EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Le projet de loi relatif à l'amélioration des relations entre les administrations et le public adopté par l'Assemblée nationale le 16 janvier 1997 constitue le premier élément du cadre législatif de la " réforme de l'Etat ". Il constituera le socle de la consécration d'une évolution des pratiques administratives dont la mise en oeuvre relèvera essentiellement du domaine réglementaire.

L'élaboration de la réforme souhaitée par le Président de la République comme l'un des chantiers de modernisation du septennat a été initiée par la circulaire du Premier ministre, M. Alain Juppé, du 26 juillet 1995. Elle a été suivie de la mise en place du comité interministériel pour la réforme de l'Etat puis du commissariat à la réforme de l'Etat créé par le décret du 13 septembre 1995. Au terme de six mois de concertation, le comité interministériel du 29 mai 1996 a arrêté le programme de réforme de l'Etat dont le Président de la République a fait l'une des principales priorités pour 1997.

Dans les départements, cette démarche est prolongée par les préfets qui consultent les élus locaux dans le cadre de l'élaboration de schémas départementaux d'organisation et d'amélioration des services publics.

Sur cette base, plusieurs textes réglementaires sont déjà intervenus, notamment le décret n° 97-34 du 15 janvier 1997 sur la déconcentration qui prévoit qu'à compter du 1er janvier 1998, les décisions individuelles administratives seront prises par les autorités locales de l'Etat, en droit commun, le préfet.

Le présent projet de loi sera suivi d'un projet de loi qui permettra de faire passer du régime de l'autorisation préalable à celui de la déclaration ou de l'accord tacite un grand nombre de décisions [1] . D'autres mesures sont annoncées en matière de changement d'adresse, d'état-civil ou de permis de construire qui viseraient à simplifier les procédures comme avait pu le faire la loi n° 94-126 du 11 février 1994, relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle, pour les formalités imposées aux entreprises.

Le présent projet de loi s'inscrit dans la lignée d'une jurisprudence ancienne relayée par les lois n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal (accès aux documents administratifs) et n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ou par les décrets n° 65-29 du 11 janvier 1965 relatif aux délais de recours contentieux en matière administrative et n° 83-1025 du 28 novembre 1983 concernant les relations entre l'administration et les usagers (accusé de réception, transmission des demandes, observations préalables à la décision).

Il est marqué par la volonté d'accélérer le processus de décision des administrations centrales et locales, de consacrer certains dispositifs réglementaires ou expérimentaux destinés à rapprocher l'administration du citoyen et d'accroître la transparence des procédures.

Il s'agit de redonner une fluidité à l'action de l'administration qui lui permette de se mettre davantage au service du public, de ne pas entraver le dynamisme économique et de réduire les coûts de gestion administrative tant pour les services publics que pour les particuliers et les entreprises.

L'Assemblée nationale y a principalement apporté des améliorations d'ordre rédactionnel.

Le titre premier regroupe sept articles relatifs au régime de certaines décisions prises par les autorités administratives dont l'article premier définit le champ . Celui-ci incluant les collectivités territoriales, il nécessite l'intervention du législateur en application de l'article 34 de la Constitution.

Votre commission des Lois vous proposera de le compléter par un article additionnel définissant les " demandes " soumises aux procédures prévues aux articles suivants. Sont exclues les décisions concernant les rapports entre une autorité administrative et ses agents.

Les articles 2 à 7 reprennent en les aménageant pour leur donner une nouvelle impulsion des dispositifs déjà mis en oeuvre, pour l'essentiel par décret, pour les administrations de l'Etat.

L'article 2 prévoit que toute demande adressée à une autorité administrative au sens du présent texte doit faire l'objet d'un accusé de réception , sauf lorsque des dispositions spéciales existent, lorsque la brièveté du délai imparti pour prendre la décision s'y oppose, lorsque la délivrance de la prestation ou du service a un caractère automatique ou lorsque la demande est abusive.

Votre commission vous proposera de préciser à cet article que le défaut d'envoi de l'accusé de réception n'entraînera pas l'inopposabilité des délais de recours lorsqu'une décision expresse aura répondu à la demande avant que ne naisse une décision implicite. Il s'agit d'éviter de pénaliser une administration qui s'attacherait à répondre rapidement et explicitement à une demande et d'assurer la sécurité des situations juridiques.

L'article 3 prévoit une procédure transparente de transmission à l'autorité compétente d'une demande adressée à une autorité incompétente.

Votre commission vous proposera de préciser que, dans ce cas, l'accusé de réception est délivré par l'autorité compétente.

Les articles 4 et 5 encadrent le régime des décisions implicites de rejet ou d'acceptation. La novation principale est la réduction de quatre à deux mois du délai de droit commun , ce qui permettra d'accélérer substantiellement le délai de réponse des administrations. Cette modification sera notamment réalisée grâce à la déconcentration des décisions; elle traduit également la volonté de rapprocher l'instance de décision de l'administré.

Ces articles précisent en outre les conditions dans lesquelles des décrets en Conseil d'Etat pourront opter pour le régime de la décision implicite d'acceptation lequel est appelé à se développer, le droit commun demeurant toutefois que le silence de l'administration vaut rejet.

L'article 6 tient compte du développement envisagé des décisions implicites d'acceptation et élargit la possibilité de retrait pour illégalité d'une telle décision. Votre commission vous proposera d'en affiner la rédaction pour mieux encadrer le délai de retrait lorsque les formalités de publicité à l'égard des tiers ont été omises.

L'article 7, dont l'Assemblée nationale a interverti le contenu avec celui de l'article 4 du projet de loi initial, traite de la faculté donnée à l'intéressé de présenter des observations préalablement à une décision administrative ne résultant pas d'une demande.

Le titre II composé du seul article 8 tire les conséquences de l'oeuvre accomplie depuis plus de vingt ans par la médiature en renforçant les pouvoirs du Médiateur de la République et en élargissant la liste des autorités habilitées à le saisir. L'Assemblée nationale n'a pas souhaité que cette extension comprenne les députés européens. Votre commission vous proposera à son tour de revenir sur la faculté ouverte par le projet de loi aux exécutifs locaux de saisir le Médiateur.

L'Assemblée nationale a en outre prévu que le Médiateur procèderait à une communication de son rapport devant chacune des deux assemblées.

Lors de son audition par la comission des Lois le 28 janvier 1997, le Médiateur a dressé un bilan de l'activité de ses services. Il a indiqué qu'en 1996, 43 000 réclamations lui avaient été adressées. Il a précisé que sur les quelque 60% de celles qui avaient été déclarées recevables, l'intervention du Médiateur avait abouti dans 85% des cas et qu'au cours des deux dernières années le délai de réponse moyen avait été ramené de six à quatre mois.

Reconnaissant l'efficacité de cette institution qui, à l'écoute des citoyens et grâce à sa bonne connaissance des rouages administratifs, a acquis une autorité morale incontestable et a activement contribué à l'amélioration des relations entre les administrations et les usagers, votre commission se félicite du renforcement proposé des pouvoirs du Médiateur de la République. Elle vous proposera un amendement de clarification pour préciser ses modalités d'intervention.

Le titre III est constitué du seul article 9 relatif aux maisons des services publics qui pourront être créées par convention ou sous forme d'un groupement d'intérêt public.

Enfin, le titre IV regroupe diverses dispositions relatives à l'ordonnancement des astreintes (article 10 A ajouté par l'Assemblée nationale), aux provisions ordonnées par le juge des référés (article 10 B inséré par l'Assemblée nationale), à l' entrée en vigueur du titre premier du projet de loi cinq mois au moins après sa publication (article 10) et à l'applicabilité de certaines dispositions aux territoires d'outre-mer et à Mayotte (article 11).

Votre commission vous proposera de le compléter par un article additionnel inséré après l'article 10 B destiné à simplifier le régime du permis de démolir.

Sous le bénéfice de ces observations et sous réserve de l'adoption de ces amendements, votre commission vous propose d'adopter le projet de loi.

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