M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Je ne reviens pas sur ce que j’ai dit sur les travailleurs des plateformes, afin d’éviter de refaire le débat. Par cohérence, je suis défavorable à l’amendement n° 490 et favorable à l’amendement n° 632.
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.
Mme Monique Lubin. Grâce à ma collègue Nadine Grelet-Certenais, nous avons rencontré les personnes qui se battent en ce moment. Il faut les entendre pour savoir ce qu’elles vivent, même si nous le savons à peu près tous, ceux d’entre nous qui vivent en zone très urbanisée et font appel à ces sociétés étant sans doute un peu plus au fait que ceux qui vivent en zone rurale.
Chacun a son histoire. Je suis élue d’un département où, il y a à peine soixante-dix ans, des gens se sont battus pour mettre un terme à des formes de travail iniques qui s’apparentaient à de l’esclavage moderne. Je croyais ce temps révolu. Or, sous couvert de nouvelles technologies, on est en train de créer de nouvelles formes de travail qui sont ni plus ni moins de nouvelles formes d’esclavage moderne. Ne nous en tenons pas aux mots, mettons-nous au travail très rapidement !
M. le président. La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais, pour explication de vote.
Mme Nadine Grelet-Certenais. Lors des travaux de la commission, nous avons déposé un amendement de suppression de l’article 40 A, article qui prévoyait l’instauration d’une charte facultative pour les plateformes numériques de mise en relation, étant farouchement opposés à ce que le secteur privé se régule par lui-même. Il revient en effet à la puissance publique de fixer le statut de ces travailleurs et d’assurer ainsi leur protection.
Or voilà que le groupe La République En Marche entend réintroduire ce dispositif. Nous ne sommes pas dupes : c’est bien parce qu’une célèbre plateforme de livraison de repas risque de voir requalifier en relation salariée le contrat de certains de ses livreurs que ce « cavalier » arrive en discussion.
Si ce dispositif vise à une protection, c’est bien à celle des plateformes et non à celle de leurs travailleurs. Mais les travailleurs de l’ubérisation de notre société doivent, comme tous les autres, relever du code du travail. D’ailleurs, un mouvement en ce sens a été engagé, notamment avec la protection contre les accidents du travail et le droit à la formation qui leur ont été reconnus dans un chapitre spécifique du code du travail relatif à la responsabilisation sociale des plateformes.
Actuellement, des livreurs parisiens de ces plateformes sont en grève pour obtenir de meilleures conditions de travail, car, à ce stade, ils représentent le sous-prolétariat du XXIe siècle. En nous opposant à cet amendement, nous nous faisons le relais de ces tâcherons modernes, comme ils se définissent eux-mêmes, qui jugent que votre démarche va renforcer l’arbitraire du secteur et pérenniser la précarité.
D’ailleurs, ils ont directement interpellé le parlementaire à l’initiative de cet amendement, le député Aurélien Taché, qui n’a pas jugé utile de les recevoir afin d’entendre leur point de vue.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Madame la ministre, il faut ouvrir ce débat, et en grand ! Un certain nombre d’entre nous prend à cœur cette question, apparue voilà quelques années. Mon collègue Pascal Savoldelli et moi-même avons rencontré de nombreuses personnes, notamment des livreurs Deliveroo et des représentants du collectif des livreurs autonomes de Paris, le CLAP. Nous soutenons évidemment la lutte qu’ils ont entamée la semaine dernière, prévue pour durer jusqu’à la finale de la Coupe du monde de football dimanche soir.
Nous pensons que ces livreurs sont des salariés comme les autres. Il ne peut pas y avoir de droit dérogatoire au code du travail.
Je le répète, pour fonctionner, Uber a besoin de chauffeurs, qui sont donc des salariés. Pour livrer ses repas, Deliveroo a besoin de livreurs, qui sont donc des salariés, lesquels représentent leur entreprise auprès des gens à qui ils livrent des repas.
Comme l’a très bien dit Mme Grelet-Certenais, l’amendement de M. Taché, une sorte de cavalier, a été déposé afin d’éviter que, dans les prochaines semaines, la relation contractuelle qui lie les parties en cause ne soit requalifiée en relation de travail salarié.
Nous voterons évidemment contre l’amendement n° 632 et appelons à voter en faveur de notre amendement n° 490. Si celui-ci n’est pas adopté, ne vous inquiétez pas – et vous connaissez l’engagement de notre groupe et sa volonté de toujours faire des propositions : nous reviendrons sur cette question, y compris par le dépôt d’une proposition de loi l’année prochaine.
M. le président. En conséquence, l’article 40 A demeure supprimé.
Article additionnel après l’article 40 A
M. le président. L’amendement n° 491, présenté par Mmes Cohen et Apourceau-Poly, MM. Gay, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 40 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 3 du chapitre Ier du titre II du livre II de la huitième partie du code du travail est complétée par des articles L. 8221-6–… à L. 8221-6–… ainsi rédigés :
« Art. L. 8221-6–… – Lorsque le travailleur, utilisé dans les conditions prévues à l’article L. 8221-6, emploie lui-même d’autres salariés, ceux-ci sont réputés être liés par contrat de travail au même employeur.
« Art. L. 8221-6-… – La sous-traitance de toute activité de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services ou l’accomplissement d’actes de commerce est prohibée au-delà du second rang. Les travailleurs occupés en méconnaissance de cette interdiction, y compris ceux mentionnés à l’article L. 8221-6-1, sont réputés être salariés du sous-traitant de second rang.
« Art. L. 8221-6-… – Toute décision de faire appel à la sous-traitance d’une partie de l’activité ou des fonctions de l’entreprise est soumise à l’avis conforme du comité d’entreprise. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. La sous-traitance en cascade est un fléau pour la santé économique de nos entreprises et pour le principe de justice sociale qui devrait guider les actions politiques.
Alors que la sous-traitance ne devrait être que le moyen de confier la réalisation d’un ouvrage à des personnes disposant de compétences particulières et d’un savoir-faire spécifique, elle s’est révélée être un redoutable outil de fragmentation de l’entreprise, l’expression de stratégies d’externalisation productive à des fins de coût.
La multiplication des niveaux de sous-traitance est en effet un moyen pour faire des économies. À chaque niveau, une entreprise donneuse d’ordres fait ainsi pression sur son sous-traitant pour maximiser ses marges et limiter ses risques, en les faisant porter sur d’autres.
En bout de chaîne, les petites entreprises et les artisans sont asphyxiés et contraints à réduire la qualité des produits et, surtout, à faire travailler les salariés dans des conditions dégradées.
Sur un même lieu de travail se multiplient ainsi les statuts salariaux. Pour une même activité, les salaires, les garanties contractuelles individuelles ou le niveau des protections collectives varient, provoquant d’injustes et d’inexcusables inégalités de traitement.
L’Allemagne et l’Espagne, pour ne prendre que ces exemples européens, ont légiféré bien avant nous sur la limitation des niveaux de sous-traitance. Cette limitation permet non seulement aux droits des travailleurs d’être mieux identifiés et mieux respectés, mais aussi de restreindre les situations de dumping social, de concurrence déloyale, et ainsi d’agir pour la santé de notre tissu économique, la stabilité de l’ordre public et l’impératif de justice sociale.
Cet amendement s’inscrit dans cette dynamique d’identification et de sécurisation, à la fois des salariés, mais également des entreprises sous-traitantes.
Les limites du modèle taylorien du travail ont largement été atteintes avec ce développement de la sous-traitance. Aussi, il est proposé d’encadrer cette pratique en la limitant à deux échelons et de la soumettre aux instances représentatives du personnel, chargées de déterminer s’il s’agit d’une opération d’externalisation ou si les compétences attendues sont bien absentes de l’entreprise donneuse d’ordres.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Que la sous-traitance en cascade soit source de problèmes, dont nous avons pu être victimes parfois, c’est la réalité. Toutefois, cet amendement soulève deux difficultés : premièrement, il n’est prévu que deux degrés dans la chaîne de sous-traitance, sans mécanisme de dérogation, ce qui est peu pour certaines opérations complexes ; deuxièmement, il tend à instaurer un droit de veto du comité social et économique pour s’opposer au recours à la sous-traitance, ce qui est à nos yeux excessif. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 491.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 40
I. – Le chapitre II du titre Ier du livre II de la cinquième partie du code du travail est ainsi modifié :
1° A L’article L. 5212-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 5212-1. – La mobilisation en faveur de l’emploi des travailleurs handicapés concerne tous les employeurs. À ce titre, ces derniers déclarent l’effectif total des bénéficiaires de l’obligation d’emploi mentionnés à l’article L. 5212-13 qu’ils emploient, selon des modalités fixées par décret.
« Les dispositions du présent chapitre s’appliquent à tout employeur occupant au moins vingt salariés, y compris les établissements publics industriels et commerciaux. » ;
1° L’article L. 5212-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 5212-2. – Tout employeur emploie des bénéficiaires de l’obligation d’emploi mentionnés à l’article L. 5212-13 dans la proportion minimale de 6 % de l’effectif total de ses salariés.
« Ce taux est révisé tous les cinq ans, en référence à la part des bénéficiaires de l’obligation d’emploi dans la population active et à leur situation au regard du marché du travail, après avis du conseil mentionné à l’article L. 146-1 du code de l’action sociale et des familles, et à l’issue d’un débat tenu dans chacune des deux assemblées du Parlement. » ;
1° bis Le premier alinéa de l’article L. 5212-3 est ainsi modifié :
a) (nouveau) Après le mot : « entreprises », sont insérés les mots : « de plus de 250 salariés » ;
b) Les mots : « établissement par établissement » sont remplacés par les mots : « au niveau de l’entreprise » ;
2° L’article L. 5212-5 est ainsi modifié :
a) Les deux premiers alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« L’employeur déclare sa situation au regard de l’obligation d’emploi auquel il est soumis en application de l’article L. 5212-2 du présent code au moyen de la déclaration prévue à l’article L. 133-5-3 du code de la sécurité sociale. Cette déclaration distingue, au sein des bénéficiaires de l’obligation d’emploi rémunérés par l’employeur, ceux qui y figurent au titre de l’insertion ou du maintien dans l’emploi. Si, au bout de trois exercices consécutifs, l’employeur ne déclare aucun recrutement de bénéficiaire de l’obligation d’emploi, l’organisme mentionné à l’article L. 213-1 du code de la sécurité ou à l’article L. 723-2 du code rural et de la pêche maritime dont relève l’employeur lui fait parvenir une notification. » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les informations contenues dans cette déclaration sont confidentielles. Elles ne peuvent être communiquées à un autre employeur auprès duquel un bénéficiaire de l’obligation d’emploi que la déclaration concerne sollicite un emploi. » ;
3° Au 3° de l’article L. 5212-5-1, la référence : « L. 5212-6, » est supprimée ;
4° La sous-section 1 de la section 3 est ainsi modifiée :
a) À la fin de l’intitulé, le mot : « partielle » est remplacé par les mots : « par l’emploi de travailleurs handicapés » ;
b) L’article L. 5212-6 est ainsi rédigé :
« Art. L. 5212-6. – L’employeur s’acquitte de son obligation d’emploi en employant les bénéficiaires mentionnés à l’article L. 5212-13, quelles que soient la durée et la nature de leur contrat. » ;
c) L’article L. 5212-7 est ainsi rédigé :
« Art. L. 5212-7. – L’employeur peut s’acquitter de son obligation d’emploi en employant :
« 1° Les bénéficiaires mentionnés à l’article L. 5212-13 accueillis en stage par l’employeur, quelle qu’en soit la durée, ainsi que les jeunes de plus de seize ans bénéficiaires de droits à la prestation de compensation du handicap, de l’allocation compensatrice pour tierce personne ou de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé qui disposent d’une convention de stage ;
« 2° Les bénéficiaires mentionnés au même article L. 5212-13 accueillis pour des périodes de mise en situation en milieu professionnel dans les conditions fixées au chapitre V du titre III du livre Ier de la présente partie ;
« 3° Les bénéficiaires mentionnés à l’article L. 5212-13 mis à disposition des entreprises par les entreprises de travail temporaire et par les groupements d’employeurs.
« Les modalités de prise en compte des bénéficiaires mentionnés au présent article sont fixées par décret. » ;
d) L’article L. 5212-7-1 est abrogé ;
e) Il est ajouté un article L. 5212-7-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 5212-7-2. – Pour le calcul du nombre de bénéficiaires de l’obligation d’emploi mentionnés à l’article L. 5212-13, l’âge des bénéficiaires peut être pris en compte. Les modalités de calcul sont fixées par décret. » ;
4° bis L’article L. 5212-8 est ainsi rédigé :
« Art. L. 5212-8. – L’employeur peut s’acquitter de son obligation d’emploi en faisant application d’un accord de branche, de groupe ou d’entreprise agréé prévoyant la mise en œuvre d’un programme pluriannuel en faveur des travailleurs handicapés, pour une durée maximale de trois ans, renouvelable une fois. Le contenu des accords, qui fait l’objet d’une évaluation à la première échéance triennale, est fixé par décret. » ;
4° ter Le premier alinéa de l’article L. 5212-9 est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Tout employeur qui n’a pas satisfait à l’obligation mentionnée à l’article L. 5212-2 est tenu de s’en acquitter en versant une contribution annuelle, dans des conditions fixées par décret, pour chacun des bénéficiaires de l’obligation qu’il aurait dû employer. Cette contribution est recouvrée par les organismes mentionnés à l’article L. 213-1 du code de la sécurité sociale ou à l’article L. 723-2 du code rural et de la pêche maritime dont relève l’employeur, dans les mêmes conditions que les cotisations du régime général de sécurité sociale. » ;
5° (Supprimé)
5° bis À la première phrase du second alinéa du même article L. 5212-9, après le mot : « décret », sont insérés les mots : « , après avis du conseil mentionné à l’article L. 146-1 du code de l’action sociale et des familles » ;
5° ter (Supprimé)
5° quater (nouveau) L’article L. 5212-10 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est supprimé ;
b) Le second alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, cette limite est appliquée de façon dégressive aux entreprises assujetties à l’obligation d’emploi, en fonction du nombre de bénéficiaires de l’obligation d’emploi qu’elles occupent, du nombre des contrats et des accords collectifs susmentionnés. Elle ne peut être portée à un niveau inférieur à 600 fois le salaire horaire minimum de croissance. » ;
6° Au second alinéa de l’article L. 5212-10, la référence : « L. 5212-6 » est remplacée par la référence : « L. 5212-10-1 » ;
7° Après le même article L. 5212-10, il est inséré un article L. 5212-10-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 5212-10-1. – Peuvent être déduites du montant de la contribution annuelle les dépenses supportées directement par l’entreprise afférentes à des contrats de fourniture, de sous-traitance ou de prestations de services ou à des partenariats qu’elle passe avec :
« 1° Des entreprises adaptées ;
« 2° Des établissements ou services d’aide par le travail ;
« 3° Des travailleurs indépendants handicapés reconnus bénéficiaires de l’obligation d’emploi au sens de l’article L. 5212-13. Est présumée travailleur indépendant au sens du présent article toute personne remplissant les conditions mentionnées au I de l’article L. 8221-6 ou à l’article L. 8221-6-1.
« La nature des dépenses mentionnées au premier alinéa du présent article ainsi que les conditions dans lesquelles celles-ci peuvent être déduites du montant de la contribution sont déterminées par décret. » ;
8° Au premier alinéa de l’article L. 5212-11, les mots : « , en vue de permettre à l’employeur de s’acquitter partiellement de l’obligation d’emploi, » et les mots : « au sein de l’entreprise, l’abondement du compte personnel de formation au bénéfice des personnes mentionnées à l’article L. 5212-13 ou l’accès de personnes handicapées à la vie professionnelle » sont supprimés ;
9° À l’article L. 5212-12, la référence : « L. 5212-6 » est remplacée par la référence : « L. 5212-7 » ;
10° Le dernier alinéa de l’article L. 5212-14 est supprimé.
11° (nouveau) L’article L. 5213-2 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsque le handicap est irréversible, la qualité de travailleur handicapé est attribuée de façon définitive. »
II. – L’article L. 5523-4 du code du travail est abrogé.
III. – A. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2020 et s’applique aux obligations portant sur les périodes courant à compter de cette date.
B. – Toutefois, le 1° bis du I entre en vigueur selon des modalités fixées par décret, et au plus tard le 1er janvier 2025. Entre le 1er janvier 2020 et le 31 décembre 2024, l’acquittement de l’obligation d’emploi par le versement d’une contribution annuelle fait l’objet de modalités transitoires déterminées par décret. Ce décret fixe notamment, d’une part, les modalités de calcul de la limite maximale de la contribution, à effectif de travailleurs handicapés au minimum égal à la somme des effectifs des travailleurs handicapés des différents établissements d’une entreprise assujettie, et, d’autre part, les modalités de modulation du montant de la contribution, notamment en fonction de l’effectif de l’entreprise.
IV. – Les accords mentionnés à l’article L. 5212-8 du code du travail agréés avant le 1er janvier 2020 continuent à produire leurs effets jusqu’à leur terme et peuvent être renouvelés une fois pour une durée maximale de trois ans, à l’exception des accords d’établissement qui ne peuvent pas être renouvelés.
V. – Pour l’application de l’article L. 5212-9 du code du travail, dans sa rédaction résultant de la présente loi, les branches professionnelles engagent des négociations en vue d’élaborer des propositions pour réviser la liste des emplois exigeant des conditions d’aptitude particulières. Le décret prévu au même article L. 5212-9 ne peut être publié avant le 1er juillet 2019.
VI. – À titre expérimental, à compter du 1er janvier 2019 et jusqu’au 31 décembre 2021, outre les cas prévus aux articles L. 1251-6 et L. 1251-7 du code du travail, la mise à disposition d’un salarié temporaire auprès d’une entreprise utilisatrice peut intervenir lorsque ce salarié temporaire est un bénéficiaire de l’obligation d’emploi mentionné à l’article L. 5212-13 du même code.
Au plus tard le 30 juin 2021, le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur l’application du présent VI au regard de son impact sur l’accès à l’emploi des bénéficiaires de l’obligation d’emploi susmentionnée.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, sur l’article.
Mme Patricia Schillinger. Mes chers collègues, avant d’entamer l’examen du chapitre du projet de loi qui s’attache à rendre les entreprises plus inclusives, je souhaite rappeler quelques chiffres importants : 2,7 millions de personnes en âge de travailler sont en situation de handicap, mais trente ans après la mise en œuvre de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés, le taux d’emploi direct dans les entreprises du secteur privé est de 3,4 % pour un objectif de 6 %. Il atteint 5,2 % dans la fonction publique. Par ailleurs, le chômage des travailleurs handicapés reste trop élevé, avec un taux de 19 %.
Face à ces constats, la mobilisation globale de l’État, des partenaires sociaux, des associations et des entreprises doit être maximale pour refuser ce qui après trente ans pourrait s’apparenter à de la résignation, voire à de la fatalité.
Aussi, je tiens à saluer le travail de concertation conduit par vous-même, madame la ministre, et par Sophie Cluzel, secrétaire d’État chargée des personnes handicapées, ainsi que le précieux travail réalisé par Dominique Gillot sur l’emploi des travailleurs handicapés et sur les aidants qui va continuer de nourrir la deuxième phase de concertation jusqu’au mois de septembre.
Je veux également souligner l’importance pour mon groupe de réintroduire l’entreprise comme périmètre de calcul de l’obligation d’emploi, sans autre condition de seuil.
Il s’agit pour nous d’une disposition importante et le seuil de 250 salariés adopté par la commission n’est pas acceptable à nos yeux. Il priverait la nouvelle échelle de calcul de l’essentiel de son effet, alors que, je le répète, la mobilisation en faveur de l’emploi des travailleurs handicapés doit être générale.
M. le président. La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais, sur l’article.
Mme Nadine Grelet-Certenais. Nous abordons, en ce début d’examen du titre III, un sujet majeur pour l’emploi des personnes en situation de handicap.
Comme vous le savez, mes chers collègues, le chômage frappe très durement cette population. Selon les chiffres de la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, la DARES, seuls 35 % des personnes en situation de handicap ont un emploi, contre 64 % pour la population générale et 19 % – environ 500 000 personnes – sont au chômage contre 9 % en moyenne.
L’Inspection générale des affaires sociales, dans son rapport du mois de décembre 2017 sur le mode de financement de l’insertion professionnelle des travailleurs handicapés, relevait très justement que, eu égard aux taux de chômage par âge et niveau de qualification, ce sont les travailleurs reconnus handicapés les plus âgés qui sont le plus pénalisés.
Il existe également un frein psychologique à l’emploi. En effet, les entreprises considèrent trop les personnes handicapées du point de vue de leur handicap, de leur limitation, plutôt que du point de vue de leurs compétences.
L’article 40 et les suivants du projet de loi prévoient de réformer la politique de l’emploi en faveur des travailleurs handicapés. Mais sommes-nous réellement devant une vraie réforme ou face à un coup de communication ?
En effet, de nombreuses mesures proposées ressemblent fort à l’état du droit actuel et s’apparentent bien souvent à des allégements pour les entreprises, notamment concernant l’acquittement de l’obligation d’emploi, peu favorable à l’emploi direct.
Comme sur beaucoup d’autres textes de loi présentés par le Gouvernement, des négociations parallèles sont toujours en cours et, parfois, aboutissent. Hier, une convention très engageante a été signée en vue de doubler d’ici à 2022 le nombre de créations d’emplois dans le secteur adapté.
Mais, en même temps, si j’ose dire, le Gouvernement réduit drastiquement la prime d’activité pour les salariés percevant une pension d’invalidité ou une rente accident du travail-maladie professionnelle au 1er juillet de cette année !
Cette mesure d’économie de 20 millions d’euros plonge des centaines de familles, notamment monoparentales, dans la misère.
D’un côté, le Gouvernement nous annonce des lendemains qui chantent à l’horizon de la fin du quinquennat. Et, de l’autre, il coupe les vivres aux personnes en situation de handicap les plus fragiles et les plus modestes ! Quelle contradiction !
Je ne vois pas en quoi les mesures proposées dans le présent projet de loi sont de nature à contrebalancer la suppression indigne de la prime d’activité pour les personnes handicapées les plus faibles.
Enfin, des inconnues de taille demeurent sur les questions relatives à la contribution, à son montant ou barème et à ses modalités de recouvrement par l’URSSAF. Il manque véritablement une étude d’impact.
M. le président. L’amendement n° 387, présenté par Mme Grelet-Certenais, M. Daudigny, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 3, première phrase
Après le mot :
handicapés
insérer les mots :
et du maintien de ces derniers dans l’emploi
La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais.
Mme Nadine Grelet-Certenais. Cet amendement vise à mentionner l’objectif de maintien dans l’emploi des personnes en situation de handicap dans l’alinéa 3 de l’article 40 inséré dans le projet de loi après adoption en séance publique à l’Assemblée nationale d’un amendement du Gouvernement.
Il nous semble en effet utile de préciser que la mobilisation pour l’emploi des travailleurs handicapés doit également être envisagée sur le long terme par tous les employeurs.
Le rapport de Dominique Gillot insiste, lui aussi, sur la nécessité de prendre en compte le maintien en emploi comme un moyen pour lutter contre la désinsertion professionnelle et comme un levier essentiel pour favoriser la sensibilisation des employeurs.
C’est pourquoi nous vous proposons d’ajouter cette mention. Au-delà de la mobilisation pour l’emploi dans le cadre de la généralisation de la déclaration sociale nominative, la fameuse DSN, à tous les employeurs, celle-ci doit s’inscrire dans une démarche pérenne d’ouverture à l’égard de l’emploi des personnes en situation de handicap.