M. Pascal Savoldelli. Cet amendement est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 386, présenté par Mme Grelet-Certenais, M. Tourenne, Mme Féret, M. Daudigny, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 29
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article L. 7342-3 du code du travail, il est inséré un article L. 7342-3-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 7342-3-1. – Bénéficie d’une allocation spécifique contre la perte de revenu payée par la plateforme le travailleur qui satisfait à des conditions de ressources, de durée antérieure d’activité, de revenus antérieurs d’activité et dont l’activité qu’il réalise pour le compte de la plateforme a diminué, sans que cette diminution lui soit imputable.
« Les dispositions des articles L. 5422-4 et L. 5422-5 sont applicables à cette allocation.
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions de mise en œuvre de cet article. Préalablement à la publication de ce décret, une négociation spécifique s’engage entre les organisations représentant les plateformes de mise en relation par voie électronique et les organisations syndicales représentatives représentant les travailleurs des plateformes numériques sur ces conditions de mise en œuvre. »
II. – Au premier alinéa de l’article L. 7342-4 du code du travail, après la référence : « L. 7342-3 », est insérée la référence : « et L. 7342-3-1 ».
La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais.
Mme Nadine Grelet-Certenais. En 2016, la loi relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels a reconnu pour la première fois la responsabilité sociale des plateformes numériques.
Elle impose à ces plateformes de prendre en charge l’assurance couvrant les risques d’accident du travail souscrite volontairement par un travailleur ou un contrat collectif aux garanties équivalentes. Une condition est posée : le travailleur doit avoir réalisé un chiffre d’affaires au moins égal à 5 100 euros dans l’année, avec une ou plusieurs plateformes.
Ce montant est, par exemple, le seuil de déclenchement de l’activité professionnelle pour les locations de meublés ou les tables d’hôtes, en application du décret du 4 mai 2017 relatif à la responsabilité sociale des plateformes de mise en relation par voie électronique. Il s’agit donc d’un seuil déjà opérationnel et clairement identifié par les acteurs du secteur.
Alors qu’une grève des livreurs des plateformes est en cours, nous vous proposons de créer une allocation spécifique, payée par les plateformes elles-mêmes, contre la perte de revenu pour ces travailleurs, respectant la condition que je viens de mentionner.
Cet amendement vise donc à légiférer sur un secteur économique en pleine expansion et qui est appelé à se développer, notamment pour les services à la personne. Il nous apparaît urgent d’élargir le champ de la loi à ces activités boostées par le numérique.
Le rapport Terrasse remis en 2016 démontrait bien que l’ubérisation de l’emploi constitue l’un des défis législatifs majeurs de ces prochaines années. Les acteurs du numérique ne peuvent pas continuer à ne suivre que leurs propres lois ou leurs propres chartes…
Mais nous en reparlerons à l’article 40 A. Dans cette attente, je vous invite, mes chers collègues, à voter en faveur de cet amendement qui constitue une véritable avancée sociale pour ces nouveaux manœuvriers des temps modernes, qui ne bénéficient à ce jour de presque aucune protection sociale et sont à la merci d’entrepreneurs prédateurs. Les clients ne sont pas en reste et doivent également prendre conscience de la dépendance totale de ces soi-disant travailleurs indépendants.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Vous avez raison, ma chère collègue, le secteur des plateformes est en pleine expansion.
Vous estimez qu’il est urgent d’élargir le champ de la loi. Il me semble surtout urgent de prendre le temps d’une réflexion collective sur les plateformes, pour aboutir, après un processus législatif comprenant un avis du Conseil d’État et une étude d’impact, à une loi solide en la matière, ce qui n’a jamais été le cas. C’est l’adoption d’un amendement qui a permis, lors de l’examen du projet de loi Travail en 2016, d’obtenir certaines avancées sur les plateformes. Là encore, vous proposez un nouveau progrès par voie d’amendement.
Nous avons fait le choix de supprimer l’article 40 A. Mme la ministre le regrette, mais nous reparlerons de cette question tout à l’heure.
Nous devons nous poser et engager ensemble une réflexion approfondie ; c’est d’ailleurs ce que souhaitent les travailleurs des plateformes.
Je suis donc au regret d’émettre un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Nous partageons tous la volonté d’avancer sur le sujet des plateformes. De plus en plus de personnes travaillent pour celles-ci, et cela dessine un nouveau contexte social. Il s’agit à la fois d’un travail indépendant, et non salarié – la Cour de cassation l’a réaffirmé récemment –, mais avec des conditions d’activité spécifiques, qui ne ressemblent pas à celles que l’on retrouve dans d’autres secteurs. Évidemment, les partenaires sociaux et le législateur doivent travailler sur cette question.
Des avancées sont déjà intervenues sur le volet « accidents du travail et maladies professionnelles », ou AT-MP : depuis l’an dernier, les entreprises qui organisent les plateformes doivent prévoir une assurance accidents du travail.
Nous avons aussi proposé dans le texte, après discussion avec les différentes parties prenantes, d’avancer sur le droit à la formation. La plupart des personnes qui exercent comme travailleurs indépendants pour les plateformes ont assez peu de choix professionnels. Dans l’esprit qui consiste à permettre à nos concitoyens d’avoir la liberté de choisir leur avenir professionnel, nous souhaitons que ces travailleurs aient également droit au compte personnel de formation, ou CPF, financé par les plateformes, afin qu’ils ne soient pas assignés à vie à ce type d’emplois et qu’ils puissent évoluer professionnellement.
Enfin, j’ai regretté que la commission refuse notre proposition sur les chartes. C’est déjà un progrès, me semble-t-il, notamment pour que les conditions de travail et les horaires soient connus à l’avance et discutés.
Bien évidemment, cette proposition n’épuise pas le sujet – je suis d’accord avec vous sur ce point, madame la rapporteur ; les discussions vont se poursuivre avec les partenaires sociaux, mais il nous a paru important de la faire figurer dans le présent texte.
J’émets donc évidemment un avis défavorable sur cet amendement et je vous inviterai, tout à l’heure, mesdames, messieurs les sénateurs, à accomplir une première étape de progrès en rétablissant l’article 40 A supprimé par la commission.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 386.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 29 bis
À titre expérimental et par dérogation au 1° de l’article L. 1242-2 du code du travail, un même contrat à durée déterminée peut être conclu, jusqu’au 31 décembre 2021, pour remplacer plusieurs salariés.
Le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de cette expérimentation avant le 31 décembre 2021. Ce rapport évalue notamment les effets de l’expérimentation sur la fréquence de la conclusion de contrats à durée déterminée et sur l’allongement de la durée de ces contrats.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 220 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 338 est présenté par M. Tourenne, Mme Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 220.
Mme Laurence Cohen. Depuis le début de ce débat, certains ont tendance à sous-entendre que nous serions réfractaires à tout changement, acceptant de laisser filer le chômage de masse. Pourtant, notre assemblée se prépare à voter l’article 29 bis…
En pleine période de chômage de masse, le Gouvernement autoriserait une entreprise à remplacer plusieurs salariés absents par le biais d’un seul et même contrat à durée déterminée…
Cela pourrait prêter à sourire si le sujet n’était pas si grave. La commission des affaires sociales du Sénat a quelque peu atténué la portée de la mesure en adoptant un amendement de repli visant à transformer ce dispositif en expérimentation.
Reprenons toutefois ensemble les arguments qui ont été développés par le rapporteur du texte à l’Assemblée nationale, et qui nous laissent pour le moins perplexes.
Tout d’abord, il s’agirait de couvrir les cas où une seule personne devrait pourvoir à temps plein deux postes vacants à temps partiel. Les entreprises se retrouveraient alors dans l’impossibilité de recruter. En réalité, ce n’est pas le cas, puisque ladite personne peut tout à fait signer à son tour deux CDD à temps partiel pour occuper les deux postes en question. L’obligation d’un temps minimal de travail de 24 heures hebdomadaires peut par ailleurs être contournée sur seule déclaration du salarié en cause.
Il s’agirait ensuite de permettre le remplacement de deux personnes employées successivement, en couvrant par un seul contrat les deux périodes concernées. Mais, une nouvelle fois, la situation actuelle est tout à fait vivable, puisque la succession de CDD est aujourd’hui monnaie courante.
Au final, la seule justification à cet article est une nouvelle fois la volonté de précariser la situation des salariés en CDD et de limiter les coûts pour les entreprises. En effet, la rédaction de l’article, même après sa transformation par la commission des affaires sociales, est tellement large que toute entreprise pourrait remplacer dans tous les cas plusieurs salariés.
Le rapporteur de l’Assemblée nationale a argué que cette disposition permettrait de faire des économies en matière d’allocations chômage.
Sans parler du cynisme de ses propos, son calcul ne me semble pas pertinent : s’il est vrai que deux CDD impliquent deux primes de précarité, il est tout aussi vrai que cette mesure risque de freiner les recrutements.
Alors que le taux de chômage est de nouveau en hausse au premier trimestre 2018, pour s’établir à presque 9 %, cet article ne me semble absolument pas opportun.
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour présenter l’amendement n° 338.
M. Jean-Louis Tourenne. Je partage ce qui vient d’être brillamment exposé par ma collègue. Cet article est la porte ouverte à tous les abus, avec la possibilité de remplacer quatre ou cinq personnes absentes exerçant des fonctions complètement différentes : jardinage, nettoyage, etc. On invente une autre façon d’exploiter les salariés.
Vouloir trouver des solutions pour remplacer plusieurs personnes dans un établissement – je pense notamment aux EHPAD, les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes – n’est pas nocif en soi, mais les garanties font défaut, et la possibilité d’utiliser à l’excès cette disposition risque de se retourner contre les salariés et de les précariser.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Madame Cohen, je vous indique que l’expérimentation a été décidée par l’Assemblée nationale, et non par le Sénat.
Cela étant, la commission des affaires sociales a émis un avis favorable sur l’expérimentation de ce dispositif.
Vous avez raison, il peut y avoir des abus et des dérives néfastes, pour l’employé comme pour l’employeur.
Toutefois, l’expérimentation agit comme un filet de protection, et je crois qu’il faut la laisser aller à son terme. Nous avons d’ailleurs fait le choix dans ce texte de pérenniser un certain nombre d’expérimentations, et nous aurons donc l’occasion de revenir ultérieurement sur plusieurs dispositifs.
Je propose toutefois que l’on passe assez rapidement sur ces deux amendements. Nous avons en effet fait le choix de réécrire l’article 29 bis ; nous y reviendrons dans quelques instants lors de l’examen de l’amendement n° 732.
En conséquence, l’avis de la commission est défavorable sur ces deux amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 220 et 338.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 133, présenté par M. Janssens, n’est pas soutenu.
L’amendement n° 732, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
À titre expérimental et par dérogation respectivement au 1° de l’article L. 1242-2 du code du travail et au 1° de l’article L. 1251-6 du même code, un seul contrat à durée déterminée ou un seul contrat de travail temporaire peut être conclu pour remplacer plusieurs salariés dans les secteurs définis par décret. Cette expérimentation a lieu sur la période du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2020.
L’expérimentation ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.
Le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de cette expérimentation avant le 1er juin 2021.
Ce rapport évalue en particulier, dans les secteurs mentionnés au premier alinéa du présent article, les effets de l’expérimentation sur la fréquence de la conclusion des contrats à durée déterminée et des contrats de travail temporaire ainsi que sur l’allongement de leur durée, et les conséquences des négociations de branche portant sur les thèmes mentionnés au 7° de l’article L. 2253-1 dudit code.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. J’en arrive au point que j’évoquais précédemment. Cet amendement conserve la logique initiale de l’expérimentation des CDD multi-remplacements – introduite en séance publique à l’Assemblée nationale, elle permet de conclure un contrat unique plutôt que des CDD successifs pour remplacer plusieurs salariés –, tout en lui apportant plusieurs modifications tenant compte des amendements qui ont été proposés par un certain nombre de sénateurs.
Tout d’abord, l’expérimentation est étendue aux contrats d’intérim, car les conditions de recours de ce dernier sont très proches de celles du CDD.
Ensuite, elle sera limitée à des secteurs définis par un décret qui devrait être pris avant le 1er janvier 2019.
En outre, la durée de l’expérimentation sera réduite à deux ans avant une éventuelle généralisation.
Par ailleurs, afin d’éviter tout risque de contournement des règles d’ordre public social en matière de contrats courts, les CDD et contrats d’intérim multi-remplacements ne pourront pas avoir pour objet ou pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale ou permanente de l’entreprise.
Enfin, l’évaluation de l’expérimentation devra se pencher sur les nouvelles compétences reconnues aux partenaires sociaux de branche depuis l’ordonnance Travail du 22 septembre 2017.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. J’émets un avis favorable sur cet amendement, qui autorise l’expérimentation tout en l’encadrant plus strictement.
M. le président. En conséquence, l’article 29 bis est ainsi rédigé et les amendements nos 523, 146 rectifié bis, 282, 283 et 147 rectifié ter n’ont plus d’objet.
L’amendement n° 523, présenté par M. Henno, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
1° Supprimer les mots :
jusqu’au 31 décembre 2021
2° Compléter cet alinéa par les mots :
dans les secteurs définis par décret avant le 30 juin 2019
II. – Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Cette expérimentation a lieu du 1er juillet 2019 au 30 juin 2022.
III. – Alinéa 2
1° Remplacer la date :
31 décembre 2021
par la date :
30 juin 2022
2° Compléter cet alinéa par les mots :
, en lien avec les négociations de branche sur la qualité de l’emploi conformément au 7° de l’article L. 2253-1 du code du travail, dans les secteurs concernés
L’amendement n° 146 rectifié bis, présenté par Mme Gruny, MM. Perrin, Raison et Lefèvre, Mmes Micouleau et Imbert, MM. Brisson et Savary, Mmes Deseyne et Garriaud-Maylam, MM. Vaspart, Pierre et Daubresse, Mmes Lopez et Deroche, M. Magras, Mmes Delmont-Koropoulis et A.M. Bertrand, MM. Émorine, Mandelli, Laménie, Revet, Sido, Charon et Poniatowski et Mmes Lamure et Lherbier, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par les mots :
, dès lors que ledit contrat n’a pas pour effet de pourvoir durablement un emploi permanent au sein de l’entreprise
L’amendement n° 282, présenté par M. Tourenne, Mme Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par les mots :
absents pour raison de congés ou d’absence non consécutive à un licenciement
L’amendement n° 283, présenté par M. Tourenne, Mme Taillé-Polian, M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Ce type de contrat ne peut excéder une durée fixée par décret.
L’amendement n° 147 rectifié ter, présenté par Mme Gruny, MM. Perrin, Raison et Lefèvre, Mmes Micouleau et Imbert, MM. Brisson et Savary, Mmes Deseyne et Garriaud-Maylam, MM. Vaspart, Pierre et Daubresse, Mmes Lopez et Deroche, M. Magras, Mmes Delmont-Koropoulis et A.M. Bertrand, MM. Émorine, Mandelli, Laménie, Revet, Sido, Charon et Poniatowski et Mmes Lamure et Lherbier, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… - À titre expérimental et par dérogation au 1° de l’article L. 1251-6 du code du travail, un même contrat de mission peut être conclu, jusqu’au 31 décembre 2021, pour remplacer plusieurs salariés.
Le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de cette expérimentation avant le 31 décembre 2021. Ce rapport évalue notamment les effets de l’expérimentation sur la fréquence de la conclusion de contrats de mission et sur l’allongement de la durée de ces contrats.
Articles additionnels après l’article 29 bis
M. le président. L’amendement n° 99 rectifié quater, présenté par Mmes Gruny et Primas, M. Bonne, Mme Morhet-Richaud, M. Lefèvre, Mmes Lassarade et Imbert, M. Bascher, Mmes Lavarde, L. Darcos, Di Folco et Chauvin, MM. Brisson et D. Laurent, Mme Duranton, M. Revet, Mme Estrosi Sassone, MM. Pointereau, Cambon, Savary et Mouiller, Mmes Deseyne, Lanfranchi Dorgal et Bonfanti-Dossat, MM. de Legge, Paccaud, Charon et Schmitz, Mmes Troendlé et Garriaud-Maylam, MM. B. Fournier, Vaspart, Pierre, Savin et Daubresse, Mmes Lopez, Deromedi et Deroche, MM. Allizard, Cuypers, Leleux, Kennel, Chevrollier, Émorine, Rapin, Mandelli, Babary, Laménie, Vogel, Carle, Grand et Sido, Mmes Lamure et Bories et MM. Mayet et Gremillet, est ainsi libellé :
Après l’article 29 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 1242-2 du code du travail est ainsi modifié :
1° Au 3°, les mots : « ou emplois pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois » sont supprimés ;
2° Après le même 3°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Emplois relevant de certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, dans lesquels il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et des conditions de travail inhérentes à celle-ci, ne permettant pas notamment de prédéterminer le volume et la répartition de travail ; »
La parole est à Mme Christine Lavarde.
Mme Christine Lavarde. Le recours aux contrats d’usage dits « extras » est une nécessité, par exemple dans la branche de l’hôtellerie et de la restauration, afin de faire face aux fluctuations d’activité.
Une jurisprudence de la Cour de cassation de septembre 2008 considère que la seule qualification conventionnelle de « contrat d’extra » impose de rechercher, pour l’emploi considéré, non seulement s’il est effectivement d’usage de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée, mais également si le recours à des contrats successifs est justifié par des raisons objectives.
Or la preuve du caractère par nature temporaire de l’emploi est en réalité impossible à fournir. En effet, le recours aux extras est une nécessité liée à un besoin temporaire de main-d’œuvre résultant d’un événement particulier, par exemple une réception ou un mariage.
En revanche, les métiers qui sont confiés à ces salariés employés en extras – serveurs, maîtres d’hôtel – ne sont évidemment pas temporaires par nature. Aussi, faute de pouvoir apporter la preuve du caractère par nature temporaire de l’emploi, et même si l’employeur respecte strictement les dispositions conventionnelles, les juridictions requalifient le CDD en CDI et la relation de travail à temps partiel en temps complet.
Ces décisions aboutissent à des condamnations de plusieurs centaines de milliers d’euros.
Cet amendement, s’il était adopté, permettrait donc de définir dans le code du travail la notion d’emploi par nature temporaire dans les secteurs d’activité définis par décret ou accord de branche.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Monsieur le président, je sollicite l’avis du Gouvernement et reprendrai la parole après Mme la ministre, si le règlement le permet.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Il est défavorable.
Cet amendement vise à modifier les textes qui définissent les cas de recours aux CDD d’usage, notamment pour « contrecarrer » une jurisprudence de la Cour de cassation sur l’utilisation de ce type de contrats dans le secteur des hôtels, cafés, restaurants.
Je vous l’accorde, la réglementation sur le CDD d’usage est un peu complexe, car elle se situe au confluent des réglementations française et européenne, notamment avec la directive concernant les CDD.
Pour autant, je ne partage pas la lecture alarmiste du secteur des hôtels, cafés, restaurants.
En effet, la jurisprudence est plutôt mesurée et il existera toujours des cas d’espèce, quelle que soit la législation.
En outre, et c’est peut-être le point le plus important, la réforme récente a ouvert à la négociation des partenaires sociaux la question du calcul et de la suppression du délai de carence, ce qui est de nature à répondre à cette problématique.
C’est vraiment à l’échelon professionnel, par les négociations de branche, qu’il faut résoudre ces questions.
M. le président. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Madame la ministre, vous avez raison, les CDD d’usage sont extrêmement complexes et constituent une source d’insécurité juridique pour les employeurs.
Cela étant, les dispositions de cet amendement ont déjà donné lieu à de nombreuses discussions dans cet hémicycle. Je procéderai à un petit rappel historique très rapide.
En 2015, M. Macron, alors ministre de l’économie, estimait que le CDD d’usage devait être traité dans une loi relative au dialogue social.
En décembre 2015, un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, dressait un bilan très négatif du CDD d’usage et conseillait de se pencher en urgence sur ce dispositif.
En juillet 2017, M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État, prenait, au nom du Gouvernement, l’engagement de s’emparer du sujet, devant ma collègue Sophie Primas, qui est cosignataire de cet amendement.
Nous sommes aujourd’hui en 2018 et nous considérons que nous ne pouvons plus laisser planer cette incertitude sur le secteur économique, notamment si nous voulons effectivement améliorer notre compétitivité.
La commission a sollicité l’avis du Gouvernement, mais, à titre personnel, j’émets un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Madame la rapporteur, vous avez rappelé avec beaucoup de brio l’historique de cet amendement.
On entre ici dans la vraie vie, la réalité de terrain. Les CDD d’usage sont certes des contrats très particuliers, mais, notamment dans le domaine de l’hôtellerie et de la restauration, ils sont le seul moyen de pouvoir travailler et de faire face aux aléas des manifestations et de la clientèle selon les soirs.
Ce sont principalement les petits restaurants qui sont concernés, ceux qui résistent difficilement, entre autres en milieu rural. Ils ne peuvent pas établir un planning quarante-huit heures à l’avance et sont bien obligés de faire appel à des extras en fonction des besoins.
Il est donc préférable d’autoriser ces embauches, certes précaires, mais qui permettent de développer des activités et d’apporter une valeur ajoutée.
Je vous remercie d’avoir émis un avis favorable à titre personnel, madame la rapporteur, et j’invite mes collègues à voter en faveur de cet amendement.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 29 bis.
L’amendement n° 445, présenté par M. Morisset, est ainsi libellé :
Après l’article 29 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 1244-2-2 du code du travail est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« … – Dans toutes les branches ou entreprises où l’emploi à caractère saisonnier est autorisé, malgré la demande de reconduction formulée par le salarié, la clause de reconduction ne peut pas s’appliquer si l’entreprise ne dispose pas du volume d’heures suffisant à proposer au salarié demandeur. Le contrat a pris fin la saison précédente. L’entreprise ne peut pas être sanctionnée. »
La parole est à M. Jean-Marie Morisset.