M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Sophie Taillé-Polian, rapporteur spécial. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement qui vise à augmenter de 8,3 millions d’euros les crédits pour les conventions pluriannuelles d’objectifs conclues avec les missions locales. Principalement, l’adoption de cet amendement aurait pour conséquence d’ôter des crédits au volet formation du PIC.
Cela dit, à titre personnel, il me semble difficile de considérer que l’augmentation des crédits de la garantie jeunes permettra de contrebalancer la baisse de ceux qui sont consacrés à ces conventions pluriannuelles. Pourquoi ? Parce qu’une mission locale qui fait entrer un jeune dans le dispositif de la garantie jeunes n’est pas du tout certaine de percevoir in fine 100 % du financement, puisque le financement en clôture dépend de la manière dont le jeune sort du dispositif : si sa sortie n’est pas positive, la mission locale ne touche pas la totalité du budget prévu.
En pratique, ces jeunes étant très éloignés des situations d’insertion, certains étant même sans domicile fixe ou en rupture parentale, il est impossible de demander aux missions locales d’obtenir un taux de sortie positive égal à 100 %. On sait bien que certains abandonnent en cours de route, ce qui est normal, même si c’est malheureux.
On peut quand même s’interroger sur ces crédits dédiés aux missions locales, bien que, je le rappelle, la commission des finances soit défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. L’État est largement impliqué dans le financement des missions locales, à hauteur de 52 % de leur budget, et sa participation est dynamique.
Ce financement est triple : un financement structurel ; un financement au titre des missions d’accompagnement exercées par la garantie jeunes ; un financement pour le développement du parrainage.
Si l’on considère ces trois enveloppes, le financement global des missions locales par l’État prévu par le projet de loi de finances pour 2019 enregistre une baisse très légère de 1,1 %, comme je le disais.
Par ailleurs, et c’est important, une réflexion a été engagée sur les modalités de financement des missions locales, avec un objectif de simplification des circuits financiers. Plutôt que d’avoir trois enveloppes différentes faisant l’objet de trois conventions et de trois négociations, nous souhaitons une globalisation des crédits versés aux missions locales pour tirer les conséquences de l’intégration durable de la garantie jeunes dans leur offre de service et leur permettre d’avoir plus de souplesse de gestion. C’est évidemment un aspect dont nous souhaitons discuter aussi avec les collectivités territoriales, qui – j’ai bien compris vos propos – sont très favorables à ces missions locales et dont, je l’espère bien, elles ne se désengageront pas.
L’avis du Gouvernement est défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Gisèle Jourda, pour explication de vote.
Mme Gisèle Jourda. Dire que je soutiens avec force cet amendement, c’est peu dire. En effet, la pseudo-constance des crédits de la mission « Travail et emploi » pour les missions locales est de fait un véritable tour de passe-passe. Elle masque la réalité des moyens dévolus aux missions locales, qui, au titre des conventions pluriannuelles d’objectifs conclues avec l’État, vont perdre 8,2 millions d’euros, alors qu’elles ont la charge de la montée en puissance de la garantie jeunes.
L’annonce du plan Pauvreté, la volonté du Gouvernement de faire bénéficier de ce dispositif 100 000 jeunes supplémentaires n’est donc qu’un écran de fumée.
Madame la rapporteur l’a justement dit dans son intervention : la garantie jeunes est un système très complexe à mettre en œuvre, tant dans ses obligations de résultat, excessives, que dans ses modalités d’évaluation, inadaptées.
Département pilote, l’Aude avait au départ un très bon taux de sortie. Mais aujourd’hui celui-ci est en baisse. Telle est la réalité ! Les missions locales n’ont plus les moyens d’accompagner les jeunes. Au final, elles ne perçoivent en moyenne que 85 % des financements : ce ne sont donc pas 1 600 euros qu’elles touchent par jeune, mais 85 % de 1 600 euros. Il faut simplifier cette bureaucratie excessive et non pas supprimer les crédits.
S’agit-il là d’affaiblir ces opérateurs de l’emploi, pourtant reconnus, pourtant spécialisés, pourtant de proximité ? S’agit-il de les affaiblir encore et encore, afin de montrer qu’ils n’ont pas la capacité de réaliser cette prise en charge des jeunes ?
Que se passera-t-il ? In fine, le Gouvernement justifiera la rationalisation des dispositifs, annoncera ou, en tout cas, favorisera leur fusion avec Pôle emploi. On connaît la méthode ! Terrible erreur !
Les élus sur l’ensemble de nos territoires y sont fermement opposés. La preuve : quand M. le Premier ministre a fait cette annonce brutale, sans concertation préalable, en juillet dernier, c’est à une véritable levée de boucliers qu’il s’est confronté. C’est devenu alors une expérimentation, annoncée dans le cadre du plan de transformation Action publique 2022. Il faut se méfier de cette expérimentation : les missions locales ne font pas le même métier que Pôle emploi. Il faudrait que les élus maintiennent leur contribution financière tout en abandonnant cela, sous pilotage automatique, à Pôle emploi.
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.
Mme Gisèle Jourda. Cette perspective est hors de question et je vous demande avec conviction, mes chers collègues, de soutenir cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote.
M. Alain Fouché. Je connais bien également les missions locales, financées à l’échelle des pays, avec un soutien du département, des intercommunalités. Elles fonctionnaient pas mal. Chez moi – peut-être est-ce le cas ailleurs –, à un moment donné, la région a carrément décidé de mettre la main sur ces missions locales, attribuant des financements.
Je m’interroge : les régions apportent-elles toujours des financements ? Je n’en ai pas le sentiment. Le président de la région Nouvelle-Aquitaine, à laquelle appartient mon département, retire une quantité de financements qui étaient auparavant accordés à la fois aux associations, aux communes, etc. Tout cela est inquiétant.
M. le président. L’amendement n° II-546 rectifié, présenté par Mmes Féret, Van Heghe et Taillé-Polian, MM. Daudigny et Kanner, Mmes Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier et Rossignol, MM. Tourenne, Botrel, Carcenac et Éblé, Mme Espagnac, MM. Féraud, Jeansannetas, P. Joly, Lalande, Lurel, Raynal, Bérit-Débat et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
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Accès et retour à l’emploi |
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Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi |
5 000 000 |
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5 000 000 |
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Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail |
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Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail dont titre 2 |
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5 000 000 |
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5 000 000 |
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TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
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SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Sabine Van Heghe.
Mme Sabine Van Heghe. Les crédits dédiés au CPA-CPF – compte personnel d’activité et compte personnel de formation – baissent de 8 à 3 millions d’euros, en plein contexte de mise en œuvre de votre réforme de la formation professionnelle, madame la ministre.
Il est prévu que l’application internet d’accès au CPA-CPF soit opérationnelle à l’automne prochain, la Caisse des dépôts et consignations travaillant à sa configuration en lien avec les organismes de formation.
À ce propos, si la concertation est établie avec les professionnels pour s’assurer que l’application réponde bien aux besoins des acteurs privés du marché de la formation, une telle concertation est-elle envisagée en direction des usagers de cette future application ?
Garantir que celle-ci répondra effectivement aux besoins de nos concitoyens doit être la priorité des pouvoirs publics. Je vous remercie, madame la ministre, de bien vouloir nous rassurer sur ce point.
Le financement en baisse est un mauvais signal. Vous nous répondrez sans doute qu’un financement complémentaire est prévu via le PIC, mais nous n’avons aucune garantie sur ce point ni aucune information sur son montant. D’où notre amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Avis défavorable. Au total, en considérant également les crédits complémentaires du Grand Plan d’investissement, 23 millions d’euros seront dépensés à ce titre en 2019, en y incluant les 3 millions d’euros du système d’information CPA.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Travail et emploi », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
(Les crédits sont adoptés.)
M. le président. J’appelle en discussion les articles 84 et 84 bis, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Travail et emploi ».
Travail et emploi
Article 84
I. – Le titre II du livre Ier de la cinquième partie du code du travail est ainsi modifié :
1° L’article L. 5122-1 est complété par un IV ainsi rédigé :
« IV. –Sont prescrites, au profit de l’État et de l’organisme gestionnaire de l’assurance chômage, les créances constituées au titre de l’allocation mentionnée au II pour lesquelles l’employeur n’a pas déposé de demande de versement auprès de l’autorité administrative dans un délai d’un an à compter du terme de la période couverte par l’autorisation de recours à l’activité partielle. » ;
2° À la première phrase de l’article L. 5124-1, la référence : « à l’article L. 5123-2 » est remplacée par les références : « aux articles L. 5122-1 et L. 5123-2 ».
II. – Le I s’applique aux demandes de versement de l’allocation mentionnée à l’article L. 5122-1 pour lesquelles la demande préalable d’autorisation de recours à l’activité partielle a été déposée à compter du 24 septembre 2018. – (Adopté.)
Article 84 bis (nouveau)
Pour l’année 2019, il est institué une contribution, d’un montant de 25 millions d’euros, de l’association de gestion du fonds de développement pour l’insertion professionnelle des handicapés mentionnée à l’article L. 5214-1 du code du travail, au profit de l’Agence de services et de paiement mentionnée à l’article L. 313-1 du code rural et de la pêche maritime. Cette contribution est affectée au financement des aides financières mentionnées à l’article L. 5213-19 du code du travail et attribuées dans les conditions prévues au même article L. 5213-19.
Le recouvrement, le contentieux, les garanties et les sanctions relatifs à cette contribution sont régis par les règles applicables en matière de taxe sur les salaires. – (Adopté.)
compte d’affectation spéciale : financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage », figurant à l’état D.
ÉTAT D
(En euros) |
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Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage |
1 709 714 489 |
1 709 714 489 |
Répartition régionale de la ressource consacrée au développement de l’apprentissage |
1 384 542 387 |
1 384 542 387 |
Correction financière des disparités régionales de taxe d’apprentissage et incitations au développement de l’apprentissage |
325 172 102 |
325 172 102 |
M. le président. Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
(Les crédits sont adoptés.)
M. le président. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Travail et emploi », ainsi que du compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage ».
7
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 5 décembre 2018, à onze heures, quatorze heures trente et le soir :
Suite du projet de loi de finances pour 2019, adopté par l’Assemblée nationale (n° 146, 2018-2019) ;
- Relations avec les collectivités territoriales (+ articles 79 à 81 ter) ;
- Compte spécial : Avances aux collectivités territoriales ;
- Enseignement scolaire.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le mercredi 5 décembre 2018, à une heure quinze.)
Direction des comptes rendus
GISÈLE GODARD