M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Il est vrai que les indus ont des enjeux importants, et qu’il est parfois très compliqué de résoudre le problème pour les personnes qui les subissent. Cela vaut pour l’assurance chômage comme pour le RSA ou d’autres dispositifs sociaux, d’autant que ces prestations ont comme bénéficiaires des personnes qui sont en grande difficulté, ce qui multiplie encore la complexité du problème.
Je pense que ces indus sont souvent causés par la complexité des règles ; j’invite donc tous les parlementaires à simplifier celles-ci au maximum pour que ce type de difficulté soit évité.
Au-delà, il me semble que cet amendement n’est pas justifié, du fait, précisément, que le principe de la responsabilité civile est d’ordre législatif et d’application générale. L’article 1240 du code civil pose le principe de la responsabilité du fait personnel ; en d’autres termes, quand une personne cause un préjudice à un tiers, elle doit indemniser la victime. Pôle emploi, comme personnalité morale de droit public, est concerné par ce dispositif.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement, non par principe, mais parce que le droit existant satisfait déjà son objet.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 348.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 36 bis
Après le premier alinéa de l’article L. 5422-4 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La notification de la décision relative à la demande en paiement de l’allocation d’assurance prise par Pôle emploi mentionne, à peine de nullité, les délais et voies de recours. » – (Adopté.)
Article 36 ter
(Supprimé)
M. le président. L’amendement n° 489, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Dans un délai de deux ans à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la réalité et les conséquences du non-recours aux droits en matière d’assurance chômage ainsi que les pistes envisagées pour résorber le phénomène.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Nous proposons, par cet amendement, de réintroduire un article inséré dans le projet de loi par l’Assemblée nationale et que les rapporteurs ont supprimé en commission.
De façon plus précise, l’article 36 ter résulte de l’adoption d’un amendement de notre collègue et ami Pierre Dharréville, député du groupe Gauche démocrate et républicaine. Celui-ci proposait qu’un rapport du Gouvernement sur le non-recours aux droits en matière d’assurance chômage soit remis au Parlement, et ce dans un délai de deux ans.
J’attire votre attention, mes chers collègues, sur la thématique de ce rapport. Nous connaissons bien la position de la majorité sénatoriale sur les rapports, mais celui-ci revêt – même si nous le disons chaque fois – un caractère particulier.
En effet, alors qu’une sorte de chasse aux sorcières est en train d’être amplifiée par le présent projet de loi, il nous semble qu’il pourrait être pertinent de connaître l’autre face, à savoir le non-recours aux droits.
Je vous invite d’ailleurs à lire l’ouvrage intitulé L’envers de la « fraude sociale », écrit par les chercheurs de l’Observatoire des non-recours aux droits et services, l’ODENORE, rattaché au CNRS.
Les raisons de ces non-recours sont multiples : un défaut d’information, des complexités administratives qui peuvent décourager les demandeurs, ou tout simplement la honte.
Je vous rappelle que le Défenseur des droits lui-même s’est inquiété de ces non-recours qui placent des personnes déjà précaires dans des situations encore plus délicates.
Il s’agit d’un phénomène de société complètement sous-estimé, et je pense, tout comme mon groupe, que ces non-recours ont aussi un coût au final et qu’il serait donc utile de les limiter et d’inciter davantage les bénéficiaires potentiels à effectuer les démarches.
Notre amendement, circonscrit aux droits en matière d’assurance chômage, vise, par exemple, un défaut d’inscription sur les listes des demandeurs d’emploi ou bien de recours aux droits par les demandeurs d’emploi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Ma chère collègue, pour aller vite, je pourrais effectivement me contenter de vous répondre que la commission est hostile aux demandes de rapports, d’autant que la restitution de ceux-ci est complexe et mobilise du temps. Cela étant, il est vrai que le non-recours aux droits est un enjeu qui nécessite de la part des professionnels comme des élus que nous sommes une attention constante. J’ajoute que nous avons prévu la mise en place d’un comité de suivi de la loi, ce qui devrait nous permettre de récolter un certain nombre de réponses au regard de vos attentes.
Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. J’entends les explications de Mme la rapporteur et je retire cet amendement, qui a au moins le mérite d’ouvrir le débat. En émettant un avis de sagesse, Mme la ministre s’y est montrée sensible. Il faut vraiment que nous réfléchissions ensemble à ce véritable problème.
M. le président. L’amendement n° 489 est retiré.
En conséquence, l’article 36 ter demeure supprimé.
Chapitre IV
Dispositions applicables Outre-mer
Article 37
I. – À l’article L. 5524-2 du code du travail, la référence : « n° 2002-149 du 7 février 2002 relative à l’extension et à la généralisation des prestations familiales et à la protection sociale dans la collectivité départementale de Mayotte » est remplacée par la référence : « n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte ».
II. – L’article L. 5524-3 du code du travail est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par les mots : « , dans les conditions fixées aux articles L. 5422-20-1 et L. 5422-20-2 » ;
2° Le second alinéa est complété par les mots : « , dans les conditions fixées aux articles L. 5422-20-1 et L. 5422-20-2 ».
III. – À l’article L. 5524-10 et au second alinéa de l’article L. 6523-3 du code du travail, le mot : « involontairement » est supprimé.
IV. – Au début de l’article L. 5531-1 du code du travail, les mots : « L’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi ».
M. le président. L’amendement n° 224, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. En cohérence avec notre amendement de suppression de l’article 32, nous proposons la suppression de l’article 37.
En effet, nous ne pouvons accepter cette remise en cause du caractère paritaire de l’UNEDIC et le retrait de l’intervention des partenaires sociaux dans la gestion de l’assurance chômage.
L’article 37 se résumant à la mise en œuvre de cette réforme dans les outre-mer, il est donc normal que nous demandions sa suppression.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Par cohérence, l’avis de la commission est également défavorable sur cet amendement. Je précise que l’article 37 assure également des coordinations juridiques nécessaires.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 37.
(L’article 37 est adopté.)
Chapitre V
Dispositions diverses
Article 38
I. – Au premier alinéa de l’article L. 1233-68 du code du travail, après le mot : « partie », sont insérés les mots : « , à l’exception de l’article L. 5422-20-1 et du second alinéa de l’article L. 5422-22, ».
I bis. – L’article L. 1235-4 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour le remboursement prévu au premier alinéa, le directeur général de Pôle emploi ou la personne qu’il désigne en son sein peut, pour son propre compte, pour le compte de l’organisme chargé de la gestion du régime d’assurance chômage mentionné à l’article L. 5427-1, pour le compte de l’État ou des employeurs mentionnés à l’article L. 5424-1, dans des délais et selon des conditions fixés par décret en Conseil d’État, et après mise en demeure, délivrer une contrainte qui, à défaut d’opposition motivée du débiteur devant la juridiction compétente, comporte tous les effets d’un jugement et confère le bénéfice de l’hypothèque judiciaire. »
II. – La cinquième partie du code du travail est ainsi modifiée :
1° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 5312-13-1, à l’article L. 5411-1, au second alinéa de l’article L. 5411-2, à la fin de la première phrase de l’article L. 5411-6, au 1° et au b du 2° de l’article L. 5411-10, à la deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 5422-16, à la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 5424-2 et aux articles L. 5426-1, L. 5427-2, L. 5427-3 et L. 5427-4, les mots : « l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi » ;
2° L’article L. 5411-4 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi » ;
b) Au début du deuxième alinéa, les mots : « L’institution » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi » ;
3° À l’article L. 5413-1, la première occurrence du mot : « inscrit » est supprimée ;
4° L’article L. 5422-2 est ainsi modifié :
a) Après la première phrase du premier alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Ces durées peuvent également tenir compte, le cas échéant, du suivi d’une formation par les intéressés. » ;
a bis) Au début de la seconde phrase du même premier alinéa, les mots : « Ces durées » sont remplacés par le mot : « Elles » ;
b) Le second alinéa est supprimé ;
5° L’article L. 5422-4 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, le mot : « involontairement » est supprimé ;
b) Au même premier alinéa et à la fin de la seconde phrase du second alinéa, les mots : « l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi » ;
6° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 5422-16, les références : « articles L. 5422-9, L. 5422-11 » sont remplacées par les références : « 1° à 3° de l’article L. 5422-9 ainsi qu’aux articles L. 5422-11 » ;
7° L’article L. 5423-4 est abrogé ;
7° bis L’article L. 5424-21 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, le mot : « involontairement » est supprimé ;
b) Au quatrième alinéa, les mots : « l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi » ;
8° À l’intitulé de la section 1 bis du chapitre VI du titre II du livre IV, le mot : « activités » est remplacé par le mot : « activité » ;
9° Au début de l’article L. 5426-8-3, les mots : « L’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 est autorisée » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi est autorisé » ;
10° L’article L. 5428-1 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Sous réserve des dispositions prévoyant leur incessibilité ou leur insaisissabilité, les allocations, aides ainsi que toute autre prestation versées par Pôle emploi sont cessibles et saisissables dans les mêmes conditions et limites que les salaires. » ;
b) Au deuxième alinéa, les mots : « , l’allocation de solidarité spécifique et l’allocation temporaire d’attente » sont remplacés par les mots : « et l’allocation de solidarité spécifique ».
M. le président. L’amendement n° 648, présenté par Mme Schillinger, MM. Rambaud, Lévrier, Patriat, Amiel, Bargeton, Karam, Marchand, Mohamed Soilihi, Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 8
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Le même deuxième alinéa est complété par les mots : « , y compris lors du renouvellement des titres de séjour et de travail afin de s’assurer du maintien de l’intéressé sur la liste des demandeurs d’emploi » ;
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Cet amendement vise à modifier l’article L. 5411-4 du code du travail, lequel prévoit que Pôle emploi peut avoir accès aux fichiers des services de l’État pour obtenir les informations nécessaires à la vérification de la validité des titres de séjour et de travail des personnes étrangères lors de leur inscription sur la liste des demandeurs d’emploi.
Cette inscription a plusieurs effets : elle exonère l’employeur embauchant un étranger inscrit sur la liste des demandeurs d’emploi de la vérification de l’existence du titre autorisant l’intéressé à exercer une activité salariée en France.
Par le biais de cet amendement, nous proposons que la transmission d’informations puisse avoir lieu en cas de renouvellement des titres de séjour et de travail qui ont permis l’inscription sur la liste des demandeurs d’emploi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Pôle emploi doit vérifier la validité des titres de séjour et de travail d’une personne étrangère s’inscrivant sur la liste des demandeurs d’emploi.
Cet amendement vise à préciser que ce contrôle concerne également le maintien des demandeurs d’emploi étrangers sur les listes de Pôle emploi, autrement dit les opérations d’actualisation du dossier. Son adoption comblera ainsi un vide juridique. Avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 38, modifié.
(L’article 38 est adopté.)
Article 39
Les dispositions du présent titre entrent en vigueur le 1er janvier 2019, à l’exception du c du 5° du II de l’article 30 et du II de l’article 33. – (Adopté.)
TITRE III
Dispositions relatives À l’emploi
Chapitre Ier
Favoriser l’entreprise inclusive
Section 1
Simplifier l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés
Article 40 A
(Supprimé)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 490, présenté par Mmes Cohen et Apourceau-Poly, MM. Gay, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
L’article L. 8221-6 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 8221-6. – Est réputé salarié tout travailleur qui exerce son activité dans des conditions de droit ou de fait caractérisant un lien de subordination juridique ou un lien de dépendance économique vis-à-vis d’une autre personne physique ou morale.
« Est présumé être l’employeur la personne physique ou morale qui, pour le développement de son activité économique et commerciale, recourt à la conclusion de contrats ayant pour objet la location de la force de travail.
« Outre les clauses du contrat conclu entre les parties, le lien de subordination juridique ou de dépendance économique sont établis notamment :
« 1° Lorsque le travailleur ne possède pas la maîtrise des moyens matériels ou immatériels utilisés pour la production des biens ou services ;
« 2° Ou lorsque le travailleur est intégré à l’organisation d’autrui, de sorte qu’il ne dispose pas d’une identité propre sur le marché des biens et des services en dehors de celle de son cocontractant.
« C’est notamment le cas lorsque le travailleur, pour l’exécution de son activité, est soumis à des instructions telles que celles portant sur des horaires ou des méthodes de travail, émises par une personne physique ;
« 3° Ou, lorsque le cocontractant est une plateforme numérique de travail, la possibilité de radier le travailleur doit être analysée comme étant l’expression d’un pouvoir de sanction, sinon également de contrôle et de direction, caractéristique de l’exercice d’un pouvoir de l’employeur.
« L’employeur est la personne physique ou morale qui détient un pouvoir de fait ou de droit sur le travailleur, le tenant sous sa dépendance, pour les besoins de l’activité économique et commerciale de l’organisation ;
« 4° Ou lorsque le travailleur ne fixe pas lui-même ou par entente avec le client le prix de ses prestations ;
« 5° Ou lorsque le travailleur se voit imposer la vente de telles marchandises à l’exclusion de toutes autres ou se voit imposer le prix de vente de ces marchandises. »
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Les plateformes numériques de travail se construisent sur un modèle économique qui a vocation à contourner les règles applicables au secteur dans lequel elles évoluent, en particulier celles du droit social.
L’intermédiation numérique comme activité spécifique justifierait une telle mise à l’écart : il n’y aurait plus de travailleurs et encore moins de salariés, mais des utilisateurs ou des prestataires extérieurs ; il n’y aurait plus d’employeurs, mais des intermédiaires, plus de sanctions directes, mais des incitations et la désactivation fait figure de rupture contractuelle « euphémisée ».
Il ne s’agit pourtant que d’une torsion de la réalité opérée par le recours à un langage spécifique. Dans les faits se multiplient les pratiques de concurrence déloyale envers les entreprises qui respectent la loi et s’observe une vaste opération de dumping social.
La Cour de justice de l’Union européenne est pourtant formelle : l’intermédiation numérique n’est que la modalité d’exécution d’un service qui dépasse la simple mise en relation.
Si Uber est une société de transport, Deliveroo une société de livraison de repas, ces plateformes ont besoin de travailleuses et de travailleurs qui réaliseront pour leur compte l’activité économique et commerciale qu’elles encadrent et dirigent. C’est ce qu’on appelle du travail salarié.
Or le développement des plateformes numériques de travail est l’occasion d’une paupérisation terrible des travailleuses et des travailleurs, à l’écart du statut de l’emploi, payés à la tâche, sans assurance maternité, chômage, vieillesse ou maladie, sans protection contre le pouvoir de contrôle, de direction et de sanction des plateformes, soumis à la loi du plus fort.
Pour protéger ces travailleurs, lutter contre le faux travail indépendant, le dumping social et les pratiques de concurrence déloyale, il semble alors indispensable d’établir une présomption de salariat qui explicite la nature de l’état de subordination, ainsi que de mieux identifier le débiteur des obligations légales et contractuelles par une définition de l’employeur.
M. le président. L’amendement n° 632, présenté par Mme Schillinger, MM. Lévrier, Rambaud, Patriat, Amiel, Bargeton, Karam, Marchand, Mohamed Soilihi, Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le chapitre II du titre IV du livre III de la septième partie du code du travail est ainsi modifié :
1° L’article L. 7342-1 est complété par onze alinéas ainsi rédigés :
« À ce titre, la plateforme peut établir une charte déterminant les conditions et modalités d’exercice de sa responsabilité sociale, définissant ses droits et obligations ainsi que ceux des travailleurs avec lesquels elle est en relation. Cette charte, qui rappelle les dispositions du présent chapitre, précise notamment :
« 1° Les conditions d’exercice de l’activité professionnelle des travailleurs avec lesquels la plateforme est en relation, en particulier les règles selon lesquelles ils sont mis en relation avec ses utilisateurs. Ces règles garantissent le caractère non exclusif de la relation entre les travailleurs et la plateforme et la liberté pour les travailleurs d’avoir recours à la plateforme ;
« 2° Les modalités permettant d’assurer aux travailleurs un revenu d’activité décent ;
« 3° Les modalités de développement des compétences professionnelles et de sécurisation des parcours professionnels ;
« 4° Les mesures de prévention des risques professionnels auxquels les travailleurs peuvent être exposés en raison de leur activité et les mesures permettant de garantir aux travailleurs des conditions de travail décentes ;
« 5° Les modalités de partage d’informations et de dialogue entre la plateforme et les travailleurs sur les conditions d’exercice de leur activité professionnelle ;
« 6° Les modalités selon lesquelles les travailleurs sont informés de tout changement relatif aux conditions d’exercice de leur activité professionnelle ;
« 7° Les garanties applicables en cas de rupture de relations contractuelles entre la plateforme et les travailleurs.
« La charte est publiée sur le site internet de la plateforme et annexée aux contrats qui la lient aux travailleurs.
« L’établissement de la charte et le respect des engagements pris par la plateforme dans les matières énumérées aux 1° à 7° du présent article ne peuvent caractériser l’existence d’un lien de subordination juridique entre la plateforme et les travailleurs.
« L’autorité administrative peut être sollicitée par les signataires de la charte dans des conditions fixées par décret pour attester de la réalité des conditions fixées à l’alinéa précédent au regard des éléments fournis par les parties signataires et de la réalité des mesures prévues dans la charte. » ;
2° L’article L. 7342-3 est ainsi rédigé :
« Art. L. 7342-3. – Le travailleur bénéficie du droit d’accès à la formation professionnelle continue prévu à l’article L. 6312-2. La contribution à la formation professionnelle mentionnée à l’article L. 6331-48 est prise en charge par la plateforme.
« Il bénéficie, à sa demande, des actions mentionnées au 3° de l’article L. 6313-1. La plateforme prend alors en charge les frais d’accompagnement et lui verse une indemnité dans des conditions définies par décret.
« Lorsque le chiffre d’affaires réalisé par le travailleur sur la plateforme est supérieur à un seuil défini par décret, son compte personnel de formation est abondé par la plateforme d’un montant égal à celui d’un salarié à temps plein. » ;
3° L’article L. 7342-4 est ainsi rédigé :
« Art. L. 7342-4. – L’article L. 7342-2 n’est pas applicable lorsque le chiffre d’affaires réalisé sur la plateforme est inférieur à un seuil défini par décret. Pour le calcul de la cotisation afférente aux accidents du travail, seul est pris en compte le chiffre d’affaires réalisé par le travailleur sur la plateforme. »
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Le développement des technologies numériques a d’ores et déjà modifié en profondeur les organisation et mode de travail de très nombreux actifs.
L’essor de ce que l’on appelle désormais le travail à la demande, que traduit l’avènement des plateformes numériques, a indéniablement contribué à l’accélération de cette évolution.
Les plateformes collaboratives présentent néanmoins une ambivalence : d’un côté, elles offrent des opportunités d’activité pour de nombreux actifs, qu’il convient d’accompagner ; de l’autre, leur modèle de fonctionnement fragilise ces mêmes actifs, qui, s’ils sont officiellement non subordonnés à la plateforme, restent néanmoins dépendants économiquement.
Les fortes perspectives de développement de ce secteur et la fréquence des conflits sociaux en son sein appellent une réaction.
Depuis le début de la semaine, des livreurs de plusieurs plateformes de livraison de repas sont en grève pour protester contre la précarisation de leur statut. La multiplication, ces derniers mois, de tels mouvements des travailleurs de plateformes doit être perçue comme une alerte qui nous est adressée.
Mes chers collègues, il incombe aux responsables politiques de prendre acte des changements profonds qu’opère la révolution numérique au sein de notre société et d’accompagner ces derniers. La sécurisation de la relation entre les plateformes et les travailleurs indépendants et le développement de la responsabilité de ces plateformes doivent être une priorité.
Dans ce contexte, vous l’aurez bien compris, l’établissement d’une charte des plateformes destinée à rendre effective cette responsabilité et à protéger davantage les travailleurs indépendants paraît indispensable.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Ces deux amendements ont des portées différentes, puisque l’un tend à préciser, tandis que l’autre vise à rétablir. Néanmoins, sur l’un comme sur l’autre, l’avis de la commission est défavorable, pour la raison évoquée tout à l’heure.
La passion avec laquelle mon collègue Fabien Gay a défendu son amendement me donne envie de dire : « Ouvrons le débat, madame la ministre ! » Pourquoi ne pas créer un groupe de travail sur ce sujet ? En tout cas, veillons à légiférer de façon posée, en nous appuyant sur les outils juridiques que sont les avis du Conseil d’État, les auditions. Nous pourrons ainsi adopter une position qui sera davantage en adéquation avec l’enjeu économique que représentent ces plateformes.
Cet article 40 A, inséré par l’Assemblée nationale, n’a fait l’objet d’aucune étude d’impact et nous n’avons pu mener aucune audition au sujet de ses dispositions. C’est la raison pour laquelle nous l’avons supprimé. Les auteurs de l’amendement n° 490 ont au moins le mérite de formuler des propositions, que nous reprendrons peut-être, comme celles de M. Tourenne.
En tout état de cause, je le répète, la commission est défavorable à ces deux amendements. Il faut ouvrir le débat de façon sérieuse.