II. L'APPROVISIONNEMENT EN DISPOSITIFS MÉDICAUX

A. DES DIFFICULTÉS D'APPROVISIONNEMENT GRANDISSANTES

Le cadre juridique applicable aux dispositifs médicaux (DM) et aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro (DMDIV) a été profondément renouvelé par l'entrée en vigueur de deux nouveaux règlements européens en 2017. Ceux-ci ont notamment cherché à renforcer la sécurité des patients et la transparence du marché en :

- étendant les obligations applicables aux fabricants, exploitants, distributeurs et organismes certifiés, ces derniers étant chargés d'octroyer les marquages « CE » attestant de la conformité des dispositifs à la réglementation et permettant leur commercialisation ;

- créant une nouvelle base de données européenne Eudamed rassemblant les informations relatives aux DM et DMDIV commercialisés dans l'Union.

En application de ces règlements, les dispositifs précédemment certifiés doivent obtenir un nouveau marquage CE, à l'issue d'une période transitoire. Plusieurs textes postérieurs ont allongé cette période, afin de tenir compte de l'engorgement observé et du risque que des exploitants choisissent de renoncer à la commercialisation de certains de leurs dispositifs.

Ces difficultés ont contribué à alimenter, ces dernières années, les craintes relatives à l'approvisionnement en DM et DMDIV. En France, le nombre de ruptures signalées à l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a considérablement augmenté depuis la crise sanitaire.

Nombre de signalements de ruptures de DM et DMDIV adressées à l'ANSM

Source : données transmises par l'Agence nationale de sécurité du médicament

Les ruptures signalées apparaissent multifactorielles et touchent une grande diversité de dispositifs. Selon l'ANSM, 37 % d'entre elles seraient dues à des difficultés d'approvisionnement et 28 % à un arrêt de commercialisation. Les ruptures signalées concernent l'ensemble des aires thérapeutiques et peuvent toucher des dispositifs indispensables à la prise en charge des patients - canules veineuses, pousses-seringues, etc.

B. UN RENFORCEMENT NÉCESSAIRE DES OUTILS DE SÉCURISATION DE L'APPROVISIONNEMENT EN FRANCE ET EN EUROPE

En réponse à ces difficultés, la France et l'Union européenne ont progressivement mis en place des outils de sécurisation de l'approvisionnement ces dernières années.

L'ANSM a établi, depuis 2021, une procédure de gestion anticipée des ruptures et risques de ruptures, impliquant les opérateurs dans l'évaluation et la maîtrise des risques associés.

Par ailleurs et à l'initiative du Sénat, le législateur a, en 2023, introduit des procédures de gestion de l'indisponibilité des DM ou DMDIV. Celles-ci font notamment obligation aux exploitants identifiant un risque d'agir pour éviter sa réalisation et d'informer l'ANSM de l'existence de ce risque, sous peine de sanction financière. Les actes réglementaires nécessaires à l'application de ces dispositions n'ayant pas été pris, celles-ci sont toutefois demeurées inappliquées.

La loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2025 a, en outre, porté des dispositions visant à permettre l'identification et la prise en charge de DM alternatifs en cas de rupture.

Enfin, un règlement européen de 2024 a étendu le dispositif Eudamed en faisant obligation :

- aux fabricants anticipant une interruption ou une cessation d'approvisionnement susceptible d'entraîner un préjudice grave pour les patients ou la santé publique, d'informer l'autorité nationale compétente, ainsi que les opérateurs économiques, les établissements et professionnels de santé auxquels ils fournissent directement le dispositif ;

- à l'autorité nationale compétente, d'informer ses homologues européens et la Commission ;

- aux opérateurs économiques ayant reçu l'information, d'informer tout autre opérateur, établissement ou professionnel de santé auxquels ils fournissent directement le dispositif.

L'article 41 du présent projet de loi tire les conséquences de ce règlement en droit national en soumettant à des sanctions financières les fabricants ou opérateurs économiques qui ne respecteraient pas leurs obligations déclaratives. Il permet, en outre, à l'ANSM de prendre, dans de telles circonstances, des mesures de police sanitaire strictement nécessaires et proportionnées afin d'assurer la continuité des prises en charge en :

- publiant sur son site internet les informations relatives aux interruptions ou cessations d'approvisionnement ;

- émettant des recommandations à destination des professionnels et des patients ;

- soumettant à des conditions particulières, restreignant ou suspendant l'exploitation, l'exportation, la distribution en gros, le conditionnement, la mise sur le marché, la détention, la publicité, la mise en service, la prescription, la délivrance ou l'utilisation du dispositif.

La commission a soutenu sans réserve ces dispositions, rapprochant les prérogatives de l'ANSM en matière de dispositifs médicaux de celles dont dispose l'agence pour lutter contre les pénuries de médicaments.

Réunie le mardi 4 mars 2025 sous la présidence de Philippe Mouiller, la commission des affaires sociales propose d'adopter, avec des modifications rédactionnelles et de coordination, les articles 40 et 41.

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