Mme Catherine Deroche. À l’origine, monsieur le secrétaire d’État, votre texte ne prévoyait cette reprise de dette que pour les établissements publics. Le Conseil d’État, le 26 mai dernier, a estimé que les dispositions en cause créaient une inégalité de traitement au détriment des établissements privés exerçant une mission de service public, les Espic. Vous en avez tenu compte, dont acte ! Mais le montant reste inchangé ; en outre, les ARS peuvent flécher librement les crédits et décider quels établissements seront concernés.
Je souhaite relayer les inquiétudes d’établissements comme les centres de lutte contre le cancer, qui m’ont alertée sur ce sujet : ils craignent qu’à montant inchangé les ARS privilégient certains établissements par rapport à d’autres et que la réponse à l’inégalité de traitement observée par le Conseil d’État soit biaisée.
J’avais déposé un amendement sur ce sujet ; il est devenu sans objet, puisque nous avons modifié le système de reprise de dette. Je tenais néanmoins à relayer les inquiétudes qui se sont exprimées.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Sur les 13 milliards d’euros de dette des hôpitaux publics, les deux tiers, soit 10 milliards d’euros, correspondent à des investissements immobiliers. Les 3 milliards d’euros restants sont sans doute dus aux dépenses liées à la gestion de l’épidémie de covid-19 : salaires, achats de masques, de mobiliers… La dette consécutive à ces dépenses peut en effet à bon droit être reprise par la Cades ; mais le reste me semble plutôt du ressort du budget de l’État, comme cela a déjà été dit.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour explication de vote.
Mme Michelle Gréaume. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez dit que tout ce qui est du domaine du PLFR doit relever du PLFR et que tout ce qui est du domaine du PLFSS doit relever du PLFSS. Dans ce cas, expliquez-moi pourquoi on intègre dans la dette le déficit d’un régime spécial de retraite des fonctionnaires.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Je veux faire un rapide rappel historique. Il y a dix ans, avec le sénateur socialiste d’Ille-et-Vilaine Jacky Le Menn, nous avions commis un rapport sur les ARS, la T2A et la dette des hôpitaux. À l’époque, nous avions proposé que la dette des hôpitaux ne soit plus prise en charge par l’assurance maladie, à l’instar de ce qui se passe pour l’éducation nationale, qui ne paie pas les écoles, les collèges ou les lycées. Depuis lors, une loi de privatisation de la SNCF a été votée, et l’État a repris à son compte l’intégralité de la dette de la SNCF.
Quand j’ai entendu les annonces de Mme la ministre sur la reprise d’un tiers de la dette des hôpitaux, j’ai été particulièrement déçu : c’est l’intégralité de cette dette qu’il faut reprendre. Quand j’ai constaté qu’en définitive cette dette était reprise par la Cades, j’ai été plus déçu encore : ce n’est pas à la politique sociale de rembourser l’immobilier, qui est propriété de l’État ; en la matière, il faudrait suivre la règle qui prévaut pour l’éducation nationale et qui a prévalu pour la SNCF.
Je ne voterai évidemment pas ces amendements, et je suivrai notre rapporteur. Je vous demanderai même, monsieur le secrétaire d’État, d’aller plus loin : ne vous contentez pas de reprendre 11 milliards d’euros de dette ; reprenez l’intégralité de cette dette ! (Mme Catherine Deroche et M. Philippe Mouiller applaudissent.)
M. le président. L’amendement n° 6, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 8, première phrase
Supprimer les mots :
ainsi que celles consacrées à la prévention, à l’apprentissage de l’autonomie et à la recherche
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le projet de loi organique prévoit qu’une nouvelle annexe au PLFSS permettra d’intégrer au texte la présentation des dépenses relatives à l’aide à l’autonomie des personnes âgées et des personnes en situation de handicap.
La commission des affaires sociales de votre assemblée a adopté un amendement visant à compléter ces dispositions organiques pour que l’annexe fasse figurer les dépenses relatives à la prévention, à l’apprentissage de l’autonomie et à la recherche. Il s’agit évidemment d’enjeux majeurs – nous ne pouvons que vous rejoindre sur ce point –, qui pourront être abordés en tant que de besoin dans cette nouvelle annexe, dont le contenu pourra évoluer.
Mais, d’une part, ces enjeux doivent également être traités de manière transversale ; les dépenses de prévention, par exemple, ne sont pas toujours spécifiques à l’aide à l’autonomie, vous le savez, et il sera très difficile de différencier ces dépenses de prévention de celles qui relèvent du domaine de la santé notamment.
D’autre part, il nous semble peu opportun de prédéterminer aussi précisément au niveau organique le contenu de l’annexe. En effet, le périmètre de l’annexe sera en cohérence avec le périmètre de la branche, qui doit faire l’objet d’un rapport remis au Parlement et d’un débat lors de l’examen du prochain PLFSS.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur. Avis défavorable.
Il s’agit de précisions qui ont été apportées en commission. Je pense que M. Philippe Mouiller serait mécontent si nous émettions un avis favorable sur cet amendement de M. le secrétaire d’État. (Sourires.)
M. Philippe Mouiller. Tout à fait ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l’ensemble du projet de loi organique.
En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 130 :
Nombre de votants | 337 |
Nombre de suffrages exprimés | 314 |
Pour l’adoption | 228 |
Contre | 86 |
Le Sénat a adopté.
Nous passons à l’examen, dans le texte de la commission, du projet de loi relatif à la dette sociale et à l’autonomie.
projet de loi relatif à la dette sociale et à l’autonomie
Article 1er
Le II septies de l’article 4 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi rétabli :
« II septies. – A. – La couverture des déficits cumulés au 31 décembre 2019 de la branche mentionnée au 1° de l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale et du fonds mentionné à l’article L. 135-1 du même code est assurée par des transferts de la Caisse d’amortissement de la dette sociale à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale.
« La couverture des déficits cumulés au 31 décembre 2019 de la branche mentionnée au 3° de l’article L. 722-8 du code rural et de la pêche maritime est assurée par des transferts de la Caisse d’amortissement de la dette sociale à la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole.
« La couverture des déficits cumulés au 31 décembre 2019 du régime de retraite géré par la caisse mentionnée à l’article 3 de l’ordonnance n° 45-993 du 17 mai 1945 relative aux services publics des départements et communes et de leurs établissements publics est assurée par des transferts à cette caisse de la Caisse d’amortissement de la dette sociale.
« Les transferts mentionnés aux trois premiers alinéas du présent A assurent la couverture des déficits mentionnées aux mêmes trois premiers alinéas dans la limite de 31 milliards d’euros et sont effectués au plus tard le 30 juin 2021.
« Les dates et montants de ces versements, dont le premier intervient avant le 31 juillet 2020, sont fixés par décret.
« B. – La couverture des déficits cumulés des exercices 2020 à 2023 des branches mentionnées aux 1°, 3° et 4° de l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale et du fonds mentionné à l’article L. 135-1 du même code est assurée par des transferts de la Caisse d’amortissement de la dette sociale à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale.
« La couverture des déficits cumulés des exercices 2020 à 2023 de la branche mentionnée au 3° de l’article L. 722-8 du code rural et de la pêche maritime est assurée par des transferts de la Caisse d’amortissement de la dette sociale à la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole.
« Les transferts prévus aux deux premiers alinéas du présent B assurent la couverture des déficits mentionnés aux mêmes deux premiers alinéas dans la limite de 92 milliards d’euros.
« Les versements interviennent chaque année à compter de 2021. Leurs dates et montants sont fixés par décret.
« Dans le cas où le montant des déficits cumulés des exercices 2020 à 2023 excède 92 milliards d’euros, les transferts sont affectés par priorité à la couverture de la dette ou des déficits les plus anciens et, pour le dernier exercice, dans l’ordre fixé aux mêmes deux premiers alinéas.
« C. – (Supprimé)
« D. – Le montant total des versements réalisés par la Caisse d’amortissement de la dette sociale en application des A et B du présent II septies ne peut excéder 40 milliards d’euros par an. Les transferts couvrent par priorité les déficits mentionnés au A, puis les déficits mentionnés au B, dans les conditions prévues au dernier alinéa du même B.
« E. – (Supprimé)
M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, sur l’article.
Mme Michelle Gréaume. L’article 1er prévoit un transfert de dette d’un montant global de 136 milliards d’euros à la Cades. Je pense, mes chers collègues, qu’il est temps que le Gouvernement explique aux Français ce qu’est véritablement la dette sociale. Cela évitera des transferts abusifs de dettes qui devraient en réalité être prises en charge par l’État.
Ces 136 milliards d’euros ne représentent pas une dette sociale, en effet, mais une dette en partie liée à la crise sanitaire de la covid-19, crise qui a été gérée par le Gouvernement par le biais d’ordonnances. Cette dette signifie aussi des déficits futurs, puisqu’on y insère l’investissement des établissements de santé, qui aurait dû apparaître dans un projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificative. N’oublions pas également que les déficits des branches, qui existaient avant la covid-19, sont les conséquences de choix politiques : primes « gilets jaunes » notamment, mais surtout exonérations de charges sociales non compensées par l’État.
Rétablir clairement la distinction entre la dette sociale et la dette de l’État empêchera ce mécanisme de culpabilisation, avec un « trou de la sécu » qu’il faudrait absolument combler, et ce au prix d’une perte de droits pour les assurés sociaux et d’un affaiblissement de la sécurité sociale.
En transférant ce montant à la Cades, ce sont près de 18 milliards d’euros de recettes par an dont nous nous privons, sommes qui auraient pu être utilisées dès 2024 pour financer les hôpitaux et la dépendance. Il est trop facile d’inclure dans la dette sociale des charges qui devraient être assumées par l’État et de s’en servir ensuite comme justificatif afin de réduire les dépenses de la sécurité sociale sous prétexte que les recettes sont insuffisantes.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 4 est présenté par M. Daudigny, Mmes Meunier et Taillé-Polian, M. Kanner, Mmes Cabaret, Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 5 est présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen, Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Yves Daudigny, pour présenter l’amendement n° 4.
M. Yves Daudigny. En cohérence avec les avis que nous avons exprimés depuis le début de cette discussion, nous sommes contre le transfert de plus de 130 milliards d’euros de dette à la Cades. Nous pensons que ce transfert met en danger la sécurité sociale pour les années à venir et obère sa capacité à relever les nouveaux défis auxquels elle fait face.
Nous insistons également sur le fait que la majeure partie de ce montant n’est pas une dette sociale en tant que telle et ne saurait donc relever du budget de la sécurité sociale. Même si nous avons parfois approuvé certaines des mesures d’urgence, nous ne voulons pas faire payer par la sécurité sociale ces mesures, qui relèvent des choix politiques que le Gouvernement a effectués en lien avec la pandémie de covid-19.
Nous proposons donc la suppression de l’article 1er.
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 5.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous venons de discuter de ces dispositions lors de l’examen de l’article 1er du projet de loi organique. Je voudrais néanmoins revenir un instant sur le transfert à la Cades de 136 milliards d’euros, réduits à 123 milliards en retirant 13 milliards de dette de nos hôpitaux. Ce point est, nous semble-t-il, fondamental.
Au-delà de la question de savoir si la bonne gestion devrait conduire à faire porter cette dette par l’État plutôt que par la sécurité sociale, c’est une répartition des responsabilités qui est ici remise en cause. En effet, les travaux immobiliers et les investissements de rénovation afférents ont jusqu’à présent toujours relevé du budget de l’État.
Soit le Gouvernement décide aujourd’hui de transférer cette dette à la sécurité sociale, mais, dans ce cas, il transfère les compétences et surtout les dotations correspondantes ; soit le Gouvernement ne transfère pas ces compétences, mais, dans ce cas, il assume le remboursement de la dette liée aux investissements. Vous ne pouvez pas décider de faire payer à la sécurité sociale les dépenses liées à une mission qui ne relève pas de sa compétence.
Votre projet n’a absolument aucune logique, car nous savons votre cruelle intention : en transférant à la sécurité sociale une dette aussi importante à rembourser, vous faites le pari que les efforts pour rembourser la dette, en réduisant le périmètre de la sécurité sociale, permettront de justifier vos politiques d’austérité futures et, ainsi, vos contre-réformes, celle des retraites par points par exemple, ainsi que les fermetures d’hôpitaux, les fermetures de services et la diminution des prestations sociales.
Alors que s’achève bientôt le Ségur de la santé, j’espère, monsieur le secrétaire d’État, que vous avez eu le courage de dire aux représentants des professionnels de santé que leurs conditions de travail vont encore se dégrader dans les prochaines années en raison de cette dette à rembourser.
Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de l’article 1er.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur. La commission est défavorable à ces amendements. Les nouveaux transferts à la Cades de déficits passés et à venir sont nécessaires à court terme pour soulager la trésorerie de l’Acoss, et à moyen terme pour ne pas transmettre notre dette sociale aux générations futures.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Nous avons déjà eu ce débat : avis défavorable, pour les raisons exposées par M. le rapporteur.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 4 et 5.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 12, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen, Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. Je l’ai indiqué, l’article 1er vise à prévoir un transfert de dette d’un montant global de 136 milliards d’euros à la Caisse d’amortissement de la dette sociale. Sur ces 136 milliards d’euros, 1,2 milliard d’euros proviennent du déficit cumulé de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), qui régit notamment le régime spécial des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers.
La solution proposée par le Gouvernement pour financer ce déficit est donc de le faire reprendre par la Cades. Mais si le déficit de la CNRACL a été aggravé, c’est bien parce que les gouvernements successifs ont décidé de geler le point d’indice des fonctionnaires et de ne pas remplacer les départs à la retraite. Comment renflouer la CNRACL si la masse salariale diminue ? Il suffirait de répondre aux revendications du personnel soignant, qui réclame une augmentation des salaires et davantage d’effectifs.
Là encore, ce n’est pas à la sécurité sociale de prendre en charge ce déficit ; c’est à l’État de l’assumer en projet de loi de finances.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable. La reprise des dettes de la CNRACL s’inscrit parfaitement dans les missions de la Cades.
Cela étant, le Gouvernement pourrait peut-être nous apporter quelques précisions sur la trajectoire financière de la CNRACL et nous dire pourquoi elle n’est pas concernée par les reprises de dettes pour les années 2020 à 2023.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, pour les raisons qui ont été exposées par M. le rapporteur.
En qui concerne la CNRACL, les prévisions de juin 2020 laissent anticiper un déficit de 1,6 milliard d’euros pour 2020 et de 2,2 milliards d’euros pour 2021, soit des niveaux de déficit relativement proches de ce qui était envisagé dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, les projections s’établissant à l’époque à 1,3 milliard d’euros pour 2020 et à 1,6 milliard d’euros pour 2021.
La loi prévoit bien la reprise de la dette antérieure de l’ensemble des régimes, incluant le déficit courant de la CNRACL. La dette de la CNRACL pour les années à venir n’a rien à voir avec la crise du covid-19. Ainsi, avant même cette crise, il était prévu que la dette atteindrait 2,9 milliards d’euros en 2021 et 7,1 milliards d’euros en 2022, selon des projections qui datent de juin 2019.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Tout cela montre bien que ce transfert à la Cades est un fourre-tout, dans lequel vous mettez, monsieur le secrétaire d’État, ce que vous voulez ! (Mme Michelle Gréaume approuve.)
On sait bien que la CNRACL connaît des difficultés en raison de la baisse du nombre de fonctionnaires territoriaux et hospitaliers. Il y a moins de cotisants, mais toujours plus de retraités.
Ces difficultés sont aussi la conséquence de la politique de non-revalorisation indiciaire et d’attribution de primes ne donnant pas lieu à cotisation pour la retraite et donc n’ouvrant pas de droits à ce titre.
Monsieur le secrétaire d’État, la CNRACL prévoit un déficit estimé à 1,6 milliard d’euros pour 2020. Pourquoi ne reprenez-vous que 1,2 milliard d’euros, sachant que la trajectoire financière de la CNRACL pour 2020-2023 montre que son déficit total s’établira à 11 milliards d’euros sur cette période ?
Mme Michelle Gréaume. Oui !
M. René-Paul Savary. Pourquoi ne pas reprendre l’intégralité de la dette prévisionnelle, puisque, sur les 136 milliards d’euros de dette devant être transférés à la Cades, la dette prévisionnelle représente 92 milliards d’euros ? Il y a une incohérence !
Idem pour la dette des hôpitaux : vous prévoyez son amortissement sur douze ans par le biais de la Cades, mais c’est de l’investissement pour une génération, à l’horizon de vingt-cinq ou trente ans. Les investissements hospitaliers relèvent de l’État, et non de la Cades. Et pourquoi seulement un tiers ? Je suis d’accord avec le président Milon : si votre solution est si avantageuse, si elle permet de donner une bouffée d’oxygène aux hôpitaux, reprenez la totalité de la dette ! Il y a quelque chose qui ne va pas, de même que pour la modification du périmètre du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il y a là une terrible confusion !
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. On mesure tout le travail réalisé par la commission des affaires sociales. Il est question ici du transfert de 136 milliards d’euros de dette à la Cades. Comment nos concitoyens peuvent-ils s’y retrouver dans des mécanismes aussi complexes ? L’aspect financier est important, mais le volet humain est fondamental. Nous savons quelle est la situation des hôpitaux et des Ehpad, quels drames vivent les soignants depuis de nombreuses années. Les problèmes ne datent pas d’il y a quelques mois !
La situation des finances publiques est difficile, mais il importe d’avancer des propositions et de trouver des solutions. Faisant confiance au travail de la commission, je me rallie à sa position.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. La reprise de la dette dont nous parlons est liée à la crise du covid-19 et à la situation économique du pays, alors que le déficit de la CNRACL est structurel, monsieur le sénateur Savary.
M. René-Paul Savary. Pourquoi les autres organismes sont-ils pris en compte, alors ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. La question que vous soulevez est réelle et elle doit être traitée, mais pas au travers de ce texte. La cohérence est totale. (M. René-Paul Savary manifeste son scepticisme.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur. C’est la règle, monsieur Savary : les régimes déficitaires sont compensés par le régime général ou d’autres régimes. Il y aura des déficits tant que le régime de la CNRACL ne sera pas structurellement équilibré.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 13 est présenté par MM. Théophile, Lévrier, Iacovelli, Bargeton et Buis, Mme Cartron, M. Cazeau, Mme Constant, MM. de Belenet, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Marchand, Mohamed Soilihi, Patient, Patriat et Rambaud, Mme Rauscent, M. Richard, Mme Schillinger, M. Yung et les membres du groupe La République En Marche.
L’amendement n° 16 est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I – Alinéa 12
Rétablir le C dans la rédaction suivante :
« C. – La couverture de dotations de la branche mentionnée au 1° de l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale couvrant une partie, qui ne peut excéder 13 milliards d’euros, des échéances des emprunts contractés au 31 décembre 2019 par les établissements de santé relevant du service public hospitalier est assurée par des transferts de la Caisse d’amortissement de la dette sociale à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, à compter de 2021.
II. – Alinéa 13
1° Première phrase
Remplacer les mots :
A et B
par les mots :
A, B et C
2° Seconde phrase
Après le mot :
puis
insérer les mots :
les dotations mentionnées au C, dans la limite de 5 milliards d’euros par an, et enfin
La parole est à M. Dominique Théophile, pour présenter l’amendement n° 13.
M. Dominique Théophile. Cet amendement vise à rétablir le transfert à la Cades d’une partie de la dette des hôpitaux, pour les raisons que j’ai déjà évoquées. La dette des hôpitaux n’est pas que patrimoniale. Ce transfert serait une bouffée d’oxygène pour les hôpitaux, qui se trouvaient contraints d’emprunter ces dernières années, du fait notamment d’un Ondam contraint. Il y a une « fenêtre de tir », dont il importe de profiter. Sortons de la dialectique État-Cades.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État, pour présenter l’amendement n° 16.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur. Avis défavorable. Tout a déjà été dit sur la dette hospitalière.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 13 et 16.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er.
(L’article 1er est adopté.)
Article 1er bis
(Non modifié)
Au plus tard le 31 décembre 2020, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les opportunités pour la Caisse d’amortissement de la dette sociale ainsi que pour tout organisme ou établissement public concerné de contracter des emprunts à impact social. Ce rapport précise les conditions juridiques et financières nécessaires pour émettre de tels emprunts dans le respect des standards internationaux les plus exigeants ainsi qu’un état des lieux sur la situation du marché et l’appétence des investisseurs pour ce type de produits financiers. – (Adopté.)
Article 2
(Non modifié)
I. – L’article L. 131-8 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le 3° est ainsi modifié :
a) Au c, le taux : « 0,60 % » est remplacé par le taux : « 0,45 % » ;
b) Le f est ainsi rédigé :
« f) À la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, pour la part correspondant à un taux de :
« – 0,38 %, pour la contribution mentionnée au 1° du I de l’article L. 136-8 ;
« – 0,15 %, pour les contributions mentionnées aux II, III et III bis du même article L. 136-8 ; »
2° Le 3° bis est ainsi modifié :
a) À la fin du b, le taux : « 0,60 % » est remplacé par le taux : « 0,45 % » ;
b) Il est ajouté un c ainsi rédigé :
« c) À la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, pour la part correspondant à un taux de 0,15 % ; ».
II. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2024.