2. L'utilité de la compensation judiciaire
La
disposition la plus importante du projet de loi qui nous est soumis ne doit pas
pour autant être écartée, dans la mesure où elle
répond à un souci d'efficacité immédiate.
La compensation judiciaire, s'il ne faut pas en attendre qu'elle résolve
à elle seule la question du grand nombre d'infractions qui demeurent
impunies, est une mesure qui présente des avantages réels.
En premier lieu, elle permettra
d'apporter une réponse à
nombre d'infractions qui font aujourd'hui l'objet de classements sans suite et
de soulager l'audience de certaines affaires ni graves ni complexes
. On
peut même penser que, si elle est suffisamment utilisée par les
parquets, elle pourrait provoquer certains changements de comportements. Des
infractions qui, aujourd'hui ne font bien souvent, même pas l'objet de
plaintes, comme le vol à l'étalage, pourraient recevoir une
réponse tout à fait appropriée. A l'inverse, des affaires
qui, aujourd'hui, font l'objet d'une audience correctionnelle,
mériteraient de bénéficier de cette
procédure ; le temps ainsi dégagé permettrait de
traiter de manière plus approfondie des affaires plus graves. Dans
certains cas, la compensation sera plus favorable à la victime que
l'audience correctionnelle elle-même, qui ne garantit pas que les mesures
prononcées pourront être exécutées.
En second lieu, cette nouvelle forme d'alternative aux poursuites constitue un
premier pas vers la mise en oeuvre d'une forme de " plaidé
coupable ".
Votre rapporteur considère que le
" plaidé coupable " constitue une piste qui ne doit pas
être négligée dans la recherche d'une solution à
l'engorgement de la justice pénale. Il y voit en outre le germe d'une
conception nouvelle, plus humaniste de cette justice.
Certes, le " plea bargaining ", tel qu'il est pratiqué aux
Etats-Unis, fait l'objet de certains excès et donne parfois l'impression
d'être un véritable marchandage qui ne grandit pas la justice.
Faut-il pour autant se priver d'un système dans lequel l'auteur de faits
répréhensibles reconnaîtrait sa faute et ferait l'objet
d'une sanction immédiate moins grave que celle qu'il encourrait en
l'absence d'aveu ? Est-il vraiment choquant qu'une personne poursuivie commence
à faire amende honorable avant d'être condamnée en
reconnaissant les faits qu'elle a commis et en cherchant à les
réparer, facilitant ainsi l'action de la justice? Ne s'agit-il pas d'une
voie plus conforme à la dignité humaine et, de ce fait, plus
éducative et donc plus efficace ?
Le " plaidé coupable " permet d'associer la personne
poursuivie à la décision la concernant. Il peut avoir un effet de
responsabilisation, peut permettre une prise de conscience et ne bafoue en rien
les droits de la défense lorsqu'il est pleinement volontaire.
Votre commission approuve donc l'introduction du plaidé coupable dans
une procédure alternative aux poursuites et souhaite que la
réflexion se poursuive sur l'application de cette notion dans la
procédure pénale proprement dite.