M. le président. La parole est à M. Hervé Gillé, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Hervé Gillé. Monsieur le Premier ministre, c’est la double peine pour les communes, pour les employeurs territoriaux et hospitaliers. Lors des Assises des départements de France, vous avez affirmé vouloir redonner des marges de manœuvre, de l’oxygène, de la liberté aux collectivités territoriales, afin de restaurer le sens de leur mission.
Mais, en rehaussant brutalement, de douze points sur trois ans, la cotisation à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), que fait le Gouvernement, sinon l’exact inverse ? Au lieu d’offrir de l’oxygène aux collectivités locales, vous les asphyxiez financièrement. Aucune compensation par l’État n’est prévue à ce jour. Au lieu de restaurer leurs missions, vous les contraignez à réduire leurs services essentiels sous le poids d’une pression financière insoutenable. Toutes les communes seront touchées. Toutes les collectivités territoriales et leurs groupements seront concernés.
Comment justifiez-vous cette contradiction ? Comment pouvez-vous parler de redonner de la liberté aux collectivités territoriales tout en les étranglant financièrement, sans même leur offrir la moindre concertation sur le sujet ? Vous le savez, c’est là une décision unilatérale du Gouvernement.
Les collectivités – et notamment les services départementaux d’incendie et de secours (Sdis) – risquent de se retrouver privées des moyens nécessaires pour assurer leurs missions de proximité. En Gironde, par exemple, ce sont 9 millions d’euros supplémentaires sur trois ans à trouver pour le Sdis.
Avec ces nouvelles charges de fonctionnement, l’autofinancement se réduit comme peau de chagrin. Il est grand temps de passer des mots aux actes et de rétablir un véritable dialogue avec les collectivités locales, avant qu’il ne soit trop tard. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ainsi que sur des travées des groupes SER et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail et de l’emploi.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre du travail et de l’emploi. Mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Hervé Gillé, nous anticipons le débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, notamment sur son article 40…
Je vous remercie de votre question, qui me permet de rappeler le travail de concertation conduit avec les sénateurs. J’en profite pour saluer le travail mené par Mme la rapporteure générale Élisabeth Doineau et par Philippe Mouiller, le président de la commission des affaires sociales.
Pour rappel, la CNRACL souffre actuellement d’un très important déficit, qui atteint 2,8 milliards d’euros cette année. En 2030, elle accumulerait 10 des 14 milliards d’euros de déficit de l’ensemble de la branche vieillesse. C’est dire s’il est impératif d’opérer son redressement pour assurer la soutenabilité du financement et du paiement des pensions dues aux fonctionnaires des collectivités territoriales et de la fonction publique hospitalière.
En septembre, une mission a émis des recommandations beaucoup plus dures que nos propositions. Certaines ont d’ailleurs été reprises dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Au cours de sa rencontre avec les représentants des départements, le Premier ministre a opté pour une augmentation plus douce, sur quatre années au lieu de trois : ce sera l’objet d’un amendement présenté par la rapporteure générale.
La mission a formulé d’autres recommandations, dont nous discuterons avec les collectivités territoriales concernées. Mais nous devons relever ensemble le défi de la soutenabilité auquel cette caisse est confrontée pour garantir les pensions des retraités concernés.
M. le président. La parole est à M. Hervé Gillé, pour la réplique.
M. Hervé Gillé. Madame la ministre, vous annoncez la possibilité d’un lissage sur quatre ans au lieu de trois, ce qui est loin de répondre aux attentes des associations d’élus. Celles-ci réclament l’abandon pur et simple de cette mesure, et surtout une véritable concertation avec l’État – car il n’y en a pas eu – pour une remise à plat. Si nous en sommes là, c’est parce que la CNRACL a largement abondé les autres caisses, avec au moins 100 milliards d’euros de transferts cumulés sur de nombreuses années. Ce n’est pas aux collectivités territoriales de payer le prix fort ! Monsieur le Premier ministre, sur ce sujet, soyez réellement équitable. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ainsi que sur des travées des groupes CRCE-K et GEST.)
finances des collectivités territoriales
M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
M. Stéphane Sautarel. « Les communes… Heureusement ! » Tel est le thème du 106e congrès des maires. Dans la période trouble que nous connaissons pour le lien social et les services fournis, je dirais même : « Le bloc territorial… Heureusement ! » C’est le quotidien des Françaises et des Français.
Je le rappelle, les dépenses des collectivités ne représentent que 19 % de la dépense publique totale, contre 34 % en Europe, alors que celles-ci assument 70 % de l’investissement public, pour seulement 8 % de la dette.
Même si chacun doit contribuer en responsabilité à un effort consenti pour redresser nos comptes publics, nous attendons de l’État que cet effort soit juste et soutenable. La priorité doit donc être de garantir l’épargne des collectivités, qui produit immédiatement un investissement dont notre pays a besoin.
Pour cela, monsieur le ministre, et avant de vous lancer, en lien avec Mme la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation, dans les réformes structurelles de la fiscalité locale et de la dotation globale de fonctionnement ou dans le desserrement bureaucratique, vous pourriez prendre trois engagements pour rassurer les communes, ainsi que les autres niveaux de collectivités.
D’abord, réduire substantiellement, de 5 milliards d’euros à 2 milliards d’euros, l’effort demandé aux collectivités, en exonérer largement les communes et les départements et en exclure totalement les communes rurales.
Ensuite, supprimer toute mesure rétroactive et garantir lisibilité et stabilité des relations avec les collectivités ; je pense évidemment d’abord au FCTVA.
Enfin, et peut-être surtout, renoncer à capter l’épargne des collectivités tout en la gelant pour partie dans leurs comptes ; je pense en l’occurrence aux modalités du fonds de précaution, qu’il faut profondément modifier en faisant confiance aux collectivités.
Monsieur le ministre chargé du budget, vos réponses pourront se traduire en amendements au projet de loi de finances dès la semaine prochaine, et ainsi éviter un blackout territorial et amorcer le contrat de confiance, tel que le Premier ministre le souhaite et nous y invite. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre chargé du budget et des comptes publics.
M. Laurent Saint-Martin, ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics. Monsieur le sénateur Sautarel, je salue l’engagement qui est le vôtre dans le dialogue engagé avec l’ensemble des sénatrices et des sénateurs, de la réunion du Comité des finances locales (CFL), voilà quelques semaines, jusqu’à aujourd’hui, pour essayer de trouver le bon compromis sur la question de la contribution financière des collectivités territoriales. Comme vous l’avez indiqué, il doit bien y avoir une contribution de ces dernières, mais elle doit être juste.
Vous m’avez posé trois questions.
La première concernait la réduction de l’effort des collectivités territoriales. Oui, l’effort qui leur est demandé sera bien réduit à l’issue de l’examen du projet de loi de finances, ne serait-ce que pour mettre en œuvre les annonces du Premier ministre, qui s’est engagé sur une diminution significative de la contribution des départements. Il convient également de prendre en compte le lissage de l’augmentation du taux de cotisation à la CNRACL – Mme la ministre du travail et de l’emploi vient d’y faire référence en réponse à une autre question –, sujet qui, même s’il est distinct, a sa place dans les discussions portant sur l’effort demandé aux collectivités territoriales.
Votre deuxième question avait trait à la suppression de la rétroactivité. Je vous confirme que nous reviendrons sur la rétroactivité s’agissant de l’effort demandé sur le FCTVA. Nous aurons l’occasion de débattre d’autres sujets liés au FCTVA, dont son recentrage sur l’investissement, qui, je le crois, va dans le bon sens. Je pense que nous pourrons nous rejoindre sur ce point.
Votre troisième question portait sur le fonds de précaution. C’est probablement le sujet sur lequel le débat va le plus se cristalliser lors de l’examen du projet de loi de finances. Le Gouvernement est ouvert aux propositions pour que la gouvernance et la finalité du fonds puissent être repensées. Vous suggérez – nous avons déjà eu l’occasion d’en discuter – que le gel se constitue au sein des collectivités, et non pas dans un fonds ad hoc. C’est une option que nous devrons regarder ensemble ; je ne l’exclus pas, mais je ne la confirme pas à ce stade. Il faut que nous l’expertisions ensemble.
Vous avez terminé en soulignant – cela résume parfaitement, me semble-t-il, la situation – la nécessité de la confiance mutuelle entre l’État et les collectivités pour parvenir à ce bon compromis. Nous aurons besoin du débat sur le projet de loi de finances pour construire cette confiance mutuelle et définir les modalités de la contribution des collectivités. Après des années de hausse des dépenses publiques, la réduction du déficit public concerne tout le monde. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. François Patriat applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour la réplique.
M. Stéphane Sautarel. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, et je salue le dialogue engagé, y compris avec Mme Vautrin.
À mon sens, pour rétablir la confiance, il faut poser un acte de confiance. Et le meilleur acte de confiance est de laisser l’épargne dans les comptes des collectivités avec un engagement permettant de répondre aux objectifs de réduction de notre déficit public ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
retraite des sapeurs-pompiers volontaires
M. le président. La parole est à M. Olivier Cigolotti, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Olivier Cigolotti. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.
Monsieur le ministre, notre sécurité civile repose sur un modèle qui démontre chaque jour sa pertinence et son efficacité, en associant les sapeurs-pompiers professionnels et les sapeurs-pompiers volontaires au service d’un même objectif : protéger la population, les biens et l’environnement.
Par son organisation, notre modèle de sécurité civile nous permet de faire face aux accidents du quotidien comme aux situations de crise exceptionnelles. Nous l’avons malheureusement encore constaté voilà quelques semaines, notamment dans le département de la Haute-Loire.
Or cette capacité de montée en puissance dans des délais très courts repose sur une ressource précieuse : le volontariat.
Lors de l’examen du texte portant réforme des retraites, avec l’accord du gouvernement d’alors, nous avons, par un amendement sénatorial, souhaité octroyer à nos sapeurs-pompiers volontaires une bonification de trimestres de retraite au titre de la solidarité nationale pour reconnaître leur engagement citoyen et favoriser leur fidélisation. Vingt mois après l’adoption du texte, cette mesure, votée à l’unanimité sur nos travées, n’est toujours pas effective, faute de décret d’application.
Le 13 décembre dernier – cela fait pratiquement un an –, votre prédécesseur, répondant à une question de mon collègue Pascal Martin, indiquait sa volonté d’avancer sur le sujet.
À la fin du mois de septembre, lors du congrès des sapeurs-pompiers de France, à Mâcon, M. le Premier ministre a rappelé la volonté du Gouvernement de mener à son terme ce travail interministériel.
Monsieur le ministre, quand pourrons-nous exprimer à nos sapeurs-pompiers la reconnaissance qui leur est due au titre de leur engagement ? (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Bruno Retailleau, ministre de l’intérieur. Monsieur le questeur Olivier Cigolotti, vous avez parfaitement raison. Ce qui caractérise notre modèle, ce qui fait sa force aussi, c’est la mixité : mixité d’abord des statuts, civil ou militaire ; mixité aussi des formes d’engagement, professionnel ou volontaire. (M. Olivier Cigolotti acquiesce.) Sans les 200 000 sapeurs-pompiers français volontaires, notre modèle s’effondrerait.
C’est la raison pour laquelle, comme vous l’avez rappelé, lors de l’examen du texte portant réforme des retraites, nous avons adopté à l’unanimité – je m’en souviens très bien, d’autant qu’il était assez rare d’obtenir un vote unanime dans ce débat (M. Olivier Cigolotti acquiesce.) – un dispositif de fidélisation grâce à des bonifications de trimestres de retraite. J’entends que le vote des parlementaires soit respecté. Et j’entends que l’engagement du Premier ministre à Mâcon, auquel vous avez fait référence, le soit aussi.
Je me permets de vous apporter quelques précisions sur l’objectif et les modalités. L’objectif est que le décret, en l’occurrence interministériel, puisse sortir en tout début d’année 2025. Les modalités, c’est, d’une part, le respect de l’esprit et de la lettre de la loi et, d’autre part, la nécessité d’être raisonnable dans le contexte budgétaire actuel.
Je tiens comme à la prunelle de mes yeux – c’est aussi le cas, je le sais, de M. le Premier ministre – à la reconnaissance de l’engagement des sapeurs-pompiers professionnels, mais également des sapeurs-pompiers volontaires pour sauver des vies.
Il y a à cela une autre raison, plus symbolique. Peut-être connaissez-vous les paroles d’une très belle chanson que Bruce Springsteen avait composée en hommage aux pompiers de New York, mais qui va comme un gant aux pompiers français :
« Que votre force nous donne la force,
« Que votre espoir nous donne l’espoir ».
Mme Cécile Cukierman. Il faut chanter, monsieur le ministre ! (Sourires sur les travées du groupe CRCE-K.)
M. Bruno Retailleau, ministre. Les sapeurs-pompiers nous donnent la force de l’engagement, mais aussi l’espoir : l’espoir d’une cité plus fraternelle, l’espoir d’une une cité où l’on place les devoirs avant les droits, l’espoir d’une une cité où l’on place le don de soi avant le chacun pour soi !
Vive les sapeurs-pompiers ! Honneur à tous les sapeurs-pompiers de France ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP, RDSE et RDPI. – M. Hussein Bourgi applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Olivier Cigolotti, pour la réplique.
M. Olivier Cigolotti. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, que nous ne manquerons pas de relayer dans quelques jours, à l’occasion de la fête de la Sainte-Barbe, lorsque nous serons aux côtés de nos sapeurs-pompiers pour rendre hommage à leur courage et à leur engagement. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, RDPI, INDEP et Les Républicains.)
fret aérien
M. le président. La parole est à M. Christian Bruyen, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Christian Bruyen. Ma question s’adresse à M. le ministre délégué auprès de la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation, chargé des transports. Elle a trait à l’embolie croissante des plateformes aéroportuaires franciliennes. Toutes les études faisant état d’une hausse inéluctable du transport aérien, nous ne pouvons pas ne pas réagir !
Au demeurant, des solutions sont là : des aéroports peu éloignés de Paris ont la capacité d’accueillir une part du trafic.
Ce qui est reproché aujourd’hui, ce sont des nuisances sonores grandissantes, une saturation du réseau routier, notamment du fait des poids lourds, ainsi qu’un impact atmosphérique bien trop concentré.
Les avions de fret tout cargo sont des pourvoyeurs notoires de ces agressions inacceptables. Or il existe un aéroport dédié à ce type de trafic : celui de Paris-Vatry, dans la Marne, à moins de deux heures de Paris. C’est une infrastructure remarquable – la direction générale de l’aviation civile (DGAC) ne me démentira pas –, de surcroît située sur un territoire de très faible densité.
Je prends cet exemple non pas pour déplacer le problème, mais afin d’organiser la répartition des vols et, ainsi, de ne pas dépasser le seuil d’acceptabilité des populations concernées.
Les opérateurs terrestres ne s’en plaindront pas, tant certains se sentent « maltraités », en termes d’immobilisation au sol du fait de l’engorgement des plateformes franciliennes.
En outre, est-il acceptable que du fret français soit traité à l’étranger et doive venir par camion sur nos routes, avec les conséquences environnementales que l’on peut imaginer ?
Monsieur le ministre, serez-vous celui qui prendra enfin les décisions qui s’imposent ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC. – M. Marc Laménie applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports.
M. François Durovray, ministre délégué auprès de la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation, chargé des transports. Mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Christian Bruyen, j’aimerais tout d’abord saluer l’engagement ancien, entier et constant qui est le vôtre en faveur de l’avenir de l’aéroport de Paris-Vatry.
Je suis particulièrement sensible à la question de la réduction des nuisances liées aux aéroports franciliens. C’est dans cet esprit que je travaille pour l’avenir de l’aéroport de Paris-Vatry, qui est un atout pour la France, à double titre.
D’une part, cet aéroport offre des conditions idéales, avec une piste très longue, de près de quatre kilomètres, des conditions d’exploitation assez libres compte tenu de l’absence de population à proximité et des coûts d’exploitation faibles.
D’autre part, il permet de répondre à un enjeu important pour notre pays, celui du trafic et du transport des marchandises. Comme vous le savez, nous avons beaucoup travaillé au sein du ministère des transports pour faire venir de nouvelles activités. Et vous connaissez l’engagement d’Aéroports de Paris en faveur de la complémentarité des flux entre les plateformes franciliennes et l’aéroport de Paris-Vatry. J’ai noté avec satisfaction qu’un nouvel opérateur, FTL Airlines, s’était implanté ; le groupe a des projets de développement sur cette plateforme aéroportuaire.
Il faut en effet que nous puissions réorganiser les flux de marchandises. Ceux-ci passent trop souvent par d’autres pays d’Europe du Nord, comme la Belgique ou le Luxembourg, alors même que nous avons, avec l’aéroport de Paris-Vatry, un atout considérable pour en rapatrier un certain nombre en France.
Soyez assuré de la mobilisation du ministre des transports et de ses services en faveur de cet aéroport, qui représente un bel enjeu pour votre territoire et pour la France. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Christian Bruyen, pour la réplique.
M. Christian Bruyen. Monsieur le ministre, je vous remercie de ces éléments de réponse, qui me donnent un peu d’espoir. Manifestement, le sujet vous préoccupe.
Les perspectives d’évolution se font jour. Il convient d’aller plus loin, avec des solutions pérennes. Ce n’est pas facile, j’en conviens, mais nos voisins travaillent de façon très prometteuse. Je pense à Amsterdam, avec Maastricht, à Bruxelles et à d’autres. La France doit faire de même.
La souveraineté économique tient aussi à la maîtrise des approvisionnements ; nous l’avons vu avec la crise du covid-19. Il serait incompréhensible que l’on n’adopte pas des positions fermes.
Mieux considérer encore les aéroports de province, et pas seulement Paris-Vatry, ce serait aussi agir pour un aménagement équilibré du territoire national, sans laisser les opérateurs étrangers entrer éventuellement dans la gouvernance des infrastructures concernées. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
violences faites aux élus
M. le président. La parole est à Mme Marion Canalès, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Marion Canalès. Les réseaux sociaux sont devenus le nouvel eldorado des atteintes à l’intégrité des individus, et les élus ne sont pas épargnés. Un maire sur quatre en a été victime. Si l’intelligence peut être artificielle, la violence qu’elle induit est, elle, bien réelle. Un clic peut blesser plus qu’un coup. Voilà quatre jours, le visage d’un député du Puy-de-Dôme a été découpé en deux au couteau, tandis que la tête du maire de Clermont-Ferrand et celle d’un adjoint étaient écrabouillées dans une presse.
À celles et à ceux pour qui ces montages ne seraient « pas si dramatiques », nous devons répondre fermement que l’intelligence artificielle générative crée des contenus toujours plus extrêmes, augmentant le risque de passage à l’acte. Nous ne devons pas banaliser l’intolérable, même en ligne ; les plaintes doivent être suivies d’effets.
Dans 500 jours auront lieu les élections municipales. « Rengagez-vous, qu’ils disaient ! » La formule culte du légionnaire romain dans les albums d’Astérix et Obélix pourrait aujourd’hui être celle de nombreux maires qui se posent la question de la poursuite de leur engagement. À quel prix ? Au prix de leur tranquillité, de celle de leurs proches, voire – cela a été dit par un de mes collègues – au prix de leur santé physique et mentale.
Avec le retrait de l’État et des services publics de nos territoires, les administrés n’ont plus d’interlocuteurs. C’est donc aux maires qu’ils s’adressent : le « dernier à portée d’engueulades », comme ils disent.
Chaque décision gouvernementale qui affaiblit la capacité de faire des élus locaux est un coup de canif supplémentaire porté dans le contrat passé avec eux et la République. Affaiblis, plus vulnérables, les élus locaux se sentent plus démunis. Dépourvus de moyens, ils deviennent, aux yeux de leurs détracteurs, de mauvais gestionnaires, voire inutiles, et ils ne mériteraient plus que du mépris.
Avez-vous l’intention de continuer d’entretenir ainsi la gronde pour ensuite jouer les pompiers pyromanes, avec des plans à 5 millions d’euros – 5 millions ! – pour renforcer la sécurité des élus ? Nous nous demandons d’ailleurs si les crédits seront bien dans le projet de loi de finances. Le doute plane. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE-K.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Bruno Retailleau, ministre de l’intérieur. Madame la sénatrice, je ne pense absolument pas que l’on réglera la question de la violence contre les élus à coups de millions d’euros. La violence, elle est partout ; elle se répand dans notre société. Et les premières victimes en sont évidemment les élus.
Il y a un énorme paradoxe : jamais la France n’a eu autant besoin des maires et des élus et jamais – M. le questeur Lefèvre le disait voilà quelques instants – ces derniers n’ont été autant découragés, découragés par des règles souvent bureaucratiques,…
M. Adel Ziane. Ce n’est pas la question !
M. Bruno Retailleau, ministre. … comme Mathieu Darnaud l’a souligné voilà quelques instants, découragés aussi, vous l’avez dit à juste titre, par ces violences.
J’ai été tenu au courant par le préfet de votre département des violences qui ont été exercées sur les réseaux via l’intelligence artificielle générative. D’ailleurs, ce n’est pas l’intelligence artificielle en soi qui est coupable ; en l’occurrence, les coupables, ce sont ceux qui en font cet usage-là.
Je le rappelle – d’ailleurs, je pense que vous vous en souvenez parfaitement –, la loi du 21 mars 2024 renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux, issu d’une proposition de loi sénatoriale, offre un certain nombre d’outils pour lutter contre la violence, y compris sur les réseaux sociaux. Ce dernier volet est peut-être moins connu, mais il faut que notre texte, votre texte, puisse être scrupuleusement suivi d’effets.
J’ai demandé aux préfets de se mobiliser, notamment en signalant systématiquement au procureur lorsqu’il y a lieu de le faire. Ainsi, le préfet de votre département a signalé, au titre de l’article 40 du code de procédure pénale, les faits que vous avez évoqués.
Il faut également surveiller les réseaux. Et l’intelligence artificielle générative nous place face à de nouveaux défis.
Je pense qu’internet ne doit pas être une zone de non-droit. Ce que nous exigeons dans la sphère physique réelle, nous devons être en droit de l’obtenir aussi dans la sphère virtuelle. Ce principe figurait d’ailleurs dans un certain nombre de textes européens, dont celui qui concernait l’intelligence artificielle.
Vous avez raison : un élu qui dépose une plainte doit être informé des suites apportées ou de l’absence de suite. Je pense que c’est fondamental.
M. Loïc Hervé. Bien sûr ! Mais ce n’est pas toujours le cas.
M. Bruno Retailleau, ministre. En tout cas, croyez-moi, nous sommes entièrement et concrètement mobilisés. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Mickaël Vallet. Comme le chantait Mick Jagger… (Sourires sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme Marion Canalès, pour la réplique.
Mme Marion Canalès. Nous espérons que les 5 millions d’euros promis dans le cadre du plan en faveur de la sécurité des élus annoncé par Mme Faure au moment de l’examen de la loi de mars 2024 seront maintenus dans le projet de loi de finances. À ce stade, le doute plane. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
fermeture de maternités, notamment dans les yvelines
M. le président. La parole est à Mme Marta de Cidrac, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Marta de Cidrac. Ma question porte sur la fragilisation des services dans nos territoires.
En l’occurrence, je souhaite évoquer non pas les inégalités territoriales d’accès aux soins, sujet sur lequel notre collègue Bruno Rojouan a remis dernièrement un rapport contenant trente-huit recommandations, mais les maternités.
Année après année, inexorablement, nos maternités en France ferment. Aujourd’hui, leur nombre a baissé de plus de 40 %. On s’est d’abord attaqué à la ruralité, en prétendant que c’était lié à la désertification. On a aussi dit qu’il fallait concentrer l’offre de soins en fermant de petites maternités. On a encore invoqué le manque de rentabilité des maternités du fait du nombre des naissances. C’est certain, les bonnes raisons ne manquent pas…
Mais les indicateurs ont continué de baisser, et la France a continué de reculer au classement européen. Mortinatalité spontanée et mortalité infantile sont en progression dans notre pays. La France se place au vingt-deuxième rang européen sur trente-quatre pays en termes de prise en charge des naissances.
Je ne suis pas seule à le dire. Les rapports s’empilent, tous plus alarmants les uns que les autres. Il suffit de lire le dernier rapport de la Cour des comptes sur le sujet.
Doit-on se résoudre à laisser nos sœurs, nos filles et nos petites-filles craindre, et même redouter, l’arrivée de leurs enfants ?
Madame la ministre, que répondez-vous à celles qui n’auront plus la certitude de pouvoir accoucher en toute sécurité dans notre pays en 2024 et en 2025 ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Michel Laugier applaudit également.)