Mme Nathalie Goulet. Nous entrons, à une heure tardive – je le déplore ! – dans le tunnel des amendements antifraude. (Sourires.)
Cet amendement vise à compléter l’article L. 114-14 du code de la sécurité sociale en incluant les agents consulaires parmi les bénéficiaires possibles du droit de communication qui vient d’être évoqué.
Vous le savez, j’exerce au sein de la commission des finances les fonctions de rapporteur spécial sur les crédits de la mission budgétaire « Action extérieure de l’État ». Les agents du service du ministère des affaires étrangères chargés de la fraude seraient absolument ravis d’être associés au dispositif et d'obtenir communication d’un certain nombre d’éléments.
Prenons un exemple concret. Les personnes qui demandent un visa pour la France doivent apporter des preuves de leur solvabilité et de leur hébergement dans notre pays. Or il arrive que, une fois arrivées en France, ces personnes fassent des demandes de prestation, voire de logement, ce qui ne devrait pas être le cas au regard des facultés contributives dont elles ont justifié pour obtenir un visa… Aussi nos services consulaires se demandent-ils pourquoi ils ne sont pas plus souvent consultés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous connaissons l’engagement de Nathalie Goulet en matière de traque de la fraude.
Comme cela a été rappelé, l’article 8 quater étend le droit de communication des directeurs comptables et financiers des Urssaf et des agents placés sous leur autorité à l’ensemble des actions de contrôle et de lutte contre la fraude, ce qui est déjà une avancée importante.
Notre collègue propose d’inclure les agents consulaires dans le dispositif. En réalité, cette demande est satisfaite. En effet, l’article L. 114-11 du code de la sécurité sociale dispose que, dans leurs missions respectives, les organismes de sécurité sociale et les services de l’État chargés des affaires consulaires se communiquent toutes les informations utiles à l’appréciation et au contrôle des prestations et des aides versées.
Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis de la commission serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre. Je salue à mon tour l’action de Mme la sénatrice Goulet dans la lutte contre la fraude.
En l’espèce, son amendement est satisfait : j’émettrai donc le même avis que Mme la rapporteure générale.
Le droit en vigueur prévoit bien un cadre juridique d’échange de données entre les organismes de sécurité sociale et les autorités consulaires, ce qui permet notamment de communiquer des informations liées à l’appréciation et au contrôle des conditions d’ouverture ou de service des prestations et des aides versées, ainsi qu’au recouvrement des créances détenues.
Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
Mme Nathalie Goulet. Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 104 rectifié est retiré.
Article 8 quinquies (nouveau)
I. – Le I de l’article L. 613-6-1 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À la fin du second alinéa, les mots : « et à l’article 1447 du même code » sont remplacés par les mots : « , aux articles 150 VI et 1447 du même code et au chapitre Ier du titre VII du livre IV du code des impositions sur les biens et services » ;
2° Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« Le présent article n’est applicable aux vendeurs, aux prestataires et aux opérateurs de plateforme mentionnés au premier alinéa qu’à l’expiration d’un délai à compter du début ou de la reprise d’activité sur une plateforme qui est défini par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale.
« Lorsque le vendeur ou le prestataire est redevable des taxes mentionnées au chapitre Ier du titre II de la première partie du livre Ier du code général des impôts au titre du chiffre d’affaires ou des recettes réalisés par l’intermédiaire d’une plateforme mentionnée au premier alinéa du présent article, l’organisme mentionné à l’article L. 213-1 du présent code régularise auprès du vendeur ou du prestataire le montant prélevé au premier alinéa du présent article. Un décret prévoit les conditions et modalités de cette régularisation. »
II. – Le B du II de l’article 6 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024 est ainsi modifié :
1° Après le mot : « plateforme », la fin de la deuxième phrase est ainsi rédigée : « volontaires selon des modalités prévues par décret. » ;
2° La dernière phrase est ainsi rédigée : « Les conditions dans lesquelles les plateformes se portent volontaires et la liste des plateformes concernées sont fixées par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale. »
M. le président. L’amendement n° 361 rectifié, présenté par Mmes Puissat et Lassarade, MM. Michallet et Savin, Mme Lavarde, MM. Daubresse et Somon, Mme de La Provôté, M. Panunzi, Mme Berthet, M. Sol, Mmes Micouleau, M. Mercier, Gosselin et Schalck, M. Henno, Mme Muller-Bronn, M. Duffourg, Mme Goy-Chavent, M. Gremillet, Mme Evren, MM. C. Vial et Belin, Mme Dumont, M. Bruyen, Mme Bourcier, M. J.B. Blanc, Mmes Valente Le Hir et Petrus, MM. Mandelli, Hingray, Genet et Lefèvre, Mme Gruny, MM. Brisson, Cambon et Piednoir et Mmes Billon, Belrhiti et P. Martin, est ainsi libellé :
Avant l’alinéa 1er
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – À l’article L. 613-6 du code de la sécurité sociale, après le mot : « impôts », sont insérés les mots : « qui entrent dans le champ d’application de l’article L. 7342-1 du code du travail ».
La parole est à Mme Frédérique Puissat.
Mme Frédérique Puissat. S’ils sont votés, cet article et cet amendement devraient simplifier la vie de nombreuses entreprises dans notre pays.
L’article 6 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 a prévu l’obligation pour les plateformes numériques de collecter et de verser les cotisations sociales des microentrepreneurs utilisateurs des plateformes par un calcul et un prélèvement directs des cotisations dues.
L’objectif était louable et la mesure demandée en particulier par les plateformes intervenant dans les secteurs des véhicules de transport avec chauffeur (VTC), de la livraison et de l’emploi, pour lesquelles l’enjeu est en effet bien réel.
Malheureusement, la disposition a été appliquée à toutes les plateformes, y compris à celles qui, en règle générale, traitent très peu avec les autoentrepreneurs.
Prenons par exemple, sans faire de publicité, la plateforme Le Bon Coin, dont 99 % des utilisateurs sont des particuliers.
À l’heure actuelle, les autoentrepreneurs qui utilisent cette plateforme tiennent une comptabilité et paient chaque trimestre leurs cotisations à l’Urssaf.
Si l’amendement que je propose n’est pas voté, non seulement ces professionnels devront tenir une double comptabilité, ce qui en soi est déjà compliqué, mais encore la vente d’un article au prix de 100 euros ne donnera-t-elle pas lieu à un paiement direct de 100 euros : en raison du précompte qui sera établi par l’Urssaf, l’autoentrepreneur sera rémunéré 87 euros. Or le risque existe que le produit ne fonctionne pas, qu’il faille le renvoyer, que la transaction fasse l’objet de multiples contentieux.
Au bout du compte, on complique la vie de l’Urssaf et des plateformes.
Monsieur le ministre, c’est sur l’initiative du Gouvernement que l’article 8 quinquies a été introduit à l’Assemblée nationale puis maintenu dans le PLFSS pour 2025.
Vous n’ignorez donc rien du problème, qui inquiète grandement les administrations. Nous pouvons le résoudre très simplement : conservons le schéma actuel, qui permet de payer les cotisations de façon très simple.
M. Laurent Duplomb. Bravo !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je remercie Frédérique Puissat d’appeler notre attention sur le désordre que cette disposition votée l’année dernière a pu créer.
Selon l’étude d’impact du PLFSS pour 2024, 69 % des microentrepreneurs utilisateurs de plateformes déclareraient à l’Urssaf des chiffres d’affaires inférieurs à ceux qui sont réellement enregistrés, et 55 % d’entre eux ne déclaraient rien du tout. (M. Michel Savin s’exclame.)
M. André Reichardt. Ce n’est pas bien !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Les cotisations ainsi éludées s’élèveraient à 144 millions d’euros en 2021 et à 175 millions d’euros en 2022. Ces montants sont considérables !
L’article 8 quinquies du présent projet de loi a justement pour objet de préciser le dispositif mis en place par le précédent PLFSS.
Le dispositif ainsi modifié doit entrer en vigueur à titre expérimental le 1er janvier 2026. Il s’agit de vérifier son caractère opérationnel avant une éventuelle généralisation qui interviendra à compter du 1er janvier 2027, assortie des corrections qui s’imposeront.
Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre. Si j’en comprends l’objectif, cet amendement me paraît un peu disproportionné : vous proposez en définitive, madame la sénatrice, de priver les utilisateurs qui n’interviennent pas sur une plateforme d’emploi de cette mesure de simplification.
Je suis par ailleurs sensible à l’argument de Mme la rapporteure générale.
Pour ces raisons, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.
Si toutefois cet amendement devait être adopté, nous pourrions le retravailler d’ici à la réunion de la commission mixte paritaire (CMP).
M. Laurent Duplomb. Pourquoi alors ne pas émettre un avis de sagesse ?
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Nous avons tous entendu M. le ministre : le travail reste à faire.
M. le président. Madame Puissat, l’amendement n° 361 rectifié est-il maintenu ?
Mme Frédérique Puissat. Oui, monsieur le président. Maintenons-le et discutons-le en commission mixte paritaire ; ainsi aurons-nous l’occasion de le retravailler.
M. Laurent Duplomb. Nous allons le voter, pas d’inquiétude !
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.
Mme Monique Lubin. Je ne suis pas une spécialiste du sujet, mais j’ignorais que quand on vend un produit à 100 euros sur Le Bon Coin on paie des cotisations à l’Urssaf ;…
Mme Frédérique Puissat. Quand on n’est pas un particulier !
Mme Monique Lubin. … à moins que l’on ne parle ici d’autoentrepreneurs qui passent par des plateformes ? (Mme Frédérique Puissat le confirme.)
Quoi qu’il en soit, j’ai tendance à considérer que nous devons habituer les autoentrepreneurs à verser des cotisations.
Mme Frédérique Puissat. Ils le font déjà !
Mme Monique Lubin. Certes ! Néanmoins, il ne me semble pas opportun, d’une manière générale, d’adopter des dispositions visant à simplifier un système qui a été mis en place récemment et dont l’objectif est plutôt vertueux. Je pencherais pour que nous n’adoptions pas cet amendement.
Mme Frédérique Puissat. Mais, en l’espèce, on a complexifié !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 361 rectifié.
(L’amendement est adopté.) – (Mme Florence Lassarade applaudit.)
M. le président. L’amendement n° 844, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, est ainsi libellé :
Alinéas 6 à 8
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. J’ignorais que la CMP avait pour vocation de raccourcir les débats en séance… (Sourires.)
Issu d’un amendement du Gouvernement adopté par l’Assemblée nationale, le présent article modifie les dispositions de l’article 6 du PLFSS pour 2024 visant à réformer la collecte des cotisations sociales des microentrepreneurs des plateformes numériques.
L’enjeu est en effet important : la sous-déclaration des revenus générés par ces activités a été soulignée, dans une note de décembre 2022, par le Haut Conseil du financement de la protection sociale, qui relevait un manque à gagner de près de 200 millions d’euros pour le financement de la sécurité sociale.
Au-delà de l’aspect financier, la réduction ou la dissimulation des revenus déclarés réduit les cotisations sociales versées et par conséquent – c’est pour moi le plus important – les droits sociaux des travailleurs.
En effet, dans cette configuration, ces derniers ne peuvent prétendre en totalité ni aux indemnités journalières auxquels ils auraient droit, ni à leur pension de retraite, ni encore à une protection efficace contre les accidents du travail, un risque auquel les livreurs sont particulièrement exposés.
Si nous partageons l’ambition du présent article, limiter le dispositif aux seules plateformes volontaires nous paraît néanmoins contradictoire avec l’objectif affiché d’amélioration du recouvrement des cotisations auprès des travailleurs indépendants et des travailleurs des plateformes – au reste, l’apparition du terme « volontaire » dans un texte de loi n’est jamais bon signe…
En effet, cette restriction ne fera que minorer les possibilités de recouvrement des manques à gagner dus aux fraudes et limitera le nombre de travailleurs pouvant prétendre à des droits contributifs complets.
L’intérêt des plateformes ne doit pas primer sur la solidarité nationale ni sur l’intérêt des travailleurs desdites plateformes.
Pour toutes ces raisons, le présent amendement tend à supprimer la restriction du dispositif aux seules « plateformes volontaires ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Lorsque l’on conduit une expérimentation, il est toujours utile de prévoir une possibilité de correction du dispositif avant d’en généraliser l’application.
Telle est la méthode que nous avions employée pour un dispositif de plus grande ampleur, celui du RSA : les départements participant à l’expérimentation avaient pu y apporter des correctifs.
Je me souviens des travaux que nous avions menés à ce sujet avec Martin Hirsch : une évaluation très précise du dispositif avait permis à tous les départements, au moment de la généralisation, de profiter de l’expérience de ceux qui avaient « essuyé les plâtres ».
En l’espèce, si nous voulons apporter une réponse ciblée et prévenir les dysfonctionnements, il me semble intéressant de faire appel à quelques plateformes volontaires, qui auront le dynamisme et l’envie nécessaires. En outre, les plateformes volontaires ne se trouveront pas parmi celles qui rechignent à déclarer leur chiffre d’affaires.
Par principe, je suis donc plutôt défavorable à cet amendement : l’expérimentation, selon moi, c’est la correction utile.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 8 quinquies, modifié.
(L’article 8 quinquies est adopté.)
Après l’article 8 quinquies
M. le président. L’amendement n° 15 rectifié, présenté par Mme N. Goulet, MM. Canévet, Kern, Henno, Laugier, Longeot et S. Demilly, Mme Saint-Pé, M. Bitz, Mme Sollogoub, MM. Bonneau et Lafon, Mme Perrot, MM. Levi et Delahaye, Mmes Jacquemet et O. Richard, MM. Pillefer, Menonville, Maurey et Courtial et Mmes Romagny et Antoine, est ainsi libellé :
Après l’article 8 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 111-2 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 111-2-… ainsi rédigé :
« Art. L. 111-2-…- Au sens du présent code, la résidence principale d’une personne doit être justifiée dans des conditions fixées par décret.
« L’élection de domicile ne vaut pas résidence. »
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, si vous me le permettez, je présenterai en même temps les amendements nos 15 rectifié et 105 rectifié.
M. le président. J’appelle donc en discussion l’amendement n° 105 rectifié, présenté par Mme N. Goulet, MM. Canévet, Kern, Henno, Laugier, Longeot et S. Demilly, Mme Saint-Pé, M. Bitz, Mme Sollogoub, MM. Bonneau et Lafon, Mme Perrot, MM. Levi et Delahaye, Mmes Jacquemet et O. Richard, MM. Pillefer, Menonville, Maurey et Courtial et Mmes Romagny et Antoine, et ainsi libellé :
Après l’article 8 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 114-9 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les contrôles réalisés par une caisse de même que leurs résultats sont opposables sur l’ensemble des risques. »
Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
Mme Nathalie Goulet. Il s’agit, par l’amendement n° 15 rectifié, de répondre à un problème soulevé par nos administrations consulaires, qui ne comprennent pas comment une simple élection de domicile peut constituer une résidence. Si un sans domicile fixe peut tout à fait être domicilié dans un centre communal d’action sociale (CCAS), une famille avec enfants ne peut pas l’être. Certains voient dans cette pratique une source de fraude à la résidence ; d’où la nécessité de bien définir la notion de résidence.
Par l’amendement n° 105 rectifié, il s’agit de considérer que les contrôles réalisés par une caisse, de même que leurs résultats, sont opposables sur l’ensemble des risques. Cette mesure correspond aux recommandations nos 55 et 56 du rapport intitulé Lutte contre la fraude sociale : état des lieux et enjeux remis au mois de juillet 2024 par le HCFiPS.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Le versement de certaines prestations sociales est en effet soumis à la condition de résidence sur le territoire français.
L’amendement n° 15 rectifié est toutefois satisfait par le droit en vigueur, dans la mesure où l’article R. 111-2 du code de la sécurité sociale, de niveau réglementaire, définit la notion de résidence stable et régulière.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.
Pour ce qui concerne l’amendement n° 105 rectifié, je comprends tout à fait la volonté de permettre à un organisme de sécurité sociale ayant réalisé un contrôle de transmettre ses conclusions à un organisme couvrant un autre risque.
Le dispositif proposé me semble toutefois inopérant : avis défavorable.
Il conviendra néanmoins de reprendre et d’approfondir la réflexion sur ce sujet. Monsieur le ministre, si vous y êtes disposé, je ne saurais trop vous conseiller de travailler avec Nathalie Goulet, qui est une véritable chercheuse de fraude !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre. Même avis, pour les mêmes raisons.
Je travaillerai volontiers avec Mme Goulet sur ces sujets.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, je retire l’amendement n° 15 rectifié, mais je maintiens l’amendement n° 105 rectifié, qui reprend exactement la rédaction retenue par le HCFiPS !
M. le président. L’amendement n° 15 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 105 rectifié.
(L’amendement est adopté.) – (Applaudissements sur des travées du groupe UC.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 8 quinquies.
L’amendement n° 1236 rectifié bis, présenté par Mme Nadille, MM. Théophile, Iacovelli, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Kulimoetoke, Lemoyne, Lévrier, Omar Oili, Patient et Patriat, Mme Phinera-Horth, M. Rambaud, Mme Ramia, M. Rohfritsch, Mme Schillinger et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Après l’article 8 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le septième alinéa de l’article L. 323-6 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de fraude avérée commise par le bénéficiaire liée à la délivrance d’un arrêt de travail par une personne autre qu’un médecin ou une sage-femme mentionnés à l’article L. 321-1 ou au non-respect, par l’assuré, de l’interdiction d’exercer une activité non autorisée prévue au 4° du présent article, la caisse informe son employeur de la fraude constatée. Les données et pièces justificatives pouvant être transmises dans le cadre de cette information ainsi que les modalités et délais de transmission sont déterminés par décret en Conseil d’État. »
La parole est à Mme Solanges Nadille.
Mme Solanges Nadille. Dans une perspective de lutte contre la fraude, cet amendement du groupe RDPI tend à prévoir, en cas de fraude avérée d’un salarié, la communication par l’assurance maladie des informations relatives à cette fraude à l’employeur de l’assuré concerné.
Ainsi, sur le fondement de cette disposition légale, en cas de délivrance frauduleuse d’un arrêt de travail ou d’exercice d’une activité non autorisée pendant l’arrêt maladie, la caisse primaire d’assurance maladie constatant la fraude serait habilitée à porter cette information à la connaissance de l’employeur.
In fine, la communication d’une telle information pourrait justifier, selon la nature de la fraude, une éventuelle sanction disciplinaire de l’assuré par l’employeur.
L’objectif est de désinciter les salariés à recourir à de faux arrêts de travail pour justifier leur absence.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je partage l’objectif de lutte contre la fraude, notamment contre la fraude aux arrêts de travail – on sait que lesdits arrêts se multiplient ces derniers temps.
Notre collègue Anne-Sophie Romagny nous a ainsi alertés – nous y étions déjà très sensibles – sur la facilité avec laquelle il est possible d’obtenir sur internet un arrêt de travail pour 9 euros, sans même que le médecin concerné sache qu’il en est signataire. Nous devrons étudier ce dossier avec précision.
Toutefois, le dispositif proposé au travers de cet amendement me semble restrictif, en ce qu’il vise uniquement les arrêts de travail qui ne seraient pas délivrés par un médecin ou une sage-femme.
Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre. Cet amendement va dans le bon sens, celui de la délivrance d’une information nécessaire à l’employeur : avis favorable.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. L’employeur qui prendrait une sanction disciplinaire sur la base d’une information extérieure transmise par une caisse d’assurance maladie enfreindrait selon moi le droit du travail.
Par cette disposition, vous conduiriez les employeurs qui seraient tentés par vos recommandations devant les prud’hommes, où ils perdraient. (M. Olivier Rietmann s’exclame.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1236 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 374 rectifié bis est présenté par MM. Henno et Vanlerenberghe et Mmes Guidez, Sollogoub, Devésa et Romagny.
L’amendement n° 449 rectifié est présenté par Mme N. Goulet, M. Canévet, Mmes Saint-Pé, Sollogoub, Perrot, Jacquemet et O. Richard, MM. Cambier, Pillefer et Folliot, Mme Patru, MM. Delcros, Courtial et Capo-Canellas et Mmes Billon, Romagny et Antoine.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 8 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’avant-dernier alinéa de l’article L. 114-9 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque les investigations prévues au présent article concluent à la fraude d’un assuré au titre d’allocations journalières versées en cas d’incapacité physique de continuer ou de reprendre le travail, les organismes visés au premier alinéa transmettent à l’employeur de l’assuré concerné tous renseignements et tous documents utiles pour caractériser ladite fraude. Cette information est réalisée par tout moyen permettant de garantir sa bonne réception par l’employeur. »
La parole est à M. Olivier Henno, pour présenter l’amendement n° 374 rectifié bis.
M. Olivier Henno. Par cet amendement, il s’agit non pas de voler la vedette à Nathalie Goulet sur le thème de la fraude (Sourires.), mais de faire évoluer l’article L. 114-9 du code de la sécurité sociale, afin de faciliter la circulation de l’information et la caractérisation de ladite fraude, pour ce qui concerne notamment les indemnités journalières.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour présenter l’amendement n° 449 rectifié.
Mme Nathalie Goulet. Il est défendu !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La fraude aux arrêts de travail est un phénomène qui prend de l’ampleur.
En 2023, les faux arrêts de travail ont ainsi représenté un préjudice de 7,7 millions d’euros pour l’assurance maladie, contre 5 millions d’euros en 2022.
Si nos discussions portaient jusqu’à présent sur les recettes, il s’agit ici de mieux dépenser, car un euro dépensé dans la lutte contre la fraude est un euro utile.
La fraude aux arrêts de travail peut être sanctionnée par des pénalités financières décidées par la caisse primaire d’assurance maladie. Elle constitue également, au sens de l’article 441-2 du code pénal, un délit passible de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende.
Le fait de produire de faux arrêts de travail peut en outre être constitutif d’un manquement professionnel.
Aussi l’idée d’obliger les caisses de sécurité sociale à informer les employeurs de telles pratiques frauduleuses est-elle intéressante ; elle pourrait être suivie d’effets.
Toutefois, le dispositif juridique ici proposé me semble perfectible, en ce qui concerne notamment la définition matérielle de la fraude.
Il est important que ces sujets soient traités selon une cohérence d’ensemble, afin de ne pas fragiliser les procédures pénale et civile et de sécuriser les dispositifs de sanction et de recouvrement.
Avis défavorable.