- PREMIÈRE PARTIE
LA MISSION « MÉDIAS, LIVRE ET
INDUSTRIES CULTURELLES »
- I. UNE LÉGÈRE DIMINUTION DES
CRÉDITS DE LA MISSION APRÈS LA CROISSANCE DES ANNÉES
PRÉCÉDENTES
- II. LE PROGRAMME « PRESSE ET
MÉDIAS » : UNE RELATIVE STABILISATION DES AIDES À
LA PRESSE DANS L'ATTENTE DE LEUR NÉCESSAIRE RÉFORME
- A. UNE RÉFORME DES AIDES À LA PRESSE
QUI CONSTITUE UN DES PRINCIPAUX ENJEUX DES ÉTATS GÉNÉRAUX
DE L'INFORMATION
- B. UNE STABILITÉ DES FINANCEMENTS
PRÉVUS POUR L'AFP CONFORME À LA TRAJECTOIRE DE SON CONTRAT
D'OBJECTIFS ET DE MOYENS
- C. UNE REGRETTABLE DIMINUTION DES MOYENS
ACCORDÉS AU FONDS DE SOUTIEN À L'EXPRESSION RADIOPHONIQUE (FSER)
- A. UNE RÉFORME DES AIDES À LA PRESSE
QUI CONSTITUE UN DES PRINCIPAUX ENJEUX DES ÉTATS GÉNÉRAUX
DE L'INFORMATION
- III. LE PROGRAMME « LIVRE ET INDUSTRIES
CULTURELLES »
- A. UN MAINTIEN DES CRÉDITS
DÉDIÉS À LA POLITIQUE DU LIVRE CONSÉCUTIF À
LA HAUSSE CONSTATÉE LES ANNÉES PRÉCÉDENTES
- B. LA NORMALISATION EN COURS DE LA GESTION DU
FINANCEMENT DU CENTRE NATIONAL DE LA MUSIQUE
- C. UNE CONTRIBUTION DU CNC AU REDRESSEMENT DES
FINANCES PUBLIQUES À HAUTEUR DE 450 MILLIONS D'EUROS
JUSTIFIÉE PAR LA SITUATION BUDGÉTAIRE DE
L'ÉTABLISSEMENT
- A. UN MAINTIEN DES CRÉDITS
DÉDIÉS À LA POLITIQUE DU LIVRE CONSÉCUTIF À
LA HAUSSE CONSTATÉE LES ANNÉES PRÉCÉDENTES
- I. UNE LÉGÈRE DIMINUTION DES
CRÉDITS DE LA MISSION APRÈS LA CROISSANCE DES ANNÉES
PRÉCÉDENTES
- DEUXIÈME PARTIE
LA MISSION
« AUDIOVISUEL PUBLIC » ET
LE COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS
« AVANCES À L'AUDIOVISUEL PUBLIC »
- I. UNE NOUVELLE MISSION BUDGÉTAIRE N'AYANT
VOCATION À ÊTRE QUE TEMPORAIRE DANS L'ATTENTE DU VOTE DE LA
PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE ADOPTÉE PAR LE SÉNAT
- II. UNE CONTRIBUTION NÉCESSAIRE DES
SOCIÉTÉS D'AUDIOVISUEL PUBLIC AUX EFFORTS DE REDRESSEMENT DES
FINANCES PUBLIQUES
- I. UNE NOUVELLE MISSION BUDGÉTAIRE N'AYANT
VOCATION À ÊTRE QUE TEMPORAIRE DANS L'ATTENTE DU VOTE DE LA
PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE ADOPTÉE PAR LE SÉNAT
- EXAMEN PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
- EXAMEN EN COMMISSION
- LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
- LA LOI EN CONSTRUCTION
N° 144 SÉNAT SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025 |
Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 novembre 2024 |
RAPPORT GÉNÉRAL FAIT au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale, pour 2025, |
Par M. Jean-François HUSSON, Rapporteur général, Sénateur LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES (seconde partie de la loi de
finances) MÉDIAS, LIVRE ET INDUSTRIES
CULTURELLES COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS : AVANCES À L'AUDIOVISUEL PUBLIC |
Rapporteur spécial : M. Jean-Raymond HUGONET |
(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Michel Canévet, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Bernard Delcros, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; Mmes Marie-Carole Ciuntu, Frédérique Espagnac, MM. Marc Laménie, Hervé Maurey, secrétaires ; MM. Pierre Barros, Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mmes Florence Blatrix Contat, Isabelle Briquet, MM. Vincent Capo-Canellas, Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Stéphane Fouassin, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Victorin Lurel, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Jean-Baptiste Olivier, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Georges Patient, Jean-François Rapin, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek, Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean-Pierre Vogel. |
Voir les numéros : Assemblée nationale (17ème législ.) : 324, 459, 462, 468, 471, 472, 486, 524, 527, 540 et T.A. 8 Sénat : 143 et 144 à 150 (2024-2025) |
PREMIÈRE PARTIE
LA MISSION
« MÉDIAS, LIVRE ET
INDUSTRIES CULTURELLES »
I. UNE LÉGÈRE DIMINUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION APRÈS LA CROISSANCE DES ANNÉES PRÉCÉDENTES
Pilotée par le ministère de la culture, la mission « Médias, Livre et industries culturelles » cible le développement et le pluralisme des médias, l'appui au secteur du livre et de la lecture, le soutien à l'industrie musicale et la protection des oeuvres sur internet.
Elle est composée de deux programmes, contribuant chacun pour moitié aux dépenses de la mission :
- le programme 180 « Presse et médias », qui vise à renforcer la vitalité, le pluralisme et le développement de la presse et des médias, notamment au niveau local ;
- le programme 334 « Livre et industries culturelles », consacré à la diversité et au renouvellement de la création, quels que soient les secteurs (livre, musique, audiovisuel, cinéma et jeu vidéo), et l'élargissement de la diffusion des oeuvres. Si l'État n'a pas vocation à se substituer aux acteurs privés du secteur culturel, il agit néanmoins afin d'assurer certains équilibres, tant en matière de diversité que d'accès à l'offre.
La mission ne comporte pas de dépenses de personnel de titre 2 puisque toutes les dépenses de personnel du ministère de la culture sont inscrites dans le programme 224 « Soutien aux politiques du ministère de la culture » rattaché à la mission « Culture ».
1. Une légère diminution des crédits qui reste inférieure à la baisse anticipée l'année précédente
Le présent projet de loi de finances prévoit au titre de cette mission 728,04 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 723,66 millions en crédits de paiement (CP). Ces chiffres traduisent une légère baisse de 12 millions d'euros par rapport à la loi de finances pour 2024, soit 1,7 % en CP et 1,9 % en AE.
Cette relative diminution interrompt la trajectoire fortement haussière de la mission au cours des dernières années. En 2024, les crédits avaient augmenté de 5,62 %en AE et + 4,41 % en CP, cette croissance s'ajoutant à celle des années précédentes (0,6 % en AE et 4,4 % en CP).
Entre 2022 et 2025, les crédits supplémentaires accordés à la mission atteignent 48,5 millions d'euros, soit une hausse de 7,2 %.
Évolution des crédits de paiement de
la mission « Médias, livre
et industries
culturelles » par programme
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires
Les deux programmes de la mission ont cependant évolué de manière très contrastée. Le programme 334 - Livre et industries culturelles a absorbé l'essentiel de la hausse des crédits (+ 7,2 % entre 2023 et 2025), alors que le programme 180 - Presse et Médias s'est légèrement contracté (- 1,4 % sur la même période).
Évolution des crédits de paiement de la mission « Médias, Livre et industries culturelles » à périmètre courant
(en millions d'euros et en %)
|
PLF 2023 |
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution 2024/2025 (en valeur) |
Évolution 2024/2025 (en %) |
Évolution 2025/2023 (en %) |
Programme 180 : Presse et médias |
371 |
376,65 |
365,7 |
- 11,0 |
- 2,9 % |
- 1,4 % |
Programme 334 : Livre et industries culturelles |
333,85 |
359,28 |
358,0 |
- 1,3 |
- 0,4 % |
+ 7,2 % |
Total |
704,86 |
735,95 |
723,7 |
- 12,3 |
- 1,7 % |
+ 2,7 % |
Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires
Une part importante de la hausse des crédits accordés l'année précédente aux opérateurs de la mission recouvrait des mesures de compensation des conséquences de l'inflation. Celle-ci ayant entre temps diminué, cette augmentation conjoncturelle n'a plus lieu d'être.
La loi de programmation des finances publiques 2023-20271(*) prévoit que les crédits de la mission devraient diminuer dès 2025, en AE comme en CP, pour revenir au niveau de 2023. En conséquence, et malgré le contexte budgétaire actuel, le niveau de crédits prévu en 2025 est plus favorable que celui anticipé l'année précédente (+ 7 millions d'euros).
Comparaison des trajectoires prévisionnelles de la mission « Médias, Livre et industries culturelles » en 2024 et 2025
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires
La mission « Médias, livre et industries culturelles » n'a formellement pas fait l'objet d'une annulation de crédits par le décret de février 20242(*), au contraire de la mission « Culture » qui avait fait l'objet d'une annulation de 100 millions d'euros de crédits. En conséquence, le ministère de la Culture a réparti l'effort du décret d'annulation sur les deux missions budgétaires par un virement de 2 % des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » vers les programmes de la mission « Culture » (175 « Patrimoine » et 131 « Création »)3(*).
Ces crédits ont été prélevés sur les réserves de précaution des programmes 334 et 180. Ont été prélevés, d'une part, 7,55 millions d'euros en AE et 7,53 millions d'euros en CP sur le programme 180 « presse et médias », soit 40 % de la réserve de précaution, et, d'autre part, 7,28 millions d'euros en AE et 7,19 millions d'euros en CP sur le programme 334 « livre et industries culturelles », soit les deux-tiers de la réserve.
2. La fin souhaitable des crédits exceptionnels
Depuis le premier programme d'investissement d'avenir (PIA) jusqu'au plan France 2030, la part des crédits dits « exceptionnels » dédiés au secteur de la culture n'a cessé d'augmenter, jusqu'à atteindre plus de 3 milliards d'euros cumulés au cours des cinq dernières années. Le financement d'un certain nombre de dispositifs relevant de la mission « Médias, livres et industrie culturelles » s'effectue par des crédits relevant du plan France 2030. Parmi eux, la « Grande fabrique de l'image » bénéficie de 350 millions d'euros de crédits.
Afin de disposer d'une meilleure visibilité sur ces financements, la commission des finances avait confié la réalisation d'une enquête à la Cour des comptes au titre du 2° de l'article 58 de la loi organique relative aux lois de finances4(*). Le panorama qui ressort de ces travaux doit impérativement conduire à une réflexion sur l'usage qui a été fait de ces financements publics : lacunes dans le pilotage et l'évaluation malgré l'importance des moyens consacrés ; absence de lisibilité des dispositifs ; faiblesse du rôle de contrôle laissé au Parlement ; liens avec les filières culturelles parfois limités.
La stratification des programmes et des actions, ainsi que la multiplicité des objectifs, certains gérés directement par le ministère de la Culture ou le SGPI, d'autres confié à des opérateurs, rendent extrêmement complexe l'établissement d'un panorama global de ces crédits, en dépit de l'importance des montants.
Une partie des crédits du plan de relance devait faire l'objet d'un remboursement par l'Union européenne (UE). Ce montant, initialement conséquent (702 millions d'euros, soit près de 4/5e du volet « Culture » du plan) a été fortement diminué du fait du retrait des plans de filières « Presse », « Livre » et « Cinéma » de la demande de remboursement auprès de l'UE. Le montant maximal potentiellement remboursé à la France ne serait donc désormais que de 393 millions d'euros.
II. LE PROGRAMME « PRESSE ET MÉDIAS » : UNE RELATIVE STABILISATION DES AIDES À LA PRESSE DANS L'ATTENTE DE LEUR NÉCESSAIRE RÉFORME
Le présent projet de loi de finances prévoit de porter les crédits du programme 180 « Presse et médias » à 365,6 millions d'euros en AE et 355,6 millions d'euros en CP. Plus de la moitié de ces financements concerne les aides à la presse, 40 % les crédits versés à l'AFP et une part restreinte (7 %) les radios locales.
Répartition des crédits de paiement
par action
au sein du programme 180 « Presse et
médias »
(en %)
Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires
Cela représente une baisse de 11 millions d'euros par rapport à l'année précédente (- 2,9 %). Les crédits du programme étaient en hausse tendancielle au cours des dernières années : + 1,5 % entre 2023 et 2024 et + 6,1 % en AE et + 5,8 % en CP entre 2022 et 2023. En conséquence, la diminution des crédits entre 2024 et 2025 n'empêche pas une trajectoire de hausse à l'échelle des quatre dernières années : + 4,5 % entre 2022 et 2025.
L'essentiel de la baisse des crédits est supporté par le soutien à l'expression radiophonique locale (- 10 millions d'euros).
Évolution des crédits du programme
180 « Presse et médias »
de
2022 à 2025
(en euros en CP)
|
LFI 2022 |
LFI 2023 |
PLF 2024 |
PLF 2025 |
Évolution
2024/2025 |
Évolution
|
Évolution |
Action 01 : Relations financières avec l'AFP |
134 976 239,00 |
134 976 239 |
141 692 217 |
142 974 143 |
1 281 926 |
0,9 % |
5,9 % |
Action 02 : Aides à la presse |
179 186 325,00 |
197 542 361 |
196 826 383 |
194 888 133 |
- 1 938 250 |
- 1 % |
8,8 % |
Action 05 : Soutien aux médias de proximité |
1 831 660,00 |
1 831 660 |
1 958 654 |
1 831 660 |
- 126 994 |
- 6,5 % |
0,00 % |
Action 06 : Soutien à l'expression radiophonique locale |
33 098 639,00 |
36 032 069 |
35 688 639 |
25 344 320 |
- 10 344 319 |
- 29 % |
- 23,4 % |
Action 07 : Compagnie internationale de radio et de télévision |
1 666 500,00 |
1 666 500 |
1 666 500 |
1 666 500 |
0 |
0,00 % |
0,0 % |
Programme 180 : Presse et médias |
350 759 363,00 |
372 049 399 |
377 832 393 |
366 704 756 |
- 11 127 637 |
- 2,9 % |
4,6 % |
Source : commission des finances du Sénat, d'après les données budgétaires
A. UNE RÉFORME DES AIDES À LA PRESSE QUI CONSTITUE UN DES PRINCIPAUX ENJEUX DES ÉTATS GÉNÉRAUX DE L'INFORMATION
L'action n° 2 du programme 180 recense trois types d'aides à la presse : les aides à la diffusion, les aides au pluralisme et les aides à la modernisation du secteur.
Répartition des crédits de paiement
par sous-action
au sein de l'action 02 « Aides à la
presse »
Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires
Le montant total des aides à la presse devrait atteindre 194,8 millions d'euros en AE et 193,8 millions en CP en 2025. Il est donc stable par rapport à l'année précédente (- 1 %).
Montant des aides à la presse prévues au sein du programme 180
(en CP, en euros et en %)
Action |
Montant 2024 |
Montant 2025 |
Variation 2024/2025 (en %) |
Sous-action 01 « Aides à la diffusion » |
114,7 |
112,3 |
- 2,12 % |
Aide au portage de la presse |
35,1 |
35,2 |
0,28 % |
Aide à l'exemplaire posté |
68,2 |
65,5 |
- 3,96 % |
Exonération de charges patronales pour les vendeurs-colporteurs et porteurs de presse |
11,4 |
11,6 |
1,45 % |
Sous-action 02 « Aides au pluralisme » |
25,9 |
25,9 |
- 0,10 % |
Aide aux publications nationales d'information politique et générale à faibles ressources publicitaires |
17,1 |
17,0 |
-0,32 % |
Aide aux quotidiens régionaux, départementaux et locaux d'information politique et générale à faibles ressources de petites annonces |
1,4 |
1,4 |
0,00 % |
Aide au pluralisme des titres ultramarins |
2,0 |
2,0 |
0,00 % |
Aide au pluralisme de la presse périodique régionale et locale |
1,5 |
1,5 |
2,04 % |
Aide aux services de presse en ligne |
4,0 |
4,0 |
0,00 % |
Sous-action 03 « Aides à la modernisation » |
55,1 |
55,6 |
0,86 % |
Aide à la modernisation de la distribution de la presse |
27,9 |
27,9 |
0,18 % |
Aide à la modernisation des diffuseurs de presse |
6,0 |
6,0 |
0,00 % |
Fonds stratégique pour le développement de la presse |
16,3 |
16,8 |
3,21 % |
Fonds de soutien à l'émergence et à l'innovation dans la presse |
5,0 |
5,0 |
0,00 % |
Total |
195,8 |
193,8 |
- 1,01 % |
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Il convient de noter qu'aux 200 millions d'euros de dépense budgétaire en faveur de la presse s'ajoute un montant presque équivalent de dépenses fiscales (environ 170 millions d'euros attendus en 2024 dont 160 millions d'euros pour le seul taux de TVA « super réduit »).
Évolution du montant des dispositifs fiscaux en faveur de la presse
(en millions d'euros)
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
2024 (prévision) |
|
Taux de TVA super réduit (2,1 %) |
155 |
140 |
145 |
155 |
160 |
160 |
Déduction spéciale prévue en faveur des entreprises de presse |
1 |
1 |
1 |
1 |
1 |
Moins de 0,5 |
Réduction d'impôt accordée au titre des souscriptions en numéraire au capital d'entreprises de presse |
Moins de 0,5 |
Moins de 0,5 |
Moins de 0,5 |
Moins de 0,5 |
Moins de 0,5 |
Moins de 0,5 |
Réduction d'impôt au titre des dons effectués en faveur des entreprises de presse |
Non chiffré |
Non chiffré |
Non chiffré |
Non chiffré |
Non chiffré |
Non chiffré |
Exonération des publications des collectivités publiques et des organismes à but non lucratif |
- |
1 |
1 |
1 |
Moins de 0,5 |
Non chiffré |
Réduction d'impôt pour souscription au capital des sociétés de presse |
- |
- |
Moins de 0,5 |
Moins de 0,5 |
Moins de 0,5 |
Moins de 0,5 |
Exonération en faveur des entreprises dont les établissements vendent au public des écrits périodiques en qualité de mandataires inscrits à la commission du réseau de la diffusion de la presse et revêtent la qualité de diffuseurs de presse spécialistes |
5 |
5 |
5 |
5 |
5 |
4 |
Exonération de cotisation sur la valeur ajoutée en faveur des entreprises dont les établissements vendent au public des écrits périodiques en qualité de mandataires inscrits à la commission du réseau de la diffusion de la presse et revêtent la qualité de diffuseurs de presse spécialistes |
4 |
5 |
3 |
3 |
5 |
4 |
TOTAL |
165 |
152 |
155 |
165 |
172,5 |
169,5 |
Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire
La crise structurelle du secteur de la presse écrite est cependant amenée à durer.
Les chiffres de la chute des ventes au numéro sont vertigineux : entre 2019 et 2023, le volume de vente au numéro de la presse quotidienne nationale (PQN) a diminué de 60 % et celui de la presse quotidienne régionale (PQR) de 36 % sur la même période. L'érosion constatée sur la seule année 2023 est de respectivement 14 % pour la PQN et 11 % pour la PQR.
Ventes au numéro en France
(en millions d'exemplaires et en %)
Source : commission des finances
Le rapport précédent de la commission des finances sur les aides à la presse5(*) plaidait pour la refonte de l'ensemble des aides (distribution, pluralisme, modernisation) versées actuellement à plusieurs acteurs de la filière en une aide unique au titre, évolutive en fonction de son degré de digitalisation, de sa participation à la connaissance et au savoir - la question de la pertinence du critère d'information politique et générale est notamment posée - et de son accès aux ressources publicitaires.
La corrélation entre la nature actuelle des aides et leurs modalités d'attribution, d'un côté, et les défis posés en termes industriels par la mutation de l'accès à l'information et les conséquences de celle-ci sur la vie de titres de presse, de l'autre, doivent servir de points cardinaux à une réforme d'ampleur du régime d'aides. Les États généraux de l'information, dont les conclusions ont été rendues mi-2024 ont à leur tour émis plusieurs propositions, sans aborder explicitement le sujet d'un renforcement de la conditionnalité des aides.
Les États généraux de l'information
Annoncés par le Président de la République dans le courant de la campagne électorale au printemps 2022, les États Généraux de l'information (EGI) ont été lancés en juillet 2023.
Les États généraux comportaient plusieurs groupes de travail thématiques :
- « L'Espace informationnel et l'innovation technologique », présidé par Sébastien Soriano, ancien président de l'ARCEP ;
- « Citoyenneté, information et démocratie », présidé par Pascal Ruffenach, président du directoire du groupe Bayard ;
- « L'avenir des médias d'information et du journalisme », présidé par Christopher Baldelli, président de Public Sénat ;
- « Souveraineté et lutte contre les ingérences étrangères », présidé par Arancha Gonzalez Laya, ancienne ministre des affaires étrangères de l'Espagne et doyenne de l'École des Affaires internationales de Sciences Po Paris ;
- « L'État et la régulation », présidé par Isabelle Falque-Pierrotin, ancienne présidente de la CNIL.
Le rapport des États généraux rendu en septembre 2024 contient 15 propositions, dont 6 qui doivent être négociées au niveau européen, et deux recommandations aux professionnels de l'information. La ministre a annoncé qu'une partie de ces conclusions allaient être reprises dans un ou plusieurs supports législatifs.
Source : commission des finances
Les aides à la distribution ont été réformées en 2022. On distingue désormais un double barème : l'un concernant les exemplaires postés et l'autre pour les exemplaires portés.
Le volet dédié aux exemplaires postés est destiné aux éditeurs des publications d'information politique et générale (IPG) et quotidiens à faibles ressources publicitaires ou à faibles ressources de petites annonces (QFRP/QFRA), d'une périodicité au maximum hebdomadaire. L'objectif de la réforme est d'encourager le portage, le montant de l'aide à l'exemplaire ayant diminué de 15 % à compter du 1er janvier 2024, sauf pour les exemplaires distribués dans les communes situées dans les zones dites peu denses dans lesquelles il n'existe pas à court terme d'alternative à la distribution postale.
Le montant de l'aide à l'exemplaire posté est évalué en 2025 à 65,5 millions d'euros, soit une diminution de 2,7 millions d'euros par rapport à la LFI 2024. Elle poursuit donc la trajectoire de baisse anticipée (4 % entre 2024 et 2025), s'ajoutant à la diminution de 4 millions d'euros déjà constatée entre 2023 et 2024.
L'aide au portage constitue le second volet, d'un montant de 35,2 millions d'euros. Le secteur est divisé entre deux principaux acteurs, les messageries lyonnaises de presse et France Messagerie.
L'aide aux exemplaires portés est assise sur les volumes portés pendant une année donnée et est liquidée et versée aux éditeurs au cours de l'année suivante. Elle comporte une part de plafonnement : le montant de l'aide ne peut être supérieur aux coûts supportés par l'éditeur bénéficiaire pour la distribution des titres constituant l'assiette de l'aide. Par ailleurs, dans le cas où les crédits disponibles au titre d'une année sont inférieurs aux montants calculés, les montants attribués à chaque bénéficiaire peuvent faire l'objet d'un abattement à partir de 15 millions d'exemplaires portés.
De Presstalis à France Messagerie
Le groupe Presstalis, entreprise de messagerie de presse privée, était jusqu'à sa liquidation en juillet 2020, l'un des principaux acteurs de la distribution de la presse en France et, de fait, le seul opérateur de distribution de la presse quotidienne nationale. Face à une impasse de trésorerie de près de 50 millions d'euros en avril 2020, Presstalis s'est déclarée en cessation des paiements et une procédure collective a été ouverte devant le tribunal de commerce de Paris. Le 1er juillet 2020, le tribunal a homologué la reprise du niveau 1 de la société par la coopérative des quotidiens et la création de France Messagerie.
140 millions d'euros en AE = CP étaient prévus par la troisième loi de finances rectificative pour 2020 pour la restructuration de Presstalis et son remplacement par France Messagerie. L'État a en outre abandonné les créances qu'il détenait sur Presstalis. Un plan de départs volontaires a également été mis en place pour réduire le nombre de salariés.
Source : commission des finances
En 2022, France Messagerie présentait un résultat positif de 4,9 millions d'euros. En 2023, son bilan était positif à hauteur de 6 millions d'euros. Le risque n'est cependant pas complètement écarté dans le contexte actuel. À l'heure de la digitalisation de la presse, la rapidité de la diffusion de l'information comme le coût écologique de la distribution rendent cette diffusion en large partie obsolète, et n'a donc que peu d'espoir d'augmenter au cours des prochaines années.
La question des aides à la distribution a fait l'objet d'un rapport de l'inspection générale des finances et de l'inspection générale des affaires culturelles remis en 2022. Cette mission proposait 4 scénarios. Le quatrième, qui serait privilégié à ce stade, pourrait mener à des modifications dans les schémas logistiques, industriels et organisationnels de la filière par une réforme structurelle de la chaîne logistique et la création d'un contrat de filière, reposant sur une conditionnalité de l'aide à la distribution.
Face à un modèle de la diffusion qui atteint la distribution de la presse écrite, le rapporteur spécial considère que les mutualisations entre les deux principaux acteurs, bien que ceux-ci répondent sur certains points à des logiques différentes, doit impérativement permettre une rationalisation des coûts et une diminution des pollutions induites par la presse imprimée.
La ministre a annoncé à la suite le lancement d'une concertation de filière pilotée par Sébastien Soriano, qui se poursuit actuellement. Le rapporteur spécial sera attentif aux avancées de cette mission sur la réorganisation de la filière, alors que le soutien de l'État à la distribution a déjà été très généreux.
B. UNE STABILITÉ DES FINANCEMENTS PRÉVUS POUR L'AFP CONFORME À LA TRAJECTOIRE DE SON CONTRAT D'OBJECTIFS ET DE MOYENS
L'action 01 rassemble les relations financières entre l'État et l'Agence France-Presse (AFP). Le versement fait à l'AFP à ce titre distingue, d'une part, le paiement des abonnements commerciaux de l'État (régis par une convention d'abonnements signée en septembre 2015, pour un montant de 23 millions d'euros) et, d'autre part, la compensation des missions d'intérêt général (MIG) de l'AFP6(*).
Après de grandes difficultés au cours de la décennie précédente, la situation financière de l'AFP est aujourd'hui nettement renforcée. L'agence avait bénéficié en 2019 et 2020 d'une dotation majorée pour soutenir la mise en place d'un plan stratégique de réorientation de l'activité et de réduction des charges, qui lui a permis de faire face à la crise sanitaire. L'agence se félicite ainsi d'avoir dégagé au cours des cinq derniers exercices un résultat net positif.
L'AFP poursuit en outre sa trajectoire de désendettement. Sa dette s'élevait à plus de 49 millions d'euros en 2017. Elle a restructuré sa dette, lui substituant un emprunt hypothécaire sur 6 ans auprès d'une banque commerciale, à taux fixe moins élevé que celui de l'emprunt initial. En conséquence, l'AFP devrait être totalement désendettée en 2028 avec une économie de plus de 10 millions d'euros sur ses charges d'intérêts.
Cette trajectoire de désendettement s'est également faite grâce à une stratégie de baisse des charges. Les réponses au questionnaire budgétaire indiquent que la cible du COM 2019-2023, qui prévoyait une économie de 16,5 millions d'euros en année pleine en 2024, a été légèrement dépassée. La croissance annuelle moyenne des dépenses de personnel est restée contenue à l'objectif du COM (+ 1,1 % par an).
Les recettes commerciales de l'AFP s'élèvent à 207 millions d'euros. La croissance des recettes commerciales sur la période 2019-2023, correspondant au COM précédent, a été supérieure à la prévision : elles ont connu un taux de croissance annuel moyen de 2,1 % contre 1,5 % prévus.
Les crédits à destination de l'AFP devraient très légèrement progresser en 2025 de 0,9 % par rapport à la LFI 2024, pour atteindre 143 millions d'euros. Cette hausse est essentiellement concentrée sur la compensation des MIG (125 millions d'euros, 1,2 million de plus qu'en 2024), le paiement des abonnements n'augmentant que de 0,3 million d'euros.
Montants versés à l'AFP par le programme 180
(en millions d'euros)
Source : commission des finances d'après les documents budgétaires
Un nouveau COM 2024-2028 a été signé par l'État et l'agence au printemps 2024. Ce contrat prévoit une trajectoire de hausse, à hauteur de 7,3 millions d'euros sur la période. Le montant des crédits prévus en PLF 2025 est conforme à la trajectoire du COM.
Montants versés par l'État prévus dans le COM 2024-2028
(en millions d'euros)
Source : commission des finances d'après les documents budgétaires
Cette trajectoire n'est pas excessivement ambitieuse, dans la mesure où l'Agence doit poursuivre un double objectif de renforcement de ses recettes propres et de mise en place de nouvelles stratégies de réduction de ses dépenses.
Concernant le premier point, d'après le ministère de la Culture, les indicateurs définis dans le nouveau COM de l'AFP doivent permettre de maintenir une croissance de ses ressources propres de 0,6 % par an entre 2023 et 2028.
S'agissant du deuxième aspect, on ne saurait donc trop encourager la poursuite des efforts de réduction de ses charges, afin de maintenir la capacité d'adaptation de l'AFP aux nouveaux enjeux liés à la diffusion de l'information. L'AFP devrait aussi générer 9 millions d'euros d'économies sur la période, ce dont le rapporteur spécial se félicite.
C. UNE REGRETTABLE DIMINUTION DES MOYENS ACCORDÉS AU FONDS DE SOUTIEN À L'EXPRESSION RADIOPHONIQUE (FSER)
L'action 06 - Soutien à l'expression radiophonique locale du programme 180 regroupe les crédits dédiés au Fonds de soutien à l'expression radiophonique (FSER). Ce fonds couvre 750 radios associatives non commerciales.
Le FSER est chargé de soutenir le secteur radiophonique local associatif, considéré comme le garant de l'expression du pluralisme et de la communication de proximité. Il distribue à cet effet des aides aux radios locales associatives accomplissant une mission de « communication sociale de proximité » lorsque leurs ressources publicitaires sont inférieures à 20 % de leur chiffre d'affaires total7(*). Ces aides représentent 40 % des ressources des radios couvertes par le Fonds.
Quatre subventions sont versées :
- la subvention d'installation ;
- la subvention d'équipement, appelée à financer 50 % des dépenses d'investissement ;
- la subvention d'exploitation ;
- la subvention sélective à l'action radiophonique, destinée à soutenir les services de radio ayant réalisé des actions particulières dans un certain nombre de domaines, à l'instar de l'emploi, de l'intégration, de la lutte contre les discriminations, de la culture et de l'éducation.
Les radios diffusant à la fois en FM et en numérique terrestre (DAB +) bénéficient d'un accompagnement supplémentaire8(*). Les coûts liés au déploiement de la radio numérique terrestre, appelée à compléter voire remplacer la modulation de fréquence (FM), sont en effet importants. Cette dotation, même majorée, ne permet pas totalement d'appuyer les radios FM en vue de soutenir leur développement numérique. En effet, les radios FM ne sont éligibles qu'une fois au dispositif. Celles qui perçoivent une aide du FSER au titre de leur mode de diffusion actuel ne peuvent donc bénéficier d'un apport complémentaire en vue de leur diffusion en DAB +.
Les crédits ont été augmentés chaque année depuis 2021 (+ 1,25 million d'euros en 2021, 1,1 million d'euros en 2022, puis 1,7 million d'euros en 2023). D'après le ministère, cette hausse des crédits a permis de stabiliser le montant moyen des aides versées, voire de l'augmenter s'agissant des radios les plus engagées.
En revanche, les crédits du fonds devraient diminuer de 30 % entre 2024 et 2025, soit - 10,3 millions d'euros. Le ministère avait pourtant annoncé en amont la création, dans le cadre du Plan culture et ruralité, d'une dotation spécifique à hauteur de 2 millions d'euros en faveur des radios associatives rurales et d'Outre-mer.
Évolution du FSER
(en millions d'euros et en nombre d'aides)
Source : commission des finances d'après les documents budgétaires
La justification de cette baisse dans les documents budgétaires est pour le moins succincte : « la dotation du FSER inscrite dans le projet de loi de finances est revue à la baisse conformément aux arbitrages interministériels », dont il est même douteux qu'ils aient eu lieu. Le rapporteur spécial s'interroge sur la pertinence de cette réduction des crédits, alors que les radios associatives sont des acteurs essentiels pour la vitalité des territoires. La commission a donc adopté un amendement II-15 visant à rétablir les crédits au niveau de 2024.
III. LE PROGRAMME « LIVRE ET INDUSTRIES CULTURELLES »
Le programme « Livre et industries culturelles » est composé de deux actions. L'action 01 « Livre et lecture » représente la quasi-totalité des crédits de paiement du programme.
Les moyens accordés au programme devraient être stables en 2025 par rapport à l'année précédente (- 0,8 % en AE et -0,4 % en CP). Cette stabilité est consécutive à la forte hausse accordée en 2024 (+ 33 millions d'euros en AE et + 34 millions d'euros en CP), notamment du fait d'une prise en charge partielle des surcoûts liés à l'inflation constatée en 2023 et 2024 pour les opérateurs de la mission et à la compensation des hausses du point d'indice.
Évolution des crédits du
programme 334 « Livre et industries
culturelles »
de 2024 à 2025 à
périmètre courant
(en euros)
|
LFI 2023 |
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Variation 2024/2023 ( %) |
||||
|
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
01 - Livre et lecture |
296 686 040 |
304 187 054 |
331 895 864 |
327 008 531 |
330 395 864 |
327 055 864 |
-0,45 % |
0,01 % |
02 - Industries culturelles |
29 663 988 |
29 663 988 |
32 274 112 |
32 274 112 |
30 938 874 |
30 938 874 |
-4,14 % |
-4,14 % |
334 - Livre et industries culturelles |
330 337 709 |
324 433 411 |
364 169 976 |
359 282 643 |
361 334 738 |
357 994 738 |
-0,78 % |
-0,36 % |
Source : commission des finances du Sénat, d'après les données budgétaires
A. UN MAINTIEN DES CRÉDITS DÉDIÉS À LA POLITIQUE DU LIVRE CONSÉCUTIF À LA HAUSSE CONSTATÉE LES ANNÉES PRÉCÉDENTES
L'action 01 « Livre et lecture » du programme 334 devrait être dotée en 2024 de 330,4 millions d'euros en AE et 327,1millions d'euros en CP. Ces crédits sont stables (- 0,5 % et + 0,01 %) par rapport à 2024. Ils avaient augmenté entre 2023 et 2024 de respectivement + 10,4 % et + 7,5 %.
88 % des crédits du programme 334 sont à destination de quatre opérateurs : Bibliothèque nationale de France (BnF), Bibliothèque publique d'information (Bpi), Centre national du livre (CNL) et Centre national de la musique (CNM), dont 60 % des crédits du programme consacrés à la seule BnF.
Les crédits d'intervention déconcentrés inscrits sur le programme 334 s'élèvent à 10,1 millions d'euros. Ils ont vocation à être mobilisés pour l'essentiel dans le domaine de la lecture publique, pour le soutien au développement et à la diffusion de l'offre et des pratiques de lecture par les bibliothèques et les structures régionales pour le livre.
L'action 1 du programme 334 est par ailleurs loin de résumer pour autant l'action du ministère de la culture en faveur du livre, éclatée entre plusieurs programmes et également exercée par les collectivités territoriales.
Le financement de la lecture publique par les collectivités territoriales
Les collectivités territoriales sont au premier rang du développement de la lecture publique par l'entretien des bibliothèques communales ou départementales. Le principal levier d'accompagnement de l'État est le concours particulier relatif aux bibliothèques au sein de la dotation générale de décentralisation (DGD), tel que défini par le code général des collectivités territoriales (articles L. 1614-10 et 11). La DGD figure sur les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et non sur le programme 334.
En application du Plan Bibliothèques, les crédits de ce concours particulier s'élèvent à 94,9 millions d'euros en 2024. Toutefois, l'importance de l'inflation des dernières années a réduit les effets positifs de cette augmentation.
Les collectivités contribuent fortement au soutien à la lecture publique. En 2022, dernière année pour laquelle les données ont été transmises au rapporteur spécial, les collectivités avaient dépensé près d'1,4 milliard d'euros pour les bibliothèques.
Dépenses des collectivités territoriales à destination des bibliothèques publiques en 2022
(en millions d'euros)
Source : commission des finances d'après les données du questionnaire budgétaire
1. Près de 90 % des crédits de l'action sont dédiés aux grandes bibliothèques publiques
La majorité des crédits de l'action consistent en des dotations versées à trois opérateurs : la Bibliothèque nationale de France (BnF), la Bibliothèque publique d'information (Bpi) implantée au Centre national d'art et de culture Georges Pompidou et le Centre national du livre.
Après une hausse de 15,3 millions d'euros, soit 5,5 %, l'année précédente, les crédits accordés à ces opérateurs devaient se stabiliser. Une partie de cette progression accordée en 2024 découlait de la compensation de la hausse du point d'indice de 1,5 % décidée à l'été 2023.
Au cours des dernières années, les crédits accordés aux opérateurs ont largement augmenté (+ 21 millions d'euros entre 2022 et 2023). La quasi-totalité de cette hausse a cependant été absorbée par la BnF.
Évolution des crédits de paiement
dédiés aux opérateurs
de l'action 01 du programme
334
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Le report des financements du projet de la maison du dessin de presse
En 2024, 13,91 millions d'euros en AE et 2,6 millions d'euros en CP étaient prévus sur les crédits du programme 334 pour les travaux de la Maison du dessin de presse dont l'ouverture était prévue à Paris en 2026. 2 millions d'euros avaient déjà été versés en 2023 pour mener les études préalables et lancer les travaux.
Le budget prévisionnel des travaux est estimé à 15,6 millions d'euros, qui devaient être versés entre 2023 et 2026. Le calendrier de financement initial a cependant été décalé. Les crédits votés en 2024 au titre de l'investissement devraient donc être reportés en 2025 et le PLF ne comporte pas de nouveau crédit (contrairement aux 6,8 millions d'euros de crédits prévus dans le plan de financement initial).
L'État a délégué en 2022 la maîtrise d'ouvrage des études et des travaux à son établissement public de maîtrise d'ouvrage publique, l'OPPIC. Ce dernier a réalisé, au second semestre 2022 et au premier semestre 2023, les études préalables et le programme architectural et fonctionnel de la Maison. Sur cette base, a été lancé en avril 2023 un avis d'appel public à la concurrence en vue du choix du maître d'oeuvre. Le premier semestre 2024 a permis au maître d'oeuvre de rédiger un avant-projet architectural, dont l'élaboration a donné lieu à d'intenses échanges avec l'équipe de préfiguration sur la scénographie des expositions et qui a confirmé l'estimation budgétaire des travaux. Cet avant-projet a été approuvé par le ministère de la Culture en juin 2024.
Parallèlement, le premier semestre 2024 a permis de préparer avec la Ville de Paris, propriétaire du bâtiment qui accueillera la future maison du dessin de presse, un projet de bail emphytéotique administratif. Les étapes suivantes sont l'instruction du permis de construire et la finalisation des études de maîtrise d'oeuvre.
Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire
2. La Bibliothèque nationale de France, premier opérateur du ministère
Pour 2025, l'enveloppe consacrée à la subvention pour charges de service public (SCSP) de la BnF s'établit à 216,2 millions d'euros en AE et en CP, soit une progression de 5 millions d'euros par rapport à 2024, « notamment afin de compenser les charges incompressibles de l'établissement » d'après les réponses au questionnaire budgétaire.
La subvention pour charges d'investissement (SCI) est reconduite à 31,34 millions d'euros en AE et augmente de 4 millions d'euros en CP (qui correspondent à l'engagement des crédits du site de stockage à Amiens).
Entre 2021 et 2025, les crédits accordés à la BnF sont en hausse de 35 millions d'euros, soit 16 %.
Il s'agit de la plus importante subvention versée à un opérateur du ministère de la culture.
Évolution des subventions pour charges de service public et pour charges d'investissement de la Bibliothèque nationale de France depuis 2021
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire
Une hausse de la fréquentation des différents sites
La BnF se félicite d'une fréquentation en forte hausse : en 2023, près de 1,5 million de visites ont ainsi été comptabilisées sur l'ensemble des sites et pour l'ensemble des activités : salles de lecture, musée, expositions, manifestations. Ce « record historique » qui dépasse la cible fixée pour 2023 dans le COP, est largement dû à la fréquentation des espaces tous publics de la BnF (en particulier de la salle ovale de Richelieu, seule salle gratuite).
Depuis son ouverture en septembre 2022, plus de 300 000 visiteurs ont fréquenté le musée et les expositions du site Richelieu.
Une part très importante de cette fréquentation néanmoins concerne les salles de lecture, soit 1,1 million d'entrées en 2023, dont 475 000 pour la bibliothèque tous publics, 254 000 pour les salles de la bibliothèque de recherche et 380 000 pour la salle Ovale. 77 % de la fréquentation provient du grand public, les chercheurs ne représentent plus que 23 % de la fréquentation.
La BnF entend cependant poursuivre la reconquête de ces publics académiques. La fréquentation des salles de recherche progresse de 11 % par rapport à 2022 mais reste inférieure à la fréquentation pré-crise sanitaire (346 160 en 2019).
Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire
L'essentiel des dépenses de la BnF concerne sa masse salariale (164,7 millions d'euros en 2024). Sa croissance est essentiellement liée aux mesures générales concernant l'ensemble de la fonction publique, qui n'ont d'ailleurs été que partiellement compensées : 4,75 millions d'euros ont été prévus en 2024 au titre du point d'indice 2022, mais aucune hausse n'avait cependant été inscrite pour la compensation du relèvement du point d'indice en 2023.
Hors augmentation du point d'indice et hors mesures indemnitaires ministérielles ou interministérielles, la BnF indique que la progression de ses dépenses de personnel a été de - 0,7 % entre 2021 et 2023.
Au 31 décembre 2023, les effectifs sous plafond de la BnF représenteraient, en projection, 2 145,73 ETPT, dont 39 % de catégorie A, 30,3 % de B et 30,7 % de C. Toutes catégories confondues, les emplois titulaires représenteraient 1 358,24 ETPT (63,3 %) et les emplois contractuels 787,49 ETPT (36,7 %).
Les dépenses de fonctionnement ont été tirées à la hausse par l'inflation des coûts de l'énergie et par la réouverture en 2022 du site Richelieu. Le site François-Mitterrand est un bâtiment très consommateur d'énergie : le ministère de la Culture indique que sa consommation électrique annuelle est l'équivalent de celle d'une ville de 20 000 habitants. Afin d'en tenir compte, sur les deux années 2022 et 2023, la BnF a perçu 13,2 millions d'euros de compensation des surcoûts de l'énergie.
Évolution des dépenses de la Bibliothèque nationale de France
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire
Les investissements constituent un poste important, notamment du fait des grands travaux engagés par la BnF au cours des dernières années ou devant être prochainement engagés.
Le chantier de rénovation du quadrilatère Richelieu, terminé en 2022, s'est élevé à 247,6 millions d'euros, dont 205 millions d'euros versés par le ministère de la culture.
La construction du centre de stockage et de conservation d'Amiens devrait permettre de pallier la saturation des espaces de stockage des documents. 30 millions d'euros d'AE ont été ouvertes en LFI 2021, et sont décaissés au rythme de 4 millions d'euros en 2024 et 2025. Le budget prévisionnel du projet est fixé à près de 97 millions d'euros et devrait se terminer en 2029.
Hors grands projets, le niveau des investissements courants est demeuré stable sur la période. Le vieillissement des sites a cependant nécessité la mise en place de travaux de réhabilitation du site Richelieu et de remise à niveau des équipements du site Tolbiac, qui ont largement contribué à la progression de la subvention versée.
Plusieurs chantiers ont ainsi déjà débuté, certains devant prendre fin en 2027, pour un montant total de 63,3 millions d'euros. Il en va ainsi :
- du remplacement du système de sécurité incendie, estimé à 31 millions d'euros, les travaux devant s'étaler de 2020 à 2026 ;
- de la rénovation des équipements de la gestion technique centralisée et du système de gestion technique électrique, pour un montant de 5,4 millions d'euros étalé entre 2019 et 2025 ;
- du remplacement des 62 ascenseurs du socle, soit 1 million d'euros par an entre 2020 et 2026 ;
- du renouvellement décennal du transport automatique des collections et des documents, soit 5,9 millions d'euros étalés entre 2026 et 2027 ;
- l'amélioration de la performance énergétique des centrales de traitement d'air. Le coût de 1,3 million d'euros sera étalé entre 2022 et 2027 ;
- le remplacement des groupes froids de la production centralisée, soit 4 millions d'euros entre 2022 et 2025 ;
- la rénovation des installations électriques de puissance pour un coût de 9,7 millions d'euros à financer à partir de 2023.
Le niveau de fonds de roulement de la BnF s'élève à 50 millions d'euros. Le montant du fonds de roulement mobilisable, une fois retenus les montants fléchés, notamment vers le site d'Amiens, est estimé par la BnF de l'ordre de 18,87 millions d'euros à fin 2024. Cela correspond au niveau du seuil prudentiel des 30 jours de fonctionnement (18,6 millions d'euros).
B. LA NORMALISATION EN COURS DE LA GESTION DU FINANCEMENT DU CENTRE NATIONAL DE LA MUSIQUE
Créé en 2019 et mis en place le 1er janvier 2020, le Centre national de la musique (CNM) est un établissement public à caractère industriel et commercial dont l'ambition est de devenir, à terme, l'équivalent, dans le domaine de la musique, du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC)9(*).
Le CNM dispose actuellement de deux sources de financement principales :
- le produit de la taxe sur les spectacles de musiques actuelles et de variétés ;
- l'ancienne dotation budgétaire accordée au Centre national de la chanson, des variétés et du jazz (CNV), à laquelle s'ajoutent les crédits budgétaires initialement dédiés à l'IRMA, au fonds pour la création musicale (FCM), au club action des labels et disquaires indépendants (CALIF) ou au Bureau export de la musique. Celle-ci s'élèvera à 25,65 millions d'euros en 2025, en baisse d'1,3 million d'euros par rapport à 2024.
Les organismes de gestion collective (OGC)10(*) peuvent également affecter au CNM leurs contributions destinées à l'action culturelle et sociale. Avant la crise sanitaire, les OGC contribuaient à hauteur de 6 millions d'euros environ. Seuls 2,85 millions d'euros ont été versés en 2023 et 3 millions d'euros ont été prévus en 2024, sans que leur recouvrement ne soit certain. Le CNM a indiqué travailler avec ces OGC à la mise en place d'une convention pluriannuelle sur une base triennale 2025 - 2027, sans être certains de l'aboutissement de ces négociations.
Une hausse continue de la dépense fiscale gérée par le CNM
Le Président du CMN peut délivrer, au nom du ministre de la culture, les agréments fiscaux de trois crédits d'impôts :
- le crédit d'impôt pour la production d'oeuvres phonographiques (CIPP) pour un montant de 31 millions d'euros en 2025 ;
- le crédit d'impôt pour les dépenses de production de spectacle vivant (CISV) pour un montant de 42 millions d'euros ;
- le crédit d'impôt en faveur de l'édition musicale, introduit en loi de finances pour 2022, dont le coût s'élève à 2 millions d'euros.
Le montant total de la dépense fiscale ainsi supervisée est estimé à 75 millions d'euros, contre 50 millions d'euros en 2024. Elle est extrêmement dynamique, dans un contexte de reprise du secteur à la suite de la crise sanitaire.
Source : commission des finances du Sénat, d'après les données budgétaires
Le premier contrat d'objectifs et de performance (COP) a été signé en juin 2024 et porte sur le quadriennal 2024-2028. Il prévoit une trajectoire de recettes ambitieuse pour le CNM, tenant compte du dynamisme actuel du secteur musical et du spectacle vivant.
Trajectoire de recettes du CNM dans le COP 2024-2028 (hors SCSP)
(en millions d'euros)
Cible 2025 |
Cible 2026 |
Cible 2027 |
Cible 2028 |
|
Taxes |
71,5 |
76,1 |
81,2 |
86,9 |
dont taxe spectacles vivants |
53,2 |
54,9 |
56,6 |
58,5 |
dont taxe streaming |
18,3 |
21,2 |
24,6 |
28,4 |
Commerciales |
0,67 |
0,71 |
0,74 |
0,78 |
Autres concours financiers (OGC, collectivités territoriales / DRAC, autres ministères, ressources diverses dont remboursement d'aides) |
8,9 |
9,9 |
10,9 |
10,9 |
dont OGC |
4 |
5 |
6 |
6 |
Total ressources |
81,07 |
86,71 |
92,84 |
98,58 |
Source : commission des finances d'après le COP du CNM
Le schéma de financement du centre prévoit une stabilisation du schéma d'intervention, notamment grâce à des reports de financements. Cela devrait lui permettre de couvrir ses dépenses d'intervention (soit 142 millions d'euros en 2024, dont 67 millions d'euros d'aides directes et 25,5 millions d'euros de droits de tirage). Le ministère annonce par ailleurs que le CNM va opérer d'ici la fin 2024 une refonte globale de son schéma d'intervention.
Concernant la taxe sur les spectacles de musiques actuelles et de variétés, principale ressource fiscale du CMN, elle voit son rendement augmenter extrêmement rapidement grâce à la reprise très forte de la fréquentation des salles de spectacle après la crise sanitaire. En 2023, les recettes de billetterie ont pour la première fois dépassé le seuil du milliard d'euros.
Le rapporteur spécial notait l'année dernière que le chiffrage figurant dans les documents budgétaires, soit 30 millions d'euros en 2023 « pouvait être qualifié de prudent ». De fait, le rendement de la taxe a atteint 49,3 millions d'euros en 2023, et devrait atteindre le plafond fixé en LFI pour 2024 (soit 50 millions d'euros).
Rendement de la taxe sur les spectacles de variétés
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les données budgétaires
Concernant la taxe sur le streaming musical adoptée en 2024 à l'initiative du Sénat, elle devait atteindre un montant prévisionnel de 15 millions d'euros. Son rendement pour 2024 devrait finalement être largement inférieur aux prévisions, autour de 9 millions d'euros, « traduisant a priori le non-respect à date par certains redevables de leurs obligations déclaratives » d'après le ministère. Il est plus que regrettable que certains redevables tentent de se soustraire au paiement de la taxe, eu égard au montant modique qu'elle représente pour de tels acteurs.
C. UNE CONTRIBUTION DU CNC AU REDRESSEMENT DES FINANCES PUBLIQUES À HAUTEUR DE 450 MILLIONS D'EUROS JUSTIFIÉE PAR LA SITUATION BUDGÉTAIRE DE L'ÉTABLISSEMENT
Le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) est un établissement public administratif placé sous la tutelle du ministère chargé de la culture mais qui exerce les missions d'une administration centrale sur son domaine de compétence. Il lui a été confié une triple mission :
- économique, au travers du soutien à l'industrie du cinéma ;
- culturelle, via la valorisation de la création française ;
- stratégique et réglementaire, par l'intermédiaire d'une participation directe à la définition de la politique de l'État pour ce secteur et à l'élaboration des textes de nature législative ou réglementaire visant ce secteur.
1. Des recettes en constante augmentation
Le CNC ne bénéficie d'aucun crédit budgétaire. Son budget annuel - 846,4 millions d'euros en 2024 et 821,5 millions d'euros prévus en 2025 - est abondé par quatre taxes affectées :
- la taxe sur les services de télévision due par les éditeurs (TST-E) ;
- la taxe sur les services de télévision due par les distributeurs de services de télévisions (TST-D) ;
- la taxe sur la diffusion en vidéo physique et en ligne de contenus audiovisuels (TSV) ;
- la taxe sur les entrées en salle de cinéma (TSA).
Le CNC dispose également de ressources propres d'un montant limité, à hauteur de 22,4 millions d'euros en 2024.
Prévision des recettes du CNC issues de taxes affectées pour 2025
Source : commission des finances
Les ressources du CNC sont en constante augmentation : en 10 ans (2014-2024), le CNC devrait voir ses recettes augmenter de 12 %, soit 80 millions d'euros supplémentaires.
Évolution des ressources du CNC depuis 2014
(en millions d'euros)
Source : commission des finances d'après le CNC
Le produit des taxes perçues par le CNC en 2024 est estimé à 785 millions d'euros, soit une hausse de 4,7 % par rapport à 2023.
Évolution du montant des taxes affectées au CNC
(en millions d'euros et en %)
|
Exécuté 2019 |
Exécuté 2020 |
Exécuté 2021 |
Exécuté 2022 |
Exécuté 2023 |
Budget 2024 |
Prévisions actualisées 2024 |
Évolution 2023-2024 (en %) |
Prévision 2025 |
Évolution 2024-2025 (en valeur) |
Évolution 2024-2025 (en%) |
Taxe sur les entrées en salles de cinéma (TSA) |
154,4 |
28,5 |
56,9 |
117,9 |
146,6 |
152,94 |
143,0 |
-2 % |
149,9 |
6,9 |
4,8 % |
Taxe sur les services de télévision - Éditeurs (TST-E) |
298,7 |
236,7 |
238,9 |
292,2 |
245,3 |
258,68 |
256,6 |
5 % |
261,4 |
4,8 |
1,9 % |
Taxe sur les services de télévision - Distributeurs (TST-D) |
193,7 |
224,4 |
218,5 |
176,9 |
201,7 |
205,43 |
231,5 |
15 % |
213,6 |
-17,9 |
-7,7 % |
Taxe sur les services vidéo (TSV) |
34,2 |
87,3 |
111,6 |
127,0 |
178,3 |
139,51 |
150,0 |
-16 % |
155,9 |
5,9 |
3,9 % |
Recettes diverses (sanctions ARCOM) |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,3 |
0,1 |
0,1 |
4,0 |
- |
0,1 |
-4,0 |
- |
Produit total des taxes |
681,1 |
576,9 |
625,9 |
714,3 |
772,0 |
756,6 |
785,1 |
1,7 % |
780,9 |
-4,3 |
-0,5 % |
Source : commission des finances d'après le CNC
La fréquentation des salles de cinéma se stabilise en 2024 par rapport à 2023. Le rendement de la TSA a donc été inférieur en 2024 à celui anticipé (143 millions d'euros contre 195 millions d'euros prévus initialement), du fait de la grève des scénaristes à Hollywood qui a entraîné une baisse de la fréquentation au premier trimestre 2024.
La fréquentation des cinémas en 2023
S'agissant de la fréquentation des cinémas, l'exercice 2022 était demeuré en demi-teinte, avec 152 millions d'entrée (contre 213 millions en 2019, qui constituait un sommet historique).
Les prévisions pour 2023 étaient en revanche très optimistes, le CNC tablant sur environ 210 millions de tickets vendus.
La fréquentation réelle s'établit à 180,4 millions d'entrées en 2023, ce qui constitue une progression très importante par rapport à 2022 (+ 18,6 %), se rapprochant progressivement de son niveau d'avant crise (-13,3 % par rapport à la moyenne 2017-2019).
Les cinémas de 12 écrans ou plus (-21,5 %) sont les plus impactés. À l'inverse, les cinémas de 6 à 11 écrans (-5,8 %) et ceux de 2 et 3 écrans (-6,4 %) se rapprochent de leur niveau d'avant crise. En revanche, le nombre de salles de cinéma et d'écrans reste globalement élevé (2 050 cinémas pouvant accueillir 1,2 million de spectateurs.
Source : commission des finances d'après les données du CNC
La taxe sur les services de télévision - Éditeurs (TST-E) diminue légèrement. En revanche, les recettes fiscales du CNC sont tirées en 2024 par une forte hausse de la taxe sur les services de télévision - Distributeurs (TST-D), mais qui ne devrait être que conjoncturelle, et par une augmentation du produit de la taxe sur les services vidéo (TSV), notamment liée au dynamisme du streaming vidéo.
S'agissant des dépenses de l'établissement, l'intervention financière du CNC, au travers de son fonds de soutien, revêt principalement deux aspects :
- les aides automatiques, indexées sur la performance d'un producteur, d'un distributeur ou d'un exploitant ;
- les aides sélectives, appelées à soutenir la création et attribuées après avis de commissions composées de professionnels divers.
Les soutiens automatiques devraient représenter 458 millions d'euros, soit 58 % des dépenses du fonds de soutien. Le soutien automatique au secteur audiovisuel devrait également continuer à progresser.
2. Le maintien d'un fort dynamisme de la dépense fiscale
L'action du CNC est appuyée, au niveau fiscal, par cinq crédits d'impôts au rendement dynamique.
Le CNC assure la gestion des quatre dispositifs :
- le crédit d'impôt « cinéma » (CIC)11(*), mis en place depuis le 1er janvier 2004, prévoit une déduction fiscale représentant de 20 à 30 % du montant total des dépenses éligibles, dans la limite de 30 millions d'euros par film ;
- le crédit d'impôt « audiovisuel » (CIA)12(*), entré en vigueur le 1er janvier 2005, prévoit un crédit d'impôt équivalent à 25 % du montant total des dépenses éligibles pour les oeuvres de fiction et d'animation et à 20 % pour les oeuvres documentaires ;
- le crédit d'impôt « international » (C2I)13(*) est dédié aux oeuvres étrangères tournées en France depuis 2009. Il prévoit une déduction fiscale de l'ordre de 30 % des dépenses éligibles. Initialement appelé à s'éteindre fin 2016, le dispositif a été prorogé jusqu'au 31 décembre 2026 ;
- le crédit d'impôt « jeux vidéo »14(*), créé en 2009, vise les dépenses afférentes à la création de ce type de programme. Le crédit d'impôt est égal à 30 % des dépenses éligibles, dans la limite de 6 millions d'euros par exercice et par entreprise.
S'y ajoute la réduction d'impôt au titre des souscriptions au capital des sociétés de financements d'oeuvres cinématographiques ou audiovisuelles (SOFICA).
Dépense fiscale en faveur du cinéma
(en millions d'euros)
Source : commission des finances
Le montant des dépenses éligibles a très fortement augmenté au cours des dernières années, pour atteindre 3,157 milliards d'euros, soit un milliard de plus qu'en 2019 qui était déjà une année où l'activité était soutenue.
Le montant total de la dépense fiscale est évalué à 544 millions d'euros en 2025. Pour 2024, les prévisions actualisées du CNC tablent sur un montant de 687 millions d'euros.
La commission des finances a consacré une analyse détaillée à la situation du CNC et plus largement aux financements publics accordés à la filière du cinéma15(*).
Ce rapport indique qu'en agrégeant les soutiens automatiques et sélectifs versés par le CNC, les subventions attribuées par les collectivités territoriales, les investissements de France Télévisions, la dépense fiscale liée au crédit d'impôt cinéma ou à la réduction d'impôt afférente aux investissements dans les SOFICA, il apparaît que la production cinématographique d'initiative française a été financée à hauteur de 31 % par des fonds publics en 2021. Ainsi, en 2021, le montant de la dépense publique (budgétaire et fiscale) en faveur du cinéma a atteint 747 millions d'euros, hors mesures d'urgence et Plan de relance.
Il semble donc aujourd'hui nécessaire d'insister sur une révision des politiques menées en vue de contribuer à une réduction de la production au profit d'une meilleure qualité de celle-ci, même s'il n'existe pas de « bon chiffre » en la matière ou de martingale s'agissant de la réussite d'un film. Il conviendrait sans doute de renforcer l'aide à la formation, qu'il s'agisse de l'écriture ou des techniques, mais aussi l'appui à la distribution, en réduisant a minima à due concurrence les aides sélectives à la production.
Le rapport consacrait une large part de son analyse à la dépense fiscale en faveur du cinéma : « s'il ne remet pas en cause la pertinence des dispositifs mis en place en vue de soutenir l'activité en France, le rapporteur spécial [Roger Karoutchi] invite le CNC à vérifier les risques d'effets d'aubaine qu'induisent nécessairement des mécanismes de plus en plus avantageux ces dernières années, qui bénéficient de surcroît à un nombre croissant d'acteurs depuis leur lancement. Il relève en outre que l'argument d'une forte concurrence fiscale internationale peut être relativisé par d'autres atouts pour attirer des tournages, de la variété des paysages ou de la richesse des sites à la mise en place des fabriques de l'image censées créer un véritable écosystème favorable à la production et pour lesquelles la puissance publique est amenée à dégager des moyens considérables ».
La dynamique des crédits d'impôts interroge néanmoins, dès lors qu'ils tendent à financer des grosses productions qui ne semblent pas, de prime abord, peiner à réunir des financements.
3. Un prélèvement de 450 millions d'euros de la trésorerie du CNC vers l'État qui contribuera à assainir la situation comptable du centre
L'article 33 du projet de loi de finances procède à une ponction de 450 millions d'euros sur la trésorerie du CNC, ces recettes abondant le budget général de l'État.
Si le montant de ce prélèvement est élevé, la situation n'est pas inédite. Le CNC a déjà fait l'objet par le passé de ponctions entre 2011 et 2017 pour un total de 340 millions d'euros.
Bien que d'un volume important, le prélèvement opéré par l'article 33 est indolore pour le CNC, qui a lui-même suggéré cette piste à l'État, celle-ci lui semblant préférable à un écrêtement de ses ressources.
La trésorerie du centre a en effet augmenté de façon continue au cours des dernières années, en particulier grâce aux réserves supplémentaires exceptionnelles liées à la crise sanitaire, pour atteindre le montant considérable de 847 millions d'euros. Le solde net de gestion du CNC en 2024 devrait là encore être pour atteindre 26,5 millions d'euros.
Évolution du fonds de roulement du CNC depuis 2014
(en millions d'euros)
Source : commission des finances d'après le CNC
La Cour des comptes a consacré une longue analyse à la politique de gestion du risque du CNC dans son rapport sur le centre paru en mai 202316(*). La Cour considère qu'une part des réserves du CNC sont « infondées » et souligne le caractère « confortable » de son fonds de roulement, qui permet au CNC de « disposer d'une trésorerie disproportionnée au regard des autres opérateurs de l'État distribuant des aides ».
Le nombre de jours de fonctionnement couverts par le fonds de roulement est proche d'une année, alors que le besoin en fonds de roulement du CNC n'a pas dépassé 70 millions d'euros en plein coeur de la crise sanitaire, voire a été négatif sur la quasi-totalité de la période 2011-2021 analysée par la Cour.
L'augmentation continue de la trésorerie découle de la gestion prudente menée par le CNC.
Théoriquement, la stricte application des normes comptables devrait entraîner une couverture intégrale par la trésorerie du CNC des provisions et réserves constituées au bilan du Centre, ce qui aurait conduit à des montants de trésorerie encore bien plus importants. En réalité, le CNC a opté pour une sécurisation partielle : seules les provisions pour soutiens automatiques ne sont pas intégralement sécurisées par la trésorerie (soit un taux de sécurisation de 56,1 %) ; dans la mesure où il ne paraissait pas utile de disposer d'une trésorerie « dormante » couvrant 100 % des provisions pour soutiens automatiques.
Néanmoins, les provisions partielles pour soutiens automatiques ont continué à alimenter la trésorerie. Dès que le CNC accorde une aide sélective celle-ci fait l'objet d'une provision tant qu'elle n'a pas été mobilisée. La Cour note que le montant de ces provisions sur aides sélectives a progressé de 45 % entre 2011 et 2021 tandis que les aides sélectives correspondantes versées diminuaient de 10 %.
Le CNC a annoncé vouloir mettre fin à ce mode de gestion et a confié une mission d'audit à des magistrats financiers afin d'éviter que cette situation d'accumulation ne se reproduise.
Le fonds de roulement du CNC est essentiellement destiné à couvrir les engagements et risques structurels, les sommes destinées à couvrir les risques conjoncturels ne représentant que 13 % du montant total du fonds de roulement.
Composition du fonds de roulement du CNC
(en %)
Source : commission des finances d'après le CNC
Les 450 millions d'euros prélevés en 2025 correspondent en grande partie à des provisions pour aides automatiques qui n'ont pas eu à être mobilisées et qui viennent donc artificiellement grossir la trésorerie de l'établissement. Le rapporteur spécial juge parfaitement légitime que ces « fonds dormants » alimentent le budget général, en particulier dans le contexte actuel des finances publiques.
Il convient de souligner que le CNC ne mobilise pas son fonds de roulement pour la distribution de soutiens financiers au secteur, de sorte que le prélèvement n'aura aucun impact sur sa capacité à mobiliser des financements pour le cinéma en 2025.
DEUXIÈME PARTIE
LA
MISSION
« AUDIOVISUEL PUBLIC » ET
LE COMPTE DE
CONCOURS FINANCIERS
« AVANCES À L'AUDIOVISUEL
PUBLIC »
La mission « Audiovisuel public » retrace, comme c'était le cas les années précédentes du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public », l'intégralité des crédits destinés aux organismes de l'audiovisuel public.
La mission est composée de six programmes, correspondant aux différentes sociétés de l'audiovisuel public (372 - France Télévisions, 373 - ARTE France, 374 - Radio France, 375 - France Médias Monde, 376 - l'Institut national de l'audiovisuel (INA) et 377 - TV5 Monde). S'y ajoute, comme sur le compte de concours financiers en 2024, un programme spécifique, intitulé « programme de transformation » - 383, dont les montants, très marginaux, sont destinés à financer des projets de transformation prioritaires.
La mission regroupe l'ensemble des financements de l'État à l'audiovisuel public, à l'exception de ceux accordés à France Médias Monde. La mission « Aide publique au développement » contribue en 2025 au financement de cette société à hauteur de 4,25 millions d'euros, contre 10 millions en 2024. Ces financements sont ciblés pour financer quatre projets spécifiques destinés à lutter contre la désinformation. Ce montant ne répond qu'imparfaitement aux critiques de la mission conjointe de contrôle du Sénat sur le financement de l'audiovisuel17(*), considérant qu'une part nettement supérieure des activités de France Médias Monde relevait du champ de l'aide publique au développement et devait donc être portée par la mission correspondante.
I. UNE NOUVELLE MISSION BUDGÉTAIRE N'AYANT VOCATION À ÊTRE QUE TEMPORAIRE DANS L'ATTENTE DU VOTE DE LA PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE ADOPTÉE PAR LE SÉNAT
La création d'une mission budgétaire en PLF 2025 reflète une budgétisation par défaut, dans la mesure où il s'agit du seul mode de financement qui ne nécessite pas de modification législative de niveau organique.
Acquittée par près de 23 millions de foyers et 80 000 entreprises, le montant de la contribution à l'audiovisuel public - CAP (138 euros en métropole et 88 euros en outre-mer), en principe indexé sur l'inflation, était gelé depuis 2018. Prélèvement peu dynamique - le nombre de foyers l'acquittant se réduisant chaque année - et ne reflétant plus les nouveaux usages en matière de consommation audiovisuelle, la CAP était appelée à être profondément modifiée afin de tenir compte de la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales en 2023, sur laquelle elle était adossée.
L'article 6 de la loi de finances rectificative pour 2022 modifiant le 2° du 1 du VI de l'article 46 de la loi de finances pour 2006 prévoyait donc que la CAP était supprimée. Ce même article prévoyait que la dotation affectée par l'État à l'audiovisuel public était constituée jusqu'au 31 décembre 2025 d'une fraction du produit de la TVA déterminée chaque année en loi de finances.
À législation constante, ce système ne pouvait perdurer. Le premier alinéa du II de l'article 2 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) limite à compter du dépôt du PLF pour 2025 les possibilités de recourir à un financement par une taxe affectée pour d'autres organismes publics : l'affectation d'une ressource à un tiers autre que les collectivités territoriales et les organismes de sécurité sociale « ne peut être maintenue que si ce tiers est doté de la personnalité morale et si ces impositions sont en lien avec les missions de service public qui lui sont confiées ».
Or, l'affectation d'une fraction de TVA aux organismes de l'audiovisuel public ne satisfait pas la condition de lien entre la ressource publique affectée et la mission de service public assurée par ces mêmes organismes. La TVA est un impôt sur la consommation acquitté par l'ensemble des consommateurs, sans rapport avec les missions du service public audiovisuel.
La solution d'un financement des sociétés d'audiovisuel public par des crédits budgétaires ne paraît pas adaptée.
Certes, la solution de la budgétisation n'emporterait pas nécessairement de risque de revenir sur les garanties d'indépendance de l'audiovisuel public, comme le notait le rapport de l'inspection générale des finances et de l'inspection générale des affaires culturelles préalable à la suppression de la CAP18(*).
La mise en place d'une dotation spéciale aurait pu par exemple être imaginée. Le système de la dotation est utilisé pour de nombreuses institutions, notamment pour les crédits des assemblées parlementaires ou du Conseil constitutionnel. Le mécanisme de la dotation aux pouvoirs publics est prévu à l'article 7 de la LOLF. Dans la pratique, le Gouvernement exclut toute régulation budgétaire en cours d'année car les fonds sont versés à l'organisme attributaire en début d'année, tout en garantissant le maintien de l'information du Parlement par les documents budgétaires.
Il serait cependant nécessaire de mettre en place d'autres garde-fous, parmi lesquels la mission identifiait la création d'une instance indépendante chargée de l'évaluation des crédits nécessaires au bon fonctionnement du service public de l'audiovisuel, l'inscription dans la LOLF du principe d'exonération de régulation infra-annuelle et l'inscription dans la loi de programmation des finances publiques d'une trajectoire financière pour les sociétés d'audiovisuel public.
Les sociétés d'audiovisuel public perçoivent le système de financement par crédits budgétaires comme moins protecteur et soulèvent des inquiétudes sur les enjeux symboliques qui en découleraient, notamment sur le plan international. Au vu de l'urgence à trouver un mode de financement pouvant prendre le relais du système actuel, le temps manque pour mettre en place les précautions qui pourraient rendre un financement par crédits budgétaires plus acceptable par les sociétés d'audiovisuel public.
Alors que la commission des finances du Sénat avait soulevé cette difficulté dès le vote dans l'urgence de la suppression de la contribution à l'audiovisuel public (CAP) à l'été 2022, il est regrettable qu'aucune mesure n'ait été prise au cours des deux dernières années afin d'anticiper cette échéance.
La préservation de l'indépendance budgétaire des services publics audiovisuels, notamment protégée par la jurisprudence du Conseil constitutionnel, impose cependant de trouver rapidement un mode de financement pérenne, à deux mois de la caducité du mécanisme actuel.
Le Sénat a donc adopté le 23 octobre 2024 une proposition de loi organique portant réforme du financement de l'audiovisuel public. Celle-ci vise à modifier l'article 2 de la LOLF afin de permettre aux sociétés d'audiovisuel public de bénéficier de l'affectation d'un montant d'impôt d'État, ce qui permettra de maintenir le système antérieur de financement par une part de TVA affectée.
En conséquence, la création de la mission « Audiovisuel public » est réversible, dans l'hypothèse où la proposition de loi organique serait adoptée avant la fin de l'examen du projet de loi de finances. Les documents budgétaires sont ainsi explicites : « Cette solution ne préempte pas d'éventuelles modifications du cadre organique visant à définir un mode de financement alternatif pour le secteur qui serait décidé par le Parlement ».
Si la proposition de loi organique était adoptée suffisamment à temps pour que soit adopté un montant de TVA affectée lors du vote de la première partie du PLF pour 2025, la mission serait vraisemblablement de nouveau transformée en compte de concours financiers.
II. UNE CONTRIBUTION NÉCESSAIRE DES SOCIÉTÉS D'AUDIOVISUEL PUBLIC AUX EFFORTS DE REDRESSEMENT DES FINANCES PUBLIQUES
A. UNE STABILITÉ DES MOYENS PAR RAPPORT À 2024 QUI DOIT ÊTRE SALUÉE
1. Des moyens équivalents à ceux prévus en 2024 pour l'ensemble des sociétés
Le présent projet de loi de finances prévoit que les sociétés de l'audiovisuel public bénéficient en 2025 d'un montant de 4,029 milliards d'euros, bénéficiant pour près des deux-tiers à France Télévisions et pour 16,5 % à Radio France.
Répartition de la part du produit de TVA
affectée
aux sociétés de l'audiovisuel public
en 2025
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Une partie de ces crédits découle de la compensation des effets fiscaux de la suppression de la contribution à l'audiovisuel public. Celle-ci était soumise à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) depuis 1969. Cette taxation permettait d'exonérer les opérateurs du paiement de la taxe sur les salaires. Le remplacement de la CAP par une fraction de TVA a donc eu pour conséquence d'entraîner l'assujettissement des sociétés de l'audiovisuel public concernées à la taxe sur les salaires. En conséquence, la fraction de TVA accordée inclut en retour une part supplémentaire destinée à compenser la hausse des prélèvements des entreprises, que le Gouvernement s'est engagé à compenser lors de la fixation de la trajectoire financière du secteur.
Au total, le coût de la neutralisation des effets fiscaux devrait atteindre 122 millions d'euros, soit un montant équivalent à celui prévu en 2024 (120 millions d'euros) et correspondant à 3 % de la dotation totale accordée aux sociétés de l'audiovisuel public.
Décomposition de la compensation des effets fiscaux de la suppression de la CAP versée aux sociétés de l'audiovisuel public en 2025
(en millions d'euros)
Source : commission des finances d'après les documents budgétaires
Le Gouvernement a annoncé projeter de réduire au cours de l'examen parlementaire le montant de la mission de 50 millions d'euros, ce qui la porterait à 3,979 milliards d'euros. Cette réduction est justifiée par les documents par un « effort de maîtrise des dépenses de l'audiovisuel public, en particulier pour France Télévisions ». Une telle réduction semble absorbable.
2. Une stabilité à analyser au prisme des modifications en gestion des crédits accordés en 2024
Le montant demandé pour 2025 correspond à une stabilité complète (+ 3,9 millions d'euros et + 0,06 %) par rapport à la loi de finances initiale pour 2024.
Cette stabilité fait cependant suite à une importante augmentation en 2024 : entre 2023 et 2025, les crédits prévus pour l'audiovisuel public auront augmenté de 213,45 millions d'euros, soit une hausse de 6,4 %. Plus de la moitié (136 millions d'euros) de cette hausse a bénéficié à France Télévisions.
Évolution des dotations accordées
aux sociétés de l'audiovisuel public
entre 2023 et
2025
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Par rapport à l'exécution observée en 2024, les crédits prévus dans le PLF devraient augmenter de 59 millions d'euros, une partie des crédits prévus en 2024 ayant été annulés (à hauteur de 20 millions d'euros)19(*) et une autre ayant été gelée.
En tenant compte des montants effectivement versés aux sociétés d'audiovisuel public au titre de 2024, les crédits accordés à l'audiovisuel public devraient augmenter d'1,5 %.
Évolution des dotations accordées aux sociétés de l'audiovisuel public entre 2024 et 2025
(en millions d'euros)
|
2024 (LFI) |
2024 (prévision d'exécution) |
2025 (PLF) |
Écart exécution 2024/PLF 2025 en valeur |
Écart exécution 2024/ prévision 2025 (en %) |
France Télévisions |
2 568,11 |
2 535,5 |
2 567,07 |
31,57 |
1,25% |
ARTE France |
293 |
293,6 |
300,95 |
7,35 |
2,50% |
Radio France |
667,9 |
657,25 |
666,21 |
8,96 |
1,36% |
France Médias Monde |
304,2 |
295,55 |
304,91 |
9,36 |
3,17% |
Institut national de l'audiovisuel |
107,91 |
105 |
105,77 |
0,77 |
0,73% |
TV5 Monde |
83,45 |
83,45 |
84,24 |
0,79 |
0,95% |
Total |
4 025,23 |
3 970,35 |
4 029,16 |
58,81 |
1,48% |
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
3. Des moyens qui n'ont que marginalement évolué depuis 10 ans mis à part en 2024
Entre 2016 et 2023, les montants accordés à l'audiovisuel public n'avaient pas augmenté : ils s'élevaient à 3,80 milliards d'euros en 2023 contre 3,79 millions d'euros sept ans plus tôt. Le montant de la CAP avait en effet fait l'objet d'une diminution d'un euro en 2020, suivie de deux années de gel du montant de la contribution, pourtant théoriquement indexée sur l'inflation.
Cette stabilité des moyens s'inscrivait dans un contexte d'une trajectoire d'économies demandées aux sociétés de l'audiovisuel public, définie en juillet 2018 par le Gouvernement. Celle-ci prévoyait une réduction des dotations accordées de 190 millions d'euros entre 2018 et 2022.
La loi de finances pour 2019 prévoyait par ailleurs la suppression de l'affectation à France Télévisions d'une part de la taxe sur les communications électroniques (TOCE). Le montant de cette fraction s'élevait à 85,5 millions d'euros en loi de finances pour 2018.
Évolution des montants accordés
à l'audiovisuel public
en loi de finances initiales depuis
2016
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Rapportée à l'inflation, l'évolution observable depuis 2017 revient à des économies de près de 500 millions d'euros.
Évolution des moyens accordés à l'audiovisuel public depuis 2017 hors inflation
(en millions d'euros et en %)
2018 |
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
2024 |
2025 |
|
Montant en valeur |
3 853,20 |
3 816,50 |
3 780,50 |
3 711,20 |
3 695,60 |
3 796,00 |
4 025,20 |
4 029,20 |
Taux d'évolution en valeur |
1079,16 % |
-0,95 % |
-0,94 % |
-1,83 % |
-0,42 % |
2,72 % |
6,04 % |
0,10 % |
Taux d'évolution hors inflation |
1060,44 % |
-1,86 % |
-1,15 % |
-3,34 % |
-5,47 % |
-2,01 % |
3,86 % |
-1,67 % |
Montant en euros 2024 |
4 461,77 |
4 378,78 |
4 328,50 |
4 184,14 |
3 955,15 |
3 875,72 |
4 025,20 |
3 957,96 |
Source : commission des finances du Sénat
Le rapporteur spécial considère cependant qu'il n'y a pas lieu de s'inquiéter de cette trajectoire.
D'une part, les montants présentés plus haut n'intègrent pas les efforts consentis par ailleurs par l'État pour amortir les conséquences de la crise sanitaire. Une dotation de 73 millions d'euros, prévue sur la mission « Plan de relance » a été répartie sur les exercices 2021 et 2022 (45,5 millions d'euros en 2021 et 27,5 millions d'euros en 2022).
Par ailleurs, plusieurs sociétés ont fait l'objet d'une augmentation de la dotation en capital de l'État, pour un total de 138 millions d'euros sur la période 2020-2023.
Dotations en capital accordées par l'État aux sociétés d'audiovisuel public
(en millions d'euros)
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
Total |
|
France Télévisions |
17 |
15,2 |
14,9 |
31,5 |
78,6 |
Radio France |
17,7 |
18,5 |
15,6 |
6,5 |
58,3 |
France Médias Monde |
1,6 |
Source : commission des finances du Sénat d'après les données transmises au rapporteur spécial
La forte hausse accordée en 2024 était motivée par trois éléments :
- en premier lieu, la neutralisation - pour la première fois en année pleine - des effets fiscaux induits par le remplacement de la CAP par une fraction du produit de la TVA ;
- en deuxième lieu, la mise en place de recettes conditionnées à l'atteinte des objectifs fixés par les contrats d'objectifs et de moyens (COM) 2024-2028 conclus par les entreprises d'audiovisuel public20(*) ;
- enfin, la prise en compte des effets de la hausse des prix sur l'activité des entreprises.
La relative baisse en exécution 2024 n'est demeurée que marginale eu égard aux 209 millions d'euros supplémentaires prévus.
Considérant que ces moyens nouveaux n'étaient pas justifiés au regard de la situation budgétaire, le rapporteur spécial avait déposé un amendement visant à stabiliser les moyens au niveau de 2022. Par conséquent, il ne peut que saluer l'absence de révision à la hausse des montants prévus pour 2025, qui prolonge la stratégie d'économies au cours des dernières années.
B. FAUTE DE VÉRITABLE STRATÉGIE DE RÉFORME, UN PROGRAMME DE TRANSFORMATION LIMITÉ ET UNE TRAJECTOIRE BUDGÉTAIRE FRAGILE
1. Le programme de transformation : des ambitions très réduites, une gestion problématique
L'article 162 de la loi de finances pour 2024 prévoyait d'introduire la possibilité pour les entreprises de l'audiovisuel public de bénéficier d'avances finançant des « actions de transformation » identifiées dans les contrats d'objectifs et de moyens (COM).
D'après les documents budgétaires, l'enveloppe additionnelle dédiée à ces projets de transformation s'élevait à 200 millions d'euros sur trois ans, dont 69 millions d'euros au titre de 2024.
L'essentiel de ces financements conditionnels devait être affecté à France Télévisions (pour un montant de 45 millions d'euros) et, dans une moindre mesure, Radio France (à hauteur de 15 millions d'euros) et aux autres sociétés, à l'exception de TV5 Monde.
Une partie de ces financements a été débloquée dès le début de l'année 2024. Le décret d'annulation de février 2024 précité a ensuite annulé 20 millions d'euros sur les 69 millions d'euros initialement prévus. Les montants annulés ont été répartis au prorata de ceux initialement prévus. France Télévisions devait ainsi percevoir 32 millions d'euros, Radio France 10 millions d'euros, France Médias Monde 3,6 millions d'euros et enfin l'Ina 2,8 millions d'euros.
Le solde a été gelé, bien que n'étant pas officiellement annulé. D'après les informations fournies au rapporteur spécial, ces montants ne sont cependant pas destinés à être reportés en 2025. En conséquence, seuls 19 millions d'euros ont été attribués en 2024 aux différentes sociétés.
De façon curieuse, ce gel n'a pas donné lieu à une notification officielle du ministère du budget ou du ministère de tutelle auprès des organismes d'audiovisuel public. Les réponses au questionnaire budgétaire indiquent ainsi que « depuis le mois de mai 2024, les versements mensuels des crédits de transformation aux entreprises ont été interrompus sur arbitrage du cabinet du Premier ministre en raison des tensions persistantes sur les comptes publics et dans la perspective alors proche d'une réforme de la gouvernance du secteur ». Les organismes auditionnés ont indiqué ne pas avoir reçu d'annonce officielle de cette interruption. Le rapporteur spécial déplore cette légèreté, qui ne participe pas à la prévisibilité et partant, à la performance, de la dépense. En outre, l'annulation en gestion n'a pas le même impact sur les petits organismes, qui avaient lancé en début d'année des projets spécifiques, et les grandes sociétés, qui ont pu absorber cette annulation sans difficulté. L'annulation au prorata des crédits initialement distribués n'apparaît pas comme le choix de gestion le plus judicieux.
Exécution des crédits des programmes de transformation en 2024
(en millions d'euros)
Source : commission des finances d'après les documents budgétaires
Le rapporteur spécial n'avait que peu d'attentes vis-à-vis des programmes de transformation tels qu'ils avaient été présentés en 2024, dans la mesure où ceux-ci ne pouvaient en aucun cas être assimilés à une réelle réforme. Une part conditionnelle n'aurait pu être réellement positive que par un renforcement important des critères de performance. Le projet annuel de performances annexé au PLF 2024 se contentait d'indiquer, pour le seul indicateur du programme 848 (avancement des projets de transformation prioritaires) que « la cible 2024 sera définie pour chacun des projets de transformation prioritaires dans les COM 2024-2028 en cours de finalisation qui préciseront les indicateurs de suivi de la réalisation de ce projet ».
Exemple de projets partiellement financés par les programmes de transformation en 2024
L'analyse des chantiers de transformation conduits par les entreprises partiellement financés par des crédits de transformation confirme le caractère très marginalement incitatif de ces crédits. Au moins dans le cas de France Télévisions et de Radio France, les chantiers présentés par le ministère comme liés aux programmes de transformation concernent en réalité des chantiers déjà lancés précédemment et dont le coût est largement supérieur aux quelques millions d'euros de transformation finalement accordés.
C'est le cas du déploiement de France 2 et France 3 en ultra haute définition, du déploiement de formats conçus pour les réseaux sociaux, du lancement de la marque unique « Ici », commune à France Bleu et France 3, ou encore « le déploiement de formations permettant la montée en expertise de journalistes dans les domaines environnemental et scientifique ».
Sans remettre en question l'intérêt de fond de ces projets, alors que le rapporteur spécial en considère certains comme indispensable, il est légitime de s'interroger sur le bien-fondé d'un financement par des crédits spécifiques.
Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire
Force est de constater que la réduction du montant des programmes de transformation, déjà initialement marginal, a entériné leur faible ambition. À défaut d'une attribution des crédits sur la base de la performance des projets, ceux-ci n'auront finalement principalement servi que de marge d'ajustement budgétaire.
Cette situation est appelée à se reproduire en 2025. 30 millions d'euros sont de nouveau prévus au titre des programmes de transformation. Ces financements ne correspondent pas aux 30 millions d'euros de « restes à payer » de 2024, mais à la deuxième tranche des programmes de transformation. Celle-ci devait initialement s'élever à 74 millions d'euros.
Contrairement à 2024, ARTE France devrait également bénéficier de ces financements, pour un montant de 2,8 millions d'euros. France Télévisions recevra l'essentiel de ces crédits (18,2 millions d'euros). L'INA ne devrait donc bénéficier sur 2024-2025 que d'un peu moins de 2 millions d'euros, ce qui est très limité eu égard aux ambitions initiales.
Crédits prévus au titre des programmes de transformation en 2025
(en millions d'euros et en %)
Source : commission des finances d'après les documents budgétaires
Le destin de ces crédits est pour ainsi dire déjà connu, dans la mesure où les documents budgétaires indiquent que ce financement « devra être ajusté à l'aune des sous-jacents budgétaires et en fonction de l'évolution des réflexions sur la gouvernance de l'audiovisuel public et de la conduite de rapprochements structurels entre les entreprises du secteur ».
2. Des contrats d'objectifs et de moyens déjà partiellement caducs avant leur conclusion
Les programmes de transformation, tels qu'ils étaient initialement décrits, étaient supposés être conditionnés à l'atteinte d'objectifs figurant dans les contrats d'objectifs et de moyens (COM), devant couvrir pour France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et l'INA la période 2024-2028. Rien n'était connu lors de l'adoption de la loi de finances pour 2024, dès lors que les projets de COM, initialement conclus dès mi-2023, n'ont en réalité été finalisés qu'en juin 2024.
Le résultat de cette transmission tardive est la très courte vie des données chiffrées figurant dans les contrats.
L'Arcom évoque pudiquement dans son avis sur les COM21(*) la « trajectoire financière ambitieuse mais incertaine » portée par ces contrats. Le mot est faible, dès lors que, à peine quatre mois après la conclusion des contrats, les crédits du PLF pour 2025 ne correspondent pas à la trajectoire budgétaire.
Le rapporteur spécial considère par ailleurs qu'il n'y a pas lieu de le regretter, dès lors que, sans que ces financements n'aient pris en compte une éventuelle réorganisation de l'audiovisuel public, 225 millions d'euros supplémentaires étaient prévus pour les quatre COM venant d'être renouvelés sur la période 2024-2028.
Les COM reposent, une fois tenu compte du décret d'annulation de février 2022, sur une hypothèse de progression des dotations publiques allouées à l'ensemble des sociétés de 104 millions d'euros en 2025 et 225 millions d'euros en 2028 par rapport à 2024, soit une progression de 6,4 % en quatre ans.
Le rapporteur spécial estime qu'une telle hausse ne paraissait pas justifiée et se félicite que, dans le contexte budgétaire actuel, l'audiovisuel public prenne sa part de l'effort général d'économies.
Trajectoire financière prévue dans les COM 2024-2028
(en millions d'euros)
2024 |
2025 |
2026 |
2027 |
2028 |
Hausse cumulée 2024-2028 |
||
France Télévisions |
Ressources publiques annuelles |
2 555,10 |
2 618,20 |
2 644,70 |
2 647,70 |
2 684,00 |
+ 128,90 |
Variation annuelle |
+ 63,10 |
+ 26,50 |
+ 3,00 |
+ 36,30 |
|||
Radio France |
Ressources publiques annuelles |
654,7 |
680 |
689 |
694 |
716 |
+ 61,3 |
Variation annuelle |
+ 25,3 |
+ 9 |
+ 5 |
+ 22 |
|||
France Médias Monde |
Ressources publiques annuelles |
275,3 |
285,1 |
289 |
291,6 |
297,3 |
+ 22 |
Variation annuelle |
+ 9,8 |
+ 3,9 |
+ 2,6 |
+ 5,7 |
|||
INA |
Ressources publiques annuelles |
103,5 |
105,6 |
110,4 |
113,3 |
116 |
+ 12,5 |
Variation annuelle |
+ 2,1 |
+ 4,8 |
+ 2,9 |
+ 2,7 |
|||
Total |
3 588,60 |
3 688,90 |
3 733,10 |
3 746,60 |
3 813,30 |
+ 224,70 |
Source : commission des finances d'après les COM
La trajectoire présentée dans les documents budgétaires annexés au PLF pour 2025 ne peut que difficilement être comparée avec celle figurant dans les COM. En incluant les crédits accordés au titre des programmes de transformation (dont, l'expérience l'ayant prouvé, il est douteux qu'ils correspondent finalement aux montants prévus), les hausses cumulées entre 2024 et 2028 s'élèveraient à 2,8 %, soit 113 millions d'euros supplémentaires.
Trajectoire des ressources des sociétés d'audiovisuel public dans le PLF 2025
(en millions d'euros)
Source : commission des finances d'après les documents budgétaires
L'écart dès 2025 entre des contrats pourtant conclus très récemment et le PLF est de -81 millions d'euros. Toutefois, toutes les sociétés ne sont pas touchées de la même façon : ainsi, l'écart entre la trajectoire prévue dans le COM et le PLF n'est que 1,5 % pour Radio France, mais de 3,25 % pour ARTE France ou 2,85 % pour l'INA.
Écart entre le PLF 2025 et la trajectoire prévue dans les COM
(en millions d'euros)
Source : commission des finances d'après les documents budgétaires
Le rapporteur spécial a analysé par le passé, en qualité de rapporteur de la commission de la culture du Sénat, les faiblesses des précédents COM, dont le bilan apparaissait mitigé22(*). Il avait notamment mis en avant un nombre d'objectifs trop important et un manque de hiérarchisation : « le grand nombre des sujets évoqués dans ces documents comme le faible caractère contraignant des objectifs visés ont mis en évidence les défaillances de cet outil alors même que les entreprises de l'audiovisuel public ont besoin d'une certaine stabilité pour développer leur projet ».
Pourtant, les COM 2024-2028 se contentent, en dépit de l'augmentation des moyens qu'ils prévoyaient, de prolonger la génération précédente de contrats. L'Arcom note ainsi dans son avis précédemment mentionné qu'ils « reprennent certains objectifs stratégiques ou indicateurs, comme l'attestent le recours à de nombreuses thématiques et indicateurs des COM 2020-23 et les nombreuses références à la poursuite ou au renforcement de la stratégie mise en place par ces COM ».
Le rapporteur spécial réitère le constat selon lequel les COM ne constituent qu'un ersatz de réforme de l'audiovisuel public. Ces contrats ne se substituent pas à une réelle stratégie pour l'audiovisuel public, compte tenu du manque d'ambition et de moyens qui les caractérisent. À cet égard, il est particulièrement regrettable que les nouveaux COM ne reprennent pas la structure des précédents, qui avaient au moins de positif de contenir une partie commune à France Télévisions, Radio France et France Médias Monde. Cette évolution est d'autant plus surprenante qu'elle est antagoniste avec l'objectif de rapprochement affiché par le programme de transformation.
Le rapporteur spécial s'interroge par ailleurs sur le volet « économies » des COM. France Télévisions prévoit ainsi un important plan d'économies s'élevant à 200 millions d'euros sur 2024-2028, dont 170 millions d'euros sur le fonctionnement interne et frais de personnel et 30 millions d'euros liés à la dynamisation des ressources propres, alors même que l'Arcom considère que la trajectoire de ressources propres prévue « manque d'ambition ».
Il y a lieu de s'interroger sur la crédibilité de telles annonces d'économies, sauf à considérer que France Télévisions dispose actuellement de marges de manoeuvre importantes, dont le précédent plan d'économies de 2018 n'aurait pu venir à bout, malgré la réduction des charges d'exploitation de 453,1 millions d'euros auquel l'entreprise a procédé entre 2015 et 2023.
C. RÉSOUDRE LA QUADRATURE DU CERCLE BUDGÉTAIRE PAR LA RÉFORME DE LA GOUVERNANCE DE L'AUDIOVISUEL PUBLIC
Une première tentative de réforme de la gouvernance de l'audiovisuel public a été abandonnée en février 2020 du fait de l'épidémie de covid-19. Le projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle à l'ère numérique prévoyait la création de France Médias, holding censée chapeauter les sociétés publiques audiovisuelles. Arte France et TV5 Monde n'étaient pas, cependant, intégrées à cette nouvelle structure. Trois missions lui auraient été assignées :
- définir des coopérations éditoriales entre les différentes entités, les décisions éditoriales demeurant du ressort des entreprises éditrices de programme ;
- déployer une offre « trimédia » : télévision, radio et internet ;
- mutualiser les fonctions non éditoriales à l'image de la formation, de la régie publicitaire ou de la recherche et développement.
La mission conjointe de contrôle du Sénat sur le financement de l'audiovisuel a préconisé d'aller plus loin avec la création d'une entreprise unique, regroupant France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et l'INA et de rendre enfin effectives les projets de coopération « par le bas » laborieusement mis en oeuvre ces dernières années, qu'il s'agisse des matinales communes à France 3 et France Bleu, du lancement de l'application numérique commune « Ici » ou du Club « Achats » lancé en 2017.
En conséquence, le rapporteur spécial n'avait pu que se réjouir de l'adoption par le Sénat en juin 2023 de la proposition de loi relative à la réforme de l'audiovisuel public 23(*), dont il était rapporteur. Le texte a ensuite été examiné en commission à l'Assemblée nationale.
Le chapitre 1er de cette proposition de loi prévoyait de regrouper France Télévisions, Radio France, France Médias monde et l'INA dans une holding dès 2025. Cette holding, dénommée France Médias, devait permettre de préparer la fusion un an plus tard des différentes entités de l'audiovisuel public. Les députés avaient retiré France Médias monde du projet de fusion.
Cette proposition de loi devait être examiné en séance publique à l'Assemblée nationale du 24 au 26 juin 2024. Le processus aura été brutalement interrompu par la dissolution de l'Assemblée nationale le 9 juin 2024.
Le rapporteur spécial ne peut qu'inciter le Gouvernement actuel à se saisir des travaux déjà engagés pour relancer la réforme. Il est en tout état de cause certain que la stratégie de mutualisations « par le bas » ne peut suffire. Malgré une prise de conscience des sociétés d'audiovisuel public, qui semblent davantage prêtes à progresser sur le sujet, les avancées sont restées minimes au cours des dernières années, faute de gouvernance commune.
La définition d'une nouvelle gouvernance commune devrait permettre de mettre à plat le niveau de financement de l'audiovisuel public, découlant dans un premier temps de la définition des missions de service public confiées aux sociétés de l'audiovisuel public et dans un second temps de la situation budgétaire du pays.
À moyen terme, une fusion devrait nécessairement entraîner des gains de productivité qui peuvent seuls permettre de redonner des marges à l'audiovisuel public sans entraîner d'augmentation de la dépense publique.
EXAMEN PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
En première lecture, l'Assemblée nationale n'ayant pas adopté la première partie du projet de loi, celui-ci est considéré comme rejeté en application du troisième alinéa de l'article 119 du Règlement de l'Assemblée nationale.
En conséquence, sont considérés comme rejetés les crédits des missions « Médias, livre et industries culturelles » et « Audiovisuel public » et ceux du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public ».
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mercredi 30 octobre 2024, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a procédé à l'examen du rapport de M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial, sur les missions « Médias, livre et industries culturelles » et « Audiovisuel public ».
M. Claude Raynal, président. - Nous passons à l'examen du rapport de Jean-Raymond Hugonet.
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial des missions « Médias, livre et industries culturelles » et « Audiovisuel public ». - Je vous présente aujourd'hui, non pas une mission et un compte de concours financiers comme à l'accoutumée, mais deux missions. Le PLF pour 2025 voit en effet la création d'une mission budgétaire finançant l'audiovisuel public - j'aurais l'occasion d'y revenir.
Je commencerai mon intervention par les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles ». Le PLF prévoit 728,04 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 723,66 millions en crédits de paiement (CP). Ces chiffres traduisent une baisse par rapport à 2024 de 12 millions d'euros, soit 1,7 % en CP et 1,9 % en AE.
La quasi-totalité de cette diminution est absorbée par le soutien aux radios locales. Le fonds de soutien à l'expression radiophonique (FSER), qui aide 750 radios associatives non commerciales, bénéficiait en 2024 de 35 millions d'euros de crédits. Ce montant est ramené à 25 millions d'euros pour 2025.
Cette baisse a été décidée par le ministère chargé du budget et des comptes publics sans concertation avec le ministère de la culture, et met dans l'embarras nombre de petites radios qui sont précieuses dans nos territoires. La ministre de la culture a d'ores et déjà indiqué son intention de revenir sur cette baisse, si ce n'est au cours de l'examen du PLF, à tout le moins en gestion. Il est probable que l'examen à l'Assemblée nationale permette d'abonder le FSER. J'y serai en tout cas très attentif et me réserve la possibilité d'y revenir avant l'examen de la mission en séance publique au Sénat.
Au-delà des radios, la moitié des crédits de la mission est fléchée vers le soutien au secteur de la presse écrite. Le montant total des aides à la presse diminue de 1 % par rapport à 2024. Il devrait atteindre 194 millions d'euros en crédits de paiement en 2025. Cette stabilité appelle un commentaire principal : la réforme des aides à la presse est devenue indispensable. Alors que le secteur est très fragile et que les ventes de la presse écrite au numéro sont en chute libre, la réforme des aides à la distribution attend toujours.
Les états généraux de l'information, qui ont rendu leurs conclusions en septembre dernier, n'ont pas directement suggéré une rationalisation d'ensemble des aides à la presse, qui semble pourtant plus que nécessaire. La dépense fiscale en faveur de la presse s'élève à 170 millions d'euros. Le soutien de l'État représente donc un montant total de près de 400 millions d'euros, sans avoir permis jusqu'à présent de répondre aux défis de long terme du secteur.
En outre, la mission finance également l'Agence France-Presse (AFP), à hauteur de 143 millions d'euros en 2025. L'AFP a connu une situation financière très difficile au cours des dernières années, sa dette ayant atteint 50 millions d'euros en 2017. Ses finances sont aujourd'hui assainies et sa trajectoire de désendettement bien engagée, notamment grâce à un plan d'économies. Celui-ci devrait se poursuivre au cours des prochaines années.
La mission porte également une partie des crédits de l'État en faveur du livre et de la lecture, pour 327 millions d'euros. Ces crédits sont pour l'essentiel destinés aux grandes bibliothèques, en particulier la Bibliothèque nationale de France (BNF). La subvention versée à la BNF représentera 216,2 millions d'euros en 2025. Les bâtiments sont pour certains vieillissants et font l'objet d'investissements continus. L'essentiel des dépenses de la BNF concerne sa masse salariale, dont la croissance est essentiellement liée aux mesures générales prises dans la fonction publique, qui n'ont d'ailleurs été que partiellement compensées.
Ces crédits, comparés à la dépense des collectivités en faveur de la lecture, restent limités. Les collectivités territoriales ont ainsi dépensé en 2022 près de 1,4 milliard d'euros pour les bibliothèques. La dotation de l'État pour les bibliothèques, portée par la mission « Relations avec les collectivités territoriales », ne représente que moins d'un dixième de cette somme.
Enfin, je voudrais dire quelques mots du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC). Le CNC n'est pas financé par des crédits budgétaires, mais par des taxes affectées. Le rendement de ces taxes est dynamique, de sorte que le CNC bénéficie d'un budget en hausse continue. Il atteindra 785 millions d'euros en 2025.
L'article 33 du projet de loi de finances prélève 450 millions d'euros sur la trésorerie du CNC. Cette ponction devrait être sans aucune conséquence pour l'établissement, dont le fonds de roulement dépassait les 800 millions d'euros. La gestion du CNC a été très prudente et a entraîné une croissance de sa trésorerie qui n'a pas de réelle raison d'être. Il semble donc tout à fait logique, en particulier par les temps qui courent, que cet argent inemployé rejoigne le budget général.
Compte tenu de ce qui vient d'être dit, je vous propose d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles ».
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Concernant les radios associatives, je m'interroge sur les raisons d'une baisse si brutale des crédits. C'est un vecteur d'information de proximité très utile pour nos territoires qui doit faire l'objet de toute notre vigilance.
Ensuite, les réformes sont très lentes à mettre en oeuvre, alors que la presse écrite bénéficie d'un soutien de 200 millions d'euros. Nous courons de difficulté en difficulté, sans parvenir à réformer. Je compte sur la responsabilité de chacun pour que les choses avancent, car réformer, c'est aussi prendre une juste part aux efforts budgétaires demandés.
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. - S'agissant maintenant de la mission « Audiovisuel public », elle devrait, je l'espère, être temporaire. En effet, nous avons adopté il y a une semaine la proposition de loi organique (PPLO) portant réforme du financement de l'audiovisuel public. Celle-ci a modifié la loi organique relative aux lois de finances (Lolf) pour permettre aux sociétés d'audiovisuel public de bénéficier de l'affectation d'un montant d'impôt d'État. En d'autres termes, cela revient à pérenniser le système antérieur d'affectation d'une fraction de TVA.
La PPLO sera examinée en séance publique à l'Assemblée nationale le 19 novembre prochain. Si elle est adoptée dans les mêmes termes, nous pourrons en tirer les conséquences en réintroduisant un financement par une fraction de TVA en première partie de la loi de finances. J'ai donc bon espoir que la mission « Audiovisuel public » soit redevenue un compte de concours financiers d'ici à son passage en séance au Sénat.
S'agissant maintenant du niveau du financement accordé, le montant des crédits prévus en 2025 est stable par rapport à l'année précédente. Cela représente 4,029 milliards d'euros. Les deux tiers de ce montant vont à France Télévisions et 16 % à Radio France.
Ce montant est nettement inférieur à la trajectoire prévue par les contrats d'objectifs et de moyens (COM) qui nous ont été transmis juste après la dissolution. C'est une bonne chose. Les contrats négociés il y a à peine quatre mois reposent sur une hypothèse de progression des dotations de 104 millions d'euros en 2025.
Dans le contexte actuel, il est légitime que l'audiovisuel public prenne sa part à l'effort général d'économies.
Notons par ailleurs que les crédits sont stables par rapport à la loi de finances initiale (LFI). Toutefois, par rapport à l'exécution observée en 2024, les crédits prévus dans le PLF devraient augmenter de 72 millions d'euros. En tenant compte des montants effectivement versés aux sociétés d'audiovisuel public au titre de 2024, les crédits accordés à l'audiovisuel public devraient augmenter de 1,8 %.
Cette différence découle de la modification accordée au titre de l'enveloppe prévue en 2024 pour des projets de transformation. Ce financement spécifique devait initialement s'élever à 200 millions d'euros sur trois ans, dont 69 millions d'euros au titre de 2024.
Or, devant l'ampleur de la catastrophe budgétaire, une partie des crédits prévus en 2024 ont été annulés par le décret de février, à hauteur de 20 millions d'euros. Une autre partie des crédits a été gelée. Tout compte fait, seuls 19 millions d'euros sur 69 millions d'euros auront été versés aux sociétés d'audiovisuel public au titre du programme de transformation. En 2025, 30 millions d'euros sont tout de même prévus.
Nous avons appris par le document publié dimanche dernier que le Gouvernement projetait de réduire de 50 millions d'euros le montant de la mission, ce qui le porterait à 3,979 milliards d'euros. Cette réduction est justifiée par un « effort de maîtrise des dépenses de l'audiovisuel public, en particulier pour France Télévisions ». Je trouve cette réduction justifiée. Nous attendons cependant l'amendement du Gouvernement.
Je suis certain que la seule piste d'économies durable est celle d'une réorganisation générale de l'audiovisuel public. La stratégie de mutualisation « par le bas » entre les sociétés se hâte avec lenteur et ne peut suffire. La priorité est de redéfinir les missions de l'audiovisuel public, d'en dessiner le nouveau périmètre, puis d'en tirer les conséquences budgétaires. J'ai bon espoir que nous y travaillerons avec le Gouvernement dans les prochains mois.
Je vous propose d'adopter les crédits de la mission « Audiovisuel public » sans modification.
M. Arnaud Bazin. - Je précise, par souci de transparence, que je préside par intérim la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), actionnaire à 66 % de La Poste. Vous annoncez 170 millions d'euros de soutien à la presse écrite ; or la mission de service public assurée par La Poste est sous-financée à hauteur de 500 millions d'euros, chiffre de La Poste confirmé par l'audit de la commission de surveillance de la CDC. La participation de l'État à cette mission de service public va-t-elle être revue ?
M. Vincent Éblé. - Le budget de cette belle mission « Médias, livre et industries culturelles » est en baisse de 1,67 %. Les crédits du programme 180 « Presse et médias » baissent de 2 %. Les radios associatives perdent près d'un tiers de leur enveloppe, déjà amputée précédemment de l'aide aux podcasts en 2024, qui n'aura duré que deux ans. Les crédits du programme 334 « Livre et industries culturelles » sont également en baisse, même si elle est moindre.
Les crédits du FSER diminuent de 30 %, ce qui nous inquiète vivement. Les radios indépendantes garantissent une forme de pluralité de l'information dans les territoires ; le Sénat y est historiquement attaché.
Pour toutes ces raisons, nous n'adopterons pas ces crédits.
M. Michel Canévet. - Je me réjouis que le rapporteur spécial s'attelle à la tâche d'une meilleure optimisation de l'utilisation des crédits de l'audiovisuel public, rappelant le souhait de rigueur qui prévaut dans cette commission.
Le CNC, après prélèvement, disposera encore de 400 millions d'euros de trésorerie. Pourrait-on envisager une ponction supplémentaire ? Ne mobilisons pas du capital inutilement.
M. Grégory Blanc. - Je trouve symptomatique cette ponction d'un demi-milliard d'euros sur la trésorerie du CNC : agir ainsi, c'est un tir à un coup. Cela en dit long de nos perspectives pour l'avenir.
Les crédits de l'audiovisuel public pourraient baisser de 50 millions d'euros. Or toute réforme prend du temps, et les économies attendues à terme arriveront tardivement. En 2026, la situation budgétaire des sociétés risque d'être difficile. Les seules coupes budgétaires ne règleront pas les problèmes financiers du pays.
Concernant les radios associatives, je ne comprends pas une telle baisse des crédits. Dans mon territoire, Radio France n'est pas présente ; sans radios associatives, il n'y aura plus rien. Les radios associatives sont un véritable enjeu en termes d'aménagement du territoire.
Mme Nathalie Goulet. - Nous avons eu la même discussion en séance l'année dernière sur les contributions du CNC. Quels sont les critères d'attribution des subventions ? Je n'ai rien de particulier contre Bernard-Henri Lévy, mais le nombre d'aides qu'il touche pour ses films de médiocre qualité est spectaculaire ! Quand on connaît le nombre de chaînes dont il est membre du conseil d'administration, on peut légitimement s'interroger sur d'éventuels conflits d'intérêts.
Par ailleurs, nous avons largement débattu, ces dernières années, du maintien des aides à la presse, qui, à l'origine, devaient permettre la numérisation et l'informatisation des rédactions. Alors que les crises liées à la financiarisation de la presse se multiplient, ces aides publiques, qui ne garantissent manifestement pas l'indépendance des rédactions, sont-elles toujours aussi nécessaires ?
M. Raphaël Daubet. - Je partage le désarroi de mes collègues concernant les radios associatives. Celles-ci sont menacées par une coupe budgétaire à la fois disproportionnée, incompréhensible et dangereuse, qui porterait un coup fatal à la vie démocratique et culturelle de nos territoires.
Je m'interroge, par ailleurs, sur la consommation énergétique du site François-Mitterrand de la Bibliothèque nationale de France, dont il nous est dit qu'est équivalente à celle d'une ville de 20 000 habitants.
M. Éric Jeansannetas. - J'insiste à mon tour sur les radios associatives. Monsieur le rapporteur spécial, je vous remercie de vous interroger sur la pertinence de cette réduction de crédits à hauteur de 30 %. Ces radios associatives sont en péril. Dans mon département de la Creuse, il s'agit de toutes petites stations, avec des budgets très restreints, animées par des permanents. C'est leur survie qui est en jeu, et, en même temps, celle du pluralisme et de l'éducation à l'information qu'elles assurent, en particulier en milieu scolaire.
Ces radios ont progressivement disparu du paysage médiatique - nous ne sommes plus à l'époque de l'éclosion des radios libres dans les années 1980 !
Quoi qu'il en soit, si l'Assemblée nationale n'adopte pas d'amendement pour abonder ce fonds de soutien à l'expression radiophonique, le Sénat devra s'en charger.
Mme Christine Lavarde. - Je suis également interpellée par la consommation énergétique de la BNF. En tant que membre du Conseil de l'immobilier de l'État, aux côtés de Rémi Féraud, je me demande quels crédits ont été ouverts pour le respect du décret, dit « tertiaire », du 23 juillet 2019 relatif aux obligations d'actions de réduction de la consommation d'énergie finale dans des bâtiments à usage tertiaire par le ministère de la culture.
M. Laurent Somon. - Au moment de la crise covid, une nouvelle chaîne culturelle a été créée. Alors qu'elle devait être provisoire, elle a été pérennisée. Ne ferions-nous pas acte de bonne gestion en réintégrant une chaîne créée de manière exceptionnelle dans des programmes de chaînes plus populaires ? Nous en améliorerions d'ailleurs la qualité ! Plutôt que d'inciter les Français à regarder des séries policières américaines à longueur de soirées, il serait plus pertinent de promouvoir des émissions culturelles tout en faisant des économies de fonctionnement.
M. Victorin Lurel. - Je m'associe aux propos de mes collègues sur le soutien que nous devons apporter aux radios locales. Je m'étonne de la réduction de leur budget.
Je suis également surpris d'apprendre la diminution de 50 millions d'euros pour l'audiovisuel public qu'a évoquée le rapporteur. La semaine dernière, lorsque le Sénat a adopté la proposition de loi organique portant réforme du financement de l'audiovisuel public, Mme Dati a répondu à mes questions par des engagements forts. Elle a notamment assuré qu'elle ne toucherait pas aux dotations telles qu'elles ont été inscrites dans le PLF 2025
Par ailleurs, le programme de transformation, qui a été créé de toutes pièces, a imposé une condition d'exécution préalable du contenu du contrat d'objectifs et de moyens. Les crédits de ce programme s'élevaient à 69 millions d'euros, dont 45 millions pour France Télévisions. Pour l'heure, seuls 12 millions ont été versés. Et finalement, le Gouvernement projette une réduction de 50 millions d'euros de ces crédits, sans que l'on sache vraiment où et comment cela sera imputé !
Cette information tranche fortement avec les engagements pris par Mme Dati la semaine dernière. J'avais souligné, à cette occasion, que le ministre chargé du budget et des comptes publics avait expliqué que 12 milliards d'euros ne seraient pas consommés et que l'État, dans le projet de loi de finances de fin de gestion, procéderait à des annulations à hauteur de 6 milliards d'euros. Là encore, la ministre de la culture s'est engagée à préserver l'audiovisuel public.
Je sais que vous appelez de vos voeux une réforme globale de la gouvernance et même une fusion de l'audiovisuel public français. Néanmoins, je suis surpris d'apprendre que le Gouvernement souhaite revoir entièrement le financement à la baisse. Comme on dit en créole : « Pawòl an bouch pa chaj » - ne prenons pas les mots pour argent comptant !
M. Bernard Delcros. - J'abonde dans le sens de mes collègues sur les radios associatives. L'enjeu financier n'est pas considérable : on parle de 10 millions d'euros, dans un plan d'économies de 60 milliards ! Et pourtant, c'est une question de survie pour ces radios associatives locales qui jouent un rôle déterminant, en particulier pour faire vivre les territoires les plus reculés. Le jeu n'en vaut pas la chandelle.
M. Christian Bilhac. - Je ne voterai pas les crédits de cette mission, car c'est une caricature de notre administration. Le Gouvernement ne propose aucune réforme, mais il se contente, à son habitude, de sortir de son atelier de menuiserie son rabot préféré. Mes collègues sont déjà largement revenus sur la mort annoncée de nombreuses radios associatives - tout cela pour quelques sous ! Puis on sort le fusil à un coup, pour 450 millions d'économies, soit la moitié des réserves de trésorerie du CNC. Mais si l'on tire le deuxième coup l'an prochain, il ne restera plus rien !
Bref, on bricole, au lieu de réformer en profondeur, on rabote, on ponctionne les fonds de réserve : quelle absence totale de vision de ce que doit être la gestion d'une mission par les services de l'État !
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. - Monsieur Bazin, les aides à la diffusion s'élèvent à 114 millions d'euros, dont 65,5 millions pour les exemplaires postés. L'ambition est de diminuer le soutien à la diffusion postée, au profit de l'aide à l'exemplaire porté. Une baisse est donc prévue, y compris dans le contrat avec La Poste.
Monsieur Éblé, nous avons jusqu'à maintenant assisté à un bricolage sur l'audiovisuel, d'année en année. C'est encore le cas cette année, en l'absence de réforme. Mais pour la première fois, la tendance est plutôt à la baisse. Pour autant, les ressources restent globalement stables.
J'en viens au CNC. Il s'agit d'une maison qui fonctionne très bien, ce qui est d'ailleurs rassurant pour le cinéma français, à l'heure où l'on parle de créer un musée national dédié au septième art, dont, ne l'oublions pas, nous sommes les inventeurs. Depuis l'après-guerre, le cinéma représente une activité importante et structurée dans notre pays.
La Cour des comptes avait conseillé au CNC la constitution d'importantes réserves de précaution, bien que sa gestion soit de bonne qualité. La ponction n'a pas posé de difficulté à l'établissement, alors que le temps budgétaire se couvre, car chacun, était bien conscient de l'existence de ce gisement.
Le directeur du CNC, qui en est aussi le président par intérim, estime que la ponction de 450 millions d'euros ne représente pas un problème. En revanche, la question de la nécessité de conserver la réserve restante pour conserver une gestion prudente peut se poser.
Monsieur Blanc, lorsque nous soulignons des baisses de crédits, ne soyons pas amnésiques. Depuis des années, l'audiovisuel public vit dans un relatif confort financier. Alors que toute la Nation se voit contrainte à un effort collectif, ce programme budgétaire me paraît tout à fait tolérable.
Quels que soient nos territoires ou notre sensibilité politique, nous sommes tous touchés par la baisse de crédits en faveur des radios associatives. Tant dans la forme que dans le montant, cette réduction est inexplicable. La somme en question - 10 millions - n'est pas négligeable, mais c'est une goutte d'eau au regard de la situation financière catastrophique de notre pays. Pourquoi, alors, le budget de ces radios a-t-il été divisé de moitié par Bercy ? Je m'attends à des réactions similaires à la nôtre à l'Assemblée nationale. Il est d'ailleurs insupportable que le ministère de la culture n'ait pas été informé de cette décision.
Je me demande, pour ma part, si cette baisse ne résulte pas d'une volonté d'agir, de manière très ciblée, sur le local. Il pourrait s'agir d'une manière d'accompagner ce mouvement, à l'image de la synergie entre France 3 et France Bleu sous la marque « Ici ».
Madame Goulet, je me garderai de donner un avis artistique sur la production d'un réalisateur. La question des subventions se pose de la même manière au Centre national de la musique (CNM). Il est tout à fait illusoire d'espérer trouver une clé de répartition parfaite qui ne lèse personne. En tant que co-financeur des productions, le CNC doit prendre des risques, car la matière artistique n'a rien d'arithmétique.
La financiarisation de la presse pose en effet problème. Comme dans l'audiovisuel, nous voyons chaque année s'accroître les problèmes sans trouver de véritable parade. Sauf à adopter une réforme en profondeur, nous ne pourrons procéder autrement que par cette forme de bricolage.
Je n'ai pas de réponse précise à apporter sur la consommation énergétique de la BnF. Ces crédits sont pour l'essentiel d'ordre bâtimentaire, car le site François-Mitterrand, construit il y a trente ans, est déjà relativement ancien. Ce sont en particulier les salles de conservation qui sont fortement consommatrices. L'ouverture du site d'Amiens en 2029, qui accueillera les archives de la BnF, a été prévue notamment pour répondre à cette problématique.
Monsieur Lurel, en ces temps, les promesses budgétaires n'engagent que ceux qui les écoutent. J'étais présent lorsque la ministre vous a répondu. Mais, mon cher collègue, cet échange date de la semaine dernière. Or c'est ce week-end seulement que nous avons appris que 50 millions d'économies sont désormais à prévoir. Par ailleurs, les crédits du programme de transformation, encore une fois, résultent d'un bricolage - il s'appuyait d'ailleurs largement sur la promesse du numérique, vu comme l'alpha et l'oméga de l'audiovisuel à venir. Certains présidents de structures n'ont même pas été avertis que ces crédits ont été gelés. En tout cas, je vous rejoins sur un point : bien malin celui qui pourra prévoir si ces crédits seront intégralement versés !
Monsieur Bilhac, vous invitez à mettre fin aux coups de rabot. Mais ne disiez-vous pas, hier encore, qu'il fallait faire des économies ?
Monsieur Somon, juste avant la crise sanitaire, dans une volonté de réduire la subvention à l'audiovisuel public, la commission de la culture préconisait de supprimer France 4. Puis, lorsque le confinement a été déclaré, cette même commission a jugé pertinente la création d'une chaîne culturelle en continu - Culturebox -, même si le Président de la République s'est attribué le mérite de cette idée deux jours plus tard. Cette chaîne a très bien fonctionné pendant le covid. Et des années plus tard, plus personne ne souhaite la supprimer, au vu de son succès. Pour autant, ne faisons pas de Culturebox l'arbre qui cache la forêt des 2,7 milliards de financements alloués à France Télévisions.
La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits des missions « Médias, livre et industries culturelles » et « Audiovisuel public ».
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Réunie à nouveau le jeudi 21 novembre 2024, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a procédé à l'examen définitif de l'équilibre, des missions, des budgets annexes, des comptes spéciaux et des articles rattachés de la seconde partie.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Réunie le 30 octobre, la commission des finances a adopté sans modification les crédits des deux missions « Médias, livre et industries culturelles » et « Audiovisuel public ». Nous devrons également nous prononcer sur le compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public », actuellement à zéro euro puisque les crédits dédiés à l'audiovisuel public sont inscrits sur la mission « Audiovisuel public ».
Le rapporteur spécial vous propose tout d'abord un amendement de crédits sur la mission « Médias, livre et industries culturelles ».
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. - Comme je l'avais indiqué lors de l'examen de la mission le 31 octobre, une part importante de la baisse des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » était concentrée sur le fonds de soutien à l'expression radiophonique (FSER). En effet, celui-ci bénéficiait en 2024 de 35 millions d'euros de crédits, ce montant étant étrangement ramené à 25 millions d'euros en 2025.
Le Gouvernement avait déposé à l'Assemblée nationale un amendement visant à abonder ce fonds afin de revenir au niveau de 2024 : si tout porte à croire qu'il va rééditer l'exercice, la confiance n'exclut pas le contrôle et je dépose donc un amendement similaire à celui qui n'a pas pu être examiné à l'Assemblée nationale.
L'amendement II-15 (FINC.6) est adopté.
La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » tels que modifiés par son amendement.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - L'Assemblée nationale a adopté conforme hier la proposition de loi organique permettant de financer l'audiovisuel public par une imposition affectée en 2025. Je déposerai lundi prochain, sur la première partie du PLF, un amendement rétablissant une fraction de TVA. Ce rétablissement tiendra compte d'un effort supplémentaire demandé à l'audiovisuel public.
Cela aura donc une incidence directe sur la mission « Audiovisuel public » et le compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public ».
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. - En effet, l'Assemblée nationale a adopté hier, par un vote conforme à celui de notre assemblée, la proposition de loi organique portant réforme du financement de l'audiovisuel public. Le Gouvernement devra en tirer les conséquences en seconde partie en abondant les crédits du compte de concours financiers. Il conviendra ensuite de rejeter les crédits de la mission « Audiovisuel public », qui a vocation à disparaître.
Je vous propose donc de confirmer l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Audiovisuel public » et l'adoption, sans modification, des crédits du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public », qui est actuellement vide.
La commission a confirmé sa décision de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Audiovisuel public ». Elle a proposé au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public ».
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
Direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC)
- Mme Florence PHILBERT, directrice générale ;
- M. Fabrice DE BATTISTA, chef du département des affaires financières et générales.
Bibliothèque nationale de France
- M. Gilles PÉCOUT, président ;
- Mme Marie DE LAUBIER directrice des collections ;
- Mme Corinne GRANGE, cheffe du service du budget et de la programmation.
Centre national du cinéma et de l'image animée
- M. Olivier HENRARD, directeur général délégué.
France Messagerie
- M. Éric MATTON, directeur général ;
- M. Thomas LIÉBEL, directeur financier.
LA LOI EN CONSTRUCTION
Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :
https://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2025.html
* 1 Loi n° 2023-1195 du 18 décembre 2023 de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.
* 2 Décret n° 2024-124 du 21 février 2024.
* 3 Décret n° 2024-303 du 2 avril 2024.
* 4 Les crédits exceptionnels à la culture et aux industries créatives : des moyens considérables, une logique de guichet, un contrôle insatisfaisant - 2017-2023.
* 5 Vitamine ou morphine ? Quel avenir pour les aides à la presse écrite ?, rapport de Roger KAROUTCHI au nom de la commission des finances, juin 2021.
* 6 Loi du 13 janvier 1957 portant statut de l'AFP.
* 7 Décret n° 2006-1067 du 25 août 2006 pris en application de l'article 80 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, relative à la liberté de communication.
* 8 Arrêté du 16 février 2023 fixant le coefficient majorateur prévu à l'article 5 du décret n° 2006-1067 du 25 août 2006 pris pour l'application de l'article 80 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée relative à la liberté de communication.
* 9 Loi n° 2019-1100 du 30 octobre 2019 relative à la création du Centre national de la musique.
* 10 Les OGC sont des sociétés civiles constituées dans le but de percevoir et de reverser aux auteurs et artistes interprètes adhérents, les droits d'auteur ou droits voisins.
* 11 Articles 220 F et 220 sexies du code général des impôts.
* 12 Articles 220 F et 220 sexies du code général des impôts.
* 13 Articles 220 X et 220 quaterdecies du code général des impôts.
* 14 Article 220 Z bis et terdecies du code général des impôts.
* 15 Itinéraire d'un art gâté : le financement public du cinéma, Roger KAROUTCHI, rapport n° 610 au nom de la commission des finances, mai 2023.
* 16 Observations définitives sur le Centre national du cinéma et de l'image animée - Exercices 2011-2022, Cour des comptes, mai 2023.
* 17 Changer de cap pour renforcer la spécificité, l'efficacité et la puissance du service public, rapport d'information n° 651 (2021 2022) de MM. Roger Karoutchi et Jean-Raymond Hugonet, fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication et de la commission des finance - 8 juin 2022.
* 18 Réforme du financement de l'audiovisuel public, rapport de mission IGAC-IGF, juin 2022.
* 19 Décret n° 2024-124 du 21 février 2024 portant annulation de crédits.
* 20 Cf. infra.
* 21 Avis du 24 juillet 2024 relatif aux projets de contrats d'objectifs et de moyens de France Télévisions, Radio France et France Médias Monde pour la période 2024-2028.
* 22 « L'occasion manquée des COM de l'audiovisuel public : des objectifs modestes et des moyens rationnés », rapport d'information n° 309 (2020-2021) de M. Jean-Raymond HUGONET, fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, déposé le 27 janvier 2021.
* 23 Proposition de loi relative à la réforme de l'audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle, de M. Laurent LAFON et plusieurs de ses collègues, déposée au Sénat le 21 avril 2023.