Mme Monique de Marco. L’adoption, le 7 mai 2024, de l’European Freedom Media Act modifie le cadre supralégal applicable à la protection du secret des sources. Elle rend ainsi obsolète l’interprétation que notre commission des lois a faite de cet article et nécessite, en conséquence, des adaptations législatives.
Madame la ministre, vous l’avez relevé vous-même : le règlement européen impose de réexaminer ce point avant le 8 août 2025. Dans cette perspective, je propose de rétablir l’article 5 dans sa version initiale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des lois ?
M. Christophe-André Frassa, rapporteur pour avis. Ma chère collègue, dans le peu de temps qui m’était imparti au cours de la discussion générale, je me suis fort modestement efforcé de présenter l’excellent rapport de Mme Josende. Aussi, vous avez certainement noté les raisons qui ont conduit la commission des lois à modifier l’article 5, raisons qui ne sont pas celles que vous tentez de nous faire accroire.
Les arguments juridiques que vous invoquez pour rétablir cet article sont totalement erronés. Le règlement européen sur la liberté des médias et la directive sur les « procédures bâillons » appellent une évolution de notre droit ; mais cette dernière doit être menée dans le respect de la Constitution. Or, en la matière, nous sommes placés face à une grave question d’articulation des normes.
Madame la ministre, je me tourne à présent vers vous : c’est dans le cadre d’un projet de loi que cette question doit être traitée. Au sujet de ce travail, qui est devant nous, je souhaite recueillir votre avis.
La commission sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis particulièrement défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, ministre. Madame la sénatrice, c’est sur mon initiative que la protection des sources a été consacrée dans la loi. C’était en 2010 et il s’agissait bel et bien d’une première.
Vous pouvez vous référer aux débats de l’époque : j’étais déjà allée très loin dans la mise en œuvre de ce principe, et bien au-delà du texte initial, que j’avais présenté.
Aujourd’hui, un nouveau chantier est devant nous et il suppose à son tour un débat parlementaire exigeant ; un débat tout à fait apaisé, de la même qualité que celui de 2008 et 2009.
Ce travail devra tenir compte des conclusions des États généraux de l’information, lesquels ont formulé, sur ce sujet, une recommandation très détaillée et très argumentée. Il devra naturellement s’inscrire dans le cadre constitutionnel et respecter le règlement européen.
J’y insiste, le renforcement de cette protection exige un débat parlementaire plus large et plus poussé. Or les dispositions de votre amendement ne permettent pas de mener un tel travail. Voilà pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 5.
(L’article 5 est adopté.)
Article 6
I. – Après l’article 2 bis de la loi du 29 juillet 1881 précitée, il est inséré un article 2 ter ainsi rédigé :
« Art. 2 ter. – Un numéro d’inscription est attribué aux entreprises de presse imprimée et aux entreprises de presse en ligne par la Commission paritaire des publications et des agences de presse, dès lors que la nomination du directeur de la rédaction a fait l’objet d’une validation préalable, par un vote d’au moins la moitié des membres de la rédaction concernée, à la majorité de soixante pour cent.
« Un décret fixe les conditions d’application du présent article. »
II. – La loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée est ainsi modifiée :
1° Après l’article 30-7, il est inséré un article 30-7-1 ainsi rédigé :
« Art. 30-7-1. – La nomination d’un responsable de la rédaction d’un service de communication audiovisuelle soumis à autorisation fait l’objet d’une validation préalable par un vote d’au moins la moitié des membres de la rédaction concernée, à la majorité de soixante pour cent, dans des conditions fixées par décret.
« Si le service ne se conforme pas à l’exigence mentionnée au premier alinéa, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique procède au retrait de son autorisation. » ;
2° Après le premier alinéa du I de l’article 34, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les services distribués sur des réseaux n’utilisant pas une fréquence assignée par l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique et qui ne consistent pas en la reprise d’un service autorisé diffusé par voie hertzienne, la nomination du responsable de la rédaction fait l’objet d’une validation préalable par un vote d’au moins la moitié des membres de la rédaction concernée, à la majorité de soixante pour cent, dans des conditions fixées par décret. Le défaut de mise en œuvre de cette procédure de validation par un service est sanctionné par l’application d’une sanction pécuniaire correspondant à 7 % du chiffre d’affaires mondial hors taxes de l’exercice précédent de la ou des personnes physiques ou morales détenant plus de vingt pour cent du capital ou des droits de vote du service. » ;
3° Après le premier alinéa de l’article 43-11, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les nominations des responsables de la rédaction des sociétés mentionnées au premier alinéa font l’objet d’une validation préalable par un vote d’au moins la moitié des membres de la rédaction concernée, à la majorité de soixante pour cent, dans des conditions fixées par décret. »
M. le président. L’amendement n° 1 rectifié quinquies, présenté par MM. Laugier et Levi, Mme Malet, MM. Henno, Canévet, Kern, Mizzon, Verzelen, Paccaud, Brisson, Lévrier, Fialaire, Bonneau, Wattebled et Longeot, Mmes Morin-Desailly et Joseph, MM. Delahaye, Duffourg, Paumier, Piednoir, Savin, Le Rudulier et Chauvet, Mme Saint-Pé et M. Courtial, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Michel Laugier.
M. Michel Laugier. Avant tout, je tiens à lever un malentendu : je ne suis évidemment pas un ennemi de l’indépendance de la presse – je suis d’ailleurs persuadé que personne, dans cet hémicycle, ne l’est. Mais il nous appartient comme législateur de retenir les moyens les mieux à même de la garantir. Or le droit d’agrément instauré par cet article me paraît aller à l’encontre de son objectif même.
Nous avons longuement débattu de ce point au sein de la commission d’enquête sur la concentration des médias : c’est bien la preuve qu’il s’agit d’un sujet complexe.
Les États généraux de l’information se sont à leur tour penchés sur la question : comme notre commission d’enquête, ils ont écarté cette piste, pour au moins trois raisons.
Tout d’abord, un tel droit d’agrément serait de nature à affaiblir économiquement la presse, alors qu’elle a plus que jamais besoin d’attirer des investisseurs. Qui irait se lancer dans une telle aventure sans l’assurance de pouvoir effectivement diriger le titre faisant l’objet de l’investissement ?
Le principal problème de la presse, aujourd’hui, c’est sa faiblesse économique. Permettez-moi de vous renvoyer au rapport d’information que j’ai rédigé, au nom de notre commission de la culture, au sujet de la presse quotidienne régionale (PQR) : cette dernière – mon rapport le démontre – est contrainte de se lancer dans une transition numérique par nature très coûteuse. Dans un tel contexte, il me semble particulièrement dangereux d’affaiblir l’attractivité de la presse.
Ensuite, le principe même d’un droit d’agrément me semble instaurer une forme de défiance généralisée entre la rédaction, d’une part, et la direction, d’autre part. Je ne nie pas que de tels cas puissent se produire ; mais ce n’est pas du tout ce que j’ai pu constater depuis sept ans que je suis rapporteur pour avis des crédits de la presse.
L’intérêt commun des journalistes et des actionnaires est bien que le titre ou l’antenne rencontre le succès. Malgré les conflits susceptibles d’éclater de temps à autre, cet objectif suppose nécessairement une relation confiante.
Enfin, j’attire votre attention sur la question de la compatibilité entre un droit d’agrément et les droits spécifiques des journalistes, qu’il s’agisse du droit de cession ou de la clause de conscience. Avec un droit d’agrément, ces protections auraient-elles encore leur légitimité ? Comment justifier l’usage d’une clause de conscience quand le choix du directeur de la rédaction a été validé par un vote ?
Mes chers collègues, d’autres solutions existent. La commission d’enquête sur la concentration des médias, confirmée sur ce point par de nombreux travaux, penchait ainsi pour une modulation des aides à la presse en fonction de critères d’indépendance des médias. Cette formule me semble bien préférable.
Madame la ministre, je vous invite à explorer cette piste pour renforcer la confiance entre rédactions et directions.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Sylvie Robert, rapporteure. Mes chers collègues, vous ne serez pas surpris : la commission est favorable à la suppression de cet article. Je le regrette, bien sûr, mais j’entends les arguments qui ont été avancés à cette occasion, repris par Michel Laugier.
Nous avons longuement débattu de ce point, notamment au sein de la commission d’enquête sur la concentration des médias.
De même, ce sujet a beaucoup mobilisé les États généraux de l’information ; j’ai d’ailleurs lu avec attention les travaux des différents groupes de travail, au sein desquels le droit de veto, de validation ou d’agrément – appelons-le comme vous le voudrez, madame la ministre – a été examiné avec soin.
Monsieur Laugier, mon intention n’était pas de susciter une quelconque défiance entre actionnaires et journalistes, bien au contraire. J’ajoute que ce mécanisme peut lui aussi constituer une piste. Il pourrait contribuer à créer les conditions d’un travail serein et apaisé.
Madame la ministre, j’ignore ce que vous pensez du mécanisme d’information préalable finalement validé par les États généraux de l’information. Quoi qu’il en soit, je déplore sincèrement que cette question continue de cliver ainsi. Loin de débats qui me semblent assez binaires, nous devons poursuivre un travail exigeant en misant sur l’intelligence collective. (Mme Colombe Brossel applaudit.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Sylvie Robert, rapporteure. Absolument.
Mme Rachida Dati, ministre. Dans tel ou tel cas – c’est la liberté de chacun –, il peut donc être mis en œuvre. Les États généraux de l’information n’ont toutefois pas souhaité en faire une règle générale.
Je suis donc évidemment favorable à cet amendement de suppression. Le cas échéant, nous reviendrons sur ce sujet lors de l’examen du texte issu des recommandations des États généraux de l’information.
M. le président. La parole est à M. Yan Chantrel, pour explication de vote.
M. Yan Chantrel. Mme la rapporteure l’a rappelé : cet article, que le Sénat s’apprête manifestement à supprimer, confère aux journalistes un droit d’agrément sur la nomination de leur directeur de rédaction. Le vote d’au moins la moitié des membres de la rédaction serait ainsi nécessaire.
Chers collègues de la majorité sénatoriale, plusieurs affaires récentes, dont vous avez nécessairement eu connaissance, ont mis en lumière la faculté pour un actionnaire de faire évoluer, de manière significative, la ligne éditoriale d’un titre après l’avoir racheté. (Mme Corinne Narassiguin acquiesce.)
Le droit d’agrément instauré par cet article fait partie des préconisations des États généraux de l’information. Surtout, une écrasante majorité des journalistes sont favorables à cet outil de démocratie interne.
L’urgence démocratique impose de reconnaître que la presse n’est pas un bien comme les autres. Ce droit d’agrément serait un marqueur fort ; en l’accordant, nous prendrions fait et cause pour le pluralisme des médias. Il s’agit non seulement de renforcer leur indépendance, mais aussi de protéger les journalistes au sein des rédactions.
Je pensais que vous étiez attachés à la défense du pluralisme des médias. Or – pardonnez-moi de vous le dire – j’ai plutôt l’impression du contraire et de trouver en face de moi les petits télégraphistes de Bolloré ; j’ai comme l’impression que vous vous chargez de porter sa parole au sein de notre hémicycle !
C’est tout à fait désolant. Cette proposition de loi concerne tous les médias, quels qu’ils soient, même ceux que vous montrez du doigt : si vous êtes pour la diversité, pour le pluralisme, vous devez rejeter cet amendement afin de conserver cet article. Mais aujourd’hui tel n’est pas le cas, si j’en crois vos prises de parole… (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1 rectifié quinquies.
J’ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l’une, du groupe Les Républicains et, l’autre, du groupe Union Centriste.
Je rappelle que l’avis de la commission est favorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 13 :
Nombre de votants | 330 |
Nombre de suffrages exprimés | 330 |
Pour l’adoption | 220 |
Contre | 110 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, l’article 6 est supprimé.
Après l’article 6
M. le président. L’amendement n° 15 rectifié, présenté par Mmes de Marco et Ollivier, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article 6 de la loi du 29 juillet 1881 précitée, il est inséré un article 6 … ainsi rédigé :
« Art. 6 …. – La rédaction est dotée de la personnalité juridique et organise un conseil de rédaction dont les modalités sont déterminées par décret.
« Le conseil de rédaction élabore un règlement intérieur qui détermine le nombre de ses représentants, leur fonction, la durée de leur mandat et leurs prérogatives. Il s’assure par ailleurs que :
« 1° Tous les journalistes de l’entreprise de presse concernée peuvent, au quotidien, exercer leur travail en toute indépendance des pouvoirs publics, des pouvoirs économiques, notamment ceux qui constituent l’actionnariat du média auquel ils contribuent ;
« 2° Les journalistes qui en sont membres sont à l’abri de pressions ou tentatives de pression au but d’altérer la pratique indépendante de leur mission d’informer ;
« 3° Les journalistes qui en sont membres ne se trouvent pas en situation de conflit d’intérêts.
« Le conseil de rédaction est consulté pour validation sur la désignation et sur la démission du directeur et de ses adjoints, lorsqu’elle advient du fait du propriétaire du titre selon les conditions fixées par son règlement intérieur.
« Il formule des avis préalables sur l’élaboration et sur la modification de l’organisation de la rédaction après avoir consulté l’ensemble des salariés de l’entreprise.
« Il assure, de manière indépendante de l’actionnaire et de la régie commerciale, la ligne éditoriale du média qui a été définie au préalable avec les cadres de direction représentant des actionnaires.
« Il se prononce sur la conformité des écrits ou des images publicitaires avec l’orientation éditoriale du titre.
« Il reçoit les déclarations d’intérêts des actionnaires de l’entreprise et veille à leur publicité.
« Il reçoit annuellement des informations sur le montant des aides à la presse et contribue à la qualité de l’information et au pluralisme.
« Le conseil de rédaction ne se substitue pas à la direction de la rédaction.
« Le conseil de rédaction peut ester en justice pour assurer la défense et le bon déroulement des missions mentionnées à l’article 2 de la présente loi.
« Le fait d’entraver la constitution, le fonctionnement régulier ou la mise en œuvre d’une des prérogatives d’un conseil de rédaction est puni des mêmes peines, assorties d’une suspension partielle ou totale des aides publiques directes et indirectes dont bénéficie l’entité ainsi que de l’obligation pour celle-ci de publier les sanctions judiciaires dont elle pourrait faire l’objet au titre de ces manquements. »
La parole est à Mme Monique de Marco.
Mme Monique de Marco. Jusqu’à présent, pour garantir la liberté de la presse et l’honnêteté de l’information, nos lois se sont bornées à reconnaître des droits individuels aux journalistes et à leur imposer un cadre déontologique. Je pense, par exemple, aux clauses contractuelles de cession ou de conscience.
Or, dans un contexte de forte précarisation de la profession, ces droits individuels ne sont plus suffisants.
À ce titre, le rapport Bloche de 2010 cite les explications apportées par la chercheuse Alexandrine Civard-Racinais : « Tous ces jeunes entrants dans la profession, les précaires, les isolés […] n’ont d’autres choix que d’accepter des conditions de production peu favorables à leur épanouissement professionnel et […] évoluent dans des environnements où la déontologie est un luxe. »
En conséquence, cet amendement vise à reprendre, en la renforçant, une proposition de Nathalie Goulet : accorder la personnalité juridique aux rédactions, afin de leur reconnaître des droits collectifs, et leur permettre de défendre leur indépendance face à d’éventuelles interventions d’actionnaires dans la ligne éditoriale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Sylvie Robert, rapporteure. Il s’agit d’un avis défavorable et, personnellement, je le regrette – j’ai d’ailleurs eu l’occasion de le dire en commission.
Madame la ministre, il s’agit là d’un amendement important. Depuis longtemps déjà, les journalistes réclament ce statut juridique des rédactions – ils l’ont d’ailleurs rappelé lors de nos auditions. En outre, je suis frappée de le constater : la défiance d’une partie de notre société envers les médias progresse de pair avec la défiance des journalistes envers les actionnaires. Et c’est préoccupant.
Madame de Marco, vous l’avez rappelé à juste titre, notre collègue centriste Nathalie Goulet avait elle aussi plaidé pour le statut juridique des rédactions. C’est là un sujet qu’il faut absolument continuer à travailler. Cela étant – je le répète –, la commission a émis un avis défavorable sur votre amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, ministre. À mon sens, la rédaction ne peut être considérée comme une entité juridique au sein d’une entreprise, d’autant que rien n’empêche les journalistes de s’organiser en association – ce qu’ils font déjà.
À une époque où l’on se plaint de l’affaiblissement des représentations syndicales, je crains que l’adoption de ce type d’amendement n’accentue encore la tendance. Voilà pourquoi je n’y suis pas favorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 15 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 14 :
Nombre de votants | 330 |
Nombre de suffrages exprimés | 330 |
Pour l’adoption | 110 |
Contre | 220 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Article 7
Le chapitre VIII du titre unique du livre II de la première partie du code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa de l’article L. 218-1 est ainsi rédigé :
« On entend par publication de presse au sens du présent chapitre toute production journalistique, notamment rédactionnelle, photographique, sonore ou vidéographique, collectée, traitée et mise en forme à l’initiative, sous la responsabilité éditoriale et sous le contrôle d’un éditeur de presse ou d’une agence de presse, dans le but de fournir au public des informations sur l’actualité ou d’autres sujets. » ;
2° L’article L. 218-4 est ainsi modifié :
a) Le dernier alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Après consultation des éditeurs, agences de presse et services de communication au public en ligne concernés, un décret en Conseil d’État détermine la liste des éléments devant nécessairement faire l’objet d’une transmission de la part des services de communication en ligne aux agences et éditeurs de presse. Ce décret détermine également les conditions permettant de garantir la fiabilité des éléments transmis. » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« L’Autorité de la concurrence est saisie au titre de l’article 464-1 du code de commerce par les éditeurs ou agences de presse en cas de refus exprès ou tacite d’un service de communication au public en ligne de transmettre les éléments déterminés par le décret mentionné au troisième alinéa du présent article. L’autorité peut infliger des astreintes dans les conditions prévues au II de l’article L. 464-2 du code de commerce. »
M. le président. L’amendement n° 2 rectifié quinquies, présenté par MM. Laugier et Levi, Mme Malet, MM. Henno, Canévet, Kern, Mizzon, Verzelen, Brisson, Lévrier, Fialaire, Bonneau, Wattebled et Longeot, Mmes Morin-Desailly et Joseph, MM. Delahaye, Duffourg, Paumier, Piednoir, Savin et Le Rudulier, Mme Vérien, M. Chauvet, Mme Saint-Pé et M. Courtial, est ainsi libellé :
Alinéas 2 et 3
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Michel Laugier.
M. Michel Laugier. Par cet amendement, je propose de supprimer la nouvelle définition de la publication de presse prévue au troisième alinéa de l’article 7.
La définition retenue dans la loi du 24 juillet 2019 tendant à créer un droit voisin au profit des agences de presse et des éditeurs de presse, votée sur l’initiative du Sénat et de notre ancien collègue David Assouline, reprenait très exactement celle qui figure à l’article 2 de la directive européenne du 17 avril 2019. Les autres pays ont d’ailleurs fait le même choix. Il me paraît donc dangereux de s’en éloigner, puisque cela risque de faire peser sur les négociations de forts risques contentieux.
Cependant, je vois bien derrière cette nouvelle définition la volonté de conforter la place des agences de presse, qui ont plus de difficultés à se faire reconnaître des droits. Je rappelle donc très solennellement que la loi de juillet 2019 est parfaitement claire sur l’éligibilité aux droits voisins des agences de presse, qui figurent dans l’intitulé même de cette loi. De plus, toute autre interprétation a été condamnée par la cour d’appel de Paris dans un arrêt du 8 octobre 2020. Dès lors, les agences de presse auront tout notre soutien et celui de la justice pour faire reconnaître leurs droits.
Au passage, madame la ministre, je rappelle que l’Autorité de la concurrence a condamné la société Google à 750 millions d’euros d’amende, lesquels sont allés abonder le budget de l’État, qui en a bien besoin. À tout le moins, une fraction de cette somme aurait pu revenir aux personnes lésées, qui n’ont donc rien touché tout en assumant de très lourds frais juridiques face à des plateformes riches à milliards.
Telle est la raison pour laquelle je vous propose de supprimer ces deux alinéas, mais sans rien lâcher sur notre objectif de garantir l’application pleine et entière du droit européen et français.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Sylvie Robert, rapporteure. La commission a émis un avis favorable sur cet amendement. J’entends les arguments de notre collègue Michel Laugier, qui m’invite à faire preuve de prudence en conservant la définition d’une publication de presse telle qu’elle figure dans la directive de 2019.
Cependant, la rédaction, peut-être trop large, que j’ai proposée ne vient pas de nulle part. En effet, de nombreuses questions sont apparues dans l’application de la loi sur les droits voisins, notamment au sujet des agences de presse. Puisque nous sommes l’un des rares pays à compter des agences de presse, j’espère que ce sujet sera repris dans un texte futur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, ministre. Certes, il faut améliorer l’effectivité des droits voisins des éditeurs de presse. Cependant, la loi en vigueur n’est que la reprise intégrale de la définition qui nous est imposée par la directive de 2019. L’élargir, comme le prévoit cet amendement, nous ferait donc sortir du champ légal européen. Nous pouvons discuter de l’élargissement dans le cadre du droit européen, mais l’adoption de votre amendement, je le répète, nous placerait dans l’illégalité. Avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 2 rectifié quinquies.
J’ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l’une, du groupe Union Centriste, l’autre, du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis de la commission est favorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 15 :
Nombre de votants | 330 |
Nombre de suffrages exprimés | 330 |
Pour l’adoption | 220 |
Contre | 110 |
Le Sénat a adopté.
Je mets aux voix l’article 7, modifié.
(L’article 7 est adopté.)
Article 7 bis (nouveau)
I. – Au premier alinéa de l’article 108 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée, les mots : « n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022 » sont remplacés par les mots : « n° … du … visant à renforcer l’indépendance des médias et à mieux protéger les journalistes ».
II. – Au premier alinéa de l’article 69 de la loi du 29 juillet 1881 précitée, les mots : « n° 2024-247 du 21 mars 2024 renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux » sont remplacés par les mots : « n° … du … visant à renforcer l’indépendance des médias et à mieux protéger les journalistes » – (Adopté.)
Article 8
Les conséquences financières résultant pour l’État de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services – (Adopté.)
Vote sur l’ensemble