Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de lautonomie et des personnes handicapées, chargée des personnes handicapées. Madame la sénatrice Raimond-Pavero, je vous prie d’excuser Charlotte Caubel, qui m’a demandé de vous répondre ce matin.

Vous le savez, le Président de la République a souhaité faire de l’enfance et de sa protection un des sujets prioritaires pour les prochaines années. Dans votre question, vous avez cité la loi du 7 février 2022 : si bien des choses ont été faites au cours du précédent quinquennat, il reste encore beaucoup à faire.

La secrétaire d’État Charlotte Caubel est pleinement mobilisée pour mettre en œuvre la loi de 2022. Plusieurs décrets ont déjà été publiés : je pense notamment à celui relatif aux jeunes majeurs et à celui sur la revalorisation de la rémunération des assistants familiaux. D’ici à la fin de l’année, d’autres le seront, comme celui sur l’interdiction totale en 2024 de l’hébergement à l’hôtel des mineurs et jeunes majeurs.

Nous travaillons également à mieux accompagner les départements, une orientation à laquelle – je le sais – vous serez sensible. Nous réfléchissons actuellement avec eux à la future vague de contractualisation, à laquelle nous souhaiterions associer les ministères de l’éducation et de la justice.

Nous travaillons aussi au renforcement de la coordination des acteurs de terrain – la demande est forte en la matière – grâce à la mise en place des conseils départementaux de la protection de l’enfance.

Enfin, la Première ministre a réuni la semaine dernière le premier comité interministériel à l’enfance. Avec les ministres concernés, nous avons déterminé une quarantaine de mesures structurées autour des axes prioritaires : lutter contre les violences faites aux enfants, garantir l’égalité des chances des enfants et des jeunes, et agir pour leur offrir un meilleur avenir.

Nous sommes tous au travail, pleinement engagés et mobilisés pour mieux protéger et mieux accompagner nos enfants. Vous avez raison, le repérage des problèmes psychiques et psychiatriques, ainsi que des troubles du neuro-développement, feront partie des axes de travail auxquels nous porterons une attention particulière – et nous le ferons avec vous.

situation des urgences de manosque

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Roux, auteur de la question n° 128, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé.

M. Jean-Yves Roux. Madame la ministre, l’année 2022 a été très difficile pour les usagers du centre hospitalier de Manosque. Les 60 000 habitants du bassin de vie manosquin ont ainsi subi plusieurs mois de fermeture des urgences la nuit, en particulier cet été alors même que, durant cette période, la population du département double.

Face aux arrêts maladie, aux difficultés de recrutement et à l’épuisement des personnels, des mesures ont été prises pour renvoyer vers d’autres structures les cas les plus graves. Mais il faut souligner que ces mesures se sont heurtées à plusieurs écueils majeurs. En effet, la médecine de ville, elle aussi exsangue, ne peut prendre le relais ; quant aux solutions numériques de renvoi vers des systèmes de cartographie des soins, elles sont inadaptées aux personnes en situation d’illectronisme.

Ces situations ne sont que provisoires, et vous comprendrez que les élus souhaiteraient avoir une véritable stratégie d’accueil durable des patients en situation d’urgence dans le département, de jour comme de nuit.

Au-delà de la situation de Manosque, qui demeure très fragile, notamment pendant les périodes d’afflux touristique, c’est toute l’organisation de l’offre hospitalière du département qui ne cesse d’évoluer. Les périodes très longues de fermeture des urgences de son hôpital ont d’ailleurs affecté les habitudes prises par les patients de celui-ci.

Par ailleurs, je viens d’apprendre que, malgré l’opposition des élus et des acteurs locaux des services d’urgence, il était de nouveau question de rattacher le service mobile d’urgence et de réanimation (Smur) de Sisteron au Samu 05 – service d’aide médicale urgente des Hautes-Alpes –, ce qui viendrait considérablement affaiblir le pôle de Digne-les-Bains.

L’ensemble des services d’urgence – Samu, service départemental d’incendie et de secours (Sdis), gendarmerie, services déconcentrés de l’État – fonctionnent pourtant en bonne cohérence territoriale, à l’échelle du département, avec le souci constant de garantir un accès aux soins d’urgence dans les trente minutes.

Madame la ministre, la proximité constitue un enjeu majeur d’efficacité de la médecine d’urgence, avec la connaissance fine de l’environnement et des acteurs concernés. Chacun sait qu’une organisation stable du système de santé de proximité permet d’économiser du stress, du carburant et du temps, ce qui est un gage de prise en charge sereine des patients.

Aussi, je veux vous demander comment vous entendez conforter les principaux pôles hospitaliers du département des Alpes-de-Haute-Provence, déjà déstabilisés par la crise des urgences de Manosque, et nous rassurer sur les projets de réorganisation du Samu 04.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de lautonomie et des personnes handicapées, chargée des personnes handicapées. Monsieur le sénateur Jean-Yves Roux, les difficultés rencontrées par les urgences du site de Manosque s’inscrivent aussi dans un contexte national de manque d’urgentistes, qui exacerbe ces problèmes.

La situation des urgences fait l’objet d’une attention particulière du Gouvernement, comme en témoignent les mesures prises cet été et mises en place grâce à la mission du ministre de la santé François Braun.

Pour améliorer la situation, plusieurs leviers nationaux à résonance locale peuvent être activés : la mise en application de la loi du 26 avril 2021 visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification, dite loi Rist, qui limite l’intérim, lequel déstabilise les services, notamment d’urgence ; l’évolution de la capacité de médecine d’urgence (Camu) pour permettre aux urgentistes de conserver une activité de généraliste ; le renforcement de la médecine de ville, qui va de pair avec le réflexe du recours au 15 pour éviter des passages injustifiés aux urgences.

Au niveau local, les tensions sur le service d’accueil des urgences de Manosque font l’objet d’un suivi de l’ARS de Provence-Alpes-Côte d’Azur (Paca), grâce aux nombreux échanges hebdomadaires avec la délégation départementale des Alpes-de-Haute-Provence.

Un protocole de fonctionnement adapté en cas de manque de professionnels est en cours d’élaboration afin d’assurer la continuité de la prise en charge. Pour combler le manque de personnels, des appels à candidatures ont été lancés et la prime de solidarité territoriale a été majorée.

La fusion, un temps évoquée, du Samu des Alpes-de-Haute-Provence avec celui de Hautes-Alpes n’est plus à l’ordre du jour. L’enjeu est d’encourager les synergies et les mutualisations, par exemple en faisant opérer la régulation certaines nuits depuis le centre 15 de Digne et les autres depuis Gap.

Par ailleurs, l’ARS soutient le déploiement de dispositifs innovants d’aide médicale d’urgence dans les territoires difficiles d’accès pour le Smur.

Vous le voyez, ces différentes mesures conjuguées entre elles permettront, au travers de systèmes innovants, de faire face au manque de ressources humaines dans le secteur médical.

Mme la présidente. Nous en avons terminé avec les réponses à des questions orales.

Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures trente-cinq, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de Mme Pascale Gruny.)

PRÉSIDENCE DE Mme Pascale Gruny

vice-président

Mme le président. La séance est reprise.

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Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Discussion générale (suite)

Financement de la sécurité sociale pour 2023

Rejet en nouvelle lecture d’un projet de loi

Mme le président. L’ordre du jour appelle la discussion en nouvelle lecture du projet de loi, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, de financement de la sécurité sociale pour 2023 (projet n° 145, rapport n° 146).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre déléguée. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Question préalable (début)

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de lautonomie et des personnes handicapées, chargée des personnes handicapées. Madame la présidente, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure générale, mesdames, messieurs les sénateurs, le retour du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 en nouvelle lecture devant votre assemblée me donne l’occasion, au nom du ministère des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées et du ministère de la santé et de la prévention, d’en saluer l’importance et l’ambition.

L’importance pour nos concitoyens de tous les âges et dans toutes les situations de vie.

L’importance pour les professionnels qui les accompagnent, des premiers aux derniers jours de la vie, a fortiori dans le contexte d’incertitudes et de tensions que nous connaissons : l’inflation, la pénurie de professionnels et les doutes quant aux grandes transformations en cours se ressentent dans de nombreux secteurs. Le texte dont vous reprenez l’examen constitue une part de la réponse ambitieuse du Gouvernement en la matière.

Le premier rôle du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), c’est d’abord de financer.

L’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) est ainsi proposé à un niveau historique, de +3,7 % hors dépenses de la crise sanitaire. Cette augmentation importante s’inscrit dans la droite ligne de l’effort d’investissement que nous avons réalisé ces dernières années, notamment avec le Ségur de la santé.

Pour soutenir l’hôpital face aux épisodes hivernaux, nous ajoutons 1 milliard d’euros pour l’année 2022, comme vous l’avez voté dans cet hémicycle. Cela s’ajoute aux 543 millions d’euros supplémentaires pour faire face aux surcoûts de la crise du covid-19 adoptés à l’Assemblée nationale.

Grâce aux sénateurs, et notamment à la rapporteure Corinne Imbert, ce texte sécurise la garantie de financements pour le second semestre de 2022. Pour 2023, l’Assemblée nationale a créé un dispositif transitoire de financement des hôpitaux, afin de permettre un retour progressif à la normale.

Nous n’oublions pas la médecine de ville. Alors que la négociation conventionnelle s’ouvre, elle fait aussi l’objet de toutes nos attentions.

Mais nous ne perdons pas de vue nos responsabilités. Après la crise, ce PLFSS entend garantir la soutenabilité de la sécurité sociale. C’est pourquoi des mesures d’économies justes et proportionnées sont demandées à la radiologie ou à la biologie.

En ce qui concerne le secteur médico-social, l’Ondam augmentera de 5,1 %, contre 4,3 % en 2022, pour atteindre 30 milliards d’euros.

C’est près de 1,5 milliard d’euros de financements supplémentaires, avec notamment : 600 millions d’euros dédiés aux revalorisations salariales, c’est-à-dire aux suites du Ségur et de la conférence des métiers, ainsi qu’à l’augmentation du point d’indice dans la fonction publique et à son extension au secteur privé ; 500 millions d’euros pour le soutien de l’accueil à domicile, avec la réforme de la tarification des services de soins infirmiers à domicile et la création de places pour réduire les refus de prise en charge auxquels certaines personnes sont confrontées ; 200 millions d’euros pour recruter des soignants en établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), ce qui nous inscrit dans la trajectoire annoncée de recrutement de 50 000 professionnels dans les prochaines années ; et enfin plus de 200 millions d’euros de compensation de l’inflation.

Réponse ambitieuse donc, avec des moyens financiers importants et inédits pour les politiques de santé, du grand âge, du handicap et de la famille.

Mais le rôle du PLFSS, c’est aussi d’améliorer la vie de nos concitoyens et de préparer l’avenir.

Je pense en premier lieu à l’enjeu de la transition démographique qui est en cours dans notre pays. En 2030, un tiers de la population aura plus de 60 ans. Or le virage domiciliaire, que la majorité des Français appelle de leurs vœux, est bien en cours.

C’est pour cela que nous faisons le choix tout d’abord de renforcer les services de soins infirmiers à domicile (Ssiad), avec le financement de 4 000 nouvelles places, en cohérence avec notre trajectoire d’augmentation de 20 % d’ici à 2030.

C’est pour cela aussi que nous ajoutons deux heures de présence supplémentaire hebdomadaire pour les 780 000 personnes bénéficiaires de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) à domicile. De cette façon, nous apportons de la sérénité à des gestes de soin et aidons les professionnels à retrouver le sens de leur métier.

C’est pour cela encore que nous renforçons la lisibilité de l’offre, qui est cruciale pour que les bénéficiaires exercent un choix libre et éclairé.

D’abord, avec la poursuite de la logique de guichet unique engagée en 2022, que nous consolidons avec le forfait coordination.

Ensuite, avec l’introduction de davantage de souplesse pour les bénéficiaires de l’APA. Je salue à ce titre le travail accompli par le Gouvernement et le Parlement, qui a permis d’aboutir à une solution appropriée en s’inspirant de ce qui existe pour la prestation de compensation du handicap (PCH). La même possibilité de report des heures non utilisées sur six mois sera ainsi demain appliquée aux plans APA.

Un autre résultat du dialogue de qualité entre le Gouvernement et les assemblées, c’est l’amélioration de l’accompagnement financier des départements par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA). Les mesures de revalorisation des rémunérations des salariés des services d’aide à domicile ont eu un impact marqué sur les finances des départements. Le Gouvernement en a pris acte.

Je pense aussi, évidemment, aux mesures relatives au handicap. L’augmentation de 5,2 % de l’objectif national de dépenses pour le volet « personnes en situation de handicap » est inédite. Elle nous permet d’accélérer la mise en œuvre de grands objectifs et de politiques prioritaires.

Il s’agit entre autres : de développer davantage les relations entre l’école et les établissements médico-sociaux, par exemple en renforçant la création de services d’accompagnement à la scolarisation en milieu ordinaire, ou de poursuivre le déploiement des unités de scolarisation dédiées aux élèves polyhandicapés ; de diversifier les modalités d’accompagnement des personnes handicapées vieillissantes, pour favoriser l’accompagnement dans leur lieu de vie habituel.

Je pense aussi à la poursuite des mesures concernant l’autisme et les troubles du neuro-développement, avec 80 millions d’euros prévus. Ces financements permettront ainsi d’étendre aux 7-12 ans la politique de détection précoce, qui est l’une des réussites majeures de la stratégie nationale et qui a permis à près de 30 000 enfants depuis trois ans d’être détectés à temps et donc correctement accompagnés.

Là encore, le texte portait une ambition forte dès l’origine, amplifiée au cours de la navette parlementaire. Je pense tout particulièrement à la création de briques informatiques nationales, afin d’harmoniser les systèmes d’information des MDPH et de faciliter leur interopérabilité, pour garantir une meilleure équité de traitement sur le territoire et l’universalité des droits.

J’exprime ici le vœu que nous conservions à l’avenir un tel esprit de coconstruction dans la perspective de la prochaine Conférence nationale du handicap.

Le PLFSS contient également des mesures relatives aux familles qui concernent en particulier la réforme du complément de libre choix du mode de garde (CMG), qui doit permettre à chacune et à chacun d’occuper un emploi, mais aussi de lutter contre les inégalités à la racine, dès la petite enfance.

Nous modifions ainsi le barème du CMG, pour permettre aux familles qui ne recourent pas à la crèche de faire garder leur enfant au même coût par une assistante maternelle. De même, nous étendons le CMG au-delà de l’âge de 6 ans et jusqu’à l’entrée au collège pour les familles monoparentales.

L’engagement du Gouvernement est total aux côtés des familles monoparentales, dont 30 % vivent dans la pauvreté et dont le parent seul est une femme dans 90 % des cas. Cet engagement passe aussi, depuis le 1er novembre dernier, par l’augmentation de 50 % de la pension alimentaire minimale. Cette mesure doit faire baisser le taux de pauvreté des familles monoparentales de 2,2 points.

À cela s’ajoutent les créations de nouvelles places d’accueil pour combler les 200 000 places manquantes d’ici à 2030. Nous savons que 160 000 parents ne reprennent pas leur travail faute de solution. C’est donc un enjeu d’égalité des chances, de développement pour les enfants, d’accès à l’emploi et de conciliation entre vie personnelle et vie professionnelle pour leurs parents.

Ces mesures forment la première pierre du service public de la petite enfance, engagement de campagne du Président de la République, qui s’inscrit dans la droite ligne de ce qui a été fait avec les « mille premiers jours ». Nous y travaillerons, avec responsabilité et ambition, tout au long de ce quinquennat, avec les collectivités locales.

J’en viens maintenant au volet santé.

En la matière, ce texte a pour première vocation d’améliorer l’accès à la santé pour tous.

Nous capitalisons donc sur les mesures d’urgence prises cet été. Le Président de la République l’avait annoncé et c’est une mesure forte face aux territoires sous-dotés : nous exonérons de cotisations de retraite les médecins retraités qui souhaiteraient continuer à s’engager dans notre système de santé.

Nous actionnons également plusieurs leviers pour reconquérir du temps soignant dans tous les territoires. Je pense tout d’abord à la création d’une quatrième année de consolidation dans le cursus du diplôme d’études spécialisées de médecine générale. Un véritable projet pédagogique permettra, durant cette année supplémentaire d’internat, d’accompagner les futurs médecins pour leur installation rapide. Une mission lancée conjointement par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche et le ministère de la santé et de la prévention permettra par ailleurs d’engager une concertation avec l’ensemble des parties prenantes sur les conditions de succès de cette réforme.

Nous souhaitons également, à l’heure où s’ouvrent les négociations conventionnelles, créer un cadre plus adapté, afin d’accompagner pleinement les engagements réciproques qui feront l’objet des discussions dans le cadre du Conseil national de la refondation en santé (CNR Santé).

L’objectif est d’améliorer la réponse aux besoins de santé dans les territoires, et de créer les conditions d’un renforcement du temps soignant dans les zones sous-denses.

Enfin, nous simplifions et renforçons la politique d’aide à l’installation. Le Gouvernement entend harmoniser les dispositifs d’aide, en renvoyant l’ensemble de ceux qui sont portés par l’État au champ conventionnel, sauf pour les étudiants et les remplaçants.

En parallèle, les territoires seront incités à généraliser des guichets uniques, pour apporter plus facilement des réponses concrètes à toutes les questions que se posent les jeunes médecins avant de s’installer en libéral.

Enfin, il faut souligner que ce PLFSS permet de se projeter au-delà de l’année à venir.

Il a ainsi pour ambition de remettre durablement l’éthique au cœur du système de santé.

Il en va ainsi du recours à l’intérim. Malgré une volonté de la part des pouvoirs publics de mieux le réguler, il a pris trop d’importance, avec un coût financier inacceptable à l’heure où nous devons rééquilibrer les comptes de la sécurité sociale.

Surtout, il engendre une déstabilisation des services et des équipes, notamment dans les territoires démographiquement fragiles en professionnels de santé.

Ce PLFSS renforce donc la régulation de l’intérim – à ce propos, je veux rappeler l’amendement du groupe RDPI dont l’adoption rend ces mesures applicables aux entreprises intérimaires situées à l’étranger (M. Martin Lévrier acquiesce.) –, une évolution qui ira de pair avec les travaux à engager en matière d’accompagnement des débuts de carrière, au service des jeunes professionnels.

Enfin, ce PLFSS transforme le système de santé en accélérant le virage préventif au travers de plusieurs dispositions importantes.

Les rendez-vous de prévention aux âges clés de la vie constituent une première innovation majeure. Vaccination, dépistage des cancers, santé sexuelle, habitudes de vie, dépistage auditif et visuel, santé mentale : les thèmes abordés au cours de ces rendez-vous seront très larges, adaptés en fonction des âges, selon une approche globale de la santé de la personne. Ces rendez-vous de prévention seront intégralement pris en charge par l’assurance maladie, sans avance de frais, de façon à réduire les inégalités.

Par ailleurs, le covid-19 l’a montré, la prévention repose aussi en grande partie sur la vaccination. Ce PLFSS prévoit donc, sur la base des recommandations de la Haute Autorité de santé, d’étendre aux pharmaciens, aux infirmiers et aux sages-femmes la faculté de prescrire et de réaliser des vaccins. Cette mesure permettra très concrètement de simplifier le parcours des patients en augmentant le nombre de professionnels habilités à vacciner.

Ce PLFSS renforce également la prévention en améliorant la santé sexuelle. Le Gouvernement souhaite faciliter le dépistage des infections sexuellement transmissibles au-delà du seul VIH : désormais réalisable sans ordonnance et intégralement remboursé, ce dépistage visera tout particulièrement les jeunes de moins de 26 ans.

Enfin, donner le choix aux femmes de disposer de leur corps, c’est bien entendu garantir la possibilité de recourir à l’interruption volontaire de grossesse (IVG), mais aussi s’assurer que la contraception d’urgence soit accessible à toutes.

Nous proposons donc d’élargir à toutes les femmes majeures la délivrance gratuite de la contraception d’urgence hormonale en pharmacie, sans condition de prescription médicale.

En un mot, ce PLFSS concrétise notre ambition de faire de la prévention un pilier à part entière de notre système de santé.

Mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, voilà les premières briques que pose ce PLFSS, un texte de responsabilité qui répond aux urgences d’aujourd’hui tout en préparant les défis de demain, un texte qui conserve aussi certains de vos apports, signe que le débat a été fécond en première lecture dans votre chambre. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme le président. La parole est à Mme la rapporteure générale. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Madame la ministre, vous avez raison, le projet de loi de financement de la sécurité sociale est un rendez-vous important, et ce pour deux raisons : tout d’abord, il y va d’un budget de 600 milliards d’euros, soit cinq fois le budget de la défense – je ne cesse de le répéter ; ensuite, ce texte est le véritable carrefour de la protection sociale de toutes les Françaises et de tous les Français.

Après l’échec de la commission mixte paritaire, l’Assemblée nationale a examiné ce projet de loi en nouvelle lecture.

Les députés ont pu débattre en séance de l’article liminaire, qu’ils ont amendé pour coordination, et de la première partie relative aux comptes de 2021, qu’ils ont curieusement adoptée conforme. Ainsi ont-ils adopté l’article 1er dans la version issue des travaux du Sénat, en suivant les préconisations de la Cour des comptes. Mais ils n’ont pas pour autant amendé l’article 2, qui approuve le tableau patrimonial ; de ce fait, l’un des articles affiche un déficit de 29,3 milliards d’euros pour l’année dernière, et l’autre un déficit de seulement 24,3 milliards d’euros. Une telle discordance est pour le moins curieuse et pourrait conduire le Conseil constitutionnel à s’interroger sur la sincérité de ces dispositions, s’il en était saisi.

Enfin, les députés ont examiné la deuxième partie, sur les comptes de l’année en cours. Dans ce cadre, ils ont essentiellement adopté une nouvelle rallonge, de 500 millions d’euros, de l’Ondam 2022, destinée à compléter les financements octroyés au système hospitalier et ainsi à « compenser les surcoûts liés à l’épidémie de covid-19 pour les établissements de santé en 2022 ». La rectification de l’Ondam 2022 est ainsi portée à un peu plus de 10 milliards d’euros par rapport au montant voté dans la LFSS pour 2022.

Madame la ministre, comme nous l’avons constaté en commission, cette nouvelle révision est de nature à conforter la grande prudence du Sénat quant aux estimations du Gouvernement pour ce qui concerne l’enveloppe de 2023, d’autant que la provision prévue n’est que de 1 milliard d’euros.

Une fois passé l’examen de ces cinq articles, la suite a été beaucoup plus expéditive, puisque le Gouvernement a engagé sa responsabilité à deux reprises, l’une au tout début de la troisième partie, l’autre au tout début de la quatrième partie. Il n’y a donc eu aucun débat en séance sur ces deux parties en nouvelle lecture. Et ni la partie « recettes » ni la branche maladie n’auront fait l’objet d’un quelconque débat en séance publique à l’Assemblée nationale lors de l’examen de ce PLFSS, en première lecture comme en nouvelle lecture…

Ce sont donc bien les dispositions que le Gouvernement a souhaité retenir qui nous sont soumises aujourd’hui, madame la ministre.

Or reconnaissons que les apports du Sénat qui figurent dans ce texte sont particulièrement modestes.

Dans la partie « recettes », on retiendra pour l’essentiel un amendement à l’article 11 bis tendant à aligner le régime social des rachats de RTT et celui des heures supplémentaires pour les entreprises de 20 à 249 salariés.

Sur le volet autonomie, on soulignera la reprise d’un amendement de Bernard Bonne qui traduisait l’une des recommandations du rapport sur le contrôle des Ehpad, à savoir le plafonnement du montant des excédents pouvant être mis en réserve.

Sur le volet maladie, je signalerai le maintien de la prolongation de la garantie de financement des établissements de santé. On peut évoquer aussi un amendement visant à encadrer le développement de la biologie médicale délocalisée, qui intervient lorsque le prélèvement ou la phase analytique d’un examen de biologie est réalisé en dehors d’un laboratoire de biologie médicale.

Enfin, conformément au souhait de la rapporteure pour l’assurance maladie, Corinne Imbert, et de la présidente de la commission des affaires sociales, Catherine Deroche, l’entrée en vigueur de la réforme du financement des activités de soins de suite et de réadaptation est reportée au 1er juillet 2023.

Et c’est à peu près tout pour ce qui concerne les mesures véritablement normatives. (MM. Bernard Bonne et René-Paul Savary feignent létonnement.)