compte rendu intégral
Présidence de Mme Pascale Gruny
vice-présidente
Secrétaires :
M. Pierre Cuypers,
Mme Victoire Jasmin.
1
Procès-verbal
Mme le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Mise au point au sujet d’un vote
Mme le président. La parole est à Mme Françoise Dumont, pour une mise au point au sujet d’un vote.
Mme Françoise Dumont. Lors du scrutin public n° 158, Mme Sylvie Goy-Chavent souhaitait s’abstenir.
Mme le président. Acte est donné de votre mise au point. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin concerné.
3
Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023
Suite de la discussion d’un projet de loi
Mme le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, dont le Sénat est saisi en application de l’article 47-1, alinéa 2, de la Constitution (projet n° 368, rapport n° 375, avis n° 373).
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de la première partie, à l’article 6.
PREMIÈRE PARTIE (suite)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2023
Article 6
Est approuvé le rapport figurant en annexe à la présente loi modifiant, pour les quatre années à venir (2023 à 2026), les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses, par branche, des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes, ainsi que l’objectif national de dépenses d’assurance maladie.
Annexe
RAPPORT DÉCRIVANT LES PRÉVISIONS DE RECETTES ET LES OBJECTIFS DE DÉPENSES, PAR BRANCHE, DES RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE, LES PRÉVISIONS DE RECETTES ET DE DÉPENSES DES ORGANISMES CONCOURANT AU FINANCEMENT DE CES RÉGIMES AINSI QUE L’OBJECTIF NATIONAL DE DÉPENSES D’ASSURANCE MALADIE POUR LES QUATRE ANNÉES À VENIR
La présente annexe décrit l’évolution des agrégats de dépenses, de recettes et de soldes de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) pour la période 2023-2026.
Le solde des régimes obligatoires de base a connu en 2020, sous l’effet des dépenses de crise sanitaire et de la récession qui a suivi, une dégradation sans précédent et a atteint le niveau de -39,7 milliards d’euros. Il s’est redressé en 2021 à -24,3 milliards d’euros, sous l’effet de la reprise progressive de l’activité et de l’atténuation graduelle des contraintes sanitaires, et est prévu en 2022 à -18,9 milliards d’euros dans la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023.
La reprise de l’activité économique se poursuivrait en 2023, bien qu’en ralentissement après les forts rebonds enregistrés en 2021 et en 2022. Les dépenses liées à la crise sanitaire diminueraient sensiblement cette année, tandis que le contexte de forte inflation conduirait à l’inverse à une hausse des prestations. Au total, ces mouvements conduiraient à une nette diminution du déficit cette année, qui verrait également les premiers effets de la réforme des retraites portée par la présente loi (I). Les comptes de la sécurité sociale demeureraient toutefois fortement dégradés à moyen terme, sous l’effet de recettes durablement affectées par la crise, d’une hausse des dépenses de la branche Maladie et de la situation des comptes de la branche Vieillesse, les effets de la réforme des retraites se matérialisant seulement progressivement au gré de l’élévation progressive de l’âge de départ à la retraite et l’équilibre global du système de retraite étant en partie assuré par les régimes complémentaires de retraite, hors du champ de la présente annexe. La trajectoire présentée traduirait enfin la mise en œuvre des mesures votées dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 (II). La branche Vieillesse serait dans une situation de déficits élevés durant les années à venir, atténués par la montée en charge progressive de la réforme. La branche Maladie présenterait également des déficits élevés, bien que plus réduits, notamment du fait d’un transfert entre la branche Famille et la branche Maladie dès 2023. La branche Famille et la branche Accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) dégageraient des excédents. Enfin, la nouvelle branche Autonomie présenterait une trajectoire excédentaire à moyen terme, reflétant le surcroît de recettes de la contribution sociale généralisée (CSG) apporté en 2024, lui permettant de financer dans la durée les dépenses prévues dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 (III).
I. – La présente loi s’inscrit dans un contexte macroéconomique, inchangé par rapport à celui prévu dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, de forte poussée de l’inflation, en lien avec la situation géopolitique et sur les marchés de l’énergie, et de ralentissement marqué de la croissance attendu pour cette année.
L’hypothèse de croissance du produit intérieur brut (PIB) retenue est de 1,0 % en 2023, après 2,7 % en 2022. Le rythme d’inflation resterait toujours élevé, à 4,3 % en 2023 au sens de l’indice des prix à la consommation hors tabac (IPCHT), après 5,4 % en 2022. À moyen terme, la croissance effective du PIB serait supérieure à son rythme potentiel de 1,35 % par an et atteindrait 1,6 % en 2024, puis 1,7 % en 2025 et 2026, tandis que l’inflation refluerait pour s’établir à 1,75 % par an à cet horizon. La masse salariale du secteur privé, principal déterminant de la progression des recettes de la sécurité sociale, progresserait de 5,0 % en 2023 avant de revenir progressivement à son rythme tendanciel.
Le tableau ci-dessous détaille les principaux éléments retenus pour l’élaboration des prévisions de recettes et objectifs de dépenses décrits dans la présente annexe :
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
2024 |
2025 |
2026 |
|
PIB en volume |
1,8 % |
-7,8 % |
6,8 % |
2,7 % |
1,0 % |
1,6 % |
1,7 % |
1,7 % |
Masse salariale secteur privé * |
3,1 % |
-5,7 % |
8,9 % |
8,6 % |
5,0 % |
3,9 % |
3,6 % |
3,4 % |
Inflation hors tabac |
0,9 % |
0,2 % |
1,6 % |
5,4 % |
4,3 % |
3,0 % |
2,1 % |
1,75 % |
Revalorisations au 1er janvier ** |
0,3 % |
1,0 % |
0,4 % |
3,1 % |
2,8 % |
4,9 % |
3,2 % |
2,2 % |
Revalorisations au 1er avril ** |
0,5 % |
0,3 % |
0,2 % |
3,4 % |
3,7 % |
3,6 % |
3,2 % |
2,2 % |
ONDAM |
2,7 % |
9,4 % |
8,7 % |
2,6 % |
-1,2 % |
2,4 % |
2,7 % |
2,6 % |
ONDAM hors covid |
2,7 % |
3,3 % |
6,3 % |
5,6 % |
3,5 % |
2,8 % |
2,7 % |
2,6 % |
* Masse salariale du secteur privé. Hors prime exceptionnelle de pouvoir d’achat et prime de partage de la valeur ajoutée, la progression serait de 4,8 % en 2023. |
||||||||
** En moyenne annuelle, incluant les effets en moyenne annuelle de la revalorisation anticipée au 1er juillet 2022 de 4,0 %. |
La trajectoire présentée dans cette annexe repose sur les mesures votées dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 ainsi que la réforme des retraites présentée dans la présente loi. Le solde atteindrait ainsi -7,5 milliards d’euros en 2023.
La trajectoire de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) intègre en 2023 une provision d’un milliard d’euros au titre des dépenses liées à la crise sanitaire. La progression de l’ONDAM hors crise est par ailleurs marquée à partir de 2020 par le « Ségur de la santé ». La progression hors dépenses de crise restera soutenue, à +3,5 % en 2023, en lien notamment avec la poursuite de la montée en charge du « Ségur » mais également avec la revalorisation de 3,5 % du point d’indice de la fonction publique intervenue en juillet 2022 et la compensation des effets de l’inflation sur les charges des établissements de santé et des établissements et services médico-sociaux (2,2 milliards d’euros d’effet cumulé). La progression tendancielle de l’ONDAM, c’est-à-dire avant mesures d’économies, atteindrait 4,4 % cette année, tenant compte, au-delà des effets liés au contexte d’inflation, de la montée en charge des mesures nouvelles dans ce champ, en ville, à l’hôpital et dans le secteur médico-social, et des économies permises par la maîtrise médicalisée et la lutte contre la fraude. L’atteinte du taux de progression de 3,5 % hors crise sera permise par les mesures de régulation et d’économie, s’élevant à un total de 1,7 milliard d’euros. Dans une perspective pluriannuelle, le taux de progression de l’ONDAM hors crise serait ramené à 2,8 % en 2024, puis à 2,7 % en 2025 et à 2,6 % en 2026.
Dans le champ des régimes de base de retraite, la trajectoire intègre les dispositions présentées dans la présente loi, portant une hausse progressive de l’âge d’ouverture des droits (AOD) de soixante-deux à soixante-quatre ans, au rythme d’un trimestre par génération à compter du 1er septembre 2023, et une accélération de la durée d’assurance requise (DAR), au rythme d’un trimestre par génération, contre un trimestre toutes les trois générations jusqu’à présent. La trajectoire intègre également des mesures d’accompagnement et de hausse des minima de pensions. Ces mesures viseront, en premier lieu, à dispenser de la hausse de l’AOD les personnes inaptes au travail ou reconnues invalides. Elles permettront également aux assurés ayant commencé à travailler précocement de partir plus tôt que l’âge de droit commun avec notamment un renforcement du dispositif « carrières longues », développeront les transitions entre l’activité et la retraite et amélioreront les dispositifs de prévention et de réparation de l’usure professionnelle. Enfin, les minima de pension seront revalorisés pour les nouveaux retraités à partir de 2023 mais également pour ceux déjà partis à la retraite et bénéficiant du minimum contributif. La réforme emporte également des mesures en recettes, avec des hausses des taux des cotisations vieillesse dues par les employeurs publics (Caisse nationale de retraites des agents des collectivités territoriales [CNRACL]) et par les employeurs privés, cette hausse étant compensée pour ces derniers par une baisse à due concurrence des cotisations AT-MP. La présente annexe porte sur le champ des régimes obligatoires de base et du FSV à l’horizon 2026, mais la réforme des retraites présentée dans la présente loi aura des impacts financiers qui monteront en charge au-delà de 2026, ainsi que sur les régimes complémentaires. Le système de retraite pris dans son ensemble retournera ainsi à l’équilibre à l’horizon 2030. Une étude d’impact financière spécifique a été jointe au projet de loi.
Dans le champ de la famille, la trajectoire intègre, sur un horizon pluriannuel, la réforme du service public de la petite enfance ainsi que celle du complément de mode de garde et l’augmentation de l’allocation de soutien familial intervenue en novembre 2022.
Dans le champ de l’autonomie, elle intègre un plan de recrutements d’aides-soignants et d’infirmiers en établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), l’accroissement des moyens consacrés au maintien à domicile avec le développement des services de soins infirmiers à domicile (SSIAD) et la mise en place de temps dédiés au lien social auprès de nos aînés bénéficiant d’un plan d’aide à domicile.
Le Haut Conseil des finances publiques (HCFP), dans son avis publié le 18 janvier 2023 relatif au projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, « considère que la prévision de croissance [pour 2023] associée au PLFRSS reste élevée » et que les prévisions d’inflation et de masse salariale sont « un peu basses ». S’agissant de la trajectoire des comptes publics et de l’impact de la réforme des retraites sur l’équilibre 2023, il considère que le « coût net estimé à 0,4 Md€ […] est réaliste ».
II. – Au-delà du contexte macroéconomique, la trajectoire financière traduit la normalisation progressive de la situation sanitaire et la mise en œuvre des mesures votées en loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 ainsi que la réforme du système de retraite présentée dans la présente loi.
Comme lors de la crise économique et financière de 2008-2009, la sécurité sociale a joué un rôle majeur d’amortisseur économique et social, tant en matière de prélèvements que de dépenses. Majoritairement proportionnelles au niveau d’activité, les recettes se sont fortement contractées alors que les dépenses se sont maintenues s’agissant des prestations retraites et famille, dont les déterminants ne sont pas affectés par la crise, et ont fortement progressé pour ce qui concerne la branche Maladie.
Après un net rebond en 2021, à +8,0 % sur l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale (ROBSS) et du FSV pris à périmètre constant, les recettes auraient continué de progresser de +5,3 % en 2022 selon les prévisions de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, portées par la progression de l’emploi et des salaires, dans un contexte de forte inflation produisant ses effets au-delà des règles d’indexation automatique du salaire minimum (+8,6 % de progression de la masse salariale privée). Dans le même temps, les dépenses ont également été dynamiques mais dans une moindre proportion. Elles progresseraient de 4,1 % en valeur en 2022. En résultante, le déficit des régimes obligatoires de base et du FSV diminuerait à nouveau en 2022 de 5,4 milliards d’euros et s’établirait à 18,9 milliards d’euros.
En 2023, le déficit des régimes obligatoires de base et du FSV atteindrait 7,5 milliards d’euros, en très nette amélioration par rapport à 2022 (11,4 milliards d’euros). Les dépenses ne progresseraient que de 2,0 %, à la faveur d’une diminution des dépenses sous ONDAM du fait de dépenses liées à la crise attendues en net repli, provisionnées à hauteur de 1 milliard d’euros, mais avec une poursuite des effets de l’inflation sur les prestations : à la revalorisation anticipée de 4,0 % de juillet 2022 s’est ainsi ajoutée une revalorisation de 0,8 % au 1er janvier 2023 pour les retraites et s’ajouterait au 1er avril 2023, pour les autres prestations sociales, une revalorisation de 1,7 %. Les recettes croîtraient de 4,0 %, soutenues par la masse salariale du secteur privé.
À partir de 2024, les prestations continueraient d’être portées par le contexte d’inflation persistant, mais avec un effet retard moyen d’une année pour les pensions et les autres prestations, alors que les recettes réagiraient davantage au contexte contemporain de l’année. Le ralentissement progressif de l’inflation, au rythme d’un point par an environ (de 4,3 % en 2023 à 2,1 % en 2025), participerait ainsi à une dégradation du solde en 2024 et à nouveau en 2025, malgré une progression maîtrisée de l’ONDAM et la montée en charge progressive de la réforme des retraites. En 2024, le déficit des régimes obligatoires de base et du FSV se creuserait ainsi à 8,9 milliards d’euros, les recettes évoluant de +4,2 %, légèrement en deçà de la dépense (+4,3 %). En 2025, il atteindrait 12,7 milliards d’euros, avec une progression des recettes de +3,1 %, moindre que celle des dépenses (+3,7 %). Le déficit se réduirait à partir de 2026, l’effet du différentiel d’inflation d’une année sur l’autre disparaissant quasiment alors que les effets de la réforme des retraites continueraient de monter en charge. Il atteindrait ainsi 12,3 milliards d’euros à cet horizon.
III. – D’ici 2026, les branches des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale connaîtraient des évolutions différenciées.
La branche Maladie, qui connaîtrait une nouvelle résorption de son déficit en 2022 avec un solde atteignant -21,9 milliards d’euros, verrait son solde se redresser plus nettement, à -7,2 milliards d’euros en 2023, sous l’effet de dépenses de crise attendues en très nette baisse (1 milliard d’euros provisionnés). L’amélioration du solde serait par ailleurs soutenue par le transfert pérenne du coût des indemnités journalières liées au congé maternité post-natal, de 2 milliards d’euros en 2023.
Le projet de loi prévoit un financement du fonds de prévention à l’usure professionnelle en soutien aux employeurs des établissements publics de santé et médico-sociaux. Les effets et le financement de la hausse du taux des cotisations vieillesse de la CNRACL sont intégrés dans la trajectoire. La branche Maladie verrait son solde s’améliorer continuellement à l’horizon 2026, en raison à la fois de recettes dynamiques et de dépenses évoluant de manière contenue. En 2026, son déficit s’établirait à 3,2 milliards d’euros.
La branche Autonomie verrait son solde passer en déficit en 2022, à -0,4 milliard d’euros, et se creuser à nouveau en 2023, sous l’effet d’un objectif global de dépenses porté respectivement à 5,1 % et à 5,2 % dans les champs des personnes âgées et des personnes handicapées. Il atteindrait -1,3 milliard d’euros en 2023.
À partir de 2024, la branche Autonomie bénéficiera d’une fraction de CSG augmentée de 0,15 point supplémentaire de la part de la CADES, en application de la loi n° 2020-992 du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie. La Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) afficherait alors un excédent de 0,7 milliard d’euros, qui diminuerait par la suite, du fait notamment de 50 000 créations à terme de postes en EHPAD et du financement de temps dédiés au lien social auprès des personnes âgées qui bénéficient d’un plan d’aide à domicile. La branche financera par ailleurs la meilleure prise en compte des trimestres cotisés au titre du congé proche aidant dans le cadre de la présente réforme.
S’agissant de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP), son excédent passerait à 2,0 milliards d’euros en 2022, puis s’élèverait à 2,2 milliards d’euros en 2023. À partir de 2024, la branche verrait le niveau de ses cotisations baisser au bénéfice de la branche retraite. De plus, elle prendrait en charge de nouvelles dépenses liées à la meilleure prise en compte de la pénibilité et de l’usure professionnelle dans le cadre de la réforme. Au total, son excédent atteindrait encore 2,1 milliards d’euros en 2026.
Le solde de la branche Vieillesse des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale et du FSV poursuivrait en 2022 son amélioration engagée en 2021, après le creux enregistré en 2020, à -1,2 milliard d’euros.
À partir de 2023, le solde de la branche serait directement affecté par les effets démographiques du vieillissement (augmentation de la taille des générations qui partent à la retraite) et par la dégradation marquée du solde de la CNRACL mais bénéficierait de la hausse progressive de l’âge effectif de départ portée par la présente loi. Le solde de la branche serait également particulièrement sensible au contexte d’inflation, notamment au ralentissement projeté des prix, avec comme conséquence une progression des recettes en phase avec le contexte de prix de l’année, moindre cependant que l’inflation de l’année précédente dont s’approche le taux de revalorisation appliqué au 1er janvier de l’année. Ainsi, en 2023, les revalorisations des pensions liées à la prise en compte de l’inflation porteraient la progression des charges de la branche vieillesse et du FSV à 4,5 %, contre 4,0 % pour les recettes. Le déficit de la branche, y compris fonds de solidarité active, atteindrait ainsi 2,6 milliards d’euros en 2023 et jusqu’à 12,1 milliards d’euros à l’horizon 2026. Les éléments relatifs à l’ensemble des régimes, qui permettent d’atteindre l’équilibre à l’horizon 2030, sont présentés dans l’étude d’impact du projet de loi.
La branche Famille verrait son excédent se réduire légèrement en 2022, à 2,6 milliards d’euros, reflétant le transfert d’une fraction de taxe sur les salaires à la branche Maladie décidé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 pour compenser le coût lié aux indemnités journalières dérogatoires pour garde d’enfants (1,0 milliard d’euros) supporté par cette branche.
L’excédent serait moindre en 2023 en raison du transfert de la part du congé maternité post-natal, pour 2,0 milliards d’euros, prévu par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022. De plus, conformément aux engagements du Président de la République, l’allocation de soutien familial a été revalorisée de 50 % en novembre 2022. L’excédent de la branche Famille diminuerait ainsi de moitié, pour s’établir à 1,3 milliard d’euros en 2023.
À l’horizon 2026, l’excédent de la branche diminuerait et s’élèverait à 0,8 milliard d’euros, du fait de dépenses portées par l’indexation des prestations légales et de la montée en charge des mesures du quinquennat concernant la branche Famille s’agissant du complément de mode de garde et du service public de la petite enfance.
Prévisions des recettes, dépenses et soldes des régimes de base et du FSV
Recettes, dépenses et soldes de l’ensemble des régimes obligatoires de base
(En milliards d’euros) |
||||||||
2019 |
2020 |
2021 |
2022 (p) |
2023 (p) |
2024 (p) |
2025 (p) |
2026 (p) |
|
Maladie |
||||||||
Recettes |
216,6 |
209,8 |
209,4 |
221,0 |
231,2 |
238,4 |
244,7 |
251,7 |
Dépenses |
218,1 |
240,3 |
235,4 |
242,9 |
238,4 |
243,9 |
249,7 |
254,9 |
Solde |
-1,5 |
-30,5 |
-26,1 |
-21,9 |
-7,2 |
-5,4 |
-5,0 |
-3,2 |
Accidents du travail et maladies professionnelles |
||||||||
Recettes |
14,7 |
13,5 |
15,1 |
16,2 |
17,0 |
16,9 |
17,5 |
18,2 |
Dépenses |
13,6 |
13,6 |
13,9 |
14,2 |
14,8 |
15,3 |
15,7 |
16,1 |
Solde |
1,1 |
-0,1 |
1,3 |
2,0 |
2,2 |
1,6 |
1,8 |
2,1 |
Famille |
||||||||
Recettes |
51,4 |
48,2 |
51,8 |
53,5 |
56,7 |
58,5 |
60,3 |
62,2 |
Dépenses |
49,9 |
50,0 |
48,9 |
50,9 |
55,3 |
57,7 |
59,8 |
61,4 |
Solde |
1,5 |
-1,8 |
2,9 |
2,6 |
1,3 |
0,8 |
0,5 |
0,8 |
Vieillesse |
||||||||
Recettes |
240,0 |
241,2 |
249,4 |
258,9 |
269,7 |
281,8 |
291,1 |
299,3 |
Dépenses |
241,3 |
246,1 |
250,5 |
261,9 |
273,7 |
290,1 |
303,6 |
314,2 |
Solde |
-1,3 |
-4,9 |
-1,1 |
-3,0 |
-3,9 |
-8,3 |
-12,6 |
-14,9 |
Autonomie |
||||||||
Recettes |
32,8 |
35,0 |
36,3 |
40,3 |
41,3 |
42,5 |
||
Dépenses |
32,6 |
35,4 |
37,5 |
39,6 |
41,1 |
42,4 |
||
Solde |
0,3 |
-0,4 |
-1,3 |
0,7 |
0,2 |
0,2 |
||
Régimes obligatoires de base de sécurité sociale consolidés |
||||||||
Recettes |
509,1 |
499,3 |
544,2 |
569,6 |
593,2 |
617,5 |
636,2 |
655,0 |
Dépenses |
509,2 |
536,5 |
567,0 |
590,3 |
601,1 |
628,1 |
651,3 |
670,1 |
Solde |
-0,2 |
-37,3 |
-22,7 |
-20,7 |
-8,8 |
-10,7 |
-15,0 |
-15,1 |
Recettes, dépenses et soldes du Fonds de solidarité vieillesse
(En milliards d’euros) |
||||||||
2019 |
2020 |
2021 |
2022 (p) |
2023 (p) |
2024 (p) |
2025 (p) |
2026 (p) |
|
Recettes |
17,2 |
16,7 |
17,7 |
19,8 |
20,6 |
21,5 |
22,2 |
23,1 |
Dépenses |
18,8 |
19,1 |
19,3 |
18,0 |
19,3 |
19,7 |
19,9 |
20,3 |
Solde |
-1,6 |
-2,5 |
-1,5 |
1,8 |
1,3 |
1,8 |
2,3 |
2,8 |
Recettes, dépenses et soldes des régimes obligatoires de base et du Fonds de solidarité vieillesse
(En milliards d’euros) |
||||||||
2019 |
2020 |
2021 |
2022 (p) |
2023 (p) |
2024 (p) |
2025 (p) |
2026 (p) |
|
Recettes |
508,0 |
497,2 |
543,0 |
571,8 |
594,9 |
619,6 |
638,9 |
658,1 |
Dépenses |
509,7 |
536,9 |
567,3 |
590,7 |
602,4 |
628,5 |
651,6 |
670,4 |
Solde |
-1,7 |
-39,7 |
-24,3 |
-18,9 |
-7,5 |
-8,9 |
-12,7 |
-12,3 |
Mme le président. La parole est à Mme Céline Brulin, sur l’article.
Mme Céline Brulin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, à la faveur de l’examen de l’article 6 et de son annexe, qui traduit l’impact budgétaire futur de cette réforme des retraites, je veux pointer l’une des nombreuses injustices que comporte ce texte, à savoir l’augmentation de la cotisation des employeurs publics et en particulier – personne n’y sera insensible ici – des collectivités.
Nos collectivités ont pourtant déjà subi la hausse du point d’indice – légitime, mais non compensée –, qui affecte leurs finances, la crise énergétique et l’inflation que nous connaissons.
Il est injuste encore que les employeurs publics, dont les collectivités, aient à payer plein pot, si j’ose dire, l’augmentation des cotisations, alors que les employeurs privés verront cette augmentation compensée par une diminution de leurs cotisations à la branche AT-MP.
Dans un pays où l’on enregistre tout de même, il faut le rappeler, trois morts par accident du travail chaque jour, c’est évidemment un non-sens.
Dans ma région, j’ai lancé un appel qui a rassemblé 500 élus et je sais que de nombreux collègues, notamment dans les travées de la gauche, ont fait de même.
Mes chers collègues, sachez que les appels en question mobilisent bien au-delà des élus de la gauche. D’innombrables élus locaux nourrissent une très forte inquiétude et sont révoltés par une décision, préparée sans concertation avec les associations, qui risque d’affecter encore de manière considérable les finances de nos collectivités.
Nous avons fait des propositions en vue de rechercher d’autres sources de financement. Malheureusement, elles n’ont pas été entendues.
Les élus nous regardent et nous devons agir en responsabilité !
Mme le président. La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas, sur l’article.
Mme Marie-Claude Varaillas. S’agissant du poids de l’austérité sur les collectivités territoriales, rappelons que les employeurs hospitaliers devront supporter un coût de 240 millions d’euros par an au titre de l’augmentation d’un point, à 31,65 %, du taux de cotisation au régime de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL).
Les employeurs territoriaux – les collectivités locales – verront chaque année leur budget grevé de 460 millions d’euros.
Cette mesure est d’autant plus regrettable qu’elle s’inscrit dans un débat plus large sur l’austérité, qui a été imposée aux collectivités depuis le pacte de Cahors.
En 2022, la droite sénatoriale avait adopté, main dans la main avec le Gouvernement, un projet de loi de programmation des finances publiques extrêmement dur qui, à défaut d’accord, a été abandonnée depuis. Elle avait ainsi validé la trajectoire de baisse des dépenses en volume, soit 15 milliards d’euros d’économies demandés dès cette année.
En adoptant l’article liminaire de cette contre-réforme des retraites, le Sénat vient de confirmer cette orientation. En 2026, les collectivités devront ainsi réduire leurs dépenses de 1,1 point, ce qui représente 27,5 milliards d’euros.
Le projet politique du Gouvernement et de la droite sénatoriale figurait en ces termes à l’article 16 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 : « Les collectivités territoriales contribuent à l’effort de réduction du déficit public et de maîtrise de la dépense publique. »
Loin de s’acquitter d’une simple contribution, les collectivités, qui sont par nature à l’équilibre, devraient ainsi absorber toute la dette publique. C’est une fuite en avant !
Dans ce contexte, et outre l’augmentation des taux, les collectivités territoriales contribueront massivement à la réforme des retraites. Sur le dos des 5,7 millions d’agents publics, le recul de l’âge légal et l’accélération de la mise en œuvre des 43 années de cotisations feront peser sur elles un coût de 2,5 milliards d’euros.
Ces 2,5 milliards d’euros seront-ils compensés ?