORCEMENT DE NOTRE CAPACITÉ DE RECHERCHE DANS CE DOMAINE
A. DE NOMBREUX ORGANISMES CONTRIBUENT À LA CONNAISSANCE DE L'EFFET DE SERRE ET DES RISQUES LIÉS AU RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE
L'amélioration de l'efficacité des politiques
publiques de lutte contre l'intensification de l'effet de serre suppose une
connaissance approfondie des émissions de gaz à effets de serre,
de leurs déterminants et de leurs conséquences sur les
changements climatiques ainsi qu'un suivi des mesures adoptées pour
limiter leur émission.
Cette connaissance suppose, d'une part, un inventaire systématique des
émissions et, d'autre part, un suivi de l'évolution des
changements climatiques. La connaissance des déterminants de ces
émissions implique également un champ d'étude très
vaste qui englobe aussi bien l'évolution du parc des véhicules,
du parc des bâtiments, des modes de consommation que l'évolution
économique et démographique. La connaissance de ces
déterminants est, en effet, un préalable à la constitution
de modèles permettant de reconstituer ces émissions et de les
projeter dans l'avenir.
Le suivi des mesures adoptées pour limiter les émissions de gaz
à effet de serre et de leur degré d'application est
également nécessaire à l'efficacité de la politique
menée. Ce suivi devrait non seulement faire un bilan de l'état
d'application des mesures, mais aussi analyser leur impact sur les
émissions de gaz à effet de serre.
La France dispose, pour recueillir l'ensemble de ces données, d'une
capacité importante de recherche sur l'effet de serre. Le
caractère transversal et pluridisciplinaire de la problématique
fait intervenir de nombreux d'organismes.
En matière de recherche fondamentale et finalisée,
le Groupe
d'Experts Intergouvernemental sur l'Evolution du Climat (GIEC)
constitue
l'expertise scientifique sur laquelle reposent les décisions prises
ensuite dans le cadre de la Convention sur le Climat.
Actuellement les recherches menées en relation avec le GIEC portent sur
les aspects scientifiques de l'évolution du climat. Elles incluent la
recherche sur les mécanismes physiques du climat, les réseaux
d'observation du climat, l'évaluation des émissions de gaz
à effet de serre, les scénarios d'émission de ces gaz pour
le futur et la prévision climatique.
La réalisation des observations systématiques de l'état du
climat repose quant à elle sur des organismes opérationnels et en
grande partie sur
Météo-France,
le
Centre national
d'études spatiales et l'Institut national des Sciences de l'Univers
pour ce qui concerne l'atmosphère et les océans.
La réalisation des inventaires d'émissions de gaz à effet
de serre est traitée par le
CITEPA
(Centre interprofessionnel
technique d'Etudes de la Pollution atmosphérique) sous contrat du
ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
L'analyse scientifique, socio-économique et technique des impacts de
l'évolution du climat font eux l'objet
d'un programme de recherche
sur la Gestion et les impacts des changements climatiques (GICC)
rassemblant de nombreux organismes dont
le Centre national de recherche
scientifique (CNRS), le Commissariat à l'énergie atomique (CEA),
l'Institut national de recherche agronomique (INRA)
et le
Centre
international de recherche en agriculture et développement (CIRAD).
L'effort de recherche de la France sur les aspects scientifiques, les impacts
et les implications socio-économiques du changement climatique
lié à l'accroissement de l'effet de serre s'intègre au
niveau européen dans le
programme " Environnement et
développement durable " du 5ème Programme Communautaire de
Recherche et Développement.
Dans ce cadre, l'accent est mis, tout comme dans le programme GICC sur le
développement nécessaire des méthodes et outils
d'évaluation des stratégies de prévention et d'adaptation
aux changements climatiques.
Le suivi des mesures de lutte contre l'intensification de l'effet de serre est,
enfin, assuré par la
Mission interministérielle de l'effet de
serre (MIES)
créée en 1992. La MIES a plus
généralement pour mission d'assurer, de coordonner et
d'organiser, en concertation avec les associations et les partenaires
économiques et sociaux, la préparation et la réalisation
du programme français de prévention de changement de climat. Elle
prépare les positions à défendre dans la
négociation internationale et assiste le ministère des affaires
étrangères dans le déroulement de ces négociations.
Elle participe aux groupes d'experts techniques traitant de ce sujet au niveau
communautaire et international.
La lutte contre l'effet de serre fait également l'objet de nombreux
travaux parlementaires.
L'office parlementaire d'évaluation des choix
scientifiques et technologiques
a, en particulier, chargé notre
collègue Marcel Deneux d'une étude sur le sujet.
B. CETTE CAPACITÉ DE RECHERCHE SUR L'EFFET DE SERRE DOIT ÊTRE RENFORCÉE ET MIEUX COORDONNÉE
La
maîtrise des émissions de gaz à effet de serre impliquera
à terme des choix collectifs et privés contraignants, que les
citoyens n'accepteront que s'il existe une prise de conscience collective des
grands enjeux liés au changement climatique. Comme le souligne le
Sénateur Serge Lepeltier : "
le renforcement de
l'information des citoyens est donc un préalable
nécessaire
à la mise en oeuvre d'instruments
économiques. Cette information doit porter sur les causes du changement
climatique (...). Elle doit également attirer l'attention sur les
conséquences prévisibles du changement
climatique. "
6(
*
)
Cette prise de conscience collective doit s'appuyer sur des données
indiscutables
. La crédibilité et l'efficacité de la
lutte contre l'effet de serre exigent de lever les nombreuses incertitudes qui
demeurent sur les mécanismes déterminants des changements
climatiques
. On ne peut, à cet égard, que rejoindre les
propos du Premier ministre, M. Lionel Jospin, lorsqu'il souligne
"
à quel point l'information la plus précise -donc la
plus scientifique possible- sur l'état véritable du
réchauffement climatique paraît indispensable
"
7(
*
)
.
Cet effort d'information suppose de renforcer notre capacité de
recherche.
L'effet de serre n'est, en effet, encore pour beaucoup de laboratoires qu'un
thème accessoire par rapport à une activité principale. La
multiplicité des causes et des conséquences du
réchauffement climatique conduit en outre à faire intervenir un
nombre important de laboratoires spécialisés.
La diversité des structures concernées par ce domaine suppose
de veiller constamment à ce que la problématique de l'effet de
serre soit prise en compte dans la définition des programmes de
recherche.
De ce point de vue, la proposition formulée dans le
rapport de la MIES de mettre en place "
un mécanisme
garantissant la motivation des organismes institutionnels et de recherche sur
ce sujet
" afin
d'" assurer une présence à tous
les niveaux, comparable à celle des autres grands pays
développés. "
mériterait d'être retenue. La
diversité des structures impose également qu'une
meilleure
coordination des travaux
soit recherchée afin d'assurer la
complémentarité des efforts de recherches entrepris et une plus
grande efficience des dépenses engagées.
Ce renforcement de la capacité de recherche sur l'effet de serre
permettrait, en outre, de mieux faire valoir les positions de la France dans
les négociations internationales
. Le développement de la
participation de la France au GIEC permettrait, en particulier, que ses
préoccupations scientifiques soient mieux prises en compte, dans le
cadre de l'élaboration des rapports du GIEC qui servent de fondement aux
décisions prises dans le cadre de la Convention sur le climat.
Une meilleure connaissance des causes des changements climatiques et de
leurs conséquences pourrait, en outre, contribuer à la politique
de coopération en faveur des pays en voie de développement.
Certains pays en développement et, en particulier, les pays insulaires
de faible altitude et les pays à zones côtières de basse
altitude sont, du fait de leur vulnérabilité aux changements
climatiques, particulièrement demandeurs d'un développement des
connaissances scientifiques sur l'évolution des climats et ses
conséquences.
Depuis la conférence de Rio, la France a déjà mis en place
des actions diverses visant à mieux connaître l'évolution
des climats et la progression de la désertification, et à
favoriser l'adoption de chemins de développement moins émetteurs
de gaz à effet de serre dans les pays en développement.
La France soutient par ailleurs des mécanismes de financement qui
contribuent à la lutte contre l'effet de serre dans les pays du Sud,
tels que le Fonds pour l'environnement mondial (FEM) et le Fonds
français pour l'Environnement mondial (FFEM). Au sein de l'ICRI
(Initiative internationale en faveur des récifs coralliens et
écosystèmes associés) , la France a enfin pris des
initiatives dont l'Initiative française pour les récifs
coralliens (IFRECOR) afin d'aider les pays les plus vulnérables.
Ces efforts doivent être poursuivis et amplifiés. L'engagement des
pays en voie de développement dans la voie du développement
durable, dépend en partie de la capacité des pays
industrialisés à répondre à leurs besoins
spécifiques. De ce point de vue, la connaissance des conséquences
des changements climatiques est un élément essentiel pour leur
permettre d'accroître la capacité d'adaptation à ces
changements.