Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Si nous souhaitons le faire de façon pragmatique, il faut proposer des solutions qui sont temporaires, mais aussi, bien sûr, cadrées.
Par conséquent, la commission assume la disposition retenue et émet un avis défavorable sur ces amendements de suppression.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Je partage tout à fait l’analyse de Mme la rapporteure et m’oppose à mon tour à ces amendements de suppression.
L’article 7 bis qui a été introduit par l’Assemblée nationale est très utile.
Il permet, d’une part, d’accélérer les opérations de rénovation de l’habitat indigne et des copropriétés dégradées, et, d’autre part, de trouver des solutions temporaires pour des personnes qui ont besoin d’être relogées, le tout avec des garde-fous que Mme la rapporteure a soulignés – on parle bien de constructions temporaires et démontables qui remplissent des conditions minimales de confort et d’habitabilité fixées par décret – et qui permettent de s’assurer que nous disposons d’outils de relogements temporaires et provisoires, à même de lutter réellement contre l’habitat indigne.
Nous devons prioriser les objectifs. Souhaite-t-on accélérer la rénovation de bâtiments et d’habitats indignes ? Si la réponse est oui, il faut bien des solutions rapides pour héberger de façon temporaire des personnes qui ont besoin d’être logées, le temps de réaliser les travaux de rénovation.
Si l’on met des obstacles à ces solutions provisoires d’attente, on ne pourra pas accélérer la rénovation de l’habitat indigne. Qui plus est, nous avons le soutien des acteurs, que vous avez interrogés dans le cadre des auditions que vous avez organisées, madame la rapporteure, et nous avons des protections et des garde-fous pour garantir le confort et la sécurité des occupants. Aussi, allons-y ! Essayons d’accélérer !
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements de suppression.
Mme la présidente. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour explication de vote.
Mme Audrey Linkenheld. Il n’est pas de bon ton, me semble-t-il, d’opposer ceux qui voudraient accélérer la rénovation de l’habitat indigne et ceux qui ne le voudraient pas, au motif que ces derniers soulignent qu’un hébergement temporaire, fût-il destiné à reloger des personnes qui étaient jusqu’alors mal logées, ne doit pas faire l’objet d’un permis de construire – car c’est bien de cela qu’il s’agit.
Monsieur le ministre, oui, il existe des normes de confort et d’habitabilité, mais il faut aussi respecter d’autres règles !
Pour ma part, je n’imagine pas que l’on puisse, dans ma ville, installer sans permis de construire des constructions modulaires sur des terrains dont je sais qu’ils sont pollués. Un permis de construire ne vise pas seulement à vérifier les conditions de confort et d’habitabilité ; il sert également à s’assurer que la construction modulaire que l’on envisage d’installer ne se trouvera pas à un emplacement dangereux.
Tous les élus locaux, malgré leur envie d’installer sur leurs friches des containers, des algécos ou des habitats modulaires de très bonne facture y ont souvent renoncé, parce que ces terrains présentaient des risques pour les familles qui y auraient été logées, notamment les enfants.
Exiger un permis de construire n’a pas pour objectif d’alourdir les procédures ou de s’opposer à la simplification. Il s’agit plus prosaïquement de tenir compte de la réalité de nos territoires.
Monsieur le ministre, si l’on veut véritablement accélérer la rénovation de l’habitat dégradé, donnons plus de moyens aux particuliers et aux copropriétaires qui veulent rénover, plutôt que de sabrer MaPrimeRénov’. Donnons plus de moyens aux bailleurs sociaux, plutôt que de les ponctionner !
Je le répète, il me semble mal à propos d’opposer comme vous le faites ceux qui seraient favorables à l’accélération des logements temporaires et ceux qui ne le seraient pas, alors qu’il y va de la sécurité des occupants.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 24 et 85 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 150, présenté par MM. Buis, Buval, Fouassin, Patriat, Bitz et Mohamed Soilihi, Mmes Schillinger, Cazebonne, Duranton et Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Rohfritsch, Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 2, 3 et 6
Supprimer ces alinéas.
II. – Alinéa 5
Remplacer les mots :
la durée de l’opération
par les mots :
une durée maximale de cinq ans
III. – Alinéa 7
Remplacer les mots :
Les constructions mentionnées aux premier et deuxième alinéas du présent I
par les mots :
Ces constructions
IV. – Alinéa 9
1° Deuxième phrase
Remplacer les mots :
Cet accord
par les mots :
La demande
2° Troisième phrase
Remplacer le mot :
Il
Par le mot :
Elle
La parole est à M. Bernard Buis.
M. Bernard Buis. Tout en conservant une partie des évolutions adoptées en commission, nous prévoyons au travers de cet amendement de simplifier le dispositif prévu par l’article 7 bis.
Il s’agit également de supprimer l’alinéa 6, qui crée un second régime de dispense et complexifie le dispositif.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Pourquoi revenir à une durée maximale de cinq ans pour la dispense d’autorisation d’urbanisme, plutôt qu’aligner celle-ci sur la durée de l’opération de résorption de l’habitat dégradé concerné, ce qui serait plus logique ?
Si la commission s’oppose à la durée maximale de cinq ans, c’est parce qu’utiliser ces constructions temporaires lors de l’ensemble des phases de mise en œuvre de ces opérations, avec une occupation successive par des ménages différents présente un intérêt évident. Qui plus est, cela permet non seulement d’abaisser le coût à la place, mais surtout d’optimiser ces emplacements.
Pour lever toute crainte, je précise que, afin d’éviter les implantations excessivement longues, la commission a prévu que ces dispenses ne s’appliqueraient que dans le cadre d’opérations conduites par la puissance publique et que l’accord donné par le maire à ces implantations puisse fixer une date de fin d’implantation. Ainsi, les collectivités sont protégées contre toute durée excessive et non bornée des implantations dispensées d’autorisation.
Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Mon avis, malheureusement, diverge encore une fois de celui de Mme la rapporteure.
Nous sommes favorables à votre amendement, monsieur Buis, qui vise à simplifier le dispositif prévu à l’article 7 bis et à limiter à cinq ans la durée maximale d’implantation de ces constructions temporaires.
Une telle durée est raisonnable pour ce type de projet, s’agissant surtout de constructions temporaires, dispensées de toute formalité au titre du code de l’urbanisme. Une durée d’implantation alignée sur celle du projet, qui peut parfois être très longue, pourrait présenter des risques juridiques.
En outre, vous proposez de supprimer la création d’un second régime de dispense à l’alinéa 6, qui complexifie le dispositif.
Je répondrai à présent aux sénatrices qui s’interrogeaient précédemment sur le dispositif. Je vous invite à lire l’alinéa 11 de cet article, qui prévoit : « Le présent article n’est pas applicable dans les zones où le fait de construire ou d’aménager est interdit par un plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé ou est soumis au respect de conditions de réalisation, d’utilisation ou d’exploitation prescrites par ce plan. »
Vous parliez de zone de danger ou de zone de risque : en réalité, le dispositif prévoit bien le cas que vous avez évoqué en vous opposant à cet article.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 7 bis.
(L’article 7 bis est adopté.)
Article 8
Le III de l’article L. 711-2 du code de la construction et de l’habitation est ainsi rédigé :
« III. – Figurent également au registre les principales données concernant la copropriété devant permettre :
« 1° De connaître la situation financière de la copropriété ;
« 2° De connaître les caractéristiques techniques des immeubles constituant la copropriété, notamment celles prévues dans les diagnostics obligatoires ;
« 3° Aux services de l’État et aux collectivités territoriales de mettre en œuvre les dispositifs de repérage et d’accompagnement des copropriétés en difficulté ;
« 4° D’informer de l’existence d’un dépôt de plainte ou d’une condamnation sur le fondement de l’article 225-14 du code pénal, si le syndic en a connaissance. »
Mme la présidente. L’amendement n° 79 rectifié ter, présenté par Mmes Noël, Joseph et Dumont, MM. Anglars, Pellevat, D. Laurent, Mouiller et Houpert, Mme Muller-Bronn, MM. Favreau, Savin et Savoldelli, Mme Josende, M. C. Vial, Mme Berthet et MM. Klinger et Genet, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3
Compléter cet alinéa par les mots :
en faisant apparaître le budget, le montant total des impayés copropriétaires et de toute dette de la copropriété
II. – Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le syndic professionnel ou l’administrateur provisoire, dans le cas des procédures prévues à l’article 29-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, a l’obligation d’actualiser toutes ces données dans un délai de deux mois suivant la notification du procès-verbal de l’assemblée générale de la copropriété.
« En cas de non-respect du délai fixé au précédent alinéa, le syndic professionnel ou l’administrateur provisoire, dans le cas des procédures prévues à l’article 29-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, s’expose à une sanction prononcée par le conseil syndical ou d’une majorité qualifiée des copropriétaires correspondant à 10 % des honoraires annuels qu’il perçoit pour la gestion de ladite copropriété. »
La parole est à Mme Sylviane Noël.
Mme Sylviane Noël. L’article 8 dresse la liste les données supplémentaires devant être inscrites dans le registre national des copropriétés.
En l’état actuel de sa rédaction, il s’agit des données relatives à la situation financière de la copropriété, des caractéristiques techniques des immeubles constituant la copropriété, des données permettant aux services de l’État et aux collectivités territoriales de mettre en œuvre les dispositifs de repérage et d’accompagnement des copropriétés en difficulté et, enfin, de celles qui permettent d’informer de l’existence d’agissements consistant à abuser d’autrui.
Le présent amendement vise donc à ajouter aux données relatives à la situation financière de la copropriété le budget, le montant total des impayés des copropriétaires et toute dette de la copropriété.
En outre, l’amendement tend à rendre obligatoire l’actualisation de toutes les données inscrites au III de l’article L. 711-2 du code de la construction et de l’habitation dans les deux mois suivant la notification du procès-verbal d’assemblée générale de la copropriété.
Enfin, cet amendement vise à prévoir une astreinte afin de rendre ce dispositif plus effectif.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Cet amendement, qui a déjà été rejeté en commission, a pour objet de préciser les données financières devant être inscrites au registre national d’immatriculation des copropriétés.
Ces données figureront dans le décret qui sera pris en application de l’article. L’amendement me paraît donc satisfait sur le fond.
Sur la forme, cette disposition est contraire à la volonté de simplifier la loi et de renvoyer ces précisions, ainsi que d’éventuelles sanctions, au décret. En outre, il s’agit d’une obligation administrative, et une sanction prononcée par le conseil syndical ou par la majorité des copropriétaires ne paraît pas adaptée.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Madame Noël, l’amendement n° 79 rectifié ter est-il maintenu ?
Mme Sylviane Noël. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 79 rectifié ter est retiré.
L’amendement n° 25, présenté par M. Benarroche, Mme Guhl, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par les mots :
et de l’existence d’agissements qui consistent à abuser d’autrui, soit directement, soit par un intermédiaire, en vendant, en louant ou en mettant à disposition, moyennant une contrepartie, un bien meuble, une partie de celui-ci ou tout ou partie d’un logement ou d’un local dans un immeuble, dans des conditions incompatibles avec la dignité humaine
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Mis en place par la loi Alur de 2014, le registre national d’immatriculation des copropriétés (RNIC) a été pensé comme un outil de connaissance. Il permet aux citoyens et aux pouvoirs publics de mieux connaître l’état des copropriétés. L’action de l’État, des collectivités, les programmes locaux de l’habitat (PLH) et l’Anah se fondent sur ce registre.
L’article 8 permet d’étendre les données recueillies dans le RNIC, notamment au diagnostic de performance énergétique, qui n’y figurait pas encore, ce qui sera utile pour le repérage des immeubles devant être prioritairement rénovés.
Lors de nos échanges avec un certain nombre de collectifs de citoyens, en particulier avec les associations et les collectifs en lutte contre le mal-logement et l’habitat indigne de Marseille, nous avons constaté que cette amélioration du RNIC en outil opérationnel de prévention et de traitement des copropriétés dégradées avait été très favorablement accueillie.
Néanmoins, nous avons aussi constaté, comme ces associations, que l’Assemblée nationale avait veillé utilement à ce que figurent également dans ce registre les données devant permettre de prévenir les agissements des marchands de sommeil.
Il est essentiel de lutter contre la prédation sur le marché de la précarité et de la pauvreté. À cet égard, les services de l’État et des collectivités territoriales doivent agir, et ils le font. Les marchands de sommeil constituent un phénomène caractéristique de la dégradation des copropriétés, et le registre doit servir à mettre en œuvre les dispositifs de repérage et d’accompagnement des copropriétés en difficulté.
Par cet amendement, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires entend aller au-delà de la consignation des simples dépôts de plainte ou d’une condamnation sur le fondement de l’article 225-14 du code pénal, si le syndic en a connaissance, en rétablissant la rédaction plus large issue de l’Assemblée nationale concernant le signalement des agissements des marchands de sommeil.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Si la commission a supprimé certaines dispositions issues de l’Assemblée nationale pour ne retenir que des faits, notamment une condamnation ou un dépôt de plainte, c’est parce que le registre national d’immatriculation des copropriétés n’est pas le lieu pour effectuer des dénonciations et signaler des agissements. Le RNIC n’est pas une main courante ou le registre du commissariat ou de la gendarmerie !
Il s’agit non pas de restreindre la lutte contre les marchands de sommeil, mais, au contraire, d’en assurer la solidité juridique.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.
M. Guy Benarroche. Il n’est pas question de délation ici. En outre, tout le monde s’accorde pour dire que la disposition que nous proposons serait efficace, ce qui est notre objectif premier.
Par ailleurs, l’amendement vise à remplacer dans le texte de la commission les mots « l’intention de réaliser un profit anormal ». En effet, je me suis interrogé sur cette formulation. Si l’on parle d’intention de réaliser un profit « anormal », cela sous-entend qu’il existerait une possibilité de réaliser un profit « normal » dans le cadre de la mise à disposition ou de la location d’un bien incompatible avec la dignité humaine.
Je ne comprends pas cette rédaction. On ne peut pas parler de profit « anormal », car, de fait, un profit réalisé dans des conditions incompatibles avec la dignité humaine est anormal. Nous proposons donc une rédaction plus pertinente et voulons écrire : « moyennant une contrepartie ».
Monsieur le ministre, madame la rapporteure, la lutte contre l’habitat dégradé doit s’appuyer sur un droit lisible, clair et applicable par les juges.
Mme la présidente. L’amendement n° 90 rectifié, présenté par Mmes Artigalas et Narassiguin et MM. Ziane, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Tissot, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À titre expérimental, pendant une durée de six ans, dans le cadre du paragraphe 2 de la section 5 du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier du code de procédure pénale, les inspecteurs de salubrité ou agents de police municipale de catégorie A et B compétents pour la recherche et la constatation des infractions portant atteinte à la santé ou à la sécurité des occupants de locaux à usage d’habitation affectés à un service communal d’hygiène et de santé, disposent, pour les enquêtes judiciaires qu’ils diligentent sur réquisition du procureur de la République ou sur commission rogatoire du juge d’instruction, des mêmes prérogatives et obligations que celles attribuées aux officiers de police judiciaire. La liste des communes volontaires et les modalités de l’expérimentation sont fixées par décret en Conseil d’État.
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Cet amendement vise à mettre en place une expérimentation, pendant laquelle les inspecteurs de salubrité et les agents de la police municipale seraient dotés des pouvoirs d’enquête judiciaire en habitat indigne.
Cette expérimentation pourrait se dérouler dans les communes volontaires, situées dans les six territoires d’accélération de lutte contre l’habitat indigne.
L’objectif est de renforcer les pouvoirs des agents déjà mobilisés pour l’instruction des procédures, afin d’optimiser leur expérience du terrain et de faciliter l’instruction des actes judiciaires les plus simples : audition libre des mis en cause, des victimes, avis au parquet, rappel à la loi, avis à victime.
Il ne s’agit en aucun cas de se subroger aux obligations et responsabilités de la police. Cette mesure s’appliquerait dans le cadre d’une convention avec l’État et le parquet.
Cet amendement vise à traduire la recommandation n° 22 du rapport de Mathieu Hanotin et Michèle Lutz, tous deux maires de communes particulièrement exposées à l’habitat indigne. Ils souhaitent que leur capacité d’intervention soit renforcée, afin d’être en mesure de mieux identifier les situations d’habitat indigne, de les évaluer et de mettre en œuvre plus rapidement les procédures les plus adaptées.
Mathieu Hanotin, en particulier, est volontaire pour expérimenter immédiatement à Saint-Denis cette recommandation phare de son rapport, dans un objectif d’efficacité de l’action des maires.
La rédaction proposée ici a été simplifiée et renvoie à un décret les modalités de mise en œuvre de l’expérimentation.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Amel Gacquerre, rapporteure. La proposition de donner des pouvoirs d’enquête judiciaire en matière d’habitat indigne aux inspecteurs de salubrité et aux agents de police municipale n’est pas nouvelle. On en parle assez régulièrement, cette disposition étant très demandée et très attendue par les élus locaux, notamment les maires. Je vous remercie de nous donner l’occasion de débattre ici de cette question, ma chère collègue.
Cette proposition, qui a été formulée dans le rapport de Mathieu Hanotin et Michèle Lutz, reçoit, je l’ai dit, un large soutien des maires. Lors d’une consultation, 71 % d’entre eux s’y sont déclarés favorables. Plusieurs sénateurs m’ont d’ailleurs également interrogée sur ce sujet.
Pour tout vous dire, j’ai moi-même souhaité reprendre cette disposition, mais elle se heurte à des difficultés constitutionnelles, compte tenu du statut de ces agents, qui sont placés sous l’autorité du maire et non de l’État et du procureur de la République. Le Conseil constitutionnel a d’ailleurs déjà censuré des dispositions similaires.
Cette proposition soulève par ailleurs d’autres questions, notamment la prise en charge des coûts de ces missions effectuées pour le compte de l’État, coûts qui ne seraient sans doute pas compensés.
J’y ai donc renoncé, pour cette raison également. Le sujet n’est pas mûr aujourd’hui, même s’il est très présent dans nos débats.
La commission souhaite donc connaître l’avis et les intentions du Gouvernement sur ce sujet.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Je salue la lucidité de Mme la rapporteure : elle a rappelé les raisons pour lesquelles le Gouvernement sera défavorable à cette proposition.
Je comprends bien vos intentions : cet amendement vise à confier aux agents de la police municipale et aux inspecteurs de salubrité les mêmes prérogatives de police judiciaire que celles dont disposent les officiers de police judiciaire en matière d’habitat indigne.
Toutefois, confier aux policiers municipaux le soin de conduire seuls une enquête de police judiciaire dans son intégralité constitue un véritable bouleversement des missions qui leur sont confiées. Un tel changement doit s’inscrire dans le cadre d’une réflexion plus large.
À ce jour, il nous apparaît totalement inenvisageable de leur permettre, par exemple, de placer des personnes soupçonnées d’avoir commis une infraction en garde à vue. Peut-on aujourd’hui leur confier cette mission ? Le Gouvernement aujourd’hui n’y est pas prêt.
Peut-être faudrait-il retravailler cet amendement dans un autre véhicule législatif, telle une proposition de loi, dans le cadre d’une réflexion plus large sur le rôle de la police municipale. Pour l’heure, je le répète, je ne souhaite pas voir prospérer cet amendement.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour explication de vote.
Mme Viviane Artigalas. Une expérimentation dans des villes volontaires permettrait d’évaluer ce qu’il convient ensuite de faire sur ce sujet.
Tel qu’il est rédigé, cet amendement, qui tend par ailleurs à prévoir une convention avec l’État et le parquet, ne vise pas à laisser les agents exercer seuls des responsabilités qui incombent à l’État.
Le dispositif expérimental que nous proposons nous permettrait d’avancer sur la question de l’habitat indigne. Il s’agit de confier aux policiers municipaux des pouvoirs dans ce domaine, et uniquement dans ce domaine, non de revoir globalement leurs pouvoirs.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Je précise qu’une mission d’information à l’Assemblée nationale a été conduite sur ce sujet, conjointement par Lionel Royer-Perreaut et Alexandre Vincendet. Peut-être pourriez-vous travailler sur le fondement de leurs travaux et de leurs conclusions pour réformer de façon plus large le rôle de chacun.
À ce stade, néanmoins, je le répète, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Antoinette Guhl, pour explication de vote.
Mme Antoinette Guhl. Nous voterons cet amendement tendant à proposer une expérimentation, parce qu’il faut bien chercher des solutions.
La quasi-totalité des élus qui ont été auditionnés par la commission sont favorables à ce type d’expérimentation. Tous disent qu’ils ont besoin de mobiliser leur police municipale pour traiter l’habitat insalubre, faute, certes, d’effectifs suffisants et disponibles dans la police nationale.
Je pense qu’il vaut la peine de tenter cette expérimentation. Nous verrons ensuite s’il convient de la généraliser.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 90 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 8 bis A
(Supprimé)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 94 est présenté par Mmes Artigalas et Linkenheld, M. Kanner, Mme Brossel, MM. Féraud et Lurel, Mme Narassiguin, MM. Ros, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 153 est présenté par MM. Buis, Buval, Fouassin, Patriat, Bitz et Mohamed Soilihi, Mmes Schillinger, Cazebonne, Duranton et Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud, Rohfritsch et Théophile.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après le 5° de l’article 776-1 du code de procédure pénale, il est inséré un 6° ainsi rédigé :
« 6° À l’association pour le développement du service notarial, placée sous le contrôle du Conseil supérieur du notariat, en vue de mettre en œuvre l’article L. 551-1 du code de la construction et de l’habitation. »
La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour présenter l’amendement n° 94.
Mme Viviane Artigalas. Lors de l’examen du texte en commission, l’article 8 bis A relatif à l’accès des notaires au bulletin n° 2 du casier judiciaire des personnes morales a été supprimé, au motif que cette disposition était satisfaite.
Cet article a été introduit dans le texte à l’Assemblée nationale à la suite de l’adoption d’un amendement du Gouvernement, au motif que, en l’état actuel de la législation, les notaires ne peuvent avoir accès au bulletin n° 2 du casier judiciaire des personnes morales.
Ce point est essentiel et mérite une clarification de la part du Gouvernement. Monsieur le ministre, les notaires ont-ils un accès effectif au bulletin n° 2 du casier judiciaire des personnes morales ?