Sommaire
Présidence de M. Philippe Dallier
Secrétaires :
MM. Yves Daudigny, Daniel Dubois.
2. Liberté de choisir son avenir professionnel. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Amendement n° 335 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 663 de M. Didier Rambaud. – Rejet.
Amendement n° 235 rectifié de M. Daniel Chasseing. – Retrait.
Amendement n° 627 de M. Richard Yung. – Rejet.
Amendement n° 281 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 737 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 628 de M. Didier Rambaud. – Rejet.
Amendement n° 650 de M. Didier Rambaud. – Rejet.
Amendement n° 748 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 337 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 479 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 629 de M. Didier Rambaud. – Rejet.
L’article demeure supprimé.
Articles additionnels après l’article 29
Amendement n° 480 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 481 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 483 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 386 de Mme Nadine Grelet-Certenais. – Rejet.
Amendement n° 133 de M. Jean-Marie Janssens. – Non soutenu.
Amendement n° 732 de la commission. – Adoption de l’amendement rédigeant l’article.
Amendement n° 523 de M. Olivier Henno. – Devenu sans objet.
Amendement n° 146 rectifié bis de Mme Pascale Gruny. – Devenu sans objet.
Amendement n° 282 de M. Jean-Louis Tourenne. – Devenu sans objet.
Amendement n° 283 de M. Jean-Louis Tourenne. – Devenu sans objet.
Amendement n° 147 rectifié ter de Mme Pascale Gruny. – Devenu sans objet.
Articles additionnels après l’article 29 bis
Amendement n° 445 de M. Jean-Marie Morisset. – Retrait.
Amendement n° 462 rectifié de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 733 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 304 rectifié de Mme Maryvonne Blondin. – Devenu sans objet.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 222 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 341 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 343 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 342 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article 33 (précédemment examiné)
Amendement n° 630 de M. Didier Rambaud. – Rejet.
Amendement n° 734 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 735 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article additionnel après l’article 34
Amendement n° 631 de M. Didier Rambaud. – Retrait.
Amendement n° 487 de Mme Laurence Cohen. – Rejet par scrutin public n° 213.
Amendement n° 366 de M. Jean-Louis Tourenne. – Adoption.
Amendement n° 367 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet par scrutin public n° 214.
Amendement n° 368 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet par scrutin public n° 215.
Adoption, par scrutin public n° 216, de l’article modifié.
Amendement n° 488 rectifié de Mme Laurence Cohen. – Rejet par scrutin public n° 217.
Amendement n° 738 de la commission
Amendement n° 369 de M. Jean-Louis Tourenne
Mme Laurence Cohen ; M. le président.
Article 36 (suite)
Amendement n° 738 de la commission (suite). – Adoption.
Amendement n° 369 de M. Jean-Louis Tourenne (suite). – Rejet.
Amendement n° 370 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 36
Amendement n° 347 rectifié de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 348 de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.
Amendement n° 489 de Mme Laurence Cohen. – Retrait.
L’article demeure supprimé.
Amendement n° 224 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 648 de Mme Patricia Schillinger. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 490 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 632 de Mme Patricia Schillinger. – Rejet.
L’article demeure supprimé.
Article additionnel après l’article 40 A
Amendement n° 491 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 387 de Mme Nadine Grelet-Certenais. – Rejet.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Thani Mohamed Soilihi
3. Mise au point au sujet d’un vote
4. Liberté de choisir son avenir professionnel. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Amendement n° 410 de Mme Nadine Grelet-Certenais. – Rejet.
Amendement n° 754 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 709 rectifié de M. Jean-Pierre Corbisez. – Non soutenu.
Amendement n° 388 de Mme Nadine Grelet-Certenais. – Rejet.
Amendement n° 134 rectifié de M. Jean-Marie Janssens. – Non soutenu.
Amendement n° 633 de Mme Patricia Schillinger. – Rejet par scrutin public n° 218.
Amendement n° 762 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 492 de Mme Laurence Cohen. – Devenu sans objet.
Amendement n° 291 de Mme Nadine Grelet-Certenais. – Devenu sans objet.
Amendement n° 389 de Mme Nadine Grelet-Certenais. – Rejet.
Amendement n° 390 de Mme Nadine Grelet-Certenais. – Rejet.
Amendement n° 753 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 634 de Mme Patricia Schillinger. – Rejet.
Amendement n° 187 rectifié de M. Daniel Chasseing. – Non soutenu.
Amendement n° 758 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 391 de Mme Nadine Grelet-Certenais. – Devenu sans objet.
Amendement n° 231 rectifié bis de Mme Catherine Deroche. – Adoption.
Amendement n° 436 rectifié bis de M. Jean-François Longeot. – Rejet.
Amendement n° 751 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 759 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 752 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 392 de Mme Nadine Grelet-Certenais. – Adoption.
Amendement n° 493 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Adoption de l’article modifié.
Article additionnel après l’article 40 ter
Amendement n° 761 de la commission. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Article additionnel après l’article 40 quater
Amendement n° 292 de Mme Nadine Grelet-Certenais. – Rejet.
Amendement n° 765 de la commission. – Retrait.
Amendement n° 249 du Gouvernement. – Adoption.
Amendement n° 637 de Mme Patricia Schillinger. – Rejet.
Amendement n° 763 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 756 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 755 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 250 du Gouvernement. – Rejet.
Amendement n° 188 rectifié de M. Daniel Chasseing. – Non soutenu.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 757 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 294 de Mme Nadine Grelet-Certenais. – Retrait.
Amendement n° 494 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 251 du Gouvernement. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 293 de Mme Nadine Grelet-Certenais. – Rejet.
Amendement n° 760 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 393 de Mme Monique Lubin. – Adoption.
Amendement n° 189 rectifié de M. Daniel Chasseing. – Non soutenu.
Amendement n° 190 rectifié de M. Daniel Chasseing. – Non soutenu.
Amendement n° 394 de Mme Monique Lubin. – Devenu sans objet.
Amendement n° 766 de la commission. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 43
Amendement n° 682 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 600 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 601 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 365 de Mme Michelle Meunier. – Rejet.
Amendement n° 396 de Mme Nadine Grelet-Certenais. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article additionnel après l’article 46
Amendement n° 101 rectifié ter de M. Philippe Dallier. – Retrait.
Amendement n° 225 de Mme Laurence Cohen. – Retrait.
Adoption de l’article.
Articles 46 bis et 47 – Adoption.
Article additionnel après l’article 47
Article additionnel après l’article 49
Amendement n° 713 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Article 49 bis (nouveau) – Adoption.
Amendement n° 684 du Gouvernement. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article additionnel après l’article 50
Amendement n° 685 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Adoption de l’article.
Amendement n° 495 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article additionnel après l’article 52
Articles 52 bis et 53 – Adoption.
Amendement n° 74 rectifié bis de Mme Pascale Gruny. – Retrait.
Amendement n° 150 rectifié bis de Mme Pascale Gruny. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 57
Amendement n° 430 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 151 rectifié bis de Mme Pascale Gruny. – Retrait.
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l’article 60
Amendement n° 501 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 499 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 500 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 498 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 236 rectifié de M. Daniel Chasseing. – Non soutenu.
Amendement n° 502 de Mme Laurence Cohen. – Devenu sans objet.
Amendement n° 399 de Mme Laurence Rossignol. – Rejet.
Amendement n° 584 de Mme Laurence Rossignol. – Rejet.
Amendement n° 586 rectifié de Mme Laurence Rossignol. – Rejet.
Amendement n° 400 de Mme Laurence Rossignol. – Rejet.
Renvoi de la suite de la discussion.
compte rendu intégral
Présidence de M. Philippe Dallier
vice-président
Secrétaires :
M. Yves Daudigny,
M. Daniel Dubois.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Liberté de choisir son avenir professionnel
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour la liberté de choisir son avenir professionnel (projet n° 583, texte de la commission n° 610 rectifié, rapport n° 609, tomes I et II, avis n° 591).
Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus, au sein du titre II, à l’article 26.
TITRE II (suite)
UNE INDEMNISATION DU CHÔMAGE PLUS UNIVERSELLE ET PLUS JUSTE
Chapitre Ier
Créer de nouveaux droits à indemnisation et lutter contre la précarité et la permittence
Section 1
Créer de nouveaux droits pour sécuriser les parcours et les transitions professionnelles
Article 26
I. – (Non modifié) Les articles L. 5421-1 et L. 5421-2 du code du travail sont ainsi rédigés :
« Art. L. 5421-1. – En complément des mesures tendant à faciliter leur reclassement ou leur conversion, les personnes aptes au travail et recherchant un emploi ont droit à un revenu de remplacement dans les conditions fixées au présent titre.
« Art. L. 5421-2. – Le revenu de remplacement prend, selon le cas, la forme :
« 1° D’une allocation d’assurance, prévue au chapitre II du présent titre ;
« 2° Des allocations de solidarité, prévues au chapitre III ;
« 3° De l’allocation des travailleurs indépendants et des autres allocations et indemnités régies par les régimes particuliers, prévues au chapitre IV. »
II. – L’article L. 5422-1 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 5422-1. – I. – Ont droit à l’allocation d’assurance les travailleurs aptes au travail et recherchant un emploi qui satisfont à des conditions d’âge et d’activité antérieure, et dont :
« 1° Soit la privation d’emploi est involontaire, ou assimilée à une privation involontaire par les accords relatifs à l’assurance chômage mentionnés à l’article L. 5422-20 ;
« 2° Soit le contrat de travail a été rompu conventionnellement selon les modalités prévues aux articles L. 1237-11 à L. 1237-16 du présent code ou à l’article L. 421-12-2 du code de la construction et de l’habitation ;
« 3° Soit le contrat de travail a été rompu d’un commun accord selon les modalités prévues aux articles L. 1237-17 à L. 1237-19-14 du présent code.
« II. – Ont également droit à l’allocation d’assurance les salariés dont la privation d’emploi volontaire résulte d’une démission au sens de l’article L. 1237-1, sans préjudice du 1° du I du présent article, aptes au travail et recherchant un emploi qui :
« 1° Justifient d’au moins sept années de contributions versées au régime d’assurance chômage ;
« 2° Poursuivent un projet de reconversion professionnelle nécessitant le suivi d’une formation ou un projet de création ou de reprise d’une entreprise. Ce projet doit présenter un caractère réel et sérieux attesté par la commission paritaire interprofessionnelle régionale mentionnée à l’article L. 6323-17-6, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. »
III. – (Non modifié) À l’intitulé du titre II du livre IV de la cinquième partie du code du travail ainsi qu’au second alinéa de l’article L. 2145-9 et au premier alinéa de l’article L. 5425-9 du même code, le mot : « involontairement » est supprimé.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.
Mme Laurence Cohen. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le candidat à l’élection présidentielle Emmanuel Macron promettait dans son programme : « Nous ouvrirons les droits à l’assurance chômage aux salariés qui démissionnent. Ce droit ne sera utilisable qu’une fois tous les cinq ans. » Cette promesse a été largement amoindrie par l’ajout de conditions drastiques à l’accès à une indemnisation.
Désormais, le salarié démissionnaire devra, en plus des cinq ans d’ancienneté, solliciter un accompagnement au titre du conseil en évolution professionnelle, obtenir l’attestation du caractère réel et sérieux du projet professionnel par la commission paritaire régionale interprofessionnelle. En outre, il faudra que cette aide conserve un caractère subsidiaire par rapport aux autres dispositifs. Par conséquent, cette promesse électorale, présentée partout comme une formidable avancée, ne constitue en réalité qu’une régression. En effet, alors que Pôle emploi indemnise déjà entre 70 000 et 80 000 démissionnaires par an, selon les prévisions, seules 29 300 personnes seront potentiellement concernées par ce dispositif.
En matière de communication politique, c’est assez fort, mais, vis-à-vis des salariés qui subissent le mal-être au quotidien et restent dans leur entreprise par peur de démissionner et de se retrouver sans rien, c’est extrêmement cavalier.
Dans son livre DRH : le livre noir, Jean-François Amadieu explique que la vie professionnelle exerce une influence néfaste sur l’humeur, occasionnant déprime ou irritabilité pour plus d’une personne interrogée sur deux. Selon lui, la moitié des Français affirment que leur emploi a un impact négatif sur leur vie familiale et sentimentale et 39 %, sur leur vie sociale. Il est bien évident que nous sommes, pour notre part, à la recherche d’un emploi épanouissant.
Le mal-être au travail est une réalité concrète et notre système de sécurité sociale, que vous souhaitez faire disparaître de la Constitution, est là pour répondre aux nouveaux besoins de la vie des salariés. Les salariés démissionnaires et les travailleurs indépendants doivent pouvoir bénéficier des mêmes droits que les autres demandeurs d’emploi.
Pour financer ces indemnisations nouvelles, les syndicats ont des propositions : Force Ouvrière suggère d’instaurer une cotisation sur les indépendants, la CGT promeut un système forfaitaire de 800 euros par mois pendant six mois. Si vous souhaitez réellement « créer de nouveaux droits à indemnisation et lutter contre la précarité et la permittence », comme le prévoit le chapitre Ier, il faut s’inspirer des préconisations des partenaires sociaux. C’est d’ailleurs ce que vous avez dit hier pour justifier l’amendement du Gouvernement rejeté par le Sénat, madame la ministre.
M. le président. L’amendement n° 335, présenté par M. Tourenne, Mme Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Madame la ministre, comme cela vient d’être indiqué, ces grandes déclarations ont semé l’illusion. Lors de la campagne, nous devions avoir un nouveau dispositif qui aurait un caractère universel et qui aurait embrassé toutes les catégories de population et catégories de profession, pour que chacun puisse bénéficier d’une indemnité compensatrice de revenus, dès lors qu’il aurait connu quelques accidents dans sa vie.
Or la réalité, c’est 30 000 indépendants sur 2,8 millions, surtout, c’est environ 20 000 démissionnaires sur 1 million de démissionnaires par an ! Bien pis, le congé individuel de formation, le CIF, dont vous dites tant de mal, bénéficiait malgré tout à 90 000 salariés démissionnaires dans des conditions tout à fait intéressantes !
Il s’agit véritablement là d’une régression, loin des grandes déclarations qui étaient les vôtres.
Le dispositif actuel est remplacé par le CPF de transition, qui n’aura pas du tout les mêmes avantages et qui voit ses crédits divisés par deux.
Plutôt que d’augmenter le nombre de bénéficiaires par l’intermédiaire de l’extension de l’assurance chômage, il eût mieux sans doute valu étendre les bénéficiaires, soit du CIF, soit du CPF de transition, après que l’on en aurait amélioré le contenu.
Sans doute pourrait-on d’ailleurs reporter tout cela pour engager une réflexion ensemble, car cette idée d’universalité est intéressante. Encore faut-il que cela s’inscrive dans un projet global qui soit financé, parce qu’en plus celui-ci ne l’est pas.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur de la commission des affaires sociales. Je ne suis pas loin de partager les remarques qui viennent d’être formulées sur le fait qu’il y a loin des paroles aux actes.
Cela étant, la commission n’a pas fait le choix de supprimer cet article : elle a préféré enrichir le texte. C’est la raison pour laquelle elle émet un avis défavorable sur cet amendement.
Toutefois, je souhaite apporter une nuance : ce dispositif bénéficiera aussi aux démissionnaires et aux indépendants. En effet, les démissionnaires auront cotisé à l’assurance chômage ; les indépendants, eux, ont un statut différent, puisqu’ils n’auront pas cotisé.
Comme nous le verrons ultérieurement, pour les démissionnaires, nous avons fait le choix d’amortir le dispositif en portant à sept ans la possibilité d’ouvrir ce droit. Pour les indépendants, la logique est différente : nous avons décidé de flécher le dispositif financier.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Je souhaite rassurer le Sénat : l’engagement présidentiel est pleinement tenu. Nous nous acheminons vers une sécurité qui est rattachée non plus au statut, mais à la personne. C’est très important, car on change maintenant de statut de plus en plus souvent au cours de sa vie : on ne reste pas dans la même entreprise ni dans le même emploi et l’on peut passer du statut de salarié à celui d’autoentrepreneur ou de gérant d’une société. Il convient donc que ces filets de sécurité existent.
Je souhaite apporter une rectification : si l’on dénombre bien 1 million de démissionnaires par an, environ 800 000 d’entre eux ont un nouvel emploi avant même de démissionner. C’est la fluidité du marché du travail. Par conséquent, 200 000 personnes qui s’inscrivent par an à Pôle emploi ont véritablement démissionné. Parmi elles, environ 70 000 l’ont fait par exemple pour suivre un conjoint ; c’est ce que l’on pourrait appeler des cas de force majeure. Ces démissions correspondent non à un projet personnel, mais plutôt à une nécessité.
On estime que, grâce à ce projet de loi, 50 % de plus de personnes auront la possibilité de démissionner pour un projet professionnel de création d’entreprise ou de reconversion.
Ce dispositif répond donc bien à la philosophie de ce qui a été promis pendant la campagne présidentielle.
J’ajoute qu’il s’agit d’une estimation, puisque c’est une logique de guichet qui prévaut : il se peut que cela concerne un plus grand nombre de personnes – on ne choisit pas entre les personnes, pour peu qu’elles aient un projet professionnel valide. Nous constaterons donc ensemble l’état de la demande.
M. le président. L’amendement n° 663, présenté par M. Rambaud, Mme Schillinger, MM. Lévrier, Patriat, Amiel, Bargeton, Karam, Marchand, Mohamed Soilihi, Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 1° Satisfont à des conditions d’activité antérieure spécifiques ;
La parole est à M. Martin Lévrier.
M. Martin Lévrier. La commission des affaires sociales a adopté un amendement tendant à préciser que seuls les salariés ayant cotisé au moins sept ans au régime d’assurance chômage pourront bénéficier de la nouvelle allocation ouverte aux démissionnaires.
Non seulement la durée de sept ans paraît trop restrictive pour ce dispositif, mais il semble préférable de ne pas inscrire dans la loi le cadre précis d’antériorité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. La commission ne peut qu’être défavorable à cet amendement puisqu’il tend à supprimer ce qu’elle a elle-même ajouté dans ce texte, à savoir porter le dispositif de cinq ans à sept ans.
Cela étant, l’on ne peut décemment pas vouloir rouvrir le débat avec les partenaires sociaux et ne pas tenir compte de ce qui a été indiqué dans l’accord national interprofessionnel du 22 février dernier ! Nous restons fidèles à notre philosophie : nous écoutons les partenaires sociaux, qui ont souhaité que ce dispositif soit porté à sept ans. C’est ce que nous avons fait, notamment pour amortir le coût de cette allocation, qui n’a pas été prévue dans le financement de l’UNEDIC.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.
Nous proposons de ne pas fixer et rigidifier dans la loi la durée d’activité antérieure. L’étude d’impact a été menée sur une durée d’activité de cinq ans. Je rappelle qu’il s’agit d’un dispositif nouveau : il faut le laisser vivre, si j’ose dire ! Nous verrons au fil du temps avec les partenaires sociaux s’il faut intervenir sur ce point. Cela dépendra aussi du flux.
La durée de cinq ans a été retenue parce que c’est le signal le plus fort qui puisse être donné à tous ceux qui ont un projet de création d’entreprise, de reconversion et qui attendent de le réaliser. Néanmoins, il nous paraît important de revenir au texte antérieur qui prévoit de fixer cette durée par décret après discussion avec les partenaires sociaux, plutôt que de l’inscrire dans la loi.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 235 rectifié, présenté par MM. Chasseing, Capus, Guerriau, Decool, A. Marc, Lagourgue, Fouché et Malhuret, Mme Mélot, MM. Wattebled et Longeot, Mme Goy-Chavent, M. L. Hervé, Mme Vullien et M. Moga, est ainsi libellé :
Alinéa 14, première phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
Poursuivent un projet de reconversion professionnelle nécessitant le suivi d’un projet de création ou de reprise d’une entreprise, ou d’une formation qualifiante ou complémentaire identifiée suite à une validation des acquis de l’expérience.
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Le projet de loi ouvre le droit aux démissionnaires de bénéficier de l’assurance chômage, lorsqu’ils ont un projet de reconversion professionnelle nécessitant une formation.
Certes, la rédaction actuelle prévoit des conditions, mais celles-ci paraissent encore trop faibles pour limiter les risques d’un déséquilibre financier de l’UNEDIC. En effet, l’extension de l’assurance chômage aux démissionnaires conduirait à une dépense supplémentaire de 300 millions d’euros par an.
Par ailleurs, l’objectif est bien d’indemniser les démissionnaires ayant un projet de reconversion nécessitant une formation qualifiante, qui ne peut être réalisée dans le cadre de leur emploi et en mobilisant les autres dispositifs existants. Or le texte laisse supposer que le démissionnaire peut être indemnisé pour tout type de formation suivie dans le cadre d’un projet professionnel.
Afin d’éviter toute dérive, il convient de préciser que la formation doit être qualifiante ou que le salarié démissionnaire suit une formation complémentaire à la suite d’une validation des acquis de l’expérience, une VAE.
M. le président. L’amendement n° 627, présenté par M. Yung, Mme Schillinger, MM. Lévrier, Rambaud, Patriat, Amiel, Bargeton, Karam, Marchand, Mohamed Soilihi, Théophile et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Alinéa 14, première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
, y compris lorsque la réalisation de ce projet implique une mobilité à l’étranger
La parole est à M. Martin Lévrier.
M. Martin Lévrier. Cet amendement vise à inclure dans le champ des personnes susceptibles de bénéficier de l’allocation d’assurance chômage les démissionnaires souhaitant s’établir à l’étranger en vue d’y réaliser un projet de reconversion professionnelle ou un projet de création ou de reprise d’une entreprise. Nous souhaitons permettre à ces personnes de percevoir un revenu de remplacement pendant la période de formation précédant leur départ à l’étranger.
Une fois à l’étranger, les démissionnaires cesseront de percevoir l’allocation d’assurance chômage, à l’exception de ceux qui se seront installés dans un État de l’Union européenne, de l’Espace économique européen ou en Suisse. Il convient en effet de rappeler que l’article 64 du règlement européen du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale permet aux chômeurs qui se rendent dans un autre État européen pour y chercher un emploi de conserver le droit aux prestations de chômage pendant une durée de trois mois, laquelle peut être étendue jusqu’à six mois au maximum.
Le dispositif prévu par notre amendement ne vise absolument pas à encourager un prétendu « exil des forces vives ». Il s’agit de permettre à celles et ceux qui le souhaitent de se lancer plus facilement dans l’aventure de l’expatriation professionnelle. Cette dernière présente de nombreux avantages : elle permet notamment d’acquérir de nouvelles compétences susceptibles de répondre aux enjeux d’une économie concurrentielle et mondialisée.
Par ailleurs, il importe de souligner que les entreprises créées à l’étranger par des Français constituent un véritable atout économique pour notre pays. D’après le Conseil économique, social et environnemental, l’activité de chaque créateur d’entreprise établi à l’étranger entraînerait, en moyenne, dix-neuf emplois en France. Elle est également à l’origine de flux financiers professionnels vers notre pays. De plus, ces entrepreneurs ont recours aux produits et technologies français.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. L’objet de l’amendement n° 235 rectifié semble intéressant, mais un peu restrictif. La commission est assez sensible au fait que l’ouverture de l’assurance chômage aux indépendants pourrait créer un certain nombre d’emplois. Toutefois, à partir du moment où il s’agit essentiellement d’une reconversion professionnelle nécessitant au moins une formation qualifiante, on restreint le champ des possibilités. Or la commission a plutôt pour objectif d’ouvrir ce dernier. C’est la raison pour laquelle elle met un avis défavorable sur cet amendement.
L’amendement n° 627 est surprenant, puisqu’il vise un sujet spécifique, prévoir une mobilité à l’étranger. Je ne veux pas que l’on puisse circonscrire les créations d’entreprise à la métropole. Néanmoins, on ne voit pas en quoi l’adoption de cet amendement apporterait quelque chose au texte.
C’est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur cet amendement : il est préférable de ne pas restreindre le champ de cet article.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Mélot, l’amendement n° 235 rectifié est-il maintenu ?
Mme Colette Mélot. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 235 rectifié est retiré.
Monsieur Lévrier, qu’en est-il de l’amendement n° 627 ?
M. Martin Lévrier. Je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 281, présenté par M. Tourenne, Mme Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 14
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° Ont un niveau de qualification inférieur à un seuil fixé par décret. »
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Il s’agit de faire en sorte que les démissionnaires pouvant bénéficier d’un CPF de transition soient en priorité des démissionnaires dont le niveau de qualification est le plus bas, de façon à éviter que ne se précipitent vers ce type d’avantage ceux qui ont des diplômes et qui savent exactement à quelle porte frapper, quelles formalités remplir, etc.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement s’inscrit dans la même logique que précédemment. En l’occurrence, il s’agit de restreindre le dispositif aux personnes ayant le moins de qualification – tout à l’heure, cela concernait les formations qualifiantes.
Je rappelle la philosophie du Gouvernement, que la commission partage : permettre la création d’entreprises et la création de valeur ajoutée pour un certain nombre de personnes qui souhaitent démissionner. Si nous restreignons encore le champ de ce dispositif, nous aurons moins de chances d’avoir des perspectives de création d’emplois.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 26.
(L’article 26 est adopté.)
Sous-section 1
Ouverture du régime d’assurance chômage aux démissionnaires
Article 27
I. – Après l’article L. 5422-1 du code du travail, il est inséré un article L. 5422-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 5422-1-1. – Pour bénéficier de l’allocation d’assurance au titre du II de l’article L. 5422-1, le salarié demande, préalablement à sa démission, un conseil en évolution professionnelle auprès des institutions, organismes ou opérateurs mentionnés à l’article L. 6111-6, à l’exception de Pôle emploi et des organismes mentionnés à l’article L. 5314-1, dans les conditions prévues à l’article L. 6111-6. Le cas échéant, l’institution, l’organisme ou l’opérateur en charge du conseil en évolution professionnelle informe le salarié des droits qu’il pourrait faire valoir pour mettre en œuvre son projet dans le cadre de son contrat de travail.
« Le salarié établit avec le concours de l’institution, de l’organisme ou de l’opérateur le projet de reconversion professionnelle mentionné au 2° du II de l’article L. 5422-1. »
II. – Après la section 1 bis du chapitre VI du titre II du livre IV de la cinquième partie du code du travail, est insérée une section 1 ter ainsi rédigée :
« Section 1 ter
« Dispositions particulières applicables aux bénéficiaires de l’allocation d’assurance à la suite d’une démission
« Art. L. 5426-1-2. – I. – Par dérogation à l’article L. 5421-3, durant la période de mise en œuvre du projet mentionné au 2° du II de l’article L. 5422-1, la condition de recherche d’emploi requise pour bénéficier de l’allocation d’assurance au titre du même II est satisfaite dès lors que les intéressés sont inscrits comme demandeurs d’emploi et accomplissent les démarches nécessaires à la mise en œuvre de leur projet.
« II. – La réalité des démarches accomplies en vue de la mise en œuvre du projet mentionné au 2° du II de l’article L. 5422-1 est contrôlée par Pôle emploi au plus tard à l’issue d’une période de six mois suivant l’ouverture du droit à l’allocation d’assurance.
« La personne qui ne peut justifier, sans motif légitime, de la réalité de ces démarches est radiée de la liste des demandeurs d’emploi, dans les conditions mentionnées au f du 6° de l’article L. 5412-1. L’allocation d’assurance cesse alors d’être due.
« Les accords relatifs à l’assurance chômage mentionnés à l’article L. 5422-20 définissent les conditions dans lesquelles l’allocataire peut bénéficier de la reprise du versement du reliquat de ses droits à l’allocation d’assurance. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 219 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 336 est présenté par M. Tourenne, Mme Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 219.
Mme Cathy Apourceau-Poly. « Nous ouvrirons les droits à l’assurance chômage aux salariés qui démissionnent. » Voilà la phrase exacte du candidat Emmanuel Macron, lors de la campagne présidentielle.
Je commencerai par pointer une limite du dispositif.
Pour les entreprises, cette disposition pourrait constituer une opportunité de pousser à la démission des salariés dont elles souhaitent se séparer, afin d’éviter des coûts de licenciement ou de rupture conventionnelle. Toutefois, il n’est malheureusement pas rare que ces pratiques se fassent déjà et, dans ce cadre, l’ouverture des droits au chômage des démissionnaires est plutôt une sécurité financière qu’autre chose, même si elle constitue un transfert de responsabilité financière de l’entreprise à l’État.
Ensuite, cette mesure d’ouverture pourrait constituer une solution au mal-être au travail. En effet, en l’état actuel, de trop nombreux salariés restent à leur poste au mépris de leur santé pour la simple et bonne raison qu’ils ne pourraient pas supporter financièrement le poids d’une démission sans indemnité de départ et sans allocation chômage. Dans un temps où la recherche d’emploi est particulièrement difficile et chronophage, on peut comprendre que ces salariés n’osent pas ou ne puissent pas franchir le pas.
Il est essentiel de revenir sur quelques données relatives au mal-être au travail. Comme le montrait une enquête de 2011, l’absentéisme et le micro-abstentéisme sont symptomatiques d’un mal-être profond au travail et de dysfonctionnements au sein d’une entreprise. Ainsi, plus de la moitié des salariés avouaient avoir déjà pris un repos forcé de courte durée pour évacuer le stress, ce qui représentait 3 500 euros par salarié et par an. Une seconde étude montrait qu’un quart des salariés était en situation d’hyperstress – cela pouvait concerner plus de 40 % d’entre eux dans certains secteurs – et que la moitié des travailleurs étaient touchés par un niveau élevé d’anxiété au travail. Le mal-être au travail coûterait chaque année aux entreprises 12 600 euros.
Enfin, on touche ici même au principe de ce que sont les droits au chômage. En refusant aux salariés démissionnaires l’accès aux allocations chômage, on les prive d’un droit pour lequel ils ont cotisé selon le principe du salaire différé.
Au final, la montagne a accouché d’une souris. En limitant les droits des démissionnaires aux seuls salariés ayant un projet arrêté, seuls 14 000 à 23 000 sur 1 million de salariés démissionnant chaque année pourraient bénéficier du dispositif, soit 2,3 % des effectifs.
Ce calcul réalisé par les organisations syndicales et patronales lors de l’accord consacré à l’assurance chômage le 22 février dernier montre clairement l’insuffisance du dispositif tel qu’il est prévu.
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour présenter l’amendement n° 336.
M. Jean-Louis Tourenne. Le conseil en évolution professionnelle précède la démission. En cohérence avec l’amendement que j’ai déposé à l’article 26, je propose également la suppression de cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Chacun peut avoir sa conception du dispositif d’assurance chômage, notamment des enjeux de droits et de devoirs des ayants droit. La logique de la commission consiste à considérer que le demandeur d’emploi a des droits et devoirs, surtout lorsque l’on ouvre le dispositif à un certain nombre de nouvelles personnes susceptibles d’avoir recours à l’assurance chômage.
Bien sûr, si l’article 26 avait été supprimé, il aurait fallu adopter ces amendements de suppression de l’article 27. Dans la mesure où il en a été décidé autrement, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 219 et 336.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 737, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 9, première phrase
Remplacer la référence :
6°
par la référence :
3°
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Il s’agit de corriger une erreur de référence.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 27, modifié.
(L’article 27 est adopté.)
Sous-section 2
L’indemnisation des travailleurs indépendants en cessation d’activité
Article 28
I. – Le chapitre IV du titre II du livre IV de la cinquième partie du code du travail est complété par une section 4 ainsi rédigée :
« Section 4
« Allocation des travailleurs indépendants
« Art. L. 5424-24. – Pour l’application de la présente section, sont regardés comme travailleurs indépendants les personnes mentionnées à l’article L. 611-1 du code de la sécurité sociale, aux articles L. 722-1 et L. 731-23 du code rural et de la pêche maritime, aux 4° à 6°, 11°, 12°, 23°, 30° et 35° de l’article L. 311-3 du code de la sécurité sociale et à l’article L. 382-1 du même code.
« Art. L. 5424-25. – Ont droit à l’allocation des travailleurs indépendants les travailleurs qui étaient indépendants au titre de leur dernière activité, qui satisfont à des conditions de ressources, de durée antérieure d’activité et de revenus antérieurs d’activité et :
« 1° Dont l’entreprise a fait l’objet d’un jugement d’ouverture de liquidation judiciaire dans les conditions prévues à l’article L. 641-1 du code de commerce, à l’exception des cas prévus à l’article L. 640-3 du même code ;
« 2° Ou dont l’entreprise a fait l’objet d’une procédure de redressement judiciaire dans les conditions prévues au titre III du livre VI du code de commerce, lorsque l’adoption du plan de redressement est subordonnée par le tribunal au remplacement du dirigeant conformément à l’article L. 631-19-1 du même code ;
« 3° (Supprimé)
« Art. L. 5424-26. – Les dispositions des articles L. 5422-4 et L. 5422-5 sont applicables à l’allocation des travailleurs indépendants.
« Art. L. 5424-27. – Les mesures d’application de la présente section, notamment les conditions de ressources, de durée antérieure d’activité et de revenus antérieurs d’activité auxquelles est subordonné le droit à l’allocation des travailleurs indépendants sont fixées par décret en Conseil d’État. Toutefois :
« 1° Le montant de l’allocation, qui est forfaitaire, et sa durée d’attribution sont fixés par décret ;
« 2° Les mesures d’application relatives à la coordination de l’allocation des travailleurs indépendants avec l’allocation d’assurance sont fixées par les accords mentionnés à l’article L. 5422-20.
« Art. L. 5424-28. – L’allocation des travailleurs indépendants est financée exclusivement par les impositions de toute nature mentionnées au 4° de l’article L. 5422-9. »
II. – La cinquième partie du code du travail est ainsi modifiée :
1° Au 4° de l’article L. 5312-1, après les mots : « allocation d’assurance », sont insérés les mots : « et de l’allocation des travailleurs indépendants » ;
1° bis Au 3° de l’article L. 5421-4, les mots : « et L. 351-1-4 du code de la sécurité sociale » sont remplacés par les mots : « , L. 351-1-4 et des II et III des articles L. 643-3 et L. 723-10-1 du code de la sécurité sociale, des articles L. 732-18-1 à L. 732-18-3 du code rural et de la pêche maritime » ;
2° À la fin du premier alinéa de l’article L. 5422-3, les références : « aux articles L. 5422-9 et L. 5422-11 » sont remplacées par les références : « au 1° de l’article L. 5422-9 et à l’article L. 5422-11 » ;
3° À l’article L. 5423-1, les mots : « ou à l’allocation de fin de formation prévue par l’article L. 5423-7 » sont supprimés ;
4° Au 1° de l’article L. 5425-1, après le mot : « assurance », sont insérés les mots : « et l’allocation des travailleurs indépendants » ;
5° Au deuxième alinéa de l’article L. 5427-1, après le mot : « assurance », sont insérés les mots : « et de l’allocation des travailleurs indépendants ».
III. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le 2° de l’article L. 135-2 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « et le régime social des salariés agricoles » sont remplacés par les mots : « , le régime des non-salariés agricoles, le régime d’assurance vieillesse des professions libérales et la Caisse nationale des barreaux français » ;
b) Au b, la référence : « et L. 5423-7 » est remplacée par les références : « , L. 5423-7 et L. 5424-25 » ;
2° La sous-section 1 de la section 3 du chapitre III du titre VII du livre Ier est complétée par un article L. 173-1-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 173-1-4. – Lorsque l’assuré a relevé successivement, alternativement ou simultanément de plusieurs régimes d’assurance vieillesse de base, le régime auquel incombe la charge de valider les périodes assimilées est déterminé par décret. » ;
3° Après l’article L. 643-3, il est inséré un article L. 643-3-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 643-3-1. – Les périodes pendant lesquelles l’assuré a bénéficié de l’allocation mentionnée à l’article L. 5424-25 du code du travail sont comptées comme périodes d’assurance dans le régime d’assurance vieillesse de base des professions libérales. » ;
4° Après l’article L. 723-10-1-1, il est inséré un article L. 723-10-1-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 723-10-1-2. – Les périodes pendant lesquelles l’assuré a bénéficié de l’allocation mentionnée à l’article L. 5424-25 du code du travail sont comptées comme périodes d’assurance dans le régime d’assurance vieillesse de base des avocats. »
IV. – L’article L. 732-21 du code rural et de la pêche maritime est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les périodes pendant lesquelles l’assuré a bénéficié de l’allocation mentionnée à l’article L. 5424-25 du code du travail sont prises en considération pour l’ouverture du droit à pension, dans des conditions fixées par décret. »
V. – (Supprimé)
M. le président. L’amendement n° 628, présenté par M. Rambaud, Mme Schillinger, MM. Lévrier, Patriat, Amiel, Bargeton, Karam, Marchand, Mohamed Soilihi, Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Alinéa 10, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Ce décret prend en compte la diversité des métiers des travailleurs indépendants.
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. L’article 28 met en œuvre une promesse importante du candidat devenu Président de la République : l’ouverture aux indépendants du droit à un revenu de remplacement. C’est une avancée qui correspond à l’évolution des métiers, à l’évolution de la structure de l’économie. Cependant, cette évolution doit être accompagnée pour ne pas pénaliser ceux qui, par choix ou non, sont travailleurs indépendants.
Cet amendement vise donc à s’assurer que le décret en Conseil d’État qui fixera les mesures d’application comme les conditions de ressources et de durée antérieure d’activité prenne en compte la diversité des métiers. Peut-on traiter de la même manière un indépendant agricole, dont le revenu est, convenons-en, a priori inférieur à celui d’un avocat ou d’un médecin ? Nous croyons à la différenciation et au calibrage le plus efficace du dispositif.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Sur la forme, l’objet de cet amendement nous semble un peu dépourvu de portée normative. Sur le fond, M. le rapporteur soulignait qu’il énonçait des évidences, ce qui est bien le cas.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 650, présenté par M. Rambaud, Mme Schillinger, MM. Lévrier, Patriat, Amiel, Bargeton, Karam, Marchand, Mohamed Soilihi, Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Martin Lévrier.
M. Martin Lévrier. Pour actualiser le mode de financement de l’assurance chômage, c’est-à-dire faire correspondre ce mode de financement à l’économie d’aujourd’hui, mais aussi à la diversité des revenus, le Gouvernement prévoit de supprimer les cotisations d’assurance chômage et de les remplacer de manière pérenne par une fraction d’une imposition de toute nature.
La commission des affaires sociales a adopté à l’article 30 un amendement maintenant ouvertes plusieurs pistes de financement de l’assurance chômage, y compris les cotisations salariales. Ce choix entre en contradiction avec l’alinéa 13 de l’article 28.
C’est pourquoi notre groupe propose un amendement de coordination avec l’article 30, visant à supprimer la mention selon laquelle l’allocation des travailleurs indépendants sera financée exclusivement par les impositions de toutes natures affectées à l’UNEDIC.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Elle émet bien sûr un avis défavorable, puisque cet amendement vise à supprimer un apport de la commission.
Cela étant, je rappelle que le Conseil d’État a bien précisé qu’il fallait flécher le financement pour les indépendants, qui, aujourd’hui, n’ont pas cotisé à l’assurance chômage.
Par ailleurs, notre système est assurantiel. Si l’on doit le changer, il faudra prévoir un débat autrement plus substantiel que celui que nous avons sur cet amendement.
Je précise enfin que ce sont les députés de La République en Marche qui, les premiers, ont procédé à cet apport ; la commission n’a fait que le confirmer.
Nous sommes favorables à ce qu’un fléchage très précis du dispositif soit prévu, d’autant que l’on n’arrive pas à savoir précisément quel en sera le coût – entre 140 et 150 millions d’euros.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le Gouvernement est favorable à cet amendement, car cette mention est superfétatoire. Les dépenses afférentes à l’allocation des travailleurs indépendants, l’ATI, représenteront moins de 0,5 % des dépenses du régime d’assurance chômage alors que les impositions de toutes natures affectées à l’UNEDIC représenteront plus d’un tiers des ressources du régime, soit environ 13 milliards d’euros par an. Il n’est donc pas utile de préciser que le financement de l’ATI se fera exclusivement par ces impositions de toutes natures. Elles seront nécessairement couvertes par les impositions de toutes natures.
M. le président. L’amendement n° 748, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 29
a) Remplacer la référence :
L. 723–10–1–1
par la référence :
L. 653–3
b) Remplacer la référence :
L. 723–10–1–2
par la référence :
L. 653–3–1
II. – Alinéa 30
Remplacer la référence :
L. 723–10–1–2
par la référence :
L. 653–3–1
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination juridique.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote sur l’article.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Je souhaite simplement poser une question. Pourquoi avoir frappé d’irrecevabilité notre amendement sur les artistes-auteurs alors que d’autres amendements visant d’autres catégories professionnelles ont été acceptés, d’autant que les artistes-auteurs sont dans des situations particulièrement précaires ?
M. le président. Je n’ai pas la réponse à cette question, mais elle vous sera communiquée ultérieurement.
Je mets aux voix l’article 28, modifié.
(L’article 28 est adopté.)
Section 2
Lutter contre la précarité et la permittence
Article 29
(Supprimé)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 337, présenté par M. Tourenne, Mme Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après l’article L. 5422-9 du code du travail, il est inséré un article L. 5422-9-… ainsi rédigé :
« Art. L. 5422-9-… – L’allocation d’assurance est également financée par un fonds alimenté par une somme forfaitaire versée par les employeurs à la clôture de tout contrat de travail.
« Un décret détermine le montant de la contribution forfaitaire, et les modalités de mise en œuvre et d’application du présent article. »
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Il s’agit de trouver un moyen de lutter contre la multiplication des contrats précaires, lesquels ont augmenté de 165 % entre 2000 et aujourd’hui. Il faut savoir que le recours excessif à ces contrats coûte aux alentours de 7,5 milliards d’euros à UNEDIC chaque année.
On a renvoyé aux branches le soin de discuter de cette question et de mettre en place une sorte de bonus-malus. Seraient ainsi récompensées les entreprises ayant recours de manière parcimonieuse aux CDD, les autres étant pénalisées. Or, on le sait, cela n’aboutira sans doute pas. On cherche déjà à savoir si certains secteurs ne pourraient pas bénéficier d’une dérogation. Un tel dispositif serait du reste difficile à mettre en place.
Nous proposons donc d’instaurer une taxe forfaitaire, de l’ordre de 15 euros, qui serait due en cas de multiplication des contrats courts, quelle que soit la durée du contrat – une heure ou six mois. Ce serait une bonne façon de dire aux entreprises qu’elles ont tout intérêt à signer des contrats les plus longs possible.
M. le président. L’amendement n° 479, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le second alinéa de l’article L. 5422-12 du code du travail est remplacé par huit alinéas ainsi rédigés :
« Le taux de contribution de chaque employeur peut être majoré en fonction :
« 1° Du nombre de fins de contrat de travail et de contrats de mise à disposition mentionnés au 1° de l’article L. 1251-1, à l’exclusion des démissions et des contrats de mission mentionnés au 2° du même article L. 1251-1, et sous réserve de l’inscription des personnes concernées par ces fins de contrat sur la liste des demandeurs d’emploi mentionnée à l’article L. 5411-1 ;
« 2° Du nombre et de la durée des contrats à temps partiels en cours dans l’entreprise ;
« 3° Du nombre de licenciements pour inaptitude ;
« 4° De la nature du contrat de travail, de sa durée ou du motif de recours à un contrat d’une telle nature ;
« 5° De l’âge du salarié ;
« 6° De la taille de l’entreprise ;
« 7° Du secteur d’activité de l’entreprise. »
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Comme l’amendement de notre collègue Alain Tourenne, cet amendement vise à rétablir l’article 29 tout en le modifiant.
J’ai dit hier, de manière un peu passionnée, que 29 % des jeunes de la nouvelle génération entrent dans le monde du travail en ayant un contrat d’une journée. Le sujet est prégnant. Il n’est donc pas étonnant que plusieurs amendements portent sur cette question.
Nous proposons d’instaurer un système de majoration et de minoration des cotisations sociales des entreprises en fonction, notamment, du nombre de contrats courts qu’elles ont conclu. Pour rappel, l’article L. 1221–2 du code du travail dispose : « Le contrat de travail à durée indéterminée est la forme normale et générale de la relation de travail. » Autrement dit, la loi précise que le CDI doit être la norme et que le recours au CDD doit être exceptionnel.
Dans ce contexte, il nous paraît justifié d’imposer une majoration des cotisations sociales aux entreprises qui ne respectent pas le code du travail en abusant des contrats courts. Une sanction est donc légitime.
En revanche, il nous paraît moins légitime d’accorder un bonus aux entreprises ayant peu recours aux contrats courts, car elles se contentent de respecter la loi ! Je ne vois pas pourquoi les entreprises seraient récompensées financièrement pour cette seule raison. Cela ne se fait dans aucun autre cas. Je ne connais aucun citoyen – et vous non plus – qui touche de l’argent de l’État parce qu’il respecte le droit ! Je ne vois pas pourquoi on ferait une différence entre les entreprises et les citoyens.
Un tel bonus serait d’autant moins légitime que les cotisations sociales constituent un salaire différé pour les salariés, salaire qu’ils pourront mobiliser lorsqu’ils en auront besoin, par le biais de l’assurance chômage notamment. Minorer les cotisations sociales revient donc concrètement à retirer des droits aux salariés et à rendre de l’argent aux entreprises afin de les récompenser pour le seul fait de respecter la loi.
Pour ces raisons, nous demandons le rétablissement de l’article 29, en n’en conservant que la disposition instaurant un malus.
M. le président. L’amendement n° 629, présenté par M. Rambaud, Mme Schillinger, MM. Lévrier, Patriat, Amiel, Bargeton, Karam, Marchand, Mohamed Soilihi, Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le second alinéa de l’article L. 5422–12 du code du travail est remplacé par six alinéas ainsi rédigés :
« Le taux de contribution de chaque employeur peut être minoré ou majoré en fonction :
« 1° Du nombre de fins de contrat de travail et de contrats de mise à disposition mentionnées au 1° de l’article L. 1251–1, à l’exclusion des démissions et des contrats de mission mentionnés au 2° du même article L. 1251-1, et sous réserve de l’inscription des personnes concernées par ces fins de contrat sur la liste des demandeurs d’emploi mentionnée à l’article L. 5411-1 ;
« 2° De la nature du contrat de travail, de sa durée ou du motif de recours à un contrat d’une telle nature ;
« 3° De l’âge du salarié ;
« 4° De la taille de l’entreprise ;
« 5° Du secteur d’activité de l’entreprise. »
La parole est à M. Martin Lévrier.
M. Martin Lévrier. Pour améliorer notre système d’assurance chômage, nous devons avoir deux priorités : lutter contre les emplois instables, d’une part ; faire payer les entreprises qui font supporter un coût anormal au système, d’autre part.
Comme cela est indiqué dans une note du Conseil d’analyse économique, les contrats courts sont fréquemment des réembauches par un ancien employeur. Ce fut le cas de plus de 70 % des réembauches en CDD en 2011.
Les entreprises qui n’offrent que des emplois stables ne font supporter aucun coût à l’assurance chômage. En conséquence, l’instauration d’un bonus-malus consistant à moduler la cotisation de l’entreprise à l’assurance chômage en fonction du coût qu’elle lui fait supporter permettrait de gérer la main-d’œuvre de manière optimale et de réduire la précarité de l’emploi.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous invitons à voter cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. La permittence et l’instauration d’un bonus-malus nous interpellent tous. Nous connaissons tous dans nos entourages des personnes en situation précaire, qui ont des contrats très courts et on sait ce que cela peut engendrer. Cela étant dit, il n’est pas simple de trouver une solution probante à ce problème. La preuve, c’est que l’accord national interprofessionnel du 22 février n’en contient pas.
L’amendement n° 337 a la vertu de la simplicité, puisque ses auteurs y font quelques propositions assez simples. Elles nécessiteraient toutefois d’être étudiées, notamment avec les partenaires sociaux, afin d’évaluer leur efficacité. Il s’agit en outre de savoir si elles permettraient de dégager les marges de manœuvre suffisantes pour compenser le coût de la permittence dans le budget de l’assurance chômage.
À ce stade, la commission émet donc un avis plutôt défavorable sur cet amendement, qui pourrait être retenu lors de prochaines discussions sur ce sujet. Mais peut-être cet amendement va-t-il être retiré ?
L’amendement n° 479 présente lui aussi la vertu de la simplicité. Du bonus-malus, il ne tend à retenir que le malus. Cette mesure poserait un certain nombre de difficultés, car les entreprises seraient taxées quel que soit le type de contrat court. Or les contrats courts, il faut bien le dire, sont parfois subis par l’entreprise. Aussi, la commission a fait le choix de rejeter cet amendement.
Je m’étendrai un peu plus longuement sur l’amendement n° 629, qui vise à revenir sur la suppression du bonus-malus par la commission. Or cette suppression est importante pour nous. Je vais vous en expliquer les raisons.
La première raison pour laquelle la commission a fait le choix de supprimer le bonus-malus, c’est que l’article 29, tel qu’il figurait dans le projet de loi, visait indifféremment toutes les fins de contrats, quelle que soit leur durée, sans distinguer celles qui sont directement imputables à l’entreprise et celles dont elle n’a pas directement la responsabilité. Ainsi, dans la version adoptée à l’Assemblée nationale, une entreprise pourrait être soumise à un malus pour avoir signé des ruptures conventionnelles individuelles ou collectives, alors que ces ruptures nécessitent l’accord du salarié. Ce système n’est pas juste, nous l’avons dit en commission. En refusant l’option de l’experience rating à l’américaine, qui était certes un peu compliquée à mettre en œuvre, on tombe dans un autre écueil : celui d’un bonus-malus fondé sur le critère trop lâche des fins de contrat.
La deuxième raison ayant conduit la commission à supprimer le bonus-malus, c’est qu’on ignore les paramètres qui seront retenus pour le bonus-malus. Quel sera le périmètre choisi ? Le bonus-malus sera-t-il équilibré uniquement à l’échelon national ou aussi dans chaque secteur d’activité ? Quelle sera l’amplitude de variation de la contribution patronale et sa sensibilité par rapport à la moyenne constatée dans un secteur ?
Enfin, la troisième et dernière raison, c’est que l’expérience de bonus-malus menée à la suite de l’accord national interprofessionnel de 2013 sur la sécurisation de l’emploi ne s’est pas révélée concluante.
La commission a donc fait le choix de supprimer le bonus-malus. Pour autant, nous n’avons pas trouvé de solution à la permittence. En tout état de cause, la solution proposée à l’article 29 ne nous semble pas être la bonne.
La commission émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 629.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Quel est le but de l’article 29 sur ce sujet ? Il est de lutter contre la précarité excessive, qui prive un nombre très important de nos concitoyens de la possibilité de s’inscrire dans un projet à long terme. Comment être autonome quand on enchaîne indéfiniment des CDD, qui plus est, dans la grande majorité des cas, mais pas toujours, en les subissant ?
Si l’on veut être autonome dans la vie, avoir des projets personnels, un logement, il est extrêmement difficile de rester dans la précarité. L’enjeu est donc social, mais il est aussi assurantiel et de responsabilité collective.
Par ailleurs, si on prend l’ensemble des CDD et des CDD-intérim, la différence entre les cotisations que perçoit l’assurance chômage et les indemnités qu’elle verse constitue un déficit de 8 milliards d’euros chaque année, lequel représente une part majeure du déficit général de l’assurance chômage, qui est de 3 milliards d’euros par an. L’enjeu est donc important pour l’assurance chômage.
La flexibilité est-elle indispensable et nécessaire d’un point de vue économique ? Parfois, oui. Je rappelle qu’il n’est absolument pas illégal d’embaucher en CDD ou en intérim, contrairement à ce qui a été affirmé il y a quelques instants. Cela étant dit, on voit bien que, dans un même secteur d’activité, des entreprises ont recours de manière excessive aux contrats précaires – CDD, contrats d’intérim –, d’autres non.
Ayant passé vingt ans dans le secteur industriel, je peux vous dire qu’il arrive qu’une usine fonctionne avec 50 % d’intérimaires – ce sont des cas extrêmes, mais ils arrivent. Dans ce cas, comment fait-on pour s’assurer de la qualité des produits, de la sécurité au travail ? Il y a évidemment beaucoup d’accidents dans ces usines. Est-ce de la bonne gestion ? Non ! On voit bien que, dans ces cas, la flexibilité n’est pas nécessaire, car elle n’est pas liée à un à-coup du marché ou à une urgence. Le fait est que la flexibilité est devenue un mode de gestion des ressources humaines dans certaines entreprises.
Cela a été dit, la proportion des embauches en contrats courts – en CDD et en intérim – représente 87 % des embauches. Alors que nous sommes en période de croissance, que les entreprises cherchent partout des personnels, elles embauchent en CDD ou en intérim dans 87 % des cas. Plus inquiétant, la proportion des CDD de moins d’un mois a considérablement augmenté. Ces contrats représentaient 57 % des CDD il y a 20 ans, contre 83 % aujourd’hui. Il s’agit d’une forme de précarité extrême, aggravée par le fait que, dans 70 % des cas, le contrat est renouvelé chez le même employeur. En clair, cela signifie que l’employeur a fait des contrats courts un mode de gestion des ressources humaines. (M. Martin Lévrier opine.) Le salarié alterne ainsi contrats en CDD ou en intérim et périodes de chômage.
Cette pratique est effectivement dommageable à l’assurance chômage. Cela signifie que certaines entreprises qui proposent davantage des emplois durables paient pour les autres et qu’un certain nombre de salariés sont durablement, voire indéfiniment, précarisés.
Je suis néanmoins défavorable aux amendements nos 337 et 479, car le problème n’est pas le contrat court en lui-même. De nombreux CDD ou contrats d’intérim sont des tremplins vers un emploi pérenne. En outre, ils correspondent parfois à un choix du salarié. Le problème est que ces contrats, c’est la remise permanente à l’assurance chômage, et en plus des mêmes personnes et en les maintenant dans la précarité. Il ne faut donc pas taxer les contrats de travail, ni même les fins de contrat, le problème étant que les salariés retournent indéfiniment au chômage. Le bonus-malus a donc pour but de changer les comportements sur cette question.
Je suggère donc aux auteurs des amendements nos 479 et 337 de bien vouloir les retirer au profit de l’amendement n° 629, qui vise à rétablir le bonus-malus, lequel me paraît être d’intérêt général.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Votre analyse est très intéressante, madame la ministre, mais vous prenez des cas extrêmes. Or la situation que nous évoquons ne date pas d’hier. Nous avons reçu, comme le prévoit la loi, le rapport de l’UNEDIC. Cela fait longtemps qu’on voit la courbe des contrats précaires progresser. Je ne vois donc pas pourquoi on remettrait en cause les accords qui ont été signés en prenant une mesure urgente.
Une analyse a été réalisée, des mesures devaient être étudiées. Il eût été judicieux d’attendre les propositions qui seront faites pour prendre ensuite les mesures adaptées.
Si on étudie plus finement les contrats courts, on s’aperçoit qu’ils sont signés dans la grande majorité des cas dans des secteurs très particuliers, ayant des besoins spécifiques. C’est notamment le cas des secteurs de l’hébergement médico-social et de l’action sociale sans hébergement. Il incombe donc au Gouvernement de faire en sorte que ces secteurs aient les moyens nécessaires de ne pas avoir recours à des contrats courts. Les secteurs de l’hébergement et de la restauration, dont on connaît les difficultés, sont également concernés, de même que les secteurs de l’art, des spectacles, des activités récréatives et le secteur des activités de services administratifs et de soutien. Il s’agit donc de secteurs précis. Peut-être faut-il envisager des mesures spécifiques dans ces secteurs pour éviter la précarisation ?
Ce qui m’interpelle, madame le ministre, c’est qu’il soit bien souvent possible de cumuler ces contrats courts avec les allocations chômage. Le directeur de l’UNEDIC signale ainsi que « les bénéficiaires de l’assurance chômage qui reprennent des emplois tout en restant inscrits à Pôle emploi présentent des profils variés. Seule une minorité d’entre eux reprend des contrats de moins d’un mois et leur nombre augmente peu. […]
« Un diagnostic précis des situations de reprise d’emploi en cours d’indemnisation sera un préalable nécessaire pour étayer les décisions à venir. »
Un temps d’analyse est donc encore nécessaire. C’est la raison pour laquelle il n’était pas indispensable d’agir avec précipitation en proposant l’amendement que vous avez élaboré. S’agissant d’un phénomène qui, je le répète, ne date pas d’hier, il me semble préférable d’attendre quelques semaines que les réflexions des partenaires sociaux débouchent sur des propositions.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Madame la ministre, nous avons évidemment fait la même expérience que vous et nous posons le même diagnostic. Le contrat court est parfois un choix contraint pour un chef d’entreprise, en raison de la nature de son activité ou du choix du salarié. Parfois, c’est le chef d’entreprise qui choisit d’y avoir recours. Mais, en tant que législateurs, notre rôle est-il de qualifier le choix ? Non, nous sommes là pour protéger le salarié.
Madame la rapporteur, vous dites qu’un accord avec les partenaires sociaux est nécessaire. Pourquoi l’avis ou l’accord des partenaires sociaux est-il nécessaire sur certaines réformes et pas sur d’autres ? Je demande à tout le monde de faire un effort de cohérence ! Soit on débat en attendant que les partenaires sociaux soient d’accord pour mettre en œuvre une loi, soit on fait deux poids, deux mesures. Pour ma part, je pense qu’il faut, pour la qualité de nos débats, être cohérent. Ce qui est valable dans un domaine doit l’être dans un autre.
J’en reviens au bonus-malus. C’est une méthode de pondération, un moyen d’apprécier un risque, à l’instar du bonus-malus automobile par exemple, que l’on connaît tous. Or, en tant que législateurs, pensons-nous que le risque est de même nature pour un chef d’entreprise et pour un salarié ? C’est pour cela que nous voulions supprimer le bonus et ne conserver que le malus. Ce débat est intéressant.
Enfin, madame la ministre, vous nous avez donné raison en démontrant que la précarisation s’accélérait. Alors que vous reconnaissez, comme votre collègue d’En Marche, que certains chefs d’entreprise multiplient les contrats à durée déterminée et les reconduisent, vous nous dites qu’il ne faut pas les sanctionner.
M. Pascal Savoldelli. Vous l’avez dit !
M. le président. Il faut conclure !
M. Pascal Savoldelli. Ces chefs d’entreprise sont une minorité, mais ils méritent d’être sanctionnés. Là aussi, soyons cohérents !
M. le président. En conséquence, l’article 29 demeure supprimé.
Articles additionnels après l’article 29
M. le président. L’amendement n° 480, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 29
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code du travail est ainsi modifié :
1° L’article L. 1242-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1242-2. – Le contrat de travail ne peut être conclu pour une durée déterminée que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire et seulement dans les cas suivants :
« 1° Remplacement d’un salarié en cas d’absence ou de suspension de son contrat de travail et pour pourvoir directement le poste de travail du salarié absent ;
« 2° Accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise. Au titre de ce motif, le nombre de salariés occupés en contrat de travail à durée déterminée ne peut excéder 10 % de l’effectif moyen occupé au cours de l’année civile précédente dans les entreprises d’au moins onze salariés. Le nombre obtenu est arrondi à l’unité supérieure. En cas de dépassement de ce taux, les contrats de travail excédentaires et par ordre d’ancienneté dans l’entreprise sont réputés être conclus pour une durée indéterminée ;
« 3° Emplois à caractère saisonnier de courte durée définis par décret ou pour lesquels dans certains secteurs d’activité définis par décret, il est d’usage constant et établi de recourir à des emplois temporaires en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois ;
« 4° Remplacement d’un chef d’entreprise temporairement absent ;
« 5° Réalisation d’un contrat d’apprentissage. » ;
2° Les articles L. 1242-3 et L. 1242-4 sont abrogés.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Après votre dernière intervention, madame la ministre, je ne doute pas que vous émettrez un avis favorable sur notre amendement !
Cet amendement vise à encadrer le recours aux contrats à durée déterminée. Nous proposons de limiter le nombre d’embauches en CDD à 10 % de l’effectif total dans les entreprises d’au moins onze salariés, en cas d’accroissement temporaire de l’activité.
Le nombre d’embauches en CDD n’a cessé d’augmenter depuis les années quatre-vingt. Ainsi, entre 2000 et 2014, le nombre d’embauches en intérim et en CDD pour une durée inférieure à un mois a augmenté de 61 %, alors que le nombre d’embauches en CDI et en CDD à long terme a stagné.
Si le recours aux CDD a augmenté, c’est non parce que les entreprises connaissent plus souvent des accroissements temporaires d’activité, mais parce que ces contrats sont devenus une variable d’ajustement. De plus en plus de CDD pourvoient durablement des emplois liés à l’activité normale et permanente de l’entreprise. Les exemples ne manquent pas. Ces dernières années, des entreprises comme La Poste ou Air France ont été attaquées à plusieurs reprises par des salariés qui cumulaient des CDD, parfois depuis plus de dix ans.
Non seulement le recours excessif aux contrats courts est contraire au droit du travail, qui prévoit que le CDI est la forme normale de la relation de travail, mais il est de plus source de précarité pour les salariés. Les fins de CDD représentent en effet un quart des nouvelles inscriptions à Pôle emploi.
Le Gouvernement étend dans le projet de loi les possibilités d’embauche en CDD. Pourtant, M. Macron et sa ministre du travail prétendent vouloir favoriser l’emploi et lutter contre le chômage. Dans cette perspective, ils devraient encadrer strictement les contrats précaires au lieu de faciliter leur utilisation.
Afin de lutter contre la précarité et de diminuer les dépenses de l’assurance chômage, nous proposons d’insérer un article additionnel après l’article 29 encadrant le recours aux CDD.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Permettez-moi de revenir tout d’abord sur les propos de votre collègue qui nous appelle à faire preuve de cohérence. Chacun apprécie bien entendu la cohérence de ses propos !
Cela étant dit, je suis une adepte du dialogue social et je pense qu’il est nécessaire que les partenaires discutent, puis, au bout d’un moment – il ne faut pas que cela dure indéfiniment –, que le Gouvernement et le législateur fassent leur travail. Cela me semble normal.
L’amendement que nous avons adopté tout à l’heure visant à porter à sept ans le délai à partir duquel un salarié démissionnaire peut percevoir l’assurance chômage est conforme à ce qu’avaient décidé les partenaires sociaux, puisque cette mesure figure dans l’accord national interprofessionnel du 22 février. Je pourrais ainsi multiplier les exemples.
Je tenais à revenir sur vos propos, cher collègue, car il me semblait important de le souligner, notamment par rapport à ce texte.
J’en viens à l’amendement n° 480. C’est vrai, comme vous nous l’avez dit en commission, que la permittence pose des difficultés, que vous faites des propositions et qu’elles sont rejetées. Mais quand on est un adepte du dialogue social, on doit, à un moment donné, renvoyer ces difficultés aux partenaires sociaux. Cela n’a en effet pas été le cas dans l’accord national interprofessionnel du 22 février, mais les partenaires sociaux doivent trouver une solution.
La proposition du Gouvernement ne nous convient pas, car nous considérons qu’elle a été essayée et qu’elle n’est pas concluante. Nous devons renvoyer la discussion sur ce sujet aux partenaires sociaux.
La commission émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 480, et, je vous prie de m’en excuser, son avis sera sans doute le même sur l’amendement suivant. Limiter les cas de recours aux contrats courts en interdisant à une entreprise d’employer plus de 10 % de son personnel en CDD sur l’année, c’est ne pas faire cas des secteurs d’activité et c’est trop restrictif.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 481, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 29
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 1251-6 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 1251-6. – Un utilisateur ne peut faire appel à un salarié temporaire que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire et seulement dans les cas suivants :
« 1° Remplacement d’un salarié en cas d’absence ou de suspension de son contrat de travail et pour pourvoir directement le poste de travail du salarié absent ;
« 2° Accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise. Au titre de ce motif, le nombre de salariés temporaires ne peut excéder 10 % de l’effectif occupé en moyenne au cours de l’année civile précédente dans les entreprises d’au moins onze salariés. Ce nombre obtenu est arrondi à l’unité supérieure. En cas de dépassement de ce taux, les contrats de travail excédentaires et par ordre d’ancienneté dans l’entreprise sont réputés être conclus pour une durée indéterminée avec l’entreprise utilisatrice. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Malgré le peu de succès qu’ont rencontré nos propositions successives, nous continuons à tenter d’enrichir et d’améliorer ce projet de loi. Nous tenons bon !
Ce qui mine actuellement les salariés, c’est la précarité, l’instabilité. Aussi, nous proposons ici d’encadrer plus particulièrement le recours aux contrats de travail intérimaires. Il s’agit d’empêcher que ces contrats ne soient utilisés par les entreprises comme un mode de gestion permanent afin que les salariés ne soient pas considérés comme des variables d’ajustement. Nous proposons donc de limiter le nombre de personnes employées en contrat intérimaire à 10 % de l’effectif total dans les entreprises comptant au moins onze salariés.
Certes, cette forme de travail atypique est encadrée par l’article L. 1251–6 du code du travail, mais nous proposons de limiter les possibilités de recours à ce type de contrat aux seuls cas de remplacement d’un salarié absent ou d’accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise.
Le travail en intérim est aujourd’hui en augmentation, et ce pour la troisième année consécutive. Au total, 600 000 personnes sont concernées dans notre pays, 600 000 personnes qui n’ont pas de sécurité d’emploi, qui ne savent pas si elles auront encore du travail le mois suivant, voire la semaine suivante, qui ignorent quelques heures avant leur mission, le lieu de ladite mission et le type de travail qui leur sera demandé.
Ces contraintes pèsent bien évidemment sur les perspectives d’avenir et de carrière de ces travailleurs, mais aussi sur leur vie personnelle, en termes de logement par exemple.
Au-delà des problèmes de précarité et des abus d’entreprises largement dénoncés au sein des prud’hommes, nous souhaitons limiter le recours à l’intérim, car, on le sait, le travail intérimaire engendre de nombreux accidents du travail, dont certains sont très graves. En 2014, 64 intérimaires sont morts au travail. Cette même année, on a dénombré 40 000 accidents du travail, soit deux fois plus que chez les autres salariés.
Il s’agit donc là d’une véritable question de santé et de sécurité au travail. Nous espérons donc que cet amendement sera voté.
Vous le voyez, nos propositions concernent les entreprises qui ne sont pas vertueuses.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Par cohérence, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement. Si vous êtes cohérente dans vos propositions, chère collègue, nous sommes cohérents dans notre approche !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. De façon cohérente, le Gouvernement émet également un avis défavorable.
M. le président. L’amendement n° 483, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 29
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les chapitres Ier et II du titre IV du livre II de la deuxième partie du code du travail sont ainsi rédigés :
« Chapitre Ier
« Négociation de branche et professionnelle
« Section 1
« Négociation annuelle
« Art. L. 2241–1. – Les organisations liées par une convention de branche ou, à défaut, par des accords professionnels, se réunissent, au moins une fois par an, pour négocier sur les salaires.
« Ces négociations prennent en compte l’objectif d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, ainsi que les mesures permettant de l’atteindre.
« Art. L. 2241–2. – La négociation sur les salaires est l’occasion, pour les parties, d’examiner au moins une fois par an au niveau de la branche les données suivantes :
« 1° L’évolution économique, la situation de l’emploi dans la branche, son évolution et les prévisions annuelles ou pluriannuelles établies, notamment pour ce qui concerne les contrats de travail à durée déterminée et les missions de travail temporaire ;
« 2° Les actions éventuelles de prévention envisagées compte tenu de ces prévisions ;
« 3° L’évolution des salaires effectifs moyens par catégories professionnelles et par sexe, au regard, le cas échéant, des salaires minima hiérarchiques.
« Les informations nécessaires à la négociation sont déterminées par voie réglementaire.
« Art. L. 2241–2–1. – Lorsque le salaire minimum national professionnel des salariés sans qualification au sens du 4° du II de l’article L. 2261–22 est inférieur au salaire minimum interprofessionnel de croissance, les organisations liées par une convention de branche ou, à défaut, par des accords professionnels se réunissent pour négocier sur les salaires.
« À défaut d’initiative de la partie patronale dans les trois mois, la négociation s’engage dans les quinze jours suivant la demande d’une organisation syndicale de salariés représentative au sens de l’article L. 2231–1.
« Section 2
« Négociation triennale
« Sous-section 1
« Égalité professionnelle entre les femmes et les hommes
« Art. L. 2241–3. – Les organisations liées par une convention de branche ou, à défaut, par des accords professionnels se réunissent pour négocier tous les trois ans sur les mesures tendant à assurer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et sur les mesures de rattrapage tendant à remédier aux inégalités constatées. La mise en œuvre de ces mesures de rattrapage, lorsqu’elles portent sur des mesures salariales, est suivie dans le cadre de la négociation annuelle obligatoire sur les salaires prévue à l’article L. 2241–1.
« La négociation porte notamment sur :
« 1° Les conditions d’accès à l’emploi, à la formation et à la promotion professionnelle ;
« 2° Les conditions de travail et d’emploi et notamment celles des salariés à temps partiel.
« Les informations nécessaires à la négociation sont déterminées par voie réglementaire.
« Sous-section 2
« Conditions de travail et gestion prévisionnelle des emplois et des compétences
« Art. L. 2241–4. – Les organisations liées par une convention de branche ou, à défaut, par des accords professionnels se réunissent, au moins une fois tous les trois ans, pour négocier sur les conditions de travail, la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, et sur la prise en compte de la pénibilité du travail. La négociation peut également porter sur le contrat de génération. L’accord conclu au titre de la présente sous-section vaut conclusion de l’accord mentionné au 3° de l’article L. 5121–8, sous réserve du respect des dispositions prévues à la section 4 du chapitre Ier du titre II du livre Ier de la cinquième partie. »
« La négociation sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences peut se décliner à l’échelle du territoire et s’appuie sur les travaux de l’observatoire prospectif des métiers et des qualifications mis en place par la commission paritaire nationale de l’emploi au niveau de chaque branche, tout en veillant à l’objectif de mixité des métiers. Cet observatoire porte une attention particulière aux mutations professionnelles liées aux filières et aux métiers de la transition écologique et énergétique.
« Par ailleurs, les organisations mentionnées au premier alinéa se réunissent tous les trois ans pour négocier sur les matières définies aux articles L. 2242–15 et L. 2242–16.
« Sous-section 3
« Travailleurs handicapés
« Art. L. 2241–5. – Les organisations liées par une convention de branche ou, à défaut, par des accords professionnels se réunissent pour négocier, tous les trois ans, sur les mesures tendant à l’insertion professionnelle et au maintien dans l’emploi des travailleurs handicapés.
« La négociation porte notamment sur les conditions d’accès à l’emploi, à la formation et à la promotion professionnelles ainsi que sur les conditions de travail, d’emploi et de maintien dans l’emploi.
« Les informations nécessaires à la négociation sont déterminées par voie réglementaire.
« Sous-section 4
« Formation professionnelle et apprentissage
« Art. L. 2241-6. – Les organisations liées par une convention de branche ou, à défaut, par un accord professionnel se réunissent au moins tous les trois ans pour négocier sur les priorités, les objectifs et les moyens de la formation professionnelle des salariés.
« Cette négociation porte notamment sur l’égal accès à la formation des salariés selon leur catégorie professionnelle et la taille de leur entreprise, les abondements supplémentaires du compte personnel de formation, la validation des acquis de l’expérience, l’accès aux certifications, le développement du tutorat et la valorisation de la fonction de tuteur ou de maître d’apprentissage, en particulier les actions aidant à l’exercer et les conditions de son exercice par des salariés âgés de plus de cinquante-cinq ans.
« La négociation sur la validation des acquis de l’expérience visée à l’alinéa précédent porte sur :
« 1° Les modalités d’information des entreprises et des salariés sur les actions de validation des acquis de l’expérience mises en œuvre en vue de l’obtention d’une qualification mentionnée à l’article L. 6314–1 ;
« 2° Les conditions propres à favoriser l’accès des salariés, dans un cadre collectif ou individuel, à la validation des acquis de l’expérience ;
« 3° Les modalités de prise en charge par les organismes collecteurs paritaires agréés des dépenses afférentes à la participation d’un salarié à un jury d’examen ou de validation des acquis de l’expérience.
« Section 3
« Négociation quinquennale
« Sous-section 1
« Classifications
« Art. L. 2241–7. – Les organisations liées par une convention de branche ou, à défaut, par des accords professionnels se réunissent, au moins une fois tous les cinq ans, pour examiner la nécessité de réviser les classifications.
« Ces négociations prennent en compte l’objectif d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et de mixité des emplois.
« Lorsqu’un écart moyen de rémunération entre les femmes et les hommes est constaté, les organisations liées par une convention de branche ou, à défaut, par des accords professionnels font de sa réduction une priorité.
« À l’occasion de l’examen mentionné au premier alinéa, les critères d’évaluation retenus dans la définition des différents postes de travail sont analysés afin d’identifier et de corriger ceux d’entre eux susceptibles d’induire des discriminations entre les femmes et les hommes et afin de garantir la prise en compte de l’ensemble des compétences des salariés.
« Sous-section 2
« Épargne salariale
« Art. L. 2241–8. – Les organisations liées par une convention de branche ou, à défaut, par des accords professionnels se réunissent, une fois tous les cinq ans, pour engager une négociation sur l’institution d’un ou plusieurs plans d’épargne interentreprises ou plans d’épargne pour la retraite collectifs interentreprises lorsqu’il n’existe aucun accord conclu à ce niveau en la matière.
« Section 4
« Dispositions communes à la négociation annuelle et à la négociation quinquennale
« Art. L. 2241–9. – Les négociations annuelle et quinquennale prévues aux articles L. 2241–1 et L. 2241–7 visent également à définir et à programmer les mesures permettant de supprimer les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes.
« Art. L. 2241–10. – À défaut d’initiative de la partie patronale dans l’année suivant la promulgation de la loi n° 2006–340 du 23 mars 2006 relative à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes, la négociation s’engage dans les quinze jours suivant la demande d’une organisation syndicale de salariés représentative au sens de l’article L. 2231–1.
« Art. L. 2241–11. – L’accord visant à supprimer les écarts de rémunération conclu à la suite des négociations annuelle et quinquennale fait l’objet d’un dépôt auprès de l’autorité administrative dans les conditions définies à l’article L. 2231–6.
« En l’absence de dépôt d’un accord ou de transmission d’un procès-verbal de désaccord auprès de cette autorité, contenant les propositions des parties en leur dernier état, la commission mixte mentionnée à l’article L. 2261–20 est réunie à l’initiative du ministre chargé du travail afin que s’engagent ou se poursuivent les négociations prévues à l’article L. 2241–9.
« Art. L. 2241–12. – Une commission mixte est réunie dans les conditions prévues à l’article L. 2241–11 si la négociation n’a pas été engagée sérieusement et loyalement.
« L’engagement sérieux et loyal des négociations implique que la partie patronale ait communiqué aux organisations syndicales les informations nécessaires pour leur permettre de négocier en toute connaissance de cause et ait répondu de manière motivée aux éventuelles propositions des organisations syndicales.
« Section 5
« Temps partiel
« Art. L. 2241–13. – Les organisations liées par une convention de branche ou, à défaut, par des accords professionnels ouvrent une négociation sur les modalités d’organisation du temps partiel dès lors qu’au moins un tiers de l’effectif de la branche professionnelle occupe un emploi à temps partiel.
« Cette négociation porte notamment sur la durée minimale d’activité hebdomadaire ou mensuelle, le nombre et la durée des périodes d’interruption d’activité, le délai de prévenance préalable à la modification des horaires et la rémunération des heures complémentaires.
« Chapitre II
« Négociation obligatoire en entreprise
« Section 1
« Modalités de la négociation obligatoire
« Art. L. 2242–1. – Dans les entreprises où sont constituées une ou plusieurs sections syndicales d’organisations représentatives, l’employeur engage :
« 1° Chaque année, une négociation sur la rémunération, le temps de travail et le partage de la valeur ajoutée dans l’entreprise ;
« 2° Chaque année, une négociation sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la qualité de vie au travail ;
« 3° Tous les trois ans, dans les entreprises d’au moins trois cents salariés mentionnées au premier alinéa de l’article L. 2242–13, une négociation sur la gestion des emplois et des parcours professionnels.
« À défaut d’une initiative de l’employeur depuis plus de douze mois, pour chacune des deux négociations annuelles, et depuis plus de trente-six mois, pour la négociation triennale, suivant la précédente négociation ou, en cas d’accord mentionné à l’article L. 2242–20 ou prévu à l’article L. 2222–3, suivant le terme de cet accord, cette négociation s’engage obligatoirement à la demande d’une organisation syndicale représentative.
« La demande de négociation formulée par l’organisation syndicale est transmise dans les huit jours par l’employeur aux autres organisations représentatives.
« Dans les quinze jours qui suivent la demande formulée par une organisation syndicale, l’employeur convoque les parties à la négociation.
« Art. L. 2242–2. – Lors de la première réunion sont précisés :
« 1° Le lieu et le calendrier des réunions ;
« 2° Les informations que l’employeur remettra aux délégués syndicaux et aux salariés composant la délégation sur les thèmes prévus par la négociation qui s’engage et la date de cette remise.
« Art. L. 2242–3. – Tant que la négociation est en cours conformément aux dispositions de la présente section, l’employeur ne peut, dans les matières traitées, arrêter de décisions unilatérales concernant la collectivité des salariés, sauf si l’urgence le justifie.
« Art. L. 2242–4. – Si, au terme de la négociation, aucun accord n’a été conclu, il est établi un procès-verbal de désaccord dans lequel sont consignées, en leur dernier état, les propositions respectives des parties et les mesures que l’employeur entend appliquer unilatéralement.
« Ce procès-verbal donne lieu à dépôt, à l’initiative de la partie la plus diligente, dans des conditions prévues par voie réglementaire.
« Section 2
« Négociation sur la rémunération, le temps de travail et le partage de la valeur ajoutée
« Art. L. 2242–5. – La négociation annuelle sur la rémunération, le temps de travail et le partage de la valeur ajoutée dans l’entreprise porte sur :
« 1° Les salaires effectifs ;
« 2° La durée effective et l’organisation du temps de travail, notamment la mise en place du travail à temps partiel. Dans ce cadre, la négociation peut également porter sur la réduction du temps de travail ;
« 3° L’intéressement, la participation et l’épargne salariale, à défaut d’accord d’intéressement, d’accord de participation, de plan d’épargne d’entreprise, de plan d’épargne pour la mise à la retraite collectif ou d’accord de branche comportant un ou plusieurs de ces dispositifs. S’il y a lieu, la négociation porte également sur l’affectation d’une partie des sommes collectées dans le cadre du plan d’épargne pour la retraite collectif mentionné à l’article L. 3334–1 et sur l’acquisition de parts de fonds investis dans les entreprises solidaires mentionnés à l’article L. 3334–13. La même obligation incombe aux groupements d’employeurs ;
« 4° Le suivi de la mise en œuvre des mesures visant à supprimer les écarts de rémunération et les différences de déroulement de carrière entre les femmes et les hommes.
« Cette négociation peut avoir lieu au niveau des établissements ou des groupes d’établissements distincts.
« Art. L. 2242–5–1. – L’employeur qui n’a pas rempli l’obligation définie au 1°de l’article L. 2242–5 dans les conditions prévues aux articles L. 2242–1 à L. 2242–4 est soumis à une pénalité. Si aucun manquement relatif à cette obligation n’a été constaté lors d’un précédent contrôle au cours des six années civiles précédentes, la pénalité est plafonnée à un montant équivalent à 10 % des exonérations de cotisations sociales mentionnées à l’article L. 241–13 du code de la sécurité sociale au titre des rémunérations versées chaque année où le manquement est constaté, sur une période ne pouvant excéder trois années consécutives à compter de l’année précédant le contrôle. Si au moins un manquement relatif à cette obligation a été constaté lors d’un précédent contrôle au cours des six années civiles précédentes, la pénalité est plafonnée à un montant équivalent à 100 % des exonérations de cotisations sociales mentionnées au même article L. 241–13 au titre des rémunérations versées chaque année où le manquement est constaté, sur une période ne pouvant excéder trois années consécutives comprenant l’année du contrôle.
« Dans le cas où la périodicité de la négociation sur les salaires effectifs a été portée à une durée supérieure à un an en application de l’article L. 2242–20 du présent code, le premier alinéa n’est pas applicable pendant la durée fixée par l’accord. Au terme de cette durée ou si une organisation signataire a demandé que cette négociation soit engagée sans délai, lorsque l’employeur n’a pas rempli l’obligation définie au 1° de l’article L. 2242–5, dans les conditions prévues aux articles L. 2242–1 à L. 2242–4, il est fait application du premier alinéa du présent article.
« Lorsque l’autorité administrative compétente constate le manquement mentionné au même premier alinéa, elle fixe le montant de la pénalité en tenant compte notamment des efforts constatés pour ouvrir les négociations, de la situation économique et financière de l’entreprise, de la gravité du manquement et des circonstances ayant conduit au manquement, dans des conditions fixées par décret.
« La pénalité est recouvrée dans les conditions prévues à la section 1 du chapitre VII du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale.
« Le produit de la pénalité est affecté au régime général de sécurité sociale, selon les mêmes modalités que celles retenues pour l’imputation de la réduction mentionnée à l’article L. 241–13 du même code.
« Art. L. 2242–6. – La négociation prévue à l’article L. 2242–5 donne lieu à une information par l’employeur sur les mises à disposition de salariés auprès des organisations syndicales ou des associations d’employeurs mentionnées à l’article L. 2231–1.
« Dans les entreprises qui ne sont pas soumises à cette obligation annuelle de négocier, l’employeur communique aux salariés qui en font la demande une information sur les mises à disposition de salariés auprès des organisations syndicales ou des associations d’employeurs mentionnées à l’article L. 2231–1.
« Art. L. 2242–7. – Les accords collectifs d’entreprise sur les salaires effectifs ne peuvent être déposés auprès de l’autorité administrative, dans les conditions prévues à l’article L. 2231–6, qu’accompagnés d’un procès-verbal d’ouverture des négociations portant sur les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes, consignant les propositions respectives des parties.
« Le procès-verbal atteste que l’employeur a engagé sérieusement et loyalement les négociations. L’engagement sérieux et loyal des négociations implique que l’employeur ait convoqué à la négociation les organisations syndicales représentatives dans l’entreprise et fixé le lieu et le calendrier des réunions. L’employeur doit également leur avoir communiqué les informations nécessaires pour leur permettre de négocier en toute connaissance de cause et avoir répondu de manière motivée aux éventuelles propositions des organisations syndicales.
« Section 3
« Égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et qualité de vie au travail
« Art. L. 2242–8. – La négociation annuelle sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la qualité de vie au travail porte sur :
« 1° L’articulation entre la vie personnelle et la vie professionnelle pour les salariés ;
« 2° Les objectifs et les mesures permettant d’atteindre l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, notamment en matière de suppression des écarts de rémunération, d’accès à l’emploi, de formation professionnelle, de déroulement de carrière et de promotion professionnelle, de conditions de travail et d’emploi, en particulier pour les salariés à temps partiel, et de mixité des emplois. Cette négociation s’appuie sur les données mentionnées au 1° bis de l’article L. 2323–8.
« Cette négociation porte également sur l’application de l’article L. 241–3–1 du code de la sécurité sociale et sur les conditions dans lesquelles l’employeur peut prendre en charge tout ou partie du supplément de cotisations.
« En l’absence d’accord prévoyant les mesures prévues au présent 2° , l’employeur établit un plan d’action destiné à assurer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Après avoir évalué les objectifs fixés et les mesures prises au cours de l’année écoulée, ce plan d’action, fondé sur des critères clairs, précis et opérationnels, détermine les objectifs de progression prévus pour l’année à venir, définit les actions qualitatives et quantitatives permettant de les atteindre et évalue leur coût. Ce plan d’action est déposé auprès de l’autorité administrative. Une synthèse de ce plan d’action, comprenant au minimum des indicateurs et des objectifs de progression définis par décret, est portée à la connaissance des salariés par l’employeur par voie d’affichage sur les lieux de travail et, éventuellement, par tout autre moyen adapté aux conditions d’exercice de l’activité de l’entreprise. Elle est également tenue à la disposition de toute personne qui la demande et publiée sur le site internet de l’entreprise lorsqu’il en existe un.
« En l’absence d’accord prévoyant les mesures prévues au présent 2° , la négociation annuelle sur les salaires effectifs prévue au 1° de l’article L. 2242–5 porte également sur la programmation de mesures permettant de supprimer les écarts de rémunération et les différences de déroulement de carrière entre les femmes et les hommes ;
« 3° Les mesures permettant de lutter contre toute discrimination en matière de recrutement, d’emploi et d’accès à la formation professionnelle ;
« 4° Les mesures relatives à l’insertion professionnelle et au maintien dans l’emploi des travailleurs handicapés, notamment les conditions d’accès à l’emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, les conditions de travail et d’emploi et les actions de sensibilisation de l’ensemble du personnel au handicap ;
« 5° Les modalités de définition d’un régime de prévoyance et, dans des conditions au moins aussi favorables que celles prévues à l’article L. 911–7 du code de la sécurité sociale, d’un régime de remboursements complémentaires de frais occasionnés par une maladie, une maternité ou un accident, à défaut de couverture par un accord de branche ou un accord d’entreprise.
« Dans les entreprises de travaux forestiers mentionnées au 3° de l’article L. 722–1 du code rural et de la pêche maritime, la négociation définie au premier alinéa du présent 5° porte sur l’accès aux garanties collectives mentionnées à l’article L. 911–2 du code de la sécurité sociale ;
« 6° L’exercice du droit d’expression directe et collective des salariés prévu au chapitre Ier du titre VIII du présent livre, notamment au moyen des outils numériques disponibles dans l’entreprise ;
« 7° Les modalités du plein exercice par le salarié de son droit à la déconnexion et la mise en place par l’entreprise de dispositifs de régulation de l’utilisation des outils numériques, en vue d’assurer le respect des temps de repos et de congé ainsi que de la vie personnelle et familiale. À défaut d’accord, l’employeur élabore une charte, après avis du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel. Cette charte définit ces modalités de l’exercice du droit à la déconnexion et prévoit en outre la mise en œuvre, à destination des salariés et du personnel d’encadrement et de direction, d’actions de formation et de sensibilisation à un usage raisonnable des outils numériques.
« Art. L. 2242–9. – Les entreprises d’au moins cinquante salariés sont soumises à une pénalité à la charge de l’employeur lorsqu’elles ne sont pas couvertes par un accord relatif à l’égalité professionnelle portant sur les objectifs et les mesures mentionnées au 2° de l’article L. 2242–8 ou, à défaut d’accord, par les objectifs et les mesures constituant le plan d’action mentionné au même 2° . Les modalités de suivi de la réalisation des objectifs et des mesures de l’accord et du plan d’action sont fixées par décret. Dans les entreprises d’au moins 300 salariés, ce défaut d’accord est attesté par un procès-verbal de désaccord.
« Le montant de la pénalité prévue au premier alinéa du présent article est fixé au maximum à 1 % des rémunérations et gains au sens du premier alinéa de l’article L. 242–1 du code de la sécurité sociale et du premier alinéa de l’article L. 741–10 du code rural et de la pêche maritime versés aux travailleurs salariés ou assimilés au cours des périodes au titre desquelles l’entreprise n’est pas couverte par l’accord ou le plan d’action mentionné au premier alinéa du présent article. Le montant est fixé par l’autorité administrative, dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État, en fonction des efforts constatés dans l’entreprise en matière d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ainsi que des motifs de sa défaillance quant au respect des obligations fixées au même premier alinéa.
« Le produit de cette pénalité est affecté au fonds mentionné à l’article L. 135–1 du code de la sécurité sociale.
« Art. L. 2242–10. – Sans préjudice des dispositions prévues à l’article L. 2242–8, les négociations obligatoires en entreprise conduites en application du présent chapitre prennent en compte l’objectif d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
« Art. L. 2242–11. – La négociation sur l’insertion professionnelle et le maintien dans l’emploi des travailleurs handicapés se déroule sur la base d’un rapport établi par l’employeur présentant la situation par rapport à l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés prévue par les articles L. 5212–1 et suivants.
« Art. L. 2242–12. – La négociation prévue à l’article L. 2242–8 peut également porter sur la prévention de la pénibilité prévue au chapitre III du titre VI du livre Ier de la quatrième partie.
« Section 4
« Gestion des emplois et des parcours professionnels
« Art. L. 2242–13. – Dans les entreprises et les groupes d’entreprises au sens de l’article L. 2331–1 d’au moins trois cents salariés, ainsi que dans les entreprises et groupes d’entreprises de dimension communautaire au sens des articles L. 2341–1 et L. 2341–2 comportant au moins un établissement ou une entreprise de cent cinquante salariés en France, l’employeur engage tous les trois ans, notamment sur le fondement des orientations stratégiques de l’entreprise et de leurs conséquences mentionnées à l’article L. 2323–10, une négociation sur la gestion des emplois et des parcours professionnels et sur la mixité des métiers portant sur :
« 1° La mise en place d’un dispositif de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, ainsi que sur les mesures d’accompagnement susceptibles de lui être associées, en particulier en matière de formation, d’abondement du compte personnel de formation, de validation des acquis de l’expérience, de bilan de compétences ainsi que d’accompagnement de la mobilité professionnelle et géographique des salariés autres que celles prévues dans le cadre des articles L. 2242–21 et L. 2242–22 ;
« 2° Le cas échéant, les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l’entreprise prévue à l’article L. 2242–21, qui doivent, en cas d’accord, faire l’objet d’un chapitre spécifique ;
« 3° Les grandes orientations à trois ans de la formation professionnelle dans l’entreprise et les objectifs du plan de formation, en particulier les catégories de salariés et d’emplois auxquels ce dernier est consacré en priorité, les compétences et qualifications à acquérir pendant la période de validité de l’accord ainsi que les critères et modalités d’abondement par l’employeur du compte personnel de formation ;
« 4° Les perspectives de recours par l’employeur aux différents contrats de travail, au travail à temps partiel et aux stages, ainsi que les moyens mis en œuvre pour diminuer le recours aux emplois précaires dans l’entreprise au profit des contrats à durée indéterminée ;
« 5° Les conditions dans lesquelles les entreprises sous-traitantes sont informées des orientations stratégiques de l’entreprise ayant un effet sur leurs métiers, l’emploi et les compétences ;
« 6° Le déroulement de carrière des salariés exerçant des responsabilités syndicales et l’exercice de leurs fonctions.
« Un bilan est réalisé à l’échéance de l’accord.
« Art. L. 2242–14. – La négociation mentionnée à l’article L. 2242–13 peut également porter sur le contrat de génération. L’accord conclu au titre du présent article vaut conclusion de l’accord mentionné au second alinéa de l’article L. 5121–8 et à l’article L. 5121–9, sous réserve du respect des autres dispositions prévues à la section 4 du chapitre Ier du titre II du livre Ier de la cinquième partie.
« Art. L. 2242–15. – La négociation prévue à l’article L. 2242–13 peut également porter :
« 1° Sur les matières mentionnées aux articles L. 1233–21 et L. 1233–22 selon les modalités prévues à ce même article ;
« 2° Sur la qualification des catégories d’emplois menacés par les évolutions économiques ou technologiques ;
« 3° Sur les modalités de l’association des entreprises sous-traitantes au dispositif de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences de l’entreprise ;
« 4° Sur les conditions dans lesquelles l’entreprise participe aux actions de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences mises en œuvre à l’échelle des territoires où elle est implantée.
« Art. L. 2242–16. – Si un accord de groupe est conclu sur les thèmes inclus dans le champ de la négociation triennale mentionnée à l’article L. 2242–13, les entreprises comprises dans le périmètre de l’accord de groupe sont réputées avoir satisfait aux obligations de négocier prévues par ce même article.
« Art. L. 2242–17. – L’employeur peut engager une négociation portant sur les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l’entreprise dans le cadre de mesures collectives d’organisation courantes sans projet de réduction d’effectifs.
« Dans les entreprises et les groupes d’entreprises mentionnés à l’article L. 2242–13, les modalités de cette mobilité interne à l’entreprise s’inscrivent dans le cadre de la négociation prévue au même article.
« Dans les autres entreprises et groupes d’entreprises, la négociation prévue au présent article porte également sur les évolutions prévisionnelles des emplois et des compétences et sur les mesures susceptibles de les accompagner.
« Art. L. 2242–18. – L’accord issu de la négociation prévue à l’article L. 2242–17 comporte notamment :
« 1° Les limites imposées à cette mobilité au-delà de la zone géographique d’emploi du salarié, elle-même précisée par l’accord, dans le respect de la vie personnelle et familiale du salarié conformément à l’article L. 1121–1 ;
« 2° Les mesures visant à concilier la vie professionnelle et la vie personnelle et familiale et à prendre en compte les situations liées aux contraintes de handicap et de santé ;
« 3° Les mesures d’accompagnement à la mobilité, en particulier les actions de formation ainsi que les aides à la mobilité géographique, qui comprennent notamment la participation de l’employeur à la compensation d’une éventuelle perte de pouvoir d’achat et aux frais de transport.
« Les stipulations de l’accord collectif conclu au titre de l’article L. 2242–17 et du présent article ne peuvent avoir pour effet d’entraîner une diminution du niveau de la rémunération ou de la classification personnelle du salarié et doivent garantir le maintien ou l’amélioration de sa qualification professionnelle.
« Art. L. 2242–19. – L’accord collectif issu de la négociation prévue à l’article L. 2242–17 est porté à la connaissance de chacun des salariés concernés.
« Les stipulations de l’accord conclu au titre des articles L. 2242–17 et L. 2242–18 sont applicables au contrat de travail. Les clauses du contrat de travail contraires à l’accord sont suspendues.
« Lorsque, après une phase de concertation permettant à l’employeur de prendre en compte les contraintes personnelles et familiales de chacun des salariés potentiellement concernés, l’employeur souhaite mettre en œuvre une mesure individuelle de mobilité prévue par l’accord conclu au titre du présent article, il recueille l’accord du salarié selon la procédure prévue à l’article L. 1222–6.
« Lorsqu’un ou plusieurs salariés refusent l’application à leur contrat de travail des stipulations de l’accord relatives à la mobilité interne mentionnées au premier alinéa de l’article L. 2242–17, leur licenciement repose sur un motif économique, est prononcé selon les modalités d’un licenciement individuel pour motif économique et ouvre droit aux mesures d’accompagnement et de reclassement que doit prévoir l’accord, qui adapte le champ et les modalités de mise en œuvre du reclassement interne prévu aux articles L. 1233–4 et L. 1233–4–1.
« Section 5
« Adaptation des règles de négociation par voie d’accord
« Art. L. 2242–20. – Un accord d’entreprise peut modifier la périodicité de chacune des négociations prévues à l’article L. 2242–1 pour tout ou partie des thèmes, dans la limite de trois ans pour les deux négociations annuelles et de cinq ans pour la négociation triennale. Cette possibilité de modifier la périodicité de la négociation annuelle sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la qualité de vie au travail mentionnée à l’article L. 2242–8 n’est ouverte que dans les entreprises déjà couvertes par un accord sur l’égalité professionnelle ou, à défaut, par un plan d’action.
« Dans le cas où un accord modifie la périodicité de la négociation sur les salaires effectifs définie au 1° de l’article L. 2242–5, une organisation signataire peut, au cours de la période fixée par l’accord, formuler la demande que cette négociation soit engagée. L’employeur y fait droit sans délai.
« Cet accord peut adapter le nombre de négociations au sein de l’entreprise ou prévoir un regroupement différent des thèmes de négociations mentionnés au présent chapitre, à condition de ne supprimer aucun des thèmes obligatoires.
« Lorsqu’un accord modifie la périodicité de la négociation sur l’égalité professionnelle définie au 2° de l’article L. 2242–8, l’entreprise remplit l’obligation prévue à l’article L. 2242–9 pendant la durée prévue par l’accord. »
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Cet amendement est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 386, présenté par Mme Grelet-Certenais, M. Tourenne, Mme Féret, M. Daudigny, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 29
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article L. 7342-3 du code du travail, il est inséré un article L. 7342-3-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 7342-3-1. – Bénéficie d’une allocation spécifique contre la perte de revenu payée par la plateforme le travailleur qui satisfait à des conditions de ressources, de durée antérieure d’activité, de revenus antérieurs d’activité et dont l’activité qu’il réalise pour le compte de la plateforme a diminué, sans que cette diminution lui soit imputable.
« Les dispositions des articles L. 5422-4 et L. 5422-5 sont applicables à cette allocation.
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions de mise en œuvre de cet article. Préalablement à la publication de ce décret, une négociation spécifique s’engage entre les organisations représentant les plateformes de mise en relation par voie électronique et les organisations syndicales représentatives représentant les travailleurs des plateformes numériques sur ces conditions de mise en œuvre. »
II. – Au premier alinéa de l’article L. 7342-4 du code du travail, après la référence : « L. 7342-3 », est insérée la référence : « et L. 7342-3-1 ».
La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais.
Mme Nadine Grelet-Certenais. En 2016, la loi relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels a reconnu pour la première fois la responsabilité sociale des plateformes numériques.
Elle impose à ces plateformes de prendre en charge l’assurance couvrant les risques d’accident du travail souscrite volontairement par un travailleur ou un contrat collectif aux garanties équivalentes. Une condition est posée : le travailleur doit avoir réalisé un chiffre d’affaires au moins égal à 5 100 euros dans l’année, avec une ou plusieurs plateformes.
Ce montant est, par exemple, le seuil de déclenchement de l’activité professionnelle pour les locations de meublés ou les tables d’hôtes, en application du décret du 4 mai 2017 relatif à la responsabilité sociale des plateformes de mise en relation par voie électronique. Il s’agit donc d’un seuil déjà opérationnel et clairement identifié par les acteurs du secteur.
Alors qu’une grève des livreurs des plateformes est en cours, nous vous proposons de créer une allocation spécifique, payée par les plateformes elles-mêmes, contre la perte de revenu pour ces travailleurs, respectant la condition que je viens de mentionner.
Cet amendement vise donc à légiférer sur un secteur économique en pleine expansion et qui est appelé à se développer, notamment pour les services à la personne. Il nous apparaît urgent d’élargir le champ de la loi à ces activités boostées par le numérique.
Le rapport Terrasse remis en 2016 démontrait bien que l’ubérisation de l’emploi constitue l’un des défis législatifs majeurs de ces prochaines années. Les acteurs du numérique ne peuvent pas continuer à ne suivre que leurs propres lois ou leurs propres chartes…
Mais nous en reparlerons à l’article 40 A. Dans cette attente, je vous invite, mes chers collègues, à voter en faveur de cet amendement qui constitue une véritable avancée sociale pour ces nouveaux manœuvriers des temps modernes, qui ne bénéficient à ce jour de presque aucune protection sociale et sont à la merci d’entrepreneurs prédateurs. Les clients ne sont pas en reste et doivent également prendre conscience de la dépendance totale de ces soi-disant travailleurs indépendants.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Vous avez raison, ma chère collègue, le secteur des plateformes est en pleine expansion.
Vous estimez qu’il est urgent d’élargir le champ de la loi. Il me semble surtout urgent de prendre le temps d’une réflexion collective sur les plateformes, pour aboutir, après un processus législatif comprenant un avis du Conseil d’État et une étude d’impact, à une loi solide en la matière, ce qui n’a jamais été le cas. C’est l’adoption d’un amendement qui a permis, lors de l’examen du projet de loi Travail en 2016, d’obtenir certaines avancées sur les plateformes. Là encore, vous proposez un nouveau progrès par voie d’amendement.
Nous avons fait le choix de supprimer l’article 40 A. Mme la ministre le regrette, mais nous reparlerons de cette question tout à l’heure.
Nous devons nous poser et engager ensemble une réflexion approfondie ; c’est d’ailleurs ce que souhaitent les travailleurs des plateformes.
Je suis donc au regret d’émettre un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Nous partageons tous la volonté d’avancer sur le sujet des plateformes. De plus en plus de personnes travaillent pour celles-ci, et cela dessine un nouveau contexte social. Il s’agit à la fois d’un travail indépendant, et non salarié – la Cour de cassation l’a réaffirmé récemment –, mais avec des conditions d’activité spécifiques, qui ne ressemblent pas à celles que l’on retrouve dans d’autres secteurs. Évidemment, les partenaires sociaux et le législateur doivent travailler sur cette question.
Des avancées sont déjà intervenues sur le volet « accidents du travail et maladies professionnelles », ou AT-MP : depuis l’an dernier, les entreprises qui organisent les plateformes doivent prévoir une assurance accidents du travail.
Nous avons aussi proposé dans le texte, après discussion avec les différentes parties prenantes, d’avancer sur le droit à la formation. La plupart des personnes qui exercent comme travailleurs indépendants pour les plateformes ont assez peu de choix professionnels. Dans l’esprit qui consiste à permettre à nos concitoyens d’avoir la liberté de choisir leur avenir professionnel, nous souhaitons que ces travailleurs aient également droit au compte personnel de formation, ou CPF, financé par les plateformes, afin qu’ils ne soient pas assignés à vie à ce type d’emplois et qu’ils puissent évoluer professionnellement.
Enfin, j’ai regretté que la commission refuse notre proposition sur les chartes. C’est déjà un progrès, me semble-t-il, notamment pour que les conditions de travail et les horaires soient connus à l’avance et discutés.
Bien évidemment, cette proposition n’épuise pas le sujet – je suis d’accord avec vous sur ce point, madame la rapporteur ; les discussions vont se poursuivre avec les partenaires sociaux, mais il nous a paru important de la faire figurer dans le présent texte.
J’émets donc évidemment un avis défavorable sur cet amendement et je vous inviterai, tout à l’heure, mesdames, messieurs les sénateurs, à accomplir une première étape de progrès en rétablissant l’article 40 A supprimé par la commission.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 386.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 29 bis
À titre expérimental et par dérogation au 1° de l’article L. 1242-2 du code du travail, un même contrat à durée déterminée peut être conclu, jusqu’au 31 décembre 2021, pour remplacer plusieurs salariés.
Le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de cette expérimentation avant le 31 décembre 2021. Ce rapport évalue notamment les effets de l’expérimentation sur la fréquence de la conclusion de contrats à durée déterminée et sur l’allongement de la durée de ces contrats.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 220 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 338 est présenté par M. Tourenne, Mme Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 220.
Mme Laurence Cohen. Depuis le début de ce débat, certains ont tendance à sous-entendre que nous serions réfractaires à tout changement, acceptant de laisser filer le chômage de masse. Pourtant, notre assemblée se prépare à voter l’article 29 bis…
En pleine période de chômage de masse, le Gouvernement autoriserait une entreprise à remplacer plusieurs salariés absents par le biais d’un seul et même contrat à durée déterminée…
Cela pourrait prêter à sourire si le sujet n’était pas si grave. La commission des affaires sociales du Sénat a quelque peu atténué la portée de la mesure en adoptant un amendement de repli visant à transformer ce dispositif en expérimentation.
Reprenons toutefois ensemble les arguments qui ont été développés par le rapporteur du texte à l’Assemblée nationale, et qui nous laissent pour le moins perplexes.
Tout d’abord, il s’agirait de couvrir les cas où une seule personne devrait pourvoir à temps plein deux postes vacants à temps partiel. Les entreprises se retrouveraient alors dans l’impossibilité de recruter. En réalité, ce n’est pas le cas, puisque ladite personne peut tout à fait signer à son tour deux CDD à temps partiel pour occuper les deux postes en question. L’obligation d’un temps minimal de travail de 24 heures hebdomadaires peut par ailleurs être contournée sur seule déclaration du salarié en cause.
Il s’agirait ensuite de permettre le remplacement de deux personnes employées successivement, en couvrant par un seul contrat les deux périodes concernées. Mais, une nouvelle fois, la situation actuelle est tout à fait vivable, puisque la succession de CDD est aujourd’hui monnaie courante.
Au final, la seule justification à cet article est une nouvelle fois la volonté de précariser la situation des salariés en CDD et de limiter les coûts pour les entreprises. En effet, la rédaction de l’article, même après sa transformation par la commission des affaires sociales, est tellement large que toute entreprise pourrait remplacer dans tous les cas plusieurs salariés.
Le rapporteur de l’Assemblée nationale a argué que cette disposition permettrait de faire des économies en matière d’allocations chômage.
Sans parler du cynisme de ses propos, son calcul ne me semble pas pertinent : s’il est vrai que deux CDD impliquent deux primes de précarité, il est tout aussi vrai que cette mesure risque de freiner les recrutements.
Alors que le taux de chômage est de nouveau en hausse au premier trimestre 2018, pour s’établir à presque 9 %, cet article ne me semble absolument pas opportun.
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour présenter l’amendement n° 338.
M. Jean-Louis Tourenne. Je partage ce qui vient d’être brillamment exposé par ma collègue. Cet article est la porte ouverte à tous les abus, avec la possibilité de remplacer quatre ou cinq personnes absentes exerçant des fonctions complètement différentes : jardinage, nettoyage, etc. On invente une autre façon d’exploiter les salariés.
Vouloir trouver des solutions pour remplacer plusieurs personnes dans un établissement – je pense notamment aux EHPAD, les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes – n’est pas nocif en soi, mais les garanties font défaut, et la possibilité d’utiliser à l’excès cette disposition risque de se retourner contre les salariés et de les précariser.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Madame Cohen, je vous indique que l’expérimentation a été décidée par l’Assemblée nationale, et non par le Sénat.
Cela étant, la commission des affaires sociales a émis un avis favorable sur l’expérimentation de ce dispositif.
Vous avez raison, il peut y avoir des abus et des dérives néfastes, pour l’employé comme pour l’employeur.
Toutefois, l’expérimentation agit comme un filet de protection, et je crois qu’il faut la laisser aller à son terme. Nous avons d’ailleurs fait le choix dans ce texte de pérenniser un certain nombre d’expérimentations, et nous aurons donc l’occasion de revenir ultérieurement sur plusieurs dispositifs.
Je propose toutefois que l’on passe assez rapidement sur ces deux amendements. Nous avons en effet fait le choix de réécrire l’article 29 bis ; nous y reviendrons dans quelques instants lors de l’examen de l’amendement n° 732.
En conséquence, l’avis de la commission est défavorable sur ces deux amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 220 et 338.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 133, présenté par M. Janssens, n’est pas soutenu.
L’amendement n° 732, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
À titre expérimental et par dérogation respectivement au 1° de l’article L. 1242-2 du code du travail et au 1° de l’article L. 1251-6 du même code, un seul contrat à durée déterminée ou un seul contrat de travail temporaire peut être conclu pour remplacer plusieurs salariés dans les secteurs définis par décret. Cette expérimentation a lieu sur la période du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2020.
L’expérimentation ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.
Le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de cette expérimentation avant le 1er juin 2021.
Ce rapport évalue en particulier, dans les secteurs mentionnés au premier alinéa du présent article, les effets de l’expérimentation sur la fréquence de la conclusion des contrats à durée déterminée et des contrats de travail temporaire ainsi que sur l’allongement de leur durée, et les conséquences des négociations de branche portant sur les thèmes mentionnés au 7° de l’article L. 2253-1 dudit code.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. J’en arrive au point que j’évoquais précédemment. Cet amendement conserve la logique initiale de l’expérimentation des CDD multi-remplacements – introduite en séance publique à l’Assemblée nationale, elle permet de conclure un contrat unique plutôt que des CDD successifs pour remplacer plusieurs salariés –, tout en lui apportant plusieurs modifications tenant compte des amendements qui ont été proposés par un certain nombre de sénateurs.
Tout d’abord, l’expérimentation est étendue aux contrats d’intérim, car les conditions de recours de ce dernier sont très proches de celles du CDD.
Ensuite, elle sera limitée à des secteurs définis par un décret qui devrait être pris avant le 1er janvier 2019.
En outre, la durée de l’expérimentation sera réduite à deux ans avant une éventuelle généralisation.
Par ailleurs, afin d’éviter tout risque de contournement des règles d’ordre public social en matière de contrats courts, les CDD et contrats d’intérim multi-remplacements ne pourront pas avoir pour objet ou pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale ou permanente de l’entreprise.
Enfin, l’évaluation de l’expérimentation devra se pencher sur les nouvelles compétences reconnues aux partenaires sociaux de branche depuis l’ordonnance Travail du 22 septembre 2017.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. J’émets un avis favorable sur cet amendement, qui autorise l’expérimentation tout en l’encadrant plus strictement.
M. le président. En conséquence, l’article 29 bis est ainsi rédigé et les amendements nos 523, 146 rectifié bis, 282, 283 et 147 rectifié ter n’ont plus d’objet.
L’amendement n° 523, présenté par M. Henno, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
1° Supprimer les mots :
jusqu’au 31 décembre 2021
2° Compléter cet alinéa par les mots :
dans les secteurs définis par décret avant le 30 juin 2019
II. – Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Cette expérimentation a lieu du 1er juillet 2019 au 30 juin 2022.
III. – Alinéa 2
1° Remplacer la date :
31 décembre 2021
par la date :
30 juin 2022
2° Compléter cet alinéa par les mots :
, en lien avec les négociations de branche sur la qualité de l’emploi conformément au 7° de l’article L. 2253-1 du code du travail, dans les secteurs concernés
L’amendement n° 146 rectifié bis, présenté par Mme Gruny, MM. Perrin, Raison et Lefèvre, Mmes Micouleau et Imbert, MM. Brisson et Savary, Mmes Deseyne et Garriaud-Maylam, MM. Vaspart, Pierre et Daubresse, Mmes Lopez et Deroche, M. Magras, Mmes Delmont-Koropoulis et A.M. Bertrand, MM. Émorine, Mandelli, Laménie, Revet, Sido, Charon et Poniatowski et Mmes Lamure et Lherbier, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par les mots :
, dès lors que ledit contrat n’a pas pour effet de pourvoir durablement un emploi permanent au sein de l’entreprise
L’amendement n° 282, présenté par M. Tourenne, Mme Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par les mots :
absents pour raison de congés ou d’absence non consécutive à un licenciement
L’amendement n° 283, présenté par M. Tourenne, Mme Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Ce type de contrat ne peut excéder une durée fixée par décret.
L’amendement n° 147 rectifié ter, présenté par Mme Gruny, MM. Perrin, Raison et Lefèvre, Mmes Micouleau et Imbert, MM. Brisson et Savary, Mmes Deseyne et Garriaud-Maylam, MM. Vaspart, Pierre et Daubresse, Mmes Lopez et Deroche, M. Magras, Mmes Delmont-Koropoulis et A.M. Bertrand, MM. Émorine, Mandelli, Laménie, Revet, Sido, Charon et Poniatowski et Mmes Lamure et Lherbier, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… - À titre expérimental et par dérogation au 1° de l’article L. 1251-6 du code du travail, un même contrat de mission peut être conclu, jusqu’au 31 décembre 2021, pour remplacer plusieurs salariés.
Le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de cette expérimentation avant le 31 décembre 2021. Ce rapport évalue notamment les effets de l’expérimentation sur la fréquence de la conclusion de contrats de mission et sur l’allongement de la durée de ces contrats.
Articles additionnels après l’article 29 bis
M. le président. L’amendement n° 99 rectifié quater, présenté par Mmes Gruny et Primas, M. Bonne, Mme Morhet-Richaud, M. Lefèvre, Mmes Lassarade et Imbert, M. Bascher, Mmes Lavarde, L. Darcos, Di Folco et Chauvin, MM. Brisson et D. Laurent, Mme Duranton, M. Revet, Mme Estrosi Sassone, MM. Pointereau, Cambon, Savary et Mouiller, Mmes Deseyne, Lanfranchi Dorgal et Bonfanti-Dossat, MM. de Legge, Paccaud, Charon et Schmitz, Mmes Troendlé et Garriaud-Maylam, MM. B. Fournier, Vaspart, Pierre, Savin et Daubresse, Mmes Lopez, Deromedi et Deroche, MM. Allizard, Cuypers, Leleux, Kennel, Chevrollier, Émorine, Rapin, Mandelli, Babary, Laménie, Vogel, Carle, Grand et Sido, Mmes Lamure et Bories et MM. Mayet et Gremillet, est ainsi libellé :
Après l’article 29 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 1242-2 du code du travail est ainsi modifié :
1° Au 3°, les mots : « ou emplois pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois » sont supprimés ;
2° Après le même 3°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Emplois relevant de certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, dans lesquels il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et des conditions de travail inhérentes à celle-ci, ne permettant pas notamment de prédéterminer le volume et la répartition de travail ; »
La parole est à Mme Christine Lavarde.
Mme Christine Lavarde. Le recours aux contrats d’usage dits « extras » est une nécessité, par exemple dans la branche de l’hôtellerie et de la restauration, afin de faire face aux fluctuations d’activité.
Une jurisprudence de la Cour de cassation de septembre 2008 considère que la seule qualification conventionnelle de « contrat d’extra » impose de rechercher, pour l’emploi considéré, non seulement s’il est effectivement d’usage de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée, mais également si le recours à des contrats successifs est justifié par des raisons objectives.
Or la preuve du caractère par nature temporaire de l’emploi est en réalité impossible à fournir. En effet, le recours aux extras est une nécessité liée à un besoin temporaire de main-d’œuvre résultant d’un événement particulier, par exemple une réception ou un mariage.
En revanche, les métiers qui sont confiés à ces salariés employés en extras – serveurs, maîtres d’hôtel – ne sont évidemment pas temporaires par nature. Aussi, faute de pouvoir apporter la preuve du caractère par nature temporaire de l’emploi, et même si l’employeur respecte strictement les dispositions conventionnelles, les juridictions requalifient le CDD en CDI et la relation de travail à temps partiel en temps complet.
Ces décisions aboutissent à des condamnations de plusieurs centaines de milliers d’euros.
Cet amendement, s’il était adopté, permettrait donc de définir dans le code du travail la notion d’emploi par nature temporaire dans les secteurs d’activité définis par décret ou accord de branche.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Monsieur le président, je sollicite l’avis du Gouvernement et reprendrai la parole après Mme la ministre, si le règlement le permet.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Il est défavorable.
Cet amendement vise à modifier les textes qui définissent les cas de recours aux CDD d’usage, notamment pour « contrecarrer » une jurisprudence de la Cour de cassation sur l’utilisation de ce type de contrats dans le secteur des hôtels, cafés, restaurants.
Je vous l’accorde, la réglementation sur le CDD d’usage est un peu complexe, car elle se situe au confluent des réglementations française et européenne, notamment avec la directive concernant les CDD.
Pour autant, je ne partage pas la lecture alarmiste du secteur des hôtels, cafés, restaurants.
En effet, la jurisprudence est plutôt mesurée et il existera toujours des cas d’espèce, quelle que soit la législation.
En outre, et c’est peut-être le point le plus important, la réforme récente a ouvert à la négociation des partenaires sociaux la question du calcul et de la suppression du délai de carence, ce qui est de nature à répondre à cette problématique.
C’est vraiment à l’échelon professionnel, par les négociations de branche, qu’il faut résoudre ces questions.
M. le président. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Madame la ministre, vous avez raison, les CDD d’usage sont extrêmement complexes et constituent une source d’insécurité juridique pour les employeurs.
Cela étant, les dispositions de cet amendement ont déjà donné lieu à de nombreuses discussions dans cet hémicycle. Je procéderai à un petit rappel historique très rapide.
En 2015, M. Macron, alors ministre de l’économie, estimait que le CDD d’usage devait être traité dans une loi relative au dialogue social.
En décembre 2015, un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, dressait un bilan très négatif du CDD d’usage et conseillait de se pencher en urgence sur ce dispositif.
En juillet 2017, M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État, prenait, au nom du Gouvernement, l’engagement de s’emparer du sujet, devant ma collègue Sophie Primas, qui est cosignataire de cet amendement.
Nous sommes aujourd’hui en 2018 et nous considérons que nous ne pouvons plus laisser planer cette incertitude sur le secteur économique, notamment si nous voulons effectivement améliorer notre compétitivité.
La commission a sollicité l’avis du Gouvernement, mais, à titre personnel, j’émets un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Madame la rapporteur, vous avez rappelé avec beaucoup de brio l’historique de cet amendement.
On entre ici dans la vraie vie, la réalité de terrain. Les CDD d’usage sont certes des contrats très particuliers, mais, notamment dans le domaine de l’hôtellerie et de la restauration, ils sont le seul moyen de pouvoir travailler et de faire face aux aléas des manifestations et de la clientèle selon les soirs.
Ce sont principalement les petits restaurants qui sont concernés, ceux qui résistent difficilement, entre autres en milieu rural. Ils ne peuvent pas établir un planning quarante-huit heures à l’avance et sont bien obligés de faire appel à des extras en fonction des besoins.
Il est donc préférable d’autoriser ces embauches, certes précaires, mais qui permettent de développer des activités et d’apporter une valeur ajoutée.
Je vous remercie d’avoir émis un avis favorable à titre personnel, madame la rapporteur, et j’invite mes collègues à voter en faveur de cet amendement.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 29 bis.
L’amendement n° 445, présenté par M. Morisset, est ainsi libellé :
Après l’article 29 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 1244-2-2 du code du travail est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« … – Dans toutes les branches ou entreprises où l’emploi à caractère saisonnier est autorisé, malgré la demande de reconduction formulée par le salarié, la clause de reconduction ne peut pas s’appliquer si l’entreprise ne dispose pas du volume d’heures suffisant à proposer au salarié demandeur. Le contrat a pris fin la saison précédente. L’entreprise ne peut pas être sanctionnée. »
La parole est à M. Jean-Marie Morisset.
M. Jean-Marie Morisset. Cet amendement évoque la situation des branches où l’emploi saisonnier est particulièrement développé.
L’arrêté du 5 mai 2017 a listé les dix-sept branches concernées, soumises aux règles de l’ordonnance d’avril 2017 concernant l’ancienneté ou la reconduction des contrats.
Toutefois, de nombreux secteurs d’activité non compris dans la liste de l’arrêté sont amenés à employer un nombre important de salariés sous contrat saisonnier. C’est le cas notamment de celui des transports de passagers en navigation intérieure, activité exercée notamment par les bateliers du marais poitevin.
Pour l’ensemble de ces branches non incluses dans l’arrêté, il est nécessaire de clarifier la situation juridique, les conditions d’emploi et les fins de contrats des employés.
Certaines années, le nombre d’heures effectuées n’est pas suffisant pour répondre favorablement à la demande de reconduction des contrats formulée par les salariés.
Il me semble dès lors nécessaire, madame la ministre, soit de faire évoluer l’arrêté, soit d’inclure certaines activités pour s’adapter aux réalités du terrain et à l’activité des entreprises.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Je demande, là encore, l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. J’entends que la commission, à ce stade, n’a pas d’avis. La procédure voulant que le Gouvernement s’exprime après la commission, je ne voudrais pas que, deux fois de suite, la commission émette après moi un avis différent…
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, qui vise à traiter le cas des salariés saisonniers dans les secteurs où ce type d’emplois est particulièrement développé, mais est contraire aux textes en vigueur et à l’utilisation des CDD saisonniers.
L’article du code du travail que vous souhaitez compléter, monsieur le sénateur, dispose que, dans les secteurs où l’emploi saisonnier est très développé, le salarié bénéficie d’un « droit à la reconduction de son contrat » dès lors que l’« employeur dispose d’un emploi saisonnier ». Il s’agit d’une priorité à la réembauche, mais en aucun cas d’une obligation pour l’employeur de réembaucher.
La récente réforme portant sur les saisonniers a eu pour objet de sécuriser la situation de ces salariés, sans pour autant déstabiliser les employeurs.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Madame la ministre, quand la commission demande l’avis du Gouvernement, c’est parce qu’elle a besoin d’être éclairée. Pour autant, elle n’est pas obligée de se ranger à cet avis.
M. le président. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Je confirme les propos de M. le président de la commission. Sur le précédent amendement, j’ai pris soin de préciser que l’avis favorable était émis à titre personnel. Je me permettrai aussi de vous rappeler, madame la ministre, qu’il y a parfois des amendements gouvernementaux qui font couler de l’encre et qui ne satisfont pas tout le monde…
Pour en revenir au présent amendement, comme l’a dit tout à l’heure René-Paul Savary, nous sommes dans la vraie vie et, visiblement, certaines difficultés opérationnelles apparaissent sur le terrain, notamment à l’approche de la saison estivale.
Je vais toutefois me ranger à l’avis du Gouvernement et attendre le vote de l’assemblée.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Morisset, pour explication de vote.
M. Jean-Marie Morisset. Madame la ministre, votre argumentaire ne m’a pas convaincu. Il faut regarder l’historique de l’arrêté du 5 mai 2017. Pour les dix-sept branches listées, les règles du jeu sont claires quant à la reconduction du contrat. Je vois notamment que la branche jardineries et graineteries figure dans la liste. Je ne sais pas si elle compte beaucoup d’emplois saisonniers… Pourquoi telle branche est-elle inscrite sur la liste et pas telle autre ?
Nous souhaitons qu’une discussion puisse s’engager pour examiner la situation de certaines branches, tout particulièrement celle des transports en navigation intérieure pendant la saison touristique. Dans le marais poitevin, les bateliers éprouvent en ce moment beaucoup de difficultés pour reconduire leur contrat.
Il est évident que le chef d’entreprise se doit de réembaucher une personne qui a travaillé durant deux saisons. Si tel n’est pas le cas, il doit verser, entre autres, une indemnité de licenciement.
Nous devons rassurer nos entreprises sur cette situation juridique qui manque de clarté ou revoir l’arrêté pour éviter toute confusion.
Je souhaite avoir l’assurance que ce dernier sera de nouveau revu après une réflexion avec les branches concernées. Cela étant, je retire cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 445 est retiré.
L’amendement n° 462 rectifié, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 29 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa du I de l’article L. 2312-26 du code du travail, il est inséré un alinéa rédigé :
« Les modalités de recours aux contrats de travail à durée déterminée et aux salariés des entreprises de travail temporaire font l’objet d’une consultation annuelle du comité social et économique et d’un avis conforme. Les contrats ne peuvent être conclus que s’ils respectent les modalités de recours ayant reçu l’avis conforme du comité, qui peut saisir l’inspecteur du travail. »
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Avec cet amendement, nous vous proposons de renforcer les droits des salariés au sein des comités d’entreprise encore en place dans certaines entreprises et dans les nouveaux comités sociaux et économiques, les CSE, créés par les ordonnances dites « dialogue social ».
Je rencontre beaucoup de syndicalistes, madame la ministre, et ils sont unanimes : les nouveaux CSE constituent une grande avancée sociale !
Trêve de plaisanterie : ce serait bien que, à la fin de l’année, on puisse faire le bilan de la mise en place des CSE, car de nombreux syndicalistes sont inquiets.
Nous pensons que les représentantes et représentants des salariés doivent être consultés chaque année pour donner un avis conforme sur le recours aux entreprises de travail temporaire et aux contrats de travail à durée déterminée.
Désormais, les comités d’entreprise et les comités sociaux et économiques pourront formuler des propositions complémentaires ou alternatives au projet de l’employeur. Cette évolution permettrait, d’une part, de renforcer l’implication des salariés à la bonne marche de l’entreprise, via leurs représentants, et, d’autre part, de lutter véritablement contre le développement des contrats précaires.
Je rappelle que, selon la DARES, la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, la part des embauches en CDD a fortement progressé en vingt-cinq ans, passant de 76 % en 1993 à 87 % l’an dernier, et que, entre 2001 et 2017, la durée moyenne d’un CDD en France a été divisée par plus de deux, passant de 112 jours à 46 jours.
L’avis conforme du comité d’entreprise sur le recours aux formes précaires de contrats de travail permettrait de prévenir de manière efficace le développement de contrats atypiques au sein du collectif de travail, ce qui paraît d’autant plus nécessaire qu’un tiers des CDD ne dure qu’une seule journée.
Afin de prévenir de manière effective le développement de contrats atypiques au sein du collectif de travail, nous estimons que rendre obligatoire pour les employeurs l’avis conforme du comité social et économique serait une solution aux problèmes que nous rencontrons.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Le CSE doit faire l’objet de trois grandes consultations annuelles, dont l’une sur la politique sociale de l’entreprise, les questions de travail et d’emploi.
Nous considérons donc qu’il existe déjà une consultation sur le recours aux contrats de travail à durée déterminée et sur les contrats de mission conclus avec une entreprise de travail temporaire.
La commission émet par conséquent un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 462 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Chapitre II
Un nouveau cadre d’organisation de l’indemnisation du chômage
Section 1
Financement du régime d’assurance chômage
Article 30
I. – Le premier alinéa de l’article L. 5422-9 du code du travail est remplacé par six alinéas ainsi rédigés :
« L’allocation d’assurance peut être financée par :
« 1° Des contributions des employeurs ;
« 2° Des contributions des salariés ;
« 3° Des dons, legs et recettes diverses ;
« 4° Les impositions de toute nature qui sont affectées en tout ou partie à l’organisme mentionné au premier alinéa de l’article L. 5427-1.
« Les contributions mentionnées aux 1° et 2° sont assises sur les rémunérations brutes dans la limite d’un plafond. »
II. – Le titre II du livre IV de la cinquième partie du code du travail est ainsi modifié :
1° Au second alinéa de l’article L. 5422-10, les mots : « dans les mêmes conditions par les travailleurs » sont remplacés par les mots : « par les travailleurs, mentionnées aux 2° et 3° de l’article L. 5422-9, » ;
2° À la fin du premier alinéa de l’article L. 5422-14, les mots : « de la contribution incombant tant aux employeurs qu’aux salariés » sont remplacés par les mots : « des contributions mentionnées aux 1° et 2° de l’article L. 5422-9 » ;
3° L’article L. 5422-24 est ainsi modifié :
a) Au début, est ajoutée la mention : « I. – » ;
a bis) Au début, les mots : « Les contributions des employeurs et des salariés » sont remplacés par les mots : « Les ressources » ;
a ter) Les mots : « des sommes collectées » sont remplacés par les mots : « du montant des ressources précitées » ;
a quater) Les mots : « l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi » ;
b) Il est ajouté un II ainsi rédigé :
« II. – Pour l’application du I du présent article, l’appréciation des contributions des employeurs mentionnées au 1° de l’article L. 5422-9 s’entend avant application des exonérations et réductions applicables à ces contributions. » ;
4° L’article L. 5424-20 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, le mot : « involontairement » est supprimé et les mots : « prévue à l’article L. 5422-9 » sont remplacés par les mots : « des employeurs prévue au 1° de l’article L. 5422-9 » ;
b) Au deuxième alinéa, la référence : « à l’article L. 5422-9 » est remplacée par les références : « aux 1° à 3° de l’article L. 5422-9 » ;
c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les fins de contrat de travail des travailleurs relevant de la contribution spécifique prévue au présent article ne sont pas prises en compte au titre du 1° de l’article L. 5422-12 et la majoration ou la minoration de contributions qui résulte de l’application du même 1° n’est pas applicable à ces contrats. » ;
5° L’article L. 5427-1 est ainsi modifié :
a) Au troisième alinéa, les références : « aux articles L. 5422-9 et L. 5422-11 » sont remplacées par les références : « aux 1° à 3° de l’article L. 5422-9 et à l’article L. 5422-11 » ;
b) Au a, les mots : « l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 du présent code » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi » et la référence : « (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté » est remplacée par la référence : « (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 sur la coordination des systèmes de sécurité sociale » ;
c) Le c est abrogé ;
d) Au e, les mots : « l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 du présent code » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi » ;
6° À l’article L. 5429-2, les mots : « à l’article » sont remplacés par les mots : « au 2° de l’article » et, à la fin, les mots : « d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 3 750 euros » sont remplacés par les mots : « des peines prévues par l’article L. 244-6 du code de la sécurité sociale ».
III. – (Supprimé)
IV. – Au 5° de l’article L. 213-1 du code de la sécurité sociale, les références : « aux articles L. 5422-9, L. 5422-11 et L. 3253-18 » sont remplacées par les références : « à l’article L. 3253-18, aux 1° à 3° de l’article L. 5422-9 ainsi qu’à l’article L. 5422-11 ».
V. – À la première phrase du deuxième alinéa et au troisième alinéa de l’article L. 243-7 du code de la sécurité sociale, les mots : « les organismes mentionnés aux c et e de l’article L. 5427-1 du code du travail » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi ».
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 221 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 339 est présenté par M. Tourenne, Mme Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour défendre l’amendement n° 221.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Les annonces du Président de la République devant le Congrès à Versailles concernant son souhait de réformer l’assurance chômage perturbent la discussion de cet article 30.
La suppression des contributions chômage salariales et leur remplacement par l’augmentation du taux de la contribution sociale généralisée, la CSG, de 1,7 point lors du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 entraînent une bascule du financement de la sécurité sociale par les cotisations vers l’impôt, ce qui est contraire à l’esprit de la sécurité sociale.
Avec cette réforme, l’État prend désormais en charge 45 % du total des ressources de l’assurance chômage, si l’on ajoute les 13,6 milliards d’euros de contribution chômage des salariés et les 3 milliards d’euros de contribution chômage des employeurs, anciennement pris en charge par le CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi.
L’étatisation de l’assurance chômage est, selon nous, un danger, car elle va entraîner la disparition du paritarisme de la sécurité sociale, qui est pourtant l’un des fondements de notre système avec une gestion en commun des organismes sociaux par les représentants des salariés et ceux du patronat, du financement contributif à l’assurance chômage par le biais de cotisations salariales et patronales assises sur les salaires, élément fondamental de notre système d’assurance sociale, et, enfin, de notre système assurantiel, qui va basculer vers un système d’assistance dans lequel les prestations seront remplacées par des droits auxquels s’ajouteront des devoirs.
La reprise en main des ressources de la sécurité sociale par l’État ouvre la possibilité au gouvernement actuel et à ceux qui lui succèderont de réduire les prestations des salariés.
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour présenter l’amendement n° 339.
M. Jean-Louis Tourenne. Je partage ce qui vient d’être dit. J’ajoute que le remplacement des cotisations sociales par la CSG n’est pas simplement une modification de financement ; elle emporte aussi des conséquences sur le fond. C’est une autre logique qui se met en place.
D’une part, quand on paye des cotisations sociales, on s’ouvre un droit et, le jour où l’on est au chômage, on est indemnisé en fonction des droits acquis par ses cotisations.
Le financement par la CSG, c’est-à-dire par la fiscalité, comporte un certain nombre d’inconvénients.
Premièrement, c’est la fin du paritarisme. Normalement, ce sont les partenaires sociaux, directement intéressés par les conditions de travail et les difficultés qui peuvent exister, qui sont amenés à discuter.
Deuxièmement, les Français, qui ont souvent un regard critique à l’égard des prestations sociales, peuvent être facilement apaisés dès lors qu’on leur rappelle qu’il s’agit d’un droit ouvert en contrepartie de cotisations versées. À partir du moment où c’est la solidarité nationale qui s’exerce, j’ai peur que le regard porté sur le chômeur indemnisé ne soit nettement moins positif qu’il ne l’est actuellement.
Troisièmement, aucune indexation n’est prévue sur les sommes que l’État apportera à l’UNEDIC au titre de la part de CSG qui sera prélevée. Dès lors, on peut très bien imaginer que, dans des années difficiles, lorsqu’on est obligé de mettre en place une politique d’austérité, les crédits alloués par l’État à l’UNEDIC obéissent également aux choix effectués en matière de réduction des dépenses publiques.
On pourrait également parfaitement imaginer, comme pour la sécurité sociale, un régime de base, complété le cas échéant par une complémentaire à la charge des salariés.
En ayant la capacité de mener sa propre politique, l’UNEDIC a montré qu’elle était capable de mettre en place des dispositions contracycliques, en refusant de diminuer les prestations dans une période où les recettes diminuaient. L’État, lui, ne le fera jamais !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. J’ai bien écouté les propos, qui viennent d’être tenus. Le fait qu’ils aient été un peu longs, au regard du temps de parole imparti, prouve bien que nous avons besoin d’une phase de débats sur ces questions.
C’est d’ailleurs pour cela que la commission a fait le choix de ne pas clore ce sujet à l’occasion de l’examen d’un projet de loi ordinaire, mais de laisser la discussion se poursuivre lors de l’examen des futurs projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale.
Dans le droit fil de l’avis du Conseil d’État, nous avons donc réécrit l’article 30 du présent projet de loi, afin de laisser ouvertes toutes les pistes de financement de l’assurance chômage : cotisations salariales, cotisations patronales, recettes diverses, impositions de toute nature…
Je le répète, nous souhaitons que le débat reste ouvert en vue de l’examen des projets de lois financières pour 2019. C’est pourquoi l’avis de la commission est défavorable sur ces deux amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 221 et 339.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 733, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéas 21 et 22
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. C’est un amendement de coordination juridique, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 304 rectifié, présenté par Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 22
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par ailleurs, les contrats de travail des salariés relevant de la contribution spécifique précitée sont exclus d’une éventuelle modulation de contribution résultant de l’application du 2° de l’article L. 5422-12 du code du travail. » ;
La parole est à Mme Corinne Féret.
Mme Corinne Féret. Cet amendement porte sur les contrats de travail des salariés du spectacle vivant et enregistré qui relèvent de la contribution spécifique prévue à l’article L. 5424-20 du code du travail.
Ces contrats donnent déjà lieu, dans le cadre de l’application des annexes VIII et X à la convention d’assurance chômage applicable aux intermittents artistes et techniciens du spectacle, à une majoration de cotisation patronale liée à la nature et à la durée du contrat, ainsi qu’au motif de recours à un tel contrat.
Pour mémoire, la contribution patronale globale sur les contrats relevant de la contribution spécifique des annexes VIII et X précitées s’élève à 9,05 %, dont 4,05 % au titre de la contribution de droit commun et 5 % au titre de la majoration spécifique. Cette majoration de la part des contributions chômage à la charge des employeurs a été mise en place pour les CDD d’usage inférieurs à trois mois et a été prorogée, en octobre 2017, jusqu’au 31 mars 2019.
Dès lors, il nous semble inéquitable de soumettre ces contrats à la possibilité d’une modulation supplémentaire, qui serait fondée sur un même critère.
C’est pourquoi notre amendement vise à exclure ces contrats de la modulation résultant de l’application du 2° de l’article L. 5422-12 du code du travail.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement tend à exclure du champ du bonus-malus les contrats de travail des intermittents du spectacle. L’ouverture d’une nouvelle phase de dialogue social permettra peut-être de parler de nouveau du statut des intermittents du spectacle qui n’est pas évoqué dans le présent projet de loi.
Cela étant, la commission a supprimé l’article 29, qui met justement en place le dispositif du bonus-malus. De ce fait, cet amendement est sans objet au regard du texte de la commission. C’est pourquoi l’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le Gouvernement est défavorable aux amendements n° 733 et 304 rectifié, pas nécessairement pour les mêmes raisons pour ce qui concerne ce dernier amendement que celles qu’a avancées Mme la rapporteur…
Le Gouvernement est défavorable à la suppression de l’article 29 du projet de loi adoptée par la commission et il a évidemment le même avis sur l’amendement n° 733, qui opère une coordination liée à cette suppression.
M. le président. En conséquence, l’amendement n° 304 rectifié n’a plus d’objet.
Je mets aux voix l’article 30, modifié.
(L’article 30 est adopté.)
Article 31
Pour les années 2019 et 2020, la contribution globale versée au budget de Pôle emploi prévue à l’article L. 5422-24 du code du travail est calculée selon les modalités prévues au titre II du livre IV de la cinquième partie du même code dans sa rédaction antérieure à la présente loi. – (Adopté.)
Section 2 (suite)
La gouvernance
Article 32
I. – Au premier alinéa de l’article L. 5422-20 du code du travail, après les mots : « à l’exception des articles », sont insérés les mots : « de la présente section, du 4° de l’article L. 5422-9, des articles L. 5422-10, ».
II. – Après l’article L. 5422-20 du code du travail, sont insérés des articles L. 5422-20-1 et L. 5422-20-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 5422-20-1. – Préalablement à la négociation de l’accord mentionné à l’article L. 5422-20 dont l’agrément arrive à son terme ou à celle de l’accord mentionné à l’article L. 5422-25 et après concertation avec les organisations syndicales de salariés et les organisations professionnelles d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel, le Premier ministre transmet à ces organisations un document de cadrage.
« Ce document précise les objectifs de la négociation en ce qui concerne la trajectoire financière le délai dans lequel cette négociation doit aboutir, et le cas échéant, les objectifs d’évolution des règles du régime d’assurance chômage.
« Il détaille les hypothèses macroéconomiques sur lesquelles se fonde la trajectoire financière, ainsi que le montant prévisionnel, pour les trois exercices à venir, du produit des impositions de toute nature mentionnées au 4° de l’article L. 5422-9, sans préjudice des dispositions des prochaines lois de finances et lois de financement de la sécurité sociale.
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article.
« Art. L. 5422-20-2. – Pôle emploi et l’organisme chargé de la gestion de l’assurance chômage mentionné à l’article L. 5427-1 fournissent aux services de l’État toutes les informations nécessaires à l’élaboration du document de cadrage mentionné aux articles L. 5422-20-1 et L. 5422-25. »
III. – Au dernier alinéa de l’article L. 5422-21 du code du travail, les mots : « de l’autorité administrative » sont remplacés par les mots : « du Premier ministre ».
IV. – L’article L. 5422-22 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 5422-22. – Pour être agréés, les accords mentionnés à l’article L. 5422-20 doivent avoir été négociés et conclus sur le plan national et interprofessionnel entre organisations d’employeurs et de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel.
« Ces accords doivent être conformes aux dispositions légales et réglementaires en vigueur. Ils doivent également être compatibles avec la trajectoire financière et, le cas échéant, les objectifs d’évolution des règles du régime d’assurance chômage définis dans le document de cadrage mentionné à l’article L. 5422-20-1. »
V. – À l’article L. 5422-23 du code du travail, les mots : « ministre chargé de l’emploi » sont remplacés par les mots : « Premier ministre ».
VI. – L’article L. 5422-25 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 5422-25. – I. – L’organisme gestionnaire de l’assurance chômage mentionné à l’article L. 5427-1 transmet chaque année au Parlement et au Gouvernement, au plus tard le 30 juin, ses perspectives financières triennales, en précisant notamment les effets de la composante conjoncturelle de l’évolution de l’emploi salarié et du chômage sur l’équilibre financier du régime d’assurance chômage ainsi que les conséquences des principales modifications affectant le revenu de remplacement mentionné à l’article L. 5421-2 intervenues au cours des trois années précédentes.
« II (nouveau). – Au vu de ce rapport et des autres informations disponibles, le Gouvernement transmet au Parlement et aux partenaires sociaux gestionnaires de l’organisme mentionné au I du présent article, avant le 30 septembre, un rapport sur la situation financière de l’assurance chômage, précisant notamment les mesures mises en œuvre et celles susceptibles de contribuer à l’atteinte de l’équilibre financier à moyen terme.
« Si ce rapport fait état d’un écart significatif entre la trajectoire financière du régime d’assurance chômage et la trajectoire financière prévue par l’accord mentionné à l’article L. 5422-20, ou si la trajectoire financière décidée par le législateur dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques évolue significativement, le Premier ministre peut demander aux organisations d’employeurs et de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel de prendre les mesures nécessaires pour corriger cet écart en modifiant l’accord mentionné à l’article L. 5422-20, dans un délai qu’il détermine. À cette fin, le Premier ministre transmet un document de cadrage aux organisations précitées dans les conditions fixées à l’article L. 5422-20-1.
« Les dispositions de la section 5 sont applicables à la modification de l’accord mentionné à l’article L. 5422-20 opérée dans le cadre des dispositions du présent article.
« Lorsqu’aucun accord remplissant les conditions du second alinéa de l’article L. 5422-22 n’est conclu, le Premier ministre peut mettre fin à l’agrément de l’accord qu’il avait demandé aux organisations d’employeurs et de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel de modifier. Il est alors fait application du dernier alinéa de l’article L. 5422-20. »
VI bis (nouveau). – La section 6 du chapitre II du titre II du livre IV de la cinquième partie du code du travail est complétée par un article L. 5422-26 ainsi rédigé :
« Art. L. 5422-26. – Par dérogation à la date mentionnée à l’article L. 5422-25, le rapport mentionné à cet article est remis au Parlement et aux partenaires sociaux gestionnaires de l’organisme mentionné à l’article L. 5427-1 au plus tard quatre mois avant le terme de l’agrément de l’accord mentionné à l’article L. 5422-20.
« Le rapport comprend le projet de document d’orientation mentionné à l’article L. 5422-20-1. »
VII. – Le II de l’article L. 5424-22 du code du travail est ainsi modifié :
1° La première phrase du deuxième alinéa est complétée par les mots : « , en respectant les objectifs et la trajectoire financière définis dans le document de cadrage mentionné à l’article L. 5422-20-1 » ;
2° La seconde phrase du dernier alinéa est complétée par les mots : « , dans le respect des conditions définies au second alinéa de l’article L. 5422-22 ».
VIII. – L’article L. 5424-23 du code du travail est ainsi modifié :
1° À la première phrase du I et au IV, les mots : « l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi » ;
2° Au III, les mots : « le document de cadrage mentionné » sont remplacés par les mots : « les documents de cadrage mentionnés » et, après la référence : « article L. 5424-22 », est insérée la référence : « et à l’article L. 5422-20-1 ».
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.
Mme Laurence Cohen. La suppression des cotisations salariales et les exonérations de cotisations patronales ont entraîné une augmentation de la participation de l’État aux recettes de l’assurance chômage qui est désormais de plus de 40 %. L’État veut par conséquent participer aux négociations de l’UNEDIC à la hauteur de sa participation financière.
L’article 32 prévoit donc le renforcement du rôle de l’État, puisque le Premier ministre fixera dans une lettre de cadrage, avant les négociations collectives, la trajectoire financière du régime d’assurance chômage, le délai dans lequel ces négociations doivent aboutir et les objectifs d’évolution des règles de ce régime. Et si les résultats de la négociation sociale ne respectent pas ce document, le Gouvernement pourra fixer directement les règles de l’assurance chômage par décret.
Cette reprise en main par l’État du pilotage du régime d’assurance chômage mettrait fin à la gestion paritaire de l’UNEDIC. Il s’agit en fait d’un renversement sans précédent dans le fonctionnement de notre modèle social. Pour ce gouvernement, les actes divergent donc largement des paroles !
Dans ce cadre, les partenaires sociaux n’auront plus qu’un rôle subalterne : appliquer sans marges de manœuvre financières la feuille de route dictée par un gouvernement qui vante pourtant les mérites du dialogue social.
On soumet ainsi l’assurance chômage à une logique comptable, de la même manière que l’on gère le budget de l’assurance maladie sans tenir compte des besoins en matière de santé, ce que nous déplorons.
Sans possibilité d’agir sur le volet « recettes », il est à craindre que les partenaires sociaux ne soient enfermés dans un cercle vicieux, qui les amènera à réduire les dépenses, donc l’indemnisation des travailleurs privés d’emploi.
Pour conclure, les attaques contre notre sécurité sociale ne cessent de pleuvoir durant ce quinquennat, comme l’illustre l’amendement d’un député du groupe La République En Marche visant à retirer la référence à la sécurité sociale dans la Constitution. Déposée puis retirée, cette proposition semble aujourd’hui revenir par la fenêtre… Il est indispensable de se mobiliser face à ces régressions !
M. le président. L’amendement n° 222, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Depuis 1958, les organisations représentatives des salariés et des employeurs cogèrent le système de protection contre la privation involontaire d’emploi – c’est une création du général de Gaulle. La loi garantit le bon fonctionnement et le financement du régime d’assurance chômage.
Concrètement aujourd’hui, les syndicats de salariés et les employeurs négocient ensemble pour déterminer les objectifs et les principes de l’assurance chômage pour une durée limitée de deux ou trois ans.
Le document qui en découle, la convention d’assurance chômage, est soumis ensuite à l’agrément du ministère chargé de l’emploi, afin de vérifier sa conformité avec les normes juridiques et les actions menées en matière d’emploi. Enfin, l’agrément ministériel rend obligatoire la convention, qui s’applique directement aux salariés et aux employeurs.
Demain, avec cet article 32, le Premier ministre devra transmettre un document de cadrage aux partenaires sociaux, en amont de la négociation de la convention d’assurance chômage. Les syndicats de salariés et les organisations patronales négocieront les objectifs financiers, les délais et les évolutions des règles de l’assurance chômage prévus dans la lettre de cadrage du Premier ministre. Et si les résultats de la négociation sociale ne respectent pas ce document ou si la situation financière se détériore en cours d’année, le Premier ministre pourra retirer l’agrément de l’accord portant convention d’assurance chômage et prendre lui-même les mesures d’application du régime d’assurance chômage.
L’encadrement par l’État des négociations sociales de l’assurance chômage ne laisse presque plus de place aux syndicats et au patronat. Cette bascule vers le modèle bismarckien ne correspond pas à notre vision de la sécurité sociale.
Vous devez assumer votre choix de fiscaliser l’assurance chômage et de limiter l’intervention des partenaires sociaux – vous l’aurez compris, ce n’est pas le nôtre ! Comment estimer que la décision que prendra in fine le Premier ministre n’est pas une forme d’étatisation ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Il est tout à fait logique et nécessaire de s’interroger sur le paritarisme. La commission des affaires sociales, l’ensemble des parlementaires, le Gouvernement, les partenaires sociaux eux-mêmes le font.
Il est évident que, depuis 1958, le monde économique et social a profondément changé et il serait étrange de considérer que le Gouvernement devrait être complètement hors-jeu sur la question de l’assurance chômage. Il ne l’est d’ailleurs pas aujourd’hui.
Le projet de loi prévoit d’aller un peu plus loin en la matière et la question est de savoir où placer le curseur.
Le Gouvernement propose une procédure plus stricte que celle qui existe actuellement, puisqu’elle passe par l’envoi aux partenaires sociaux d’un document de cadrage. Il estime en effet que les règles de financement ont changé. Nous en avons déjà débattu lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 et nous aurons naturellement l’occasion d’en parler de nouveau.
De son côté, la commission a choisi de ne pas revenir sur l’article 32, mais elle a prévu que le Parlement sera informé et consulté sur les discussions. Pour ces raisons, son avis est défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Madame la rapporteur, madame la ministre, vous décidez donc que la CFDT, la CFTC, la CFE-CGC, la CGT et FO, pour le monde salarial, ainsi que le MEDEF, la CPME et l’U2P, du côté patronal, ne seront plus en situation de véritablement gérer l’assurance chômage de manière paritaire. C’est une décision lourde. Assumez-la !
Mme Laurence Cohen. Très bien !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 341, présenté par M. Tourenne, Mme Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 3, 7, 11, 16, 23 et 27
Remplacer les mots :
de cadrage
par les mots :
d’orientation
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Cet amendement vise à remplacer les mots « document de cadrage » par les mots « document d’orientation ». Cette modification n’est pas seulement une nuance sémantique. C’est une différence essentielle en termes de logique et de responsabilité.
Un document de cadrage fait référence à une figure géométrique qui enferme et qui ne laisse pas de place à l’initiative si les partenaires sociaux souhaitent aller au-delà de ce que prévoit le Gouvernement. Il limite considérablement le champ des possibles.
En revanche, un document d’orientation dessine des lignes de force, des perspectives, un horizon, une dynamique qui laissent toute sa place au paritarisme.
Or le paritarisme, système assez spécifique à la France, est une véritable réussite. Il favorise la négociation et l’accord entre les parties prenantes, ce qui permet de mieux faire accepter un certain nombre de décisions, qui apparaissent, sinon, comme arbitraires lorsqu’elles sont prises de façon unilatérale par le Gouvernement – quelques exemples récents le montrent bien…
Par conséquent, je souhaite que nous remplacions l’expression « document de cadrage » par les termes « document d’orientation ».
M. le président. L’amendement n° 343, présenté par M. Tourenne, Mme Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 11
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les organisations représentatives d’employeurs et de salariés signataires de ces accords exposent dans le courrier de demande d’agrément adressé au Premier ministre les suites qu’ils ont entendu donner aux objectifs d’évolution des règles du régime d’assurance chômage exposés par le Premier ministre dans le document d’orientation mentionné à l’article L. 5422-20-1. »
II. – Alinéas 13 à 21
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Cet amendement vise à amoindrir la mise sous tutelle de l’UNEDIC qui est prévue par l’article 32 du projet de loi via de multiples dispositions : contrôles permanents, révision annuelle des perspectives triennales… Il faut s’extraire de ce contrôle tatillon, afin de permettre au conseil d’administration de l’UNEDIC de s’exprimer pleinement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Il est vrai que l’amendement n° 341, qui vise à remplacer l’expression « document de cadrage » par les mots « document d’orientation », n’est pas uniquement sémantique, mais dans le domaine de l’assurance chômage, un document d’orientation ne serait pas suffisant, en raison de la dimension financière de la négociation. Je vous rappelle que la dette de l’UNEDIC est garantie par l’État, ce qui milite clairement en faveur d’un document de cadrage, même si cette expression peut paraître un peu rude. C’est pourquoi l’avis de la commission est défavorable.
En ce qui concerne l’amendement n° 343, qui a pour objet de supprimer plusieurs alinéas de l’article 32, dont l’alinéa 20 relatif à l’information du Parlement sur le projet de document de cadrage, il tend donc à supprimer un apport essentiel de la commission qui vise à renforcer la place du Parlement dans le pilotage financier de l’assurance chômage.
J’ajoute que cet amendement a aussi pour objet de supprimer le rapport annuel obligatoire de l’UNEDIC sur les perspectives pluriannuelles de l’assurance chômage. Certains ont pu considérer, à une époque, que ce rapport n’était pas suffisant pour éclairer correctement le Gouvernement et le Parlement. Cela étant, le dernier rapport – peut-être est-ce l’effet du présent projet de loi ? – est nettement plus complet et nous informe mieux sur l’organisation, le financement et la dette de l’UNEDIC.
En outre, compte tenu de la fiscalisation croissante des ressources de l’UNEDIC et de la garantie apportée par l’État sur la dette de celle-ci, il n’est pas déraisonnable d’autoriser le Gouvernement à imposer un document de cadrage, si les finances de l’assurance chômage connaissent un dérapage soudain.
La commission est donc également défavorable à l’amendement n° 343.
Enfin, je voudrais dire à M. Savoldelli qu’être favorable à la mise en place d’un document de cadrage ne signifie aucunement être défavorable aux négociations menées par les partenaires sociaux !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.
Je relève que le Gouvernement est cohérent : il souhaite justement que les partenaires sociaux puissent ouvrir de nouveau la négociation sur la convention d’assurance chômage. Ce sont eux qui fixeront, le cas échéant, de nouvelles règles d’indemnisation. Chacun est donc bien dans son rôle.
Je rappelle aussi que la dette de l’assurance chômage, qui atteint 34 milliards d’euros, est garantie par l’État. Pour cette seule raison, un document de cadrage se justifie. Le régime n’est pas complètement hors-sol et sa gestion engage la collectivité nationale.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. L’alinéa 3 de l’article 32 prévoit que le Premier ministre transmet aux organisations syndicales de salariés et aux organisations professionnelles d’employeurs représentatives à l’échelon national et interprofessionnel un document de cadrage, après concertation de ces mêmes organisations.
Je ne suis pas certain que les annonces récentes aient pu être précédées d’une telle concertation. Il faudra bien veiller, madame la ministre, à ce que le Premier ministre ne se retrouve pas hors la loi…
M. le président. L’amendement n° 342, présenté par M. Tourenne, Mme Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Remplacer les mots :
et, le cas échéant, les objectifs d’évolution des règles du régime d’assurance chômage définis
par le mot :
définie
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Cet amendement est de la même veine… Nous refusons que la tutelle de l’État sur l’UNEDIC et le paritarisme soit trop prégnante.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. L’avis de la commission sera lui aussi de la même veine, c’est-à-dire défavorable…
Le projet de loi prévoit que le document de cadrage comprend trois volets : la trajectoire financière de l’assurance chômage, les objectifs d’évolution des dispositifs à l’attention des demandeurs d’emploi et le délai fixé aux partenaires sociaux pour achever la négociation de la convention d’assurance chômage. Il est vrai que les événements de ces derniers jours peuvent laisser perplexe de ce point de vue…
Cet amendement vise à supprimer le deuxième volet du document de cadrage. Nous n’y sommes pas favorables, car il nous semble légitime que l’État puisse fixer des objectifs aux partenaires sociaux pour faire évoluer les dispositifs à l’attention des demandeurs d’emploi.
Je rappelle, en outre, qu’il ne s’agit là que d’une faculté, le document de cadrage pouvant très bien se limiter à fixer un objectif pour la trajectoire financière, sans intégrer ce deuxième volet.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. L’avis du Gouvernement est également défavorable.
Il est important que ce document de cadrage traite à la fois de la trajectoire financière et de l’évolution des règles du régime d’assurance chômage, parce que le Gouvernement doit pouvoir indiquer aux partenaires sociaux les sujets qui lui paraissent importants. Je pense notamment à la lutte contre la précarité excessive, sujet que nous intègrerons dans le prochain document.
Nous avons aussi inscrit, dans le projet de loi, que l’élaboration de ce document de cadrage doit se faire en concertation avec les partenaires sociaux. C’est une démarche interactive, à la fin de laquelle le Gouvernement prend évidemment ses responsabilités. Les partenaires sociaux prendront ensuite les leurs, en négociant le cas échéant de nouvelles règles d’indemnisation du chômage.
Dans les autres pays, il est très rare que l’État n’intervienne pas du tout dans l’assurance chômage. Parfois, le régime relève complètement de l’État, ce que nous ne souhaitons pas pour la France. Ailleurs, la gestion est tripartite, ce qui ne correspond pas non plus à notre volonté. Nous nous situons plutôt dans la catégorie des pays où l’État et les partenaires sociaux interagissent et où chacun reste dans son rôle.
Dans ce contexte, la lutte contre le chômage et la trajectoire budgétaire globale concernent bien évidemment l’État, mais les partenaires sociaux nous semblent mieux à même de fixer les règles à l’intérieur de ce cadre. Nous voulons renforcer cette interaction. C’est pourquoi nous avons prévu une concertation préalable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 32.
(L’article 32 est adopté.)
Article 33 (précédemment examiné)
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que l’article 33 a été examiné par priorité avant l’article 26.
Chapitre III
Un accompagnement plus personnalisé des demandeurs d’emploi et une meilleure effectivité des obligations liées à la recherche d’emploi
Section 1
Expérimentation territoriale visant à l’amélioration de l’accompagnement des demandeurs d’emploi
Article 34
À titre expérimental, dans les régions désignées par arrêté du ministre chargé de l’emploi, le maintien de l’inscription sur la liste des demandeurs d’emploi mentionnée à l’article L. 5411-1 du code du travail est subordonné, en complément des conditions fixées à l’article L. 5411-2 et au 2° de l’article L. 5411-10 du même code, au renseignement par les demandeurs d’emploi de l’état d’avancement de leur recherche d’emploi à l’occasion du renouvellement périodique de leur inscription. Au regard de leur particulière vulnérabilité, cette expérimentation doit accorder une vigilance spécifique aux situations des personnes handicapées et à leurs spécificités.
L’expérimentation est mise en œuvre pour une durée de dix-huit mois à compter du 1er juin 2019.
Un décret en Conseil d’État définit les modalités de l’expérimentation et de son évaluation. Les modalités de l’expérimentation tiennent compte du niveau de maîtrise de la langue française par les demandeurs d’emploi.
L’évaluation de l’expérimentation est transmise sans délai au Parlement.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 223 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 345 est présenté par M. Tourenne, Mme Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Fabien Gay, pour présenter l’amendement n° 223.
M. Fabien Gay. Cet amendement tend à supprimer l’article 34 de ce projet de loi qui instaure l’expérimentation d’un journal de bord, dans lequel les demandeurs d’emploi devront rendre compte mensuellement de leurs actions de recherche à l’occasion du nouvellement de leur demande d’allocation.
Une telle expérimentation vise à accroître le contrôle des demandeurs d’emploi, pourtant déjà très fort. Est-il nécessaire de rappeler que seulement 14 % de ceux qui perçoivent des allocations chômage ont été radiés l’an dernier ? En outre, sur ces 14 %, 60 % ne touchaient déjà plus d’allocations chômage !
La fraude à l’assurance chômage représente entre 40 et 60 millions d’euros. Vous venez d’annoncer, madame la ministre, que vous allez tripler les effectifs de contrôleurs, qui passeront de 200 à 600. Or je vous rappelle que l’évasion fiscale atteint, quant à elle, entre 60 et 80 milliards d’euros ! C’est plutôt le nombre des contrôleurs dédiés à ce sujet qui devrait tripler pour aller chercher l’argent qui se trouve dans les paradis fiscaux…
Renforcer le contrôle des chômeurs présente plusieurs conséquences négatives. D’abord, cela contribue à transformer les conseillers de Pôle emploi en agents de contrôle. Un tel contrôle demande un investissement temporel démesuré au regard du faible taux de fraude. De plus, le rôle des conseillers de Pôle emploi consiste à accompagner les demandeurs d’emploi, pas à constater mensuellement l’échec des actions de recherche de ces derniers.
Pointer du doigt les chômeurs et renforcer les contrôles à leur égard nous font oublier que le chômage est un droit, pas un cadeau accordé par l’État.
Chaque mois, plutôt que de recevoir la totalité de leur salaire, les salariés en consacrent une partie au financement de l’assurance chômage. Cette démarche leur permet de bénéficier d’un salaire différé, disponible dans l’éventualité où ils perdraient leur emploi.
Le droit à l’allocation chômage dépend donc des cotisations, et pas des efforts fournis par les demandeurs d’emploi pour retrouver un travail. Ceux qui bénéficient du chômage de plein droit ne devraient par conséquent pas avoir à prouver leurs actions de recherche.
Pour ces raisons, nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour présenter l’amendement n° 345.
M. Jean-Louis Tourenne. Finalement, le problème n’est pas tant dans la mise en place d’un journal de bord, que dans la suspicion qui sous-tend cette proposition.
Il faut quand même se rendre compte – chacun le sait dans cette enceinte – qu’être au chômage est une malédiction. Cette malédiction n’est pas seulement financière : augmenter les indemnisations ne changera pas l’idée que le salarié licencié se fait de lui-même, la perte d’estime ou son sentiment que le regard des autres est péjoratif. Tout cela a aussi une incidence sur la vie familiale. Le chômage entraîne donc une cohorte de dommages, qui vont s’acharner sur la personne concernée, mais aussi sur sa famille.
Par conséquent, tout ce qui vient renforcer l’idée que le chômeur serait responsable de sa situation et qu’il ne ferait pas tous les efforts nécessaires pour retrouver un emploi augmente les difficultés et la perte d’estime de soi.
Ce journal de bord servirait à mieux accompagner les demandeurs d’emploi. C’est une litote, tout le monde le sait bien ! Il s’agit en fait de vérifier que les recherches d’emploi ont été réelles.
Enfin, il existe tout de même une certaine contradiction : selon vous, madame la ministre, les agents de Pôle emploi devront vérifier le journal de bord, le contrôler et en discuter avec les demandeurs d’emploi, mais vous envisagez, dans le même temps, de supprimer 4 000 emplois. Quelle contradiction !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cher collègue, vous avez raison de le rappeler, le chômage est un traumatisme à la fois personnel et familial. Je crois important de le dire et je pense que nous partageons tous cette idée.
Par ailleurs, nous pourrions disserter sans fin de la conception que nous avons, les uns et les autres, d’un système d’assurance chômage et des droits et devoirs qui s’y attachent, mais il faudrait prévoir beaucoup plus de jours de séance que nous n’en disposons, sans être pour autant certains que nous trouverions un accord…
En ce qui concerne le journal de bord, objet de cet article et des amendements, la commission des affaires sociales considère la démarche intéressante.
Le numérique est aujourd’hui une réalité, mais connaît aussi des limites : l’utilisation de ces nouveaux outils peut être difficile pour certaines personnes ou sur des territoires particuliers. Nous avons d’ailleurs abordé cette question avec le directeur de Pôle emploi, lorsque nous l’avons reçu en audition. C’est pour cela que lancer une expérimentation est intéressant. La durée de dix-huit mois, validée par le directeur de Pôle emploi, devrait permettre de réaliser cette expérimentation dans de bonnes conditions.
Je crois pouvoir dire que nous sommes tous d’accord pour considérer que ce journal de bord n’est pas un outil de contrôle. Naturellement, l’utilisation du numérique ouvre la voie à de telles perspectives, que je dénonce, et c’est notre rôle, en tant que législateurs, de fixer la doctrine.
Nous pouvons aussi appréhender les outils numériques comme permettant de faciliter le travail des conseillers de Pôle emploi, qui sont confrontés tous les jours, comme le disait M. Tourenne, au traumatisme que constitue le chômage. Je profite d’ailleurs de cette occasion pour saluer leur travail.
En tout état de cause, la commission est défavorable à ces deux amendements de suppression.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à ces deux amendements. Il est important de préciser qu’il ne faut pas confondre deux sujets : l’expérimentation d’un journal de bord et le contrôle de la recherche d’emploi.
L’expérimentation d’un journal de bord est à l’origine une suggestion des conseillers de Pôle Emploi, qui ont constaté que, durant leurs rendez-vous avec les demandeurs d’emploi, ils passaient énormément de temps à récapituler les démarches que ceux-ci avaient faites. Le temps consacré à cet aspect administratif empiète sur celui du conseil proprement dit, qui est naturellement plus important.
Avec l’expérimentation, le demandeur d’emploi pourra remplir en ligne les différentes informations demandées avant son rendez-vous physique. Une grande majorité des demandeurs d’emploi utilisent couramment les outils numériques, mais il faudra naturellement aider ceux qui ne le peuvent pas. Une fois le journal de bord rempli, le conseiller référent pourra se concentrer sur les raisons pour lesquelles les démarches du demandeur d’emploi n’ont pas abouti, ce qui lui permettra d’individualiser la stratégie de recherche.
Il s’agit donc d’une amélioration qualitative, qui permettra d’augmenter le temps utile tant du point de vue du demandeur d’emploi que de son conseiller.
C’est pour ces raisons que Pôle emploi souhaite faire cette expérimentation, qui me paraît importante. Elle s’inspire d’ailleurs des pratiques des pays nordiques, où l’accompagnement est plus intensif et plus précoce. C’est le défi que nous devons relever.
Le contrôle de la recherche d’emploi est un autre sujet.
Il me semble que tout dispositif mutualisé et financé par des cotisations assurantielles ou de solidarité a une logique de droits et de devoirs. Les contrôles n’ont donc rien de choquant ni de nouveau.
Il est intéressant de noter que, sur les 300 000 demandeurs d’emploi contrôlés par Pôle emploi durant les deux dernières années, 66 % d’entre eux cherchaient très activement un emploi et 20 % n’en cherchaient plus, parce qu’ils avaient tout essayé et étaient découragés. On peut tout à fait comprendre que ces personnes aient baissé les bras, mais nous nous sommes rendu compte que les contrôles avaient finalement permis de remobiliser tant les demandeurs d’emploi eux-mêmes que les conseillers de Pôle emploi. Les contrôles ont permis d’identifier certaines difficultés et ont donc donné des résultats assez positifs.
Sur l’ensemble de ces personnes contrôlées, comme cela a été évoqué, il en reste en effet 14 % qui ne rencontrent pas de difficultés particulières et ne recherchent pas véritablement un emploi. Toutes n’étaient pas indemnisées, mais elles bénéficient tout de même des services de Pôle emploi, ce qui représente un coût pour la collectivité. C’est cette minorité qui décourage les autres demandeurs d’emploi et les entrepreneurs qui cherchent à recruter.
Je pense qu’il faut beaucoup mieux accompagner de façon précoce. C’est l’objet de l’expérimentation du journal de bord.
Par ailleurs, comme dans tout système collectif, il faut un contrôle des droits et des devoirs.
Vous avez raison, monsieur Gay, on ne peut pas demander au conseiller de Pôle emploi qui se lève tous les matins pour aider les demandeurs d’emploi d’être en même temps le contrôleur. En d’autres termes, on ne peut pas demander à la même personne d’être assistante sociale et policier. Les nombreux conseillers que j’ai rencontrés me l’ont dit. C’est pour cette raison que les contrôleurs seront des personnes différentes, pris sur d’autres effectifs.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour explication de vote.
Mme Sophie Taillé-Polian. Madame la ministre, vous dites qu’il faut beaucoup mieux accompagner de façon précoce les demandeurs d’emploi. Tout le monde en est d’accord. Mais alors que, lors du quinquennat précédent, environ 4 000 postes – tiens ! – avaient été créés à Pôle emploi pour favoriser l’accompagnement, notamment des publics les plus éloignés de l’emploi, les chiffres relatifs aux capacités d’accompagner rapidement les demandeurs d’emploi à la suite de leur inscription sont toujours inquiétants.
Je ne les ai pas en tête, mais le dernier rapport de l’IGAS montre qu’un tiers des demandeurs d’emploi très éloignés de l’emploi doit attendre plusieurs mois avant de rencontrer un conseiller de Pôle emploi. Si l’on veut beaucoup mieux accompagner de façon précoce les demandeurs d’emploi, notamment ceux qui sont dans un secteur en tension ou qui ont un faible niveau de qualification, la priorité, avant toute expérimentation, serait de surseoir à la suppression de postes que vous envisagez et de renforcer le service public de l’emploi.
Par ailleurs, j’ai bien conscience que la numérisation et la dématérialisation peuvent, à certains égards, apporter de la simplification. Cependant, aujourd’hui, à ma connaissance, aucune évaluation réelle de la dématérialisation de la procédure d’inscription à Pôle emploi n’a été vraiment mise en œuvre. Or j’ai observé dans certaines agences que certaines personnes rencontraient de grandes difficultés pour prendre en main l’outil mis à leur disposition. De surcroît, l’accompagnement des agents de Pôle emploi est réduit aux matinées, et les personnels en contrats aidés, contrats qui avaient été mis en place pour accomplir ce travail d’accompagnement à l’inscription dématérialisée, ont été remplacés, mais en moins grand nombre, par des personnes en service civique.
Il faut bien voir que cette dématérialisation a des conséquences, notamment pour les personnes les plus fragiles. Comme certains de mes collègues l’ont relevé, l’instauration de ce nouvel outil a un effet stigmatisant. Expérimentons, certes, mais, avant de mettre en place de nouvelles procédures dématérialisées, il faudrait déjà avoir une évaluation sérieuse de celle qui a été décidée pour l’inscription à Pôle emploi.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Je souscris à ce que vient de dire ma collègue. Moi aussi, madame la ministre, je me suis rendu dans une agence de Pôle emploi, celle d’Aulnay-sous-Bois, à la rencontre des salariés, qui m’ont présenté le journal de bord et m’ont confirmé que l’initiative venait d’eux-mêmes. Nous avons eu un échange très enrichissant pendant trois heures. Cette agence, située en plein 93, accueille des publics fragilisés, souvent victimes de la fracture numérique, qui est une réalité. C’est un problème, parce que l’on se trouve face à un public qui n’est pas familiarisé avec l’outil informatique. Une présence humaine est donc nécessaire.
Madame la ministre, pour ce qui me concerne, l’expérimentation ne me pose pas de problème, mais, en tant qu’habitant du Blanc-Mesnil, j’ai vu fermer un certain nombre de services publics, remplacés par un outil digital. Ainsi, à La Poste, on nous a vanté avec enthousiasme la présence d’un tel outil pour l’ensemble des services publics ; les agents de La Poste, qui ne sont pas formés pour une telle tâche, sont censés nous aider.
Aussi, j’espère que cette expérimentation n’a pas vocation à remplacer une présence physique et à tout dématérialiser, le chômeur étant laissé seul face à l’outil numérique pour chercher un emploi.
Je vous donne un exemple concret. On m’a fait la démonstration du journal de bord en effectuant une recherche d’emploi dans le domaine de la sécurité. Rien que pour le département, 10 000 ou 15 000 offres d’emploi sont apparues. J’ai alors demandé : comment faire pour s’y retrouver, si l’on est n’est pas accompagné physiquement ? Mes interlocuteurs, gênés, ont eu quelques difficultés à m’expliquer comment on pouvait affiner la recherche.
Madame la ministre, je le répète, nous ne sommes pas opposés à l’expérimentation, si elle a vocation à rendre plus rapide l’accueil physique. En revanche, si elle a pour finalité de diminuer les effectifs ou de fermer des agences de Pôle emploi, vous ferez sans nous !
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Être privé d’emploi suscite un sentiment d’inutilité sociale ce qui représente un lourd traumatisme, tout le monde en convient.
Un journal de bord, c’est un récit d’événements. Si j’ai bien compris, on va demander à celle ou à celui qui se trouve dans cette situation de faire un tel récit décrivant son parcours d’employabilité à un agent de Pôle emploi. Ce journal de bord est-il unilatéral ? Quel sera son effet ? Quelle trace laissera-t-il ? Toute personne au chômage étant un citoyen, une citoyenne à part entière, quelles conséquences peut-il y avoir en cas de dysfonctionnement ?
Madame la ministre, je vous fais cette remarque de façon sereine, apaisée. Vous supprimez des milliers de postes à Pôle emploi. Et vous venez de nous dire – je ne demande qu’à vous croire – que les agents qui vont tenir les journaux de bord ne vont pas contrôler les demandeurs d’emploi. Cela signifie par conséquent que, actuellement, des agents exercent des missions inefficaces puisqu’ils seront amenés à effectuer une nouvelle tâche… Allez-vous recruter des personnels qualifiés pour accompagner la mise en place d’un journal de bord, qui, à mon avis, ne doit pas être unilatéral ? Certaines personnes ont besoin d’un accompagnement au-delà de l’employabilité. Y aura-t-il un retour non pas sur le travail et les dysfonctionnements de Pôle emploi, mais sur les offres de la société ?
Même si, comme l’a dit Fabien Gay, l’expérimentation n’est pas un problème pour nous, ne pourrait-on pas la retarder quelque peu ?
De plus, nous avons parlé tout à l’heure des partenaires sociaux. Je pense que, sur un tel sujet, madame la rapporteur, leur avis nous aiderait à légiférer. On perdra peut-être quelques semaines, mais la question mérite d’être éclairée par l’expertise des partenaires sociaux préalablement à toute législation.
M. le président. La parole est à M. Michel Canevet, pour explication de vote.
M. Michel Canevet. Je ne voudrais pas que de ce débat ressorte une opinion négative de l’expérimentation. En effet, on met en avant les craintes, alors qu’il faut au contraire insister sur les bienfaits de la réforme. Nous le savons bien, étant donné le nombre de demandeurs d’emploi, la situation actuelle de l’accompagnement n’est pas satisfaisante ; il convient donc de l’améliorer, ce qui passe naturellement par l’utilisation des nouvelles technologies. Cependant, il importe de pouvoir accompagner ceux qui n’ont pas la chance de bien maîtriser ces outils.
Cette expérimentation doit en outre permettre de dégager du temps pour l’ensemble des collaborateurs de Pôle emploi, afin qu’ils puissent mieux assurer leur mission d’accueil et d’accompagnement des demandeurs d’emploi, ce qui nécessite de bien connaître les parcours.
Aujourd’hui, c’est certain, cette mission ne peut pas être réalisée dans les meilleures conditions. De nombreux employeurs s’étonnent d’ailleurs, au vu du nombre d’inscrits à Pôle emploi, de rencontrer des difficultés à trouver des collaborateurs en cas de besoin. Je connais particulièrement bien ce type de situation dans le secteur touristique sur mon territoire.
Il est nécessaire, à mon sens, que l’on puisse lancer l’expérimentation. Qui plus est, on parle du 1er juin 2019, donc la perspective n’est pas trop proche. Sans cela, nous n’arriverons pas à avancer. Voyons les choses plutôt de façon positive et optimiste.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 223 et 345.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 630, présenté par M. Rambaud, Mme Schillinger, MM. Lévrier, Patriat, Amiel, Bargeton, Karam, Marchand, Mohamed Soilihi, Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Alinéa 1, première phrase
Après le mot :
expérimental,
insérer les mots :
concourant notamment à un objectif d’accompagnement
La parole est à M. Martin Lévrier.
M. Martin Lévrier. Le débat que nous venons d’avoir était très important et très intéressant. Il montre bien que, quand on propose un outil nouveau, tout le monde n’en a pas la même perception. Cela peut être inquiétant, surtout pour des gens traumatisés. À l’évocation du clou précédemment, j’ai parlé du marteau ; là, j’ai l’impression qu’on voit cet outil comme un marteau qui sert à se taper sur les doigts. Il me paraît important de bien préciser que le marteau sert à enfoncer les clous. C’est pourquoi nous souhaitons ajouter dans le texte un objectif d’accompagnement des demandeurs d’emploi pour rassurer tout le monde.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement est satisfait par l’intitulé de la section 1. L’avis de la commission est par conséquent défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 734, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1, seconde phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
L’expérimentation tient compte de la situation des personnes handicapées et de la maîtrise de la langue française par les demandeurs d’emploi.
II. – Alinéa 3, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Il s’agit d’une simplification rédactionnelle.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 735, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
Le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de cette expérimentation avant le 1er mars 2021.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement a pour objet de préciser qu’il revient au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport d’évaluation de l’expérimentation.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Je suis défavorable à cet amendement, parce qu’un amendement relatif à la remise d’une évaluation de l’expérimentation du journal de bord a déjà été adopté en commission des affaires sociales à l’Assemblée nationale. De plus, le délai proposé dans le présent amendement est postérieur au terme de l’expérimentation. Il suffit de revenir au texte initial et tout est résolu. (Sourires.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 34, modifié.
(L’article 34 est adopté.)
Article additionnel après l’article 34
M. le président. L’amendement n° 631, présenté par M. Rambaud, Mme Schillinger, MM. Lévrier, Patriat, Amiel, Bargeton, Karam, Marchand, Mohamed Soilihi, Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Après l’article 34
Insérer un article ainsi rédigé :
Le code du travail est ainsi modifié :
1° L’article L. 5135-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les périodes de mise en situation en milieu professionnel sont encouragées notamment pour favoriser la découverte de métiers en tension ou d’avenir. » ;
2° L’article L. 5135-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les branches professionnelles encouragent les périodes de mise en situation en milieu professionnel. »
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Parmi les facteurs qui expliquent le taux de chômage élevé en France figure un problème d’appariement, et les chiffres le prouvent. Pour 2016, Pôle emploi a ainsi évalué le nombre d’emplois vacants, c’est-à-dire des recrutements abandonnés faute de candidats correspondant au poste, entre 200 000 et 330 000.
Au quotidien, nous avons tous des exemples de postes non pourvus dans nos départements : soudeurs, chaudronniers, plombiers, notamment, des métiers qui recrutent, aux salaires intéressants, mais qui souffrent d’une mauvaise image, peut-être.
L’amendement que nous présentons vise à donner un nouveau souffle à un dispositif utile face à cette situation, mais assez peu utilisé : la mise en situation en milieu professionnel. Ce dispositif permet des immersions de courte durée et de découverte. Quoi de mieux que vivre le métier au quotidien pour apprécier ses valeurs, son univers, pour le comprendre et savoir s’il nous convient ?
Ce dispositif devrait être axé non seulement sur les métiers en tension, mais aussi sur les métiers d’avenir, qui recruteront le plus, par exemple, les métiers de l’intelligence artificielle.
Nous pensons, par ailleurs, que les branches professionnelles devraient œuvrer à une meilleure connaissance de ce dispositif d’immersion, elles qui savent quels métiers souffrent injustement d’une mauvaise image ou constituent l’avenir de notre industrie.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement vise à encourager la promotion des périodes de mise en situation en milieu professionnel, dispositif intéressant datant de 2014. Cela étant, il semble satisfait par le droit en vigueur, plus précisément par l’article L. 5135-1 du code du travail.
J’en sollicite donc le retrait, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Les périodes de mise en situation en milieu professionnel constituent un outil intéressant. En 2017, plus de 400 000 ont été prescrites. Le Gouvernement soutient leur développement, en particulier dans les métiers en tension, mais pas que. Il ne faut pas être restrictif sur le sujet. Les structures de l’IAE, l’insertion par l’activité économique, qui en prescrivent déjà beaucoup, seront encore plus mobilisées.
Je pense néanmoins que le droit en vigueur est suffisant, donc je vous demande, madame le sénateur, de bien vouloir retirer votre amendement.
M. le président. Madame Schillinger, l’amendement n° 631 est-il maintenu ?
Mme Patricia Schillinger. Cet outil est très mal connu. J’ai pu le constater dans mon territoire. Il faudrait relancer l’information sur ce dispositif, notamment auprès des collectivités locales. Cela étant, je retire mon amendement.
M. le président. L’amendement n° 631 est retiré.
Section 2
Dispositions relatives aux droits et aux obligations des demandeurs d’emploi
Article 35
I. – L’article L. 5411-6-1 du code du travail est ainsi modifié :
1° À la première phrase et à la fin de la seconde phrase du premier alinéa, les mots : « l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi » et les mots : « l’institution précitée » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi » ;
2° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
a) (nouveau) Après le mot : « local, », sont insérés les mots : « la difficulté de recrutement pour certains métiers, » ;
b) (nouveau) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Il intègre, le cas échéant, le projet de reconversion professionnelle mentionné au 2° du II de l’article L. 5422-1. » ;
3° Au troisième alinéa, les mots : « l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi » ;
4° (nouveau) Il est ajouté deux alinéas ainsi rédigés :
« Il indique également les sanctions encourues en cas de manquement du demandeur d’emploi aux obligations mentionnées aux articles L. 5412-1 et L. 5426-2, ainsi que les voies et délais de recours en cas de contestation.
« À l’issue d’une période de douze mois suivant l’ouverture du droit à l’allocation d’assurance, Pôle emploi propose à l’allocataire une actualisation complète de son projet personnalisé d’accès à l’emploi en vue de favoriser son retour à l’emploi. »
II. – Les trois derniers alinéas de l’article L. 5411-6-3 du code du travail sont supprimés.
III. – L’article L. 5411-6-4 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 5411-6-4. – I. – Les dispositions de la présente section et du 2° de l’article L. 5412-1 ne peuvent obliger un demandeur d’emploi à accepter, pendant une période de deux années suivant son inscription sur la liste mentionnée à l’article L. 5411-1 :
« 1° Un niveau de salaire manifestement inférieur au salaire normalement pratiqué dans la région et pour la profession concernée, sans préjudice des autres dispositions légales et des stipulations conventionnelles en vigueur, notamment celles relatives au salaire minimum de croissance ;
« 2° Un emploi à temps partiel, lorsque le projet personnalisé d’accès à l’emploi prévoit que le ou les emplois recherchés sont à temps complet ;
« 3° Un emploi qui ne soit pas compatible avec ses qualifications et ses compétences professionnelles.
« II (nouveau). – Lorsque le demandeur d’emploi est inscrit sur la liste mentionnée à l’article L. 5411-1 depuis plus de deux ans, il ne peut refuser une offre d’emploi dont le salaire est supérieur au revenu de remplacement mentionné à l’article L. 5421-2.
« III (nouveau). – Les accords mentionnés à l’article L. 5422-20 peuvent adapter la période prévue aux I et II du présent article pour tenir compte des spécificités des demandeurs d’emploi. Cette période ne peut être inférieure à un an ni supérieure à quatre ans. »
M. le président. L’amendement n° 487, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article L. 5411-6-2 du code du travail est abrogé.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet amendement vise à réécrire l’article 35, afin, d’une part, de supprimer les dispositions qu’il introduit, et, d’autre part, d’abroger l’article L. 5411-6-2 du code du travail, qui définit la notion d’offre raisonnable d’emploi.
Lors du premier entretien à Pôle emploi, un demandeur d’emploi et son conseiller vont définir l’offre raisonnable d’emploi. Les critères de cet emploi, tels que la nature et les caractéristiques de celui-ci, la zone géographique privilégiée et le salaire attendu sont alors précisés.
Cette offre raisonnable d’emploi type sera différente selon les candidats et les profils. Sa détermination est censée permettre au demandeur d’emploi d’exprimer ses souhaits concernant l’emploi recherché.
En réalité, ce dispositif permet un contrôle accru du demandeur d’emploi. En effet, le présent projet de loi prévoit que celui-ci n’a le droit de refuser qu’une fois un emploi qui entrerait dans le cadre de son offre raisonnable. Au-delà, il pourra être radié du chômage, c’est-à-dire qu’il pourra perdre ses indemnités et se retrouver sans ressources. Autrement dit, l’offre raisonnable d’emploi permet de contraindre les demandeurs d’emploi à accepter des offres qui ne leur conviendraient pas, sous la menace d’une sanction.
Il est important de rappeler que l’allocation chômage constitue un salaire différé. Chaque mois, les salariés, plutôt que de toucher l’intégralité de leur salaire, en consacrent une partie au financement de l’assurance chômage, sous forme de cotisations sociales. Les indemnités versées par l’assurance chômage sont donc non pas un cadeau de l’État accordé aux chômeurs, mais tout simplement du salaire épargné par les salariés. Les demandeurs d’emploi devraient pouvoir disposer librement de leur salaire différé, sans avoir à justifier de leurs agissements.
Pour cette raison, nous demandons la réécriture de l’article 35 telle que proposée.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement, et ce pour deux raisons. D’abord, il écrase tous les apports de la commission à l’article 35 – nous aurons l’occasion d’y revenir lors de l’examen des prochains amendements. Ensuite, le projet personnalisé d’accès à l’emploi, le PPAE, doit rester un document fondamental qui consigne les droits et les devoirs du demandeur d’emploi, y compris l’offre raisonnable d’emploi.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 487.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 213 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 268 |
Pour l’adoption | 15 |
Contre | 253 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 366, présenté par M. Tourenne, Mme Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. On a tendance à considérer que, dans un secteur en tension, le demandeur d’emploi a une plus grande obligation d’accepter les offres qui lui sont faites. Certes, dans le projet personnalisé d’accès à l’emploi, fruit de la négociation avec le conseiller, la situation du marché local est déjà prise en considération, mais on ne peut quand même pas faire dépendre des sanctions éventuelles à l’égard d’un demandeur d’emploi de la situation du marché local. Cela voudrait dire que, selon l’endroit où l’on habite, on peut avoir des obligations différentes. Cela introduirait une inégalité entre tous les secteurs géographiques. Un menuisier, parce que le secteur de la boucherie est en tension, devrait-il accepter d’être boucher alors qu’il a une formation de menuisier ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Nous allons examiner plusieurs amendements sur cette offre raisonnable d’emploi, un dispositif de 2008 qui visait précisément à mettre en adéquation la demande avec l’offre, notamment pour ce qui concerne les secteurs en tension.
L’alinéa 4 de l’article 35 vise bien une information du demandeur d’emploi à l’occasion de la mise en place du PPAE, ce qui nous semble nécessaire, notamment parce que nous sommes en période de croissance. Or, nous le savons, l’un des freins à une amélioration de cette croissance, ce sont aussi les difficultés à mettre en adéquation les secteurs en tension avec les demandeurs d’emploi.
Je le répète, c’est une information qui est faite à l’occasion de l’élaboration du PPAE. L’avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 367, présenté par M. Tourenne, Mme Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Je prie pour que cet amendement subisse le même sort. (Sourires.)
Jusqu’à présent, le projet personnalisé d’accès à l’emploi se négocie avec Pôle emploi, et il définit les conditions dans lesquelles l’emploi doit être accepté, l’intéressé indiquant lui-même quelles sont ses aspirations, ses affinités. Il s’agit de bâtir ensemble un projet en fonction du marché local.
Ce projet est valable pendant deux ans. Si, pendant cette période, aucune offre ne correspond à ce projet, le demandeur d’emploi n’est pas obligé d’en accepter une. Dans le projet de loi, il est proposé une actualisation du projet personnalisé d’accès à l’emploi au bout d’un an. On imagine bien que, à l’issue de ce laps de temps, Pôle emploi attend que le demandeur d’emploi revoie ses exigences à la baisse, accepte, son projet ayant été modifié et ne correspondant plus tout à fait à ses aspirations premières, l’emploi qui lui sera proposé sous la menace d’une sanction éventuelle pour refus d’une offre réelle et sérieuse.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Je pensais que vous prendriez plus de temps pour expliquer cet amendement, monsieur Tourenne. Pour ma part, je vais prendre le temps de l’explication. Jusque-là, le dispositif était très prescriptif, peut-être trop dans le détail. Les statistiques ont montré que sa mise en application n’avait pas été à la hauteur des enjeux louables mis en avant en 2008.
Avec ce projet de loi, nous avons fait le choix, en réécrivant l’article 35, de supprimer les différents paliers précis et contraignants qui existaient auparavant. Nous avons prévu les droits et devoirs du demandeur d’emploi sur trois étapes : l’inscription, douze mois et vingt-quatre mois après celle-ci.
Pour ce qui concerne l’inscription, nous avons été mis en minorité. J’espère que ce ne sera pas le cas à propos de la période de douze mois à l’issue de laquelle nous proposons une refonte complète du PPAE, qui, je le rappelle, est un document contractuel négocié entre le conseiller de Pôle emploi et le demandeur d’emploi. À cette étape, on peut se réinterroger sur la situation du demandeur d’emploi et actualiser le PPAE avec un certain nombre de nouvelles modalités qui seront discutées entre le conseiller et le demandeur d’emploi.
L’avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Qu’est-ce que le PPAE ? C’est un document contractuel élaboré conjointement par le demandeur d’emploi et Pôle emploi, dans une logique de droits et de devoirs.
Il faut revenir à l’objectif de notre réforme concernant l’offre raisonnable d’emploi, l’ORE. Nous sommes dans une logique de simplification, et, surtout, de personnalisation, sortant d’un dispositif mécanique, qui était peu opérationnel et peu compréhensible. Prévoir une actualisation automatique au bout de douze mois est tout aussi mécanique et ne permet pas la personnalisation. Pour certains, un délai plus court suffira, tandis que d’autres auront besoin d’un délai plus long. À partir du moment où le pari est pris que c’est dans le dialogue que l’on construit la démarche, il ne faut pas mécaniser le dispositif. C’est la raison pour laquelle je suis favorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote.
M. Jean-Louis Tourenne. Madame la rapporteur, vous avez une connaissance parfaite du sujet – je suis admiratif –, mais vous avez aussi parfois une vision un peu angélique de la relation qui peut s’établir entre le demandeur d’emploi et Pôle emploi. Il ne faut pas oublier que pèse toujours la menace d’une sanction éventuelle sur le demandeur d’emploi. Lorsqu’on lui demande de revenir au bout d’un an pour revoir son projet personnalisé, il a forcément en tête l’idée qu’il devra abaisser ses exigences pour ne pas encourir la sanction qu’il redoute. À mon sens, mieux vaut en rester à deux ans et lui laisser du temps. Cela n’empêche pas qu’il puisse accepter au cours de cette période une proposition, même si elle ne correspond pas tout à fait à son projet.
Enfin, on a évoqué la suppression de 4 000 emplois à Pôle emploi. Or le PPAE exige du temps de la part des conseillers – beaucoup plus que le simple entretien –, sans compter le temps requis pour le journal de bord, qui demande beaucoup d’informations.
Je pense que ce projet n’est pas raisonnable. Il peut de surcroît être vécu comme une brimade supplémentaire par les demandeurs d’emploi. Or nous sommes tombés d’accord tout à l’heure pour reconnaître que le chômage était un traumatisme, voire parfois une malédiction. Aussi, n’en rajoutons pas !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 367.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires sociales.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 214 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 145 |
Contre | 198 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 368, présenté par M. Tourenne, Mme Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 16 et 17
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Cet amendement vise à supprimer notamment l’alinéa aux termes duquel, si le demandeur d’emploi reçoit après deux ans d’inactivité une offre qui comporte un salaire supérieur à son revenu de remplacement, et non à son salaire antérieur, il est tenu d’accepter cette proposition.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement s’inscrit dans la suite du précédent. Nous avons décidé, pour ainsi dire, de « cranter » le parcours du demandeur d’emploi par trois moments : lors de son inscription, douze mois et vingt-quatre mois après celle-ci. Nous avons fait le choix de prévoir que, à cette dernière étape, le système sera différent : le demandeur d’emploi sera contraint d’accepter un emploi dont le salaire est supérieur à l’allocation qu’il perçoit. Précisons cependant que l’article contient une souplesse qui me semble utile : il sera tenu compte de l’âge du demandeur d’emploi.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 368.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires sociales.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 215 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 344 |
Pour l’adoption | 135 |
Contre | 209 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’article 35, modifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires sociales.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 216 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 224 |
Pour l’adoption | 209 |
Contre | 15 |
Le Sénat a adopté.
Section 3
Dispositions relatives au transfert du contrôle de la recherche d’emploi et aux sanctions
Article 36
I. – L’article L. 5312-1 du code du travail est ainsi modifié :
1° Au 3°, les mots : « à ce titre » sont supprimés ;
2° Après le 4°, il est inséré un 4° bis ainsi rédigé :
« 4° bis Décider de la suppression du revenu de remplacement et du prononcé de la pénalité administrative dans les conditions prévues à la section 2 du chapitre VI du titre II du livre IV de la présente partie ; ».
II. – L’article L. 5412-1 du code du travail est ainsi modifié :
1° Au 1°, les mots : « ou de reprendre » sont remplacés par les mots : « , reprendre ou développer » ;
2° Le b du 3° est ainsi rédigé :
« b) Est absente à une action de formation ou d’aide à la recherche d’une activité professionnelle, ou abandonne cette action ; »
3° Au début du c du même 3°, les mots : « Refuse de répondre à toute convocation des » sont remplacés par les mots : « Est absente à un rendez-vous avec les » ;
4° Au d du même 3°, les mots : « auprès des services médicaux de main d’œuvre » sont supprimés ;
5° Le e du même 3° est complété par les mots : « s’inscrivant dans le cadre du projet d’accès personnalisé à l’emploi » ;
6° Le f du même 3° est ainsi rédigé :
« f) Ne peut justifier, sans motif légitime, de la réalité des démarches mentionnée au II de l’article L. 5426-1-2. »
7° (nouveau) Sont ajoutés quatre alinéas ainsi rédigés :
« Le demandeur d’emploi à l’égard duquel est susceptible d’être prononcée une radiation est informé préalablement des faits qui lui sont reprochés, afin qu’il puisse présenter ses observations écrites et orales, le cas échéant assisté d’une personne de son choix, dans un délai d’un mois.
« En cas de premier manquement du demandeur d’emploi, la durée de la radiation ne peut être supérieure à un mois.
« Pour fixer cette durée, Pôle emploi prend en compte les circonstances et la gravité du manquement, le comportement du demandeur d’emploi ainsi que ses ressources, en particulier s’il bénéficie d’une allocation de solidarité, et ses charges.
« Pôle emploi peut renforcer l’accompagnement du demandeur d’emploi qui se réinscrit sur la liste mentionnée à l’article L. 5411-1 après une radiation pour un manquement mentionné au présent article. » ;
8° (nouveau) – L’article L. 5412-2 du code du travail est abrogé.
III. – Au premier alinéa de l’article L. 5421-3 du code du travail, les mots : « ou de reprendre » sont remplacés par les mots : « , reprendre ou développer ».
IV. – Le chapitre VI du titre II du livre IV de la cinquième partie du code du travail est ainsi modifié :
1° Au début de l’intitulé de la section 2, les mots : « Réduction, suspension ou » sont supprimés ;
2° Le premier alinéa de l’article L. 5426-2 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le revenu de remplacement est supprimé pendant une période comprise entre un et six mois en cas de manquement répété aux obligations mentionnées aux 1° à 3° de l’article L. 5412-1.
« Il est supprimé définitivement lorsque la personne a fait de fausses déclarations pour être ou demeurer inscrite sur la liste mentionnée à l’article L. 5411-1, sauf en cas d’activité non déclarée d’une durée très brève. » ;
3° L’article L. 5426-5 est ainsi modifié :
a) À la fin du premier alinéa, les mots : « l’autorité administrative » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi » ;
b) (nouveau) À la fin du second alinéa, le montant : « 3 000 euros » est remplacé par le montant : « 10 000 euros » ;
3° bis (nouveau) Aux deuxième et dernier alinéas de l’article L. 5426-7, les mots : « l’autorité administrative » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi » ;
4° L’article L. 5426-6 est ainsi modifié :
a) À la fin de la première phrase, les mots : « l’État comme une créance étrangère à l’impôt et au domaine » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi » ;
b) La deuxième phrase est ainsi rédigée : « Les dispositions de l’article L. 5426-8-2 sont applicables au recouvrement de la pénalité. » ;
5° L’article L. 5426-9 est ainsi modifié :
a) Au 2°, après le mot : « lesquelles », sont insérés les mots : « et la durée pendant laquelle » et les mots : « ou réduit » sont supprimés ;
b) Au 3°, les mots : « l’institution prévue à l’article L. 5312-1 » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi » ;
c) Au 4°, les mots : « l’autorité administrative prononce » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi prononce et recouvre ».
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 488 rectifié, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéas 3, 4, 7, 8, 9, 12, 13 et 21 à 36
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Je ne doute pas que cet amendement fera l’objet d’un scrutin public ! Il vise à supprimer les dispositions de l’article 36 qui créent de nouvelles sanctions à l’égard des chômeurs.
Cet article durcit les cas de suspension de l’allocation chômage. Par exemple, la simple absence du demandeur d’emploi à un rendez-vous ou à une formation pourra être sanctionnée, sans qu’il soit précisé s’il peut justifier son absence ou si certains motifs sont acceptables, un problème de santé par exemple. Actuellement le demandeur d’emploi ne peut être sanctionné qu’en cas de refus de se présenter.
Cet article durcit également le contrôle des chômeurs, puisqu’un renforcement de l’accompagnement du demandeur d’emploi peut être décidé lorsque ce dernier a fait l’objet d’une radiation. Celle-ci pourra d’ailleurs durer entre un et six mois en cas de manquement ; elle pourra même être définitive.
Enfin, les sanctions pécuniaires sont renforcées, puisque leur montant maximal passe de 3 000 à 10 000 euros.
L’application de ces nouvelles sanctions va nécessairement entraîner un surcroît d’activité pour les conseillers de Pôle emploi, alors même que ce projet de loi prévoit une diminution du personnel et une baisse des moyens.
À ce sujet, il paraît important de rappeler que la fraude à Pôle emploi représente seulement 0,5 % des allocations versées, selon un rapport de la Délégation nationale à la lutte contre la fraude. Il est certain que le temps et l’argent investis dans cette chasse aux fraudeurs par Pôle emploi pourraient être employés de manière plus productive, par exemple en accompagnant et en conseillant les demandeurs d’emploi, afin de leur permettre de réaliser leur projet professionnel. C’est d’ailleurs le seul et unique rôle que les conseillers de Pôle emploi devraient assumer, puisque l’allocation chômage est non pas une faveur que l’État accorde au demandeur d’emploi, mais bien un droit tiré des cotisations sociales.
Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression partielle de l’article 36.
M. le président. L’amendement n° 738, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer les mots :
à la section 2
par les mots :
aux sections 2 et 3
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination juridique.
M. le président. L’amendement n° 369, présenté par M. Tourenne, Mme Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Supprimer les mots :
est absente à une action de formation ou d’aide à la recherche d’une activité professionnelle, ou
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Cet amendement a pour objet de rendre un peu plus proportionnelles les sanctions possibles.
Aux termes de l’article 36, est passible de sanctions le fait d’être absent à une action de formation ou d’aide à la recherche d’une activité professionnelle, ou d’abandonner cette action. Or les deux cas de figure ne sont pas identiques. On peut être absent à une formation et continuer à la suivre ; c’est parfaitement pardonnable et le demandeur d’emploi peut avoir de bonnes raisons. Même s’il n’y en a pas, il ne s’agit que d’une partie de la formation. En revanche, abandonner une formation suppose que l’on est largement coupable de ne pas avoir rempli un engagement que l’on a pris.
C’est pourquoi j’estime nécessaire de supprimer de cet article les mots : « est absente à une action de formation ou d’aide à la recherche d’une activité professionnelle, ou ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Nous sommes dans une logique de droits et devoirs pour le demandeur d’emploi. C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 488 rectifié.
Quant à l’amendement n° 369, la rédaction retenue par la commission est certes différente de celle du texte initial, mais elle vise à simplifier celui-ci. Peut-être, monsieur Tourenne, contrairement à la commission, n’étiez-vous pas d’accord avec la proposition du Gouvernement. J’émets également un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Avis favorable sur l’amendement n° 738 et défavorable sur les amendements nos 488 rectifié et 369.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 488 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires sociales.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 217 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 268 |
Pour l’adoption | 15 |
Contre | 253 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Rappel au règlement
Mme Laurence Cohen. Mon intervention se fonde sur l’article 36 de du règlement et a pour objet l’organisation de nos travaux.
Nous sommes en session extraordinaire ; le Gouvernement, voire le Président de la République, est donc responsable de cette organisation. Nous examinons cette semaine un projet de loi extrêmement important ; or la discussion a été amputée, lundi par la réunion du Congrès, hier par l’examen de deux autres textes. Notre débat est donc morcelé.
En outre, aujourd’hui, il manque des sénateurs dans l’hémicycle, notamment sur les travées de droite. En cette veille de 14 juillet, des collègues ont des obligations dans leurs circonscriptions ; je n’en dirai pas plus.
En tout cas, cette situation pose des problèmes quant au déroulement de notre débat et nous soumet à une pression extrêmement importante. Et la commission recourt à des scrutins publics pour éviter que des amendements que nous présentons ne soient adoptés. Ce n’est pas acceptable !
Il est prévu que la séance soit levée à dix-huit heures. Allons-nous poursuivre ainsi nos débats ? Que faire concrètement ? Pouvons-nous continuer un débat serein et approfondi au cours duquel chacun se respecte ?
Cela étant, je salue le travail et le respect indéniables de la commission et des rapporteurs, qui, pour chaque amendement, étaient l’avis de la commission par des explications, que l’on partage ou non.
Alors, que faire ? Si l’on doit avoir scrutin public sur scrutin public, on y passera la journée et le débat y perdra en consistance.
L’organisation de nos travaux en cette année parlementaire ne peut permettre les débats sereins et constructifs que l’on est en droit d’attendre ; c’est non pas la Haute Assemblée qui en porte la responsabilité, mais bien le Gouvernement !
M. le président. Acte vous est donné de ce rappel au règlement, ma chère collègue.
Article 36 (suite)
M. le président. Toujours à l’article 36, je mets aux voix l’amendement n° 738.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. L’amendement n° 370, présenté par M. Tourenne, Mme Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Aucune sanction ne peut être prononcée sans un recours préalable à la médiation.
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. La procédure en matière de sanctions prononcées après le constat d’un manquement est modifiée par le présent texte. Jusqu’à présent, Pôle emploi, après constatation de manquements éventuels, soumettait une décision au préfet, qui décidait de l’approuver ou non. Désormais, Pôle emploi aura la responsabilité, non seulement de constater l’infraction, mais aussi d’appliquer la sanction, qui peut être la suspension ou encore la radiation pour un mois du demandeur d’emploi.
Lorsqu’une telle sanction est appliquée, l’ensemble des prestations fournies sont suspendues. Or, derrière le chômeur qui n’a pas rempli l’ensemble de ses obligations, il y a une famille, des enfants ! L’application des sanctions ne peut donc se faire ainsi, de façon mécanique. Il faut pouvoir mieux comprendre, d’une part, les raisons qui ont poussé le chômeur à ne pas respecter ses obligations et, d’autre part, la situation dans laquelle se trouvera sa famille.
C’est pourquoi il nous paraît nécessaire que se tienne, entre le constat du manquement et le prononcé de la sanction, une médiation qui permettrait de comprendre la situation, d’aménager la sanction et de faire une proposition.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Monsieur Tourenne, vous avez raison de rappeler combien est important le respect du principe du contradictoire. Il permet de trouver des solutions, mais il offre surtout un temps de parole à quelqu’un qui rencontre des difficultés. Ainsi, on peut adapter la solution à un contexte qui, d’un point de vue familial et social, peut être dramatique.
Cela étant, je rappelle que Pôle emploi dispose déjà d’un médiateur, qui peut être saisi. Encore faut-il que l’information à ce sujet soit connue ; ce pourrait être l’objet d’un autre débat. Cet amendement vise, quant à lui, à rendre la médiation obligatoire avant toute sanction prononcée par Pôle emploi. Je ne suis pas certaine que, d’un point de vue opérationnel, cette mesure soit possible et facile à mettre en œuvre.
En conséquence, par souci de simplification, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 36, modifié.
(L’article 36 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 36
M. le président. L’amendement n° 347 rectifié, présenté par M. Tourenne, Mme Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 36
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 5312-4 du code du travail est ainsi modifié :
1° Après le 5°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Cinq représentants des usagers de Pôle emploi. » ;
2° L’avant-dernier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les représentants des usagers de Pôle emploi sont désignés par les organisations syndicales et les associations ayant spécifiquement pour objet la défense des intérêts des personnes en recherche d’emploi, dans les conditions déterminées par arrêté du ministre chargé de l’emploi. Ils ne sont pas rémunérés et aucun frais lié au fonctionnement du conseil d’administration ne peut être pris en charge par une personne publique. »
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Cet amendement vise à garantir la représentation des usagers au sein du conseil d’administration de Pôle emploi. En effet, ils sont tout de même les premiers concernés. Il faudrait par conséquent qu’ils aient la possibilité de s’exprimer dans les instances décisionnelles. Cela me paraît un minimum !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Nous avons déjà discuté en commission de ce point. Selon nous, les usagers sont déjà représentés au conseil d’administration de Pôle emploi parmi les organisations syndicales des salariés. De surcroît, si l’on ajoute cinq nouveaux sièges aux dix-neuf existants, on risque de bouleverser les équilibres du conseil d’administration. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 348, présenté par M. Tourenne, Mme Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 36
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 5426-8-1 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La répétition des sommes versées par erreur n’exclut pas que le demandeur d’emploi soit fondé à réclamer la réparation du préjudice qui a pu lui être causé par la faute de celui qui les lui a versées. »
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. C’est presque un one man show ! (Sourires.)
La chambre sociale de la Cour de cassation a retenu la caractérisation de la négligence fautive de l’organisme chargé de verser des allocations d’assurance chômage.
Lorsque des prestations sont versées à tort, leur bénéficiaire est amené à rembourser ces indus. Certes, ce remboursement peut faire l’objet de négociations et être étalé, mais il peut tout de même mettre le bénéficiaire dans une situation extrêmement délicate, infernale, parce que, ne disposant pas forcément de toute l’information nécessaire, celui-ci n’avait pas nécessairement eu conscience d’avoir perçu ces prestations à tort. Il a donc pu déjà dépenser l’argent.
Par ailleurs, il ne faut quand même pas négliger que, s’il y a faute, elle n’est pas uniquement le fait du bénéficiaire de cet argent ; il y a aussi faute de celui qui verse la prestation, parce qu’il n’a pas été suffisamment précautionneux et qu’il n’a pas fait montre de toute la diligence nécessaire pour éviter que cela ne se produise. Ne pas prendre en compte cette faute, c’est l’encourager à continuer !
Peut-être faudrait-il plutôt inciter le responsable à parfaire ses outils, afin que ces erreurs ne se produisent plus. D’ailleurs, le même type de problème se pose dans les départements pour le versement du RSA. À mes yeux, il est normal que la responsabilité de celui qui est chargé de verser les prestations soit engagée.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Il est vrai que les indus ont des enjeux importants, et qu’il est parfois très compliqué de résoudre le problème pour les personnes qui les subissent. Cela vaut pour l’assurance chômage comme pour le RSA ou d’autres dispositifs sociaux, d’autant que ces prestations ont comme bénéficiaires des personnes qui sont en grande difficulté, ce qui multiplie encore la complexité du problème.
Je pense que ces indus sont souvent causés par la complexité des règles ; j’invite donc tous les parlementaires à simplifier celles-ci au maximum pour que ce type de difficulté soit évité.
Au-delà, il me semble que cet amendement n’est pas justifié, du fait, précisément, que le principe de la responsabilité civile est d’ordre législatif et d’application générale. L’article 1240 du code civil pose le principe de la responsabilité du fait personnel ; en d’autres termes, quand une personne cause un préjudice à un tiers, elle doit indemniser la victime. Pôle emploi, comme personnalité morale de droit public, est concerné par ce dispositif.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement, non par principe, mais parce que le droit existant satisfait déjà son objet.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 348.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 36 bis
Après le premier alinéa de l’article L. 5422-4 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La notification de la décision relative à la demande en paiement de l’allocation d’assurance prise par Pôle emploi mentionne, à peine de nullité, les délais et voies de recours. » – (Adopté.)
Article 36 ter
(Supprimé)
M. le président. L’amendement n° 489, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Dans un délai de deux ans à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la réalité et les conséquences du non-recours aux droits en matière d’assurance chômage ainsi que les pistes envisagées pour résorber le phénomène.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Nous proposons, par cet amendement, de réintroduire un article inséré dans le projet de loi par l’Assemblée nationale et que les rapporteurs ont supprimé en commission.
De façon plus précise, l’article 36 ter résulte de l’adoption d’un amendement de notre collègue et ami Pierre Dharréville, député du groupe Gauche démocrate et républicaine. Celui-ci proposait qu’un rapport du Gouvernement sur le non-recours aux droits en matière d’assurance chômage soit remis au Parlement, et ce dans un délai de deux ans.
J’attire votre attention, mes chers collègues, sur la thématique de ce rapport. Nous connaissons bien la position de la majorité sénatoriale sur les rapports, mais celui-ci revêt – même si nous le disons chaque fois – un caractère particulier.
En effet, alors qu’une sorte de chasse aux sorcières est en train d’être amplifiée par le présent projet de loi, il nous semble qu’il pourrait être pertinent de connaître l’autre face, à savoir le non-recours aux droits.
Je vous invite d’ailleurs à lire l’ouvrage intitulé L’envers de la « fraude sociale », écrit par les chercheurs de l’Observatoire des non-recours aux droits et services, l’ODENORE, rattaché au CNRS.
Les raisons de ces non-recours sont multiples : un défaut d’information, des complexités administratives qui peuvent décourager les demandeurs, ou tout simplement la honte.
Je vous rappelle que le Défenseur des droits lui-même s’est inquiété de ces non-recours qui placent des personnes déjà précaires dans des situations encore plus délicates.
Il s’agit d’un phénomène de société complètement sous-estimé, et je pense, tout comme mon groupe, que ces non-recours ont aussi un coût au final et qu’il serait donc utile de les limiter et d’inciter davantage les bénéficiaires potentiels à effectuer les démarches.
Notre amendement, circonscrit aux droits en matière d’assurance chômage, vise, par exemple, un défaut d’inscription sur les listes des demandeurs d’emploi ou bien de recours aux droits par les demandeurs d’emploi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Ma chère collègue, pour aller vite, je pourrais effectivement me contenter de vous répondre que la commission est hostile aux demandes de rapports, d’autant que la restitution de ceux-ci est complexe et mobilise du temps. Cela étant, il est vrai que le non-recours aux droits est un enjeu qui nécessite de la part des professionnels comme des élus que nous sommes une attention constante. J’ajoute que nous avons prévu la mise en place d’un comité de suivi de la loi, ce qui devrait nous permettre de récolter un certain nombre de réponses au regard de vos attentes.
Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. J’entends les explications de Mme la rapporteur et je retire cet amendement, qui a au moins le mérite d’ouvrir le débat. En émettant un avis de sagesse, Mme la ministre s’y est montrée sensible. Il faut vraiment que nous réfléchissions ensemble à ce véritable problème.
M. le président. L’amendement n° 489 est retiré.
En conséquence, l’article 36 ter demeure supprimé.
Chapitre IV
Dispositions applicables Outre-mer
Article 37
I. – À l’article L. 5524-2 du code du travail, la référence : « n° 2002-149 du 7 février 2002 relative à l’extension et à la généralisation des prestations familiales et à la protection sociale dans la collectivité départementale de Mayotte » est remplacée par la référence : « n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte ».
II. – L’article L. 5524-3 du code du travail est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par les mots : « , dans les conditions fixées aux articles L. 5422-20-1 et L. 5422-20-2 » ;
2° Le second alinéa est complété par les mots : « , dans les conditions fixées aux articles L. 5422-20-1 et L. 5422-20-2 ».
III. – À l’article L. 5524-10 et au second alinéa de l’article L. 6523-3 du code du travail, le mot : « involontairement » est supprimé.
IV. – Au début de l’article L. 5531-1 du code du travail, les mots : « L’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi ».
M. le président. L’amendement n° 224, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. En cohérence avec notre amendement de suppression de l’article 32, nous proposons la suppression de l’article 37.
En effet, nous ne pouvons accepter cette remise en cause du caractère paritaire de l’UNEDIC et le retrait de l’intervention des partenaires sociaux dans la gestion de l’assurance chômage.
L’article 37 se résumant à la mise en œuvre de cette réforme dans les outre-mer, il est donc normal que nous demandions sa suppression.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Par cohérence, l’avis de la commission est également défavorable sur cet amendement. Je précise que l’article 37 assure également des coordinations juridiques nécessaires.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 37.
(L’article 37 est adopté.)
Chapitre V
Dispositions diverses
Article 38
I. – Au premier alinéa de l’article L. 1233-68 du code du travail, après le mot : « partie », sont insérés les mots : « , à l’exception de l’article L. 5422-20-1 et du second alinéa de l’article L. 5422-22, ».
I bis. – L’article L. 1235-4 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour le remboursement prévu au premier alinéa, le directeur général de Pôle emploi ou la personne qu’il désigne en son sein peut, pour son propre compte, pour le compte de l’organisme chargé de la gestion du régime d’assurance chômage mentionné à l’article L. 5427-1, pour le compte de l’État ou des employeurs mentionnés à l’article L. 5424-1, dans des délais et selon des conditions fixés par décret en Conseil d’État, et après mise en demeure, délivrer une contrainte qui, à défaut d’opposition motivée du débiteur devant la juridiction compétente, comporte tous les effets d’un jugement et confère le bénéfice de l’hypothèque judiciaire. »
II. – La cinquième partie du code du travail est ainsi modifiée :
1° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 5312-13-1, à l’article L. 5411-1, au second alinéa de l’article L. 5411-2, à la fin de la première phrase de l’article L. 5411-6, au 1° et au b du 2° de l’article L. 5411-10, à la deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 5422-16, à la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 5424-2 et aux articles L. 5426-1, L. 5427-2, L. 5427-3 et L. 5427-4, les mots : « l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi » ;
2° L’article L. 5411-4 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi » ;
b) Au début du deuxième alinéa, les mots : « L’institution » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi » ;
3° À l’article L. 5413-1, la première occurrence du mot : « inscrit » est supprimée ;
4° L’article L. 5422-2 est ainsi modifié :
a) Après la première phrase du premier alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Ces durées peuvent également tenir compte, le cas échéant, du suivi d’une formation par les intéressés. » ;
a bis) Au début de la seconde phrase du même premier alinéa, les mots : « Ces durées » sont remplacés par le mot : « Elles » ;
b) Le second alinéa est supprimé ;
5° L’article L. 5422-4 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, le mot : « involontairement » est supprimé ;
b) Au même premier alinéa et à la fin de la seconde phrase du second alinéa, les mots : « l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi » ;
6° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 5422-16, les références : « articles L. 5422-9, L. 5422-11 » sont remplacées par les références : « 1° à 3° de l’article L. 5422-9 ainsi qu’aux articles L. 5422-11 » ;
7° L’article L. 5423-4 est abrogé ;
7° bis L’article L. 5424-21 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, le mot : « involontairement » est supprimé ;
b) Au quatrième alinéa, les mots : « l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi » ;
8° À l’intitulé de la section 1 bis du chapitre VI du titre II du livre IV, le mot : « activités » est remplacé par le mot : « activité » ;
9° Au début de l’article L. 5426-8-3, les mots : « L’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 est autorisée » sont remplacés par les mots : « Pôle emploi est autorisé » ;
10° L’article L. 5428-1 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Sous réserve des dispositions prévoyant leur incessibilité ou leur insaisissabilité, les allocations, aides ainsi que toute autre prestation versées par Pôle emploi sont cessibles et saisissables dans les mêmes conditions et limites que les salaires. » ;
b) Au deuxième alinéa, les mots : « , l’allocation de solidarité spécifique et l’allocation temporaire d’attente » sont remplacés par les mots : « et l’allocation de solidarité spécifique ».
M. le président. L’amendement n° 648, présenté par Mme Schillinger, MM. Rambaud, Lévrier, Patriat, Amiel, Bargeton, Karam, Marchand, Mohamed Soilihi, Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 8
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Le même deuxième alinéa est complété par les mots : « , y compris lors du renouvellement des titres de séjour et de travail afin de s’assurer du maintien de l’intéressé sur la liste des demandeurs d’emploi » ;
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Cet amendement vise à modifier l’article L. 5411-4 du code du travail, lequel prévoit que Pôle emploi peut avoir accès aux fichiers des services de l’État pour obtenir les informations nécessaires à la vérification de la validité des titres de séjour et de travail des personnes étrangères lors de leur inscription sur la liste des demandeurs d’emploi.
Cette inscription a plusieurs effets : elle exonère l’employeur embauchant un étranger inscrit sur la liste des demandeurs d’emploi de la vérification de l’existence du titre autorisant l’intéressé à exercer une activité salariée en France.
Par le biais de cet amendement, nous proposons que la transmission d’informations puisse avoir lieu en cas de renouvellement des titres de séjour et de travail qui ont permis l’inscription sur la liste des demandeurs d’emploi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Pôle emploi doit vérifier la validité des titres de séjour et de travail d’une personne étrangère s’inscrivant sur la liste des demandeurs d’emploi.
Cet amendement vise à préciser que ce contrôle concerne également le maintien des demandeurs d’emploi étrangers sur les listes de Pôle emploi, autrement dit les opérations d’actualisation du dossier. Son adoption comblera ainsi un vide juridique. Avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 38, modifié.
(L’article 38 est adopté.)
Article 39
Les dispositions du présent titre entrent en vigueur le 1er janvier 2019, à l’exception du c du 5° du II de l’article 30 et du II de l’article 33. – (Adopté.)
TITRE III
Dispositions relatives À l’emploi
Chapitre Ier
Favoriser l’entreprise inclusive
Section 1
Simplifier l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés
Article 40 A
(Supprimé)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 490, présenté par Mmes Cohen et Apourceau-Poly, MM. Gay, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
L’article L. 8221-6 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 8221-6. – Est réputé salarié tout travailleur qui exerce son activité dans des conditions de droit ou de fait caractérisant un lien de subordination juridique ou un lien de dépendance économique vis-à-vis d’une autre personne physique ou morale.
« Est présumé être l’employeur la personne physique ou morale qui, pour le développement de son activité économique et commerciale, recourt à la conclusion de contrats ayant pour objet la location de la force de travail.
« Outre les clauses du contrat conclu entre les parties, le lien de subordination juridique ou de dépendance économique sont établis notamment :
« 1° Lorsque le travailleur ne possède pas la maîtrise des moyens matériels ou immatériels utilisés pour la production des biens ou services ;
« 2° Ou lorsque le travailleur est intégré à l’organisation d’autrui, de sorte qu’il ne dispose pas d’une identité propre sur le marché des biens et des services en dehors de celle de son cocontractant.
« C’est notamment le cas lorsque le travailleur, pour l’exécution de son activité, est soumis à des instructions telles que celles portant sur des horaires ou des méthodes de travail, émises par une personne physique ;
« 3° Ou, lorsque le cocontractant est une plateforme numérique de travail, la possibilité de radier le travailleur doit être analysée comme étant l’expression d’un pouvoir de sanction, sinon également de contrôle et de direction, caractéristique de l’exercice d’un pouvoir de l’employeur.
« L’employeur est la personne physique ou morale qui détient un pouvoir de fait ou de droit sur le travailleur, le tenant sous sa dépendance, pour les besoins de l’activité économique et commerciale de l’organisation ;
« 4° Ou lorsque le travailleur ne fixe pas lui-même ou par entente avec le client le prix de ses prestations ;
« 5° Ou lorsque le travailleur se voit imposer la vente de telles marchandises à l’exclusion de toutes autres ou se voit imposer le prix de vente de ces marchandises. »
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Les plateformes numériques de travail se construisent sur un modèle économique qui a vocation à contourner les règles applicables au secteur dans lequel elles évoluent, en particulier celles du droit social.
L’intermédiation numérique comme activité spécifique justifierait une telle mise à l’écart : il n’y aurait plus de travailleurs et encore moins de salariés, mais des utilisateurs ou des prestataires extérieurs ; il n’y aurait plus d’employeurs, mais des intermédiaires, plus de sanctions directes, mais des incitations et la désactivation fait figure de rupture contractuelle « euphémisée ».
Il ne s’agit pourtant que d’une torsion de la réalité opérée par le recours à un langage spécifique. Dans les faits se multiplient les pratiques de concurrence déloyale envers les entreprises qui respectent la loi et s’observe une vaste opération de dumping social.
La Cour de justice de l’Union européenne est pourtant formelle : l’intermédiation numérique n’est que la modalité d’exécution d’un service qui dépasse la simple mise en relation.
Si Uber est une société de transport, Deliveroo une société de livraison de repas, ces plateformes ont besoin de travailleuses et de travailleurs qui réaliseront pour leur compte l’activité économique et commerciale qu’elles encadrent et dirigent. C’est ce qu’on appelle du travail salarié.
Or le développement des plateformes numériques de travail est l’occasion d’une paupérisation terrible des travailleuses et des travailleurs, à l’écart du statut de l’emploi, payés à la tâche, sans assurance maternité, chômage, vieillesse ou maladie, sans protection contre le pouvoir de contrôle, de direction et de sanction des plateformes, soumis à la loi du plus fort.
Pour protéger ces travailleurs, lutter contre le faux travail indépendant, le dumping social et les pratiques de concurrence déloyale, il semble alors indispensable d’établir une présomption de salariat qui explicite la nature de l’état de subordination, ainsi que de mieux identifier le débiteur des obligations légales et contractuelles par une définition de l’employeur.
M. le président. L’amendement n° 632, présenté par Mme Schillinger, MM. Lévrier, Rambaud, Patriat, Amiel, Bargeton, Karam, Marchand, Mohamed Soilihi, Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le chapitre II du titre IV du livre III de la septième partie du code du travail est ainsi modifié :
1° L’article L. 7342-1 est complété par onze alinéas ainsi rédigés :
« À ce titre, la plateforme peut établir une charte déterminant les conditions et modalités d’exercice de sa responsabilité sociale, définissant ses droits et obligations ainsi que ceux des travailleurs avec lesquels elle est en relation. Cette charte, qui rappelle les dispositions du présent chapitre, précise notamment :
« 1° Les conditions d’exercice de l’activité professionnelle des travailleurs avec lesquels la plateforme est en relation, en particulier les règles selon lesquelles ils sont mis en relation avec ses utilisateurs. Ces règles garantissent le caractère non exclusif de la relation entre les travailleurs et la plateforme et la liberté pour les travailleurs d’avoir recours à la plateforme ;
« 2° Les modalités permettant d’assurer aux travailleurs un revenu d’activité décent ;
« 3° Les modalités de développement des compétences professionnelles et de sécurisation des parcours professionnels ;
« 4° Les mesures de prévention des risques professionnels auxquels les travailleurs peuvent être exposés en raison de leur activité et les mesures permettant de garantir aux travailleurs des conditions de travail décentes ;
« 5° Les modalités de partage d’informations et de dialogue entre la plateforme et les travailleurs sur les conditions d’exercice de leur activité professionnelle ;
« 6° Les modalités selon lesquelles les travailleurs sont informés de tout changement relatif aux conditions d’exercice de leur activité professionnelle ;
« 7° Les garanties applicables en cas de rupture de relations contractuelles entre la plateforme et les travailleurs.
« La charte est publiée sur le site internet de la plateforme et annexée aux contrats qui la lient aux travailleurs.
« L’établissement de la charte et le respect des engagements pris par la plateforme dans les matières énumérées aux 1° à 7° du présent article ne peuvent caractériser l’existence d’un lien de subordination juridique entre la plateforme et les travailleurs.
« L’autorité administrative peut être sollicitée par les signataires de la charte dans des conditions fixées par décret pour attester de la réalité des conditions fixées à l’alinéa précédent au regard des éléments fournis par les parties signataires et de la réalité des mesures prévues dans la charte. » ;
2° L’article L. 7342-3 est ainsi rédigé :
« Art. L. 7342-3. – Le travailleur bénéficie du droit d’accès à la formation professionnelle continue prévu à l’article L. 6312-2. La contribution à la formation professionnelle mentionnée à l’article L. 6331-48 est prise en charge par la plateforme.
« Il bénéficie, à sa demande, des actions mentionnées au 3° de l’article L. 6313-1. La plateforme prend alors en charge les frais d’accompagnement et lui verse une indemnité dans des conditions définies par décret.
« Lorsque le chiffre d’affaires réalisé par le travailleur sur la plateforme est supérieur à un seuil défini par décret, son compte personnel de formation est abondé par la plateforme d’un montant égal à celui d’un salarié à temps plein. » ;
3° L’article L. 7342-4 est ainsi rédigé :
« Art. L. 7342-4. – L’article L. 7342-2 n’est pas applicable lorsque le chiffre d’affaires réalisé sur la plateforme est inférieur à un seuil défini par décret. Pour le calcul de la cotisation afférente aux accidents du travail, seul est pris en compte le chiffre d’affaires réalisé par le travailleur sur la plateforme. »
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Le développement des technologies numériques a d’ores et déjà modifié en profondeur les organisation et mode de travail de très nombreux actifs.
L’essor de ce que l’on appelle désormais le travail à la demande, que traduit l’avènement des plateformes numériques, a indéniablement contribué à l’accélération de cette évolution.
Les plateformes collaboratives présentent néanmoins une ambivalence : d’un côté, elles offrent des opportunités d’activité pour de nombreux actifs, qu’il convient d’accompagner ; de l’autre, leur modèle de fonctionnement fragilise ces mêmes actifs, qui, s’ils sont officiellement non subordonnés à la plateforme, restent néanmoins dépendants économiquement.
Les fortes perspectives de développement de ce secteur et la fréquence des conflits sociaux en son sein appellent une réaction.
Depuis le début de la semaine, des livreurs de plusieurs plateformes de livraison de repas sont en grève pour protester contre la précarisation de leur statut. La multiplication, ces derniers mois, de tels mouvements des travailleurs de plateformes doit être perçue comme une alerte qui nous est adressée.
Mes chers collègues, il incombe aux responsables politiques de prendre acte des changements profonds qu’opère la révolution numérique au sein de notre société et d’accompagner ces derniers. La sécurisation de la relation entre les plateformes et les travailleurs indépendants et le développement de la responsabilité de ces plateformes doivent être une priorité.
Dans ce contexte, vous l’aurez bien compris, l’établissement d’une charte des plateformes destinée à rendre effective cette responsabilité et à protéger davantage les travailleurs indépendants paraît indispensable.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Ces deux amendements ont des portées différentes, puisque l’un tend à préciser, tandis que l’autre vise à rétablir. Néanmoins, sur l’un comme sur l’autre, l’avis de la commission est défavorable, pour la raison évoquée tout à l’heure.
La passion avec laquelle mon collègue Fabien Gay a défendu son amendement me donne envie de dire : « Ouvrons le débat, madame la ministre ! » Pourquoi ne pas créer un groupe de travail sur ce sujet ? En tout cas, veillons à légiférer de façon posée, en nous appuyant sur les outils juridiques que sont les avis du Conseil d’État, les auditions. Nous pourrons ainsi adopter une position qui sera davantage en adéquation avec l’enjeu économique que représentent ces plateformes.
Cet article 40 A, inséré par l’Assemblée nationale, n’a fait l’objet d’aucune étude d’impact et nous n’avons pu mener aucune audition au sujet de ses dispositions. C’est la raison pour laquelle nous l’avons supprimé. Les auteurs de l’amendement n° 490 ont au moins le mérite de formuler des propositions, que nous reprendrons peut-être, comme celles de M. Tourenne.
En tout état de cause, je le répète, la commission est défavorable à ces deux amendements. Il faut ouvrir le débat de façon sérieuse.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Je ne reviens pas sur ce que j’ai dit sur les travailleurs des plateformes, afin d’éviter de refaire le débat. Par cohérence, je suis défavorable à l’amendement n° 490 et favorable à l’amendement n° 632.
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.
Mme Monique Lubin. Grâce à ma collègue Nadine Grelet-Certenais, nous avons rencontré les personnes qui se battent en ce moment. Il faut les entendre pour savoir ce qu’elles vivent, même si nous le savons à peu près tous, ceux d’entre nous qui vivent en zone très urbanisée et font appel à ces sociétés étant sans doute un peu plus au fait que ceux qui vivent en zone rurale.
Chacun a son histoire. Je suis élue d’un département où, il y a à peine soixante-dix ans, des gens se sont battus pour mettre un terme à des formes de travail iniques qui s’apparentaient à de l’esclavage moderne. Je croyais ce temps révolu. Or, sous couvert de nouvelles technologies, on est en train de créer de nouvelles formes de travail qui sont ni plus ni moins de nouvelles formes d’esclavage moderne. Ne nous en tenons pas aux mots, mettons-nous au travail très rapidement !
M. le président. La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais, pour explication de vote.
Mme Nadine Grelet-Certenais. Lors des travaux de la commission, nous avons déposé un amendement de suppression de l’article 40 A, article qui prévoyait l’instauration d’une charte facultative pour les plateformes numériques de mise en relation, étant farouchement opposés à ce que le secteur privé se régule par lui-même. Il revient en effet à la puissance publique de fixer le statut de ces travailleurs et d’assurer ainsi leur protection.
Or voilà que le groupe La République En Marche entend réintroduire ce dispositif. Nous ne sommes pas dupes : c’est bien parce qu’une célèbre plateforme de livraison de repas risque de voir requalifier en relation salariée le contrat de certains de ses livreurs que ce « cavalier » arrive en discussion.
Si ce dispositif vise à une protection, c’est bien à celle des plateformes et non à celle de leurs travailleurs. Mais les travailleurs de l’ubérisation de notre société doivent, comme tous les autres, relever du code du travail. D’ailleurs, un mouvement en ce sens a été engagé, notamment avec la protection contre les accidents du travail et le droit à la formation qui leur ont été reconnus dans un chapitre spécifique du code du travail relatif à la responsabilisation sociale des plateformes.
Actuellement, des livreurs parisiens de ces plateformes sont en grève pour obtenir de meilleures conditions de travail, car, à ce stade, ils représentent le sous-prolétariat du XXIe siècle. En nous opposant à cet amendement, nous nous faisons le relais de ces tâcherons modernes, comme ils se définissent eux-mêmes, qui jugent que votre démarche va renforcer l’arbitraire du secteur et pérenniser la précarité.
D’ailleurs, ils ont directement interpellé le parlementaire à l’initiative de cet amendement, le député Aurélien Taché, qui n’a pas jugé utile de les recevoir afin d’entendre leur point de vue.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Madame la ministre, il faut ouvrir ce débat, et en grand ! Un certain nombre d’entre nous prend à cœur cette question, apparue voilà quelques années. Mon collègue Pascal Savoldelli et moi-même avons rencontré de nombreuses personnes, notamment des livreurs Deliveroo et des représentants du collectif des livreurs autonomes de Paris, le CLAP. Nous soutenons évidemment la lutte qu’ils ont entamée la semaine dernière, prévue pour durer jusqu’à la finale de la Coupe du monde de football dimanche soir.
Nous pensons que ces livreurs sont des salariés comme les autres. Il ne peut pas y avoir de droit dérogatoire au code du travail.
Je le répète, pour fonctionner, Uber a besoin de chauffeurs, qui sont donc des salariés. Pour livrer ses repas, Deliveroo a besoin de livreurs, qui sont donc des salariés, lesquels représentent leur entreprise auprès des gens à qui ils livrent des repas.
Comme l’a très bien dit Mme Grelet-Certenais, l’amendement de M. Taché, une sorte de cavalier, a été déposé afin d’éviter que, dans les prochaines semaines, la relation contractuelle qui lie les parties en cause ne soit requalifiée en relation de travail salarié.
Nous voterons évidemment contre l’amendement n° 632 et appelons à voter en faveur de notre amendement n° 490. Si celui-ci n’est pas adopté, ne vous inquiétez pas – et vous connaissez l’engagement de notre groupe et sa volonté de toujours faire des propositions : nous reviendrons sur cette question, y compris par le dépôt d’une proposition de loi l’année prochaine.
M. le président. En conséquence, l’article 40 A demeure supprimé.
Article additionnel après l’article 40 A
M. le président. L’amendement n° 491, présenté par Mmes Cohen et Apourceau-Poly, MM. Gay, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 40 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 3 du chapitre Ier du titre II du livre II de la huitième partie du code du travail est complétée par des articles L. 8221-6–… à L. 8221-6–… ainsi rédigés :
« Art. L. 8221-6–… – Lorsque le travailleur, utilisé dans les conditions prévues à l’article L. 8221-6, emploie lui-même d’autres salariés, ceux-ci sont réputés être liés par contrat de travail au même employeur.
« Art. L. 8221-6-… – La sous-traitance de toute activité de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services ou l’accomplissement d’actes de commerce est prohibée au-delà du second rang. Les travailleurs occupés en méconnaissance de cette interdiction, y compris ceux mentionnés à l’article L. 8221-6-1, sont réputés être salariés du sous-traitant de second rang.
« Art. L. 8221-6-… – Toute décision de faire appel à la sous-traitance d’une partie de l’activité ou des fonctions de l’entreprise est soumise à l’avis conforme du comité d’entreprise. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. La sous-traitance en cascade est un fléau pour la santé économique de nos entreprises et pour le principe de justice sociale qui devrait guider les actions politiques.
Alors que la sous-traitance ne devrait être que le moyen de confier la réalisation d’un ouvrage à des personnes disposant de compétences particulières et d’un savoir-faire spécifique, elle s’est révélée être un redoutable outil de fragmentation de l’entreprise, l’expression de stratégies d’externalisation productive à des fins de coût.
La multiplication des niveaux de sous-traitance est en effet un moyen pour faire des économies. À chaque niveau, une entreprise donneuse d’ordres fait ainsi pression sur son sous-traitant pour maximiser ses marges et limiter ses risques, en les faisant porter sur d’autres.
En bout de chaîne, les petites entreprises et les artisans sont asphyxiés et contraints à réduire la qualité des produits et, surtout, à faire travailler les salariés dans des conditions dégradées.
Sur un même lieu de travail se multiplient ainsi les statuts salariaux. Pour une même activité, les salaires, les garanties contractuelles individuelles ou le niveau des protections collectives varient, provoquant d’injustes et d’inexcusables inégalités de traitement.
L’Allemagne et l’Espagne, pour ne prendre que ces exemples européens, ont légiféré bien avant nous sur la limitation des niveaux de sous-traitance. Cette limitation permet non seulement aux droits des travailleurs d’être mieux identifiés et mieux respectés, mais aussi de restreindre les situations de dumping social, de concurrence déloyale, et ainsi d’agir pour la santé de notre tissu économique, la stabilité de l’ordre public et l’impératif de justice sociale.
Cet amendement s’inscrit dans cette dynamique d’identification et de sécurisation, à la fois des salariés, mais également des entreprises sous-traitantes.
Les limites du modèle taylorien du travail ont largement été atteintes avec ce développement de la sous-traitance. Aussi, il est proposé d’encadrer cette pratique en la limitant à deux échelons et de la soumettre aux instances représentatives du personnel, chargées de déterminer s’il s’agit d’une opération d’externalisation ou si les compétences attendues sont bien absentes de l’entreprise donneuse d’ordres.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Que la sous-traitance en cascade soit source de problèmes, dont nous avons pu être victimes parfois, c’est la réalité. Toutefois, cet amendement soulève deux difficultés : premièrement, il n’est prévu que deux degrés dans la chaîne de sous-traitance, sans mécanisme de dérogation, ce qui est peu pour certaines opérations complexes ; deuxièmement, il tend à instaurer un droit de veto du comité social et économique pour s’opposer au recours à la sous-traitance, ce qui est à nos yeux excessif. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 491.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 40
I. – Le chapitre II du titre Ier du livre II de la cinquième partie du code du travail est ainsi modifié :
1° A L’article L. 5212-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 5212-1. – La mobilisation en faveur de l’emploi des travailleurs handicapés concerne tous les employeurs. À ce titre, ces derniers déclarent l’effectif total des bénéficiaires de l’obligation d’emploi mentionnés à l’article L. 5212-13 qu’ils emploient, selon des modalités fixées par décret.
« Les dispositions du présent chapitre s’appliquent à tout employeur occupant au moins vingt salariés, y compris les établissements publics industriels et commerciaux. » ;
1° L’article L. 5212-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 5212-2. – Tout employeur emploie des bénéficiaires de l’obligation d’emploi mentionnés à l’article L. 5212-13 dans la proportion minimale de 6 % de l’effectif total de ses salariés.
« Ce taux est révisé tous les cinq ans, en référence à la part des bénéficiaires de l’obligation d’emploi dans la population active et à leur situation au regard du marché du travail, après avis du conseil mentionné à l’article L. 146-1 du code de l’action sociale et des familles, et à l’issue d’un débat tenu dans chacune des deux assemblées du Parlement. » ;
1° bis Le premier alinéa de l’article L. 5212-3 est ainsi modifié :
a) (nouveau) Après le mot : « entreprises », sont insérés les mots : « de plus de 250 salariés » ;
b) Les mots : « établissement par établissement » sont remplacés par les mots : « au niveau de l’entreprise » ;
2° L’article L. 5212-5 est ainsi modifié :
a) Les deux premiers alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« L’employeur déclare sa situation au regard de l’obligation d’emploi auquel il est soumis en application de l’article L. 5212-2 du présent code au moyen de la déclaration prévue à l’article L. 133-5-3 du code de la sécurité sociale. Cette déclaration distingue, au sein des bénéficiaires de l’obligation d’emploi rémunérés par l’employeur, ceux qui y figurent au titre de l’insertion ou du maintien dans l’emploi. Si, au bout de trois exercices consécutifs, l’employeur ne déclare aucun recrutement de bénéficiaire de l’obligation d’emploi, l’organisme mentionné à l’article L. 213-1 du code de la sécurité ou à l’article L. 723-2 du code rural et de la pêche maritime dont relève l’employeur lui fait parvenir une notification. » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les informations contenues dans cette déclaration sont confidentielles. Elles ne peuvent être communiquées à un autre employeur auprès duquel un bénéficiaire de l’obligation d’emploi que la déclaration concerne sollicite un emploi. » ;
3° Au 3° de l’article L. 5212-5-1, la référence : « L. 5212-6, » est supprimée ;
4° La sous-section 1 de la section 3 est ainsi modifiée :
a) À la fin de l’intitulé, le mot : « partielle » est remplacé par les mots : « par l’emploi de travailleurs handicapés » ;
b) L’article L. 5212-6 est ainsi rédigé :
« Art. L. 5212-6. – L’employeur s’acquitte de son obligation d’emploi en employant les bénéficiaires mentionnés à l’article L. 5212-13, quelles que soient la durée et la nature de leur contrat. » ;
c) L’article L. 5212-7 est ainsi rédigé :
« Art. L. 5212-7. – L’employeur peut s’acquitter de son obligation d’emploi en employant :
« 1° Les bénéficiaires mentionnés à l’article L. 5212-13 accueillis en stage par l’employeur, quelle qu’en soit la durée, ainsi que les jeunes de plus de seize ans bénéficiaires de droits à la prestation de compensation du handicap, de l’allocation compensatrice pour tierce personne ou de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé qui disposent d’une convention de stage ;
« 2° Les bénéficiaires mentionnés au même article L. 5212-13 accueillis pour des périodes de mise en situation en milieu professionnel dans les conditions fixées au chapitre V du titre III du livre Ier de la présente partie ;
« 3° Les bénéficiaires mentionnés à l’article L. 5212-13 mis à disposition des entreprises par les entreprises de travail temporaire et par les groupements d’employeurs.
« Les modalités de prise en compte des bénéficiaires mentionnés au présent article sont fixées par décret. » ;
d) L’article L. 5212-7-1 est abrogé ;
e) Il est ajouté un article L. 5212-7-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 5212-7-2. – Pour le calcul du nombre de bénéficiaires de l’obligation d’emploi mentionnés à l’article L. 5212-13, l’âge des bénéficiaires peut être pris en compte. Les modalités de calcul sont fixées par décret. » ;
4° bis L’article L. 5212-8 est ainsi rédigé :
« Art. L. 5212-8. – L’employeur peut s’acquitter de son obligation d’emploi en faisant application d’un accord de branche, de groupe ou d’entreprise agréé prévoyant la mise en œuvre d’un programme pluriannuel en faveur des travailleurs handicapés, pour une durée maximale de trois ans, renouvelable une fois. Le contenu des accords, qui fait l’objet d’une évaluation à la première échéance triennale, est fixé par décret. » ;
4° ter Le premier alinéa de l’article L. 5212-9 est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Tout employeur qui n’a pas satisfait à l’obligation mentionnée à l’article L. 5212-2 est tenu de s’en acquitter en versant une contribution annuelle, dans des conditions fixées par décret, pour chacun des bénéficiaires de l’obligation qu’il aurait dû employer. Cette contribution est recouvrée par les organismes mentionnés à l’article L. 213-1 du code de la sécurité sociale ou à l’article L. 723-2 du code rural et de la pêche maritime dont relève l’employeur, dans les mêmes conditions que les cotisations du régime général de sécurité sociale. » ;
5° (Supprimé)
5° bis À la première phrase du second alinéa du même article L. 5212-9, après le mot : « décret », sont insérés les mots : « , après avis du conseil mentionné à l’article L. 146-1 du code de l’action sociale et des familles » ;
5° ter (Supprimé)
5° quater (nouveau) L’article L. 5212-10 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est supprimé ;
b) Le second alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, cette limite est appliquée de façon dégressive aux entreprises assujetties à l’obligation d’emploi, en fonction du nombre de bénéficiaires de l’obligation d’emploi qu’elles occupent, du nombre des contrats et des accords collectifs susmentionnés. Elle ne peut être portée à un niveau inférieur à 600 fois le salaire horaire minimum de croissance. » ;
6° Au second alinéa de l’article L. 5212-10, la référence : « L. 5212-6 » est remplacée par la référence : « L. 5212-10-1 » ;
7° Après le même article L. 5212-10, il est inséré un article L. 5212-10-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 5212-10-1. – Peuvent être déduites du montant de la contribution annuelle les dépenses supportées directement par l’entreprise afférentes à des contrats de fourniture, de sous-traitance ou de prestations de services ou à des partenariats qu’elle passe avec :
« 1° Des entreprises adaptées ;
« 2° Des établissements ou services d’aide par le travail ;
« 3° Des travailleurs indépendants handicapés reconnus bénéficiaires de l’obligation d’emploi au sens de l’article L. 5212-13. Est présumée travailleur indépendant au sens du présent article toute personne remplissant les conditions mentionnées au I de l’article L. 8221-6 ou à l’article L. 8221-6-1.
« La nature des dépenses mentionnées au premier alinéa du présent article ainsi que les conditions dans lesquelles celles-ci peuvent être déduites du montant de la contribution sont déterminées par décret. » ;
8° Au premier alinéa de l’article L. 5212-11, les mots : « , en vue de permettre à l’employeur de s’acquitter partiellement de l’obligation d’emploi, » et les mots : « au sein de l’entreprise, l’abondement du compte personnel de formation au bénéfice des personnes mentionnées à l’article L. 5212-13 ou l’accès de personnes handicapées à la vie professionnelle » sont supprimés ;
9° À l’article L. 5212-12, la référence : « L. 5212-6 » est remplacée par la référence : « L. 5212-7 » ;
10° Le dernier alinéa de l’article L. 5212-14 est supprimé.
11° (nouveau) L’article L. 5213-2 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsque le handicap est irréversible, la qualité de travailleur handicapé est attribuée de façon définitive. »
II. – L’article L. 5523-4 du code du travail est abrogé.
III. – A. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2020 et s’applique aux obligations portant sur les périodes courant à compter de cette date.
B. – Toutefois, le 1° bis du I entre en vigueur selon des modalités fixées par décret, et au plus tard le 1er janvier 2025. Entre le 1er janvier 2020 et le 31 décembre 2024, l’acquittement de l’obligation d’emploi par le versement d’une contribution annuelle fait l’objet de modalités transitoires déterminées par décret. Ce décret fixe notamment, d’une part, les modalités de calcul de la limite maximale de la contribution, à effectif de travailleurs handicapés au minimum égal à la somme des effectifs des travailleurs handicapés des différents établissements d’une entreprise assujettie, et, d’autre part, les modalités de modulation du montant de la contribution, notamment en fonction de l’effectif de l’entreprise.
IV. – Les accords mentionnés à l’article L. 5212-8 du code du travail agréés avant le 1er janvier 2020 continuent à produire leurs effets jusqu’à leur terme et peuvent être renouvelés une fois pour une durée maximale de trois ans, à l’exception des accords d’établissement qui ne peuvent pas être renouvelés.
V. – Pour l’application de l’article L. 5212-9 du code du travail, dans sa rédaction résultant de la présente loi, les branches professionnelles engagent des négociations en vue d’élaborer des propositions pour réviser la liste des emplois exigeant des conditions d’aptitude particulières. Le décret prévu au même article L. 5212-9 ne peut être publié avant le 1er juillet 2019.
VI. – À titre expérimental, à compter du 1er janvier 2019 et jusqu’au 31 décembre 2021, outre les cas prévus aux articles L. 1251-6 et L. 1251-7 du code du travail, la mise à disposition d’un salarié temporaire auprès d’une entreprise utilisatrice peut intervenir lorsque ce salarié temporaire est un bénéficiaire de l’obligation d’emploi mentionné à l’article L. 5212-13 du même code.
Au plus tard le 30 juin 2021, le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur l’application du présent VI au regard de son impact sur l’accès à l’emploi des bénéficiaires de l’obligation d’emploi susmentionnée.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, sur l’article.
Mme Patricia Schillinger. Mes chers collègues, avant d’entamer l’examen du chapitre du projet de loi qui s’attache à rendre les entreprises plus inclusives, je souhaite rappeler quelques chiffres importants : 2,7 millions de personnes en âge de travailler sont en situation de handicap, mais trente ans après la mise en œuvre de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés, le taux d’emploi direct dans les entreprises du secteur privé est de 3,4 % pour un objectif de 6 %. Il atteint 5,2 % dans la fonction publique. Par ailleurs, le chômage des travailleurs handicapés reste trop élevé, avec un taux de 19 %.
Face à ces constats, la mobilisation globale de l’État, des partenaires sociaux, des associations et des entreprises doit être maximale pour refuser ce qui après trente ans pourrait s’apparenter à de la résignation, voire à de la fatalité.
Aussi, je tiens à saluer le travail de concertation conduit par vous-même, madame la ministre, et par Sophie Cluzel, secrétaire d’État chargée des personnes handicapées, ainsi que le précieux travail réalisé par Dominique Gillot sur l’emploi des travailleurs handicapés et sur les aidants qui va continuer de nourrir la deuxième phase de concertation jusqu’au mois de septembre.
Je veux également souligner l’importance pour mon groupe de réintroduire l’entreprise comme périmètre de calcul de l’obligation d’emploi, sans autre condition de seuil.
Il s’agit pour nous d’une disposition importante et le seuil de 250 salariés adopté par la commission n’est pas acceptable à nos yeux. Il priverait la nouvelle échelle de calcul de l’essentiel de son effet, alors que, je le répète, la mobilisation en faveur de l’emploi des travailleurs handicapés doit être générale.
M. le président. La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais, sur l’article.
Mme Nadine Grelet-Certenais. Nous abordons, en ce début d’examen du titre III, un sujet majeur pour l’emploi des personnes en situation de handicap.
Comme vous le savez, mes chers collègues, le chômage frappe très durement cette population. Selon les chiffres de la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, la DARES, seuls 35 % des personnes en situation de handicap ont un emploi, contre 64 % pour la population générale et 19 % – environ 500 000 personnes – sont au chômage contre 9 % en moyenne.
L’Inspection générale des affaires sociales, dans son rapport du mois de décembre 2017 sur le mode de financement de l’insertion professionnelle des travailleurs handicapés, relevait très justement que, eu égard aux taux de chômage par âge et niveau de qualification, ce sont les travailleurs reconnus handicapés les plus âgés qui sont le plus pénalisés.
Il existe également un frein psychologique à l’emploi. En effet, les entreprises considèrent trop les personnes handicapées du point de vue de leur handicap, de leur limitation, plutôt que du point de vue de leurs compétences.
L’article 40 et les suivants du projet de loi prévoient de réformer la politique de l’emploi en faveur des travailleurs handicapés. Mais sommes-nous réellement devant une vraie réforme ou face à un coup de communication ?
En effet, de nombreuses mesures proposées ressemblent fort à l’état du droit actuel et s’apparentent bien souvent à des allégements pour les entreprises, notamment concernant l’acquittement de l’obligation d’emploi, peu favorable à l’emploi direct.
Comme sur beaucoup d’autres textes de loi présentés par le Gouvernement, des négociations parallèles sont toujours en cours et, parfois, aboutissent. Hier, une convention très engageante a été signée en vue de doubler d’ici à 2022 le nombre de créations d’emplois dans le secteur adapté.
Mais, en même temps, si j’ose dire, le Gouvernement réduit drastiquement la prime d’activité pour les salariés percevant une pension d’invalidité ou une rente accident du travail-maladie professionnelle au 1er juillet de cette année !
Cette mesure d’économie de 20 millions d’euros plonge des centaines de familles, notamment monoparentales, dans la misère.
D’un côté, le Gouvernement nous annonce des lendemains qui chantent à l’horizon de la fin du quinquennat. Et, de l’autre, il coupe les vivres aux personnes en situation de handicap les plus fragiles et les plus modestes ! Quelle contradiction !
Je ne vois pas en quoi les mesures proposées dans le présent projet de loi sont de nature à contrebalancer la suppression indigne de la prime d’activité pour les personnes handicapées les plus faibles.
Enfin, des inconnues de taille demeurent sur les questions relatives à la contribution, à son montant ou barème et à ses modalités de recouvrement par l’URSSAF. Il manque véritablement une étude d’impact.
M. le président. L’amendement n° 387, présenté par Mme Grelet-Certenais, M. Daudigny, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 3, première phrase
Après le mot :
handicapés
insérer les mots :
et du maintien de ces derniers dans l’emploi
La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais.
Mme Nadine Grelet-Certenais. Cet amendement vise à mentionner l’objectif de maintien dans l’emploi des personnes en situation de handicap dans l’alinéa 3 de l’article 40 inséré dans le projet de loi après adoption en séance publique à l’Assemblée nationale d’un amendement du Gouvernement.
Il nous semble en effet utile de préciser que la mobilisation pour l’emploi des travailleurs handicapés doit également être envisagée sur le long terme par tous les employeurs.
Le rapport de Dominique Gillot insiste, lui aussi, sur la nécessité de prendre en compte le maintien en emploi comme un moyen pour lutter contre la désinsertion professionnelle et comme un levier essentiel pour favoriser la sensibilisation des employeurs.
C’est pourquoi nous vous proposons d’ajouter cette mention. Au-delà de la mobilisation pour l’emploi dans le cadre de la généralisation de la déclaration sociale nominative, la fameuse DSN, à tous les employeurs, celle-ci doit s’inscrire dans une démarche pérenne d’ouverture à l’égard de l’emploi des personnes en situation de handicap.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur de la commission des affaires sociales. Cet amendement ne présente pas d’effet normatif particulier. Il vise seulement à préciser l’énoncé déclaratoire de la mobilisation en faveur de l’emploi des personnes handicapées.
En revanche, son objet soulève un point intéressant : faire apparaître dans la DSN l’objectif de maintien dans l’emploi des personnes handicapées, par opposition avec l’embauche stricte.
Je signale que ce souhait a été satisfait par la commission, qui a adopté un amendement tendant à ce que la déclaration obligatoire d’emploi des travailleurs handicapés, la DOETH, fasse clairement la distinction au sein de la DSN entre les travailleurs qui relèvent de l’embauche et ceux qui relèvent du maintien.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à vous faire partager en quelques mots l’importance de cette rénovation de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés. Muriel Pénicaud et moi-même travaillons sur un véritable changement de paradigme, d’échelle, pour prendre en compte toutes les capacités, toutes les compétences des personnes handicapées et leur volonté d’accéder au travail.
C’est un changement de paradigme parce que, de manière positive, nous voulons inciter les entreprises à prendre en considération toutes les palettes que nous leur offrons avec cette rénovation de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés.
Nous voulons mettre en place des passerelles, des sas, pour améliorer les qualifications, lever l’autocensure des personnes handicapées à aller vers l’emploi. Nous voulons accompagner ces dernières en leur proposant toute une palette de solutions qui vont de l’établissement et service d’aide par le travail, ou ESAT, à l’entreprise adaptée, en passant par l’entreprise dite « classique » et des dispositifs d’emploi accompagné.
La concertation qui a été menée a été unique. Aussi bien les organisations syndicales et patronales que les associations de personnes handicapées représentant ces travailleurs ont été associées dans une ambition commune de changer la donne.
Cela dit, le Gouvernement est également défavorable à cet amendement. La précision selon laquelle la mobilisation des employeurs concerne également le maintien en emploi des travailleurs handicapés n’est pas nécessaire puisque l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés recouvre par essence même à la fois le recrutement des personnes handicapées et le maintien en emploi des salariés recrutés à ce titre ou qui sont confrontés à la survenance d’un handicap au cours de leur activité.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Thani Mohamed Soilihi.)
PRÉSIDENCE DE M. Thani Mohamed Soilihi
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
3
Mise au point au sujet d’un vote
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin.
Mme Véronique Guillotin. Monsieur le président, lors du scrutin n° 212, Mme Nathalie Delattre, MM. Jean-Pierre Corbisez, Olivier Léonhardt et Franck Menonville ont été considérés comme s’étant abstenus, alors qu’ils auraient souhaité voter contre.
M. le président. Acte est donné de cette mise au point, ma chère collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
4
Liberté de choisir son avenir professionnel
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour la liberté de choisir son avenir professionnel.
Dans la discussion du texte de la commission, nous poursuivons l’examen de l’article 40.
Article 40 (suite)
M. le président. L’amendement n° 410, présenté par Mme Grelet-Certenais, M. Daudigny, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Après le mot :
dispositions
insérer les mots :
relatives à l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés
La parole est à Mme Michelle Meunier.
Mme Michelle Meunier. Le diable se niche parfois dans les détails ! De nombreuses associations se sont émues de la potentielle contradiction entre les alinéas de l’article L. 5212-1 du code du travail tel qu’il a été réécrit. En effet, elles redoutent notamment que la généralisation de la déclaration sociale nominative à tous les employeurs, prévue à l’alinéa 3, ne puisse être remise en cause par l’alinéa suivant, qui indique que les dispositions du chapitre en question ne s’appliquent qu’aux entreprises de plus de 20 salariés.
Le présent amendement vise donc à sécuriser juridiquement l’obligation déclarative, élargie à tous les employeurs. C’est une très bonne mesure, car elle permettra de dresser une cartographie précise de l’emploi des personnes en situation de handicap.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur de la commission des affaires sociales. Cet amendement tend à préciser la matière d’un chapitre du code du travail dont l’intitulé mentionne déjà les termes « obligation d’emploi des travailleurs handicapés ». La précision suggérée me paraît donc inutile. C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Même avis, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 754, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer les mots :
du présent chapitre
par les mots :
des articles L. 5212-2 à L. 5212-17
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de cohérence.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 709 rectifié, présenté par MM. Corbisez, Arnell, Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, M. Collin, Mme Costes, MM. Gabouty, Gold, Guérini et Guillaume, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Requier et Vall, n’est pas soutenu.
L’amendement n° 388, présenté par Mme Grelet-Certenais, M. Daudigny, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Après les mots :
après avis
insérer le mot :
conforme
La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais.
Mme Nadine Grelet-Certenais. Cet amendement tend à sécuriser la clause de revoyure du taux d’obligation d’emploi des travailleurs handicapés. L’avis conforme du Conseil national consultatif des personnes handicapées, le CNCPH, offrirait une garantie supplémentaire à la stabilité du taux. Il est en effet hors de question que ce taux minimal puisse être revu à la baisse, car il s’agit de donner un cadre pérenne aux entreprises. Cette précision s’ajoute au contrôle du Parlement, dont l’ajout par la commission est une bonne chose.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. La détermination du taux d’emploi des personnes handicapées relève de la compétence du législateur. Elle est fondée sur l’observation de deux critères énoncés par la loi – part des bénéficiaires de l’OETH, l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés, dans la population active et situation au regard du marché du travail –, mais ne peut dépendre d’un avis conforme d’une instance non parlementaire.
En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 134 rectifié, présenté par M. Janssens, n’est pas soutenu.
Je suis saisi de onze amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 633, présenté par Mme Schillinger, MM. Lévrier, Rambaud, Patriat, Amiel, Bargeton, Karam, Marchand, Mohamed Soilihi, Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Alinéas 8 à 10
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
1° bis Au premier alinéa de l’article L. 5212-3, les mots : « établissement par établissement » sont remplacés par les mots : « au niveau de l’entreprise » ;
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. La modification introduite en commission des affaires sociales au Sénat vide purement et simplement de son sens l’obligation d’emploi à 6 % des personnes en situation de handicap. En effet, elle limite de facto la mesure aux entreprises de plus de 250 salariés. Le rapporteur prétextera qu’il s’agit de protéger les TPE-PME. Rappelons néanmoins que les TPE ne sont pas concernées par l’OETH, qui ne s’applique qu’aux entreprises de plus de 20 salariés.
Par ailleurs, il paraît opportun que, pour une entreprise à établissements multiples, l’assujettissement à l’obligation d’emploi s’effectue à l’échelon de l’entreprise et non plus de l’établissement. En effet, aujourd’hui, dans le secteur privé, l’assujettissement à cette obligation est réalisé au niveau de l’établissement autonome, une notion qui n’existe pour aucune autre contribution.
Cette modification permettrait donc à la fois de simplifier les formalités de l’entreprise et d’éviter les risques d’éviction lorsqu’une entreprise compte de multiples petits établissements.
M. le président. L’amendement n° 762, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéas 8 à 10
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
1° bis Le premier alinéa de l’article L. 5212-3 est complété par les mots : « , sous réserve de la signature d’un accord à l’issue de la négociation mentionnée à l’article L. 2242-2-1. Dans le cas contraire, l’obligation d’emploi s’applique au niveau de l’entreprise. » ;
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Cet amendement vise à revenir sur les modalités de calcul de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés pour le cas des entreprises pluri-établissements, concrètement les entreprises à la tête d’un réseau de plusieurs succursales.
Il est en effet apparu que l’idée du Gouvernement d’appliquer l’OETH à l’échelon de l’entreprise et non plus de l’établissement n’était sans doute pas compatible avec un modèle économique construit autour de l’éclatement de petites entités.
Par le présent amendement, il est suggéré de maintenir le calcul établissement par établissement, à la condition de la signature d’un accord dans le cadre de la négociation obligatoire d’entreprise, dont le dispositif renvoie à un autre amendement, que je défendrai plus tard. À défaut de cette signature, le principe de l’acquittement au niveau de l’entreprise s’appliquerait.
M. le président. L’amendement n° 492, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéas 9, 10, 21 à 29, 40 à 45, 52 et 55
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. L’article 40 redéfinit l’obligation d’emploi de 6 % de travailleurs handicapés dans le secteur privé ou public pour tout établissement d’au moins 20 salariés. Dans le secteur privé, si cet objectif de 6 % n’est pas respecté, l’entreprise doit verser une contribution à l’AGEFPIH, l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des handicapés.
La loi Macron de 2015 avait déjà ouvert une brèche dans l’obligation de compter 6 % de travailleurs handicapés, puisque les entreprises pouvaient comptabiliser les sociétés de sous-traitance employant des personnes en situation de handicap et compter les élèves handicapés en stage en leur sein.
Sous couvert de simplification de la déclaration et du nombre de travailleurs handicapés, le Gouvernement exonère toujours plus les entreprises de leurs obligations.
Ainsi, les dépenses destinées à favoriser l’insertion ou le maintien dans l’emploi des travailleurs handicapés pourront être déduites de la contribution versée par les entreprises qui ne disposent pas de 6 % de travailleurs handicapés. Autrement dit, ce sont les personnes en situation de handicap qui financent elles-mêmes les travaux d’adaptation dans les entreprises que les patrons refusent de financer eux-mêmes.
L’assouplissement des obligations en matière d’emploi des employeurs publics et privés ne pourrait s’entendre que si l’objectif de 6 % était atteint dans les établissements et si le taux de chômage des personnes en situation de handicap n’était pas de 19 %, soit près de deux fois supérieur au taux moyen de chômage de la population.
Nous ne pensons pas que le fait de développer l’emploi précaire en intérim sera de nature à répondre aux exigences d’insertion professionnelle des personnes handicapées.
Si, aujourd’hui, les entreprises sont réticentes à adapter leurs locaux aux personnes en situation de handicap, il paraît peu crédible que les sociétés d’intérim réalisent des travaux pour ces travailleurs dont la situation est plus qu’incertaine.
M. le président. L’amendement n° 291, présenté par Mmes Grelet-Certenais et Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Remplacer le nombre :
250
par le nombre :
50
La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais.
Mme Nadine Grelet-Certenais. Le seuil de déclenchement de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés pour les entreprises à établissements multiples paraît bien trop élevé. Des chaînes d’hôtel ou encore de prêt-à-porter pourraient ainsi facilement être exonérées de l’OETH.
Cet amendement tend donc à abaisser ce seuil à 50 salariés, afin de conserver une réelle ambition pour l’obligation d’emploi.
M. le président. L’amendement n° 389, présenté par Mme Grelet-Certenais, M. Daudigny, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéas 21 à 27
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais.
Mme Nadine Grelet-Certenais. Cet amendement vise à revenir à la rédaction actuelle de l’article L. 5212-7 du code du travail, car les modifications proposées par le présent projet de loi constituent une atteinte aux principes mêmes de l’OETH.
En effet, la rédaction actuelle de cet article présente le double avantage de préciser que l’employeur peut s’acquitter partiellement de l’OETH et de plafonner le recours aux stages et aux immersions à 2 % de l’effectif total des salariés de l’entreprise.
Si l’accès aux stages ou à l’immersion représente effectivement l’une des voies pour massifier l’emploi des personnes en situation de handicap, cette possibilité figure déjà dans la loi et permet aux employeurs d’intégrer ces types d’emploi dans le calcul du quota.
En supprimant le plafond de recours aux stages et autres, le risque existe de fragiliser et de dénaturer ainsi l’OETH. L’emploi, y compris pour les personnes en situation de handicap, c’est avant tout un véritable contrat de travail.
M. le président. L’amendement n° 390, présenté par Mme Grelet-Certenais, M. Daudigny, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 22
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 5212-7. – L’employeur peut s’acquitter partiellement de son obligation d’emploi, et dans la limite de 30 % de cette dernière, en employant :
La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais.
Mme Nadine Grelet-Certenais. Il s’agit d’un amendement de repli qui tend à conserver le dispositif proposé par le Gouvernement, tout en posant deux garde-fous essentiels pour préserver l’ambition première de l’obligation d’emploi.
Nous proposons donc de réaffirmer que le recours aux stages ou aux immersions pour satisfaire les exigences de l’OETH ne peut être que partiel, et de plafonner ce recours à 30 %, taux qui nous paraît un peu plus fiable.
Cette option permettrait d’éviter un déplafonnement total et de favoriser l’emploi direct des travailleurs handicapés.
M. le président. L’amendement n° 753, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 22
Supprimer les mots :
en employant
II. – Alinéa 23
1° Au début, insérer les mots :
En accueillant en stage
2° Supprimer les mots :
accueillis en stage par l’employeur
III. – Alinéa 24
1° Au début, insérer les mots :
En accueillant
2° Supprimer le mot :
accueillis
IV. – Alinéa 25
1° Au début, insérer les mots :
En employant
2° Supprimer les mots :
des entreprises
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
M. le président. L’amendement n° 634, présenté par Mme Schillinger, MM. Lévrier, Rambaud, Patriat, Amiel, Bargeton, Karam, Marchand, Mohamed Soilihi, Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Alinéa 29
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 5212-7-2. – Peut être pris en compte, dans le calcul du nombre de bénéficiaires de l’obligation d’emploi mentionnés à l’article L. 5212-13, l’effort consenti par l’entreprise en faveur des bénéficiaires qui rencontrent des difficultés particulières de maintien en emploi, selon des modalités fixées par décret. » ;
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Au-delà des difficultés à l’embauche que rencontrent les personnes en situation de handicap, la question du maintien en emploi de ces dernières, notamment les seniors, est une préoccupation majeure qui reste cependant trop souvent oubliée.
L’article 40, qui a précisément pour objet de valoriser l’emploi des travailleurs handicapés seniors, mériterait d’être réécrit, afin de gagner en intelligibilité et en cohérence, au regard des principes qui doivent être posés dans la loi sur ce sujet, notamment les modalités précises de mise en œuvre, qui relèvent bien du domaine réglementaire.
M. le président. L’amendement n° 187 rectifié, présenté par MM. Chasseing, Capus, Guerriau, Decool, A. Marc, Lagourgue, Fouché et Malhuret, Mme Mélot, MM. Wattebled et Longeot, Mme Goy-Chavent, M. L. Hervé, Mme Vullien, M. Moga et Mme Gatel, n’est pas soutenu.
L’amendement n° 758, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 52
1° Première phrase
Supprimer cette phrase.
2° Dernière phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
Ce décret fixe, d’une part, les modalités de calcul de la limite maximale de la contribution, en prenant en compte l’effectif de travailleurs handicapés de l’entreprise assujettie, et, d’autre part, les modalités de modulation du montant de la contribution.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
M. le président. L’amendement n° 391, présenté par Mme Grelet-Certenais, M. Daudigny, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 52
1° Première phrase
Remplacer l’année :
2025
par l’année :
2021
2° Deuxième phrase
Remplacer l’année :
2020
par l’année :
2019
et l’année :
2024
par l’année :
2020
La parole est à Mme Michelle Meunier.
Mme Michelle Meunier. Les délais de mise en œuvre envisagés par le Gouvernement, et définis par voie d’amendement en séance publique à l’Assemblée nationale, sont trop longs au regard des objectifs de la réforme – c’est ce que nous ont dit de nombreuses associations.
C’est pourquoi cet amendement tend à une accélération de la mise en œuvre de l’obligation d’emploi pour les entreprises à établissements multiples.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. S’agissant de l’amendement n° 633, la modification des règles concernant les entreprises pluri-établissements proposée paraît un peu brutale. C’est pourquoi la notion de seuil a été introduite en commission. De plus, lors de la négociation, il faudrait reprendre les discussions sur les accords trouvés dans ces types d’entreprises.
Nous avons adopté une position modérée de négociation, l’objectif étant que les entreprises s’acquittent de leur obligation, en adaptant les règles au contexte économique de ces structures. Tous les styles d’entreprises sont concernés, qu’il s’agisse des grands groupes ou de structures plus modestes.
Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
L’amendement n° 492 vise à supprimer l’ensemble des modalités introduites par le Gouvernement pour favoriser l’emploi direct des personnes handicapées, notamment le changement de périmètre de déduction des montants des contrats de sous-traitance avec les ESAT et les entreprises adaptées.
En effet, le projet de loi entend déduire ces montants du niveau non plus de l’obligation, mais de la contribution financière dont sont redevables les entreprises qui ne comprendront pas 6 % de salariés handicapés. Cette nouvelle forme de déduction a pour objet de réduire la mise en œuvre indirecte de l’obligation par des recours à des contrats externes, et de favoriser l’emploi direct.
Nous ne pouvons que nous montrer défavorables à cet amendement, car il remet en cause l’esprit du texte que nous soutenons.
Les auteurs de l’amendement n° 291 ne semblent pas avoir bien perçu que nous ne proposions pas d’exonération de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés pour les entreprises pluri-établissements de moins de 250 salariés, mais qu’il s’agissait du maintien de l’acquittement établissement par établissement. Nous avons adopté un dispositif plus adapté aux exigences particulières de ces entreprises.
Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Bien qu’elle comprenne l’intention qui anime ses auteurs, la commission est également défavorable à l’amendement n° 389, en raison de la volonté très claire exprimée par les associations de travailleurs handicapés elles-mêmes de réduire toute forme d’entrave possible à l’embauche. Toutes les formes d’emploi, englobant même les stages et les emplois intérimaires, doivent être ouvertes sans restriction aux travailleurs handicapés.
Par ailleurs, le Gouvernement nous a assuré – nous attendons les précisions de Mme la secrétaire d’État sur ce point – que l’encadrement du recours à ces formes d’emploi précaire figurerait dans le décret d’application du présent article, vraisemblablement sous la forme de quota.
L’amendement n° 390 vise les mêmes objectifs que le précédent, mais par des voies différentes. Il s’agit de ne réserver que 30 % de l’obligation aux nouvelles formes d’emploi que sont les stages, les périodes de mise en situation en milieu professionnel, les PMSMP, et le travail intérimaire. Pour les mêmes raisons, la commission y est défavorable.
La rédaction de l’amendement n° 634 n’est satisfaisante qu’en apparence : celui-ci tend, certes, à revenir sur la position du Gouvernement qui limitait la possibilité pour les employeurs de moduler leur contribution en fonction des seuls bénéficiaires de l’obligation ayant un certain âge. En effet, la disposition retenue revenait entièrement sur le droit en vigueur, qui prévoit la même modulation pour les bénéficiaires dont le handicap est particulièrement lourd, pour ceux qui sont en chômage de longue durée ou pour ceux qui viennent d’ESAT ou d’entreprise adaptée. Elle était donc contraire à l’objectif d’inclusion des travailleurs handicapés les plus éloignés de l’emploi.
La nouvelle rédaction suggérée par les auteurs de cet amendement ne fait plus spécifiquement mention de l’âge des bénéficiaires, pour revenir à la notion plus large de « difficultés particulières », ce qui semble aller dans le bon sens. Pour autant, son objet vise clairement le seul cas des travailleurs handicapés seniors. Est donc réaffirmée, implicitement, la volonté du Gouvernement de réserver les seuls critères de modulation de la contribution aux bénéficiaires âgés. Or nous souhaitons que les autres critères actuels soient également maintenus.
C’est pourquoi la commission est défavorable à cet amendement.
Enfin, concernant l’amendement n° 391, l’intention du Gouvernement est de mener la réforme du travail des personnes handicapées, dont ce projet de loi ne constitue que le premier volet, en plusieurs temps.
Une autre réforme sur l’offre de services déployée par l’AGEFIPH pour les entreprises, dont nous devons d’ailleurs discuter les termes de la mise en œuvre, sera engagée vraisemblablement l’an prochain. Les délais fixés dans le projet de loi nous paraissent donc plus opportuns.
La commission émet par conséquent un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État. L’amendement n° 633 tend à assujettir toutes les entreprises à établissements multiples au niveau de l’entreprise en supprimant le seuil de 250 salariés introduit par la commission des affaires sociales du Sénat.
Je suis favorable à cet amendement, qui est conforme à l’esprit et à la lettre de la réforme de l’obligation d’emploi telle qu’elle a été présentée par le Gouvernement et adoptée par l’Assemblée nationale.
L’assujettissement à l’échelon de l’entreprise permet de simplifier les formalités des entreprises ; il est cohérent avec le niveau de pilotage des politiques des ressources humaines.
Afin de maîtriser l’effet de cette mesure sur les charges des entreprises, il est prévu d’encadrer de façon provisoire les éventuelles augmentations de la contribution qu’une entreprise assujettie serait amenée à supporter.
Le Gouvernement est en revanche défavorable à l’amendement n° 762, car celui-ci vise à conserver l’assujettissement à l’obligation d’emploi au niveau de l’établissement en cas de signature d’un accord par les partenaires sociaux.
L’assujettissement à l’échelon de l’entreprise permet de simplifier les formalités des entreprises ; il est cohérent avec le niveau de pilotage des politiques des ressources humaines en faveur de l’emploi des travailleurs handicapés.
Le Gouvernement est également défavorable à l’amendement n° 492.
Il demande le retrait de l’amendement n° 291 ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Il est défavorable aux amendements nos 389 et 390.
Il est favorable à l’amendement n° 753.
L’amendement n° 634 vise à préciser la rédaction de la disposition ayant pour objectif final de valoriser l’emploi des travailleurs handicapés seniors. Le Gouvernement y est entièrement favorable, car les dispositions de cet amendement permettent de conforter et de sécuriser la prise en compte spécifique des travailleurs handicapés les plus âgés, afin d’inciter au maintien en emploi dans l’entreprise de ces salariés et de lutter contre des licenciements pour inaptitude.
Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 758.
Enfin, il est défavorable à l’amendement n° 391.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 633.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe La République En Marche.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 218 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 252 |
Pour l’adoption | 20 |
Contre | 232 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 762.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, les amendements nos 492 et 291 n’ont plus d’objet.
Je mets aux voix l’amendement n° 389.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. En conséquence, l’amendement n° 391 n’a plus d’objet.
L’amendement n° 231 rectifié bis, présenté par Mme Deroche, M. Savary, Mmes Berthet et Procaccia, M. Piednoir, Mme Morhet-Richaud, M. Lefèvre, Mmes Di Folco et de Cidrac, M. Pierre, Mme Micouleau, M. B. Fournier, Mme Bonfanti-Dossat, M. Cuypers, Mmes Lassarade et Delmont-Koropoulis, MM. Bazin et Brisson, Mmes Garriaud-Maylam, Estrosi Sassone et Bruguière, MM. D. Laurent et Charon, Mme Gruny, MM. Longuet, Laménie, Dallier, Babary, Cambon et Sido, Mme Lamure et MM. Buffet, Pillet, Poniatowski et Revet, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 10
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au second alinéa de l’article L. 5212-3, après le mot : « temporaire », sont insérés les mots : « et les entreprises de portage salarial »
La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis.
Mme Annie Delmont-Koropoulis. Dans son fonctionnement et conformément à l’article L. 1254-2 du code du travail, l’entreprise de portage salarial ne procède pas à une action de recrutement pour ses salariés portés. En effet, ce sont ces derniers qui font le choix de rejoindre une telle entreprise.
Il ne s’agit évidemment pas de remettre en cause les acquis de la loi de 2005 ni le principe de l’intégration de personnes en situation de handicap dans le monde professionnel, mais il est techniquement impossible pour les entreprises de portage salarial de mener une politique de recrutement à destination des personnes en situation de handicap.
C’est pourquoi cet amendement vise à exclure les salariés portés de la détermination de l’assiette de l’assujettissement à l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés pour les sociétés de portage.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Juridiquement, les modèles économiques de l’entreprise de travail temporaire et de l’entreprise de portage salarial sont assez proches : les deux reposent en effet sur la mise à disposition lucrative d’une partie de leurs salariés.
Or la loi prévoit que les entreprises de travail temporaire ne sont redevables de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés que pour la part permanente de leurs salariés, admettant donc le principe d’une OETH au périmètre réduit.
En toute logique, le même principe devrait s’appliquer aux entreprises de portage salarial.
La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État. Je comprends la motivation des auteurs de cet amendement, l’entreprise de portage salarial ne se trouvant en effet pas dans la même situation qu’un employeur classique, puisqu’elle ne mène pas une politique de ressources humaines de recrutement et de maintien en emploi des salariés portés.
Mais cette mesure relative au décompte des effectifs des entreprises mérite une expertise complémentaire et pourrait être examinée dans le cadre du projet de loi PACTE, ou plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises, dont certaines dispositions portent précisément sur cette thématique.
C’est pourquoi le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 436 rectifié bis, présenté par MM. Longeot et L. Hervé, Mmes Doineau et Joissains, MM. Capo-Canellas et Mizzon, Mme de la Provôté, MM. Henno, Janssens et Delahaye, Mme Sollogoub, M. Le Nay et Mmes Guidez, Férat, Billon et Létard, est ainsi libellé :
Alinéas 11 à 15
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Jean-Marie Mizzon.
M. Jean-Marie Mizzon. Cet amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 751, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 13, dernière phrase
Après la référence :
L. 213-1
insérer les mots :
ou à l’article L. 752-4
II. – Alinéa 32, seconde phrase
Après la référence :
L. 213-1
insérer les mots :
ou à l’article L. 752-4
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 436 rectifié bis.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, monsieur le président.
Quant à l’amendement n° 436 rectifié bis, son dispositif ne paraît pas tout à fait en phase avec son objet. Comme c’était le cas pour une série d’amendements précédents, son objet dénonce les nouvelles voies d’acquittement de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés. Or, pour notre part, nous sommes convaincus que ces dispositions favoriseront l’emploi direct.
En outre, le strict dispositif de l’amendement contient seulement la suppression du nouveau mode de déclaration de l’obligation d’emploi, en vertu duquel l’employeur doit verser ses données via la DSN. Nous sommes favorables à cette modification, qui ouvrira la voie à des facilités accrues pour les entreprises.
Qu’il s’agisse du fond de l’amendement ou des intentions qui le sous-tendent, nous émettons donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 436 rectifié bis et favorable à l’amendement n° 751.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 436 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L’amendement n° 107 rectifié ter est présenté par M. Longeot, Mmes Sollogoub et Morin-Desailly, MM. Médevielle, Cigolotti, Cadic, Moga et Janssens, Mme Vermeillet, MM. Henno et Kern et Mmes Gatel, Billon et Vullien.
L’amendement n° 186 rectifié bis est présenté par MM. Chasseing, Capus, Guerriau, Decool, A. Marc, Lagourgue, Fouché et Malhuret, Mme Mélot, M. Wattebled, Mme Goy-Chavent et M. L. Hervé.
L’amendement n° 414 rectifié bis est présenté par Mmes Berthet, Deromedi et Morhet-Richaud, M. Brisson, Mmes Bonfanti-Dossat et Gruny, MM. H. Leroy, Laménie et Savary, Mmes Deroche, Delmont-Koropoulis et Garriaud-Maylam, M. Carle, Mme Boulay-Espéronnier et M. Gremillet.
L’amendement n° 767 est présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 31, première phrase
Supprimer les mots :
, pour une durée maximale de trois ans, renouvelable une fois
II. – Alinéa 53
Supprimer cet alinéa.
Les amendements nos 107 rectifié ter et 186 rectifié bis ne sont pas soutenus.
La parole est à Mme Jacky Deromedi, pour présenter l’amendement n° 414 rectifié bis.
Mme Jacky Deromedi. L’article 40 prévoit la fin des accords dits « agréés », en limitant leur durée à six ans maximum.
Les établissements d’enseignement supérieur n’ont pas été invités à participer à la concertation dont procède cet article. Or celui-ci aurait pour conséquence de mettre fin au principal mode de financement des missions « handicap » des établissements d’enseignement supérieur, tant privés que publics. En effet, les subventions publiques des ministères de tutelle fléchées vers le handicap sont rares, voire inexistantes. Les établissements de l’enseignement supérieur ont donc mis en place et développé leurs politiques en faveur de la réussite des étudiants en situation de handicap grâce au financement complémentaire issu de ces accords agréés.
Aujourd’hui, les établissements d’enseignement supérieur ayant des politiques inclusives exemplaires sont ceux qui bénéficient de ces partenariats pluriannuels inscrits dans le cadre des accords agréés – il s’agit du soutien à la formation des personnes handicapées et du sourcing – qui leur permettent d’accompagner au mieux les étudiants, avec une vision à long terme.
La fin des accords agréés affecterait directement et durablement l’accès à l’enseignement supérieur des personnes en situation de handicap et, partant, leur insertion professionnelle. Les établissements ne seraient plus en mesure de financer ni les aménagements, qu’il s’agisse du mobilier, du matériel ou des aides humaines, ni les frais annexes – assurances, surcoûts discriminatoires, etc.
Cet amendement vise donc à supprimer la limitation dans le temps des accords agréés, afin d’assurer la pérennité et le développement des politiques menées en faveur des étudiants en situation de handicap dans l’enseignement supérieur.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l’amendement n° 767.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Madame la secrétaire d’État, je sais que nous ne défendons pas la même vision des accords agréés. Toutefois, la commission a réellement pris le temps, non seulement de rencontrer les représentants des entreprises, mais aussi d’analyser les travaux de la DARES. Je peux donc vous le dire en toute objectivité : les retours que nous avons enregistrés sont plutôt favorables aux dispositions que nous proposons.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État. Monsieur le rapporteur, vous venez de le souligner, nous ne sommes pas tout à fait d’accord quant à l’effet de cette mesure.
À mon sens, le fait de limiter à six ans maximum la durée des accords agréés permettra de redynamiser le dispositif et, ainsi, d’en faire un véritable levier en faveur de la mise en œuvre, dans l’entreprise, d’une politique volontariste de recrutement et de maintien en emploi des travailleurs handicapés.
De surcroît, le travail de rénovation de l’offre de services, qui sera engagé la semaine prochaine, devra notamment dégager des solutions d’accompagnement et des prestations plus efficientes et réactives en faveur des employeurs.
Pour ces raisons, nous sommes défavorables à ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 414 rectifié bis et 767.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 635, présenté par Mme Schillinger, MM. Lévrier, Patriat, Rambaud, Amiel, Bargeton, Karam, Marchand, Mohamed Soilihi, Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 31, seconde phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
Les mentions obligatoires de cet accord et les conditions dans lesquelles cet accord est agréé par l’autorité administrative sont fixées par décret en Conseil d’État.
II. – Après l’alinéa 48
Insérer alinéa ainsi rédigé :
…° À l’article L. 5212-17, les mots : « , notamment les conditions dans lesquelles l’accord collectif prévu à l’article L. 5212-8 est agréé par l’autorité administrative » sont supprimés ;
La parole est à M. Martin Lévrier.
M. Martin Lévrier. L’article 40 dispose que l’employeur peut s’acquitter de son obligation d’emploi en faisant application d’un accord de branche, de groupe ou d’entreprise agréé comprenant la mise en œuvre d’un programme pluriannuel en faveur des travailleurs handicapés, pour une durée maximale de trois ans renouvelable une fois.
Dans un souci de cohérence des normes, il paraît important de préciser la nécessité de prévoir, par décret en Conseil d’État, la procédure d’agrément de l’accord, ainsi que la nature des plans d’action conditionnant l’agrément.
M. le président. Le sous-amendement n° 770, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Amendement n° 635, alinéas 1 à 3
Rédiger ainsi ces alinéas :
I. – Après l’alinéa 31
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les mentions obligatoires de cet accord et les conditions dans lesquelles cet accord est agréé par l’autorité administrative sont fixées par décret en Conseil d’État. » ;
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Ce sous-amendement tend tout simplement à préserver l’évaluation triennale des accords agréés que nous avons adoptée en commission.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État. Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 635 et au sous-amendement n° 770.
M. le président. L’amendement n° 759, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 49
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le dernier alinéa de l’article L. 5213-11 est supprimé.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer l’interdiction de cumuler l’aide financière apportée à l’embauche par l’AGEFIPH et la modulation de la contribution en fonction de critères spécifiques de la personne embauchée.
À nos yeux, ces deux mécanismes d’incitation financière peuvent servir des objectifs différents : le maintien dans l’emploi pour le premier, l’embauche pour le second. La règle de leur non-cumul ne répond donc pas à un impératif d’efficacité ou d’économie. Elle doit, dès lors, être supprimée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 752, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 56
Remplacer le mot :
susmentionnée
par le mot :
susmentionnés
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 40, modifié.
(L’article 40 est adopté.)
Article 40 bis
L’article L. 1222-9 du code du travail est ainsi modifié :
1° Le dernier alinéa du I est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsque la demande de recours au télétravail est formulée par un travailleur handicapé mentionné à l’article L. 5212-13, l’employeur motive, le cas échéant, sa décision de refus. » ;
2° Le II est complété par un 5° ainsi rédigé :
« 5° Les modalités d’accès des travailleurs handicapés à une organisation en télétravail, en application des mesures prévues par l’article L. 5213-6. » ;
3° (nouveau) – Un décret en Conseil d’État fixe les conditions dans lesquelles les dispositions du présent article s’appliquent aux agents mentionnés à l’article L. 323-2.
M. le président. L’amendement n° 392, présenté par Mme Grelet-Certenais, M. Daudigny, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après la référence :
L. 5212-13
insérer les mots :
ou un proche aidant mentionné à l’article L. 113-1-3 du code de l’action sociale et des familles
La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais.
Mme Nadine Grelet-Certenais. Cet amendement vise à ce que l’obligation de motiver le refus de télétravail soit étendue, en faveur aussi bien des personnes en situation de handicap que des proches aidants.
Nous souhaitons élargir ce droit aux proches aidants afin de permettre une meilleure conciliation des vies professionnelle et familiale tout en évitant la rupture du lien professionnel. On connaît les grandes difficultés auxquelles les personnes concernées se heurtent à cet égard.
Le télétravail constitue une réponse adaptée aux besoins de temps qu’éprouvent les aidants. Il permet de garder un lien avec l’entreprise et facilite par là même le retour à l’emploi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. La commission estime que ces dispositions sont fort intéressantes. Au demeurant, elles s’inscrivent dans la droite ligne de la proposition de loi, rapportée par notre collègue Jocelyne Guidez et soutenue par le Gouvernement, qui prévoyait le don de jours de repos au profit des proches aidants.
L’élargissement du télétravail s’inscrit dans le prolongement des facilités qu’il est nécessaire de ménager aux aidants. Voilà pourquoi la commission est favorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État. Madame la sénatrice, je comprends tout à fait la philosophie qui sous-tend votre amendement : le sujet des proches aidants est crucial.
Toutefois, cet amendement ne me paraît pas adapté. En effet, l’obligation de motiver le refus du télétravail est d’ores et déjà générale, dès lors que le poste est éligible. Elle ne s’applique pas spécifiquement à une catégorie de travailleurs. La mesure que vous proposez n’aurait donc pas d’effet concret.
Surtout, le télétravail est une forme d’organisation qui implique une réflexion quant aux méthodes et aux structures de production de l’entreprise. Il doit donc demeurer un outil concerté entre le salarié et son employeur.
Enfin, le Gouvernement s’est engagé à déployer un plan global d’aide aux aidants. Ce plan comprendra un volet relatif à l’amélioration des conditions de l’articulation entre vie professionnelle et soutien aux personnes âgées. Des mesures seront donc rapidement prises dans ce cadre.
Pour toutes ces raisons, je suis défavorable à cet amendement.
M. Yves Daudigny. Très bien !
M. le président. L’amendement n° 493, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 4
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Le III est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le télétravailleur se trouve en situation de handicap, l’employeur doit prendre des mesures afin d’assurer l’accueil du salarié dans les locaux de l’entreprise et son intégration au collectif de travail, dans les mêmes conditions que les autres salariés. » ;
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. L’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap est un grand sujet de préoccupation.
Dans ce cadre, les dispositions de l’article 40 bis présentent, selon nous, un intérêt certain ou un certain intérêt. Elles permettent notamment d’éviter les déplacements du domicile au lieu de travail : dont acte.
Toutefois, il nous semble essentiel de compléter cet article, afin d’encadrer le recours au télétravail pour les personnes en situation de handicap.
À travers cet amendement, nous soulevons deux enjeux distincts.
Premièrement, il s’agit de rappeler que, face à l’enjeu de l’accessibilité et de l’intégration des personnes en situation de handicap dans le monde du travail, l’on ne saurait se contenter de renvoyer les intéressés chez eux, pour exercer leur activité professionnelle : chacun en conviendra.
On le sait bien, l’application de la loi de 2005 relative, notamment, à la mise en accessibilité des bâtiments est bien trop limitée. Il est à craindre que ce qui est censé être une mesure de facilitation du travail des personnes en situation de handicap ne soit en définitive un simple moyen, pour l’employeur, d’échapper à ses devoirs.
De fait, en encadrant le télétravail des personnes en situation de handicap, particulièrement en prévoyant que ces télétravailleurs ou télétravailleuses sont appelés à se présenter dans l’entreprise régulièrement et qu’ils y disposent de locaux, on reste dans l’esprit de l’article tout en écartant les effets d’aubaine qu’il pourrait déclencher.
Deuxièmement, nous cherchons à favoriser l’insertion des personnes en situation de handicap, non pas seulement dans l’emploi, mais dans un collectif de travail.
En effet, tel que l’article 40 bis est rédigé, c’est un véritable régime dérogatoire qui est prévu, lequel risque de conduire à l’isolement de personnes qui ne demandent qu’à être intégrées dans une équipe. L’enjeu est donc bien d’assurer une insertion adaptée dans l’entreprise, ce qui doit passer par un minimum de présence dans les locaux, avec les collègues. Ce faisant, on permet de créer des liens conduisant, d’ailleurs, à une meilleure synergie des équipes.
Tout l’enjeu du télétravail étant d’éviter des complications, notamment de transport, on ne saurait imposer aux salariés une présence quotidienne dans l’entreprise. Le but est bien plutôt que les entreprises définissent le cadre d’une présence régulière, en leur sein, des travailleurs en situation de handicap, en concertation avec eux.
Il s’agit de favoriser une réelle intégration en milieu ordinaire – à cet égard, madame la secrétaire d’État, je me rappelle les propos que vous avez tenus lors de vos vœux – tout en prenant en compte la spécificité de tous les handicaps : il est à craindre qu’une telle généralisation du télétravail ne conduise les entreprises à éloigner l’ensemble des personnes en situation de handicap, soit par méconnaissance, soit par facilité. Cela ne serait bon ni pour ces travailleuses et ces travailleurs ni pour les entreprises.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Les dispositions de cet amendement reposent sur la présomption qu’un employeur pourrait encourager le recours au télétravail d’une personne handicapée afin de s’épargner l’aménagement du poste de travail de celle-ci. Or l’ouverture du télétravail aux personnes handicapées n’exonérera en aucun cas l’employeur de ses obligations légales à cet égard, d’autant que le télétravail n’est pas toujours exercé à temps plein et que le télétravailleur doit souvent assurer un temps de présence sur son lieu de travail.
Cet amendement me semble donc satisfait par le droit en vigueur, et la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État. Pour les raisons que M. le rapporteur vient d’exposer, le Gouvernement émet, lui aussi, un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 40 bis, modifié.
(L’article 40 bis est adopté.)
Article 40 ter
Après l’article L. 5213-6 du code du travail, il est inséré un article L. 5213-6-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 5213-6-1. – Dans toute entreprise employant au moins deux cent cinquante salariés, est désigné un référent chargé d’orienter, d’informer et d’accompagner les personnes en situation de handicap. »
Mme Laurence Cohen. Nous votons pour cet article – cela nous arrive de le faire ! (Sourires.)
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Il faut le souligner, car c’est rare ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 40 ter.
(L’article 40 ter est adopté.)
Article additionnel après l’article 40 ter
M. le président. L’amendement n° 761, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’article 40 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre II du titre IV du livre II de la deuxième partie du code du travail est ainsi modifié :
1° La section 1 est ainsi modifiée :
a) Après l’article L. 2242-2, il est inséré un article L. 2242-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 2242-2-1. – Dans les entreprises à établissements multiples mentionnées à l’article L. 5212-3, l’employeur engage, au moins une fois tous les quatre ans, en plus des négociations mentionnées à l’article L. 2242-1, une négociation sur l’insertion et le maintien dans l’emploi des travailleurs handicapés. » ;
b) La première phrase du premier alinéa de l’article L. 2242-3 est ainsi modifiée :
- les mots : « relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes » sont supprimés ;
- les mots : « de la négociation mentionnée au 2° de l’article L. 2242-1 » sont remplacés par les mots : « des négociations mentionnées au 2° de l’article L. 2242-1 et à l’article L. 2242-2-1 » ;
- à la fin, les mots : « l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes » sont remplacés par les mots : « les objectifs visés par ces négociations » ;
c) À l’article L. 2242-4, la référence : « et L. 2242-2 » est remplacée par la référence : « à L. 2242-2-1 » ;
2° La section 2 est ainsi modifiée :
a) À la fin du 1° de l’article L. 2242-11, la référence : « et à l’article L. 2242-2 » est remplacée par les références : « , à l’article L. 2242-2 et à l’article L. 2242-2-1 » ;
b) À l’article L. 2242-12, la référence : « et à l’article L. 2242-2 » est remplacée par les références : « , à l’article L. 2242-2 et à l’article L. 2242-2-1 » ;
3° L’article L. 2242-13 est ainsi modifié :
a) Après le 2°, il est inséré un 2° bis ainsi rédigé :
« 2° bis Chaque année, dans les entreprises mentionnées à l’article L. 2242-2-1, une négociation sur l’insertion et le maintien dans l’emploi des personnes handicapées, dans les conditions prévues à la sous-section 1 de la section 3 du chapitre III du titre Ier du livre II de la cinquième partie du présent code ; »
b) Au cinquième alinéa, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « trois ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Mes chers collègues, cet amendement est le pendant de celui que je vous ai présenté plus tôt, à propos des entreprises pluri-établissements.
Il s’agit de conditionner le maintien de la règle actuelle de calcul de l’OETH à l’échelle de l’établissement, qui est favorable à ces entreprises, à la signature d’un accord d’entreprise à l’issue d’une négociation annuelle obligatoire.
En effet, il ne paraît pas incongru que ce thème figure au rang des discussions annuelles obligatoires, compte tenu en particulier du statut et de la taille de ces structures. La signature d’un accord leur permettra de conserver la règle de calcul établissement par établissement. J’insiste : faute d’accord, la règle de calcul par entreprise s’appliquerait. Je crois fondamentalement au caractère incitatif de cette mesure.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État. Monsieur le rapporteur, la volonté du Gouvernement est claire. Nous souhaitons conforter la mobilisation des partenaires sociaux en faveur de l’emploi des travailleurs handicapés. Néanmoins, les dispositions que vous proposez ne sont pas cohérentes avec la nouvelle architecture conventionnelle issue des ordonnances Travail adoptées à l’automne dernier.
Désormais, la négociation obligatoire porte sur la rémunération, le temps de travail, le partage de la valeur ajoutée dans l’entreprise, l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la qualité de vie au travail.
Les thèmes relatifs à la qualité de vie au travail, qui incluent la politique d’emploi des travailleurs handicapés, sont définis par les partenaires sociaux. C’est dans ce cadre que ce sujet est abordé, sauf si les partenaires sociaux choisissent de ne pas l’inscrire à leur agenda social. Mais la négociation sur l’insertion et le maintien en emploi des travailleurs handicapés est en réalité obligatoire.
Pour ces raisons, j’émets un avis défavorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 40 ter.
Article 40 quater
(Supprimé)
Article additionnel après l’article 40 quater
M. le président. L’amendement n° 292, présenté par Mmes Grelet-Certenais et Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’article 40 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- L’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La discrimination inclut le refus de mettre en place les aménagements raisonnables requis en faveur d’une personne mentionnée à l’article L. 5212-13 du code du travail. »
II. - L’article 6 sexies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le refus de l’employeur de prendre les mesures appropriées peut être constitutif d’une discrimination. »
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.
Mme Sophie Taillé-Polian. Conformément aux recommandations qu’a exprimées le Défenseur des droits dans son avis au Parlement du 28 mai dernier, cet amendement vise à transposer, dans notre législation nationale relative aux discriminations fondées sur le handicap, l’obligation d’aménagement raisonnable définie par l’article 5 de la directive du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail.
Cette directive n’a été que partiellement transposée, et certains secteurs de travail et d’emploi échappent à l’obligation édictée au nom du droit national. Or, en 2013, l’Italie a été condamnée par la Cour de justice de l’Union européenne, la CJUE, pour de tels manquements.
L’article 2 de la convention internationale relative aux droits des personnes handicapées, la CIDPH, ratifiée par la France en 2010, mentionne : « La discrimination fondée sur le handicap comprend toutes les formes de discrimination, y compris le refus d’aménagement raisonnable ».
Cet amendement tend donc à pallier le caractère insuffisant de notre législation, afin de sécuriser le droit national et d’améliorer les conditions d’accès et de maintien en emploi des personnes en situation de handicap.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Les dispositions de cet amendement semblent déjà largement satisfaites par l’article 1er de la loi du 27 mai 2008, relative à la lutte contre les discriminations. En vertu de cet article, « constitue une discrimination directe la situation dans laquelle, sur le fondement […] de son handicap […], une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est ».
En outre, la discrimination indirecte est définie comme la disposition susceptible d’entraîner un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d’autres. Or le défaut d’aménagement du poste de travail par l’employeur, en ce qu’il place la personne handicapée dans une situation moins favorable ou entraîne pour elle un désavantage particulier, est déjà parfaitement constitutif d’une discrimination directe ou indirecte.
En conséquence, je demande le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Taillé-Polian, l’amendement n° 292 est-il maintenu ?
Mme Sophie Taillé-Polian. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 292.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 41
À la première phrase du premier alinéa du I de l’article L. 133-5-3 du code de la sécurité sociale, après le mot : « caractéristiques », sont insérés les mots : « de l’emploi et ». – (Adopté.)
Article 42
I. – Le code du travail est ainsi modifié :
1° L’article L. 323-2 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après le mot : « public, », sont insérés les mots : « les groupements de coopération sanitaire lorsque ceux-ci sont qualifiés de personne morale de droit public au sens de l’article L. 6133-3 du code de la santé publique, », les mots : « y compris ceux qui sont » sont remplacés par les mots : « ainsi que les établissements » et les références : « L. 5212-6 à L. 5212-7-1 » sont remplacées par les références : « L. 5212-7, L. 5212-7-1, L. 5212-10-1 » ;
b) Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« Tout employeur public qui occupe au moins vingt agents au moment de sa création ou en raison de l’accroissement de son effectif dispose, pour se mettre en conformité avec l’obligation d’emploi, d’un délai déterminé par décret qui ne peut excéder la durée prévue à l’article L. 5212-4.
« L’application du présent article fait l’objet, chaque année, d’un rapport présenté aux comités techniques ou aux instances en tenant lieu et au Conseil commun de la fonction publique. » ;
1° bis L’article L. 323-5 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les références : « aux articles L. 323-1 et L. 323-2 » sont remplacées par la référence : « à l’article L. 323-2 du présent code » et, à la fin, la référence : « L. 323-1 » est remplacée par la référence : « L. 5212-2 du présent code » ;
b) Le troisième alinéa est supprimé ;
c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« L’âge des bénéficiaires mentionnés aux troisième et avant-dernier alinéas du présent article et à l’article L. 5212-13 est pris en compte dans le calcul des effectifs de bénéficiaires de l’obligation d’emploi selon des modalités déterminées par décret en Conseil d’État. » ;
2° L’article L. 323-8 est abrogé ;
2° bis Au premier alinéa du II de l’article L. 323-8-6-1, le mot : « à » est remplacé par les mots : « au première alinéa de » ;
2° ter Au troisième alinéa du III du même article L. 323-8-6-1, après la deuxième occurrence du mot : « hospitalière », sont insérés les mots : « les groupements de coopération sanitaire lorsque ceux-ci sont qualifiés de personne morale de droit public au sens de l’article L. 6133-3 du code de la santé publique » ;
3° Le IV du même article L. 323-8-6-1 est ainsi modifié :
aa) Au premier alinéa, le mot : « à » est remplacé par les mots : « au premier alinéa de » ;
ab) À la seconde phrase du deuxième alinéa, les mots : « de 6 % » sont remplacés par les mots : « fixée à l’article L. 5212-2 » ;
a) Le troisième alinéa est supprimé ;
a bis) (nouveau) A la fin de la seconde phrase du quatrième alinéa, la référence : « L. 5214-1 » est remplacée par la référence : « L. 5212-9 » ;
b) Après le même quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le nombre de bénéficiaires de l’obligation d’emploi est réduit afin de tenir compte de l’effort consenti par l’employeur pour accueillir ou maintenir dans l’emploi des personnes lourdement handicapées. » ;
c) Après le cinquième alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
« Peuvent être déduites du montant de la contribution annuelle des dépenses supportées directement par l’employeur public, destinées à favoriser l’accueil, l’insertion ou le maintien dans l’emploi des travailleurs handicapés, qui ne lui incombent pas en application d’une disposition législative ou réglementaire.
« L’avantage représenté par cette déduction ne peut se cumuler avec une aide accordée pour le même objet par le fonds mentionné au I du présent article.
« Peuvent être déduites du montant de la contribution annuelle les dépenses mentionnées à l’article L. 5212-10-1, selon des modalités prévues par décret en Conseil d’État. » ;
d) À la première phrase de l’avant-dernier alinéa, le mot : « à » est remplacé par les mots : « au première alinéa de ».
II. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2020 et s’applique aux obligations portant sur les périodes courant à compter de cette date.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 765, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) À la première phrase du deuxième alinéa, les mots : « à l’alinéa précédent » sont remplacés par les mots : « au premier alinéa » ;
II. – Alinéa 9
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
b) Les deuxième, troisième et dernier alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les collectivités et organismes mentionnés à l’article L. 323-2, sont également pris en compte pour le calcul du nombre de bénéficiaires de cette obligation les agents qui bénéficient d’une allocation temporaire d’invalidité en application de l’article 65 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée, de l’article L. 417-8 du code des communes, du paragraphe III de l’article 119 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée ou de l’article 80 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 précitée. » ;
III. – Alinéa 11
Remplacer les mots :
troisième et avant-dernier
par les mots :
premier et deuxième
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.
M. le président. L’amendement n° 249, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Rédiger ainsi cet alinéa :
b) Au troisième alinéa, la référence à l’article « 85 » est remplacée par la référence « 85-1 » et la référence « 75 » est remplacée par la référence à l’article « 75-1 » ;
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Monsieur le président, mesdames, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, cet amendement vise à ce que les agents reclassés des trois versants de la fonction publique et bénéficiant de la période préparatoire au reclassement soient comptabilisés dans l’obligation d’emploi des employeurs publics.
Il y a quelques semaines, le Gouvernement a publié un décret qui encadre la période de reclassement consécutive à une déclaration d’inaptitude pour les agents publics de la fonction publique d’État.
Selon nous, pendant les douze mois que dure cette période personnalisée de reclassement, ces agents doivent être intégrés au titre de l’obligation d’emploi, ce qui leur sera plus favorable.
Je précise que ces dispositions relatives à la fonction publique d’État seront étendues aux fonctions publiques territoriale et hospitalière d’ici à la fin de cette année.
M. le président. L’amendement n° 637, présenté par Mme Schillinger, MM. Lévrier, Rambaud, Patriat, Amiel, Bargeton, Karam, Marchand, Mohamed Soilihi, Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Peut être pris en compte, dans le calcul du nombre de bénéficiaires de l’obligation d’emploi mentionnés au présent article et à l’article L. 5212-13, l’effort consenti par l’employeur en faveur des bénéficiaires qui rencontrent des difficultés particulières de maintien en emploi, selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État. » ;
La parole est à M. Martin Lévrier.
M. Martin Lévrier. Au-delà des difficultés d’embauche qu’éprouvent les personnes en situation de handicap, la question de leur maintien en emploi, notamment pour ce qui concerne les seniors, est une préoccupation majeure. Or, à cet égard, le secteur public ne doit pas être en reste.
L’article 42 a précisément pour objet de valoriser l’emploi des travailleurs handicapés seniors dans le secteur public. Il gagnerait à être réécrit de manière plus intelligible et cohérente, au regard des principes que la loi doit énoncer à cet égard. Je pense notamment aux modalités précises de mise en œuvre, qui relèvent bien du domaine réglementaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Tout d’abord, je tiens à remercier M. le secrétaire d’État des informations qu’il vient de nous communiquer quant aux discussions en cours : la commission n’en disposait pas lorsqu’elle a examiné ces amendements.
La commission avait souhaité accompagner le mouvement, engagé par le Gouvernement, de rapprochement des modalités de calcul de l’obligation en question dans les secteurs privé et public, en retirant les agents reclassés des bénéficiaires de l’obligation. Cette disposition nous avait paru cohérente, dans la mesure où, au sein de la fonction publique territoriale, l’obligation dont il s’agit est acquittée à près de 25 % par des agents reclassés. Ainsi, les personnes handicapées se trouvent privées de l’accès aux postes correspondants.
Néanmoins, compte tenu des précisions qui viennent d’être apportées, et au regard du coût estimé d’une telle mesure, qui pourrait être élevé, rapide et brutal, nous nous en remettons à la sagesse du Sénat pour ce qui concerne l’amendement n° 249.
L’amendement n° 637 vise à étendre les dispositions prévues à l’article 40 pour les employeurs privés. Mais il tend dès lors à revenir, pour les employeurs publics, sur la position du Gouvernement : il s’agissait de limiter, pour les employeurs, la possibilité de moduler la contribution apportée en fonction des seuls bénéficiaires de l’obligation ayant un certain âge.
Certes, la rédaction de cet amendement ne fait plus spécifiquement mention de l’âge des bénéficiaires : elle revient à la notion plus large de « difficultés particulières ». Toutefois, son objet vise clairement le seul cas des travailleurs handicapés seniors.
Très concrètement, nous souhaitons que tous les types de handicaps soient pris en compte, notamment les plus lourds d’entre eux, même si nous ne négligeons nullement le cas des handicapés seniors.
Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Monsieur le rapporteur, permettez-moi de vous faire remarquer que l’amendement n° 249, à propos duquel vous vous en êtes remis à la sagesse du Sénat, deviendrait sans objet dans l’hypothèse où l’amendement de la commission serait adopté.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Pour la raison que M. le président vient d’indiquer, le Gouvernement demande le retrait de l’amendement de coordination n° 765. Si des problèmes de coordination subsistent, nous veillerons à les résoudre au cours de la commission mixte paritaire.
Selon nous, l’amendement n° 637 tend à rendre plus intelligible la règle édictée. Celui-ci appelle donc, de la part du Gouvernement, un avis favorable.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Dans ces conditions, la commission retire l’amendement de coordination n° 765.
M. le président. L’amendement n° 765 est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 249.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. L’amendement n° 763, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Pour les corps de fonctionnaires dont l’accès à certains emplois est soumis à des conditions d’aptitude physique particulières, l’obligation d’emploi s’applique uniquement aux personnels administratifs et techniques. » ;
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Avec cet amendement, nous nous penchons sur le cas particulier de certains corps spécialisés de la fonction publique, dont l’accès est régi par des conditions d’aptitudes physiques singulières. Je pense notamment aux services départementaux d’incendie et de secours, les SDIS.
Pour des corps de cette nature, il ne paraît pas pertinent d’inclure l’ensemble des personnels dans le périmètre de calcul de l’obligation d’emploi. En pareil cas, lesdits corps seraient exposés à un niveau de contributions financières exorbitant, par rapport à leur capacité d’accueillir des personnels handicapés. En conséquence, je propose que le périmètre de calcul soit réduit, pour ce qui les concerne, aux personnels administratifs et techniques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Si cet amendement était adopté, le champ d’application de l’obligation d’emploi de personnes en situation de handicap serait sensiblement réduit.
De plus, les critères d’aptitude physique ou d’âge, évoqués par M. le rapporteur, peuvent trouver une forme d’application dans le secteur privé, mais n’ont jamais été appliqués dans le secteur public.
Aussi, nous considérons que l’adoption de cet amendement aurait pour effet de restreindre le champ d’application des règles d’emploi des personnes en situation de handicap dans la fonction publique. C’est la raison pour laquelle nous émettons un avis défavorable.
M. le président. L’amendement n° 756, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 14
1° Remplacer le mot :
deuxième
par le mot :
dernière
2° Après le mot :
« hospitalière »,
rédiger ainsi la fin de l’alinéa :
est supprimé le signe : « , » et sont insérés les mots : « ou des groupements de coopération sanitaire lorsque ceux-ci sont qualifiés de personne morale de droit public au sens de l’article L. 6133-3 du code de la santé publique » ;
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 755, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 17
Après le mot :
alinéa
Insérer les mots :
et à la deuxième phrase du dernier alinéa
II. – Après l’alinéa 18
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) À la première phrase du quatrième alinéa, les mots : « d’unités manquantes » sont remplacés par les mots : « de bénéficiaires manquants »
III. – Alinéa 24
Remplacer les mots :
cette déduction
Par les mots :
ces déductions
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Il s’agit également d’un amendement rédactionnel, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 250, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéas 20 et 21
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Dans le cadre de la réforme en cours, le Gouvernement souhaite que les efforts réalisés par les employeurs publics pour le recrutement et le maintien dans l’emploi des personnes lourdement handicapées n’entraînent plus une majoration du taux d’emploi.
Les efforts consentis par les employeurs publics pour l’accueil et le maintien dans l’emploi des agents handicapés ne seront pas réduits pour autant : ils resteront pris en charge par le fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique, le FIPHFP.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Cet amendement tend à revenir sur l’incitation des employeurs publics à embaucher des personnes lourdement handicapées par la baisse des contributions dont ils sont redevables. Par cohérence, la commission ne saurait être favorable à ces dispositions.
D’ailleurs, elle relève que le motif invoqué par le Gouvernement vise les ressources du FIPHFP. Selon lui, les ressources de ce fonds sont suffisantes pour assurer l’insertion et le maintien dans l’emploi des personnes lourdement handicapées au titre de l’aménagement de leur poste. Or faire peser l’intégralité de l’incitation à l’embauche de personnes lourdement handicapées sur les ressources du FIPHFP qui, je le rappelle, passeront sous la barre des 100 millions d’euros, est une véritable gageure…
M. le président. L’amendement n° 188 rectifié, présenté par MM. Chasseing, Capus, Guerriau, Decool, A. Marc, Lagourgue, Fouché et Malhuret, Mme Mélot, MM. Wattebled et Longeot, Mme Goy-Chavent, M. L. Hervé, Mme Vullien, M. Moga et Mme Gatel, n’est pas soutenu.
Je mets aux voix l’article 42, modifié.
(L’article 42 est adopté.)
Article 42 bis
I. – Après le premier alinéa de l’article L. 323-2 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les employeurs publics mentionnés au premier alinéa du présent article qui occupent moins de vingt agents à temps plein ou leur équivalent déclarent les bénéficiaires de l’obligation d’emploi mentionnés aux articles L. 323-5 et L. 5212-13, selon des modalités définies par décret en Conseil d’État. »
II. – Le I s’applique à compter de l’entrée en vigueur de l’article L. 133-5-3 du code de la sécurité sociale dans les conditions fixées au III de l’article 13 de l’ordonnance n° 2015-682 du 18 juin 2015 relative à la simplification des déclarations sociales des employeurs.
Mme Laurence Cohen. Nous votons pour !
M. le président. Je mets aux voix l’article 42 bis.
(L’article 42 bis est adopté.)
Article 42 ter
I A (nouveau). – Aux premier et au deuxième alinéas et à la seconde phrase du troisième alinéa de l’article L. 323-4-1 du code du travail, la date : « 1er janvier » est remplacée par la date : « 31 décembre ».
I. – À la première phrase du deuxième alinéa du IV de l’article L. 323-8-6-1 du code du travail, la date : « 1er janvier » est remplacée par la date : « 31 décembre ».
II. – Le I s’applique à compter de l’entrée en vigueur de l’article L. 133-5-3 du code de la sécurité sociale dans les conditions fixées au III de l’article 13 de l’ordonnance n° 2015-682 du 18 juin 2015 relative à la simplification des déclarations sociales des employeurs. Le premier exercice d’application du I tient compte des deux exercices précédemment écoulés.
M. le président. L’amendement n° 757, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 3, seconde phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
Lorsque la date d’entrée en vigueur prévue à la première phrase du présent II est le 1er janvier, il est fait exception à l’application de ladite phrase pour le calcul des bénéficiaires manquants au titre de l’année précédant cette entrée en vigueur.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Ces dispositions sont de nature rédactionnelle, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 42 ter, modifié.
(L’article 42 ter est adopté.)
Article 42 quater
I. – L’article 98 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est supprimé ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le montant de la déduction mentionnée au deuxième alinéa ne peut pas excéder un pourcentage de la contribution exigible dont le niveau, qui ne peut excéder 80 %, est fixé par décret en Conseil d’État. »
II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2020 et s’applique aux obligations portant sur la période courant à compter de cette date.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 294, présenté par Mmes Grelet-Certenais et Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Le montant de la déduction mentionnée au deuxième alinéa est fixé à 80 % pour l’année 2019. Ce montant est réduit de 20 % annuellement à partir de l’année 2020 pour atteindre un montant plancher de 20 % à partir de 2022. »
II. – Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais.
Mme Nadine Grelet-Certenais. Par cet amendement, nous souhaitons, d’une part, reprendre les objectifs de l’article 98 de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, lesquels auraient dû être atteints en 2009, et, d’autre part, mettre en place la dégressivité de la déductibilité prévue.
En effet, cet article prévoyait un traitement dérogatoire dégressif à la fois pour les administrations publiques, les écoles et les universités, avec, pour ces dernières, un plafonnement de la déduction à 80 % de la contribution exigible en 2006 et à 70 % en 2007. Au-delà, le plafonnement devait être revu annuellement : mais la loi de finances rectificative pour 2007 a supprimé ce plafonnement.
Le plafonnement proposé actuellement par le Gouvernement, à 90 %, est selon nous insuffisant : il n’a jamais été aussi élevé. En définitive, il rendrait la contribution totalement inefficiente, dans la mesure où elle resterait bien en deçà des attentes des associations envers l’État.
La commission a souhaité abaisser ce plafond à 80 %, ce qui, à nos yeux, est encore insuffisant. Aussi, cet amendement vise à reprendre le dispositif ambitieux de la loi de 2005, destiné à l’ensemble des administrations publiques, pour l’appliquer à l’éducation nationale.
Au regard de la massification des dispositifs de prise en charge des élèves handicapés observée au cours des dernières années, cette évolution fiabilise le mécanisme proposé et justifie un abaissement substantiel du taux de plafonnement.
Avec cet amendement, nous réaffirmons donc le principe d’exemplarité des pouvoirs publics, notamment de l’éducation nationale.
M. le président. L’amendement n° 494, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer le taux :
80 %
par le taux :
65 %
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. L’emploi des personnes en situation de handicap doit être une priorité partagée par toutes et tous. En pratique, pourtant, la contribution acquittée en cas de non-respect de l’obligation de recrutement fait autant figure de sanction que d’une option visant à permettre in fine ce recrutement.
Dans ce cadre, il me semble déjà problématique que les établissements scolaires puissent déduire de leur contribution les salaires des personnels d’accompagnement des élèves en situation de handicap, pour deux raisons.
Premièrement, ces accompagnements ne relèvent pas à proprement parler de l’obligation de recrutement s’ils sont assurés par des salariés valides.
Deuxièmement, on en vient à récompenser des établissements parce qu’ils mettent en œuvre l’un des principes fondateurs de l’institution scolaire : l’accès de toutes et tous à l’instruction.
De fait, si ces personnels d’accompagnement planifiés dans le cadre du projet personnalisé de scolarisation sont indispensables, ils répondent à une exigence fixée par la loi.
Toutefois, il faut bien reconnaître que, aujourd’hui, il est difficile pour les établissements de faire face à la pénurie budgétaire qui touche tous les secteurs de l’État. Dans ce contexte, la déduction des charges est non pas un cadeau, mais une nécessité.
Il faut souligner un effet de la mise en accessibilité des établissements scolaires : le nombre d’élèves en situation de handicap a augmenté d’un tiers en l’espace de dix ans, ce dont, je pense, nous pouvons nous féliciter.
Néanmoins, les réponses restent insuffisantes, notamment en ce qui concerne le temps périscolaire. Malgré les préconisations formulées par le Défenseur des droits dès 2012 et malgré la jurisprudence du Conseil d’État du 20 avril 2011, on ne peut pas dire que l’État ait mis en œuvre les moyens suffisants pour permettre l’accès des enfants en situation de handicap aux temps scolaires et périscolaires.
C’est d’ailleurs l’une des raisons qui ont conduit à l’augmentation drastique des inscriptions scolaires d’enfants français en situation de handicap à l’étranger. Habitant dans le Pas-de-Calais, je constate les difficultés des familles qui mettent des enfants dans des taxis dès six heures du matin pour qu’ils aillent à l’école en Belgique, d’où ils ne reviendront qu’à sept heures du soir. De telles situations sont scandaleuses, et il faudrait réfléchir à des solutions pour résoudre ces problèmes.
Cet amendement vise à maintenir une vraie participation de tous les établissements publics au fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique.
M. le président. L’amendement n° 251, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer le taux :
80 %
par le taux :
90 %
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Les auteurs des trois amendements en discussion commune, soit deux groupes politiques et le Gouvernement, ont le même objectif.
Jusqu’à l’année en cours, les montants de masse salariale affectés à l’accompagnement d’élèves en situation de handicap dans les écoles étaient déduits de la contribution versée par l’employeur éducation nationale au FIPHFP. Cette déduction ne faisait l’objet d’aucun plafonnement autre que le montant de la contribution elle-même.
C’est ainsi que le ministère de l’éducation nationale, qui emploie un nombre considérable de personnels pour accompagner les élèves en situation de handicap, ce qui est heureux, pouvait bénéficier, au titre des rémunérations versées, d’une minoration supérieure à la contribution théorique qu’il aurait dû acquitter.
L’Assemblée nationale a instauré un plafond de 90 %. Les auteurs des amendements nos 294 et 494 proposent de le ramener à 80 et 65 % respectivement.
À dire vrai, je crois que nous ne parlons pas tout à fait de la même chose.
Le Gouvernement ne propose pas de minorer le montant des rémunérations prises en compte pour calculer le montant de la contribution. Il souhaite que, quel que soit le montant des rémunérations consacrées à l’accompagnement des élèves en situation de handicap, la déduction dont bénéficie le ministère de l’éducation nationale ne puisse pas être supérieure à 90 % de la contribution qu’il aurait dû verser.
Ce mécanisme est progressif, puisque le plafond, de 90 % la première année, sera ramené par décret à 80 % pour l’année suivante.
Ainsi, le ministère de l’éducation nationale, quelques efforts qu’il consente en matière d’accompagnement des élèves en situation de handicap, versera une contribution représentant au moins 10, puis 20 % de sa contribution théorique, c’est-à-dire avant minoration.
Notre objectif est donc bien le même : faire mieux participer l’ensemble des employeurs. En revanche, nous divergeons sur la méthode : vous souhaitez plafonner la déduction, quand nous proposons de maintenir un socle à la contribution.
Maintenir ce socle de 10, puis 20 % pour la contribution versée en particulier par le ministère de l’éducation nationale permettra de conforter le financement du FIPHFP à hauteur de 130 millions d’euros.
Dans ces conditions, j’émets un avis défavorable sur les amendements nos 294 et 494, en invitant le Sénat à adopter l’amendement n° 251, présenté par le Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur les trois amendements.
Je ne reviendrai pas sur les explications de M. le secrétaire d’État qui étaient relativement claires. Simplement, nous considérons que l’effort de démarrage doit être plus important. C’est pourquoi la commission a fixé le taux de déduction à 80 %, reprenant ainsi une préconisation du rapport de l’Inspection générale des affaires sociales et de l’Inspection générale des finances.
Nous n’avons pas officiellement connaissance du décret auquel M. le secrétaire d’État a fait référence, fixant le taux à 80 % pour l’année suivante. De toute manière, nous considérons que l’effort doit être réalisé à cette hauteur dès cette année.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Si nous voulons y aller progressivement – permettez-moi cette familiarité –, en plafonnant la déduction à 90, puis à 80 %, c’est parce que nous mettons en place, dans la foulée du travail précédemment entrepris – il faut le souligner –, un plan de titularisation des personnels accompagnant les enfants en situation de handicap à l’école, les AESH.
À l’occasion de l’examen du projet de loi de finances pour 2019, vous constaterez que des crédits jusqu’ici inclus dans le périmètre du ministère du travail et servant, sous l’autorité de Muriel Pénicaud, à cofinancer sous forme d’emplois aidés les personnels affectés à l’accompagnement des élèves en situation de handicap sont transférés au ministère de l’éducation nationale dans le cadre de la titularisation d’AESH en nombre – nous parlons de plusieurs milliers de personnes, pour près de 30 millions d’euros de crédits.
Cette mesure permettra aux élèves en situation de handicap de bénéficier d’un accompagnement pérenne, avec les mêmes personnes tout au long de leur scolarité.
Un effort important est donc consenti par le ministère de l’éducation nationale pour garantir la pérennité de ces emplois et de l’accompagnement des élèves en situation de handicap. C’est pourquoi nous considérons, à rebours de la commission, que le choix de la progressivité est plus raisonnable que celui, défendu par le rapporteur, d’un plafonnement fixé d’emblée à 80 %.
M. le président. La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais, pour explication de vote.
Mme Nadine Grelet-Certenais. Nous avions l’intention de voter contre l’amendement du Gouvernement, mais les accents de sincérité de M. le secrétaire d’État et son engagement que le Gouvernement appliquera progressivement les 80 % – un engagement qui, je l’espère, sera tenu – nous conduisent à retirer notre amendement n° 294.
M. le président. L’amendement n° 294 est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 494.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 42 quater.
(L’article 42 quater est adopté.)
Section 2
Renforcer le cadre d’intervention des entreprises adaptées
Article 43
I A (nouveau) – L’article 5135-5 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pendant cette durée, les modalités de tarification ou de financement de l’organisme employant ou accueillant le bénéficiaire de la période de mise en situation en milieu professionnel restent inchangées. »
I. – L’intitulé de la sous-section 3 de la section 3 du chapitre III du titre Ier du livre II de la cinquième partie du code du travail est ainsi rédigé : « Entreprises adaptées ».
II. – L’article L. 5213-13 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 5213-13. – L’État agrée en qualité d’entreprise adaptée des structures qui répondent aux critères prévus à l’article L. 5213-13-1. Il conclut avec elles des contrats pluriannuels d’objectifs valant agrément.
« Les entreprises adaptées sont constituées par des collectivités territoriales ou des organismes publics ou privés. Lorsqu’elles sont constituées par des sociétés commerciales, elles prennent la forme de personnes morales distinctes. »
III. – Après l’article L. 5213-13 du code du travail, il est inséré un article L. 5213-13-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 5213-13-1. – Les entreprises adaptées contribuent au développement des territoires et promeuvent un environnement économique inclusif favorable aux femmes et aux hommes en situation de handicap.
« Elles concluent des contrats de travail avec des travailleurs reconnus handicapés par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées mentionnée à l’article L. 241-5 du code de l’action sociale et des familles qui se trouvent sans emploi ou qui courent le risque de perdre leur emploi en raison de leur handicap. Elles permettent à leurs salariés d’exercer une activité professionnelle dans un environnement adapté à leurs possibilités, afin qu’ils obtiennent ou conservent un emploi.
« Ces entreprises emploient une proportion comprise entre un minimum et un maximum, fixés par décret, de travailleurs reconnus handicapés qu’elles recrutent soit sur proposition du service public de l’emploi, soit directement, en application de critères fixés par arrêté du ministre chargé de l’emploi.
« Elles mettent en œuvre pour ces salariés un accompagnement spécifique destiné à favoriser la réalisation de leur projet professionnel, la valorisation de leurs compétences et leur mobilité au sein de l’entreprise elle-même ou vers d’autres entreprises, prioritairement du milieu ordinaire. Elles bénéficient, pour ce dernier aspect, de l’appui du service public de l’emploi et des organismes mentionnés au 1° bis de l’article L. 5311-4.
« En cas de reprise de marché par ou à la suite d’une entreprise adaptée, les dispositions du premier alinéa de l’article L. 1224-2 ne sont applicables ni à l’ancien ni au nouvel employeur. »
III bis (nouveau). – L’article L. 5213-20 du code du travail est abrogé.
IV. – Le code du travail est ainsi modifié :
1° Le 10° du II de l’article L. 3332-17-1 est abrogé ;
2° À la fin de l’article L. 5213-14, les mots : « et des centres de distribution de travail à domicile » sont supprimés ;
3° Le premier alinéa de l’article L. 5213-18 est ainsi rédigé :
« Les entreprises adaptées bénéficient de l’ensemble des dispositifs prévus au livre Ier de la présente partie. » ;
4° L’article L. 5213-19 est ainsi modifié :
a) Aux premier et deuxième alinéas, les mots : « et les centres de distribution de travail à domicile » sont supprimés ;
b) Au premier alinéa, la référence : « L. 5213-13 » est remplacée par la référence : « L. 5213-13-1 ».
V. – À la première phrase de l’article L. 344-2 du code de l’action sociale et des familles, les mots : « ou pour le compte d’un centre de distribution de travail à domicile » sont supprimés.
V bis (nouveau). – L’article L. 344-2 du code de l’action sociale et des familles est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ils signent avec les organismes mentionnés au 1° bis de l’article L. 5311-4 du code du travail une convention leur ouvrant la possibilité de prescrire les périodes mentionnées à l’article L. 5135-1 du même code. »
V ter (nouveau). – Par dérogation à l’article L. 5422-20 du code du travail, les mesures d’application du I et du II de l’article L. 5422-1, de l’article L. 5422-1-1, du 2° de l’article L. 5424-27 et de l’article L. 5425-1 du même code, en tant qu’elles s’appliquent aux travailleurs mentionnés à l’article L. 5212-2 et au troisième alinéa de l’article L. 5213-13-1 dudit code lorsque ces derniers ne remplissent pas la condition d’âge et d’activité prévue au premier alinéa de l’article L. 5422-1 du même code, sont déterminées par décret en Conseil d’État. Il est alors tenu compte des revenus de remplacement que ces travailleurs ont pu percevoir, notamment ceux qui ont préalablement fait l’objet d’un accompagnement par un établissement mentionné au a) du 5° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles.
VI. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2019. Toutefois, les contrats d’objectifs triennaux conclus avant cette date continuent de produire leurs effets jusqu’à leur terme.
M. le président. L’amendement n° 293, présenté par Mmes Grelet-Certenais et Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Après le mot :
objectifs
insérer les mots :
et de moyens
La parole est à M. Yves Daudigny.
M. Yves Daudigny. Il convient que les contrats pluriannuels conclus entre les entreprises adaptées agréées et l’État soient des contrats d’objectifs et de moyens, afin de sécuriser financièrement ces structures spécifiques, qui ont besoin de visibilité et, surtout, de continuité budgétaire pour assurer leurs missions.
À cet égard, je rappelle que la contribution à l’établissement baisse de 18 % cette année, baisse à laquelle s’ajoutera dès l’année prochaine une réduction de la contribution au poste. Dans ce contexte, cet amendement vise également à obtenir du Gouvernement des assurances en matière de soutien financier aux entreprises adaptées.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. La commission s’est montrée attentive à ce que l’instrument contractuel signé par l’entreprise adaptée et l’autorité d’agrément ne soit pas de même nature que ceux qui ont cours dans le milieu médico-social.
Il ne s’agit pas pour nous de nier la dimension financière des relations entre l’État et les entreprises adaptées, qui font d’ailleurs l’objet de modifications importantes. Mais nous tenions à rappeler que le subventionnement des entreprises adaptées ne doit pas s’apparenter au versement d’une dotation de fonctionnement, compte tenu de l’immersion de ces entreprises dans le milieu de travail. L’avis de la commission est donc défavorable sur cet amendement.
C’est passablement une question de sémantique, mais le signal est important en ce qui concerne les relations entre l’État et les entreprises adaptées.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail. Comme vous le constatez, mesdames, messieurs les sénateurs, la cause du travail des personnes handicapées mobilise tout le Gouvernement, qui s’exprime à trois voix…
Nous sommes favorables à cet amendement. Il me paraît important que la question des moyens soit réintégrée dans l’intitulé du nouvel outil contractuel qui liera les entreprises adaptées et l’État.
Le principe d’un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens est issu de la concertation, sur laquelle je reviendrai dans quelques instants, que nous avons menée à partir de janvier dernier avec les représentants des entreprises adaptées.
Cet outil doit permettre la négociation d’objectifs opérationnels sur la base des engagements proposés par la structure pour accompagner les personnes vers l’emploi, ainsi que la négociation des moyens nécessaires à la réalisation de ces objectifs.
M. le président. L’amendement n° 760, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 10
1° Remplacer les mots :
une proportion comprise entre un minimum et un maximum, fixés
par les mots :
des proportions minimale et maximale, fixées
2° Après le mot :
handicapés
insérer le signe :
,
3° Remplacer la deuxième occurrence du mot :
fixés
par le mot :
déterminés
La parole est à M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 393, présenté par Mmes Lubin et Grelet-Certenais, M. Daudigny, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 11
1° Première phrase
Supprimer les mots :
, prioritairement du milieu ordinaire
2° Seconde phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Cet amendement ne vise, notamment, qu’à supprimer quatre mots : « prioritairement du milieu ordinaire », mais quatre mots lourds de sens pour les entreprises adaptées.
Le dispositif adopté par la commission tend à donner des objectifs aux entreprises adaptées pour qu’elles conduisent les personnes qu’elles font travailler vers l’emploi durable.
Or, pour de nombreuses personnes en situation de handicap, être recruté dans l’une de ces entreprises, qui sont pour la plupart concurrentielles, normales, si je puis dire, et tout à fait adaptées, justement, au monde du travail – Mme la ministre le sait, qui est venue visiter une entreprise absolument remarquable dans mon département voilà une dizaine de jours –, constitue un aboutissement : ces personnes sont insérées dans le monde du travail quand elles sont recrutées dans une entreprise adaptée.
Si l’on assigne à ces entreprises des pourcentages d’inclusion dans le monde du travail dit classique, on transforme complètement la philosophie de ces structures.
Pour présider depuis très longtemps une association d’insertion par l’activité économique dans mon département, je puis vous dire que l’objectif des personnes atteintes de handicap, qui sont une partie du public dont nous nous occupons, est d’être recrutées dans une entreprise adaptée pour pouvoir mener une vie normale en étant durablement insérées dans le monde du travail.
Monsieur le rapporteur, mes chers collègues, réfléchissez bien avant de vous prononcer sur cet amendement, car le monde des entreprises adaptées est inquiet devant le dispositif actuel !
M. le président. L’amendement n° 189 rectifié, présenté par MM. Chasseing, Capus, Guerriau, Decool, A. Marc, Lagourgue, Fouché et Malhuret, Mme Mélot, MM. Wattebled et Longeot, Mme Goy-Chavent, M. L. Hervé, Mme Vullien, M. Moga et Mme Gatel, n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 393 ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Avant de donner l’avis de la commission, je tiens à saluer le travail réalisé au sujet des évolutions engagées par les entreprises adaptées, en particulier les négociations qui ont été menées entre le Gouvernement et les représentants de ces entreprises et les conventions qui sont aujourd’hui mises en place.
En même temps, le travail de la commission est un peu compliqué : on nous demande de travailler sur un texte que nous découvrons quarante-huit heures à l’avance et sur lequel nous devons donner des avis d’orientation. Il est particulier de signer une convention alors que le texte n’est pas encore voté. Ces questions de calendrier mettent parfois en difficulté.
J’en viens à la clarification demandée par les auteurs de l’amendement n° 393.
La commission s’est montrée attentive à ce que les trois milieux de travail ouverts aux personnes handicapées, soit les milieux protégé, adapté et ordinaire, fassent l’objet d’une distinction. Les amendements déposés par le Gouvernement allant dans le sens d’une plus grande porosité entre entreprises adaptées et entreprises dites classiques vont d’ailleurs implicitement dans ce sens.
Les auteurs de l’amendement n° 393 souhaitent que soit gommée toute mention dans la loi d’une non-appartenance des entreprises adaptées au milieu ordinaire. Je comprends tout à fait cette philosophie, mais la question de typologie est délicate. Il sera intéressant de connaître l’avis du Gouvernement. Avis de sagesse.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le débat sera plus facile à partir de l’examen du prochain amendement, l’amendement n° 683 du Gouvernement, qui va me permettre d’exposer la philosophie d’ensemble que nous proposons. En l’occurrence, l’ordre d’appel des amendements ne facilite pas les échanges…
Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 393, qui vise, en supprimant une modification opérée par la commission, à rétablir la rédaction issue de la concertation menée avec le secteur.
Cette concertation sera le socle de l’évolution que vous avez bien comprise et qui va dans le sens de ce que nous souhaitons et que souhaite le secteur des entreprises adaptées : ces entreprises ne fournissent pas seulement un travail à des personnes en situation de handicap ; elles permettent à tous ceux qui le peuvent d’aller vers l’emploi ordinaire, non adapté.
Quelle est la différence ? En termes d’emploi, elle n’est pas très importante. Mais, dans un cas, l’emploi est financé massivement par les pouvoirs publics, tandis que, dans l’autre, il s’agit d’un emploi ordinaire. Bref, du point de vue des conditions de marché, les entreprises adaptées sont des entreprises ordinaires, mais les emplois qu’elles offrent ne sont pas des emplois ordinaires.
Une partie des personnes en situation de handicap qui travaillent dans les entreprises adaptées sont en mesure d’évoluer vers le milieu ordinaire et le souhaitent. Les entreprises adaptées peuvent donc servir de tremplins pour une partie des personnes en situation de handicap ; pour d’autres, il n’y aura pas de changement.
Dans l’attente des amendements que je présenterai dans quelques instants pour favoriser les expérimentations en ce sens, le Gouvernement est, je le répète, favorable à l’amendement n° 393, qui vise à rétablir le socle juridique.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 683, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 12
Insérer trois paragraphes ainsi rédigés :
… – L’article L. 5213-16 du code du travail est ainsi modifié :
1° Au début, sont ajoutés les mots : « Pour favoriser la réalisation de leur projet professionnel, » ;
2° Après les mots : « autre employeur », sont insérés les mots : « pour une durée déterminée, en vue de leur éventuelle embauche, » ;
3° Il est ajouté un alinéa rédigé :
« Pour faciliter leur accès à un emploi durable, l’entreprise adaptée met en œuvre un appui individualisé pour l’entreprise utilisatrice, et des actions d’accompagnement professionnel et de formation pour les travailleurs handicapés. La prestation d’appui individualisée est rémunérée par l’entreprise utilisatrice et est distincte de la mise à disposition. »
… – L’article L. 5213-19 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 5213-19. – Seul l’emploi des travailleurs qui remplissent les conditions mentionnées aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 5213-13-1, ouvrent droit au bénéfice d’aides financières contribuant à compenser les conséquences du handicap et des actions engagées liées à leur emploi. Ces aides sont attribuées dans la limite des crédits fixés annuellement par la loi de finances. »
… – Après l’article L. 5213-19 du code du travail, il est inséré un article L. 5213-19-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 5213-19-1. – Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application de la présente sous-section, notamment :
« 1° Les conditions d’exécution, de suivi, de renouvellement et du contrôle des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens mentionnés à l’article L. 5213-13, ainsi que leurs modalités de suspension ou de dénonciation ;
« 2° Les modalités de l’accompagnement spécifique mentionné à l’article L. 5213-13-1 ;
« 3° Les modalités de détermination et d’attribution et de versement des aides financières de l’État mentionnées à l’article L. 5213-19 et les règles de non cumul. »
II. – Après l’alinéa 18
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le second alinéa de l’article L. 5213-18 est supprimé ;
III. – Alinéas 19 à 21
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Comme je m’y étais engagée lors du débat budgétaire dans cet hémicycle, nous avons mené une concertation avec le secteur des entreprises adaptées.
Avec l’Union nationale des entreprises adaptées, qui représente les 780 entreprises du secteur, mais aussi l’Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis, l’UNAPEI, et l’APF France Handicap, nous avons conclu cette concertation, en avons rendu compte et avons annoncé hier des engagements communs, en présence, mesdames, messieurs les sénateurs, du président de votre commission des affaires sociales, Alain Milon, et de votre collègue Patricia Schillinger.
Quelle est l’ambition de l’État partagée avec le secteur ?
Nous voulons permettre progressivement à 40 000 personnes handicapées supplémentaires de ne plus être enfermées dans le chômage et de travailler dans une entreprise adaptée. Aujourd’hui, 500 000 travailleurs handicapés sont à Pôle emploi et n’arrivent pas à accéder au marché du travail. Notre objectif est de doubler d’ici à quatre ans le nombre de personnes susceptibles de travailler en entreprise adaptée, ce qui fera 10 % de chômage en moins par rapport à la situation actuelle.
Tout en confortant ce modèle, l’innovation doit donner le cap vers des transitions professionnelles et des passerelles vers les autres employeurs. C’est l’idée que l’entreprise adaptée ne doit pas simplement avoir un stock d’emplois – excusez ce terme –, mais doit aussi permettre un flux vers d’autres types d’emploi, notamment vers l’emploi ordinaire.
Les quatre amendements que le Gouvernement a déposés traduisent cette volonté partagée de transformation, sans renier les réalités et les spécificités des entreprises adaptées, qui jouent un rôle essentiel dans notre pays.
Premièrement, nous voulons réaffirmer la vocation économique et sociale de ces entreprises en renforçant leur modèle inclusif. En d’autres termes, il s’agit d’adapter leur modèle économique pour rendre possible l’objectif d’inclusion et de flux vers d’autres emplois, ce qui n’est pas facilement le cas aujourd’hui, et d’obtenir une plus grande mixité des publics : des personnes en situation de handicap plus proches de l’emploi en milieu ordinaire pourront y travailler à côté d’autres personnes qui travailleront dans un contexte de marché ordinaire tout en ayant besoin de plus de soutien.
Deuxièmement, nous proposons d’expérimenter un dispositif innovant, le contrat tremplin. Si vous l’autorisez, ce nouveau contrat ouvrira aux entreprises adaptées volontaires la possibilité de proposer des parcours de remise en emploi de vingt-quatre mois au maximum permettant à des personnes d’accéder à un emploi dans une autre entreprise, avec évidemment un suivi et un coaching très approfondis.
Troisièmement, nous souhaitons créer des entreprises adaptées de travail temporaire qui seront spécialisées dans les mises en situation d’emploi pour les intérimaires en situation de handicap.
La moyenne de 3,4 % d’emploi de travailleurs handicapés dissimule ce fait que, si certaines entreprises sont à 6 %, beaucoup sont à 0 %. Il y a en effet une appréhension et une méconnaissance du handicap, une méconnaissance du fait que l’emploi de telles personnes est possible. Le travail intérimaire handicapé permettra indirectement de lever un certain nombre de barrières, en montrant que c’est possible et en donnant la possibilité aux travailleurs handicapés de prouver leur valeur.
Enfin, de concert avec Nicole Belloubet, il vous sera proposé de renforcer les chances de réinsertion sociale et professionnelle des détenus en offrant à ces derniers des activités au sein d’entreprises adaptées.
Les quatre amendements du Gouvernement concourent à une réforme que Sophie Cluzel et moi-même voulons construire avec le secteur des entreprises adaptées, pour aboutir à un modèle plus ouvert et plus inclusif.
La réforme de 2005, qui a fait passer les entreprises adaptées du secteur protégé vers le milieu ordinaire adapté, a été très utile. Treize ans plus tard, le cap que nous voulons donner ensemble est l’entreprise inclusive. Des engagements ont été pris de part et d’autre, des moyens financiers très importants sont engagés par l’État et l’évolution du modèle économique des entreprises adaptées permettra, je le répète, de doubler d’ici à 2022 le nombre de personnes handicapées travaillant dans ces entreprises.
Enfin, nous voulons aller chercher des publics aujourd’hui bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés et qui n’ont pas accès à l’emploi.
M. le président. Le sous-amendement n° 768, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Amendement n° 683, alinéa 12
Supprimer les mots :
et de moyens
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. La commission est fidèle à la logique que j’ai exposée précédemment : elle souhaite supprimer les mots « et de moyens », afin qu’il n’y ait pas d’ambiguïté sur la nature tarifaire des relations.
M. le président. L’amendement n° 190 rectifié, présenté par MM. Chasseing, Capus, Guerriau, Decool, A. Marc, Lagourgue, Wattebled et Malhuret, Mme Mélot, M. Longeot, Mme Goy-Chavent, M. L. Hervé, Mme Vullien, M. Moga et Mme Gatel, n’est pas soutenu.
L’amendement n° 394, présenté par Mmes Lubin et Grelet-Certenais, M. Daudigny, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 21
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Seuls les travailleurs reconnus handicapés sans emploi ou qui courent le risque de perdre leur emploi en raison de leur handicap ouvrent droit à des aides financières contribuant à compenser les conséquences du handicap et des actions engagées liées à leur emploi. »
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Il s’agit de sacraliser le terme « compenser » pour les emplois de travailleur handicapé. Ces emplois, nous le savons, sont aidés par l’État. Le texte le précise bien, mais le terme « compenser » n’y figure pas.
On sait que les aides accordées par l’État pour les emplois de travailleur handicapé le sont pour compenser le handicap de ces personnes qui rend leur travail moins productif – je pense que c’est le terme qui convient.
Si le terme « compenser » ne figure pas clairement dans la loi, on peut craindre que, un jour ou l’autre, ces aides ne soient considérées comme des subventions classiques. C’est pour l’éviter que nous proposons leur sacralisation dans la loi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Après avoir salué l’initiative du Gouvernement, j’émets naturellement un avis favorable sur son amendement. Plusieurs motifs militent pour l’adoption de celui-ci.
D’abord, je me félicite de l’ambition de rationaliser l’aide financière au poste et de la réserver aux travailleurs handicapés. La disparition de la subvention spécifique dont bénéficiaient les entreprises adaptées au profit de l’aide au poste est sans doute une mesure de bonne gestion.
Ensuite, il est proposé que, si un salarié d’une entreprise adaptée souhaite intégrer une autre entreprise, cette dernière bénéficie d’un appui individualisé à l’intégration du salarié. Intéressant dans son principe, ce dispositif sera financé par l’entreprise d’accueil et lui ouvre ainsi une voie d’acquittement possible de son obligation d’emploi.
En revanche, la commission est défavorable à l’amendement n° 394, qui tend à réserver l’aide financière au poste versée à l’entreprise adaptée aux travailleurs « sans emploi ou qui courent le risque de perdre leur emploi ». Cette proposition ne me semble pas réalisable, dans la mesure où l’aide financière n’est versée qu’à raison des travailleurs effectivement embauchés par les entreprises adaptées, donc nécessairement titulaires d’un emploi.
Je propose aux auteurs de cet amendement de se rallier à celui du Gouvernement qui vise à limiter l’aide financière au poste aux travailleurs handicapés en entreprise adaptée et qui renvoie les modalités de calcul et d’attribution à un décret qui, j’en suis sûr, ne manquera pas de cibler convenablement les travailleurs devant être le plus accompagnés.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Je me félicite de notre convergence de vues sur l’avenir des entreprises adaptées.
Je suis toutefois défavorable au sous-amendement de la commission, car, comme je l’ai déjà expliqué, le contrat d’objectifs et de moyens est un concept qui a été compris et accepté par les représentants du secteur lors de la concertation.
Je suis également défavorable à l’amendement n° 394, pour les raisons que le rapporteur vient d’expliquer.
M. le président. La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais, pour explication de vote.
Mme Nadine Grelet-Certenais. Madame la ministre, faut-il rappeler que le Parlement n’est pas une chambre d’enregistrement de vos concertations au fil de l’eau de la navette parlementaire ?
Avec le présent amendement n° 683, l’amendement n° 600 sur les CDD tremplins et l’amendement n° 601 sur l’expérimentation des agences d’intérim, vous chamboulez aussi bien la philosophie que le financement du secteur des entreprises adaptées. Vous transformez ces entreprises spécifiques en une sorte d’agences de placement et d’accompagnement des personnes en situation de handicap.
Bien sûr, nous partageons l’objectif d’une véritable chaîne d’accès à l’emploi pour une société plus inclusive, mais pas de cette manière.
Vous nous demandez de nous prononcer sur cette évolution majeure sans étude d’impact ni avis du Conseil d’État.
Madame la ministre, vous savez pourtant comment les groupes politiques travaillent en amont de l’examen en séance des projets de loi. Mon groupe a auditionné de nombreux acteurs du secteur de l’emploi des personnes en situation de handicap, mais nous n’avons évidemment pas été en mesure de les consulter sur l’évolution majeure que vous proposez.
Je regrette que votre gestion de la réforme par à-coups nous empêche d’appréhender et, surtout, d’apprécier les changements dans leur globalité. Ce n’est assurément pas de bonne méthode !
Cette évolution nous inspire à tout le moins de fortes questions. De fait, nous ne partageons pas la même philosophie : pour nous, les entreprises adaptées ne sont pas un tremplin vers le milieu ordinaire ; elles sont une facette de ce milieu très divers, avec des contraintes et des objets spécifiques. Au contraire, avec cet amendement, vous allez au bout de la logique de transformation de l’entreprise adaptée en tremplin vers le milieu ordinaire.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Par rapport à la rédaction actuelle de l’article, les amendements qui nous sont soumis représentent à la fois un progrès et une source de préoccupations.
Le progrès tient à l’instauration d’un contrat d’objectifs et de moyens qui assurera aux entreprises adaptées des financements sur plusieurs années.
Mais d’autres mesures sont préoccupantes. Ainsi, alors que, aujourd’hui, les entreprises adaptées doivent embaucher 80 % de personnes handicapées, le texte ne prévoit plus qu’un plancher minimal, fixé par décret. C’est potentiellement la porte ouverte à une réduction des embauches de personnes handicapées.
Par ailleurs, le remplacement de l’expression « travailleurs handicapés » par « travailleurs reconnus handicapés » risque d’exclure de fait, par exemple, les accidentés du travail avec incapacité permanente, les victimes de guerre, les bénéficiaires d’une pension d’invalidité ou les attributaires de l’allocation aux adultes handicapés.
Les personnes handicapées doivent avoir une sécurité suffisante pour pouvoir retrouver un emploi. J’ai l’impression que, avec ces amendements, comme il vient d’être dit, on tire plutôt vers des logiques d’entreprises ordinaires.
M. le président. En conséquence, l’amendement n° 394 n’a plus d’objet.
L’amendement n° 766, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 25, première phrase
Après les mots :
premier alinéa
insérer la référence :
du I
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. C’est un peu plus qu’un amendement de coordination. Plus exactement, il pose un problème juridique.
La modification proposée porte sur une mesure visant à ouvrir des droits à l’assurance chômage aux travailleurs handicapés en tenant compte de leur situation antérieure au sein d’un ESAT.
Or les personnes handicapées accueillies en ESAT ne disposent pas du statut de salarié soumis au code du travail. Elles ne bénéficient pas non plus d’un contrat de travail et ne peuvent faire l’objet d’un licenciement. Elles sont donc considérées comme les usagers d’un établissement social et signent à ce titre un contrat de soutien et d’aide par le travail prévu par le code de l’action sociale et des familles.
Il n’est pas possible juridiquement d’ouvrir à ces personnes des droits à l’assurance chômage sans remettre en cause le principe même de l’assurance chômage, puisqu’il n’y a pas de fait générateur, en l’occurrence pas de rupture du contrat de travail.
Par ailleurs, cet amendement tend à renvoyer la détermination de certaines mesures d’application du régime d’assurance chômage propres aux travailleurs handicapés à un décret en lieu et place des accords d’assurance chômage, ce qui pose également un problème juridique.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Nous ne faisons pas du tout la même analyse juridique, madame la ministre, mais dans un souci de simplification, je retire cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 766 est retiré.
Je mets aux voix l’article 43, modifié.
(L’article 43 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 43
M. le président. L’amendement n° 682, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 43
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l’article 33 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire est complété par les mots : « , ainsi que des dispositions relatives aux entreprises adaptées prévues aux articles L. 5213-13 et suivants du code du travail dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État au plus tard le 1er septembre 2020 »
La parole est à Mme la ministre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. L’intention qui anime le Gouvernement me paraît extrêmement louable, mais je crains qu’elle ne manque son objectif.
En effet, l’intégralité des dispositifs qui s’appliquent aux entreprises adaptées, notamment les aides financières dont elles peuvent bénéficier à l’embauche d’un travailleur handicapé, est conditionnée, d’après le nouvel article L. 5213-13-1 du code du travail, à la signature d’un contrat de travail entre l’entreprise et le travailleur.
Or le travail de la personne détenue est encadré par un acte spécifique, dont ne sont signataires que la personne et le chef d’établissement pénitentiaire, et qui n’a pas la qualification de contrat de travail.
L’incitation de l’entreprise adaptée à solliciter le travail d’une personne handicapée détenue, qui n’est pas couverte par un contrat de travail et n’ouvre le droit à aucune aide, me paraît donc fortement diminuée. Je crains que le dispositif proposé ne trouve pas d’effectivité.
La commission s’en remet donc à la sagesse du Sénat.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 43.
L’amendement n° 600, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 43
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À titre expérimental, jusqu’au 31 décembre 2022, est mise en place pour les entreprises adaptées mentionnées au II la possibilité d’expérimenter un accompagnement des transitions professionnelles afin de favoriser la mobilité professionnelle des travailleurs handicapés vers les autres entreprises en recourant au contrat à durée déterminée conclu en application du 1° de l’article L. 1242-3 du code du travail.
Cette expérimentation est mise en place avec le concours financier de l’État dans la limite des crédits inscrits chaque année en loi de finances et des organismes publics et privés volontaires pour soutenir de nouvelles modalités de mises en emploi des travailleurs handicapés exclus du marché du travail.
Dans le cadre de cette expérimentation, les entreprises adaptées mentionnées au II quel que soit leur statut juridique, concluent avec les travailleurs reconnus handicapés sans emploi ou qui courent le risque de perdre leur emploi en raison de leur handicap, des contrats à durée déterminée en application de l’article L. 1242-3 du même code.
1° La durée de ces contrats ne peut être inférieure à quatre mois. Ces contrats peuvent être renouvelés dans la limite d’une durée totale de vingt-quatre mois.
2° À titre dérogatoire, ces contrats peuvent être renouvelés au-delà de la durée maximale prévue au 1° afin d’achever une action de formation professionnelle en cours de réalisation à l’échéance du contrat. La durée de ce renouvellement ne peut excéder le terme de l’action de formation concernée.
3° À titre exceptionnel, lorsque des difficultés particulières, dont l’absence de prise en charge, feraient obstacle à l’insertion durable dans l’emploi pour des salariés âgés de cinquante ans et plus, ce contrat de travail peut être prolongé par l’employeur au-delà de la durée maximale prévue, après avis de l’organisme ou de l’institution du service public de l’emploi en charge du suivi du travailleur reconnu handicapé, qui examine la situation du salarié au regard de l’emploi, la capacité contributive de l’employeur et les actions d’accompagnement et de formation qui ont été conduites.
La durée initiale peut être prolongée par décisions successives d’un an au plus, dans la limite de la durée de l’expérimentation.
La durée hebdomadaire de travail du salarié embauché dans ce cadre ne peut être inférieure à vingt heures, sauf lorsque le contrat le prévoit pour mettre en œuvre des modalités d’accompagnement du projet professionnel adaptées à leurs possibilités afin qu’ils obtiennent ou conservent un emploi. Elle peut varier sur tout ou partie de la période couverte par le contrat sans dépasser la durée légale hebdomadaire.
4° Ce contrat peut être suspendu, à la demande du salarié, afin de lui permettre :
1- En accord avec son employeur, d’effectuer une période de mise en situation en milieu professionnel dans les conditions prévues aux articles L. 5135-1 et suivants du code du travail ou une action concourant à son insertion professionnelle ;
2- D’accomplir une période d’essai afférente à une offre d’emploi visant une embauche en contrat de travail à durée indéterminée ou à durée déterminée au moins égale à six mois.
En cas d’embauche à l’issue de cette période de mise en situation en milieu professionnel, d’une action concourant à son insertion professionnelle, ou de cette période d’essai, le contrat est rompu sans préavis.
Par dérogation aux dispositions relatives à la rupture avant terme du contrat de travail à durée déterminée prévues à l’article L. 1243-2 du même code, le contrat peut être rompu avant son terme, à l’initiative du salarié, lorsque la rupture a pour objet de lui permettre de suivre une formation conduisant à une qualification prévue à l’article L. 6314-1 du même code.
II. – Un cahier des charges national fixe les critères que doivent respecter les entreprises adaptées candidates à l’expérimentation notamment les objectifs, les moyens, et résultats attendus en termes de sorties vers l’emploi.
Sur proposition du comité de suivi de l’expérimentation, le ministre chargé de l’emploi dresse la liste des structures retenues pour mener l’expérimentation.
Un décret précise les modalités de mise en œuvre de cette expérimentation, notamment le montant de l’aide financière susceptible d’être accordée, le contenu de l’avenant au contrat conclu avec l’État ainsi que les conditions de son évaluation en vue de son éventuelle généralisation.
Au plus tard douze mois avant le terme de l’expérimentation, est réalisée une évaluation afin de déterminer les conditions appropriées pour son éventuelle généralisation. Au terme de l’expérimentation, le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur l’application de la présente disposition au regard de son impact sur l’accès à l’emploi des travailleurs reconnus handicapés, sur les formations suivies ainsi que les conséquences sur les finances publiques.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Permettez-moi de préciser ce que j’ai dit de façon un peu générale tout à l’heure.
Le présent amendement vise à donner la possibilité aux entreprises adaptées d’expérimenter le recours à un contrat à durée déterminée « tremplin » et de l’inscrire dans une logique, non pas de précarisation, mais de transition. L’accompagnement proposé dans les entreprises d’accueil permettra de faire de ces contrats de vrais tremplins et non des emplois précaires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Cet amendement complète utilement l’ensemble des mesures prises en commission des affaires sociales et destinées à protéger les parcours qui vont vers plus d’autonomisation et plus de protection.
Pour mémoire, la commission s’était surtout attachée à sécuriser les parcours qui vont vers plus d’autonomisation, ces derniers concernant les travailleurs d’ESAT désireux d’intégrer le milieu adapté ou le milieu classique de travail.
L’article additionnel que le Gouvernement propose d’introduire concerne les parcours qui vont vers plus de protection, en permettant à des travailleurs handicapés sans emploi ou menacés par une perte d’emploi de signer un CDD de quatre à vingt-quatre mois avec une entreprise adaptée, laquelle disposera pour ce faire des aides financières attribuées au titre de l’aide au poste. La période pourra utilement être mise à profit pour le maintien en EA en vue d’une embauche ou de la redirection vers une autre entreprise.
La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 43.
L’amendement n° 601, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 43
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Pour une durée de quatre ans, à compter du 1er janvier 2019 et jusqu’au 31 décembre 2022, est mise en place pour les entreprises adaptées mentionnées au II, la possibilité d’expérimenter la création d’entreprise de travail temporaire afin de favoriser les transitions professionnelles des travailleurs handicapés vers les autres entreprises. Cette expérimentation doit faciliter l’émergence de structure de travail temporaire tournée vers les travailleurs handicapés et capable de promouvoir en situation de travail, les compétences et acquis de l’expérience de ces travailleurs auprès des employeurs autres que des entreprises adaptées.
Cette expérimentation est mise en place avec le concours financier de l’État dans la limite des crédits inscrits chaque année en loi de finances et des organismes publics et privés volontaires pour soutenir de nouvelles modalités de mises en emploi des travailleurs handicapés exclus du marché du travail.
L’activité exclusive de ces entreprises adaptées de travail temporaire consiste à faciliter l’accès à l’emploi durable des travailleurs reconnus handicapés sans emploi ou qui courent le risque de perdre leur emploi en raison de leur handicap et conclure avec ces personnes des contrats de missions.
Une durée de travail hebdomadaire inférieure à la durée minimale mentionnée à l’article L. 3123-27 du code du travail peut être proposée à ces personnes lorsque leur situation de handicap le justifie.
L’activité de ces entreprises adaptées de travail temporaire est soumise à l’ensemble des dispositions relatives au travail temporaire prévues au chapitre Ier du titre V du livre II de la première partie du même code. Toutefois, par dérogation aux dispositions de l’article L. 1251-12 et L. 1251-12-1 du même code applicables à la durée des contrats, la durée des contrats de mission peut être portée à vingt-quatre mois, renouvellement compris.
II. - Un cahier des charges national fixe les critères que doivent respecter des porteurs des projets économiques, sociaux en faveur de l’emploi des travailleurs handicapés notamment les moyens, les objectifs et résultats attendus en termes de sorties vers l’emploi. Sur proposition du comité de suivi de l’expérimentation, le ministre chargé de l’emploi dresse la liste des candidats retenus pour mener l’expérimentation.
Un décret précise les modalités de mise en œuvre de cette expérimentation, notamment le montant de l’aide financière susceptible d’être accordée ainsi que les conditions de son évaluation en vue de son éventuelle généralisation.
Au plus tard douze mois avant le terme de l’expérimentation, est réalisée une évaluation afin de déterminer les conditions appropriées pour son éventuelle généralisation.
Au terme de l’expérimentation, le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur l’application de la présente disposition au regard de son impact sur l’accès à l’emploi des travailleurs reconnus handicapés, sur les formations suivies ainsi que les conséquences sur les finances publiques.
La parole est à Mme la ministre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Cette disposition rejoint l’esprit des précédentes tendant à renforcer la fluidité des parcours. L’avis est donc favorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 43.
Section 3
Accessibilité
Article 44
L’article 47 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées est ainsi modifié :
1° Le I est ainsi rédigé :
« I. – Sont accessibles aux personnes handicapées dans les conditions définies au présent article les services de communication au public en ligne des organismes suivants :
« 1° Les personnes morales de droit public ;
« 2° Les personnes morales de droit privé délégataires d’une mission de service public, ainsi que celles créées pour satisfaire spécifiquement des besoins d’intérêt général ayant un caractère autre qu’industriel ou commercial et dont :
« a) Soit l’activité est financée majoritairement par une ou plusieurs personnes mentionnées aux 1° et 3° du présent I et au présent 2° ;
« b) Soit la gestion est soumise à leur contrôle ;
« c) Soit plus de la moitié des membres de l’organe d’administration, de direction ou de surveillance sont désignés par elles ;
« 3° Les personnes morales de droit privé constituées par une ou plusieurs des personnes mentionnées aux 1° et 2° pour satisfaire spécifiquement des besoins d’intérêt général ayant un caractère autre qu’industriel ou commercial ;
« 4° Les entreprises dont le chiffre d’affaires excède un seuil défini par le décret en Conseil d’État mentionné au V.
« Par exception au premier alinéa du présent I, l’accès aux services de communication au public en ligne des fournisseurs de services de médias audiovisuels est régi par la législation qui leur est applicable. Le présent article ne s’applique pas non plus aux services de communication au public en ligne des organismes de droit privé à but non lucratif qui ne fournissent ni des services essentiels pour le public, ni des services répondant spécifiquement aux besoins des personnes handicapées ou destinés à celles-ci. » ;
2° Les II et III deviennent, respectivement, les premier et second alinéas du IV et le IV devient le V ;
2°bis Les II et III sont ainsi rétablis :
« II. – L’accessibilité des services de communication au public en ligne concerne l’accès à tout type d’information sous forme numérique, quels que soient le moyen d’accès, les contenus et le mode de consultation, en particulier les sites internet, intranet, extranet, les applications mobiles, les progiciels et le mobilier urbain numérique. Elle est mise en œuvre dans la mesure où elle ne crée pas une charge disproportionnée pour l’organisme concerné. La charge disproportionnée est définie par décret en Conseil d’État, après avis du conseil mentionné à l’article L. 146-1 du code de l’action sociale et des familles.
« III. – Les organismes mentionnés aux 1° à 4° du I publient une déclaration d’accessibilité et élaborent un schéma pluriannuel de mise en accessibilité de leurs services de communication au public en ligne, qui est rendu public et décliné en plans d’actions annuels, et dont la durée ne peut être supérieure à trois ans. » ;
2° ter Le premier alinéa du IV, tel qu’il résulte du 2° du présent article, est ainsi modifié :
a) Après la première occurrence du mot : « accessibilité », la fin est supprimée ;
b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Tous ces services de communication au public en ligne donnent aisément et directement accès à la déclaration d’accessibilité, au schéma pluriannuel de mise en accessibilité et au plan d’actions de l’année en cours et permettent facilement aux usagers de signaler les manquements aux règles d’accessibilité de ce service. » ;
3° À la première phrase du second alinéa du IV, tel qu’il résulte du 2° du présent article, la référence : « II » est remplacée par la référence : « premier alinéa du présent IV » et la référence : « IV » est remplacée par la référence : « V » et le montant : « 5 000 € » est remplacé par le montant : « 25 000 € » ;
4° La première phrase du V, tel qu’il résulte du 2° du présent article, est ainsi rédigée : « Un décret en Conseil d’État, pris après avis du conseil mentionné à l’article L. 146-1 du code de l’action sociale et des familles, fixe les règles relatives à l’accessibilité, y compris celles portant sur la déclaration d’accessibilité, les contenus exemptés parmi ceux mentionnés au 4 de l’article 1er de la directive (UE) 2016/2102 du Parlement Européen et du Conseil du 26 octobre 2016 relative à l’accessibilité des sites internet et des applications mobiles des organismes du secteur public, les modalités de mise en œuvre, qui peuvent différer selon le type de service de communication au public en ligne, les délais de mise en conformité des services de communication au public en ligne, qui ne peuvent excéder trois ans, ainsi que les conditions dans lesquelles des contrôles sont effectués et des sanctions sont imposées et recouvrées en cas de non-respect des obligations prévues au premier alinéa du IV du présent article. » ;
5° (nouveau) – À la première phrase du dernier alinéa de l’article L. 111-7-12 du code de la construction et de l’habitation, après le mot : « décret », sont insérés les mots : « , publié avant le 31 décembre 2018, ».
M. le président. L’amendement n° 365, présenté par Mmes Meunier et Grelet-Certenais, M. Daudigny, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Tout nouveau service de communication au public en ligne doit être accessible dès la création de sa première version.
La parole est à Mme Michelle Meunier.
Mme Michelle Meunier. Par le présent amendement, nous souhaitons faire en sorte que tout nouveau service de communication au public en ligne soit accessible dès sa création.
En effet, l’adaptation a posteriori n’est pas efficiente. Elle est souvent plus complexe, plus coûteuse et trop longue. C’est de plus aux personnes handicapées ou en situation de handicap qu’incombe alors souvent la charge de cette adaptation.
Cet amendement vise donc à rendre obligatoire l’accessibilité native.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. L’article 44 du projet de loi est issu de l’obligation de transposition d’une directive européenne, aux termes de laquelle les organismes du secteur public seront déliés de leur obligation d’accessibilité numérique universelle dans le cas où cette dernière engendrerait une « charge disproportionnée ».
Or cet amendement vise à rétablir l’obligation d’accessibilité numérique de tout service en ligne, ce qui va à l’encontre de la transposition de cette directive à laquelle nous sommes tenus au titre de nos engagements internationaux.
C’est pourquoi, bien que je comprenne l’argument qui a présidé au dépôt de cet amendement, j’émets un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État. Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. L’amendement n° 396, présenté par Mme Grelet-Certenais, M. Daudigny, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Les recommandations internationales pour l’accessibilité de l’internet doivent être appliquées pour les services de communication publique en ligne, les sites internet, intranet et extranet.
La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais.
Mme Nadine Grelet-Certenais. La réécriture de l’article 47 de la loi de 2005 proposée par le Gouvernement supprime la référence aux normes internationales en matière d’accessibilité, référence pourtant maintenue dans la récente loi pour une République numérique.
Cette évolution implique que les seules références à des normes d’accessibilité seraient donc celles qui sont inscrites dans le référentiel général d’accessibilité pour les administrations, le RGAA.
En raison du contexte numérique international et de l’importance du réseau mondial francophone, il ne semble pas opportun que la France se referme sur ses propres normes et se prive ainsi de progrès notables complémentaires aux normes nationales.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. L’avis est défavorable, car bien que je comprenne tout à fait les motivations de ses auteurs, la rédaction que le présent amendement vise à introduire va également à l’encontre de nos obligations de transposition de la directive susvisée.
Par ailleurs, je signale que le référentiel général pour l’accessibilité des administrations mentionné dans l’objet de l’amendement est parfaitement à jour des recommandations internationales et continuera de s’appliquer en tenant compte de la charge disproportionnée qu’induira l’accessibilité numérique d’un service.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 44.
(L’article 44 est adopté.)
Article 45
Le chapitre II du titre II du livre Ier de la première partie du code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° Le 7° de l’article L. 122-5 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ces personnes empêchées peuvent également, en vue d’une consultation strictement personnelle de l’œuvre, réaliser, par elles-mêmes ou par l’intermédiaire d’une personne physique agissant en leur nom, des actes de reproduction et de représentation ; »
2° L’article L. 122-5-1 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après le mot : « au », sont insérés les mots : « premier alinéa du » ;
b) À la fin de la seconde phrase du 1°, les mots : « et aux services qu’ils rendent » sont remplacés par les mots : « , aux services qu’ils rendent ainsi qu’aux moyens de sécurisation qu’ils mettent en œuvre pour empêcher et prévenir la distribution, la communication ou la mise à disposition à des personnes non autorisées » ;
3° L’article L. 122-5-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 122-5-2. – Les personnes morales et les établissements figurant sur la liste mentionnée au 1° de l’article L. 122-5-1 fournissent, sur demande, aux personnes atteintes d’une déficience qui les empêche de lire, aux auteurs et aux autres entités autorisées la liste et les formats disponibles des documents adaptés dont ils disposent, ainsi que le nom et les coordonnées des entités autorisées avec lesquelles ils procèdent à des échanges de tels documents.
« Ces personnes et établissements peuvent recevoir des documents adaptés ou en mettre à disposition d’une entité autorisée établie dans un autre État membre de l’Union européenne ou un autre État partie au traité de Marrakech adopté le 27 juin 2013 visant à faciliter l’accès des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d’autres difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres publiées, en vue de leur consultation par des personnes atteintes d’une déficience qui les empêche de lire.
« Les personnes atteintes de ce type de déficience peuvent également, en vue d’une telle consultation, obtenir communication de documents adaptés auprès d’une entité autorisée mentionnée au deuxième alinéa du présent article.
« On entend par entité autorisée, au sens du présent article, toute personne morale ou tout établissement autorisé ou reconnu par un État ayant pour mission d’offrir, à titre non lucratif, aux personnes physiques atteintes d’une déficience qui les empêche de lire, des services en matière d’enseignement, de formation pédagogique, de lecture adaptée ou d’accès à l’information. Cette dénomination désigne également un organisme public ou une organisation à but non lucratif dont l’une des activités principales, obligations institutionnelles ou missions d’intérêt public est de fournir les mêmes services à ces personnes.
« Les modalités d’application du présent article sont précisées par décret en Conseil d’État. » – (Adopté.)
Section 4
Inclure dans la représentation des salariés les bénéficiaires de contrats uniques d’insertion
Article 46
I. – Au début du livre III de la deuxième partie du code du travail, il est ajouté un titre préliminaire ainsi rédigé :
« TITRE PRÉLIMINAIRE
« CHAPITRE UNIQUE
« Art. L. 2301-1. – Pour l’application du présent livre et par dérogation à l’article L. 1111-3, les salariés mentionnés aux 2° et 4° du même article L. 1111-3 sont pris en compte dans le calcul des effectifs de l’entreprise. »
II. – Les dispositions du présent article s’appliquent pour le calcul des effectifs enregistrés dans les entreprises à compter du 1er janvier 2019. – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 46
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 101 rectifié ter, présenté par M. Dallier, Mmes Bruguière, Delmont-Koropoulis et Estrosi Sassone, MM. Panunzi et Savary, Mme Troendlé, MM. H. Leroy, Bazin et Le Gleut, Mme Garriaud-Maylam, MM. B. Fournier et Lefèvre, Mme Gruny, MM. de Nicolaÿ, Brisson et Savin, Mme Deroche, MM. Longuet, Piednoir, Cuypers et Magras, Mmes Deromedi et Bonfanti-Dossat, MM. Daubresse, Pierre, Carle, Vogel, Revet, Mandelli et Babary, Mme A.M. Bertrand et MM. Cambon, Buffet, Pillet et Gremillet, est ainsi libellé :
I. - Après l’article 46
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 5132-1 du code du travail, les mots : « et d’accompagnement » sont remplacés par les mots : « , d’accompagnement et de formation ».
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Section …
Renforcer le cadre d’intervention des structures d’insertion par l’activité économique
La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis.
Mme Annie Delmont-Koropoulis. Pour les personnes situées hors du marché du travail, la formation professionnelle est un levier fondamental pour l’accès à un emploi stable et durable. Elle permet l’acquisition de compétences et de qualifications correspondant aux besoins du marché du travail et au projet professionnel de la personne.
Cet amendement tend à modifier la définition législative du secteur de l’insertion par l’activité économique dans le code du travail. Il s’agit de faire apparaître officiellement cette mission de formation professionnelle et de traduire dans la loi le triptyque « mise à l’emploi, accompagnement, formation ».
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 397 est présenté par Mme Grelet-Certenais, M. Daudigny, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.
L’amendement n° 695 rectifié bis est présenté par MM. Vall, Arnell, Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Collin et Corbisez, Mmes Costes et N. Delattre, MM. Gabouty, Gold, Guérini et Guillaume, Mmes Guillotin et Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Menonville et Requier.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 46
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 5132-1 du code du travail, les mots : « et d’accompagnement » sont remplacés par les mots : « , d’accompagnement et de formation ».
La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais, pour présenter l’amendement n° 397.
Mme Nadine Grelet-Certenais. Cet amendement vise à modifier la définition législative de l’insertion par l’activité économique dans le code du travail en y incorporant la mission de formation.
L’insertion par l’activité économique, ou IAE, permet avant tout aux personnes les plus éloignées de l’emploi en raison de difficultés sociales et professionnelles particulières de bénéficier d’un accompagnement renforcé qui doit faciliter leur insertion professionnelle. Elle concerne tout de même – faut-il le rappeler ? – environ 150 000 personnes.
Dans son rapport intitulé Donnons-nous les moyens de l’inclusion remis en janvier dernier, Jean-Marc Borello identifie la présente mesure parmi les solutions de montée en compétences des personnes peu qualifiées et préconise d’ancrer le triptyque « mise à l’emploi, accompagnement, formation ».
La formation est tout aussi importante que l’accueil et l’accompagnement en matière d’insertion par l’activité économique. En effet, les bénéficiaires de l’IAE sont également formés au sein de structures spécialisées telles que les entreprises d’insertion, les associations intermédiaires, les entreprises de travail temporaire d’insertion ou les ateliers et chantiers d’insertion. Cela contribue fortement à l’innovation sociale au service de la lutte contre les exclusions du marché du travail.
Par ailleurs, l’inclusion dans l’emploi ne relève pas de la seule responsabilité des chômeurs, bien au contraire. C’est une responsabilité partagée qui doit passer par un changement du regard porté sur le demandeur d’emploi, une sortie des préjugés en quelque sorte, parfois par un engagement de l’employeur.
Pour toutes ces raisons, cet amendement vise à intégrer pleinement le volet de la formation dans l’insertion par l’activité économique.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 695 rectifié bis.
Mme Véronique Guillotin. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur de la commission des affaires sociales. Les auteurs de ces trois amendements reprennent la préconisation du rapport Borello relative aux trois volets que sont l’emploi, l’accompagnement et la formation. Si l’on ne peut qu’être d’accord, la question qui se pose est celle des moyens.
Premièrement, l’adoption de ces amendements entraînerait soit un redéploiement des crédits de l’insertion par l’activité économique soit une hausse de cette enveloppe.
Deuxièmement, pour que cette nouvelle mission soit effective, il faudra lui donner des moyens opérationnels.
La commission sollicite donc l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Dans le rapport qu’il m’a remis, Jean-Marc Borello insiste à juste titre sur le triptyque : mise en situation de travail, accompagnement et formation.
Tous les dispositifs d’insertion qui fonctionnent s’appuient sur ce triptyque – c’est d’ailleurs pour cela que nous avons transformé les contrats aidés en parcours emploi compétences.
C’est aussi pour cela que j’ai signé le 28 mai dernier un accord avec tous les réseaux de l’insertion par l’activité économique et les gestionnaires des organismes paritaires collecteurs agréés, les OPCA, visant à démultiplier le volet « formation », qui est souvent est le parent pauvre de l’insertion par l’activité l’économique. Ces mesures vont dans le même sens que les dispositions proposées au travers de vos amendements.
Par ailleurs, dans le cadre du plan d’investissement dans les compétences, j’ai décidé d’allouer une enveloppe de 200 millions d’euros durant le quinquennat pour permettre au secteur de l’insertion par l’activité économique de développer le volet formation. C’est un effort sans précédent.
Toutefois, je ne crois pas utile, à ce stade, de figer dans la loi le fait qu’un parcours d’insertion au sein d’une IAE comporte nécessairement de la formation. S’il faut que les parcours comportent les trois volets du triptyque, le dosage sera très différent d’une personne à l’autre. Ce qui me semble primordial, c’est d’offrir aux personnes en difficulté un accompagnement adapté, sur mesure, qui leur permettra d’accéder à l’emploi.
Or je crains qu’inscrire la formation dans le dur de la loi n’entraîne un encadrement administratif trop rigide, qui ne puisse tenir compte de la diversité des parcours et du fait que pour certains, l’insertion passera par quelques heures de formation tandis que pour d’autres, elle durera des semaines, voire des mois.
Nous avons prévu des moyens qui permettront de développer réellement le volet « formation » dans les quatre années à venir, mais en accord avec le secteur de l’insertion par l’activité économique, je crois qu’il est trop tôt pour inscrire ce volet de façon rigide dans la loi.
Je demande donc le retrait de ces amendements et, à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. La commission se rallie à l’avis du Gouvernement.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.
Mme Véronique Guillotin. Au vu des explications qui viennent d’être données, je retire mon amendement.
M. le président. L’amendement n° 695 rectifié bis est retiré.
Madame Delmont-Koropoulis, l’amendement n° 101 rectifié ter est-il maintenu ?
Mme Annie Delmont-Koropoulis. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 101 rectifié ter est retiré.
Madame Grelet-Certenais, l’amendement n° 397 est-il maintenu ?
Mme Nadine Grelet-Certenais. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 397.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 46 bis A
I. – L’État peut expérimenter, pendant une durée de trois ans et dans cinq départements, l’élargissement des formes d’insertion par l’activité économique au travail indépendant. Cette expérimentation permet à des personnes sans emploi, rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières, d’exercer une activité professionnelle en bénéficiant d’un service de mise en relation avec des clients et d’un accompagnement réalisés par une entreprise d’insertion par le travail indépendant telle que définie au II.
II. – Une entreprise d’insertion par le travail indépendant contracte avec des personnes rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières pour leur donner accès à une activité professionnelle dans les conditions prévues à l’article L. 8221-6 du code du travail et pour les accompagner, selon des modalités spécifiques, afin de faciliter leur insertion sociale et professionnelle.
III. – Dans le cadre de l’expérimentation, l’État peut conclure des conventions avec des entreprises d’insertion par le travail indépendant prévoyant, le cas échéant, des aides financières imputées sur les crédits de l’insertion par l’activité économique votés en loi de finances.
IV. – Seuls les contrats conclus avec des personnes agréées par Pôle emploi ouvrent droit aux aides financières.
V. – Un décret en Conseil d’État définit les modalités d’application du présent article, notamment les règles relatives aux conventions conclues entre les entreprises d’insertion par le travail indépendant et l’État ainsi que celles relatives aux aides financières dont elles peuvent bénéficier.
VI. – Un rapport d’évaluation de l’expérimentation est remis au Parlement au plus tard six mois avant le terme de l’expérimentation. Ce rapport dresse notamment le bilan de l’insertion professionnelle des bénéficiaires de l’expérimentation, de ses effets sur l’ouverture de l’insertion par l’activité économique au travail indépendant et de son efficience.
M. le président. L’amendement n° 225, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Le présent article nous laisse dubitatifs. Comme la commission, nous craignons que les structures actuelles de l’insertion par l’activité économique ne soient lésées par le transfert d’une partie de leurs dotations budgétaires vers les entreprises d’insertion par le travail indépendant.
Cet amendement vise à supprimer l’article 46 bis A, car même si nous avons bien compris que le dispositif n’est proposé qu’à titre expérimental, la crainte que je viens d’évoquer ne nous semble pas négligeable.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Le présent article a été introduit à l’Assemblée nationale à la suite de l’adoption d’un amendement déposé par le rapporteur en séance.
Il est compliqué de se prononcer sur le dispositif prévu, car nous disposons de très peu d’éléments et que nous avons eu très peu de temps pour réaliser des auditions.
La commission s’est toutefois prononcée en faveur du maintien de ce dispositif. En effet, l’expérimentation lui semble intéressante, malgré l’aspect apparemment antinomique du travail indépendant et de l’insertion, et même s’il faut veiller à ce que des fonds soient effectivement affectés à ce dispositif.
L’avis sur le présent amendement de suppression est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. L’amendement adopté par l’Assemblée nationale que vient d’évoquer Mme le rapporteur a été déposé à la suite de demandes de structures d’insertion de proximité et de voisinage. Ces structures accueillent souvent des personnes en extrême difficulté qui ne sont pas capables de s’engager de façon régulière dans un contrat de travail, même pour quelques heures par semaine.
Ces personnes souhaitent, dans un premier temps, avoir la possibilité de travailler quelques heures de temps en temps et de dire oui ou non à telle ou telle activité, ce qui permet un retour à l’emploi à la fois très souple et très encadré par les associations de solidarité où interviennent à la fois des professionnels et des bénévoles. Cette vision particulière du travail indépendant est un chemin de réinsertion pour des personnes très en difficulté.
Il s’agit toutefois d’une expérimentation, car il faudra vérifier que le dispositif atteint effectivement son objectif.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Mes craintes ayant été évoquées, et compte tenu du caractère expérimental du dispositif, je retire mon amendement.
M. le président. L’amendement n° 225 est retiré.
Je mets aux voix l’article 46 bis A.
(L’article 46 bis A est adopté.)
Article 46 bis
À la fin du deuxième alinéa du III de l’article L. 225-102-1 du code de commerce, les mots : « et aux actions visant à lutter contre les discriminations et promouvoir les diversités » sont remplacés par les mots : « , aux actions visant à lutter contre les discriminations et promouvoir les diversités et aux mesures prises en faveur des personnes handicapées ». – (Adopté.)
Chapitre II
Moderniser la gouvernance et les informations relatives à l’emploi
Article 47
L’article 9 de la loi n° 91-1 du 3 janvier 1991 tendant au développement de l’emploi par la formation dans les entreprises, l’aide à l’insertion sociale et professionnelle et l’aménagement du temps de travail, pour l’application du troisième plan pour l’emploi est abrogé. – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 47
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 280 rectifié est présenté par M. Duran, Mme Artigalas, MM. Cabanel, Carcenac et Courteau, Mme M. Jourda, M. Montaugé, Mme Préville et MM. Raynal et Sutour.
L’amendement n° 532 rectifié bis est présenté par Mmes Chain-Larché et Thomas, MM. Cuypers et Longuet, Mmes Garriaud-Maylam, Delmont-Koropoulis et Deromedi et MM. Vogel, Cambon, Mandelli, Charon, Pierre, Bonhomme, Revet et Sido.
L’amendement n° 560 rectifié ter est présenté par Mme de la Provôté, M. Lafon, Mmes Morin-Desailly et Sollogoub, MM. Janssens et Luche, Mme Vermeillet, M. Laugier, Mme Vérien, M. Maurey, Mme Loisier, MM. Canevet, Kern et Moga, Mme Goy-Chavent, M. Bockel, Mme Gatel et MM. L. Hervé et Capo-Canellas.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 47
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 5311-3-1 du code du travail, il est inséré un article L. 5311-3-… ainsi rédigé :
« Art. L. 5311-3-… – À titre expérimental, l’État peut confier aux régions si elles en font la demande, pour une durée de cinq ans, après avis du comité régional de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles, la mission de veiller à la complémentarité et de coordonner l’action des différents intervenants, notamment les missions locales, les plans locaux pluriannuels pour l’insertion et l’emploi, Cap emploi et les maisons de l’emploi, ainsi que de mettre en œuvre la gestion prévisionnelle territoriale des emplois et des compétences. »
L’amendement n° 280 rectifié n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Anne Chain-Larché, pour présenter l’amendement n° 532 rectifié bis.
Mme Anne Chain-Larché. La loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République a prévu la possibilité pour l’État de déléguer aux régions sa compétence de coordination des acteurs du service public de l’emploi. Plusieurs régions ont fait acte de candidature sans que l’État y donne suite, ce qui témoigne des limites de l’outil juridique que constitue la délégation de compétence.
Afin de remédier à cette situation, le présent amendement prévoit cette même faculté au profit des régions, mais cette fois dans un cadre expérimental. L’expérimentation, de surcroît, permettra aux régions intéressées de définir librement leur politique de coordination des acteurs du service public de l’emploi, alors que dans le cadre d’une délégation de compétence, elles agissent au nom et pour le compte de l’État.
M. le président. La parole est à M. Laurent Lafon, pour présenter l’amendement n° 560 rectifié ter.
M. Laurent Lafon. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. La loi NOTRe de 2015 a déjà autorisé l’État à déléguer à la région, après avis du comité régional de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelle, le CREFOP, deux missions en matière d’emploi.
La première est de veiller à la complémentarité et de coordonner l’action des différents intervenants, et la seconde, de mettre en œuvre la gestion prévisionnelle territoriale des emplois et des compétences.
Selon les auteurs de ces amendements identiques, plusieurs régions ont fait acte de candidature, mais l’État n’y a jamais donné suite, d’où la proposition de passer à une expérimentation pour avancer et donner de nouvelles compétences aux régions, en reprenant quasiment à la lettre les termes de l’actuel article L. 5311-3-1 du code du travail.
Je voudrais faire cinq remarques.
Tout d’abord, c’est grâce à l’initiative conjointe de notre commission et de la commission des lois que l’article 7 de la loi NOTRe a vu le jour, dans une version certes moins ambitieuse que ce que souhaitait le Sénat.
Ensuite, la loi NOTRe ne prévoit pas un transfert de compétence, mais une délégation de pouvoir aux régions pour qu’elles agissent au nom de l’État, ce qui n’est pas du tout la même chose.
En outre, le passage à une expérimentation n’apporte aucune garantie à l’État par rapport au droit en vigueur, car dans les deux cas tout dépendra in fine de la volonté de l’État de confier aux régions de nouvelles missions.
Par ailleurs, l’expérimentation proposée prévoit que les régions coordonnent l’action de tous les acteurs de la politique de l’emploi, y compris Pôle emploi.
Enfin et surtout, le Sénat a adopté le 13 juin dernier la proposition de loi relative à l’équilibre territorial et à la vitalité de la démocratie locale présentée par nos collègues Bruno Retailleau et Philippe Bas, qui modifie également les compétences des régions en matière d’emploi. Son article 17 conserve en effet le cadre de la délégation sans passer à une expérimentation, mais il élargit considérablement son champ d’application.
La commission sollicite donc le retrait de ces amendements au profit de la proposition de loi adoptée par le Sénat le 13 juin dernier. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Anne Chain-Larché, pour explication de vote.
Mme Anne Chain-Larché. J’entends vos arguments, madame le rapporteur. Nous faisons donc confiance à la navette parlementaire et, espérant que nous aboutirons à un accord après la discussion à l’Assemblée nationale de la proposition de loi adoptée par le Sénat le 13 juin dernier, je retire mon amendement.
M. le président. L’amendement n° 532 rectifié bis est retiré.
Monsieur Lafon, l’amendement n° 560 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Laurent Lafon. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 560 rectifié ter est retiré.
Article 48
L’article L. 5314-3 du code du travail est abrogé. – (Adopté.)
Article 49
Le chapitre II du titre Ier du livre III de la cinquième partie du code du travail est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa de l’article L. 5312-5 est complété par les mots : « ou représentés » ;
2° Le premier alinéa de l’article L. 5312-10 est ainsi rédigé :
« Pôle emploi est composé d’une direction générale, de directions régionales et, sur décision de son conseil d’administration, d’établissements à compétence nationale ou spécifique. » – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 49
M. le président. L’amendement n° 713, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 49
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À titre expérimental pour une durée de trois ans, dans les régions volontaires définies par arrêté du ministre du travail, un contrat d’accès à l’entreprise ayant pour objet de faciliter l’insertion professionnelle de personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières d’accès à l’emploi peut être conclu avec une collectivité territoriale. Le contrat de travail est conclu en application des dispositions de l’article L. 1242-3 du code du travail, pour une durée maximale de dix-huit mois.
Pendant l’exécution du contrat d’accès à l’entreprise, le salarié, avec son accord, peut être mis à disposition d’un employeur, mentionné à l’article L. 5134-66 du code du travail à titre gratuit pendant une durée ne pouvant excéder six mois, afin de lui permettre d’améliorer sa qualification, son insertion ou de favoriser les transitions professionnelles. Le salarié est rémunéré par la collectivité territoriale à un niveau ne pouvant être inférieur à celui prévu à l’article L. 3231-2 du code du travail. Les dispositions des articles L. 1251-21 à L. 1251-24 du code du travail sont applicables.
Par dérogation à l’article L. 8241-1 du code du travail, la mise à disposition réalisée sur le fondement du présent article n’a pas de but lucratif pour les entreprises d’accueil.
Une convention-cadre conclue entre la collectivité et l’entreprise définit notamment les conditions générales de recours à ce contrat, les garanties applicables au salarié et les obligations incombant aux signataires de cette convention pour favoriser l’insertion sociale et professionnelle du salarié. Une convention individuelle de mise à disposition est établie entre la collectivité, l’entreprise et le salarié.
La collectivité territoriale fixe par une délibération les critères d’accès des employeurs à cette mise à disposition. Elle rend public un bilan annuel des mises à disposition effectuées et des bénéficiaires.
Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application des présentes dispositions.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Cet amendement vise à expérimenter pour une durée de trois ans un dispositif ayant pour objet de faciliter l’insertion professionnelle des personnes sans emploi qui ont des difficultés sociales et professionnelles particulières d’accès à l’emploi.
Ce dispositif permettrait ainsi à des collectivités territoriales d’embaucher en CDD d’insertion des personnes éloignées de l’emploi, et de les mettre à disposition pendant une durée de six mois maximum auprès d’une entreprise.
Cette mise à disposition leur permettra de retisser des liens avec le monde professionnel, de rebâtir une expérience et de réintégrer progressivement le monde du travail.
Il s’agit ainsi, au travers de cet outil, de multiplier les occasions de contacts entre les personnes en insertion et le monde de l’entreprise tout en permettant aux collectivités volontaires – exclusivement volontaires –, de s’investir davantage dans l’activation des dépenses passives et l’inclusion dans l’emploi des personnes qui en sont éloignées.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Nous avons déjà eu l’occasion de dire que la commission était favorable aux expérimentations, notamment en matière d’insertion.
De plus, je crois que plusieurs régions sollicitent ce type de contrat.
La commission a donc émis un avis favorable.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour explication de vote.
Mme Michelle Meunier. Le Gouvernement a réduit drastiquement le nombre de contrats aidés pour les collectivités locales, et en même temps, vous proposez aux mêmes collectivités de financer une expérimentation. C’est un peu troublant, même si j’ai bien entendu que cette expérimentation se fera sur la base du volontariat.
Si les associations représentatives des collectivités locales telles que l’Association des maires de France ou les associations représentant les départements et les régions n’étaient pas présentes à la dernière Conférence nationale des territoires, c’est bien parce que le compte n’y est pas !
Entre la coupe sèche des financements des contrats aidés et cette proposition, votre démarche manque de cohérence, madame la ministre, et il est bien difficile de vous suivre.
Pourquoi ne pas soutenir des dispositifs déjà en expérimentation et qui fonctionnent, tels que le dispositif « Territoires zéro chômeur de longue durée » ?
La proposition de loi prévoyant ce dispositif, élaborée par Laurent Grandguillaume avec les associations de lutte contre l’exclusion, a été adoptée à l’unanimité des deux chambres, dont le Sénat en 2016.
Aujourd’hui, dix territoires ont commencé l’expérimentation et des collectivités sont candidates pour entrer dans ce dispositif.
Soutenez ce qui est efficace en matière de lutte contre la précarité et le chômage avant d’engager l’expérimentation d’un nouveau dispositif, qui, bien qu’il soit intéressant, est encore hasardeux.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 49.
Chapitre II bis
Expérimentation en faveur de l’emploi
(Division et intitulé nouveaux)
Article 49 bis (nouveau)
L’article 1er de la loi n° 2016-231 du 29 février 2016 d’expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée est ainsi modifié :
1° Après le III, il est inséré un III bis ainsi rédigé :
« III bis. – Au plus tard le 30 juin 2019, le comité scientifique mentionné au III réalise une évaluation intermédiaire de l’expérimentation afin de déterminer l’opportunité et les conditions pour anticiper sa généralisation. »
2° Au IV, la référence : « et III » est remplacée par la référence : « à III bis ». – (Adopté.)
Chapitre III
Mesures relatives au détachement des travailleurs et à la lutte contre le travail illégal
Article 50
Le chapitre II du titre VI du livre II de la première partie du code du travail est complété par une section 3 ainsi rédigée :
« Section 3
« Conditions particulières de détachement
« Art. L. 1262-6. – Sans préjudice de l’article L. 1262-3 et de la section 2 du présent chapitre, les obligations prévues aux I et II de l’article L. 1262-2-1, à l’article L. 1263-7 et à l’article L. 8291-1 peuvent être aménagées par voie d’accord international pour les employeurs qui sont établis depuis au moins deux ans et accomplissent leur activité dans une zone frontalière et détachent un ou plusieurs salariés ayant une ancienneté d’au moins un an dans cette même zone, dans les conditions prévues à l’article L. 1262-1.
« L’accord international mentionné au premier alinéa du présent article détermine le périmètre de chaque zone frontalière.
« Il précise le cas échéant les activités exclues de son champ d’application.
« Il est conclu pour une durée limitée à trois ans.
« Art. L. 1262-7. – Sans préjudice de l’article L. 1262-3 et de la section 2 du présent chapitre, les employeurs détachant un ou plusieurs salariés dans les conditions prévues aux 1° et 2° de l’article L. 1262-1 pour des prestations et opérations de courte durée ou dans le cadre d’événements ponctuels et dont les salariés détachés exercent l’une des activités dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé du travail sont dispensés des obligations prévues aux I et II de l’article L. 1262-2-1.
« L’arrêté mentionné au premier alinéa du présent article précise, pour chaque activité identifiée, la durée maximale d’activité en France sur une période de référence.
« Un décret en Conseil d’État détermine, le cas échéant, les adaptations dont bénéficient les employeurs mentionnés au même premier alinéa pour l’application de l’article L. 1263-7, notamment la nature des documents devant être traduits en langue française et leurs modalités de conservation sur le territoire national.
« Art. L. 1262-8. – Les dispositions de la présente section ne sont pas applicables aux entreprises de travail temporaire définies à l’article L. 1251-2 et aux agences de mannequins définies à l’article L. 7123-12. »
M. le président. La parole est à Mme Vivette Lopez, sur l’article.
Mme Vivette Lopez. Monsieur le président, madame la ministre, mesdames, messieurs les rapporteurs, chers collègues, le secteur du bâtiment a connu depuis 2004, mais surtout depuis 2012 avec la crise économique des pays du sud de l’Europe, un développement considérable du travail détaché.
En 2017, le BTP représentait le troisième secteur en termes de déclarations de détachement et de nombre de salariés détachés. Face à ce phénomène massif, l’enjeu principal est la lutte contre la fraude au détachement à l’origine d’une concurrence sociale déloyale qui pénalise sévèrement les entreprises et l’emploi.
Si les professionnels sont favorables au développement du marché européen, il importe cependant qu’il se développe dans des conditions de concurrence sociale loyales. Sans même évoquer les salaires indignes, la fraude se caractérise souvent par une fraude aux horaires ou sur le niveau du salaire versé. Ainsi, les prix pratiqués par les entreprises sont tellement tirés vers le bas qu’il est impossible pour les entreprises établies sur notre territoire national de les concurrencer.
Ces dernières années, la lutte contre les fraudes au détachement a fait l’objet de nombreuses dispositions, mais la mobilisation des services de contrôle reste encore insuffisante. Les sanctions administratives en matière de fraude au détachement et de travail illégal prévues à l’article 53 permettent la mise en œuvre d’un arsenal répressif complet, grâce notamment à l’extension de la définition du travail dissimulé au cas des sociétés boîtes aux lettres.
En revanche, concernant le devoir de vigilance des maîtres d’ouvrage à l’égard des cocontractants prévu à l’article 54, si la recherche de l’effectivité des sanctions est un objectif louable d’un point de vue opérationnel, nous pouvons nous interroger sur la mise en œuvre pratique d’un tel dispositif.
Je terminerai en insistant sur la vigilance accrue qu’il conviendra également d’exercer concernant les travailleurs étrangers qui, employés dans des exploitations agricoles françaises, bénéficient des allocations de l’assurance chômage une fois rentrés chez eux et exercent une nouvelle activité dans leur pays d’origine pour obtenir, dans un second temps, de nouvelles allocations.
Depuis quelques jours, la situation des nombreux jeunes qui ont des contrats au jour le jour et qui galèrent est au cœur de nos débats. Permettez-moi de signaler également la situation des personnes, peut-être un peu moins jeunes, qui travaillent dans la même société depuis parfois plus de quinze ans sans être titulaires. Comment est-il possible d’envisager un avenir dans de telles conditions ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 226 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 411 est présenté par Mmes Meunier et Grelet-Certenais, M. Daudigny, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour présenter l’amendement n° 226.
M. Pascal Savoldelli. Je remercie ma collègue Vivette Lopez, car elle a, en partie, défendu l’amendement que nous avons déposé. Nous estimons que la rédaction de cet article est très lapidaire. Pourtant, il s’agit là des conditions particulières du détachement et de l’aménagement du travail détaché dans les zones frontalières.
On l’a bien compris, un accord international fixe les conditions de détachement des salariés. Mais je vous avoue que le groupe CRCE s’interroge. Par qui cet accord a-t-il été signé ? Des États de plein exercice ? Dites-nous de quels États il s’agit ! Ont-ils été signés par les régions frontalières entre elles ? Ont-ils été signés par des entreprises, voire des groupes à visée transnationale ? Nous sommes là face à trois interrogations lourdes.
Le travail détaché se développe, indique le rapport. C’est une évidence ; partageons-la !
S’il affecte pour partie des pays contigus au nôtre, il concernerait plus de 500 000 salariés étrangers, parmi lesquels 75 000 Portugais, 60 000 Polonais, 45 000 Allemands et quasiment autant de Roumains. C’est un flux qualifié, qui complète de manière parfois spectaculaire l’immigration respective de chacun de ces pays en France et montre le caractère qu’il convient de donner au détachement, celui d’une gestion des ressources humaines permettant de contourner habilement une bonne partie des obligations que les employeurs doivent remplir au regard de la loi. C’est aussi une bonne manière de conjuguer, notamment, construction européenne et moins-disant social.
De notre point de vue, le jeu sur les différentiels sociaux est, somme toute, relativement secondaire : ce qui est en jeu est bien plutôt, en l’espèce, une façon comme une autre de gérer au mieux les coûts par le recours à la sous-traitance, par la mise en concurrence des personnels du sous-traitant et du donneur d’ordre – qui peuvent relever de deux conventions collectives différentes –, par la non-prise en compte de l’ancienneté, sans parler de la technique – vous la connaissez sûrement toutes et tous ici – qui permettra de faire réaliser à quelques kilomètres de la frontière les mêmes tâches et les mêmes productions – vu la diversité des territoires ici représentés, nous connaissons tous cette situation –, avec des coûts très différents. Certaines entreprises sont présentes de chaque côté des frontières de notre pays.
C’est pourquoi nous estimons que cet article doit être supprimé. Dans le cas contraire, il ouvrirait une brèche dans le droit du travail.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour présenter l’amendement n° 411.
Mme Michelle Meunier. Cet amendement a aussi pour objet la suppression de l’article 50.
En effet, nous ne comprenons pas la logique du Gouvernement qui tend, en même temps, à renforcer les pouvoirs de l’inspection du travail dans ses contrôles et ses sanctions contre la fraude au travail détaché et à alléger les obligations pesant sur les employeurs qui y ont recours.
Par ailleurs, le cadre législatif du travail détaché est remanié tellement régulièrement que l’inspection du travail n’a pas le temps d’intégrer ces modifications que ces dernières ont déjà changé. En outre, une nouvelle directive européenne vient d’être adoptée en ce domaine, comme mon collègue l’a souligné. Inutile donc de modifier une énième fois le dispositif avant la transposition de ladite directive.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Il est vrai que nous nous sommes, nous aussi, interrogés sur les accords bilatéraux, qui avaient le mérite d’assouplir les règles déclaratives, sans remettre en cause, sur le fond, l’intégralité du dispositif relatif au détachement. La commission a décidé, vous vous en souvenez, d’apporter des précisions au travers d’un certain nombre d’amendements, afin d’éviter les entreprises dites « boîtes aux lettres », etc.
Cela étant, le débat est caduc dans la mesure où l’amendement n° 684 du Gouvernement que nous allons examiner vise à supprimer ces accords.
La commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements identiques, mais tout cela est bien éphémère, si j’ose dire, puisque nous allons rediscuter de cette question dans quelques instants.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements identiques. Oui, il s’agit d’amendements de teasing, si je puis dire, et nous allons parler plus au fond du sujet dans quelques instants.
Permettez-moi simplement de dire qu’il ne faut pas confondre deux sujets : celui du travail détaché, dont on veut renforcer les règles – nous en reparlerons avec la transposition de la directive – et celui qui est lié à certaines activités frontalières. Aujourd’hui, la France est le seul pays européen à connaître une situation compliquée non pas parce que l’on contrôle le travail détaché, mais parce que l’on applique les mêmes règles pour tous.
Comme le sport est un sujet d’actualité, je prendrai un exemple en la matière : si un journaliste sportif vient couvrir le Tour de France durant une journée ou deux, il doit faire une déclaration de détachement de travailleur. (M. Pascal Savoldelli s’exclame.) Il en est de même pour l’Orchestre philharmonique de Berlin, le Bayern de Munich ou encore les participants aux salons accueillis au parc des expositions de la porte de Versailles. Pour autant, nous en sommes d’accord, ce n’est pas cela le travail détaché.
En revanche, la DIRECCTE devra donner son avis pour vérifier que l’on ne s’engouffre pas dans le véritable travail détaché pour le Bayern de Munich, par exemple.
Il faut régler certains problèmes liés aux activités frontalières, qui ne sont pas dommageables en soi. Celles-ci ne constituent pas un véritable détachement, mais sont considérées comme telles en France, et seulement en France, avec toutes les obligations afférentes.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour explication de vote.
Mme Sophie Taillé-Polian. Ma collègue Michelle Meunier l’a indiqué, nous nous interrogeons sur, d’un côté, l’allégement des obligations et, de l’autre, les pouvoirs renforcés pour l’inspection du travail et les moyens qui lui sont alloués.
En effet, depuis plusieurs années, nous le savons, on enregistre une baisse continue du nombre d’agents de contrôle, qu’ils soient contrôleurs du travail ou inspecteurs du travail. Cette diminution devant se poursuivre davantage encore cette année et l’année prochaine, on se demande bien comment les agents pourront mettre en œuvre ces prérogatives. Madame la ministre, à la question que je vous ai posée sur ce sujet lors de votre audition par la commission des finances, le 19 juin dernier, vous m’avez répondu qu’il n’y avait pas de problème, puisque le nombre d’inspecteurs ou d’agents de contrôle était suffisant au regard des normes de l’Organisation internationale du travail et que, surtout, vous aviez recentré les priorités de l’inspection du travail sur la santé et les conditions de travail, le travail illégal, la fraude au détachement et l’égalité salariale. Pourquoi pas ?… Peut-être que les agents de contrôle de l’inspection du travail se dispersaient jusqu’à présent dans leurs activités… Toutefois, les précédentes priorités étaient identiques !
Quand on examine aujourd’hui les données qui nous sont transmises par le ministère du travail lors des auditions ou dans les réponses aux questionnaires portant sur les crédits de la mission « Travail et emploi », que j’envoie en tant que rapporteur spécial, avec mon collègue Emmanuel Capus, on voit bien aujourd’hui que 44 % des principales missions exercées par l’inspection du travail concernent la santé au travail, avec, notamment, le risque amiante et celui de chutes de hauteur et 30 % d’entre elles quasiment ont trait à la lutte contre le travail illégal et la fraude au détachement. En fait, les priorités sont les mêmes, elles n’ont pas changé, mais les moyens, eux, diminuent et les exigences augmentent.
On se demande comment on va faire pour mettre vraiment tout cela en place, à moins que ce ne soit là que de la communication…
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Bon, votre réponse était sympa, madame la ministre, elle nous a permis un petit moment de détente… Mais quand on parle de la contiguïté des pays concernés par cette question, avec 500 000 salariés, j’espère que l’exemple du journaliste sportif ou du commercial participant à un salon ne sortira pas de cette enceinte ! Ce n’est pas du tout la typologie du problème des travailleurs détachés ni celle des filières concernées.
M. Pascal Savoldelli. Certes, mais…
M. Pascal Savoldelli. C’est mieux de le dire !
M. Pascal Savoldelli. C’est mieux de le dire, mais quand même…
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Il n’a pas écouté !
M. Pascal Savoldelli. Sauf à ne pas connaître les territoires ni le monde de l’entreprise !
Mme le rapporteur nous invite à considérer l’amendement n° 684 du Gouvernement. Je vous pose donc de nouveau deux questions.
Premièrement, les régions frontalières ont-elles été associées ? Vous ne pouvez pas me taxer de réflexe partisan ou idéologique – aucun président de région ne porte notre étiquette politique ! – ; nous nous préoccupons des collectivités territoriales. Les régions frontalières ont-elles été, oui ou non, consultées, celles de notre pays, mais aussi celles des pays contigus ? Je souhaiterais avoir une réponse à cette première question.
Deuxièmement, des entreprises ou des groupes à visée transnationale – je vise le monde de l’entreprise : il nous est forcément commun ici – ont-ils été associés à cette décision ? Merci de vos réponses, madame la ministre.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.
Mme Véronique Guillotin. On parle effectivement des connaissances et des spécificités des territoires.
J’irai pour ma part dans le sens de l’article 50. La réalité, c’est qu’il y a des travailleurs détachés au sens où certains veulent bien l’entendre, mais il y a aussi des zones frontalières, je dirai même des zones transfrontalières.
Résidant sur un territoire transfrontalier franco- luxembourgeois, à un kilomètre de la frontière, je constate que les frontières sont abolies par un espace de vie en commun. Des espaces contigus ou, en tout cas, de coopération existent également par l’intermédiaire d’outils que l’on appelle les GECT, les groupements européens de coopération territoriale. On voit aujourd’hui la difficulté à faire vivre ces territoires : les habitants ont des espaces de consommation, de vie, de travail, qui sont aussi français que luxembourgeois, et il leur est compliqué dans la vie courante et quotidienne de s’y retrouver, à cause du trop grand nombre de freins administratifs et législatifs.
Toutes les mesures visant à favoriser la fluidité, y compris d’un point de vue économique – du côté français, on a un mal fou à trouver du travail –, vont dans le bon sens.
M. Pascal Savoldelli. On n’a pas de réponse de la ministre ?… Merci pour les parlementaires !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 226 et 411.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 684, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéas 4 à 7
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Cet amendement me donne l’occasion d’expliquer la stratégie plus globale concernant la lutte contre les fraudes au détachement pour répondre à la question qui m’a été posée.
Lors de l’examen des amendements précédents, on a parlé d’un problème mineur pour aborder ensuite un problème majeur. Après l’article 52, je vous proposerai un amendement visant à vous demander une habilitation à transposer rapidement dans notre droit interne la nouvelle directive européenne relative au détachement de travailleurs, qui vient d’être adoptée définitivement.
Il y a deux sujets différents. Le sujet principal concerne le détachement de travailleurs qui, tant qu’il n’est pas de nature à créer une concurrence déloyale ni du dumping social, n’est pas un problème, mais en devient un s’il a des conséquences économiques ou sociales négatives. Le détachement augmente beaucoup, avec 560 000 travailleurs détachés en France l’année dernière, soit une augmentation de 46 %, ce qui constitue une forte augmentation. Les flux augmentent aussi dans d’autres pays. C’est la raison qui explique l’importance de cette directive sur les travailleurs détachés.
Lorsque nous sommes arrivés aux affaires, il y a quatorze mois, le texte révisé de la directive de 1996 – la première révision – qui était sur la table devait être signé trois semaines plus tard, mais nous avons considéré qu’il n’était pas assez protecteur sur le plan social ni au regard des engagements en matière de concurrence pour les PME et les TPE.
La France d’abord, suivie ensuite par l’Allemagne et bien d’autres pays – une très large majorité des pays d’ailleurs –a adopté cette directive après renégociation, et le processus européen vient de s’achever il y a quelques jours. Cette directive, qui est maintenant transposable dans notre droit interne, est importante en ce qu’elle permettra un salaire égal à travail égal, en prenant en compte tous les éléments de rémunération, ce qui n’était pas le cas avant – on pouvait déduire certains éléments de rémunération –, ainsi qu’un contrôle renforcé et coordonné du travail détaché pour lutter contre la fraude – le détachement de certains travailleurs ne pose aucun problème, mais il existe des cas de fraudes et de fraudes organisées, à l’image des entreprises « boîtes aux lettres », par exemple, un sujet bien connu. On va donc pouvoir transposer dans notre droit interne toute une série de mesures. Voilà le sujet principal du travail détaché : il s’agit de réguler mieux pour éviter le dumping social et assurer la protection des salariés ainsi que l’égalité de traitement, afin de ne pas nuire à la concurrence.
Le sujet que l’on traite ici est mineur si j’ose dire, il concerne les frontaliers ordinaires, ceux qui viennent travailler dans notre pays un ou deux jours ou plus régulièrement, mais dans le cadre d’une prestation de services ; je veux parler des salariés qui rendent un service ou assurent une livraison dans le pays frontalier ou des cadres qui, au sein d’une entreprise, voyagent toutes les semaines ; je pense aux cadres d’Airbus, dont l’équipe est binationale. Dans ce cas, la DIRECCTE pourra procéder à des évaluations, simplifier la procédure pour accorder des dérogations. Mais c’est là effectivement une petite partie du sujet, qu’il faut néanmoins traiter, l’essentiel ayant trait à la question de la directive sur les travailleurs détachés, que nous examinerons ultérieurement.
Pour en revenir à l’amendement n° 684 – excusez-moi d’avoir extrapolé, mais il était important d’apporter ces précisions –, nous proposons de supprimer les alinéas 4 à 7 de l’article 50.
Le Gouvernement avait prévu la possibilité de conclure des accords bilatéraux avec des pays frontaliers. Or il s’avère que cette solution n’apparaît pas aujourd’hui la plus adaptée aux situations visées. L’alternative efficace, c’est la possibilité d’évaluer au cas par cas la situation particulière des entreprises, en vue de bien distinguer le « minifrontalier ordinaire », si je puis dire, exceptionnel ou quotidien, mais qui n’exerce pas vraiment un travail détaché, du travailleur détaché.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Madame la ministre, comme vous l’avez précisé, les amendements nos 684 et 685 du Gouvernement traitent d’un sujet similaire.
Je ne reviendrai pas sur l’amendement n° 750, dont nous avons débattu hier de minuit à minuit et demi. Cela étant, permettez-moi d’intervenir sur la forme, avant d’en venir au fond sur votre amendement.
Le texte que nous avons reçu du Gouvernement évoquait, dans ses alinéas 4 à 7, les accords bilatéraux. Nous avons passé du temps, lors des auditions, à évoquer ces accords. On nous a dit que ceux-ci étaient demandés par les Allemands, notamment, sur la forme. Nous avons aussi passé du temps à amender les mesures prévues pour découvrir jeudi – ô surprise ! – un amendement visant à supprimer ces alinéas, qui sont, madame la ministre, vos propres alinéas. Je suis désolée de vous le dire, mais cette pratique contredit le discours du Gouvernement sur sa volonté de respecter le Parlement. À moins qu’il ne s’agisse là d’impréparation…
En tout état de cause, et avec tout le respect que j’ai pour vous, je ne puis pas laisser passer cet amendement du Gouvernement. La commission propose donc un avis de sagesse.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Je veux préciser trois choses.
Premièrement, j’entends ce que vous dites, mais cet amendement a été déposé dans les formes et dans les délais.
Deuxièmement, pour vous dire la vérité, il ne vous aura pas échappé qu’il y a eu un changement de gouvernement en Allemagne. Nous avons rediscuté des conditions pour aboutir à quelque chose qui convient aux deux pays et aux autres pays limitrophes. Il importait de régler le problème et on l’a fait dans les formes.
Troisièmement, permettez-moi de revenir sur les modalités. Vous m’avez demandé si des consultations avaient eu lieu. On a fait des tests auprès des entreprises. Il s’agit en fait d’un amendement de bon sens. Pour ce qui concerne les modalités d’application, nous allons nous concerter avec les régions, notamment le Grand Est, le Bade-Wurtemberg et la Rhénanie-Palatinat, qui sont directement concernées. On les a écoutées, mais on va examiner ensemble les modalités d’application.
M. Pascal Savoldelli. Merci de la réponse, madame la ministre ! La concertation a tout de même lieu, mais après !
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Avis favorable alors…
M. le président. Je mets aux voix l’article 50, modifié.
(L’article 50 est adopté.)
Article additionnel après l’article 50
M. le président. L’amendement n° 685, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 50
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre III du titre VI du livre II de la première partie du code du travail est complété par un article L. 1263-8 ainsi rédigé :
« Art. L. 1263-8 – L’autorité administrative, saisie par un ou plusieurs employeurs détachant de manière récurrente des salariés dans les conditions prévues aux 1° et 2° de l’article L. 1262-1 ou par un organisme ayant mandat, peut aménager les modalités selon lesquelles les obligations prévues aux I et II de l’article L. 1262-2-1 et à l’article L. 1263-7 sont satisfaites lorsque sont apportées à l’appui de leur demande les informations attestant du respect des dispositions légales et des stipulations conventionnelles dans les matières énumérées à l’article L. 1262-4.
« Les aménagements consentis pour une durée ne dépassant pas un an sont notifiés au demandeur.
« Pendant la durée ainsi fixée, l’autorité administrative peut demander communication des documents prévus par l’article L. 1263-7.
« L’autorité administrative met fin aux aménagements accordés en vertu du premier alinéa soit lorsque les modalités définies sur le fondement du premier alinéa n’ont pas été respectées, soit en cas de constat d’un manquement aux règles applicables dans les matières énumérées à l’article L. 1262-4.
« La demande de renouvellement des aménagements est assortie de tout élément attestant du respect des dispositions légales et des stipulations conventionnelles dans les matières énumérées à l’article L. 1262-4 pour la période écoulée.
« Un décret en Conseil d’État détermine la nature des aménagements pouvant être accordés en vertu du présent article. »
La parole est à Mme la ministre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Sagesse.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 50.
Article 51
I. – Au I de l’article L. 1262-2-1 du code du travail, les références : « articles L. 1262-1 et L. 1262-2 » sont remplacées par les références : « 1° et 2° de l’article L. 1262-1 et à l’article L. 1262-2 ».
II. – Au 1° de l’article L. 1262-4-4 du code du travail, les mots : « , ou son représentant désigné en application de l’article L. 1262-2-1 » sont supprimés.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 227 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 412 est présenté par Mmes Meunier et Grelet-Certenais, M. Daudigny, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 227
Mme Laurence Cohen. Il fallait faire évoluer la législation sur le travail détaché en permettant, notamment, aux entreprises étrangères sans représentation dans notre pays de détacher temporairement un ou plusieurs salariés, en vue d’y réaliser, par exemple, une mission commerciale ponctuelle. En l’espèce, l’entreprise n’aurait plus l’obligation de déclaration par le biais d’un correspondant et devrait en quelque sorte se débrouiller toute seule avec l’inspection du travail en France. Cela va nécessiter une très forte mobilisation des services du ministère du travail. À cet égard, j’estime que l’on demande beaucoup à l’inspection du travail, alors que les moyens humains et financiers qui lui sont alloués se réduisent comme peau de chagrin – ce point est à souligner.
En outre, cet assouplissement risque de permettre la mise en place de stratégies de contournement de la législation française par un certain nombre d’employeurs étrangers. C’est pourquoi nous proposons de supprimer cet article.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour présenter l’amendement n° 412.
Mme Michelle Meunier. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Ces deux amendements identiques visent à supprimer l’article qui aménage les règles de détachement pour « compte propre » des entreprises.
Nous en sommes d’accord, cet article dispense les entreprises de la déclaration préalable de détachement et de la désignation d’un correspondant, mais le prestataire devra toujours respecter les règles relatives au détachement – il est important de le rappeler.
Il s’agit plutôt – cela nous a été confirmé – d’une procédure de simplification. Cet article nous paraissant présenter un intérêt, la commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à ces deux amendements identiques.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 227 et 412.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 51.
(L’article 51 est adopté.)
Article 52
L’article L. 1262-4-6 du code du travail est abrogé.
M. le président. L’amendement n° 495, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article L. 1262-4-6 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 1262-4-6. – Tout employeur établi hors de France qui détache un salarié sur le territoire national est assujetti à une contribution égale à la différence entre le montant des cotisations patronales acquittées dans le pays d’origine et celui qui devrait l’être si elles étaient dues en France.
« Les modalités de calcul de cette compensation sont fixées par décret en Conseil d’État.
« La contribution est recouvrée selon les règles applicables en matière de créances étrangères à l’impôt et au domaine. »
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Dans les faits, le code actuel fixait une contribution minimale des entreprises étrangères pour faciliter la mise en place du système de traitement des données. Il faut croire que les moyens de conception et de mise en œuvre de ce système ont été réunis, puisque l’article 52 prévoit la suppression pure et simple de la contribution.
À la vérité, la contribution n’a jamais fait l’objet du moindre recouvrement, alors même que, comme beaucoup d’impôts de faible quotité, elle présentait l’avantage de permettre l’identification des entreprises recourant au travail détaché.
On notera que, en même temps, pour tenir l’équilibre, d’une certaine manière, l’article 53 prévoit de majorer les amendes administratives pour infraction au travail détaché, sans en majorer le montant maximal, soit dit en passant.
Pour notre part, nous préférons tirer parti de la discussion de ce projet de loi pour modifier le contenu de cet article du code du travail. En lieu et place d’un financement des systèmes d’information du ministère du travail, qui n’a d’ailleurs jamais été mis en place finalement, nous sommes partisans du versement d’une sorte de différentiel des cotisations sociales patronales, au bénéfice de notre système de sécurité sociale.
Les modes de financement de la sécurité sociale sont différents d’un pays l’autre et les taux applicables aux cotisations de la part patronale plutôt variables. Seuls, en effet, les deux royaumes de Suède et de Belgique ont des montants de cotisations patronales plus élevés. Mais il convient de noter que, si les coûts du travail dans l’industrie sont proches en France et en Allemagne, l’Allemagne dispose d’un différentiel en sa faveur dans le secteur des services, fondé sur le développement d’un grand nombre de « petits boulots » mal payés dans le domaine des services connexes aux activités industrielles.
D’ailleurs, c’est pour cette raison que l’on a créé en France le CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, et mis en œuvre le pacte de responsabilité et de solidarité. Objectif dépassé au-delà de toute espérance : 29 % des contrats de travail signés depuis le début de l’année sont des contrats d’un jour !
Tel est le sens de cet amendement que je vous invite à adopter, mes chers collègues.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cher collègue, l’article 52 vise effectivement à supprimer la contribution financière relative à la déclaration préalable de détachement, que l’on appelle le droit de timbre, d’un montant de quarante euros. Vous proposez de la remplacer par la contribution différentielle en matière de cotisations sociales pour les prestataires qui détachent des salariés en France, dont le montant dépassera largement les quarante euros, vous avez parfaitement raison.
Cela dit, cet amendement est contraire au droit européen.
En effet, le règlement européen d’avril 2004 sur la coordination des systèmes de sécurité sociale prévoit que ce sont les règles du pays d’origine qui s’appliquent pendant les deux premières années d’un détachement en matière de sécurité sociale.
J’ajoute que la Commission européenne a présenté en décembre 2016 une proposition de révision de ce règlement, qui est toujours débattue. Aussi, je vous invite à y apporter votre contribution.
M. Fabien Gay. Avec vous !
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. En tout état de cause, la commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 52.
(L’article 52 est adopté.)
Article additionnel après l’article 52
M. le président. L’amendement n° 681 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 52
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi afin de transposer les dispositions de la directive (UE) 2018/957 du Parlement européen et du Conseil du 28 juin 2018 modifiant la directive 96/71/CE concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services.
Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Je l’ai évoqué rapidement, mais permettez-moi de revenir un instant sur ce sujet.
Le Gouvernement propose de transposer la directive révisant la directive 96/71, qui a été adoptée par le Parlement européen le 29 mai dernier et par le Conseil le 21 juin 2018.
Cet amendement prévoit de procéder à une transposition en droit interne par voie d’ordonnance : les travaux de transposition seraient ouverts durant une période d’un an à compter de la promulgation de la loi. Notre objectif est de compter parmi les premiers pays européens à procéder à cette transposition, si ce n’est à être le premier pays à le faire. Nous voulons aller rapidement : certaines dispositions ne peuvent être mises en application qu’après transposition par l’ensemble des pays, mais d’autres pourront être appliquées plus rapidement dans le droit français.
Permettez-moi de rappeler les trois éléments majeurs de cette directive et un quatrième qui concerne le règlement de la sécurité sociale : premièrement, le principe « à travail égal, salaire égal, sur le même lieu de travail » – c’est l’élément le plus important – ; deuxièmement, la limitation à douze mois de la durée, avec une éventuelle dérogation ; troisièmement, le renforcement important de la coopération entre les inspections du travail des différents pays pour pouvoir contrôler les abus et les pénaliser ; quatrièmement, enfin, l’obligation d’une affiliation de trois mois à la sécurité sociale dans le pays d’origine pour éviter la création de sociétés fictives à la seule fin du travail détaché.
M. le président. Le sous-amendement n° 769, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Amendement n° 681 rectifié, alinéa 3
Remplacer le mot :
douze
par le mot :
six
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Ce sous-amendement prévoit que l’ordonnance doit être publiée dans un délai de six mois, et non d’un an.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Ce n’est pas un scoop : je ne partage pas l’avis que la commission et du Gouvernement ! (Sourires.)
En effet, nous sommes opposés à cet article visant à habiliter le Gouvernement à prendre toutes mesures permettant la transposition de la directive qui révise la directive sur le travail détaché.
Nous avons toujours été des adversaires résolus de l’article 38 de la Constitution. La matière dont il est question ici est suffisamment importante pour justifier, sinon un débat sur la transposition de la directive dans le présent texte, à tout le moins le dépôt d’un texte en bonne et due forme, une fois les travaux nécessaires accomplis.
En matière de travail détaché, nous avons souligné le fait que plus de 500 000 salariés – hors secteur des transports – avaient connu un détachement dans notre pays au cours de la période récente.
Sans surprise se situent en tête de peloton des salariés détachés les Portugais, devant les Polonais, les Allemands et les Roumains, les Français détachés en France venant en cinquième position.
Le « top 5 » des déclarants, si je puis m’exprimer ainsi, place dans l’ordre : l’Allemagne, l’Espagne, le Portugal, la Belgique et l’Italie. La Pologne vient ensuite, avec environ quatre fois moins de salariés déclarés par des entreprises polonaises que de salariés détachés, suivie du Luxembourg qui, apparemment, compte un certain nombre de donneurs d’ordre.
Dans les pays récemment entrés dans l’Union européenne, l’émigration des travailleurs et le travail détaché agissent comme des soupapes de sécurité pour fluidifier le marché du travail local, en relâchant la pression sur la demande d’emploi.
Il faut d’ailleurs reconnaître que la France elle-même est déjà confrontée au phénomène, qu’il s’agisse de la Lorraine qui se situe à proximité du Grand-Duché du Luxembourg, grand pourvoyeur d’emplois industriels, commerciaux et bancaires pour les pays voisins, ou de cette même région et de l’Alsace vis-à-vis de l’Allemagne, sans parler de l’attractivité de la République de Genève sur les habitants de la Haute-Savoie.
On rappellera ici que près de 900 000 jeunes de 25 à 34 ans, formés dans les écoles, les lycées, les centres d’apprentissage et les universités françaises, font le bonheur des économies étrangères où ils ont pu faire valoir leurs diplômes et leurs talents.
Le moins-disant social étant puissamment à l’œuvre à l’échelon européen, seule une discussion parlementaire franche et ouverte permettrait à notre pays d’appréhender comme il convient la question du travail détaché. Ce n’est pas ce que l’on observe avec ce projet de loi : le débat ne va pas jusqu’au bout sur ces sujets. C’est pourquoi nous voterons contre l’amendement n° 681 rectifié.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour explication de vote.
Mme Michelle Meunier. Madame la ministre, vous nous demandez d’habiliter le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance pour la transposition de la révision de la directive relative aux travailleurs détachés, qui vient d’être adoptée au niveau européen.
Nous nous félicitons de l’adoption de cette directive, car nous avons défendu les principes qui ont présidé à sa révision et soutenu la négociation sous le précédent quinquennat. Celle-ci représente en effet une véritable avancée pour les travailleurs en Europe et contribuera à mettre un terme à la concurrence déloyale, au dumping social et, enfin, à imposer des conditions de travail équitables, ainsi qu’une règle commune simple : à travail égal, salaire égal sur un même lieu de travail !
Nous regrettons toutefois que le Gouvernement n’ait pas estimé suffisamment important d’aller jusqu’au bout de la démarche engagée avec cette directive, en en faisant un texte de portée universelle pour tous les travailleurs, y compris les transporteurs routiers.
Il existe aujourd’hui un vrai risque que le régime de ces salariés soit finalement dérogatoire alors que, compte tenu des spécificités mêmes de leur travail, ils devraient évidemment pouvoir bénéficier des mêmes garanties sociales que les travailleurs des autres secteurs.
Nous voyons combien il est difficile aujourd’hui d’obtenir de telles garanties en dehors de la directive. Dans la négociation du paquet Mobilité au Parlement européen, la droite européenne n’a ainsi pas hésité à remettre à plat tous leurs droits et à contester pied à pied toutes les avancées négociées l’an dernier, qui auraient pu être intégrées à la directive relative au détachement des travailleurs.
Madame la ministre, nous estimons que ce texte si important mérite mieux qu’une transposition par voie d’ordonnance : la révision de cette directive, qui conforte des droits concrets pour nos concitoyens, qui porte une vision sociale et qui démontre que l’Europe peut répondre présent, lorsqu’il s’agit de mieux les protéger, devrait faire l’objet d’un projet de loi ordinaire, avec un débat qui permettrait d’apporter une image plus positive et plus concrète de l’Europe, notamment dans la perspective des prochaines élections européennes.
Pour ces raisons, nous voterons contre votre amendement.
M. Yves Daudigny. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Michel Magras, pour explication de vote.
M. Michel Magras. Je reconnais ne pas avoir pris connaissance de la nouvelle directive.
Je n’ai strictement rien contre les frontaliers qui trouvent des accords de part et d’autre de la frontière : cela me paraît parfaitement logique. Je n’ai rien non plus contre les travailleurs d’autres pays européens qui viennent remplir une mission que l’on ne peut pas remplir nous-mêmes.
Je me soucie, en revanche, de la manière dont on utilise actuellement la directive dans nos territoires, notamment le mien. J’aimerais vous en dire deux mots, afin de vous sensibiliser sur la question.
Aujourd’hui, on recourt de plus en plus à des plateformes – c’est le nouveau mot à la mode –, qui sont situées un peu partout, et qui effectuent toutes les formalités nécessaires pour amener dans nos territoires des travailleurs qui sont réputés en règle.
Lorsque ceux-ci viennent travailler, leurs formalités sont remplies, les charges sociales sont payées, mais dans le pays d’origine. En revanche, les prestations restent à la charge du territoire dans lequel ils exercent leur métier ! Vous devez imaginer à quel point une telle procédure contribue à déstabiliser complètement le marché du travail, notamment sur des îles ! Les prix pratiqués sont bien entendu inférieurs à ceux des entreprises locales, si bien que la concurrence et, plus largement, l’équilibre social sont totalement perturbés.
Pour respecter la règle, les contrats de ces travailleurs peuvent prendre plusieurs formes : il y a ceux qui viennent puis restent, mais il y a aussi ceux qui viennent pour de très courtes périodes de trois ou six mois, le temps de profiter au maximum du système. Après, on change les têtes et on en envoie d’autres !
Je tenais à attirer votre attention sur ce point, madame la ministre. Il faudra bien que vous preniez conscience à un moment donné, l’intégralité des règles du droit du travail s’appliquant dans mon territoire, que vous êtes en train de détruire un équilibre économique et qu’il faudra trouver des solutions pour le rétablir. Dans ma collectivité, nous n’avons aucune solution et n’avons de toute façon pas le droit d’en imposer une !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 52.
Article 52 bis
À l’article L. 1261-3 du code du travail, après les mots : « celui-ci », sont insérés les mots : « hors du territoire national ». – (Adopté.)
Article 53
I. – La première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 1264-3 du code du travail est ainsi modifiée :
1° Le montant : « 2 000 € » est remplacé par le montant : « 4 000 € » ;
2° Le montant : « 4 000 € » est remplacé par le montant : « 8 000 € » ;
3° Les mots : « d’un an » sont remplacés par les mots : « de deux ans ».
II. – L’article L. 8115-3 du code du travail est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le montant : « 2 000 € » est remplacé par le montant : « 3 000 € » ;
2° Au second alinéa, les mots : « d’un an » sont remplacés les mots : « de deux ans ». – (Adopté.)
Article 54
I. – L’article L. 1262-4-1 du code du travail est complété par un III ainsi rédigé :
« III. – Le donneur d’ordre ou le maître d’ouvrage qui contracte avec un prestataire de services qui détache des salariés, dans les conditions mentionnées aux articles L. 1262-1 et L. 1262-2, vérifie lors de la conclusion du contrat que son cocontractant s’est acquitté, le cas échéant, du paiement des sommes dues au titre des amendes prévues aux articles L. 1263-6, L. 1264-1, L. 1264-2 et L. 8115-1. »
II. – Le premier alinéa de l’article L. 1263-3 du code du travail est ainsi modifié :
1° Après la troisième occurrence du mot : « travail », il est inséré le signe : « , » ;
2° L’avant-dernière occurrence du mot : « ou » est remplacée par le signe : « , » ;
3° Après le mot : « pénal », sont insérés les mots : « ou constate que l’employeur qui s’est vu notifier l’une des amendes administratives prévues aux articles L. 1263-6, L. 1264-1, L. 1264-2 ou L. 8115-1 du présent code ne s’est pas acquitté du paiement des sommes dues ».
III. – Après l’article L. 1263-4-1 du code du travail, il est inséré un article L. 1263-4-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 1263-4-2. – L’agent de contrôle de l’inspection du travail ou l’agent de contrôle assimilé mentionné au dernier alinéa de l’article L. 8112-1 qui constate, le cas échéant à réception de la déclaration mentionnée à l’article L. 1262-2-1, l’absence de paiement des sommes dues au titre de l’une des amendes prévues aux articles L. 1263-6, L. 1264-1, L. 1264-2 ou L. 8115-1 qui a été notifiée à un employeur établi à l’étranger détachant un ou plusieurs salariés dans les conditions prévues aux articles L. 1262-1 ou L. 1262-2 saisit par rapport motivé l’autorité administrative compétente. Celle-ci informe sans délai l’entreprise concernée avant le début de la prestation du manquement constaté et lui enjoint de faire cesser ce manquement en procédant au paiement des sommes dues.
« En l’absence de régularisation avant le début de la prestation, l’autorité administrative peut ordonner au regard de la gravité du manquement, par décision motivée, l’interdiction de la prestation de services pour une durée de deux mois renouvelable. La prestation ne peut débuter en l’absence de régularisation du manquement.
« L’autorité administrative autorise la prestation dès le paiement des sommes mentionnées au premier alinéa du présent article. »
IV. – À l’article L. 1263-5 du code du travail, la référence : « ou L. 1263-4-1 » est remplacée par les références : « , L. 1263-4-1 ou L. 1263-4-2 ».
V. – Au premier alinéa de l’article L. 1263-6 du code du travail, la référence : « ou à l’article L. 1263-4-1 » est remplacée par les références : « , à l’article L. 1263-4-1 ou à l’article L. 1263-4-2 ».
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L’amendement n° 27 rectifié bis est présenté par Mme Laborde, MM. Arnell, Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, M. Collin, Mme Costes, MM. Gabouty, Gold, Guérini et Guillaume, Mme Jouve et MM. Labbé, Léonhardt, Menonville, Requier et Vall.
L’amendement n° 169 rectifié est présenté par MM. Chasseing, Capus, Guerriau, Decool, A. Marc, Lagourgue et Malhuret, Mme Mélot, MM. Wattebled et Longeot, Mme Goy-Chavent, M. L. Hervé, Mme Vullien et M. Moga.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 1 et 2
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° 27 rectifié bis.
M. Jean-Claude Requier. Cet amendement vise à supprimer la nouvelle obligation à la charge des donneurs d’ordre, les maîtres d’ouvrage, qui consiste à vérifier, lors de la conclusion du contrat, que le cocontractant s’est acquitté du paiement d’éventuelles amendes prononcées par l’administration à son encontre.
Les donneurs d’ordre sont déjà soumis à une obligation de vigilance renforcée à l’égard de leurs sous-traitants et cocontractants directs, et parfois indirects : vigilance sur le travail dissimulé, sur l’emploi d’étrangers en situation irrégulière, sur le respect des règles en matière de détachement, sur l’agrément des sous-traitants…
Cette nouvelle obligation soulève des questions. Comment vérifier, en pratique, que le cocontractant a bien payé les amendes dont il était redevable ? Le projet de loi est silencieux sur les modalités de cette vérification. Une attestation sur l’honneur sera-t-elle suffisante ?
Rappelons que la déclaration subsidiaire que le donneur d’ordre est tenu d’effectuer, en l’absence de déclaration préalable de détachement effectuée par son cocontractant, n’est applicable que lorsque ce dernier est lui-même tenu d’effectuer une telle déclaration préalable.
En outre, les entreprises effectuant des prestations de courte durée, listées par l’arrêté qui devrait prochainement paraître, ne seront pas tenues d’effectuer une déclaration préalable de détachement. Rien dans la rédaction actuelle du I de l’article L. 1262-4-1 du code du travail ne permet d’écarter avec certitude l’obligation de déclaration subsidiaire dans une telle hypothèse.
M. le président. L’amendement n° 169 rectifié n’est pas soutenu.
Les deux amendements suivants sont également identiques.
L’amendement n° 148 rectifié bis est présenté par Mme Gruny, MM. Perrin, Raison et Lefèvre, Mme Micouleau, MM. Brisson et Savary, Mmes Deseyne et Garriaud-Maylam, MM. Vaspart, Pierre et Daubresse, Mme Deroche, M. Magras, Mmes Delmont-Koropoulis et A.M. Bertrand, MM. Émorine, Mandelli, Laménie, Revet, Sido, Charon et Poniatowski et Mmes Lamure et Lherbier.
L’amendement n° 237 rectifié est présenté par MM. Chasseing, Capus, Guerriau, Decool, A. Marc, Lagourgue et Malhuret, Mme Mélot, MM. Wattebled et Longeot, Mme Goy-Chavent, M. L. Hervé, Mme Vullien et M. Moga.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
vérifie lors de la conclusion du contrat que son cocontractant
par les mots :
se fait remettre par son cocontractant une attestation sur l’honneur certifiant qu’il
La parole est à Mme Chantal Deseyne, pour présenter l’amendement n° 148 rectifié bis.
Mme Chantal Deseyne. Afin de satisfaire l’objectif que le présent projet de loi cherche à atteindre, cet amendement prévoit que cette nouvelle obligation sera considérée comme satisfaite si le donneur d’ordre se fait remettre, par son cocontractant, une attestation sur l’honneur certifiant que ce dernier s’est acquitté du paiement des amendes administratives auxquelles il a été condamné.
M. le président. L’amendement n° 237 rectifié n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur les deux amendements restant en discussion ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. L’amendement n° 27 rectifié bis tend à supprimer l’extension du devoir de vigilance du maître d’ouvrage ou du donneur d’ordre par rapport au paiement des amendes administratives dues par le prestataire étranger.
Je comprends les arguments que vous avez développés, mon cher collègue, parce que le sujet n’est pas simple, mais, en même temps, on ne peut pas soustraire le donneur d’ordre à ses obligations si l’on veut réellement lutter contre la fraude au travail détaché. Comme l’amendement n° 148 rectifié bis apporte une certaine forme de simplification, je vous demanderai, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement à son profit.
Compte tenu de l’inquiétude qu’a suscitée l’article 52, tant chez nos collègues sénateurs que chez un certain nombre de fédérations, et qui me semble d’ailleurs parfaitement justifiée, la commission émettra un avis favorable sur l’amendement n° 148 rectifié bis.
Ce dernier prévoit que le maître d’ouvrage, le donneur d’ordre, s’acquittera de son devoir de vigilance si le prestataire étranger atteste sur l’honneur avoir payé ses éventuelles amendes administratives. C’est ce document qui lui permettra de se dégager de l’obligation qui lui incombe.
Bien entendu, l’idéal consisterait à modifier le logiciel SIPSI – système d’information sur les prestations de services internationales – pour que le prestataire fournisse au maître d’ouvrage ou au donneur d’ordre une attestation officielle. Cela étant, on sait tous ce que l’on peut attendre des modifications d’un logiciel en termes de simplification, mais, dès lors que l’on a un informaticien en face de soi, on sait que le fait de modifier un logiciel est toujours compliqué ! On va donc attendre encore un peu.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 27 rectifié bis.
En ce qui concerne l’amendement n° 148 rectifié bis, je pense qu’il faut trouver un équilibre entre une certaine souplesse, qui permet au donneur d’ordre de jouer son rôle, et une activité de contrôle, pour ne pas ouvrir la porte à d’éventuelles, mais évidentes, dérives.
Par ailleurs, les modalités de mise en œuvre de la procédure de suspension doivent être précisées. Il est déjà prévu qu’elles le soient dans un décret en Conseil d’État. Les autres devoirs de vigilance, mentionnés à l’article L. 1264-1 du code du travail, font déjà l’objet de mesures réglementaires.
Quoi qu’il en soit, nous allons examiner cette question sur le plan réglementaire, si bien que je vous propose de ne pas inscrire une telle disposition dans la loi. Je demanderai donc le retrait de l’amendement n° 148 rectifié bis.
En revanche, il faudra bel et bien trouver le bon équilibre entre une simple attestation sur l’honneur, obligation qui peut sembler un peu trop légère – je pense même que c’est la porte ouverte à l’absence de tout contrôle – et une mesure réellement opérationnelle pour les entreprises. Nous n’avons pas encore trouvé le juste milieu et je pense qu’avec cet amendement, nous penchons encore un peu trop d’un côté de la balance.
M. le président. Monsieur Requier, l’amendement n° 27 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jean-Claude Requier. Je suis un peu interrogatif à propos de cette attestation sur l’honneur, mais je retire tout de même mon amendement au profit de l’amendement n° 148 rectifié bis.
M. le président. L’amendement n° 27 rectifié bis est retiré.
Madame Deseyne, l’amendement n° 148 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Chantal Deseyne. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 74 rectifié bis, présenté par Mme Gruny, MM. Perrin et Raison, Mme Morhet-Richaud, M. Lefèvre, Mmes Micouleau, Lassarade et Imbert, M. Bascher, Mmes Delmont-Koropoulis et Duranton, M. Revet, Mme Estrosi Sassone, MM. Priou et Savary, Mmes Deseyne et Garriaud-Maylam, M. Dallier, Mmes Canayer et Lherbier, MM. Vaspart, Pierre, Savin et Daubresse, Mmes Deromedi et Deroche, M. Cuypers, Mme Berthet, MM. J.M. Boyer, Kennel, Émorine, Babary, Laménie et Sido et Mmes Lamure et Bories, est ainsi libellé :
Alinéa 8, seconde phrase
Après le mot :
constaté
insérer les mots :
en lui donnant la faculté de présenter ses observations, le cas échéant assisté d’une personne de son choix,
La parole est à Mme Chantal Deseyne.
Mme Chantal Deseyne. Il s’agit d’assurer le respect du principe du contradictoire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Je voudrais resituer le contexte du dispositif prévu dans la deuxième moitié de l’article 54. Je rappelle en effet que l’on se situe après le prononcé d’une sanction administrative, au terme d’une procédure respectueuse des droits de la défense et du contradictoire. Cet aspect a déjà été intégré au dispositif.
Je rappelle aussi que le nouveau dispositif d’interdiction d’activité avant le début de la prestation de l’entreprise étrangère doit également respecter le contradictoire.
Cet amendement ne nous paraît donc pas nécessaire. C’est pourquoi je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement, ma chère collègue, faute de quoi j’y serai défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Deseyne, l’amendement n° 74 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Chantal Deseyne. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 74 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 150 rectifié bis, présenté par Mme Gruny, MM. Perrin, Raison et Lefèvre, Mme Micouleau, MM. Brisson et Savary, Mmes Deseyne et Garriaud-Maylam, MM. Vaspart, Pierre et Daubresse, Mmes Lopez et Deroche, M. Magras, Mmes Delmont-Koropoulis et A.M. Bertrand, MM. Émorine, Mandelli, Savin, Revet, Sido, Charon et Poniatowski et Mmes Lamure et Lherbier, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Après le mot :
motivée
insérer les mots :
et après respect de la procédure contradictoire
La parole est à Mme Chantal Deseyne.
Mme Chantal Deseyne. Compte tenu des explications données précédemment, je retire également cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 150 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l’article 54, modifié.
(L’article 54 est adopté.)
Article 55
I. – Le dernier alinéa de l’article L. 1263-6 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée : « L’opposition à l’exécution ou l’opposition aux poursuites n’a pas pour effet de suspendre l’action en recouvrement de la créance. »
II. – Le dernier alinéa de l’article L. 1264-3 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée : « L’opposition à l’exécution ou l’opposition aux poursuites n’a pas pour effet de suspendre l’action en recouvrement de la créance. »
III. – Le deuxième alinéa de l’article L. 1264-4 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée : « L’opposition à l’exécution ou l’opposition aux poursuites n’a pas pour effet de suspendre l’action en recouvrement de la créance. »
IV. – L’article L. 8115-7 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée : « L’opposition à l’exécution ou l’opposition aux poursuites n’a pas pour effet de suspendre l’action en recouvrement de la créance. » – (Adopté.)
Article 56
L’article L. 8272-2 du code du travail est ainsi modifié :
1° Au quatrième alinéa, après le mot : « publics », sont insérés les mots : « ou dans tout lieu autre que son siège ou l’un de ses établissements » ;
2° Au dernier alinéa, les mots : « aux chantiers du bâtiment et des travaux publics » sont supprimés. – (Adopté.)
Article 57
L’article L. 8221-3 du code du travail est complété par un 3° ainsi rédigé :
« 3° Soit s’est prévalue des dispositions applicables au détachement de salariés lorsque l’employeur de ces derniers exerce dans l’État sur le territoire duquel il est établi des activités relevant uniquement de la gestion interne ou administrative, ou lorsque son activité est réalisée sur le territoire national de façon habituelle, stable et continue. » – (Adopté.)
Articles additionnels après l’article 57
M. le président. L’amendement n° 430, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 57
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre III du titre II du livre V de la cinquième partie du code du travail est complété par un article L. 5523-6 ainsi rédigé :
« Art. L. 5523-6. – L’étranger qui entre à Saint-Pierre-et-Miquelon afin d’y exercer une activité salariée pour une durée inférieure ou égale à trois mois dans un domaine figurant sur la liste fixée par le décret pris pour l’application de l’article L. 5221-2-1 n’est pas soumis à la condition de détention de l’autorisation de travail mentionnée à l’article L. 8323-2. »
La parole est à Mme la ministre.
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Cet amendement vise à rendre applicable l’article L. 5221-2-1 du code du travail à Saint-Pierre-et-Miquelon.
Cette disposition du code du travail permet à tout salarié étranger qui exerce certaines professions, notamment artistiques, d’exercer son activité en France pendant une durée limitée, sans avoir à obtenir préalablement une autorisation de travail.
Saint-Pierre-et-Miquelon est une collectivité d’outre-mer placée sous le régime de l’article 74 de la Constitution. Par conséquent, l’article L. 5221-2-1 du code du travail, qui prévoit l’obligation de détenir un titre de travail pour les étrangers, sauf en cas de séjour pour motif professionnel de moins de trois mois, ne s’applique pas.
L’objectif du Gouvernement est de faciliter les démarches administratives relatives au séjour et au travail sur l’archipel, dans les conditions existant déjà en métropole et dans les départements d’outre-mer. En clair, pour faire la même chose, adoptons un amendement de plus !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement du Gouvernement vise à mettre en conformité les règles applicables à Saint-Pierre-et-Miquelon avec les règles nationales, en prévoyant qu’un étranger qui souhaite travailler moins de trois mois dans ce territoire ultramarin sera dispensé d’autorisation de travail si son activité est mentionnée dans un décret.
Nous ne sommes évidemment pas opposés sur le fond à cet amendement, mais on peut quand même s’interroger sur son lien avec l’objet du présent projet de loi. La commission s’en remettra donc à la sagesse du Sénat.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 57.
Article 58
Après l’article L. 719-10 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un article L. 719-10-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 719-10-1. – I. – Le fait pour la personne physique ou morale accomplissant les travaux mentionnés au 3° de l’article L. 722-1 de ne pas se conformer à l’obligation de déclaration mentionnée à l’article L. 718-9 du présent code est passible d’une amende administrative prononcée par l’autorité administrative compétente sur le rapport d’un agent de contrôle de l’inspection du travail mentionné à l’article L. 8112-1 du code du travail.
« II. – Le montant maximal de l’amende est de 5 000 € par chantier forestier ou sylvicole non déclaré.
« III. – Pour fixer le montant de l’amende, l’autorité administrative prend en compte les circonstances et la gravité du manquement, le comportement de son auteur ainsi que les ressources et les charges de ce dernier.
« IV. – Avant toute décision, l’autorité administrative informe par écrit la personne mise en cause de la sanction envisagée en portant à sa connaissance le manquement retenu à son encontre et en l’invitant à présenter, dans un délai fixé par décret en Conseil d’État, ses observations.
« À l’issue de ce délai, l’autorité administrative peut, par décision motivée, prononcer l’amende et émettre le titre de perception correspondant. Elle en informe le maire des communes concernées. »
« Le délai de prescription de l’action de l’autorité administrative pour la sanction du manquement par une amende administrative est de deux années révolues à compter du jour où le manquement a été commis.
« V. – L’amende est recouvrée comme les créances de l’État étrangères à l’impôt et au domaine.
« Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État. » – (Adopté.)
Article 59
Le chapitre IV du titre II du livre II de la huitième partie de code du travail est ainsi modifié :
1° Le 4° de l’article L. 8224-3 est ainsi rédigé :
« 4° L’affichage ou la diffusion de la décision prononcée, dans les conditions prévues à l’article 131-35 du code pénal.
« Le prononcé de la peine complémentaire d’affichage ou de diffusion de la décision est obligatoire à l’encontre de toute personne coupable d’un délit mentionné à l’article L. 8224-2 du présent code. L’affichage ou la diffusion est alors opéré pour une durée maximale d’un an par les services du ministre chargé du travail sur un site internet dédié, dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. Toutefois, la juridiction peut, par une décision spécialement motivée, décider de ne pas prononcer la peine mentionnée au présent alinéa, en considération des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur ; »
2° L’article L. 8224-5 est ainsi modifié :
a) Au 2°, la référence : « , 9° » est supprimée ;
b) Le dernier alinéa est remplacé par un 3° ainsi rédigé :
« 3° L’affichage ou la diffusion de la décision prononcée, dans les conditions prévues à l’article 131-39 du code pénal.
« Le prononcé de la peine complémentaire d’affichage ou de diffusion de la décision est obligatoire à l’encontre de toute personne coupable d’un délit mentionné à l’article L. 8224-2 du présent code. L’affichage ou la diffusion est alors opéré pour une durée maximale d’un an par les services du ministre chargé du travail sur un site internet dédié, dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. Toutefois, la juridiction peut, par une décision spécialement motivée, décider de ne pas prononcer la peine mentionnée au présent alinéa, en considération des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur. » – (Adopté.)
Article 60
Après l’article L. 8113-5 du code du travail, sont insérés des articles L. 8113-5-1 et L. 8113-5-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 8113-5-1. – Pour la recherche et la constatation des infractions constitutives de travail illégal mentionnées à l’article L. 8211-1, les agents de contrôle définis par voie réglementaire peuvent obtenir, au cours de leurs visites, communication de tout document comptable ou professionnel ou tout autre élément d’information propre à faciliter l’accomplissement de leur mission. Ils peuvent également en prendre copie immédiate, par tout moyen et sur tout support.
« Pour la communication des données informatisées, ils ont accès aux logiciels et aux données stockées ainsi qu’à la restitution en clair des informations propres à faciliter l’accomplissement de leur mission. Ils peuvent en demander la transcription par tout traitement approprié en des documents directement utilisables pour les besoins du contrôle.
« Art. L. 8113-5-2. – Pour la recherche et la constatation des infractions constitutives de travail illégal mentionnées à l’article L. 8211-1, les agents de contrôle définis par voie réglementaire disposent d’un droit de communication leur permettant d’obtenir, sans que s’y oppose le secret professionnel, communication de tout document, renseignement ou élément d’information utile à l’accomplissement de leur mission.
« Sans préjudice des autres dispositions législatives applicables en matière d’échanges d’informations, le droit de communication défini au présent article est exercé dans les conditions prévues et auprès des personnes mentionnées à la section I du chapitre II du titre II de la première partie du livre des procédures fiscales, à l’exception des personnes mentionnées aux articles L. 82 C, L. 83 A à L. 83 E, L. 84 à L. 84 E, L. 91, L. 95 et L. 96 B à L. 96 F du même livre.
« Pour les données conservées et traitées par les opérateurs de communications électroniques dans le cadre de l’article L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques et par les prestataires mentionnés aux 1 et 2 du I de l’article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, le droit de communication institué par le présent article ne s’applique qu’aux seules données permettant l’identification des personnes proposant un travail, une prestation ou une activité pouvant relever des infractions constitutives de travail illégal mentionnées à l’article L. 8211-1 du présent code.
« Le droit de communication prévu au premier alinéa du présent article s’exerce quel que soit le support utilisé pour la conservation des documents et peut s’accompagner de la prise d’extraits et de copies. Les documents et informations sont communiqués à titre gratuit dans les trente jours qui suivent la réception de la demande écrite.
« Il peut porter sur des informations relatives à des personnes non identifiées, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. »
M. le président. L’amendement n° 151 rectifié bis, présenté par Mme Gruny, MM. Perrin, Raison et Lefèvre, Mme Micouleau, MM. Brisson et Savary, Mmes Deseyne et Garriaud-Maylam, MM. Vaspart, Pierre et Daubresse, Mmes Lopez et Deroche, M. Magras, Mmes Delmont-Koropoulis et A.M. Bertrand, MM. Émorine, Mandelli, Laménie, Revet, Sido, Charon et Poniatowski et Mme Lamure, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 3
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« La liste des documents consultés au cours du contrôle fait l’objet d’une restitution écrite auprès des personnes concernées.
« Dès lors que des documents ont été emportés, leur restitution doit intervenir avant la clôture des opérations de contrôle.
La parole est à Mme Chantal Deseyne.
Mme Chantal Deseyne. Cet amendement vise à prévoir les modalités de restitution des documents emportés, en cas d’emport de documents lors d’un contrôle en matière de travail détaché.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Je suis un peu embarrassée, ma chère collègue, car nous avons déjà examiné un amendement similaire en commission. À cette occasion, nous avions précisé qu’il était nécessaire de corriger le premier alinéa qu’il tendait à insérer pour valider le second alinéa, qui a trait à l’obligation pour l’inspection du travail de rendre les documents emportés avant la clôture des opérations de contrôle.
Malheureusement, la commission est contrainte d’émettre un avis défavorable sur l’amendement, car vous ne l’avez pas rectifié, et ce bien que le motif soit davantage un motif de forme que de fond !
En tous les cas, je vous invite à trouver un autre véhicule législatif pour le redéposer, une fois corrigé, afin qu’il puisse être voté prochainement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Chantal Deseyne. Je retire mon amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 151 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l’article 60.
(L’article 60 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 60
M. le président. L’amendement n° 501, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 60
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l’article L. 1243-8 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsque le contrat de travail est à temps partiel, l’indemnité est égale à 20 % de la rémunération totale brute versée au salarié. »
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Cet amendement a pour objet d’augmenter le montant de la prime de précarité, lorsqu’un contrat à durée déterminée à temps partiel n’est pas suivi par un contrat à durée indéterminée.
De fait, nous nous retrouverions avec un dispositif à deux niveaux : tout d’abord, une prime de précarité équivalente à 10 % de la rémunération totale brute perçue par le salarié, lorsque ce dernier était à temps complet ; ensuite, une prime de précarité dont le montant doublerait dans le cas où le CDD était à temps partiel.
Il s’agit d’un véritable enjeu, tant les contrats à durée déterminée sont devenus des contrats de référence au détriment des contrats à durée indéterminée. Ainsi, 87 % des embauches effectuées aujourd’hui le sont en CDD, dont un tiers sont considérées comme très courtes, puisqu’elles ne durent parfois qu’une journée.
Pour les autres CDD, plusieurs phénomènes expliquent ce constat : un manque de prévisibilité en matière de santé des entreprises, mais surtout un détournement de la vocation du CDD, dont on fait un outil comptable, soit l’équivalent d’une période d’essai ou d’une période de test.
L’enjeu de cet amendement, comme du suivant, est de développer des outils permettant de lutter efficacement contre la recrudescence des contrats précaires, circonscrits dans un temps limité ou à temps partiel.
Il convient de favoriser les recrutements en CDD à temps complet et non à temps partiel, étant entendu que cela coûtera moins cher aux entreprises en fin de contrat, ce qui n’est pas inintéressant.
Au premier rang des bénéficiaires de ce dispositif se trouveront les femmes : en effet, ces dernières représentent presque 80 % des contrats à temps partiel, plus d’un tiers d’entre elles déclarant vouloir travailler plus.
Outre la précarité à l’instant t que cela implique, il faut garder en tête que ces pratiques grèvent profondément les conditions de vie des femmes, tout au long de leur carrière et de leur vie, remettant notamment en cause leur droit au chômage et à la retraite.
En définitive, un tiers des travailleuses sont à temps partiel, contre seulement 7 % des travailleurs. Cette situation que l’on devrait unanimement trouver scandaleuse ici doit aujourd’hui prendre fin. Tous les outils mobilisables doivent l’être.
Si, comme il l’a déclaré en mars dernier, le Président de la République entend véritablement résorber en trois ans l’écart salarial de 9 % entre les hommes et les femmes, ce dispositif devrait recueillir un avis favorable du Gouvernement. Concrètement, vous l’avez dit tout à l’heure, l’égalité salariale passera par une égalité de reconnaissance, et non par l’égalité d’accès à l’emploi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Mon cher collègue, je suis désolée, mais la commission émettra un avis défavorable sur cet amendement, ainsi que sur les trois amendements qui suivent.
Tous ces amendements sont sans doute intéressants, mais ce véhicule législatif, qui était une voiture, va bientôt devenir un bus, tellement on charge la barque !
M. Pascal Savoldelli. Un bus Macron, alors ! (Sourires.)
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Effectivement, on rattache à ce projet de loi un certain nombre d’amendements dont l’objet s’éloigne un peu du texte initial.
Dans le cas présent, il est question du travail à temps partiel, qui a déjà donné lieu à discussion au Sénat. On pourrait effectivement rouvrir cette discussion, mais, comme je l’ai déjà dit tout à l’heure, il faut être respectueux du travail du législateur : celui-ci intègre un avis du Conseil d’État, des auditions et des discussions. Si nous insérons des articles additionnels sans en passer par là, on n’a plus de vision globale sur le problème posé.
Pour toutes ces raisons, la commission est défavorable à l’amendement n° 501.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 499, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 60
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 3123-7 du code du travail est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque la durée de travail est inférieure à vingt-quatre heures par semaine et supérieure à quinze heures par semaine, ces heures de travail sont rémunérées à un taux majoré de 25 %.
« Lorsque la durée de travail est inférieure ou égale à quinze heures par semaine, ou lorsque la durée quotidienne de travail est inférieure à deux heures, ces heures de travail sont rémunérées à un taux majoré de 50 %. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement, comme le précédent, s’inscrit dans l’objectif de lutte contre le recours de plus en plus fréquent aux CDD.
Comme l’a dit mon collègue, 87 % des contrats signés aujourd’hui le sont à durée déterminée. Ce que je veux ajouter, c’est que ce taux a progressé de plus de dix points en moins de vingt ans ! Comme l’a montré la directrice de recherche au CNRS Margaret Maruani, ces contrats sont par ailleurs de plus en plus courts en termes de charge de travail hebdomadaire.
Une seule constante demeure toutefois : ce sont avant tout les femmes qui en sont les victimes, la plupart du temps par obligation. Il s’agit d’une obligation sociétale, d’une part, étant donné la persistance des stéréotypes de genre et de l’inégalité de répartition des responsabilités familiales, mais aussi d’une obligation professionnelle. En effet, comme le rappelait la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques du ministère du travail, la DARES, en 2015, les femmes ont plus de difficultés à trouver un temps complet que les hommes.
Ces deux freins à l’emploi à temps complet des femmes expliquent aujourd’hui près de 60 % des contrats à temps partiel.
De fait, et c’est dans cet esprit que s’inscrit notre amendement, il est urgent de réunir tous les outils existants pour lutter contre le recours abusif au temps partiel, notamment les contrats de très courte durée.
Je vous rappelle que le projet de loi relatif à l’accord national interprofessionnel sur la sécurisation de l’emploi, l’ANI, sans revenir sur les critiques que nous avions formulées à l’époque, prévoyait d’instaurer un plancher en matière de contrats à temps partiel, qui était fixé à vingt-quatre heures par semaine. Cette mesure, notre groupe l’a pleinement soutenue, tout en regrettant la multiplication des dérogations.
Si certaines de ces dérogations sont tout à fait justifiées – je pense notamment aux étudiants salariés qui sont dans une situation de double emploi –, l’ANI a fini par rendre ce plancher très optionnel. N’étaient pas concernés par ce plancher de vingt-quatre heures, outre les étudiants, les aides à domicile, les aides ménagères, les salariés volontaires et les salariés couverts par un accord de branche prévoyant des contreparties.
Soixante branches ont négocié pour contourner cette loi. En moyenne, la durée du travail à temps partiel dans ces branches est aujourd’hui de dix-sept heures. En outre, la loi Travail de 2016 a aggravé la situation en remettant encore en cause la hiérarchie des normes.
Comme souvent, il est à craindre que ce ne soit qu’en « tapant dans la caisse », si vous me permettez cette expression familière, que nous pourrons sanctuariser ce plancher de vingt-quatre heures hebdomadaires.
C’est pourquoi notre amendement prévoit une majoration salariale sur les contrats à faible volume horaire, étant entendu qu’il s’agit d’un outil dissuasif pour les entreprises, mais aussi d’une solution pour aider les salariés ayant peu de ressources à obtenir un supplément de rémunération.
C’est vrai, vous l’avez dit, nous utilisons tous les supports législatifs pour parler de ce problème du temps partiel et pour faire en sorte de le faire reculer !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Pour les mêmes raisons que précédemment, la commission est défavorable à l’amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 500, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 60
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code du travail est ainsi modifié :
1° La fin de la seconde phrase de l’article L. 3123-21, le taux « 10 % » est remplacé par le taux » 25 % » ;
2° L’article L. 3123-22 est ainsi modifié :
a) Le 2° est ainsi rédigé :
« 2° Détermine la majoration salariale des heures effectuées dans le cadre de cet avenant qui ne peut être inférieure à 25 % ; »
b) À la fin du dernier alinéa, le taux : « 25 % » est remplacé par le taux :« 50 % » ;
3° Après le mot : « est », la fin de l’article L. 3123-29 est ainsi rédigée : « d’au moins 25 % pour chacune des heures accomplies. »
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Puisque la commission et le Gouvernement ont déjà exprimé leur avis sur nos quatre amendements, nous avons déjà la réponse à la question que je souhaite poser : madame la rapporteur, madame la ministre, vous êtes contre la restauration des taux de majoration des heures supplémentaires à 25 % et 50 %.
Personnellement, je considère qu’il s’agissait d’une mesure extrêmement positive, parce que, tout le monde le sait, les salariés ne peuvent pas refuser les heures supplémentaires qu’on leur propose. On peut certes contester le recours abusif aux heures supplémentaires, mais, dans les faits, aucun salarié ne peut les refuser. En revanche, il existe – heureusement ! –des dispositifs qui permettent de contrer les abus.
Au cours de nos débats sur ce texte, j’ai entendu dire à plusieurs reprises que la question de la nécessaire augmentation du temps de travail allait revenir plus fréquemment dans notre hémicycle, que ce soit sous la forme de textes de loi ou sous une forme plus idéologique. Certains d’entre nous en ont parlé… C’est un point de vue !
Reste que l’on ne peut pas déclarer, d’un côté, que l’on veut s’attaquer au chômage et le faire reculer et, de l’autre, militer pour une augmentation de la durée du travail de deux heures sans pour autant être en situation de majorer la rémunération des heures supplémentaires. Ce débat va probablement traverser la société française et le monde de l’entreprise prochainement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 498, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 60
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le VII de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« VII … – Dans toute entreprise d’au moins vingt salariés, lorsque l’effectif compte en moyenne, sur une année civile, plus de 20 % de salariés à temps partiel, le montant de la réduction est diminué de 20 % au titre des rémunérations versées cette même année. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement vise à dissuader les employeurs d’abuser des contrats à temps partiel, en introduisant une nouvelle disposition dans le code de la sécurité sociale. Nous proposons de réduire les allégements de charges sociales sur les bas salaires auxquels ces entreprises peuvent prétendre.
Cette disposition, combinée à notre proposition d’instaurer un plafond pour les embauches en CDD, vise à limiter le recours aux contrats courts par les entreprises et, ainsi, à lutter contre la précarité des salariés et, plus particulièrement, celle des femmes.
Une étude de la DARES de 2013 a montré que plus de 80 % des salariés à temps partiel sont des femmes. Le travail à temps partiel signifie des salaires, des promotions, des droits sociaux moindres, alors même que l’amplitude horaire et la flexibilité sont bien souvent plus importantes.
Or un salarié sur trois déclare ne travailler à temps partiel que faute d’avoir trouvé un emploi à temps plein. C’est ce que l’on appelle le temps partiel subi qui, je le répète, concerne majoritairement des femmes.
Dans une optique de recherche de l’égalité entre les femmes et les hommes, mais également de lutte contre la précarité, de manière plus générale, il est nécessaire de limiter ce recours au temps partiel. Dans ce but, nous proposons l’instauration, dans les entreprises d’au moins vingt salariés, d’un plafond d’embauches à temps partiel, fixé à 20 % de l’effectif total de l’entreprise, ainsi que d’une sanction pour les entreprises qui dépasseraient ce plafond.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 498.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Chapitre IV
Égalité de rémunération entre les femmes et les hommes et lutte contre les violences sexuelles et les agissements sexistes au travail
Article 61
I. – Après le chapitre Ier du titre II du livre II de la troisième partie du code du travail, il est inséré un chapitre Ier bis ainsi rédigé :
« CHAPITRE IER BIS
« Mesure des écarts et actions de suppression
« Art. L. 3221-11. – Les dispositions du présent chapitre sont applicables, outre aux employeurs et salariés mentionnés à l’article L. 3211-1, au personnel des établissements publics à caractère industriel et commercial et au personnel de droit privé des établissements publics administratifs.
« Art. L. 3221-12. – Dans les entreprises d’au moins cinquante salariés, l’employeur publie chaque année une mesure des écarts de rémunération, au sens de l’article L. 3221-3, entre les femmes et les hommes et de leur évolution, selon des modalités et une méthodologie définies par décret.
« Art. L. 3221-13. – Dans les entreprises d’au moins cinquante salariés, lorsque l’entreprise ne respecte pas le principe fixé à l’article L. 3221-2 au regard d’indicateurs définis par décret, à défaut d’avoir été déjà déployés dans le cadre de la négociation collective, permettant de mesurer des écarts de rémunération au sens de l’article L. 3221-3, la négociation sur l’égalité professionnelle prévue au 2° de l’article L. 2242-1 porte également sur la programmation, annuelle ou pluriannuelle, de mesures financières de rattrapage salarial. En l’absence d’accord prévoyant de telles mesures, celles-ci sont déterminées par décision unilatérale de l’employeur, après consultation du comité social et économique.
« Art. L. 3221-14. – Dans les entreprises d’au moins cinquante salariés, lorsque le principe fixé à l’article L. 3221-2 n’est pas respecté au regard d’indicateurs définis par décret, l’entreprise dispose d’un délai de trois ans pour se mettre en conformité. À l’expiration de ce délai, si ces indicateurs démontrent un écart de rémunération entre les femmes et les hommes supérieur à un taux minimal déterminé par arrêté du ministre chargé du travail, l’employeur peut se voir appliquer une pénalité financière.
« Le montant de la pénalité prévue au premier alinéa du présent article est fixé au maximum à 1 % des rémunérations et gains au sens du premier alinéa de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale et du premier alinéa de l’article L. 741-10 du code rural et de la pêche maritime versés aux travailleurs salariés ou assimilés au cours de l’année civile précédant l’expiration du délai mentionné au premier alinéa du présent article. Le montant est fixé par l’autorité administrative, dans des conditions prévues par décret. En fonction des efforts constatés dans l’entreprise en matière d’égalité salariale entre les femmes et les hommes ainsi que des motifs de sa défaillance, un délai supplémentaire d’un an peut lui être accordé pour se mettre en conformité.
« Le produit de cette pénalité est affecté au fonds mentionné à l’article L. 135-1 du code de la sécurité sociale. »
II. – Le 3° du II de l’article L. 2232-9 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il comprend également un bilan de l’action de la branche en faveur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, notamment en matière de classifications, de promotion de la mixité des emplois et d’établissement des certificats de qualification professionnelle, des données chiffrées sur la répartition et la nature des postes entre les femmes et les hommes ainsi qu’un bilan des outils mis à disposition des entreprises pour prévenir et agir contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes. »
II bis. – L’article L. 2242-8 du code du travail est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La pénalité prévue au premier alinéa du présent article peut également être appliquée, dans des conditions déterminées par décret, en l’absence de publication des informations prévues à l’article L. 3221-12 ou en l’absence de mesures financières de rattrapage salarial définies dans les conditions prévues à l’article L. 3221-13. » ;
2° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, les mots : « n’est pas couverte par l’accord ou le plan d’action mentionné au premier alinéa » sont remplacés par les mots : « ne respecte pas l’une des obligations mentionnées aux premier et deuxième alinéas » ;
b) À la seconde phrase, après le mot : « professionnelle », sont insérés les mots : « et salariale » et les mots : « au même premier alinéa » sont remplacés par les mots : « aux mêmes premier et deuxième alinéas ».
II ter. – Au 2° de l’article L. 23-113-1 du code du travail, après le mot : « professionnelle, », sont insérés les mots : « de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes, ».
III. – Le chapitre V du titre II du livre II du code de commerce est ainsi modifié :
1° Les articles L. 225-37-1, L. 225-82-1 et L. 226-9-1 sont ainsi modifiés :
a) La première phrase est complétée par les mots : « sur la base des indicateurs relatifs à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes mentionnés au premier alinéa de l’article L. 2312-18 du code du travail et à l’article L. 3221-12 du même code, lorsque ceux-ci s’appliquent, ainsi que sur la base du plan pour l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes mentionné à l’article L. 1143-1 dudit code lorsqu’il est mis en œuvre » ;
b) La seconde phrase est supprimée ;
2° Après la première phrase du 6° de l’article L. 225-37-4, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Cette description est complétée par des informations sur la manière dont la société recherche une représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein du comité mis en place, le cas échéant, par la direction générale en vue de l’assister régulièrement dans l’exercice de ses missions générales et sur les résultats en matière de mixité dans les 10 % de postes à plus forte responsabilité. »
IV. – Le I entre en vigueur à une date fixée par décret. Cette date est au plus tard le 1er janvier 2019 pour les entreprises de plus de deux cent cinquante salariés et au plus tard le 1er janvier 2020 pour les entreprises de cinquante à deux cent cinquante salariés.
V. – Le II entre en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard le 1er janvier 2019.
VI. – Après le 2° du II de l’article L. 2312-26 du code du travail, il est inséré un 2° bis ainsi rédigé :
« 2° bis Les informations sur la méthodologie et le contenu de l’indicateur prévu à l’article L. 3221-12 ; ».
VII. – Le Gouvernement remet au Parlement le 1er janvier 2022 un rapport évaluant l’effectivité de la garantie apportée au respect de l’égalité salariale, sur le fondement de l’indicateur prévu à l’article L. 3221-13 du code du travail.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.
Mme Laurence Cohen. Il est dommage que la discussion sur cet article portant sur l’égalité professionnelle arrive si tardivement, ce qui, je l’espère, n’aura aucune conséquence sur l’approfondissement et la qualité de nos débats.
La France occupe la triste cent vingt-neuvième place sur cent quarante-quatre en matière d’égalité salariale, selon les dernières données du Forum économique mondial.
Au total, un écart de 10,5 % de rémunération subsiste entre une femme et un homme à contrat, diplôme, expérience et responsabilité identiques. Ce sont les fameux 10,5 % inexpliqués.
Avant de passer aux critiques sur les limites de cet article, je tiens tout de même à saluer votre volonté, madame la ministre, de passer enfin d’une obligation de moyens à une obligation de résultat, en engageant des concertations tripartites.
Je salue également l’évolution du dispositif de l’article par rapport à sa rédaction initiale, qui était plus que timorée, et ce grâce aux amendements déposés par le Gouvernement lui-même lors du débat à l’Assemblée nationale. Vous avez notamment tenu à préciser que la mesure des écarts serait annuelle et prévu une pénalité financière. Ces dispositions ne figuraient pas dans le texte initial.
Cela étant, le groupe communiste républicain citoyen et écologiste regrette que ces pénalités n’aient pas un caractère obligatoire et automatique, ainsi que le laisse entendre la formule « l’employeur peut se voir appliquer une pénalité financière ».
Par ailleurs, je salue l’évolution sémantique opérée à la suite des débats à l’Assemblée nationale. En effet, alors que cet article s’intitulait initialement « Mesure des écarts éventuels et actions de correction », il porte maintenant le titre suivant : « Mesure des écarts et actions de suppression ».
J’en viens à présent à ma critique la plus importante, le flou de cet article.
Madame la ministre, nous savons bien que vous avez confié à Mme Sylvie Leyre, DRH France de Schneider Electric, la mission de définir les modalités concrètes et précises pour mesurer ces écarts de rémunérations. Nous souhaitons que vous puissiez nous en dire davantage, car l’amendement gouvernemental que nous examinerons dans quelques instants nous semble peu clair. La mission devant être proche de son terme, avant une phase de test au mois de septembre prochain, ces précisions me semblent utiles.
Comme vous le savez, l’ensemble des organisations syndicales qui ont élaboré une plateforme commune de revendications sur ces questions souhaitent que cet outil soit national, et non à la carte, par entreprise. Il doit garantir la transparence et l’égalité de traitement, avec des critères objectifs et identiques pour toutes les entreprises ; c’est primordial.
M. le président. La parole est à M. Antoine Karam, sur l’article.
M. Antoine Karam. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, j’interviens pour le compte de ma collègue Patricia Schillinger.
L’article 61 s’inscrit dans le chapitre IV de ce projet de loi et porte plus spécifiquement sur les inégalités de rémunération entre les femmes et les hommes.
« À travail égal, salaire égal » : nous entendons souvent cette revendication pour plus d’égalité entre femmes et hommes au travail. Malheureusement, nous en sommes encore loin !
En France les écarts de salaires représentent, toutes professions confondues, une différence moyenne de 24 % – en défaveur des femmes, est-il besoin de le préciser ?
Partant de ce constat d’injustice sociale, les inégalités salariales sont abordées dans cet article non pas comme une fatalité, mais comme un défi prioritaire auquel il faut s’attaquer via deux leviers.
Cet article pose tout d’abord, pour les entreprises de plus de cinquante salariés, un principe général d’obligation de mesurer, à l’aide d’indicateurs chiffrés, le respect du principe selon lequel l’employeur doit assurer, pour un travail de valeur égale, la rémunération égale entre les femmes et les hommes. En cas de non-respect des indicateurs fixés par décret, les entreprises disposent d’un délai de trois ans pour se mettre en conformité, sans quoi elles pourront se voir appliquer une pénalité financière.
Cet article renforce ensuite les obligations des branches en matière de réflexion et d’information sur l’égalité professionnelle, en leur imposant de rendre compte de leur action en matière d’égalité professionnelle dans leur bilan annuel.
Tel est l’esprit de cet article : poser de manière pragmatique les bases d’une meilleure égalité salariale entre femmes et hommes et responsabiliser davantage les acteurs économiques en les amenant à prendre conscience de l’ampleur des enjeux et en les inscrivant dans un cadre contraignant.
En d’autres termes, le but est de passer, après tant d’années, d’une obligation de moyens à une obligation de résultat.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, sur l’article.
Mme Laurence Rossignol. Madame la ministre, je me réjouis que, dans le cadre de ce projet de loi, vous ayez introduit un volet relatif à l’égalité professionnelle et à la lutte contre les violences sexuelles et sexistes au travail. Je connais votre engagement sur ce sujet, que je pense à la fois sincère et déterminé.
Cependant, je mesure qu’il est difficile d’introduire la régulation qu’exige l’égalité de rémunération entre les femmes et les hommes, alors que le gouvernement auquel vous appartenez défend la dérégulation au sein de l’entreprise, au nom de la flexibilité.
Lundi dernier, au Congrès de Versailles, le Président de la République a déclaré : « Le combat pour l’égalité femmes-hommes a pu sembler dérisoire dans le passé. » Je me suis demandé à quand remontait le passé pour le Président de la République. De la plupart de ses déclarations, il ressort que, le passé, c’était il y a un an ! Communément, lorsque l’on parle du passé, on parle du siècle précédent, avant la guerre – la Deuxième Guerre mondiale… (Sourires sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
Je tiens tout de même à rappeler que le combat pour l’égalité entre les femmes et les hommes, en particulier en matière de droit du travail, n’a pas commencé voilà un an et je veux rendre hommage à celles et ceux qui l’ont mené. Pensons à la loi Roudy de 1983, à la loi Génisson de 2001 et à la loi Copé-Zimmermann de 2011.
L’égalité salariale est un enjeu majeur, à la fois un enjeu de redistribution des richesses – dans un monde dans lequel la ventilation des richesses entre le capital et le travail s’est profondément dégradée, la juste et égale rémunération du travail des femmes est également un levier de redistribution des richesses et de justice sociale – et un enjeu de croissance. Je me souviens qu’un rapport de France Stratégie rendu l’année dernière a évalué que la perte que subissait la France du fait des inégalités salariales – je ne redonne pas les chiffres, plusieurs collègues l’ont fait précédemment – était égale à 7 points de PIB et 150 milliards d’euros.
Nous aurions donc intérêt à nous engager collectivement vers l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
Madame la ministre, vous avez choisi de mettre en place un dispositif d’autoévaluation et d’évaluation et de sanction par l’inspection du travail. Au moment où vous avez annoncé ces mesures, j’ai appris que l’inspection du travail serait fortement mobilisée – j’ai même entendu l’une de vos collègues affirmer que cela constituerait désormais l’une des tâches principales de l’inspection du travail. Je rappelle que l’inspection du travail a d’autres missions, qui demeurent tout aussi importantes. Cette année, huit postes seraient ouverts à l’inspection du travail. Sans détenir les chiffres exacts, j’imagine qu’au moins huit inspecteurs du travail en fonction partent à la retraite chaque année !
M. Jean-Raymond Hugonet. Au moins !
Mme Laurence Rossignol. J’espère que les effectifs de l’inspection du travail permettront de mener à bien la procédure que vous mettez en place, madame la ministre.
M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue !
Mme Laurence Rossignol. Nous verrons au cours de l’examen de cet article et des suivants que celle-ci peut encore, à mon sens, être améliorée.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 599, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Remplacer les références :
Ier du titre II du livre II de la troisième
par les références :
II du titre IV du livre Ier de la première
et la référence :
Ier bis
par la référence :
II bis
II. – Alinéa 2
Remplacer la référence :
Ier bis
par la référence :
II bis
III. – Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Mesures visant à supprimer les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes dans l’entreprise
IV. – Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 1142-7. – L’employeur prend en compte un objectif de suppression des écarts de rémunération entre les femmes et les hommes.
V. – Alinéa 5
1° Remplacer la référence :
L. 3221-12
par la référence :
L. 1142-8
2° Remplacer les mots :
une mesure des écarts de rémunération, au sens de l’article L. 3221-3,
par les mots :
des indicateurs relatifs aux écarts de rémunération
et les mots :
et de leur évolution
par les mots :
et aux actions mises en œuvre pour les supprimer
VI. – Alinéa 6
1° Remplacer la référence :
L. 3221-13
par la référence :
L. 1142-9
2° Première phrase
Remplacer les mots :
l’entreprise ne respecte pas le principe fixé à l’article L. 3221-2
par les mots :
les résultats obtenus par l’entreprise
et les mots :
d’indicateurs définis par décret, à défaut d’avoir été déjà déployés dans le cadre de la négociation collective, permettant de mesurer des écarts de rémunération au sens de l’article L. 3221-3
par les mots :
des indicateurs mentionnés à l’article L. 1142-8 se situent en deçà d’un niveau défini par décret
b) Après les mots :
porte également
insérer les mots :
sur les mesures adéquates et pertinentes de correction et, le cas échéant,
4° Seconde phrase
Supprimer le mot :
unilatérale
5° Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :
La décision est déposée auprès de l’autorité administrative dans les mêmes conditions que le plan d’action mentionné à l’article L. 2242-3. L’autorité administrative peut présenter des observations sur les mesures prévues par l’accord ou la décision de l’employeur.
VII. – Alinéa 7
1° Remplacer la référence :
L. 3221-14
par la référence :
L. 1142-10
2° Première phrase
Remplacer les mots :
le principe fixé à l’article L. 3221-2 n’est pas respecté au regard d’indicateurs définis
par les mots :
les résultats obtenus par l’entreprise, au regard des indicateurs mentionnés à l’article L. 1142-8, se situent en deçà d’un niveau défini
3° Seconde phrase
Remplacer les mots :
ces indicateurs démontrent un écart de rémunération entre les femmes et les hommes supérieur à un taux minimal déterminé par arrêté du ministre chargé du travail
par les mots :
les résultats obtenus sont toujours en deçà du niveau défini par décret
4° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Dès lors qu’une pénalité lui est appliquée sur le fondement du présent alinéa, l’employeur ne peut se voir appliquer la pénalité financière prévue à l’article L. 2242-8.
VIII. – Alinéa 13
Remplacer la référence :
L. 3221-12
par la référence :
L. 1142-8
et la référence :
L. 3221-13
par la référence :
L. 1142-9
IX. – Alinéa 20
Remplacer la référence :
L. 3221-12
par la référence :
L. 1142-8
X. – Alinéas 25 et 26
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
VI. - La seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 2312-18 du code du travail est complétée par les mots : « et les informations sur la méthodologie et le contenu des indicateurs prévus à l’article L. 1142-8 ».
XI. – Alinéa 27
1° Remplacer les mots :
de l’indicateur prévu
par les mots :
des indicateurs prévus
2° Remplacer la référence :
L. 3221-13
par la référence :
L. 1142-8
La parole est à Mme la ministre.
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Même s’il est tard, je me réjouis que ce débat ait lieu.
Cela fait quarante-cinq ans que, en France, la loi impose l’égalité salariale entre hommes et femmes, suivant le principe « à travail égal, salaire égal ». C’est certainement l’une des très rares lois de la République qui, massivement, n’est pas appliquée.
Mme Laurence Cohen. C’est vrai !
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Certes, il y a toujours des contrevenants à la loi, mais nous battons sans doute là des records et il faut bien reconnaître que nous avons assez peu progressé dans ce domaine.
S’attaquer à ce sujet s’apparente donc à un défi énorme. Nous pourrions baisser les bras et nous demander si une loi supplémentaire changerait quoi que ce soit. Or, nous sommes, je crois, à un moment où nous pouvons collectivement changer les choses.
À cet égard, si nous menons de nombreuses concertations avec les partenaires sociaux sur différentes problématiques, la concertation sur ce sujet a été particulièrement intense, constructive et forte : de nombreuses idées ont été avancées, qui, à mon avis, peuvent nous permettre de réussir de façon concrète.
L’époque s’y prête aussi : la prise de conscience est de plus en plus forte, puisqu’il s’agit à la fois d’un enjeu d’équité sociale et d’un enjeu de performance économique. Les mentalités évoluent. Je ne vois pas qui, aujourd’hui, peut dire à ses enfants – fille ou garçon – qu’il est normal qu’existe un écart de 9 % de rémunération pour le même travail.
Il faut saisir ce moment pour franchir cette étape essentielle. C’est pourquoi, à la suite des concertations, le Gouvernement s’est décidé pour une obligation de résultat et non une obligation de moyens.
Que dit la loi actuelle ? S’il n’y a pas d’égalité, l’entreprise doit avoir un plan d’action ou un accord. Or ce plan d’action n’a aucun effet.
Nous prévoyons une obligation de résultat et accordons aux entreprises trois ans pour y arriver. Pourquoi ? Si l’écart est trop grand, les entreprises qui tentent de mettre en place l’égalité salariale n’y arrivent souvent pas en un an. Par conséquent, elles renoncent, reportent à l’année suivante, puis à celle d’après, et cela ne progresse jamais. Je parle d’expérience : en planifiant cette démarche sur deux ou trois ans, on y arrive.
Une obligation de résultat sur le principe « à travail égal, salaire égal » suppose un instrument de mesure objectivable – puisque ce principe va devenir opposable –, fondé sur des critères communs. Cela suppose aussi d’imposer l’obligation de dédier une enveloppe au rattrapage salarial et un contrôle avec sanctions si ce dispositif n’est pas respecté au bout de trois ans.
Au cours de la concertation, nous avons longuement discuté des critères de cet instrument de mesure. Celui-ci sera transparent, puisqu’un indicateur synthétique sera diffusé par chaque entreprise et devra être rendu public.
Dans un premier temps, nous nous étions principalement concentrés sur la notion « à travail égal, salaire égal ». C’est pourquoi, dans les premiers travaux, ce sont surtout des critères de ce type qui ont été introduits et c’est ce que prévoyait le projet de loi.
J’ai confié une mission à Mme Sylvie Leyre, DRH France de Schneider Electric, qui travaille avec les partenaires sociaux sur ce sujet. Nous sommes parvenus à un certain consensus sur le fait qu’il ne fallait pas se limiter aux indicateurs « à travail égal, salaire égal », car l’entreprise peut atteindre cet objectif et ne prévoir aucune mobilité professionnelle pour les femmes – on n’aurait alors pas résolu le problème – : il convient aussi d’avoir une palette d’indicateurs permettant de mesurer plus largement l’intégralité de la politique de rémunération et de la progression de carrière.
Tel est l’objet de cet amendement, qui vise à réécrire à la marge les articles sur l’égalité salariale, afin de tenir compte de ces évolutions. Aujourd’hui, ces indicateurs sont en phase de test dans des entreprises jusqu’à la fin du mois de septembre prochain : avant de se lancer, il faut être sûr que cela fonctionne et fait sens. Ensuite, avec les partenaires sociaux, nous tirerons le bilan de cet outil.
En adoptant cet amendement, vous ne limitez pas cet objectif à une égalité salariale à travail égal, vous l’élargissez à l’égalité des chances de carrière. C’est une bonne chose pour le progrès des femmes, mais aussi pour les hommes et pour les entreprises.
M. le président. Le sous-amendement n° 771, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Amendement n° 599, après l’alinéa 33
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
3° Compléter cet alinéa par les mots :
, qui tiennent compte des indicateurs déjà déployés dans le cadre de la négociation collective
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. L’adoption de l’amendement du Gouvernement « écraserait » en quelque sorte le travail de la commission, qui précisait que nous étions attentifs à ce que la diffusion de nouveaux indicateurs de mesure des écarts salariaux tienne compte de ceux qui ont déjà été mis en place dans les entreprises.
Ce sous-amendement vise à rétablir le travail de la commission.
M. le président. L’amendement n° 236 rectifié, présenté par MM. Chasseing, Capus, Guerriau, Decool, A. Marc, Lagourgue et Malhuret, Mme Mélot, MM. Wattebled et Longeot, Mme Goy-Chavent, M. L. Hervé, Mme Vullien et M. Moga, n’est pas soutenu.
L’amendement n° 502, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 6, première phrase
Supprimer les mots :
, à défaut d’avoir été déjà déployés dans le cadre de la négociation collective,
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Cet amendement vise à rendre automatique la négociation sur la programmation, annuelle ou pluriannuelle, de mesures financières de rattrapage salarial.
L’alinéa 6 de l’article 61 prévoit que la négociation sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, qui existe déjà, inclut une négociation sur les mesures de rattrapage salarial.
Ce même alinéa prévoit que cette négociation n’a lieu que dans les entreprises qui ne respectent pas l’égalité salariale et qui n’ont pas déjà déployé des mesures dans le cadre de la négociation collective. En d’autres termes, les entreprises qui ne sont pas parvenues à l’égalité salariale, mais qui auraient mis en œuvre des mesures de rattrapage seraient exonérées de l’obligation de négocier. Or il n’existe aucun moyen de contrôler la réalité ni la pertinence des mesures de rattrapage déployées.
L’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes doit être une priorité pour les entreprises. Aujourd’hui encore, des inégalités persistent. En effet, comme tout le monde le sait, les hommes perçoivent en moyenne un salaire supérieur de 22,8 % à celui des femmes, d’après une étude de l’INSEE.
Pour cette raison, les mesures de rattrapage salarial devraient faire l’objet d’une négociation automatique dans le cadre de la négociation sur l’égalité professionnelle. Peu importe que les entreprises aient déjà déployé d’autres mesures, dès lors que l’égalité salariale n’est pas atteinte.
L’objectif de cet amendement est de s’assurer qu’aucune entreprise ne bénéficie d’un passe-droit quant à la négociation sur les mesures de rattrapage salarial.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 502 ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. L’amendement n° 502 vise à revenir sur le travail de la commission.
Mon cher collègue, il ne s’agit nullement d’accorder un passe-droit aux entreprises ! Il s’agit d’être pragmatiques : comme vous le savez, lorsqu’un nouveau logiciel est mis en place, alors que tout le monde a déjà le même et qu’il donne à peu près les mêmes résultats, pour les entreprises, non seulement c’est lourd d’un point de vue financier, mais c’est aussi extrêmement compliqué.
Par conséquent, dès lors que l’outil existe, qu’il a été objectivé et validé comme tel, nous souhaitons qu’on n’ait pas à redéployer un logiciel quasi identique.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Quel est le cahier des charges de cet indicateur ? Il faut qu’il soit pertinent pour atteindre l’objectif d’égalité salariale et qu’il soit simple à déployer dans l’ensemble des entreprises.
Aujourd’hui, les travaux s’appuient surtout sur une exploitation des données qui sont soit dans la déclaration sociale nominative, la DSN, soit dans la base de données économiques et sociales, la BDES. Le but ultime serait de ne pas avoir à créer de nouvelles obligations administratives, mais d’utiliser les données existantes pour composer cet indicateur.
Cet objectif a pour corollaire celui de ne pas avoir de différences, secteur par secteur. Telle n’est pas la demande des partenaires sociaux, plus favorables à un système universel. Je rappelle que, malgré le principe « à travail égal, salaire égal », il existe un écart de 9 % entre les hommes et les femmes ; sur l’ensemble de carrières, il est de 25 % et, à temps plein égal, de 17 %.
Au regard de cette situation, il faut y aller franchement, il n’y a pas d’autres moyens. Les partenaires sociaux n’ont pas demandé que nous fassions des différenciations qui se révéleront très compliquées à mettre en œuvre dans les entreprises et qui créeront aussi des situations d’inégalité.
Si je comprends bien l’intention du sous-amendement n° 771, je crains que son adoption ne soulève une ambiguïté, car l’on pourrait considérer que les partenaires sociaux peuvent définir, branche par branche, des écarts différents. C’est ce que laisse entendre la rédaction ; sur ce sujet, nous avons une différence d’interprétation.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement demande le retrait de ce sous-amendement ; à défaut, il s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
Le Gouvernement demande également le retrait de l’amendement n° 502. Il faut des critères universels.
M. le président. En conséquence, l’amendement n° 502 n’a plus d’objet.
L’amendement n° 399, présenté par Mmes Rossignol, Grelet-Certenais et Meunier, M. Daudigny, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann et Lubin, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 5
Remplacer les mots :
cinquante salariés
par les mots :
onze salariés
II. - Alinéas 6 et 7, première phrase
Remplacer les mots :
cinquante salariés
par les mots :
onze salariés
La parole est à Mme Laurence Rossignol.
Mme Laurence Rossignol. Madame la ministre, vous avez limité le champ d’application de la mesure des écarts de rémunération et des dispositions visant à supprimer ces écarts aux entreprises de plus de cinquante salariés. Je sais pourquoi ce choix a été fait. C’était probablement le plus facile et une telle mesure a toujours quelque chose d’un peu expérimental qui fait que l’on choisit les grandes entreprises.
Toutefois, en matière d’écarts de rémunération, vous l’évoquiez il y a un instant, quarante-cinq ans après la loi fixant le principe « à travail égal, salaire égal », alors que, en 1972, les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes étaient de 33 %, ils oscillent aujourd’hui, selon les critères, entre 17 % et 25 % – je mets de côté l’écart résiduel et prends l’écart global.
On le voit bien, en quarante-cinq ans, cet écart de rémunération s’est très peu réduit malgré la loi : actuellement, plus de la moitié des femmes salariées le sont dans des entreprises de moins de cinquante salariés. En d’autres termes, plus de la moitié des femmes seront exclues du champ d’application de ce texte.
Enfin, je pense que ce sont les plus petites entreprises qui sont les plus exposées aux écarts de rémunération. Dans les grandes entreprises, les femmes sont moins vulnérables : des organisations syndicales et des organisations représentatives du personnel existent ; en outre, un grand nombre d’entreprises du SBF120 sont mobilisées sur l’égalité professionnelle. En revanche, dans les entreprises de moins de cinquante salariés, on trouve une bien moins grande « auto-mobilisation », si j’ose dire.
J’observe malheureusement que, dans les quarante années écoulées, les véhicules législatifs sur l’égalité professionnelle ne sont pas si fréquents, et ce texte, qui nous est soumis à la fin de la première année du quinquennat, risque d’être le seul projet de loi sur l’égalité professionnelle de ce mandat.
Nous n’aurons par conséquent pas forcément l’occasion de nous revoir pour étendre ce dispositif aux entreprises de moins de cinquante salariés. C’est la raison pour laquelle je propose d’inclure dès maintenant toutes les femmes salariées dans le champ d’application de la loi et d’adopter cet amendement qui vise à étendre ce dispositif aux entreprises de plus de onze salariés. Je continue d’exclure les entreprises de moins de onze salariés, pour lesquels cette mesure pose d’autres difficultés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Je ne sais pas si les plus petites entreprises sont plus concernées. Je pense qu’il y a des différences selon les secteurs d’activité.
Abaisser le seuil pose une difficulté. Il faut tout de même une taille adaptée. En effet, plus l’entreprise est petite, moins on a de chances de trouver des logiques de comparaison.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement, aussi pour des raisons statistiques. Il faut au moins un groupe de vingt salariés qui occupent le même type de poste pour que des comparaisons puissent être établies ; ce n’est guère possible dans une entreprise de trente salariés.
En outre, les études montrent que les écarts salariaux, à travail égal, sont moins grands dans les petites entreprises que dans les grandes. Dans une petite entreprise, tout le monde est à peu près dans la même situation économique et connaît plus ou moins le salaire des autres : une espèce de contrôle social se fait donc naturellement.
Cela ne signifie pas qu’il n’y ait rien à faire dans les petites entreprises, mais cela ne peut pas prendre la même forme.
M. le président. L’amendement n° 584, présenté par Mmes Rossignol, Grelet-Certenais et Meunier, M. Daudigny, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann et Lubin, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La mesure des écarts de rémunération prévue par le premier alinéa est portée à la connaissance des salariés par voie d’affichage et par courrier individuel.
La parole est à Mme Laurence Rossignol.
Mme Laurence Rossignol. Cet amendement vise à renforcer l’article 61 en prévoyant une publicité. Nous voulons en effet nous assurer que les victimes d’inégalités salariales ne prendront pas seulement connaissance du fait qu’elles ont été sous-rémunérées lorsqu’elles seront convoquées chez le DRH et qu’on leur proposera une enveloppe de rattrapage salarial.
Peut-être cet amendement est-il inutile, mais, madame la ministre, ni dans la rédaction initiale du texte ni dans l’amendement un peu abscons que vous venez de nous soumettre, je n’ai trouvé mention de la nature de la publicité donnée à ces mesures et aux décisions prises pour réduire les écarts salariaux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Ce projet de loi prévoit déjà que les écarts de rémunération font l’objet d’une publication annuelle. Je crains que, en augmentant cet affichage annuel, on ne prenne le risque de détériorer la cohésion interne de l’entreprise, ce qui n’est pas l’objectif de ce dispositif.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le Gouvernement considère que cet amendement est satisfait. C’est pourquoi il en demande le retrait.
M. le président. L’amendement n° 586 rectifié, présenté par Mmes Rossignol, Grelet-Certenais et Meunier, M. Daudigny, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann et Lubin, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Une entreprise candidate à un marché public doit fournir au pouvoir adjudicateur le dernier accord relatif à l’égalité professionnelle et la dernière mesure des écarts de rémunération.
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Lors de sa candidature à un marché public, l’entreprise doit transmettre en annexe le dernier accord relatif à l’égalité professionnelle et la dernière mesure des écarts de rémunération. De cette manière, le pouvoir adjudicateur pourra juger sur place et sur pièces d’éventuels manquements à l’égalité professionnelle et, le cas échéant, avoir connaissance des dispositions prises par l’entreprise pour les corriger.
Cette disposition aide également tant les établissements publics que les entreprises candidates à ne pas se placer dans une situation d’illégalité si les secondes remportent le marché proposé par les premiers, alors même qu’elles n’avaient pas le droit d’être candidates.
Il s’agit d’augmenter l’effectivité, actuellement peu contrôlée, de l’interdiction de candidater aux marchés publics en cas de non-respect des obligations relatives à l’égalité professionnelle prévue par la loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes.
J’entends déjà les cris d’orfraie que pousseront les entreprises amenées à candidater à des marchés publics ; nous savons que ce sont des dossiers très lourds, qui nécessitent chaque fois une ingénierie très importante.
À force de ne pas respecter une loi, à force de faire de nous les parents pauvres de ce qui existe depuis quarante-cinq ans – vous l’avez souligné, madame la ministre –, on en arrive finalement à vouloir imposer des mesures très dures. Si le bon sens et le simple fait de vouloir nous respecter l’avaient emporté depuis un moment, nous n’en serions pas là !
Mme Laurence Cohen. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Ma chère collègue, j’ignore si des cris d’orfraie seront poussés ; si c’est le cas, ils le seront contre vous et contre nous, car la commission a déposé un amendement n° 717 qui tient compte de ce que vous proposez.
Mme Laurence Rossignol. Qui « tient compte » ?...
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Oui, l’objet de l’amendement de la commission est plus complet, mais inclut cette disposition.
Par conséquent, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Lubin, l’amendement n° 586 rectifié est-il maintenu ?
Mme Monique Lubin. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 400, présenté par Mmes Rossignol, Grelet-Certenais et Meunier, M. Daudigny, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann et Lubin, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
La programmation, annuelle ou pluriannuelle, de mesures financières de rattrapage salarial ne se substitue pas aux augmentations salariales habituellement octroyées par l’employeur à ses salariés.
La parole est à Mme Laurence Rossignol.
Mme Laurence Rossignol. Cet amendement, qui est peut-être satisfait – ce serait mieux ! –, vise à ce que la programmation annuelle ou pluriannuelle des mesures financières de rattrapage salarial ne puisse se substituer aux augmentations de salaire habituellement octroyées par l’employeur à ses salariés.
On ne peut pas imaginer que des augmentations de salaire soient prévues pour les hommes et que, pour les femmes, seul un rattrapage des inégalités ait lieu : les femmes doivent bénéficier à la fois du rattrapage et de l’augmentation de salaire générale.
Mme Laurence Cohen. C’est du bon sens !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. La commission émet un avis défavorable.
Néanmoins, la crainte que vous avez formulée n’est pas totalement infondée. Reste que cet amendement nous semble satisfait par le droit actuel. En tout état de cause, le logiciel tel qu’il va être conçu – ou les éléments tels qu’ils seront conçus – devrait permettre de pallier cette difficulté.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable.
Cet amendement est satisfait, puisque ce projet de loi prévoit une enveloppe de rattrapage salarial, identifiée en tant que telle, qui n’entre pas dans la négociation annuelle des salaires.
M. le président. Madame Rossignol, l’amendement n° 400 est-il maintenu ?
Mme Laurence Rossignol. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. Mes chers collègues, nous avons examiné 155 amendements au cours de la journée ; il en reste 40.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
5
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au lundi 16 juillet 2018 :
À dix heures :
Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour la liberté de choisir son avenir professionnel (n° 583, 2017-2018) ;
Rapport de M. Michel Forissier, Mme Catherine Fournier, M. Philippe Mouiller et Mme Frédérique Puissat, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 609, 2017-2018) ;
Avis de M. Laurent Lafon, fait au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (n° 591, 2017-2018) ;
Texte de la commission (n° 610 rectifié, 2017-2018).
À quatorze heures trente et, éventuellement, le soir :
Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (discussion générale) (n° 567, 2017-2018) ;
Rapport de Mme Dominique Estrosi Sassone, fait au nom de la commission des affaires économiques (n° 630, 2017-2018) ;
Avis de M. Marc-Philippe Daubresse, fait au nom de la commission des lois (n° 604, 2017-2018) ;
Avis de M. Jean-Pierre Leleux, fait au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (n° 606, 2017-2018) ;
Avis de M. Patrick Chaize, fait au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable (n° 608, 2017-2018) ;
Texte de la commission (n° 631, 2017-2018).
Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relative à l’encadrement de l’utilisation du téléphone portable dans les écoles et les collèges (n° 558, 2017-2018) ;
Rapport de M. Stéphane Piednoir, fait au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (n° 624, 2017-2018) ;
Texte de la commission (n° 625 rectifié, 2017-2018).
Éventuellement, suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour la liberté de choisir son avenir professionnel (n° 583, 2017-2018).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-huit heures.)
Direction des comptes rendus
GISÈLE GODARD