M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. C’est toujours le problème.
Mme Christine Lavarde. Par ailleurs, en tant que sénateur des Hauts-de-Seine, je ne peux que rappeler l’impatience des élus franciliens quant à une prise de décision sur l’organisation institutionnelle de la région d’Île-de-France. Le millefeuille à cinq couches est indigeste !
En tant que sénateur du groupe Les Républicains, je veillerai à ce que le nouveau système fiscal proposé préserve la libre administration et l’autonomie financière des collectivités locales.
Pour en revenir au projet de loi dont nous allons débattre ces prochains jours, 11 des 85 articles du texte initial concernent directement les finances locales.
Conformément à l’engagement pris en 2017 de ne pas diminuer les dotations aux collectivités territoriales en contrepartie de la mise en œuvre du dispositif de contractualisation, l’article 23 maintient le niveau de la dotation globale de fonctionnement pour 2019 à son niveau de 2018. Ce maintien en euros courants masque cependant une baisse en euros constants dès lors que l’inflation repart à la hausse.
Les collectivités territoriales, monsieur le secrétaire d’État, ont respecté leur contrat. En effet, selon la note de conjoncture sur les finances locales de la Banque postale du 19 septembre 2018, la prévision d’évolution des dépenses de fonctionnement des administrations publiques locales, les APUL, est de 0,9 % pour 2018. Il aurait donc été de bon ton que l’État respecte le sien. Ce qui est vrai en général – le maintien des dotations – est faux en particulier : en 2018, près de la moitié des communes ont vu leur DGF diminuer et les deux tiers ont été touchées par une baisse de leur dotation forfaitaire.
En effet, afin de respecter les plafonds fixés par l’article 16 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 en ce qui concerne la trajectoire des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales, toute hausse doit être gagée par le biais des variables d’ajustement. Ainsi, en 2019, les variables d’ajustement sont minorées à hauteur de 144 millions d’euros.
Selon le Gouvernement, « les variables d’ajustement relatives à chaque catégorie de collectivités doivent neutraliser les hausses de crédits gagées qui lui bénéficient » ; dit autrement, cela revient à donner d’une main pour reprendre de l’autre, ou encore à financer de la péréquation verticale par de la péréquation horizontale. Cette année, cette logique n’est pas parfaitement respectée, puisque le bloc communal viendra financer à hauteur de 34 millions d’euros l’augmentation des ressources des départements.
La loi de finances pour 2018 avait élargi l’assiette des variables d’ajustement à la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle des communes et des établissements publics de coopération intercommunale. En avril 2018, une instruction fiscale de Bercy venait geler l’application de cette disposition pour les EPCI, au regard de sa très forte concentration. Les mêmes effets se sont fait sentir lors de la ventilation de la minoration sur les communes, conduisant même quatre maires des Hauts-de-Seine à attaquer en justice l’arrêté préfectoral de notification. L’article 23 du présent projet de loi de finances vient annuler les dispositions de la loi de finances initiale pour 2018. Mais, monsieur le secrétaire d’État, en 2019, les mêmes causes produiront les mêmes effets : dès lors, pourquoi donc inscrire à nouveau une minoration de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle, la DCRTP ?
Si, côté recettes, le compte y est – au moins en apparence –, côté dépenses, la situation est déséquilibrée.
Au-delà de la croissance des charges de personnel avec la réactivation du protocole sur les parcours professionnels, carrières et rémunérations, le PPCR, les dépenses des collectivités locales seront fortement majorées du fait de la hausse de la fiscalité environnementale. Je rappellerai simplement que le parc automobile des collectivités territoriales est composé à hauteur de 75 % par des véhicules diesel. Je citerai également l’augmentation des tarifs de la composante « déchets » de la TGAP entre 2021 et 2025. Bien évidemment, les apporteurs de déchets doivent être incités à privilégier les opérations de recyclage. Cependant, comme 30 % des déchets des ménages ne sont aujourd’hui pas recyclables, malgré l’application du taux de TVA de 5,5 % prévue à l’article 59 du projet de loi de finances, le surcoût pour les collectivités est estimé, au bas mot, à 431 millions d’euros pour la période 2021-2025, voire à 1 milliard d’euros si l’on en croit les simulations de l’association AMORCE. Enfin, la hausse de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, la TICPE, sur le gazole non routier, le GNR, va pénaliser à hauteur de 500 millions d’euros le secteur des travaux publics ; il ne vous aura pas échappé que ce surcoût sera très certainement refacturé aux clients. Or les donneurs d’ordres en matière de travaux publics sont à hauteur de 65 % les collectivités territoriales, soit une hausse potentielle de leur facture de 325 millions d’euros.
Alors que les maires de France sont réunis à quelques encablures de cet hémicycle, je crains que le projet de loi de finances pour 2019 ne vienne conforter la conclusion de l’Observatoire de la démocratie de proximité AMF-CEVIPOF : « la recentralisation ressentie de l’action communale ne se traduit pas par le transfert de compétences communales à l’État central, mais résulte plutôt des contraintes budgétaires installées dans la durée ».
Un sondage du CEVIPOF vient de nous apprendre qu’un maire sur deux dit aujourd’hui ne pas vouloir se représenter à l’issue de son mandat. Monsieur le secrétaire d’État, il est temps que le Président de la République et le Gouvernement passent des mots aux actes. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Jacky Deromedi. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Jacky Deromedi. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, un budget, c’est d’abord des visages, des personnes, des enfants dont nous cherchons à améliorer la vie. Ces visages, ce sont d’abord pour moi ceux des Français de l’étranger, que je représente ici avec d’autres.
Je commencerai par évoquer les conséquences fiscales de ce projet de budget pour nos compatriotes expatriés.
Le Gouvernement décrit comme une conquête sociale la suppression de la taxe d’habitation pour 80 % des Français. Cela ne concerne pas, évidemment, les Français de l’étranger qui ont une résidence en France. Il serait intéressant de savoir quand les Français de l’étranger pourront enfin obtenir que leur résidence unique en France soit considérée comme leur résidence principale.
Bercy a lâché du lest sur quelques impôts dans ce projet de budget, en matière de plus-values ou de pensions alimentaires notamment, mais on reprend d’une main ce que l’on a accordé de l’autre. Le taux minimum d’imposition sur les revenus de source française augmente de 20 % à 30 %.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Nous allons y remédier.
Mme Jacky Deromedi. J’ai déposé un amendement de suppression de cette augmentation. Nos compatriotes m’écrivent pour s’inquiéter de la mise en œuvre du prélèvement à la source. Ils ont le sentiment que le nouveau système leur sera défavorable et qu’ils paieront davantage. Aux questions écrites que j’ai posées à ce sujet, vous avez répondu, monsieur le secrétaire d’État, qu’il n’y aurait pas un double prélèvement. Mais que se passera-t-il quand existe une convention fiscale ? Le prélèvement à la source sera-t-il, dans ce cas, opéré sur les revenus de source française ?
En matière de CSG-CRDS, nos compatriotes affiliés à un régime de sécurité sociale de l’Union européenne ont été exonérés, mais les autres Français résidant dans des pays tiers sont restés sur leur faim. Pourquoi celui qui vit en Belgique, en Italie ou en Espagne serait-il exonéré de la CSG-CRDS, et pas celui qui vit en Chine, aux États-Unis, en Afrique ou en Australie ? Où est l’« égalité » qui figure dans notre belle devise ? En outre, on n’a dispensé personne de la nouvelle contribution de solidarité de 7,5 %.
En ce qui concerne notre réseau scolaire à l’étranger, le Président de la République a prévu le doublement du nombre d’élèves d’ici à 2030. Il s’agit de faire toujours plus avec des moyens qui soit diminuent, soit stagnent. Le doublement du nombre d’élèves suppose pratiquement un doublement du nombre d’enseignants. Or le leitmotiv gouvernemental, c’est la stabilisation des moyens et la réduction des effectifs, alors que les besoins augmentent. Par quel exercice de prestidigitation allez-vous réaliser ce programme ?
La subvention à l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’AEFE, est stable. Elle est fixée à 384 millions d’euros. Pour compenser les conséquences de la suppression de 33 millions d’euros de crédits l’an dernier, l’AEFE a porté unilatéralement son prélèvement sur les établissements conventionnés de 6 % à 9 % des frais de scolarité, ces établissements augmentant donc en conséquence les écolages.
La dotation consacrée aux bourses sera de 105 millions d’euros en 2019, soit une diminution de 5 millions d’euros par rapport à 2018. Au lieu de modifier le barème des bourses alors que les besoins des familles augmentent, on bloque le système en réduisant la dotation de l’État, et on fragilise l’AEFE.
En 2017, les parents ont participé à hauteur de 65 % au financement des établissements en gestion directe et des établissements conventionnés. Le Président de la République a indiqué qu’une des solutions qu’il préconisait était la recherche de partenariats locaux ou de mécénats. Toutefois, cette recherche se révèle complexe et aléatoire et ne permet pas d’avoir une véritable visibilité pour un fonctionnement sain et pérenne des établissements scolaires.
En fait, nous subissons une baisse considérable des effectifs : la suppression de 166 postes d’enseignant équivalents temps plein en 2019 fait suite à celle de 180 ETP en 2018. La législation ne permet plus de renouveler un CDD au-delà de six années, et le ministère remercie des agents qualifiés et expérimentés pour les remplacer par de nouvelles recrues qui n’auront évidemment pas la même expérience et les mêmes qualifications. On marche sur la tête… Il est essentiel de créer pour le réseau culturel une exception à la limite des six années d’emploi en CDD. Pourquoi se débarrasser de personnel qualifié par simple application d’une réglementation sans fondement ?
Bref, encore une fois, les Français de l’étranger sont pénalisés : hausse du taux minimum d’imposition sur le revenu de 20 % à 30 %, instauration d’une taxe de solidarité, réduction des budgets des postes diplomatiques, réduction des subventions à l’AEFE, diminution des bourses… Mais quel est votre problème avec les Français de l’étranger ? Ils sont avant tout français, et nous sommes fiers de leur courage. Ils ont droit à notre considération et à votre attention. Ne pensez pas à eux uniquement au moment des élections, car ils ont de la mémoire et sauront se souvenir de la manière dont ils ont été traités ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, je remercie l’ensemble des intervenants dans cette discussion générale de leurs contributions, qui ont été particulièrement riches. Je vais maintenant m’efforcer de répondre à leurs propositions, à leurs critiques et à leurs interrogations.
Ce projet de loi de finances comporte un certain nombre de réformes structurelles, d’abord en matière de compétitivité, avec une diminution de cotisations sociales de 19 milliards d’euros pour permettre et accompagner la création d’emplois, grâce au renforcement des mesures d’allégement qui avaient déjà été programmées et à la mise en place d’un nouvel allégement en remplacement du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi.
Monsieur le sénateur Raynal, vous considérez qu’il n’est pas utile de transformer le CICE en allégement de charges. N’y voyez pas malice de ma part, mais je vous rappelle que c’était un engagement pris en 2016 par François Hollande devant le monde des entreprises, deux ans après la mise en place de ce crédit d’impôt.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Grosse erreur !
M. François Bonhomme. On vous croit sur parole, monsieur le secrétaire d’État !
M. Philippe Dallier. Promesse non tenue…
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Nous pensons au contraire que c’est une mesure utile, permettant à la fois de simplifier le travail des entreprises et, en 2019, de les faire bénéficier d’une trésorerie importante, ce qui, nous l’espérons, favorisera l’investissement.
Par ailleurs, nous continuons à valoriser le travail, avec l’exonération de cotisations sociales des heures supplémentaires à compter de l’automne prochain et la suppression du forfait social à la fois sur l’intéressement et la participation, selon la taille des entreprises.
Ces mesures sont financées par des économies substantielles, comme le gel du point d’indice dans la fonction publique, qui représente une économie de 1,8 milliard d’euros, la revalorisation maîtrisée de différentes prestations sociales ou encore la limitation à 2,5 % de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, même si ce taux est l’un des plus élevés de ces dix dernières années.
Au total, au travers de ce projet de loi de finances, ce sont plus de 6 milliards d’euros de pouvoir d’achat que nous rendons aux ménages, avec, il est vrai, 3 milliards d’euros de fiscalité supplémentaire, dont une partie est liée à la fiscalité écologique – j’y reviendrai dans un instant –, mais surtout 9 milliards d’euros d’allégements, dont 4 milliards d’euros au titre des cotisations salariales et 3,8 milliards d’euros au titre de la taxe d’habitation.
M. le président Retailleau s’est inquiété d’une supposée absence de résultats de cette politique. Nous considérons au contraire qu’elle porte ses fruits, avec un déficit public inférieur à 3 % du PIB dès 2017, pour la première fois depuis onze ans, qui le sera encore en 2018 et en 2019, même si nous prévoyons un ressaut tout à fait conjoncturel, du fait de la transformation du CICE en allégement de charges : le déficit sera de 1,9 % en 2019, auquel il faut ajouter 0,9 point de PIB correspondant à la conjonction, cette année-là, du versement du CICE au titre de 2018 et de l’allégement de charges.
La dépense publique est très nettement ralentie, avec une stabilisation totale en volume pour 2018. Plus largement, la confiance est retrouvée, notamment parmi les acteurs économiques, puisque le dernier baromètre Ernst & Young sur l’attractivité de la France indique que 77 % des investisseurs, étrangers notamment, déclarent avoir confiance en l’avenir de l’industrie dans notre pays.
Pour ce qui concerne le chômage, il a reculé de près de 1 point depuis 2016 et de 2,6 points en un an pour les plus jeunes. Ces premiers résultats sont-ils suffisants ? Non ; nous ne nous y arrêtons pas, et nous nous employons au contraire à approfondir et à accélérer notre action, avec les objectifs ambitieux à l’horizon 2022 en matière de comptes publics qui ont été arrêtés en loi de programmation : 5 points de moins de dette publique, 3 points de moins de dépense publique, 2 points de moins de déficit et 1 point de moins de prélèvements obligatoires.
L’État prend toute sa part à cette trajectoire, contrairement à ce que certains d’entre vous ont pu affirmer. Les dépenses de l’État pour la norme pilotable baisseront de 0,5 % en volume en 2019, soit une augmentation en valeur de 0,8 %. Il faut rapporter ces chiffres à la hausse de 2,3 % des dépenses locales, investissement et fonctionnement compris, ou à celle de 2,5 % des dépenses d’assurance maladie.
En matière de fiscalité écologique, je ne peux que rappeler que le caractère écologique de la hausse de la TICPE et de la trajectoire carbone, qui a été votée, on l’oublie parfois, au cours du mandat précédent, ne tient pas à son affectation. D’ailleurs, ce n’est pas à une assemblée parlementaire que j’apprendrai que le principe d’universalité budgétaire interdit la généralisation des affectations de ressources. Sinon, nous aurions non plus une loi de finances, mais un simple empilement de comptes d’affectation spéciale.
Le principe de la fiscalité comportementale que nous mettons en œuvre est de décourager la consommation de produits nocifs pour notre santé ou notre environnement, et non pas de financer des dépenses nouvelles. Telle est la philosophie qui est la nôtre en matière de fiscalité écologique.
Le Premier ministre a annoncé récemment de nouvelles mesures d’accompagnement, qui amplifient un effort déjà considérable consenti au travers du projet de loi de finances pour 2019. Je le souligne, le budget du ministère de la transition écologique et solidaire est en hausse de 3,1 %, soit de plus de 1 milliard d’euros. Il atteint 34,2 milliards d’euros, chiffre à rapprocher du produit de la fiscalité écologique et environnementale.
Cela nous permet de dégager des crédits en faveur des bonus électriques et de la prime à la conversion, qui sont augmentés de 57 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2018. Le Gouvernement a tenu compte du succès massif de cette prime à la conversion, dont 70 % des bénéficiaires sont des ménages non imposables.
De même, le chèque énergie sera porté de 150 euros en moyenne à 200 euros par an, ce qui représente un engagement budgétaire de 740 millions d’euros, contre 560 millions d’euros en 2018.
Je m’arrêterai un instant sur un point particulier en matière de fiscalité écologique, pour couper court aux mauvais procès sur les annulations de crédits de fin d’année, notamment sur les ajustements réalisés en projet de loi de finances rectificative sur le compte d’affectation spéciale « Transition énergétique ». Nous avons tout simplement retenu les dernières estimations de charges des services publics de l’énergie établies par la Commission de régulation de l’énergie, la CRE. Le calcul a été effectué au mois de juillet dernier, à partir du prix de l’énergie notamment, et à la suite d’un conseil d’administration tenu le 18 juillet 2018. Les dépenses du compte d’affectation spéciale « Transition énergétique » sont des dépenses obligatoires, et non pas discrétionnaires, liées aux contrats de production d’énergie renouvelable. Ces dépenses se révélant moins élevées que prévu, l’État ne surcompensera pas les opérateurs en 2018, car ce serait inutile et illégitime.
Les crédits de la mission « Outre-mer » connaissent une hausse sans précédent de plus de 20 %, pour s’établir à 2,4 milliards d’euros dans le projet de loi de finances pour 2019. À la suite des assises des outre-mer, la ministre des outre-mer a en effet pris, monsieur Lurel, des décisions courageuses au bénéfice direct des territoires ultramarins : la suppression de la TVA-NPR, dont toutes les évaluations ont montré qu’il s’agissait d’un dispositif obsolète et inefficace, comme la révision de l’abattement de l’impôt sur le revenu pour les 4 % de ménages les mieux rémunérés. Nous aurons l’occasion de revenir sur chacune de ces dispositions en présence de la ministre. Je tiens à souligner que ces économies ont été entièrement réallouées au budget des outre-mer, avec des aides directes à l’investissement et au développement économique, pour plus de 170 millions d’euros.
Je remercie les différents intervenants qui ont bien voulu souligner que, d’une manière globale, les concours de l’État aux collectivités territoriales étaient stabilisés. Ils s’élevaient à 47,8 milliards d’euros en 2017, à 48,1 milliards d’euros en 2018 et ils sont fixés à 48,2 milliards d’euros dans le projet de loi de finances pour 2019.
Si, en dépit du maintien de la DGF à un même niveau, le montant perçu par de nombreuses communes a évolué, cela tient au fait que la répartition de la DGF est liée à un critère démographique, l’augmentation ou la diminution de la population pouvant entraîner une variation de la dotation forfaitaire, et à des mécanismes propres à la DGF : le premier relève de l’écrêtement de la dotation forfaitaire pour financer des emplois internes, notamment en matière d’augmentation de la péréquation verticale ; le second tient au fait que la DGF est aussi allouée aux communes, notamment pour ses parts péréquées – la DSU, la DSR et, souvent, la DSR « cible » –, selon leur potentiel financier agrégé. Le potentiel financier agrégé tient compte d’indicateurs socio-économiques propres à la commune, mais aussi à l’intercommunalité d’appartenance. La modification importante de la carte intercommunale intervenue au 1er janvier 2017 a, d’une manière automatique, entraîné une variation forte du potentiel financier agrégé des nombreuses communes dont l’intercommunalité d’appartenance a évolué. Cela explique que, alors que, en 2017, dernière année de baisse de dotations, la DGF avait été versée sur la base du potentiel financier agrégé de 2016 pour sa part péréquée, elle l’a été en 2018, toujours pour sa part péréquée, sur la base du potentiel financier agrégé du dernier exercice connu, soit 2017, après la modification de la carte intercommunale.
À critères constants, l’année 2019 s’annonce sous de meilleurs auspices, pour une raison très simple : la carte intercommunale a extrêmement peu bougé au 1er janvier 2018. Ainsi, le potentiel financier agrégé de référence de 2018 est logiquement très peu différent de celui de 2017, hors évolutions liées à l’amélioration ou à la dégradation de la situation économique et sociale de telle ou telle collectivité ; cela me semble être de nature à rassurer certains d’entre vous.
Vous avez évoqué, madame Lavarde, la question des variables d’ajustement. Le fait que, bien souvent, dans nos débats, au Sénat comme à l’Assemblée nationale, nous nous concentrions davantage sur la question des variables d’ajustement et de leur répartition que sur celle des dotations forfaitaires et, plus important, des dotations versées est le symptôme que le système de financement des collectivités territoriales est arrivé à bout de souffle.
Dans la loi de finances initiale pour 2017, les variables d’ajustement s’élevaient à 923 millions d’euros. En 2018, elles s’établissaient à 323 millions d’euros, dont ont été retranchés, par décision de gestion, environ 120 millions d’euros au titre de la DCRTP des intercommunalités, que Gérald Darmanin et moi-même avons décidé de ne pas minorer après l’adoption du projet de loi de finances pour 2018. Nous sommes aujourd’hui à 144 millions d’euros. Ces trois chiffres témoignent de l’effort réalisé par le Gouvernement afin de minorer les variables d’ajustement à répartir et d’éviter ainsi que les collectivités éprouvent un sentiment d’injustice quand leurs dotations baissent du simple fait des variables d’ajustement. Le Président de la République a dit hier, devant les maires réunis à l’Élysée, qu’il était favorable à un débat sur les modalités de répartition, tout en soulignant combien il était difficile d’aboutir à une solution qui satisferait tout le monde, sachant que l’enveloppe est normée et que les marges de manœuvre budgétaires sont relativement contraintes. Il a aussi indiqué, monsieur Delcros, à propos de la fiscalité locale, qu’un projet de loi de finances rectificative serait soumis au Parlement au printemps 2019. Le Premier ministre a précisé voilà un instant devant le Congrès des maires que ce texte serait présenté à la mi-avril en conseil des ministres. Nous avons pour objectif de tenir l’engagement pris par le Président de la République l’année dernière à la même période : assurer aux collectivités territoriales une compensation intégrale, une ressource qui soit pérenne, juste et durable. Nous aurons à travailler, dans les prochaines semaines, sur de nouvelles modalités de répartition du fruit des impôts locaux. Nous devrons préciser ce qui doit être compensé parce que supprimé et ce qui ne sera pas compensé parce que non supprimé. Nous avons d’ores et déjà indiqué la volonté du Gouvernement de ne pas supprimer la taxe d’habitation pour les résidences secondaires ni les outils à la main des élus locaux, en matière notamment de lutte contre la vacance des logements ou une exploitation commerciale particulière des locaux d’habitation, comme on peut en constater en zones touristiques, notamment à Paris.
Cela nous permettra d’ouvrir un débat sur la manière dont les collectivités territoriales et l’État pourront continuer à percevoir un certain nombre de taxes ou d’impôts : je pense à la contribution pour le financement de l’audiovisuel public, à la taxe ou redevance d’enlèvement des ordures ménagères ou encore à la taxe spécifique et facultative mise en place au titre de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations.
Dans le cadre de ce projet de loi de finances rectificative spécifique, nous pourrons ainsi arrêter le modèle de financement des collectivités territoriales et la répartition des impôts locaux restants après 2021 et la phase d’extinction de la taxe d’habitation. Dans cette attente, nous continuerons à assurer une compensation aux communes, grâce à la technique du dégrèvement, qui est la plus protectrice : les maires dont les communes perçoivent la taxe d’habitation par douzièmes ont pu constater que ce système avait intégré le dynamisme des bases et un certain nombre de revalorisations.
J’en suis conscient, mes réponses aux différents orateurs restent parcellaires, mais l’examen des articles nous permettra d’approfondir ces questions.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. En application de l’article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat, le Gouvernement demande la réserve jusqu’à lundi 26 novembre, quatorze heures trente, des articles 4, 5 et 6 du projet de loi de finances. Je précise que l’article 5 bis n’est pas inclus dans cette demande de réserve.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur cette demande de réserve formulée par le Gouvernement ?
M. Vincent Éblé, président de la commission des finances. La commission des finances n’a aucune objection. Il s’agit d’attendre le retour de déplacement de Mme la ministre des outre-mer, et cette demande nous paraît donc parfaitement justifiée.