M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi portant création d’un fonds d’indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques.
(La proposition de loi est adoptée.) - (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Jomier, rapporteur. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je suis ému par ce vote, qui représente le meilleur de ce que l’on attend du Sénat. Nous avons su affronter ce problème.
Nous nous sommes tous demandé si l’heure était venue de légiférer. Après mûre réflexion, après des débats de grande qualité au sein de la commission des affaires sociales – je veux d’ailleurs rendre hommage à mes collègues de la commission, et particulièrement à son président, Alain Milon –, nous avons répondu oui.
Il ne faut intervenir ni trop tard – nous en savons les conséquences – ni trop tôt. Or il n’est pas trop tôt, car la connaissance scientifique, même si elle est encore en mouvement, est déjà bien établie.
Le Sénat a empoigné, affronté la question de longue date, sous l’impulsion de la mission menée par Sophie Primas, et a provoqué les premières décisions, cela a été rappelé dans le débat. Il fait aujourd’hui un nouveau pas. Nous sommes tous conscients qu’il s’agit d’une première pierre législative, qui n’est certes pas parfaite. Certains points méritent encore d’être précisés et je veux croire qu’ils le seront au cours de la procédure législative.
Madame la ministre, nous comptons sur vous pour apporter des réponses conformes à l’ampleur du problème posé. Cela sera difficile, car cette ampleur n’est pas encore parfaitement établie. Nos réponses doivent donc être prudentes, rigoureuses et évolutives.
Cela représente un défi pour l’action publique, mais si nous ne le relevons pas, nous ne serons pas à la hauteur de notre devoir de responsables politiques nationaux qui est de répondre aux problèmes de nos concitoyens et de notre société.
Merci à l’ensemble de mes collègues sénateurs, à l’administration du Sénat, sans laquelle nous n’aurions pas produit un travail d’une telle qualité. Bien entendu, nous suivrons avec attention la suite de la procédure, avec un objectif commun : satisfaire une demande légitime de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Agnès Buzyn, ministre. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai bien entendu le signal émis aujourd’hui par la Haute Assemblée face à un enjeu de santé publique majeur.
Je vous renouvelle l’assurance de la détermination du Gouvernement à protéger nos concitoyens. Nous avons commencé à travailler avec Stéphane Travert, dans le cadre des états généraux de l’alimentation, en faisant un effort considérable en direction de l’alimentation bio, d’un changement de modèle, de l’accompagnement de nos agriculteurs.
Nous préparons également avec Nicolas Hulot un plan extrêmement ambitieux sur les produits phytosanitaires qui va être soumis à concertation. Il pose des questions de recherche, parce qu’il nous manque des connaissances un peu plus robustes, mais également des questions concernant les produits de substitution, qui sont l’enjeu majeur des années qui viennent. Il va comprendre des mesures de protection des personnes, notamment les plus vulnérables, comme les femmes enceintes et les enfants. Des dispositions de même nature seront également présentes dans mon grand programme de santé publique, dans lequel les sujets relatifs à la santé et à l’environnement seront prioritaires, afin de répondre au besoin des Français d’être mieux informés et protégés.
Nous devrons encore discuter de nombreuses mesures ensemble, au Sénat et à l’Assemblée nationale. Ce n’est qu’un début, mais nul ne peut faire le procès à ce gouvernement de ne pas avoir pris la mesure des questions liées à la contamination par les pesticides.
Beaucoup de choses ont été faites par la Commission européenne, vous l’avez constaté au sujet du glyphosate. La France a été précurseur. D’autres mesures sont prises. Nous sommes pionniers en Europe quant à la protection de nos populations et nous continuerons à l’être, vous pouvez compter sur moi ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et sur des travées du groupe socialiste et républicain, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe Les Républicains.)
6
Réforme de la caisse des Français de l’étranger
Adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion, à la demande du groupe socialiste et républicain, de la proposition de loi relative à la réforme de la Caisse des Français de l’étranger présentée par MM. Jean-Yves Leconte, Richard Yung, Mmes Claudine Lepage et Hélène Conway-Mouret (proposition n° 553 [2016-2017], texte de la commission n° 239, rapport n° 238).
Mes chers collègues, je vous rappelle que nous devrons suspendre l’examen de ce texte au terme du délai de quatre heures réservé au groupe socialiste et républicain, soit à vingt heures quinze.
Si nous n’avons pas alors achevé cet examen, il appartiendra à la conférence des présidents d’inscrire la suite de la discussion de cette proposition de loi à l’ordre du jour d’une séance ultérieure.
Dans la discussion générale, la parole est à M. Jean-Yves Leconte, auteur de la proposition de loi.
M. Jean-Yves Leconte, auteur de la proposition de loi. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous avons peu de temps pour discuter d’une proposition de loi que beaucoup attendent. Elle n’émane pas que de moi, mais a été rédigée en commun par des membres de différents groupes, en collaboration avec les administrateurs de la Caisse des Français de l’étranger, la CFE, et de la direction de la sécurité sociale. Je vais essayer d’être bref pour que nous parvenions au bout de cette discussion.
La Caisse des Français de l’étranger a été créée en 1984 pour établir une solidarité entre les Français vivant hors de France en termes d’assurance maladie. On y adhère volontairement, elle fonctionne dans le cadre des règles de la sécurité sociale et elle assure les remboursements de prestations réalisées dans le monde entier.
Malgré ces contraintes, cette caisse est à l’équilibre, ce qui doit être porté au crédit de ses gestionnaires et de son conseil d’administration. Nous avons repéré toutefois plusieurs évolutions inquiétantes.
Depuis les années 1980, l’expatriation a profondément changé. En proportion, les Français qui vivent hors de France sont plus nombreux aujourd’hui à relever de contrats locaux, avec une protection sociale qui doit être payée et assurée dans le pays de résidence, alors que l’on trouve moins, en proportion toujours, de salariés détachés par de grandes entreprises et bénéficiant d’une protection sociale française à l’étranger.
Le dispositif construit dans les années 1980 n’est plus adapté aux personnes qui ont des contrats locaux, à celles qui se rendent à l’étranger pour créer une entreprise ou qui s’installent pour y vivre sans être détachées par une grande entreprise. Les adhérents individuels sont aujourd’hui en effet un peu moins bien traités que ceux qui appartiennent à de grandes entreprises.
En outre, les pays d’accueil, eux aussi, ont changé. De plus en plus d’entre eux exigent une affiliation au régime local de protection sociale, qu’il soit obligatoire ou, comme aux États-Unis avec l’Obamacare, privé, mais labellisé par l’État.
La CFE n’étant pas un régime obligatoire, elle rencontre des difficultés à évoluer au regard de ces exigences de l’expatriation et du monde.
Et puis il y a l’Europe. Les textes des années 1980 ont été jugés contraires au principe d’égalité de traitement des ressortissants de l’Union européenne. Par conséquent, depuis 2010, l’assurance maladie offerte par la CFE est ouverte aux ressortissants européens.
Nous nous sommes demandé s’il fallait introduire des conditions restrictives pour la limiter aux Français, ou, au contraire, assumer ces évolutions et inscrire dans les textes que l’assurance maladie proposée par la CFE pouvait être offerte à l’ensemble des ressortissants européens. Nous avons choisi la seconde option, en considérant qu’un nombre d’adhérents plus important pour une caisse équilibrée serait un gage de robustesse.
Enfin, nos propositions suivent les recommandations préconisées par l’IGAS, l’Inspection générale des affaires sociales, dans son rapport de 2015. Nous avons donc inscrit la possibilité de proposer des prestations d’assurance maladie à l’ensemble des ressortissants européens qui souhaitent s’affilier à la Caisse des Français de l’étranger.
Aujourd’hui, l’état des lieux est le suivant : l’offre tarifaire est très complexe, elle compte plus de 500 tarifs différents suivant les situations ; les frais de gestion sont très importants, compte tenu de la situation de la CFE ; la définition des ayants droit scinde les familles, car les conjoints étrangers qui travaillent dans le pays d’accueil ne peuvent pas être affiliés. Cette dernière situation est très courante, en particulier dans les jeunes familles, qui recherchent donc des solutions alternatives à l’affiliation à la Caisse des Français de l’étranger. Enfin, les coûts des prestations ne peuvent pas être négociés par la CFE en raison de la rigidité des règles qui la régissent aujourd’hui.
Compte tenu de ces éléments qui bloquent le développement de la Caisse des Français de l’étranger, nous constatons une augmentation inquiétante de l’âge moyen de ses assurés qui pourrait un jour remettre en cause son équilibre. Il est donc urgent de la rendre plus attractive pour les expatriés plus jeunes et de lui permettre de mieux répondre aux besoins de l’ensemble des Français qui vivent hors de France.
Cette proposition de loi, issue du travail des administrateurs de la CFE, tous bords confondus, s’inspire d’amendements qui ont été déposés l’année dernière par Christophe-André Frassa et moi-même lors de la discussion d’autres projets de loi, ainsi que d’une proposition de loi de Joëlle Garriaud-Maylam.
Je salue également le travail du rapporteur, Yves Daudigny, qui a recadré notre projet en liaison avec la direction de la sécurité sociale, afin de simplifier encore les choses. Il a, en particulier, supprimé les différentes catégories d’assurés en articulant le texte autour des différents risques.
L’idée générale de cette réforme est d’unifier les modes de calcul des cotisations d’assurance maladie-maternité et invalidité pour que l’ensemble des adhérents, anciennement catégorisés en salariés, travailleurs indépendants, pensionnés ou étudiants, cotisent en fonction non plus de ces catégories et de leur revenu, mais de leur âge et de la composition de leur foyer, avec une modulation liée à l’ancienneté de l’admission à la CFE.
Il s’agit aussi d’offrir aux services consulaires français la possibilité de proposer, si nécessaire, une aide à l’accès à l’assurance maladie à ceux qui ne disposeraient pas de revenus suffisants, comme cela avait été instauré par la loi de modernisation sociale de 2002.
Cette flexibilité nouvelle en matière de tarification, mais aussi la capacité, pour la Caisse, de négocier des tarifs avec des intermédiaires, afin de se trouver en position de force vis-à-vis de prestataires médicaux à l’international, sont nécessaires pour adapter la CFE aux enjeux actuels et à la situation globale du marché de la santé dans le monde.
Depuis deux ans, la Caisse a fait le maximum pour se moderniser et pour répondre au mieux aux besoins, mais elle ne peut pas aller plus loin sans modification législative. Cette proposition de loi répond à cette exigence.
J’avais inclus dans le texte initial une réforme de la gouvernance de la Caisse comprenant l’élection des membres de son conseil d’administration par l’ensemble des conseillers consulaires. Cette proposition ne faisait pas consensus. En outre, vous savez sans doute que des consultations ont été lancées en vue d’une réforme de la représentation politique des Français de l’étranger. Nous avons donc préféré reporter ce point à plus tard.
Toutefois, puisque nous donnons plus de pouvoir, de flexibilité et de responsabilité au conseil d’administration de la Caisse, il nous faudra également revenir sur la question de la gouvernance le jour où nous aurons une idée précise de la représentation des Français de l’étranger.
Cette proposition de loi est un acte de confiance vis-à-vis du conseil d’administration de la Caisse. Nous croyons qu’avec plus de flexibilité, la Caisse répondra mieux aux besoins des Français de l’étranger. Son conseil d’administration doit continuer d’être élu par des représentants de l’ensemble des Français qui vivent hors de France de manière à assurer un besoin d’universalité.
En conclusion, et parce qu’il faut essayer d’aller vite, je remercie le rapporteur et mes collègues siégeant sur l’ensemble des travées de cet hémicycle qui ont participé à l’élaboration de cette proposition de loi.
Madame la ministre, nous comptons sur votre soutien pour que ce texte prospère, mais aussi sur d’autres questions comme l’accès à la retraite pour les Français qui vivent hors de France quand ils sont nés hors de France, les certificats de vie, ou encore l’accès des volontaires internationaux aux services de la Caisse des Français de l’étranger. Des évolutions législatives seront nécessaires, et nous aurons besoin de votre aide pour les mettre en œuvre. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Yves Daudigny, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, pour l’observateur familier de la sécurité sociale, la Caisse des Français de l’étranger, ou CFE, est un objet de curiosité et d’intérêt.
Conçue comme le prolongement de la sécurité sociale à l’étranger pour les expatriés, elle en reprend certaines caractéristiques, mais elle s’inscrit dans un tout autre environnement, en concurrence avec d’autres acteurs.
Jean-Yves Leconte a exposé les motifs qui ont conduit nos collègues représentant les Français établis hors de France à travailler, avec la Caisse, à une réforme de son cadre législatif que le Sénat examine cet après-midi. Je n’y reviendrai pas. J’indiquerai en revanche quels ont été l’état d’esprit de la commission des affaires sociales et ses principales observations.
Afin de bien identifier les enjeux de ce texte et ses conséquences concrètes pour nos compatriotes établis à l’étranger, j’ai souhaité rencontrer les représentants des deux principales associations des Français de l’étranger. Je remercie Claudine Lepage, pour Français du monde-association démocratique des Français de l’étranger, Français du monde-ADFE, et Ronan Le Gleut, pour l’Union des Français de l’étranger-monde, l’UFE-monde, de s’être rendus disponibles.
J’ai pu constater une grande convergence de vues sur la nécessité de revoir l’offre tarifaire de la Caisse et d’améliorer la lisibilité de ses prestations.
Saisie de ce texte, la commission des affaires sociales a confirmé ces objectifs. Leur atteinte suppose qu’une plus grande capacité d’initiative soit donnée au conseil d’administration de la Caisse.
Ces modifications législatives sont relativement urgentes puisque, sur le fondement de décisions du conseil d’administration intervenues en juin 2016, la Caisse a commencé à proposer de nouveaux produits : une offre pour les soins en France et, très récemment, une offre en direction des jeunes. Elle mène également, sur le volet de ses prestations, une expérimentation en Thaïlande qui pourrait être généralisée.
La commission des affaires sociales a souhaité préserver les équilibres issus des travaux menés par nos collègues avec la Caisse. La réécriture du texte à laquelle elle a procédé ne doit pas occulter cette volonté.
La commission a tiré les conséquences, dans la structure du chapitre concerné du code de la sécurité sociale, du changement d’approche induit par la proposition de loi, d’une logique de catégories d’adhérents – salariés, travailleurs indépendants, pensionnés, étudiants, chômeurs… – à une logique de risques couverts – maladie-maternité, invalidité, accidents du travail et maladies professionnelles.
Tout en respectant l’esprit initial de la proposition de loi, la commission a également procédé à quelques ajustements.
Sur le volet gouvernance, elle a limité les modifications apportées au droit en vigueur à l’adaptation de la composition du conseil d’administration, à la suppression des différentes catégories d’adhérents, à l’actualisation des conditions d’éligibilité et à l’obligation de la parité dans la constitution des listes.
Il lui semble que ces modifications, sans répondre à l’ambition initiale du texte, peuvent réunir un consensus.
Le conseil d’administration a été renouvelé récemment et des annonces ont été faites par le Gouvernement à propos d’une réforme de la représentation des Français établis hors de France. Le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, Jean-Baptiste Lemoyne, commence les consultations à ce sujet cette semaine. Le Sénat aura sans doute à examiner de nouveau la question de la gouvernance de la CFE.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, telles sont les principales observations qu’appelle la proposition de loi relative à réforme de la Caisse des Français de l’étranger que la commission des affaires sociales vous demande d’adopter dans la rédaction issue de ses travaux. (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe La République En Marche.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la proposition de loi que nous examinons a pour objet de réformer en profondeur la Caisse des Français de l’étranger, qui, dans l’esprit de nos concitoyens de l’étranger, demeure la sécurité sociale.
L’ambition de ce texte est de revoir à travers rien moins que treize articles le contenu et la présentation des garanties, ainsi que la gouvernance de la Caisse des Français de l’étranger afin d’adapter celle-ci aux défis actuels. En effet, si depuis près de quarante ans la CFE s’est imposée comme une référence, elle agit aujourd’hui dans un cadre contraint, et donc sans les outils pour répondre aux attentes d’une communauté française à l’étranger qui ne cesse de s’agrandir.
D’abord, les attentes des Français de l’étranger en matière de couverture sociale sont importantes. Ainsi, selon un très récent baromètre sur la protection sociale des expatriés, 75 % des Français de l’étranger interrogés jugent important de garder le lien avec le système français de protection sociale, et près de la moitié – 49 % –, déclarent que la protection sociale « à la française » fait partie de ce qui leur manque le plus à l’étranger.
Cette demande provient d’une communauté française à l’étranger qui continue de s’accroître dans des proportions très importantes. Aujourd’hui, près de 1,8 million de Français sont inscrits au registre des Français établis hors de France, et l’on estime entre 2 et 2,5 millions le nombre total de Français établis hors de notre territoire de manière permanente ou quasi permanente.
Pour accompagner la mobilité des Françaises et des Français et leur garantir une continuité de la protection sociale, nous disposons actuellement de deux outils.
D’abord, mais je ne m’étendrai pas sur cette possibilité, cette continuité est garantie via les conventions bilatérales de sécurité sociale conclues par la France et les règlements européens de coordination. La coordination des législations de sécurité sociale permet ainsi d’assurer que les droits acquis dans deux ou plusieurs systèmes soient reconnus et valorisés dans chacun des systèmes de protection sociale.
Le second outil, qui nous occupe aujourd’hui, est la CFE et les garanties qu’elle propose. Il peut intervenir en complément de la coordination en cas de couverture locale insuffisante, ou s’imposer comme l’unique choix pour l’expatrié à défaut d’accord conclu avec la France.
Or les réponses fournies actuellement par la Caisse ont été conçues il y a très longtemps, dans un autre contexte, et ne sont plus du tout adaptées. L’offre, en particulier en matière de santé, s’est compliquée et est devenue peu lisible. Les garanties sont souvent perçues comme offrant une couverture trop limitée pour des cotisations élevées.
Près de quarante ans après sa création, la Caisse doit donc se moderniser pour éviter un trop grand décalage avec le nouveau visage de l’expatriation et pour mieux répondre aux attentes des Français de l’étranger.
C’est dans cette perspective que le Gouvernement apporte son soutien à cette proposition de loi, notamment au texte de la commission.
Les évolutions aujourd’hui proposées doivent permettre d’améliorer la protection sociale de nos expatriés selon plusieurs axes : une meilleure lisibilité des garanties à travers une offre plus claire, une grille tarifaire rénovée pour la couverture maladie et une prise en charge des soins de santé à l’étranger plus adaptée.
La proposition de loi prévoit également de permettre à la Caisse des Français de l’étranger de sortir du statut dans lequel elle est enfermée, afin qu’elle puisse nouer des partenariats avec des courtiers et des assureurs tout en restant connectée à la protection sociale française.
Je n’oublie pas le volet gouvernance, dont les ajustements aujourd’hui envisagés contribueront à la bonne représentation au sein du conseil d’administration de la Caisse des Français de l’étranger, ne serait-ce qu’en termes d’exigence de parité. Cette évolution s’inscrit d’ailleurs dans le mouvement de modernisation engagé par les caisses de sécurité sociale.
Globalement, ces évolutions devront permettre de mieux répondre aux attentes de nos concitoyens et recueillent en conséquence le total soutien du Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Arnell, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
M. Guillaume Arnell. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous abordons l’examen de la proposition de loi de nos collègues socialistes dans le contexte d’une éventuelle réforme de la représentation des Français de l’étranger, avec la tenue de consultations et l’ouverture probable d’un chantier sur ce sujet.
Aussi ce texte intervient-il peut-être un peu trop tôt. Pour autant, comme les auteurs l’ont rappelé, certaines évolutions, que ce soient les formes d’expatriation ou les dernières modifications institutionnelles concernant la représentation des Français de l’étranger, en particulier la loi du 22 juillet 2013 relative à la représentation des Français établis hors de France, rendent nécessaires un certain nombre d’adaptations.
À cette fin, le texte comporte deux volets. Le premier – j’y reviendrai –, concerne l’offre tarifaire. Le second vise à réformer la gouvernance de la Caisse. Comme chacun le sait, cette réforme ne fait pas consensus. La commission des affaires sociales l’a rappelé, et a souhaité y renoncer pour le moment.
Pourtant, il faudra bien un jour tirer les conséquences de la loi de 2013 qui a réduit le nombre de membres de l’AFE, l’Assemblée des Français de l’étranger, de 155 à 90 et instauré leur élection par les conseillers consulaires dans le but d’une meilleure proximité des expatriés avec leurs élus.
Ces dispositions induisent une réduction mécanique du corps électoral pour l’élection des représentants de la Caisse. C’est pourquoi il faut bien reconnaître l’intérêt de l’élection du conseil d’administration par les 500 conseillers consulaires. Outre l’élargissement du corps électoral, une telle modification permettrait également la suppression d’un degré d’élection.
Mais visiblement, le rapprochement des assurés de leurs représentants n’est pas encore à l’ordre du jour. Je ne m’étendrai pas plus…
Je rappellerai tout de même que, en 2015, la proposition de loi de notre collègue Jean-Yves Leconte sur ce thème avait été rejetée, certains arguant qu’il fallait attendre les conclusions de l’enquête de l’Inspection générale des affaires sociales et de l’Inspection générale des finances. Eh bien, nous y voilà ! Le rapport a été rendu quelque temps après, la même année. Plus rien ne s’oppose à cette réforme, à moins que des enjeux de pouvoirs ne génèrent toutes ces tergiversations et lenteurs…
La principale innovation du texte tel qu’il résulte des travaux de la commission réside donc dans son premier volet relatif à la réforme de l’offre tarifaire pour l’assurance maladie. Cette réforme était annoncée depuis 2015, date à laquelle l’Inspection générale des finances et l’Inspection générale des affaires sociales ont mené une réflexion globale sur l’évolution des missions et de la gestion de la Caisse des Français de l’étranger.
Leur rapport mettait alors en exergue la nécessité de rénover la politique commerciale et l’offre tarifaire de la Caisse, afin de les adapter aux nouvelles formes et aux nouveaux parcours de l’expatriation.
Selon les auteurs de la proposition de loi, la Caisse proposerait en effet plus de 600 tarifs modulés en fonction de l’âge des assurés, du niveau de revenus, du paiement ou non des cotisations par une entreprise, ou encore de la catégorie d’adhérents.
Dans un contexte concurrentiel où la plupart des organismes d’assurance maladie ont développé une offre de couverture à l’expatriation, il est essentiel d’améliorer la lisibilité des prestations de la Caisse et de renforcer son action auprès des jeunes actifs.
Le rapport de l’IGAS et de l’IGF relevait également une incompatibilité avec les règles européennes. L’adhésion à la Caisse ne saurait en effet être réservée aux seuls Français.
Il aura donc fallu attendre plus de deux ans pour entreprendre la réforme préconisée en juillet 2015. Aussi, je salue l’initiative de nos collègues représentant les Français établis hors de France du groupe socialiste qui ont travaillé avec la Caisse à une évolution de la base législative régissant son offre.
Créée en 1984 dans le prolongement de la Caisse des expatriés, la CFE est devenue au fil des années un acteur majeur de la protection sociale des Français de l’étranger et couvre plus de 200 000 personnes à travers le monde.
Il était donc urgent d’entamer cette réforme, « d’adapter la Caisse à son temps, de la tourner vers l’avenir » pour reprendre les termes de notre collègue Jean-Yves Leconte. Le nombre considérable de Français travaillant aujourd’hui à l’étranger nous semble justifier que notre assemblée s’en préoccupe.
Je tiens à saluer l’excellent travail du rapporteur, qui a réécrit le dispositif tout en préservant son esprit. Il permettra de passer d’une logique de catégories d’adhérents à une logique de risques couverts. C’est une bonne chose.
Madame la ministre, mes chers collègues, bien qu’il regrette l’absence d’une véritable réforme de la gouvernance de la Caisse, le groupe du Rassemblement Démocratique Social et Européen apportera son soutien à ce texte. (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe La République En Marche.)