CHAPITRE III
UNE POLITIQUE DE SANCTIONS INUTILE ET INEFFICACE
I. LES SANCTIONS, L'EMBARGO ET SON CONTOURNEMENT
En ce qui concerne l'analyse du mécanisme et des effets des différents régimes de sanctions imposées en application du chapitre VII de la Charte des nations Unies, votre groupe d'amitié renvoie à l'excellent rapport de notre collègue député René Mangin, qui a publié récemment un rapport intitulé « ONU : les sanctions en question ». (AN 2001 n°3203 quinzième législature).
II. LE PROGRAMME PÉTROLE CONTRE NOURRITURE
Immédiatement après la guerre du Golfe en 1991,
l'Organisation des Nations Unies avait dépêché en Iraq une
mission qui a annoncé une catastrophe imminente au cas où les
besoins humanitaires vitaux ne seraient pas rapidement satisfaits. Dès
août 1991, le Conseil de sécurité avait proposé
l'idée de base du programme pétrole contre nourriture dans un
souci d'éviter la catastrophe humanitaire identifiée clairement.
Ce n'est cependant que cinq ans plus tard, en 1996, que le Gouvernement
iraquien et le Secrétariat de l'Organisation des Nations Unies ont
signé un mémorandum d'accord précisant les conditions
d'application de la résolution 986 (1995), adoptée 13 mois
auparavant par le Conseil de sécurité. Cette résolution
fixait les modalités du programme pétrole contre vivres.
Ce programme pétrole contre vivres a toujours été
conçu comme une mesure temporaire dont le terme serait
déterminé par l'application des résolutions notamment la
résolution 687 (1991) du 3 avril 1991.
L'accord de 1996
permettait à l'Iraq de vendre du pétrole
d'une valeur allant jusqu'à 2 milliards de dollars au cours d'une
période de 180 jours. Le plafond pour les ventes de pétrole a
été réduit en 1998 et finalement supprimé en 1999,
permettant ainsi au programme d'être centré non seulement sur
l'achat de denrées alimentaires et de médicaments, mais
également sur la réparation des infrastructures essentielles, y
compris celles de l'industrie pétrolière.
Il convient de rappeler qu'avec l'adoption de la résolution 1330 (2000)
du Conseil de sécurité, le 5 décembre 2000, ce sont
quelques 72 % des recettes pétrolières qui financent le programme
humanitaire en Iraq (59 % allant aux gouvernorats du centre et du sud et 13 %
aux trois gouvernorats du nord). Les sommes restantes sont ainsi
réparties :
• 25 % vont à la Commission d'indemnisation à Genève,
• 2,2 % couvrent les dépenses engagées par l'Organisation
des Nations Unies pour gérer le programme,
• 0,8 % vont à l'administration de la Commission de contrôle,
de vérification et d'inspection des Nations Unies.
Auparavant, seulement 66 % étaient affectés au programme
humanitaire (53 % allant aux gouvernorats du centre et du sud et 13 % aux trois
gouvernorats du nord), la Commission d'indemnisation recevant 30 % des
recettes.
Outre les dépenses alimentaires, les fonds prélevés sur
les deux comptes humanitaires servent à financer l'achat de
matériel et de pièces de rechange destinés à
l'industrie pétrolière. Le Gouvernement iraquien est responsable
de l'achat et de la distribution des fournitures dans les 15 gouvernorats du
centre et du sud. L'Organisation des Nations Unies exécute les
programmes dans les trois gouvernorats du nord de Dahouk, Soulaïmaniyah et
Erbil pour le compte du Gouvernement iraquien.
4(
*
)
Depuis que le premier lot de denrées alimentaires est arrivé en
mars 1997, des denrées d'une valeur de 7,5 milliards de dollars et des
fournitures médicales d'une valeur de 1,4 milliard de dollars sont
arrivées en Iraq.
En avril 1998, le Conseil de sécurité a approuvé une
recommandation du Secrétaire général visant à
relever le plafond des ventes de pétrole de 2 milliards de dollars
à 5 milliards 265 millions de dollars, ce qui donnait 3,4 milliards de
dollars pour un programme humanitaire plus large.
Tous les contrats signés par le Gouvernement sont envoyés au
Bureau chargé du Programme Iraq à New York pour être
traités et, dans la plupart des cas, soumis pour examen au Comité
des sanctions créé par la résolution 661. Certains
contrats peuvent désormais être approuvés par le
Secrétariat de l'ONU sur la base des listes approuvées par le
Comité dans le cadre de la «procédure de la voie rapide
». A dater du 31 août 2001, le Bureau chargé du Programme
Iraq avait reçu des contrats d'une valeur de plus de 33.7 milliards de
dollars, dont 27.8 milliards de dollars ont été approuvés
et 3,75 milliards de dollars mis en attente. Des fournitures humanitaires et du
matériel destiné à l'industrie pétrolière
d'une valeur de 15.4 milliards de dollars ont été livrés
au centre et au sud de l'Iraq.
Chiffres de base (source ONU)
Les premières exportations de pétrole au titre du programme
« pétrole contre nourriture » ont quitté
l'Iraq le 10 décembre 1996. Pour les trois premières phases de
180 jours chacune, le Conseil de sécurité a fixé un
plafond de 2 milliards de dollars pour la valeur du pétrole devant
être exporté. Pour les phases IV et V le plafond a
été porté à 5,2 milliards, mais le faible prix du
pétrole et la situation de l'industrie pétrolière
iraquienne ont empêché d'atteindre ce montant. Pour la phase VI,
le Conseil de sécurité a reconnu les déficiences
précédentes et a autorisé l'Iraq à exporter 3
milliards de dollars de pétrole en plus et pour la phase VII, a
éliminé complètement le plafond.
Exportations de pétrole de décembre 1996 au 25 janvier 2002
Phases I à X |
Volume
de pétrole
|
Valeur
du pétrole exporté
|
Une |
120,0 |
2 150 |
Deux |
127,0 |
2 125 |
Trois |
182,0 |
2 085 |
Quatre |
308,0 |
3 027 |
Cinq |
360,8 |
3 947 |
Six |
389,6 |
7 402 |
Sept |
343,4 |
8 302 |
Huit |
375,7 |
9 564 |
Total ou moyenne |
2 206,5 |
$38 602 |
Phase |
Volume
de pétrole
|
Valeur
du pétrole exporté
|
Neuf |
293 |
6 668 (ou $5 638) |
Dix |
300,2 |
6 004 (ou $5 350 ) |
Onze |
78,5 |
1 359(ou $1 177 ) |
Total ou moyenne |
2 878 |
€14 031 (ou $12 165) |
L'objectif principal du Programme a été de fournir à
l'Iraq des denrées alimentaires et des fournitures médicales en
quantité suffisante. À compter de la phase IV, les pièces
de rechange et le matériel destinés au secteur pétrolier
ont également été considérés comme
prioritaires afin de permettre à l'Iraq de continuer à exporter
du pétrole et même d'augmenter ses exportations, le Conseil de
sécurité ayant autorisé ce dernier à importer, dans
un premier temps, jusqu'à 300 millions de dollars puis jusqu'à
600 millions de dollars de matériel grâce aux revenus provenant
des ventes effectuées lors de chaque phase.
Situation au 30 novembre 2001
Phase I - X |
Contrats reçus |
Contrats approuvés par le Conseil de Sécurité |
Contrats notifiés par la procédure accélérée |
Contrats en attente |
Chargement arrivé |
||||
Nombre |
en million de dollars |
Nombre |
en million de dollars |
Nombre |
en million de dollars |
Nombre |
en million de dollars |
en million de dollars |
|
Alimentation* |
3 355 |
$10 963 |
1 364 |
$5 782 |
1 679 |
$5 177 |
0 |
$0 |
$8 167,5 |
Traitement des aliments |
1 489 |
$3 131 |
953 |
$2 269 |
167 |
$131 |
121 |
$426 |
$1 097,3 |
Santé* |
3 492 |
$2 891 |
2 028 |
$1 704 |
839 |
$583 |
186 |
$409 |
$1 532,1 |
Pièces détachées du secteur pétrolier |
4 956 |
$3 772 |
2 958 |
$1 802 |
895 |
$841 |
562 |
$577 |
$1 019,2 |
Électricité |
1 856 |
$3 978 |
1 510 |
$2 597 |
2 |
$9,5 |
157 |
$1 160 |
$1 211,3 |
Eau/assainissement |
856 |
$1 956 |
586 |
$1 227 |
29 |
$114 |
127 |
$529 |
$797,9 |
Agriculture |
1 826 |
$3 337 |
1 120 |
$2 256 |
186 |
$290 |
213 |
$490 |
$1 380,3 |
Enseignement |
679 |
$1 007 |
377 |
$559 |
67 |
$167 |
106 |
$209 |
$267,7 |
Transport/ Télécommunication |
764 |
$2 018 |
543 |
$1 413 |
0 |
$0 |
107 |
$370 |
$326,2 |
Logement |
1 061 |
$2 429 |
671 |
$1 890 |
98 |
$306 |
91 |
$156 |
$755,6 |
Allocations speciales |
33 |
$399 |
1 |
$8 |
0 |
0 |
5 |
$45 |
0 |
Les gouvernorats du nord |
4 831 |
$1 256 |
4 126 |
$1 138 |
329 |
$92 |
2 |
$0,3 |
**$990.6 |
Total |
25 198 |
$37 137 |
16 237 |
$22 645 |
4 291 |
$7 711 |
1 677 |
$4 371 |
$17 546 |
*
Comprend les fournitures pour les secteurs de l'alimentation et de la
santé achetées en vrac par le Gouvernement iraquien pour les
trois gouvernorats du nord
** Ne comprend pas les fournitures pour les
secteurs de l'alimentation et de la santé achetées en vrac par le
Gouvernement iraquien pour l'ensemble du pays.