Mme Sophie Primas. Un box à vélo !
M. Roger Karoutchi. … 16 mètres carrés en petite couronne et 18 mètres carrés en Île-de-France !
M. Patrice Joly. C’est aussi 150 mètres carrés dans la Nièvre !
M. Roger Karoutchi. Faut-il considérer que tous les propriétaires franciliens sont riches, y compris ceux qui ne possèdent qu’un studio, et que par conséquent il convient de les taxer encore plus ?
L’assurance vie, c’est un choix ancien pour beaucoup de nos concitoyens. Les spéculateurs ne s’y intéressent pas ! Inventez des taxes sur la spéculation, et je vous suivrai,…
M. Pierre Laurent. Parfait, l’amendement suivant porte sur la flat tax !
M. Roger Karoutchi. … mais ne vous en prenez pas à ceux qui placent leur épargne sur des contrats d’assurance vie en prétendant qu’ils sont riches. Vous vous trompez de cible !
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Je n’ai quasiment rien à ajouter aux propos de Roger Karoutchi. Je ne sais pas si les impôts, c’est la santé, mais j’en connais un qui en est mort politiquement, ou presque : je veux parler de François Hollande. (Protestations sur des travées du groupe socialiste et républicain.) En 2012, vous avez ajouté d’un coup 30 milliards d’euros de prélèvements supplémentaires !
M. Claude Raynal. Fillon a fait pareil en 2009 !
M. Philippe Dallier. Justement, tirons-en les leçons ! Quand la gauche est arrivée au pouvoir en 2012, la crise était déjà un peu derrière nous,…
M. Claude Raynal. Ah bon !
M. Philippe Dallier. … mais elle a rajouté 30 milliards d’euros de prélèvements, sans pour autant réduire réduit le chômage ni la dette. Au bout du compte, elle en est presque morte politiquement !
M. Patrick Kanner. Des morts, il y en a d’autres ! (Rires sur les travées du groupe SOCR.)
M. Philippe Dallier. Sur ce plan, vous êtes tout de même au sommet !
Il aurait fallu faire l’addition des coûts induits par tous les amendements que vous avez déposés : je ne sais pas à combien de dizaines de milliards s’élèverait le total !
Franchement, la décision du Gouvernement me paraît sage. Ce n’est pas le moment, au plus fort de la crise, si tant est que nous y soyons, d’assommer tout le monde. Donnons-nous plutôt rendez-vous l’année prochaine. Avec vous, c’est toujours : un problème, une taxe, un problème, une taxe, un problème, une taxe !
M. Vincent Éblé. Non : une charge, une taxe, une charge, une taxe, une charge, une taxe !
M. Philippe Dallier. Ce n’est pas la bonne méthode.
Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Il n’y a plus de riches en France, dites-vous ? Selon une étude récente du magazine Capital – ce n’est pas l’Humanité ! –, notre pays compte 702 000 millionnaires, hors résidence principale. Il y en a eu 62 000 de plus l’an dernier : record mondial ! La France se classe au cinquième rang mondial pour le nombre de millionnaires ! Telle est la réalité ! Il y a 183 millionnaires de plus chaque jour. Depuis le début de cette séance, il y a une demi-heure, la France compte trois millionnaires de plus, hors résidence principale !
Mme Sophie Primas. C’est heureux !
M. Fabien Gay. Vous avez cassé l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale, mais, l’an dernier, 300 000 personnes de plus ont basculé dans l’extrême précarité : c’est aussi cela, la réalité !
Les inégalités ne cessent de se creuser depuis le début du quinquennat d’Emmanuel Macron. Elles se sont encore aggravées avec la crise du covid. À qui va-t-on faire payer la crise ? Pour notre part, depuis trois ans, nous proposons de faire contribuer les 1 % de Français les plus riches. Quant à vous, vous persistez à vouloir faire supporter le coût de la crise par les salariés les plus pauvres. Le débat politique entre nous va donc se poursuivre !
Mme Sophie Primas. On a besoin des riches !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote.
M. Jean-François Husson. Je partage l’avis du rapporteur général, de Philippe Dallier et de Roger Karoutchi.
J’observe que l’amendement n’est pas très bien rédigé. Il y est question des encours constitués par les personnes physiques au titre d’un contrat d’assurance sur la vie, sans autre précision. Or un contrat d’assurance vie peut avoir pour objet, selon les cas, la couverture du risque décès, la prévoyance, l’épargne et/ou la retraite, avec des droits afférents. De surcroît, ces contrats peuvent être souscrits à titre individuel ou à titre collectif. La rédaction de l’amendement manque donc singulièrement de précision.
Par ailleurs, les Français qui choisissent de placer une part de leur épargne sur un contrat d’assurance vie le font souvent parce qu’ils souhaitent une garantie, pour faire face à un coup dur ou en prévision de la retraite. Les sommes placées sont déjà soumises à l’impôt sur le revenu. Il faut donc cesser de toujours vouloir taxer subrepticement une nouvelle fois cette épargne. Je vous le dis, on ne doit jamais procéder de la sorte : c’est contreproductif au regard de l’effort consenti par les épargnants, qui est à la fois individuel et de solidarité, les actifs contribuant au financement de l’économie française.
Mme la présidente. La parole est à M. Julien Bargeton, pour explication de vote.
M. Julien Bargeton. Du fait de la crise actuelle, le déficit se creuse en raison de la baisse des recettes et de l’accroissement des dépenses, sans parler des engagements extrabudgétaires, tels que les prêts garantis. Dès lors, comment financer la dette créée ? Un grand économiste désormais plutôt revendiqué par la gauche, bien qu’il n’ait pas été membre du parti travailliste, à savoir John Maynard Keynes, explique que, en temps de crise, il ne faut pas déprimer davantage l’activité.
On peut certes poser la question du financement après retour à meilleure fortune. C’est un débat ancien, mais peut-être prématuré en l’occurrence, puisque nous devrons l’avoir en 2022, en fonction de l’état de l’emploi et de la croissance. Cela étant, nous sommes ici dans une situation keynésienne classique : l’activité décroît et l’on prévoit une baisse de 11 % du PIB ; ce n’est donc pas le moment d’augmenter les impôts, quels qu’ils soient. Les dépenses supplémentaires qui ont été engagées creusent la dette, effectivement, mais on ne peut pas faire comme si ne s’était pas produite une crise sanitaire inédite, ayant des conséquences économiques et sociales elles aussi inédites. Soyons tous, chers collègues, un peu keynésiens !
Pour le reste, je soutiens la politique de baisse des impôts menée par le Gouvernement. On peut juger que cela ne va pas assez vite, qu’il faudrait faire davantage et que le taux de prélèvements obligatoires est encore trop important en France, mais il n’empêche que l’impôt sur le revenu a été réduit de 5 milliards d’euros. En tout état de cause, il ne convient pas d’avoir le débat sur la fiscalité aujourd’hui, alors que nous connaissons une récession économique à la suite de l’épidémie de covid-19.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 62 rectifié est présenté par MM. Raynal, Kanner, Éblé, Botrel et Carcenac, Mme Espagnac, MM. Féraud, P. Joly, Lalande et Lurel, Mme Taillé-Polian, MM. Antiste, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin, Bonnefoy, Cabaret et Conconne, MM. Duran, Durain et Fichet, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mme G. Jourda, M. Kerrouche, Mmes Lepage, Lubin, Meunier, Monier, Préville, S. Robert et Schoeller, M. Sueur, Mme Tocqueville et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 904 rectifié est présenté par MM. Savoldelli, Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 4 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Les articles du code général des impôts modifiés par les articles 28 et 29 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 sont rétablis dans leur rédaction antérieure à la publication de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018.
II. – Les articles du code monétaire et financier modifiés par l’article 28 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 sont rétablis dans leur rédaction antérieure à la publication de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018.
III. – Les articles du code de la construction et de l’habitation modifiés par l’article 28 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 sont rétablis dans leur rédaction antérieure à la publication de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018.
IV. – Les articles du code de la sécurité sociale modifiés par l’article 28 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 sont rétablis dans leur rédaction antérieure à la publication de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018.
V. – Les articles du livre des procédures fiscales modifiés par l’article 28 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 sont rétablis dans leur rédaction antérieure à la publication de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018.
VI. – Les articles 28 et 29 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 sont abrogés.
La parole est à M. Olivier Jacquin, pour présenter l’amendement n° 62 rectifié.
M. Olivier Jacquin. Après le prélèvement exceptionnel sur les encours d’assurance vie, nous proposons une mesure forte de justice sociale.
Je pense que, dans cette assemblée, la valeur travail est à l’honneur : personne n’a été au chômage, chacun a pu mener une belle carrière professionnelle. Notre amendement vise à supprimer un dispositif fiscal injuste : l’application d’une flat tax au taux de 30 % aux revenus du capital. Aujourd’hui, le capital est moins taxé que le travail. En termes de cohésion sociale et d’encouragement au travail, c’est un sacré paradoxe : les plus gros revenus du capital sont soumis à moins de prélèvements fiscaux que le salaire de celui qui se lève le matin pour aller au boulot… C’est profondément injuste !
Un rapport du comité d’évaluation des réformes de la fiscalité du capital, remis le 1er octobre 2019, indique que les gains fiscaux permis par cette flat tax se sont concentrés sur les 15 % de ménages les plus aisés, et particulièrement sur les 5 % les plus riches. Ceux-ci ont ainsi bénéficié d’un cadeau fiscal s’élevant, en moyenne, à 1 000 euros. Cela contribue, dans un contexte d’augmentation de la pauvreté, à intensifier les inégalités et porte atteinte à la cohésion de notre pays.
Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 904 rectifié.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Pour faire face à l’actuelle crise sociale et économique, nous pensons qu’il convient de solliciter les plus riches.
Dès qu’on l’on parle de faire payer les riches, votre réaction est caricaturale : pour vous, ce n’est jamais le moment ! Vous êtes beaucoup plus prompts lorsqu’il s’agit de faire payer les salariés de ce pays : en une journée, l’affaire est réglée… Quand il s’agit de rétablir l’ISF ou de s’attaquer à l’évasion fiscale, en revanche, ce n’est jamais le moment ! En fin de compte, ce n’est jamais le moment, pour les riches, de mettre la main à la poche ! (Exclamations ironiques sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sophie Primas. Les riches ! Encore plus de mépris !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Oui, madame, les riches existent, dans ce pays !
Cet amendement vise à supprimer le prélèvement forfaitaire unique (PFU), dit aussi flat tax, qui n’est rien d’autre qu’un nouveau cadeau fiscal d’environ 1 milliard d’euros accordé aux plus aisés, via la baisse de leur imposition.
Ce dispositif n’est pas justifié, le présupposé selon lequel une réduction de la fiscalité sur les dividendes diminuerait le coût du capital supporté par les entreprises n’ayant aucun fondement. C’est une réforme de plus aggravant les inégalités puisque, comme l’a rappelé Fabien Gay, ce sont les 5 % de ménages les plus aisés qui captent l’essentiel des gains permis par la création du PFU. Combiné à la baisse du taux de l’impôt sur les sociétés, le PFU contribue à inciter les dirigeants d’entreprise à percevoir leurs revenus sous forme de dividendes.
Nous allons citer à notre tour des économistes.
M. Jérôme Bascher. Marx ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. Gabriel Zucman estime que le coût final de cette mesure pour le budget de l’État atteindra 10 milliards d’euros par an. La flat tax contribue à priver les entreprises de capacités d’autofinancement de leurs investissements, en les amenant à privilégier l’augmentation des revenus des actionnaires par le versement de dividendes. Ceux-ci ont atteint, en 2019, un niveau record, s’élevant à plus de 60 milliards d’euros.
Il faut en finir avec cette course accélérée au moins-disant fiscal…
M. Philippe Dallier. On est les champions du monde des prélèvements obligatoires !
Mme Cathy Apourceau-Poly. … qui contribue à miner le consentement à l’impôt, celui-ci étant perçu comme une punition.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Au risque de vous décevoir, mes chers collègues, je m’en tiendrai simplement aux faits. Ce que vous proposez a déjà été expérimenté : sous le président « normal », François Hollande, les revenus du capital ont été soumis au barème de l’impôt sur le revenu. Dans le rapport que j’ai commis avec le président Éblé, un graphique montre que la contraction de la base fiscale s’est traduite, à l’époque, par une perte de recettes de 400 millions d’euros.
On peut vouloir se faire plaisir en taxant les riches, mais je suis, quant à moi, extrêmement attaché à la préservation des recettes fiscales. L’avis est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.
M. Olivier Cadic. Je voudrais revenir sur le propos de M. Joly concernant la progression exceptionnelle de l’attractivité de la France aux yeux des investisseurs étrangers.
Les grandes fortunes n’ont pas investi en France par hasard ou parce qu’elles avaient envie de payer des impôts chez nous ! Elles sont venues, au départ, parce qu’une personnalité de stature internationale, Emmanuel Macron, élu Président de la République française, tranchait avec une certaine image de la France donnée par un discours très fiscaliste. Cela a motivé les plus grands investisseurs de la planète à s’intéresser à notre pays. Emmanuel Macron les a reçus non pas n’importe où, mais à Versailles et à l’Élysée.
M. Claude Raynal. C’est beau…
M. Olivier Cadic. C’est ainsi qu’il les a attirés,…
M. Julien Bargeton. Tout à fait !
M. Olivier Cadic. … en mettant en place une équipe dédiée et des arrangements fiscaux. En particulier, un avantage fiscal non négligeable, le crédit impôt recherche (CIR), a incité de nombreux investisseurs à s’installer en France.
Pour ce qui concerne la taxation des revenus du capital, comme l’a très bien dit le rapporteur général, moins de capital induit une productivité du travail et des salaires plus faibles, et un chômage plus élevé si les salaires sont rigides.
L’idée selon laquelle le capital serait insuffisamment taxé en France est un mythe. L’addition de tous les prélèvements sur le capital y représente 4,4 % du PIB, contre seulement 1,8 % du PIB en moyenne dans les pays de l’OCDE. Moins de capital accumulé, c’est moins d’investissements, moins de richesse, et donc plus de pauvreté.
Je lis dans l’objet de l’amendement que le PFU aurait été « un cadeau fiscal ». Ce mépris du droit de propriété est assez sidérant ! (M. Pierre Laurent s’esclaffe.)
On raisonne comme si chaque euro gagné avait vocation à être absorbé par l’État. Ce n’est plus à l’État de justifier l’utilité du prélèvement fiscal ; c’est désormais au contribuable de se justifier pour l’argent qu’il a légitimement gagné. Il ne faut pas oublier que l’imposition des revenus épargnés aboutit à taxer deux fois les revenus du travail, déjà touchés fiscalement une première fois au moment de la constitution de l’épargne. On voit donc mal où est le cadeau fiscal, ou même la justice fiscale !
Alors que nous traversons la pire récession depuis 1945, il est plus urgent que jamais, mes chers collègues, de revoir ce rapport à l’impôt. (Applaudissements sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Avec le PFU, nous parlons non plus des propriétaires de 13 mètres carrés à Paris, monsieur Karoutchi, mais d’une tout autre catégorie de contribuables !
Vous nous expliquez que plus on baissera les impôts des 5 % de contribuables les plus riches, mieux cela ira. Prenons des cas concrets : Patrick Drahi crée-t-il de la richesse et de l’emploi ? On pourrait multiplier les exemples de grandes fortunes qui s’accroissent à coups de cadeaux fiscaux et de suppressions d’emplois et qui bénéficient, au travers des entreprises dont elles détiennent une part du capital, de toutes les exonérations fiscales et sociales. Tout cela pour continuer à licencier, à précariser les salariés, à s’enrichir ?
Selon vous, plus on s’enrichit, plus on enrichit son pays : la démonstration reste à faire ! Ce qui enrichit le pays, c’est le travail, et non ceux qui s’enrichissent sur le travail. Ce n’est pas la même chose !
Dans un moment de crise comme celui que nous connaissons, demander un peu de solidarité à ceux qui s’enrichissent en permanence sur le travail, c’est une question non seulement de justice fiscale, mais aussi d’efficacité économique. Si l’on continue à encourager ceux qui s’enrichissent en licenciant, en captant la richesse produite par le travail, on n’est pas près de sortir de la crise !
On pourrait résumer votre recette en ces termes : importons des riches, et tout ira mieux. S’il s’agit de riches qui exploitent le travail au lieu de développer la richesse nationale, il n’y aura pas de sortie de crise ! Votre raisonnement est donc non seulement injuste socialement, mais aussi faux économiquement. (Mme Sophie Primas s’exclame.)
Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Segouin, pour explication de vote.
M. Vincent Segouin. Vous avez cité Patrick Drahi, mon cher collègue, mais la flat tax touche surtout des boulangers, des notaires, des dirigeants de petites entreprises…
Par ailleurs, à la flat tax s’ajoute la CSG : au total, le taux de taxation est proche de 50 %. Drahi ne représente pas grand-chose par rapport à toutes ces entreprises que vous pénalisez, que vous écœurez !
Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Éblé, pour explication de vote.
M. Vincent Éblé. Le rapporteur général n’a qu’en partie raison : il oublie de dire que l’argent qui n’est pas distribué sous forme de dividendes et qui ne produit pas de recettes fiscales est assez largement réinvesti par les entreprises, dont le niveau d’investissement s’est trouvé, de ce fait, singulièrement renforcé. Le dispositif que nous préconisons n’est donc pas forcément mauvais pour notre économie au moment où l’on cherche à recouvrer de la croissance… Voilà pourquoi je voterai les amendements. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.)
M. Claude Raynal. CQFD !
M. Philippe Dallier. C’est un demi-aveu extraordinaire !
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 62 rectifié et 904 rectifié.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 139 :
Nombre de votants | 339 |
Nombre de suffrages exprimés | 338 |
Pour l’adoption | 92 |
Contre | 246 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 57 rectifié, présenté par MM. Raynal, Kanner, Éblé, Botrel et Carcenac, Mme Espagnac, MM. Féraud, P. Joly, Lalande et Lurel, Mme Taillé-Polian, MM. Antiste, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin, Bonnefoy, Cabaret et Conconne, MM. Duran, Durain et Fichet, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mme G. Jourda, M. Kerrouche, Mmes Lepage, Lubin, Meunier, Monier, Préville, S. Robert et Schoeller, M. Sueur, Mme Tocqueville et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 4 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa du 1 du I de l’article 117 quater, le taux : « 12.8 % » est remplacé par le taux : « 16,8 % » ;
2° La première phrase du 2° du A du 1 de l’article 200 A est complétée par les mots : « à l’exception des prélèvements prévus par l’article 117 quater du code général des impôts qui ne sont pas intégrés dans le calcul du taux forfaitaire ».
La parole est à Mme Martine Filleul.
Mme Martine Filleul. Toujours dans un souci de justice fiscale et d’efficacité économique, cet amendement vise à augmenter de 4 % le taux de la taxe sur les dividendes acquittée par les personnes physiques, comme le préconise la Convention citoyenne pour le climat (M. Philippe Dallier s’exclame.), ce modèle de démocratie (Rires sur des travées du groupe Les Républicains.) dont on ne sait toujours pas exactement ce que compte faire le Président de la République.
Par ailleurs, les auteurs du présent amendement, estimant que la France est confrontée à un double problème de recherche de nouvelles ressources à la suite de la crise sanitaire et économique et de justice fiscale, proposent de ne pas fixer de montant plancher de dividendes pour l’application de cette hausse de fiscalité.
M. Patrick Kanner. Très bien !
Mme la présidente. L’amendement n° 930 rectifié, présenté par MM. Savoldelli, Bocquet et Gay, Mmes Cukierman, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 4 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa du 1 du I de l’article 117 quater du code général des impôts, le taux : « 12,8 % » est remplacé par le taux : « 16,8 % ».
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Nous avons amorcé hier ce débat ; nous l’approfondirons lors de l’examen du projet de loi de finances à venir. Il portera sur les taux, mais aussi sur les assiettes.
M. Philippe Dallier. Tout y passe !
M. Pascal Savoldelli. Monsieur Dallier, allez-vous me laisser m’exprimer ? (Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, seul M. Savoldelli a la parole. Laissez-le s’exprimer !
M. Jean-François Husson. Parlons d’assiettes, citoyen !
M. Pascal Savoldelli. Il faudra revoir notre modèle de fiscalité. Je le dis sans intention polémique, ce n’est pas seulement une question de taux, c’est aussi une question d’assiettes. Nous avons en effet un problème de produit, de recettes.
Ceux qui réinvestissent leurs gains dans l’entreprise sont minoritaires. Selon les derniers chiffres dont je dispose, les dividendes versés par les entreprises ont augmenté de 15 % entre 2018 et 2019, tandis que l’investissement reculait de 5 %. Il n’y a pas un cadre du privé ou du public, pas un ouvrier, pas un employé dont le salaire a augmenté de 15 % dans le même temps !
Notre groupe ne prétend pas détenir la vérité sur tous les sujets, mais, au regard du décalage entre les dépenses et les recettes, si l’on ne trouve pas un autre modèle de fiscalité, il ne fait pas de doute que l’on ira dans le mur, y compris sur le plan démocratique !
Nous proposons de relever de quatre points le taux de la taxe sur les dividendes non réinvestis. Croyez-vous que cela soit choquant aux yeux d’un cadre, d’un ouvrier, d’un petit patron, d’un boulanger ? Il faut une redistribution. Sinon, la société française, qui connaît déjà énormément de divisions et perd en cohésion populaire, va vivre un cauchemar !
Mme la présidente. L’amendement n° 58 rectifié, présenté par MM. Raynal, Kanner, Éblé, Botrel et Carcenac, Mme Espagnac, MM. Féraud, P. Joly, Lalande et Lurel, Mme Taillé-Polian, MM. Antiste, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin, Bonnefoy, Cabaret et Conconne, MM. Duran, Durain et Fichet, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mme G. Jourda, M. Kerrouche, Mmes Lepage, Lubin, Meunier, Monier, Préville, S. Robert et Schoeller, M. Sueur, Mme Tocqueville et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 4 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa du 1 du I de l’article 117 quater est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ce taux est porté à 16,8 % lorsque le montant des dividendes distribués excède 1 million d’euros au cours de l’année. » ;
2° La première phrase du 2° du A du 1 de l’article 200 A est complétée par les mots : « à l’exception des prélèvements prévues par l’article 117 quater qui ne sont pas intégrés dans le calcul du taux forfaitaire ».
La parole est à M. Claude Raynal.
M. Claude Raynal. Cet amendement de repli est défendu.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. On ne change pas une recette qui gagne : des taxes, des taxes, et encore des taxes ! Je ne suis pas certain que ce soit en augmentant les taux d’imposition que l’on fera remonter de l’argent vers les entreprises, qui en ont pourtant besoin en ce moment. L’avis est défavorable.