M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.
Mme Catherine Morin-Desailly. Je souhaite également exprimer ma grande surprise et ma grande déception quant à la démarche gouvernementale. J’avais cru comprendre qu’un dialogue fructueux s’était instauré entre le Gouvernement et le Sénat et que, la même question se posant à l’Assemblée nationale, nous allions pouvoir aboutir à une solution partagée.
Je tiens vraiment à remercier Hervé Maurey d’avoir mis le sujet sur la table. Au sein de la commission de la culture et de l’éducation, nous savons combien la question est prégnante ; cela a été rappelé par Max Brisson et Françoise Laborde. Nous le voyons d’autant plus dans le cadre des travaux du groupe spécifique que j’ai mentionné en interrogeant le ministre de l’éducation nationale.
Les maires ne se cachent pas derrière leur petit doigt. Ils veulent prendre leurs responsabilités. Certains ouvriront, malgré tout, les écoles. Mais il y a cette zone d’ombre qui a été évoquée.
En guise de témoignage, permettez-moi de vous lire le message que m’a adressé voilà deux ou trois jours la présidente d’une communauté de communes : « Juste une remarque sur la responsabilité des maires. Pour ma part, je prépare la réouverture de mon école. J’ai les masques. Nous travaillons avec l’école sur l’organisation à mettre en place. Quelques maires se préparaient aussi à cette réouverture. Mais la lecture ce week-end du protocole sanitaire les interroge davantage quant à leur responsabilité. Certains sont prêts à faire machine arrière s’ils n’ont pas de réponse quant à leur responsabilité. » Je crois que, dans la simplicité de ce message, tout est dit, madame la garde des sceaux.
Le dispositif auquel la commission des lois avait abouti sur proposition de Philippe Bas nous satisfaisait tous. En tout cas, il y avait là matière à dialoguer et à poursuivre la réflexion avec l’Assemblée nationale. Nous ne comprenons ni ce revirement ni cette volonté brutale de suppression. (Applaudissements sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Dumas, pour explication de vote.
Mme Catherine Dumas. Ici, nous sommes dans l’assemblée des territoires. Nous n’avons pas le « monopole du cœur des territoires », mais presque…
L’appréhension gagne de nombreux maires, des femmes et des hommes chargés de mettre en musique la sortie du confinement. Cela concerne notamment le protocole sanitaire pour la réouverture des écoles. Tous les préfets sont interrogés. Aujourd’hui, le Premier ministre nous a indiqué que cela pouvait être un frein à la décision et que ce n’était pas un petit sujet.
Les maires ne veulent pas être des kamikazes s’agissant d’une responsabilité qui ne leur appartient pas au départ. Comme l’a rappelé Philippe Bas, dans une période difficile, où il y a tant de décisions à prendre, tous ceux qui veulent en prendre doivent être préservés. Il ne s’agit nullement d’exonérer de sa responsabilité pénale quelqu’un qui aurait causé une contamination ou n’aurait pas respecté le droit. Il s’agit simplement de tenir compte du fait que le déconfinement est une opération de très grand risque pour la France.
Dites oui à l’équilibre prôné par la commission des lois !
M. le président. La parole est à M. Hervé Marseille, pour explication de vote.
M. Hervé Marseille. Nous avons beaucoup évoqué les maires et les élus locaux, ce qui est logique au Sénat, puisque nous sommes leurs représentants. Mais le texte que nous avons soutenu en commission des lois va beaucoup plus loin : « Nul ne peut voir sa responsabilité pénale engagée. » Nous avons pensé non seulement aux élus locaux, mais également à tous les décideurs, publics et privés.
Il est naturel ici de penser aux maires et aux élus locaux. Pour beaucoup d’entre nous, nous en sommes et nous avons exercé de telles responsabilités. Nous comprenons combien les concernés sont inquiets aujourd’hui.
Le Premier ministre l’a reconnu cet après-midi en soulignant que la question se posait. Il a souhaité que l’on ne se préoccupe pas que d’une seule catégorie. Le texte proposé par la commission des lois répond à cet objectif. Nous avons pris en compte l’ensemble des décideurs : les élus, mais aussi les chefs d’entreprise, les dirigeants associatifs, les responsables administratifs, c’est-à-dire toutes celles et tous ceux qui mettent en œuvre sur le terrain les décisions prises au plus haut niveau. Nous disons depuis des semaines au Gouvernement, en vain – c’est la raison pour laquelle nous avons été obligés d’agir ; il n’y avait rien dans le texte –, qu’il faut leur adresser un signal, leur redonner confiance et accompagner leur action.
Le texte que nous avons adopté en commission des lois me semble couvrir l’ensemble des responsabilités des décideurs publics et privés. C’est pourquoi mon groupe le soutient. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Bas, rapporteur. Je souhaite apporter quelques précisions.
Cher Max Brisson, le directeur d’école, s’il lui appartient de prendre la décision, sera protégé par la disposition que notre commission a adoptée. Vous avez souligné combien il allait être seul, certes avec l’aide de sa hiérarchie, pour prendre des décisions aussi lourdes de conséquences.
Si le maire n’est pas responsable de la décision d’ouvrir l’école, ce qui signifie qu’il ne doit pas prendre d’arrêté pour en interdire l’ouverture, il est néanmoins exposé par d’autres décisions. D’une part, c’est lui qui va décider d’organiser, par exemple, des activités périscolaires. D’autre part, comme le rappelait Max Brisson, il faut prévoir la restauration scolaire ; à défaut de fournir, comme cela se faisait habituellement, les repas dans la cantine, il va falloir alimenter les enfants qui viendront à l’école. Ce n’est pas le directeur de l’école qui s’en occupe.
Il me faut, me semble-t-il, être très précis dans la définition de ce qui peut faire l’objet de la mise en jeu de la responsabilité des uns et des autres.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 194 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 101 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 327 |
Pour l’adoption | 0 |
Contre | 327 |
M. Bruno Retailleau. Ouh là là !
M. le président. Le Sénat n’a pas adopté. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
Je mets aux voix l’amendement n° 42.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 54, présenté par M. Duran, Mme Bonnefoy, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat, Jacques Bigot et Joël Bigot, Mme Blondin, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daudigny et Daunis, Mme de la Gontrie, MM. Devinaz, Durain et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mme Féret, M. Fichet, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mmes Grelet-Certenais, Guillemot et Harribey, MM. Houllegatte et Jacquin, Mme Jasmin, MM. P. Joly et Jomier, Mme G. Jourda, MM. Kanner, Kerrouche, Lalande et Leconte, Mme Lepage, M. Lozach, Mme Lubin, MM. Lurel, Magner, Manable, Marie et Mazuir, Mmes Meunier et Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Rossignol, MM. Sueur et Sutour, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Tourenne et Vallini, Mme Van Heghe, M. Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Avant toute réouverture d’école communale, le maire demande aux services de l’État de valider formellement la conformité au protocole sanitaire relatif à la réouverture des écoles maternelles et primaires prescrit par le ministère de l’éducation nationale. De la même manière, les conditions d’accueil et les mesures sanitaires appliquées dans chaque établissement font l’objet d’une discussion et d’un accord formel entre les services de l’éducation nationale et les maires.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. le président. L’amendement n° 54 est retiré.
L’amendement n° 181, présenté par MM. Gremillet et de Legge, Mme Deromedi, MM. Perrin et Raison, Mmes Deroche, Chauvin et Noël, M. Priou, Mme Malet, MM. Cuypers, Pellevat et Pierre, Mmes Thomas et Chain-Larché, MM. Kennel, Bascher, Lefèvre, Charon et B. Fournier, Mme Lamure, MM. Houpert, Piednoir et Bonne, Mme Micouleau, MM. Bouchet, Vogel et Vaspart, Mme Ramond, M. Danesi, Mme Canayer, MM. Joyandet, de Montgolfier, Grosdidier, Sido, Leleux et Regnard, Mmes Garriaud-Maylam et Lassarade, M. Bonhomme, Mme Morhet-Richaud, M. Brisson et Mme Dumas, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
En complément du décret n° 2020-293 du 23 mars 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, il convient de définir la portée normative que peuvent avoir l’ensemble des obligations incombant à la fois à l’employeur et au salarié afin de limiter la propagation du virus.
Il s’agit de pouvoir identifier les responsabilités respectives, dans le respect du code du travail tout en sachant qu’à l’heure actuelle aucune disposition relative à une quelconque obligation liée à l’épidémie covid-19 n’y est retranscrite. En droit pénal, s’agissant de la situation de risque de mise en danger d’autrui, la reconnaissance d’une quelconque méconnaissance présente un caractère trop général. En conséquence, il convient de pouvoir identifier les responsabilités de chacun étant donné que la période d’incubation du covid-19 demeure, à ce stade, de quatorze jours et qu’il reste difficile de pouvoir isoler le lieu où la maladie a pu être contractée.
La parole est à M. Antoine Lefèvre.
M. Antoine Lefèvre. D’une manière générale, les entreprises ont une obligation de sécurité, aux termes du code du travail. Dans le cadre de la lutte contre le coronavirus, elles doivent signaler et interdire les zones à risques, écarter les salariés, recourir au télétravail si c’est possible et fournir des masques et des gels. Face à ces obligations, l’employeur court des risques d’être assigné devant le conseil des prud’hommes pour manquement à la sécurité.
Actuellement, le code du travail ne prévoit pas d’obligation particulière liée à l’épidémie de Covid-19. En revanche, les dispositions du décret du 23 mars 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de Covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire prévoient qu’afin de ralentir la propagation du virus « les mesures d’hygiène et de distanciation sociale, dites “barrières”, définies au niveau national, doivent être observées en tout lieu et en toute circonstance ».
Indiscutablement, ce décret est un règlement au sens précité et impose à tout un chacun, salariés comme employeurs, une obligation qui consiste à respecter des gestes barrières. Toutefois, il ne définit pas les mesures d’hygiène, ni le principe de distanciation sociale. Ainsi, la formulation des dispositions relatives à la mise en danger d’autrui, les prévisions du décret ne sont à l’évidence pas suffisamment précises pour permettre à l’employeur de connaître les mesures qu’il doit mettre en œuvre pour protéger les salariés et, partant, de savoir à quel moment il s’écarte de façon « manifestement délibérée » de ses obligations et met volontairement ses salariés dans une situation de danger.
Cela étant, les salariés aussi ont une obligation quasi juridique : protéger leur santé et celle d’autrui. La non-pratique des gestes barrières, se laver les mains, prendre du gel hydroalcoolique et porter un masque quand c’est obligatoire, peut entraîner des plaintes à leur encontre venant de l’employeur ou d’autrui qui peut en être victime.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. C’est un problème que nous avons déjà réglé, soit par des dispositions renvoyant à un décret prises dans la loi du 23 mars d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19, soit par le régime de responsabilité que nous venons d’adopter.
Je voudrais donc dire à mon excellent collègue qu’il me serait désagréable d’émettre un avis défavorable et que je préférerais, à la différence de ce que la garde des sceaux a fait tout à l’heure, qu’il retire son amendement.
M. Antoine Lefèvre. Je le retire, puisque c’est demandé si gentiment. (Sourires.)
M. le président. L’amendement n° 181 est retiré.
L’amendement n° 6 rectifié, présenté par Mmes Guillotin, M. Carrère, Costes et N. Delattre, M. Labbé, Mme Laborde, MM. Requier, Cabanel, Collin, Dantec, Gabouty et Gold, Mme Jouve, MM. Roux et Vall, Mme Pantel et M. Guérini, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
.… - Le Gouvernement remet un rapport au Parlement faisant état des mesures prises pour renforcer les capacités d’accueil en service de réanimation, des moyens affectés à la recherche médicale, des moyens affectés à l’équipement des Français nécessaires à la prévention de la propagation du virus covid-19, mais également du nombre de décisions individuelles prises au titre de l’état d’urgence, et le nombre de recours portant contre ces décisions individuelles et les interdictions de manifestations.
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Initié par Véronique Guillotin, cet amendement vise à rappeler de manière symbolique que l’état d’urgence sanitaire a vocation à demeurer temporaire et qu’il doit permettre de prendre des mesures structurelles pour favoriser le retour à la normale dans la vie en société.
L’épidémie de Covid-19 a révélé la fragilité de notre système hospitalier, mettant en lumière des carences dans les capacités d’accueil en services de réanimation. L’amendement est donc destiné à encourager le Gouvernement à prendre des engagements forts en faveur des hôpitaux, mais également de la recherche. Il lui est ainsi demandé de présenter un rapport au Parlement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Dans chacune de nos commissions, nous effectuons un très gros travail de suivi de la mise en œuvre de l’urgence sanitaire. Nous considérons que, dans ce cadre, nous obtenons beaucoup d’explications du Gouvernement, soit oralement lors des auditions, soit en écrivant aux ministres, qui répondent en général très rapidement ; d’ailleurs, nous ne manquons pas de les relancer quand ce n’est pas le cas. Ainsi, le Premier ministre a répondu à la commission des lois sur son premier rapport d’étape. Je lui ai de nouveau écrit la semaine dernière, et il ne manquera pas, j’en suis certain, de me répondre.
Renvoyer le contrôle parlementaire à la présentation d’un rapport alors même que ce type de disposition dans la loi n’a pas de valeur obligatoire ne me semble pas le meilleur moyen de l’assurer.
Au demeurant, il y a aussi la perspective d’une commission d’enquête à l’Assemblée nationale comme au Sénat, quand il s’agira d’avoir une vue d’ensemble des mesures qui auront été prises pour préparer le pays à l’épidémie et pour combattre le virus.
Par conséquent, je pense que ce serait mieux si vous acceptiez de retirer cet amendement, mon cher collègue.
M. Jean-Claude Requier. Je le retire !
M. le président. L’amendement n° 6 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’article 1er.
(L’article 1er est adopté.)
Articles additionnels après l’article 1er
M. le président. L’amendement n° 57, présenté par M. Kerrouche, Mme Lubin, MM. Durain, Marie et Duran, Mme Bonnefoy, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat, Jacques Bigot et Joël Bigot, Mme Blondin, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daudigny et Daunis, Mme de la Gontrie, MM. Devinaz et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mme Féret, M. Fichet, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mmes Grelet-Certenais, Guillemot et Harribey, MM. Houllegatte et Jacquin, Mme Jasmin, MM. P. Joly et Jomier, Mme G. Jourda, MM. Kanner, Lalande et Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mmes Meunier et Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Rossignol, MM. Sueur et Sutour, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Tourenne et Vallini, Mme Van Heghe, M. Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 2121-41, il est inséré un article L. 2121-… ainsi rédigé :
« Art. L. 2121-…. – Lorsque l’état d’urgence sanitaire prévu à l’article L. 3131-15 du code de la santé publique est déclaré, un protocole établit les modalités de coopération de gestion de la crise sanitaire, entre le maire et le représentant de l’État territorialement compétent.
« Le maire et le représentant de l’État peuvent décider conjointement d’y associer le président de l’établissement public de coopération intercommunale dont est membre la commune.
« Un protocole-type est défini par décret. » ;
2° Après l’article L. 3121-26, il est inséré un article L. 3121-… ainsi rédigé :
« Art. L. 3121-…. – Lorsque l’état d’urgence sanitaire prévu à l’article L. 3131-15 du code de la santé publique est déclaré, un protocole établit les modalités de coopération de gestion de la crise sanitaire entre le président du conseil départemental et le représentant de l’État territorialement compétent.
« Un protocole-type est défini par décret. »
La parole est à M. Jérôme Durain.
M. Jérôme Durain. La gestion de la crise sanitaire dans les territoires est une affaire de couple. On nous a beaucoup présenté le couple maire-préfet comme le garant des bonnes conditions du déconfinement. Mais il est un autre couple qui compte : le couple président du conseil départemental-préfet.
Nous sommes tous conviés à des réunions, souvent informelles, qui se tiennent selon des configurations variées, avec les parlementaires, le préfet, les maires, les représentants des associations d’élus. Pourtant, rien ne vient formaliser cette coopération. Cela fait peser sur les maires une responsabilité qui peut dépasser leurs compétences et qui ne correspond pas à la part qu’ils ont prise dans les décisions venant de l’État.
Par conséquent, cet amendement vise à mettre en place un protocole particulier entre le maire et le préfet, ce qui est une demande de l’Association des maires de France. Pour clarifier, encadrer et rendre plus efficace la coopération que j’évoquais, nous ajoutons un protocole particulier entre le préfet et le président du conseil départemental. Enfin, nous souhaitons que les groupements de communes, dont le rôle est essentiel dans la gestion de la crise sanitaire, soient associés à ces deux protocoles particuliers.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Dans la gestion de crise, on ne doit pas consacrer trop de temps à remplir des documents pour déterminer comment collaborer : il faut agir vite. Il aurait été intéressant d’envisager une telle mesure à froid, avant la crise sanitaire, plutôt qu’à chaud. Étant donné le grand nombre de communes, les préfets auraient à négocier beaucoup de conventions, si celles-ci doivent être adaptées à la situation spécifique de chaque commune.
Par conséquent, la commission a estimé qu’il valait mieux réserver cette proposition à l’organisation de la Nation en temps de crise sanitaire ; j’ai d’ailleurs suggéré que nous préparions, le moment venu, une grande loi sur ce sujet. Nous verrons alors s’il est utile de répartir les responsabilités de manière très définie entre les différents acteurs, en tirant les leçons de la crise actuelle.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. Je partage l’avis du président Bas, il ne faut pas consacrer trop de temps à la rédaction de textes et de protocoles. Si le binôme maire-préfet joue un rôle absolument indispensable dans la gestion de crise, il ne faudrait pas oublier pour autant les agences régionales de santé (ARS), qui exercent leur mission depuis le premier jour.
On pourra sans doute écrire beaucoup de choses sur la gestion d’une crise sanitaire et sur la façon dont la France peut s’y préparer, mais des règles très claires sont d’ores et déjà prévues, en matière de répartition des rôles, dans la loi HPST portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires : en période de crise sanitaire, le préfet prend la main et travaille en coopération étroite avec l’ARS.
Le Gouvernement a fait le choix très fort et parfaitement compréhensible, qui l’honore, de mettre en place, avant même le lancement du plan de déconfinement, une concertation dans les territoires au travers du binôme maire-préfet. En effet, comme vous l’avez largement souligné au cours de l’examen de l’article 1er, les maires ont un rôle absolument essentiel à jouer dans l’application, la mise en forme et l’adaptation des divers processus relatifs à la levée du confinement.
Je demande le retrait de l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Monsieur Durain, l’amendement est-il maintenu ?
M. Jérôme Durain. Oui, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 162, présenté par Mmes Assassi, Brulin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La décision d’accueillir des usagers dans un établissement scolaire est conditionnée à l’accord express des conseils d’école pour le premier degré et des conseils d’administration des établissements pour le second degré.
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Cet amendement vise à ce que les conseils d’école, pour l’enseignement du premier degré, et les conseils d’administration des établissements scolaires, pour le secondaire, soient consultés et associés à la prise de décision de reprise des cours.
Nous avons eu un débat très intéressant et parfaitement légitime sur la responsabilité des élus locaux, en particulier des maires, et sur la nécessité de les sécuriser dans le contexte de la gestion de la crise actuelle. Cet amendement va dans ce sens.
Les conseils d’école et les conseils d’administration des établissements scolaires réunissent des élus, qui représentent les collectivités compétentes – les communes pour l’école primaire et la maternelle, les départements pour les collèges, les régions pour les lycées –, les chefs d’établissement, dont le niveau de responsabilité est différent, des représentants du corps enseignant et des parents d’élèves. Nous souhaitons qu’ils décident ensemble, au regard de la situation sanitaire et de la possibilité ou non de mettre en œuvre les protocoles définis, dont le caractère souvent « hors-sol » a été évoqué. Un certain nombre de décisions relèvent en effet de ce que l’on appelle la « communauté éducative ».
Une telle disposition permettrait de mettre en œuvre la concertation, laquelle a par trop fait défaut sur le terrain jusqu’à présent, et serait aussi de nature à sécuriser les élus locaux. La reprise de l’école, y compris à plus long terme, nécessite un travail qui est trop peu mené aujourd’hui. Il convient de mobiliser l’ensemble de la communauté éducative.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Il est défavorable. Le fait de demander l’accord du conseil d’école constituerait un transfert de la décision à une instance collective comprenant des parents d’élèves, des représentants des élèves et le maire. Dès lors, on ne saurait plus qui prend la décision et, en cas de problème, toutes ces personnes pourraient voir leur responsabilité engagée. Je trouverais légitime que l’on prenne la précaution de réunir le conseil d’école pour solliciter son avis, mais ce n’est pas à lui de décider.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 56, présenté par M. Kerrouche, Mme Lubin, MM. Durain, Marie et Duran, Mme Bonnefoy, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat, Jacques Bigot et Joël Bigot, Mme Blondin, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daudigny et Daunis, Mme de la Gontrie, MM. Devinaz et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mme Féret, M. Fichet, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mmes Grelet-Certenais, Guillemot et Harribey, MM. Houllegatte et Jacquin, Mme Jasmin, MM. P. Joly et Jomier, Mme G. Jourda, MM. Kanner, Lalande et Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mmes Meunier et Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Rossignol, MM. Sueur et Sutour, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Tourenne et Vallini, Mme Van Heghe, M. Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de l’éducation est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 212-15, il est inséré un article L. 212-… ainsi rédigé :
« Art. L. 212-… – Lorsque l’état d’urgence prévu à l’article L. 3131-15 du code de la santé publique est déclaré, les mesures spécifiques et exceptionnelles d’hygiène et de sécurité prévues sont inscrites au règlement intérieur de l’école.
« Aux heures ou périodes au cours desquelles les locaux scolaires ne sont pas utilisés pour les besoins de la formation initiale et continue, une convention entre le maire et le directeur de l’école définissant les conditions d’accueil et les mesures sanitaires est établie, après avis du conseil d’école.
« La conformité du règlement et de la convention précités au protocole sanitaire prescrit par le ministère en charge de l’éducation nationale est validée par le directeur académique des services de l’éducation nationale ou son représentant. » ;
2° Après l’article L. 213-10, il est inséré un article L. 213-… ainsi rédigé :
« Art. L. 213-… – Lorsque l’état d’urgence prévu à l’article L. 3131-15 du code de la santé publique est déclaré, les mesures spécifiques et exceptionnelles d’hygiène et de sécurité prévues sont inscrites au règlement intérieur du collège.
« Aux heures ou périodes au cours desquelles les locaux scolaires ne sont pas utilisés pour les besoins de la formation initiale et continue, une convention entre le président du conseil départemental et le directeur de l’établissement définissant les conditions d’accueil et les mesures sanitaires est établie, après avis du conseil d’administration.
« La conformité du règlement et de la convention précités au protocole sanitaire prescrit par le ministère en charge de l’éducation nationale est validée par le directeur académique des services de l’éducation nationale ou son représentant. » ;
3° Après l’article L. 214-11, il est inséré un article L. 214-… ainsi rédigé :
« Art. L. 214-… – Lorsque l’état d’urgence prévu à l’article L. 3131-15 du code de la santé publique est déclaré, les mesures spécifiques et exceptionnelles d’hygiène et de sécurité prévues sont inscrites au règlement intérieur du lycée.
« Aux heures ou périodes au cours desquelles les locaux scolaires ne sont pas utilisés pour les besoins de la formation initiale et continue, une convention entre le président du conseil régional et le directeur de l’établissement définissant les conditions d’accueil et les mesures sanitaires est établie, après avis du conseil d’administration.
« La conformité du règlement et de la convention précités au protocole sanitaire prescrit par le ministère en charge de l’éducation nationale est validée par le directeur académique des services de l’éducation nationale ou son représentant. »
II. – Après l’article L. 3111-25 du code des transports, est insérée une section ainsi rédigée :
« Section …
« Organisation du transport scolaire pendant l’état d’urgence sanitaire
« Art. L. 3111-… – Lorsque l’état d’urgence prévu à l’article L. 3131-15 du code de la santé publique est déclaré, les mesures exceptionnelles d’hygiène et de sécurité prévues pour le transport scolaire sont inscrites au règlement du transport scolaire par l’autorité organisatrice compétente et après validation conjointe par le représentant territorialement compétent du ministre en charge de la santé et du ministre en charge des transports. »
La parole est à M. Jérôme Durain.