III. LE PROGRAMME « LIVRE ET INDUSTRIES CULTURELLES »
Le programme « Livre et industries culturelles » est composé de deux actions. L'action 01 « Livre et lecture » représente la quasi-totalité des crédits de paiement du programme.
Les moyens accordés au programme devraient être stables en 2025 par rapport à l'année précédente (- 0,8 % en AE et -0,4 % en CP). Cette stabilité est consécutive à la forte hausse accordée en 2024 (+ 33 millions d'euros en AE et + 34 millions d'euros en CP), notamment du fait d'une prise en charge partielle des surcoûts liés à l'inflation constatée en 2023 et 2024 pour les opérateurs de la mission et à la compensation des hausses du point d'indice.
Évolution des crédits du
programme 334 « Livre et industries
culturelles »
de 2024 à 2025 à
périmètre courant
(en euros)
|
LFI 2023 |
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Variation 2024/2023 ( %) |
||||
|
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
01 - Livre et lecture |
296 686 040 |
304 187 054 |
331 895 864 |
327 008 531 |
330 395 864 |
327 055 864 |
-0,45 % |
0,01 % |
02 - Industries culturelles |
29 663 988 |
29 663 988 |
32 274 112 |
32 274 112 |
30 938 874 |
30 938 874 |
-4,14 % |
-4,14 % |
334 - Livre et industries culturelles |
330 337 709 |
324 433 411 |
364 169 976 |
359 282 643 |
361 334 738 |
357 994 738 |
-0,78 % |
-0,36 % |
Source : commission des finances du Sénat, d'après les données budgétaires
A. UN MAINTIEN DES CRÉDITS DÉDIÉS À LA POLITIQUE DU LIVRE CONSÉCUTIF À LA HAUSSE CONSTATÉE LES ANNÉES PRÉCÉDENTES
L'action 01 « Livre et lecture » du programme 334 devrait être dotée en 2024 de 330,4 millions d'euros en AE et 327,1millions d'euros en CP. Ces crédits sont stables (- 0,5 % et + 0,01 %) par rapport à 2024. Ils avaient augmenté entre 2023 et 2024 de respectivement + 10,4 % et + 7,5 %.
88 % des crédits du programme 334 sont à destination de quatre opérateurs : Bibliothèque nationale de France (BnF), Bibliothèque publique d'information (Bpi), Centre national du livre (CNL) et Centre national de la musique (CNM), dont 60 % des crédits du programme consacrés à la seule BnF.
Les crédits d'intervention déconcentrés inscrits sur le programme 334 s'élèvent à 10,1 millions d'euros. Ils ont vocation à être mobilisés pour l'essentiel dans le domaine de la lecture publique, pour le soutien au développement et à la diffusion de l'offre et des pratiques de lecture par les bibliothèques et les structures régionales pour le livre.
L'action 1 du programme 334 est par ailleurs loin de résumer pour autant l'action du ministère de la culture en faveur du livre, éclatée entre plusieurs programmes et également exercée par les collectivités territoriales.
Le financement de la lecture publique par les collectivités territoriales
Les collectivités territoriales sont au premier rang du développement de la lecture publique par l'entretien des bibliothèques communales ou départementales. Le principal levier d'accompagnement de l'État est le concours particulier relatif aux bibliothèques au sein de la dotation générale de décentralisation (DGD), tel que défini par le code général des collectivités territoriales (articles L. 1614-10 et 11). La DGD figure sur les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et non sur le programme 334.
En application du Plan Bibliothèques, les crédits de ce concours particulier s'élèvent à 94,9 millions d'euros en 2024. Toutefois, l'importance de l'inflation des dernières années a réduit les effets positifs de cette augmentation.
Les collectivités contribuent fortement au soutien à la lecture publique. En 2022, dernière année pour laquelle les données ont été transmises au rapporteur spécial, les collectivités avaient dépensé près d'1,4 milliard d'euros pour les bibliothèques.
Dépenses des collectivités territoriales à destination des bibliothèques publiques en 2022
(en millions d'euros)
Source : commission des finances d'après les données du questionnaire budgétaire
1. Près de 90 % des crédits de l'action sont dédiés aux grandes bibliothèques publiques
La majorité des crédits de l'action consistent en des dotations versées à trois opérateurs : la Bibliothèque nationale de France (BnF), la Bibliothèque publique d'information (Bpi) implantée au Centre national d'art et de culture Georges Pompidou et le Centre national du livre.
Après une hausse de 15,3 millions d'euros, soit 5,5 %, l'année précédente, les crédits accordés à ces opérateurs devaient se stabiliser. Une partie de cette progression accordée en 2024 découlait de la compensation de la hausse du point d'indice de 1,5 % décidée à l'été 2023.
Au cours des dernières années, les crédits accordés aux opérateurs ont largement augmenté (+ 21 millions d'euros entre 2022 et 2023). La quasi-totalité de cette hausse a cependant été absorbée par la BnF.
Évolution des crédits de paiement
dédiés aux opérateurs
de l'action 01 du programme
334
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Le report des financements du projet de la maison du dessin de presse
En 2024, 13,91 millions d'euros en AE et 2,6 millions d'euros en CP étaient prévus sur les crédits du programme 334 pour les travaux de la Maison du dessin de presse dont l'ouverture était prévue à Paris en 2026. 2 millions d'euros avaient déjà été versés en 2023 pour mener les études préalables et lancer les travaux.
Le budget prévisionnel des travaux est estimé à 15,6 millions d'euros, qui devaient être versés entre 2023 et 2026. Le calendrier de financement initial a cependant été décalé. Les crédits votés en 2024 au titre de l'investissement devraient donc être reportés en 2025 et le PLF ne comporte pas de nouveau crédit (contrairement aux 6,8 millions d'euros de crédits prévus dans le plan de financement initial).
L'État a délégué en 2022 la maîtrise d'ouvrage des études et des travaux à son établissement public de maîtrise d'ouvrage publique, l'OPPIC. Ce dernier a réalisé, au second semestre 2022 et au premier semestre 2023, les études préalables et le programme architectural et fonctionnel de la Maison. Sur cette base, a été lancé en avril 2023 un avis d'appel public à la concurrence en vue du choix du maître d'oeuvre. Le premier semestre 2024 a permis au maître d'oeuvre de rédiger un avant-projet architectural, dont l'élaboration a donné lieu à d'intenses échanges avec l'équipe de préfiguration sur la scénographie des expositions et qui a confirmé l'estimation budgétaire des travaux. Cet avant-projet a été approuvé par le ministère de la Culture en juin 2024.
Parallèlement, le premier semestre 2024 a permis de préparer avec la Ville de Paris, propriétaire du bâtiment qui accueillera la future maison du dessin de presse, un projet de bail emphytéotique administratif. Les étapes suivantes sont l'instruction du permis de construire et la finalisation des études de maîtrise d'oeuvre.
Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire
2. La Bibliothèque nationale de France, premier opérateur du ministère
Pour 2025, l'enveloppe consacrée à la subvention pour charges de service public (SCSP) de la BnF s'établit à 216,2 millions d'euros en AE et en CP, soit une progression de 5 millions d'euros par rapport à 2024, « notamment afin de compenser les charges incompressibles de l'établissement » d'après les réponses au questionnaire budgétaire.
La subvention pour charges d'investissement (SCI) est reconduite à 31,34 millions d'euros en AE et augmente de 4 millions d'euros en CP (qui correspondent à l'engagement des crédits du site de stockage à Amiens).
Entre 2021 et 2025, les crédits accordés à la BnF sont en hausse de 35 millions d'euros, soit 16 %.
Il s'agit de la plus importante subvention versée à un opérateur du ministère de la culture.
Évolution des subventions pour charges de service public et pour charges d'investissement de la Bibliothèque nationale de France depuis 2021
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire
Une hausse de la fréquentation des différents sites
La BnF se félicite d'une fréquentation en forte hausse : en 2023, près de 1,5 million de visites ont ainsi été comptabilisées sur l'ensemble des sites et pour l'ensemble des activités : salles de lecture, musée, expositions, manifestations. Ce « record historique » qui dépasse la cible fixée pour 2023 dans le COP, est largement dû à la fréquentation des espaces tous publics de la BnF (en particulier de la salle ovale de Richelieu, seule salle gratuite).
Depuis son ouverture en septembre 2022, plus de 300 000 visiteurs ont fréquenté le musée et les expositions du site Richelieu.
Une part très importante de cette fréquentation néanmoins concerne les salles de lecture, soit 1,1 million d'entrées en 2023, dont 475 000 pour la bibliothèque tous publics, 254 000 pour les salles de la bibliothèque de recherche et 380 000 pour la salle Ovale. 77 % de la fréquentation provient du grand public, les chercheurs ne représentent plus que 23 % de la fréquentation.
La BnF entend cependant poursuivre la reconquête de ces publics académiques. La fréquentation des salles de recherche progresse de 11 % par rapport à 2022 mais reste inférieure à la fréquentation pré-crise sanitaire (346 160 en 2019).
Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire
L'essentiel des dépenses de la BnF concerne sa masse salariale (164,7 millions d'euros en 2024). Sa croissance est essentiellement liée aux mesures générales concernant l'ensemble de la fonction publique, qui n'ont d'ailleurs été que partiellement compensées : 4,75 millions d'euros ont été prévus en 2024 au titre du point d'indice 2022, mais aucune hausse n'avait cependant été inscrite pour la compensation du relèvement du point d'indice en 2023.
Hors augmentation du point d'indice et hors mesures indemnitaires ministérielles ou interministérielles, la BnF indique que la progression de ses dépenses de personnel a été de - 0,7 % entre 2021 et 2023.
Au 31 décembre 2023, les effectifs sous plafond de la BnF représenteraient, en projection, 2 145,73 ETPT, dont 39 % de catégorie A, 30,3 % de B et 30,7 % de C. Toutes catégories confondues, les emplois titulaires représenteraient 1 358,24 ETPT (63,3 %) et les emplois contractuels 787,49 ETPT (36,7 %).
Les dépenses de fonctionnement ont été tirées à la hausse par l'inflation des coûts de l'énergie et par la réouverture en 2022 du site Richelieu. Le site François-Mitterrand est un bâtiment très consommateur d'énergie : le ministère de la Culture indique que sa consommation électrique annuelle est l'équivalent de celle d'une ville de 20 000 habitants. Afin d'en tenir compte, sur les deux années 2022 et 2023, la BnF a perçu 13,2 millions d'euros de compensation des surcoûts de l'énergie.
Évolution des dépenses de la Bibliothèque nationale de France
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire
Les investissements constituent un poste important, notamment du fait des grands travaux engagés par la BnF au cours des dernières années ou devant être prochainement engagés.
Le chantier de rénovation du quadrilatère Richelieu, terminé en 2022, s'est élevé à 247,6 millions d'euros, dont 205 millions d'euros versés par le ministère de la culture.
La construction du centre de stockage et de conservation d'Amiens devrait permettre de pallier la saturation des espaces de stockage des documents. 30 millions d'euros d'AE ont été ouvertes en LFI 2021, et sont décaissés au rythme de 4 millions d'euros en 2024 et 2025. Le budget prévisionnel du projet est fixé à près de 97 millions d'euros et devrait se terminer en 2029.
Hors grands projets, le niveau des investissements courants est demeuré stable sur la période. Le vieillissement des sites a cependant nécessité la mise en place de travaux de réhabilitation du site Richelieu et de remise à niveau des équipements du site Tolbiac, qui ont largement contribué à la progression de la subvention versée.
Plusieurs chantiers ont ainsi déjà débuté, certains devant prendre fin en 2027, pour un montant total de 63,3 millions d'euros. Il en va ainsi :
- du remplacement du système de sécurité incendie, estimé à 31 millions d'euros, les travaux devant s'étaler de 2020 à 2026 ;
- de la rénovation des équipements de la gestion technique centralisée et du système de gestion technique électrique, pour un montant de 5,4 millions d'euros étalé entre 2019 et 2025 ;
- du remplacement des 62 ascenseurs du socle, soit 1 million d'euros par an entre 2020 et 2026 ;
- du renouvellement décennal du transport automatique des collections et des documents, soit 5,9 millions d'euros étalés entre 2026 et 2027 ;
- l'amélioration de la performance énergétique des centrales de traitement d'air. Le coût de 1,3 million d'euros sera étalé entre 2022 et 2027 ;
- le remplacement des groupes froids de la production centralisée, soit 4 millions d'euros entre 2022 et 2025 ;
- la rénovation des installations électriques de puissance pour un coût de 9,7 millions d'euros à financer à partir de 2023.
Le niveau de fonds de roulement de la BnF s'élève à 50 millions d'euros. Le montant du fonds de roulement mobilisable, une fois retenus les montants fléchés, notamment vers le site d'Amiens, est estimé par la BnF de l'ordre de 18,87 millions d'euros à fin 2024. Cela correspond au niveau du seuil prudentiel des 30 jours de fonctionnement (18,6 millions d'euros).