IV. LA PROPOSITION DE LOI PORTANT CRÉATION D'UN OBSERVATOIRE NATIONAL SUR LES EFFETS DU RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE
La
présente proposition de loi tend à conférer à la
lutte contre l'effet de serre et à la prévention des risques
liés au réchauffement climatique la qualité de
priorité nationale.
Il s'agit de témoigner de la
préoccupation de la représentation nationale face à cet
enjeu majeur pour les prochains siècles. Il apparaît, en effet,
normal que les changements climatiques qui représentent "
la
plus grande menace pour le développement durable du monde, la
santé publique et la prospérité future
"
8(
*
)
soient ainsi consacrés comme une
des priorités des politiques publiques.
Le texte qui nous est proposé tend également à
créer un observatoire national sur les effets du réchauffement
climatique en France métropolitaine et dans les territoires
d'outre-mer.
Cet observatoire national serait chargé d'approfondir la connaissance
des risques liés au réchauffement climatique en France
métropolitaine et dans les départements et territoires
d'outre-mer et d'en mesurer l'impact sur l'aménagement et le
développement des régions. Il aurait également pour
mission d'élaborer des recommandations pour la définition, par
les autorités compétentes, de politiques tant nationales que
régionales d'adaptation et de prévention aux risques du
réchauffement climatique. Il rendrait public un rapport annuel.
Dans l'esprit de votre rapporteur,
cet observatoire répond tout
d'abord à la nécessité de développer notre
capacité à prévenir les impacts des changements
climatiques et des phénomènes climatiques extrêmes pour
réduire la vulnérabilité de nos territoires.
L'analyse de l'évolution des phénomènes climatiques et de
leur impact est, en effet, un des domaines où notre capacité de
recherche devrait être renforcée. Comme le souligne le rapport
précité de la MIES, "
le développement d'une
capacité de prévision des impacts à partir des
données fournies par les outils de prévision du climat
présenterait un grand intérêt pour réduire la
vulnérabilité, en permettant la mise en oeuvre des mesures
d'adaptation
"
9(
*
)
.
Celles-ci exigent une connaissance de la vulnérabilité des
éco-systèmes, des systèmes hydrologiques, des
systèmes côtiers et des infrastructures, ainsi que des effets des
changements climatiques sur la santé et sur la demande et l'offre
d'énergie. Or, celle-ci n'est aujourd'hui que très partielle.
Cette nouvelle structure répond également à un besoin de
recueillir, de consolider, et de diffuser des informations actuellement
disséminées dans les différents centres de recherche
.
Comme le montre le schéma suivant, l'observatoire national sur les
effets du réchauffement climatique pourrait recueillir l'ensemble des
travaux sur ce thème et consolider des observations satellites et
météorologiques pour les mettre à la disposition de la
communauté scientifique et de la mission interministérielle sur
l'effet de serre.
. AOSIS : Alliance of Small Island State
. COP : Conférence des parties
. CIRAO : Centre international de recherche en Agriculture et
Développement
. FEM : Fonds pour l'environnement mondial, (GEF, Global environment
facility)
. FFEM : Fonds français pour l'environnement mondial
. GIEC : Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution
du climat (IPCC, Intergovernmental panel on climate change)
. ICRI : Initiative internationale en faveur des récifs
coralliens et écosystèmes associés
. IEPF : Institut pour l'environnement et l'énergie de la
Francophonie (Québec)
. IFEN : Institut français de l'environnement
. IFRECOR : Initiative française pour les récifs
coralliens
. INSU : Institut national des Sciences de l'Univers
. MDP : mécanisme pour un développeemnt propre (CDM,
Clean Development Mechanism)
. MIES : Mission interministérielle sur l'évolution du
climat
. PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement
(UNDP)
. PNUE : Programme des Nations Unies pour l'environnement (UNEP)
. UN CCCC : Convention Cadre des Nations Unies sur les changements
climatiques
Cette centralisation des données devrait
s'accompagner de
l'observation des effets des changements climatiques sur le terrain, notamment
au niveau de la végétation et des récifs coralliens.
Grâce à ses départements et territoires d'outre-mer, la
France est le seul pays européen à disposer des moyens de faire
effectuer des observations dans l'Océan Pacifique, dans les
Caraïbes, et dans l'Océan Indien. Il convient de profiter
pleinement de cette opportunité.
Le recueil de ces données devrait permettre de mener une politique
d'information et de sensibilisation du public
sur les enjeux liés
aux changements climatiques.
Votre rapporteur estime
que cette information devait également
profiter aux collectivités territoriales et à leurs
responsables.
L'expérience de la tempête qui s'est abattue sur
la France l'hiver dernier montre, en effet, que les élus locaux ont
besoin d'un interlocuteur qui puisse les alerter sur les risques climatiques et
les renseigner sur les mesures de prévention et d'adaptation
susceptibles de réduire l'impact des changements climatiques.
L'Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique
pourrait également être l'instrument d'une meilleure coordination
des scientifiques français qui participent aux différentes
instances internationales
concernées par les enjeux
climatiques
. Cette coordination favoriserait la synergie et la
cohésion des différentes positions prises dans ces instances et
devrait ainsi permettre d'assurer une meilleure diffusion de la position
française au niveau mondial.
La mise en place de cette structure devrait, en outre, améliorer la
capacité de la France à s'engager dans des politiques de
coopération avec les pays du sud
. Elle permettrait, en particulier,
aux DOM et aux TOM d'engager une coopération renforcée avec les
petits Etats-îles regroupés au sein de l'alliance des petits Etats
insulaires (AOSIS) qui sont particulièrement concernés par les
conséquences du réchauffement climatique.
Il est de l'intérêt de la France de pouvoir associer l'ensemble de
ces Etats à sa politique de lutte contre l'effet de serre. La France a
en effet besoin, pour faire avancer ses positions au sein des instances
internationales, d'avoir le soutien du plus grand nombre d'Etats. Elle
gagnerait de ce point de vue à s'inspirer des Etats-Unis qui ont, depuis
longtemps, compris l'intérêt de promouvoir par des
opérations de coopération leur position auprès des pays en
voie de développement.
Ces considérations ont conduit votre commission à adopter les
dispositions de la présente proposition de loi sous réserve
d'amendements tendant à préciser et à recentrer les
missions de l'observatoire afin d'assurer la complémentarité avec
les organismes existants et, en particulier, avec la Mission
interministérielle sur l'effet de serre.
Outre des modifications rédactionnelles, votre commission vous propose
de recentrer les missions de l'observatoire sur "
la collecte et la
diffusion des informations, des études et des recherches relatives aux
risques liés au réchauffement climatique et aux
phénomènes climatiques extrêmes en France
métropolitaine et dans les départements et territoires
d'outre-mer
", ainsi que sur des "
actions d'information
auprès du public et des collectivités territoriales
".
Elle propose également de préciser que ces missions seront
exercées "
en liaison avec les établissements et
instituts de recherche concernés ainsi qu'avec le Groupe d'experts
intergouvernementaux sur l'évolution du climat (GIEC)
".
Cette nouvelle structure a, en effet, vocation à fédérer
les travaux des différents établissement des instituts de
recherche qui travaillent déjà sur ce sujet et à
réunir des équipes issues de ces différents laboratoires.
Elle ne saurait en aucun cas travailler en concurrence avec les structures
existantes. La référence au GIEC participe aussi de la même
logique et tend également à inscrire les travaux de
l'observatoire dans une perspective internationale.
Il est apparu également utile de confier à l'observatoire des
missions de sensibilisation du public et d'information des collectivités
territoriales. Un des principaux obstacles à l'adoption de mesures
volontaristes est l'absence de prise de conscience collective sur les enjeux du
changement climatique. Le laboratoire pourrait donc dans ce domaine jouer un
rôle tout à fait positif en informant et en diffusant les
résultats de la recherche scientifique dans ce domaine.
L'information des collectivités territoriales est également
essentielle pour permettre aux élus locaux d'alerter leurs concitoyens
sur les risques et sur les mesures de prévention d'adaptation
susceptibles de limiter l'impact du réchauffement climatique et des
phénomènes climatiques extrêmes.
Dans cette perspective, votre commission a souhaité que le rapport
d'information de l'observatoire puisse également contenir des
recommandations sur ce sujet précis.
Si votre commission a ainsi souhaité préciser les missions de
l'observatoire, elle n'a pas jugé opportun d'en déterminer la
composition et les règles de fonctionnement qui, non seulement,
relèvent du domaine réglementaire, mais devraient
également faire l'objet d'une négociation entre les
différents centres de recherches concernés.
Les différentes auditions auxquelles votre rapporteur a
procédé l'ont néanmoins conduit à imaginer ce que
pourraient être les principales caractéristiques de ce laboratoire.
S'agissant de la nature juridique de cet organisme, il semble que la formule du
Groupement d'intérêt public (GIP) soit la plus adaptée.
Dotant l'observatoire d'une personnalité morale, le GIP permettrait de
lui confier une réelle autonomie de gestion.
La loi du 15 juillet 1982 d'orientation et de programmation pour la
recherche et le développement technologique en France prévoit, en
effet, que "
des groupements d'intérêt public dotés
de la personnalité morale et de l'autonomie financière peuvent
être constitués entre les établissements publics ayant une
activité de recherche et de développement technologique, entre
l'un ou plusieurs d'entre eux et une ou plusieurs personnes morales de droit
public ou de droit privé pour exercer ensemble, pendant une durée
déterminée, des activités de recherche ou de
développement technologique, ou gérer des équipements
d'intérêt commun nécessaires à ces
activités.
"
Il semble, par ailleurs, souhaitable qu'outre les différents organes
prévus par le statut des GIP, l'observatoire soit doté d'un
conseil d'orientation réunissant des scientifiques de réputation
internationale afin d'asseoir la crédibilité et la
notoriété de l'observatoire au sein du public et de la
communauté scientifique internationale.
*
* *
Sous réserve de ces observations, votre commission vous demande d'adopter la proposition de loi dans le texte résultant de ses conclusions, tel qu'il est inclus dans le présent rapport.