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Par M.
Gérard BRAUN
au nom de la commission des finances - Sommaire
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C. LA PRÉEMPTION CROISSANTE DE LA CONTRIBUTION COMMUNAUTAIRE
Parallèlement à la chute de l'aide bilatérale, le poids du « multilatéral » se confirme. L'aide française accordée par l'intermédiaire d'organismes ou de fonds multilatéraux progresse en effet de 8,6 milliards de francs (1,31 milliard d'euros) en 1996 à 11,9 milliards de francs (1,81 milliard d'euros) en 2001. De fait, sa part dans le total de l'aide publique passe de 25,9 % en 1996 à 39,8 % en 2001.
Au sein de l'aide multilatérale, la part des contributions aux multiples fonds et banques de développement régionaux demeure relativement stable, aux alentours de 3 milliards de francs (0,5 milliard d'euros).
Les contributions aux organisations des Nations Unies progressent pour leur part de moins de 500 millions de francs (80 millions d'euros), soit moins du cinquième de la progression globale du multilatéral.
L'essentiel de la progression de l'aide multilatérale résulte de celle de l'aide européenne, qui passe de 4,3 milliards de francs à 6,8 milliards de francs entre 1996 et 2001 (0,66 à 1,04 milliard d'euros), soit + 25 % sur la période.
La « contribution européenne » recouvre à la fois la contribution française au Fonds européen de développement (FED) inscrite au budget des Charges communes, et la participation française au budget général de la Communauté européenne pour les actions relevant de l'aide au développement, financée par une partie du prélèvement sur recettes au profit des Communautés européennes 7 ( * ) .
Représentant désormais le quart de l'aide publique française, la contribution européenne échappe par nature à tout contrôle du Parlement français, et manifestement aussi en grande partie à celui du gouvernement.
Or il faut souligner ici le risque fort de dilution de l'aide française dans le « paquet » communautaire .
En 2002, la contribution française atteindra en effet au total 1,2 milliard d'euros, soit 7,9 milliards de francs. Son montant représente désormais le quart du total de l'aide publique française, et les deux tiers de notre aide bilatérale. En 1997, la part de la contribution européenne ne représentait que le sixième (16 %) du total de l'aide publique totale de la France, et à peine plus de la moitié (57,3 %) de son aide multilatérale.
Cette dilution risque d'être renforcée par une volonté politique forte au niveau de la Communauté.
La politique de développement européenne est aujourd'hui influencée par les seuls elit donnors que sont le Royaume-Uni et les pays nordiques, les autres pays membres étant considérés comme menant une « politique de boutique ». La majorité des pays membres ne souhaite en effet pas que les ressources communautaires viennent renforcer l'action bilatérale d'un petit nombre d'entre eux. Moins de la moitié de l'aide communautaire bénéficie d'ailleurs aux pays ACP (y compris l'Afrique du Sud).
Comme par ailleurs la France est insuffisamment présente à Bruxelles sur ces sujets, parce que la capacité d'influence de l'administration française y est faible, et que son niveau d'initiative et de réflexion en matière de développement reste généralement médiocre 8 ( * ) , le résultat est consternant.
La baisse globale de notre niveau d'aide publique au développement se trouve alors démultipliée, en termes de pertes de lisibilité et d'affichage, par l'effet du renforcement du canal communautaire .
L'aide au développement européenne*
- L'aide de la Communauté européenne transite par deux canaux distincts :
le budget de la Commission , financé sur ressources communautaires propres prélevées sur les recettes des pays membres, selon une clé de répartition fixe (la France participe à hauteur de 17,8 % ).
le Fonds européen de développement (FED), instrument financier de la Convention de Lomé, financé par des contributions spécifiques des Etats membres (la contribution française s'élève à 24,5 % ) . La ratification de l'accord de Cotonou permettra l'engagement des ressources du 9 ème Fed (13,5 milliards d'euros au total).
- Le total des dépenses d'aide financées sur le budget communautaire s'est élevé en 1999 à 6,5 milliards d'euros (42,65 milliards de francs) en engagements.
- Les décisions d'engagement au titre du FED ont porté, en 1999, sur 2,69 milliards d'euros (17,6 milliards de francs) et les paiements sur 1,27 milliard d'euros (8,4 milliards de francs).
- En 1999, la répartition sectorielle de l'aide communautaire totale attribuée au titre du budget et du FED (1) s'est établie comme suit :
- Aide programme 11,6 %
(ajustement structurel, Stabex, Sysmin)
- Aide alimentaire 14,1 %
- Aide humanitaire (2) 9,9 %
- Soutien aux ONG 3,3 %
- Ressources naturelles 4,2 %
(agriculture, forêts, pêche)
- Autres secteurs productifs 3,4 %
- Infrastructures économiques et services 20,1 %
dont transport et communication 17,1 %
- Infrastructures sociales et services 11 %
(éducation, santé, population, eau)
- gouvernement et société civile 7,7 %
- multisecteurs 6,3 %
- non spécifié 8,1 %
- La répartition géographique se définit comme suit :
- Pays ACP y compris Afrique du Sud 41,6 %
- Méditerranée et Moyen Orient (3) 13,2 %
- Asie 6,2 %
- Amérique latine (4) 5,4 %
- NEI (nouveaux Etats indépendants de 10,3 %
l'ancienne Union soviétique) (5)
- PECO (Europe centrale et orientale, 23,4 %
y compris ex-Yougoslavie) (6)
(1) Hors PECO et secteurs non attribués
(2) Via ECHO
(3) Programmes MEDA.
(4) Programmes ALA.
(5) Programme TACIS
(6) Programme PHARE
- D'après les chiffres établis par le CAD, les dix premiers pays bénéficiaires de l'aide communautaire sont les suivants :
- Maroc
- Egypte
- Bosnie-Hergézovine
- Etats de l'ex-Yougoslavie
- Algérie
- Tunisie
- Afrique du Sud
- Ethiopie
- Albanie
- Mozambique
* Source : Infofinance - février 2001. DE 107. Commission européenne et Rapport annuel du CAD de l'OCDE - juin 2001.
* 7 La quote-part française au FED -24,3 %- est très supérieure à la contribution au budget de l'Union -17 %-. Mais c'est le prix qu'il a fallu payer pour obtenir l'augmentation du FED en 1995.
* 8 On évoquera ici le contre-exemple de l'administration centrale britannique, qui a envoyé à 50 de ses fonctionnaires à Bruxelles une note intitulée « Comment influencer l'aide européenne », accompagnée de demandes de renseignements et de propositions...