Mme Evelyne Yonnet. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, pour explication de vote.
Mme Catherine Deroche. En tant que cosignataire de cet amendement, j’entends bien les engagements pris par Mme la ministre, dont je me félicite. Néanmoins, pour qu’une telle mesure puisse peser de tout son poids dans le cadre du projet de loi de finances rectificative, nous maintenons cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je considère que la réponse de Mme la ministre est très satisfaisante. J’ai été interpellé, comme beaucoup d’entre vous, par l’UNA, l’ADMR et de nombreuses autres associations, qui souhaitent qu’un nouveau fonds de restructuration voie le jour.
La création d’un tel fonds est satisfaisante dans l’immédiat, puisqu’il s’agit d’améliorer la situation de ce secteur. Nous verrons évidemment pour l’avenir. J’invite donc les auteurs de l’amendement à le retirer.
M. Yves Daudigny. Très bien !
M. le président. Madame Micouleau, que décidez-vous ?
Mme Brigitte Micouleau. Je retire l’amendement. Néanmoins, je compte vraiment sur Mme la ministre pour faire aboutir sa proposition.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. C’est au Journal officiel !
M. le président. L’amendement n° 33 rectifié bis est retiré.
Article 16
En 2016, il est prélevé, au profit du fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés créé par l’article 40 de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 de financement de la sécurité sociale pour 2001, une somme de 40 millions d’euros sur les réserves, constatées au 31 décembre 2014, du fonds pour l’emploi hospitalier créé par l’article 14 de la loi n° 94-628 du 25 juillet 1994 relative à l’organisation du temps de travail, aux recrutements et aux mutations dans la fonction publique.
Le recouvrement, le contentieux et les garanties relatifs à ce prélèvement sont régis par les règles mentionnées à l’article L. 137-3 du code de la sécurité sociale.
M. le président. L'amendement n° 392, présenté par Mmes Cohen et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet article vise à transférer 40 millions d’euros des réserves du Fonds pour l’emploi hospitalier, le FEH, vers le Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés, le FMESPP.
Nous nous opposons à ce transfert, qui nous donne l’impression, passez-moi l’expression, qu’on déshabille Paul pour habiller Pierre. Plus précisément, cette opération consiste à prendre ce qui appartient au public pour participer au financement du privé.
Je veux rappeler ici le rôle du FEH : il permet aux établissements de financer des aménagements d’horaires, que ce soit le temps partiel, la cessation anticipée d’activité ou bien encore certaines formations et aides à la mobilité. Ce fonds est donc bel et bien utile au sein de la fonction publique hospitalière.
La justification donnée par le Gouvernement pour mettre en place ce transfert, à savoir l’excédent du FEH, ne nous convainc pas, d’une part, parce que nous nous interrogeons sur les raisons de la sous-consommation constatée et, d’autre part, parce que le transfert de ces crédits au FMESPP aura pour conséquence l’allégement de la contrainte budgétaire pesant sur les établissements du fait de l’ONDAM.
Pour nous, c’est clairement prendre le problème à l’envers ! C’est bien le Gouvernement et le législateur que nous sommes qui peuvent décider du niveau de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie. C’est en instaurant un ONDAM au plus bas que vous créez les contraintes pesant sur les établissements.
Permettez-nous par ailleurs de poser une question. Puisque ce transfert de 40 millions d’euros est censé être une opération isolée, uniquement pour l’année 2016, nous aimerions savoir précisément à quelle opération du FMESPP il est destiné. L’expression « modernisation des établissements de santé » visée dans ce sigle peut être à double tranchant à l’heure où vous entendez développer les groupements hospitaliers de territoire.
Sans réponse convaincante de votre part, madame la ministre, nous maintiendrons cet amendement de suppression de l’article 16, d’autant que, d’ici à 2017, 22 000 emplois seront supprimés dans la fonction publique hospitalière. Au sein de l’AP-HP, une négociation sur le temps de travail est justement en cours. Ce fonds pourrait donc être judicieusement mis à profit.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Il me semble que la mesure proposée par l’article 16 se justifie par des raisons de bonne gestion financière. Le Fonds pour l’emploi hospitalier dispose en effet d’un niveau de réserves très important, ce qui paraît incompatible avec la situation financière de l’assurance maladie, qui, je le rappelle, est en déséquilibre. Selon les informations qui m’ont été transmises, ces réserves atteindraient 160 millions d’euros à la fin de l’exercice 2015 et jusqu’à 209 millions d’euros en 2016.
Alors que nos hôpitaux rencontrent de fortes difficultés de financement, il paraît paradoxal de laisser des sommes aussi importantes en sommeil sur les comptes du FEH. Elles pourraient en effet être utilement utilisées pour l’investissement hospitalier dans le cadre du Fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés.
Par ailleurs, le FEH est aujourd’hui très peu utilisé. Les sommes associées à ses missions au titre de l’année 2014 sont de fait très modestes : le premier poste de dépenses est celui de l’indemnisation du temps partiel, au titre duquel le FEH a dépensé 177 millions d’euros ; le dernier est celui de l’indemnisation de la mobilité, avec seulement 50 500 euros annuels.
Je me suis inquiété de cet état de fait et interrogé sur la raison pour laquelle on conserve un fonds visiblement financé au-delà de ses besoins et qui n’a qu’une faible activité. La situation s’explique par le fait que les recettes du fonds avaient été prévues pour le financement d’une mission aujourd’hui supprimée, à savoir l’abondement du Fonds de compensation du congé de fin d’activité. Depuis que ce prélèvement a été supprimé en 2006, le FEH dispose de recettes très supérieures à ses dépenses.
Les personnes que j’ai auditionnées m’ont indiqué que les missions du FEH devraient être revues et que, outre son actuel rôle d’indemnisation, le fonds devrait notamment être utilisé pour le financement de mesures d’apprentissage. En attendant une telle réorientation, il me paraît de bonne gestion financière que les réserves dormantes du FEH fassent l’objet de prélèvements ponctuels permettant de financer des dépenses plus urgentes.
La commission demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, elle se verra contrainte d’émettre un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Madame David, je comprends vos interrogations, mais, comme l’a fort justement indiqué le rapporteur général, avec cet article, nous sommes face à une mesure de bonne gestion.
Alors que nous avons des besoins en investissement, il n’est pas de bonne politique pour l’hôpital lui-même que d’avoir des sommes dormantes – 160 millions d’euros –, s’accumulant année après année. D’où les deux orientations engagées, qui viennent d’être précisées par le rapporteur général : d’une part, un transfert de 40 millions d’euros vers le fonds d’investissement ; d’autre part, une réflexion sur les missions portées par le FEH, dont le financement historique ne sert pas, aujourd'hui, l’objectif de l’emploi à l’hôpital.
Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement. Je le répète, aucun élément ne permet d’affirmer qu’il y aura des réductions d’emplois à l’hôpital, encore moins dans les proportions que vous avez indiquées. Pour les années à venir, le Gouvernement a engagé une politique et un financement de l’hôpital garantissant la stabilité globale des effectifs. Entre 2012 et 2014, près de 30 000 recrutements sont intervenus à l’hôpital public et dans les établissements publics. Nous sommes donc bien loin de ce que vous indiquez, à savoir une destruction de plusieurs milliers d’emplois.
M. le président. Madame David, l’amendement n° 392 est-il maintenu ?
Mme Annie David. Comme je l’ai lu et entendu, le FEH sera bientôt doté de 200 millions d’euros.
Vous nous dites qu’il est de bonne gestion d’utiliser cette somme pour le FMESPP. La bonne gestion aurait été de ne pas accumuler autant d’argent sur ce fonds et de l’utiliser au fur et à mesure pour financer les besoins pour lesquels il avait été créé : la cessation anticipée d’activité, l’aménagement des horaires, le temps partiel, la formation, la mobilité. Quand on voit comment les choses se passent pour les agents hospitaliers sur l’ensemble de notre territoire – je ne reviendrai pas sur la question d’éventuelles suppressions d’emplois dans les années à venir –, quand on connaît leurs conditions de travail, on se dit que ces 200 millions d’euros pourraient leur bénéficier et ne pas se transformer en fonds de réserve.
Tout de même, ces 200 millions d’euros proviennent d’argent public, issu de nos établissements publics de santé ! Or le transfert de 40 millions d’euros pourra financer la modernisation d’établissements non seulement publics, mais également privés, le FMESPP ayant été créé pour moderniser l’ensemble de nos établissements de santé. C’est donc là encore un détournement de l’argent public en direction du privé. C’est d’autant moins acceptable que nous connaissons les conditions de travail des agents de la fonction publique hospitalière. Sachez que les personnels de l’AP-HP descendront bientôt dans la rue pour faire entendre leur opposition à l’accord aujourd'hui en cours de négociation, inacceptable à leurs yeux pour ce qui concerne le temps de travail.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous maintenons notre amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'article 16.
(L'article 16 est adopté.)
Article 17
Le II quinquies de l’article 4 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, l’année : « 2017 » est remplacée par l’année : « 2015 » et les mots : « et dans la limite de 10 milliards par an » sont supprimés ;
b) (nouveau) Après le mot : « décret », la fin de la seconde phrase est ainsi rédigée : « , peuvent faire l’objet d’acomptes provisionnels. » ;
2° Au second alinéa, les mots : « les plafonds qui y sont cités » sont remplacés par les mots : « le plafond qui y est cité ».
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, sur l'article.
M. Dominique Watrin. L’article 17 tend à autoriser la CADES, la Caisse d’amortissement de la dette sociale, à reprendre dès 2016 les déficits accumulés par l’ACOSS, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale. Plus précisément, il vise à transférer, en 2016, 23,6 milliards d’euros de déficits à la CADES, car celle-ci bénéficierait d’un taux d’intérêt négatif. En clair, le Gouvernement, qui prévoit une remontée des taux d’intérêt, reporte sa dette sur la CADES, ce qui lui permettra d’emprunter tout en réduisant sa dette.
Je veux simplement insister sur deux points.
Premièrement, la vraie raison des déficits, ce sont les exonérations massives, que nous dénonçons depuis le début de l’examen de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. Elles ne sont pas compensées, contrairement à ce que l’on nous dit souvent, et ne cessent de croître : elles représentent 3,3 milliards d’euros par an. On peut d’ailleurs estimer que cette non-compensation a atteint la somme faramineuse de 48 milliards d’euros sur les vingt dernières années. Il est important de le dire !
Deuxièmement, lors de la création de la CADES en 1996, il était prévu que les déficits repris à l’ACOSS au titre des années 2011 à 2017 n’excéderaient pas 62 milliards d’euros et 10 milliards d’euros supplémentaires par an. Deux plafonds avaient donc été fixés. En réalité, à force d’exonérer, le Gouvernement a dépassé ce plafond de 62 milliards d’euros de 10 milliards d’euros. Au demeurant, ce problème devra être réglé très vite, en 2017, car la loi organique prévoit non pas l’allongement de la durée de vie de la CADES, mais seulement l’augmentation des contributions, donc de la CRDS, ce qui serait particulièrement dommageable.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, sur l'article.
M. Alain Vasselle. Je me demande si le transfert immédiat à la CADES d’un déficit de 23,6 milliards d’euros est une mesure pertinente. Une telle décision s’explique uniquement par le risque d’augmentation des taux d’intérêt. N’aurait-il pas été préférable d’attendre une loi de finances rectificative pour ce faire ?
La CADES sera-t-elle aussi performante que l’ACOSS – voire davantage – dans la gestion de ces 23,6 milliards d’euros ? La différence d’efficacité sera sans doute négligeable. Le seul intérêt d’un tel transfert consiste à entériner le fait que l’ACOSS n’a pas vocation à gérer les déficits de la sécurité sociale. Reste que le plafond de trésorerie est atteint, et nous ne savons pas comment vont évoluer financièrement les différentes branches à l’horizon de 2018-2019.
Cela étant, je voterai cette disposition, malgré mes réserves, tout en continuant de m’interroger sur sa pertinence.
M. le président. Je mets aux voix l'article 17.
(L'article 17 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 17
M. le président. L'amendement n° 296 rectifié, présenté par MM. Mézard, Amiel, Arnell, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve et Laborde et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 575 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le septième alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le montant des prélèvements applicables à un groupe de produits ne peut être inférieur à un minimum de taxes qui inclut le droit de consommation ainsi que la taxe sur la valeur ajoutée.
« Le niveau du minimum de taxes, fixé par mille unités ou mille grammes, est défini, par catégorie de produits, à l'article 575 A. » ;
2° Les avant-dernier et dernier alinéas sont supprimés.
La parole est à M. Guillaume Arnell.
M. Guillaume Arnell. Le présent amendement vise à tirer les conséquences de l'arrêt du 27 mars 2015 du Conseil d'État, qui a statué sur la légalité du système français du minimum de perception à trois niveaux, en vigueur depuis 2010. Ces minima avaient remplacé l'ancien prix minimum jugé illégal par la CJUE, la Cour de justice de l’Union européenne.
Le Conseil d'État a confirmé que le minimum de perception « simple », qui ne revient pas à fixer un prix minimum et n’est pas anti-compétitif, est conforme à la réglementation européenne. Il correspond à un droit de consommation minimum imposé de manière identique à tous les produits du tabac. En revanche, le Conseil d'État a considéré que les dispositions de l'article 575 du code général des impôts relatives à un minimum de perception « majoré » et un minimum de perception « super-majoré », qui s'appliquent uniquement à une certaine catégorie de produits, créent une distorsion de concurrence, contraire au droit européen. En conséquence, le Conseil d'État a annulé ces dispositions.
À la suite de cette décision, plusieurs industriels du tabac ont abaissé leurs prix de vente en dessous du minimum de perception, fixé à 6,50 euros pour les cigarettes et à 7,10 euros pour les tabacs à rouler. Cette pratique ouvre la voie à une guerre des prix. Cet amendement vise donc à substituer aux minima de perception « simple », « majoré » et « super-majoré » un minimum de taxes conforme à la directive européenne. Alors que le minimum de perception ne touchait que les droits de consommation, ce minimum de taxes, qui inclut la TVA, permettra d'augmenter la pression fiscale sur tous les produits bas de gamme, vendus en dessous du minimum de perception « simple » actuel.
Telle est la position des cosignataires de cet amendement, ce qui ne veut pas dire que nous serions nécessairement hermétiques à des arguments défendant d’autres moyens de parvenir, sans effets pervers, au même objectif.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à tirer les conséquences de la remise en cause par le Conseil d’État du double mécanisme du minimum de perception.
La commission est consciente des imperfections de cet amendement. Si elle s’y est néanmoins déclarée favorable, c’est pour appeler l’attention du Gouvernement sur l’intérêt de traiter lors de l’examen du PLFSS des questions relatives au droit de consommation sur les tabacs. Une telle pratique serait d’ailleurs en cohérence avec le projet de loi de santé, qui prévoit l’extension à la ministre de la santé de la compétence d’homologation des tarifs du tabac, auparavant du seul ressort du ministre chargé du budget.
L’usage veut que les droits sur le tabac ne soient évoqués qu’au moment de l’examen du collectif budgétaire, en toute fin d’année. La dernière réforme est ainsi intervenue, sur ce sujet, à l’occasion de la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2014. Or les recettes du tabac – qui sont très importantes, de l’ordre de 11 milliards d’euros chaque année – sont intégralement affectées au budget de la sécurité sociale. Si nous sommes conscients de la nécessité d’en préserver l’équilibre, elles ont aussi un lien important avec la santé publique.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Monsieur le sénateur, votre amendement vise à atteindre un objectif que non seulement je comprends, mais qu’à certains égards je partage : éviter que les augmentations des prix du tabac ne puissent être contournées par les cigarettiers et nous donner les moyens nécessaires de garantir le respect, par les acteurs économiques de ce secteur, des décisions que vous votez, selon une logique qui mêle les objectifs de santé publique et de cohérence fiscale.
Une évolution du dispositif du minimum de perception majoré est en effet souhaitable. Une modification en ce sens des trois derniers alinéas de l’article 575 du code général des impôts sera prochainement proposée dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances rectificative.
S’agissant du mécanisme du minimum de perception en lui-même, il ne pose aucun problème de conformité au droit communautaire ; il n’est donc pas nécessaire de le supprimer. Sans entrer dans les détails, je note que les dispositions que vous proposez pourraient, au regard du droit communautaire, donner lieu à des conflits, dans la mesure où tous les produits ne sont pas également concernés.
J’indique enfin, à la suite du rapporteur général, que le projet de loi de modernisation de notre système de santé comporte des mesures relatives au tabac. C’est à ce genre de mesures, susceptibles de porter un coup d’arrêt à la consommation de tabac, en particulier chez les plus jeunes de nos concitoyens, que s’attache l’effort du Gouvernement, qui reste évidemment, par ailleurs, attentif aux enjeux juridiques que vous avez évoqués et qui seront traités dans le cadre du projet de loi de finances rectificative.
Je vous demande donc de bien vouloir retirer cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Arnell, l’amendement n° 296 rectifié est-il maintenu ?
M. Guillaume Arnell. J’ai entendu vos arguments, madame la ministre. Je consens donc à retirer cet amendement.
Comme je l’ai dit, nous ne sommes pas opposés à d’autres dispositifs. Nous attendrons donc l’examen du projet de loi de finances rectificative pour en finir avec cette possibilité de contourner la loi.
M. le président. L'amendement n° 296 rectifié est retiré.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 262, présenté par Mme Archimbaud, MM. Desessard et Placé, Mmes Aïchi, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec et Gattolin, est ainsi libellé :
Après l’article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 575 A du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la deuxième ligne de la deuxième colonne du tableau du deuxième alinéa, le nombre : « 49,7 » est remplacé par le nombre : « 52,9 » ;
2° Au troisième alinéa, le montant : « 210 € » est remplacé par le montant : « 247 € ».
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Les Français sont encore nombreux à croire que les fumeurs « rapportent » plus qu’ils ne coûtent à l’État, en raison de la fiscalité des produits du tabac. Au contraire, le coût des dégâts du tabagisme, en hausse constante, pèse lourdement sur les comptes publics. La dernière étude de l’Observatoire français des drogues et toxicomanies, datée de septembre 2015, estime le coût global du tabac à 120 milliards d’euros par an, soit dix fois le déficit de la sécurité sociale, lequel s’élève, Fonds de solidarité vieillesse compris, à 13 milliards d’euros en 2015. Cette étude révèle aussi que, pour les seules dépenses sanitaires, le coût s’élève à 25 milliards d’euros par an.
Cet amendement vise à exercer une forte pression fiscale sur les prix des cigarettes, pour deux raisons majeures.
La première est que le prix constitue un élément essentiel de la lutte contre le tabac. Le Président de la République l’a lui-même rappelé lors de la présentation du plan cancer 3 en février 2014 : « L’évolution des prix nous enseigne que les seules baisses significatives – elles ont été rares – de la consommation de tabac se sont produites après des augmentations fortes du prix des cigarettes. » Les addictologues et toutes les personnes impliquées dans l’élaboration des plans de lutte contre le tabagisme le confirment.
La deuxième raison est qu’une augmentation du prix accroît les rentrées fiscales et permet de compenser partiellement le coût sanitaire et social du tabac, qui pèse sur les comptes de la sécurité sociale.
Face à l’hécatombe sanitaire et financière, il est urgent d’adopter des mesures fortes. Le tabac tue aujourd’hui 79 000 personnes par an, vingt fois plus que les accidents de la route. L’objectif, à terme, est d’atteindre le seuil psychologique que représente, selon les spécialistes en addictologie, la fixation du prix du paquet de cigarettes à 10 euros, en intensifiant, parallèlement, la lutte contre le commerce illicite et en travaillant activement à une convergence fiscale européenne.
Cette mesure, prise isolément, perd évidemment de son intérêt. Elle a vocation à s’inscrire dans le cadre d’une politique générale de lutte contre le tabagisme, qui partirait du constat lucide selon lequel aujourd’hui, malgré les efforts – notamment ceux qui font l’objet d’un certain nombre d’articles du projet de loi de santé –, la réalité résiste : le problème du tabagisme persiste en France de façon inquiétante.
J’indique enfin que l’article 40 nous empêche, nous, parlementaires – et c’est bien normal – de faire certaines propositions. Je pense par exemple qu’il serait souhaitable de renforcer l’ensemble des mesures d’accompagnement des personnes qui souhaitent arrêter de fumer. Il existe déjà des lieux, des spécialistes, des réseaux, qui mériteraient d’être renforcés et aidés davantage ; mais je ne peux pas le proposer. Cet amendement a donc également pour objet d’encourager les efforts accomplis par le Gouvernement, par les réseaux auxquels j’ai fait allusion, par les médecins, et d’indiquer en même temps que nous sommes loin du compte.
M. le président. L'amendement n° 263 rectifié, présenté par Mme Archimbaud, MM. Desessard et Placé, Mmes Aïchi, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec et Gattolin, est ainsi libellé :
Après l’article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 575 A du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la quatrième ligne de la deuxième colonne du tableau du deuxième alinéa, le nombre : « 32 » est remplacé par le nombre : « 42,3 » ;
2° Au dernier alinéa, le montant : « 143 € » est remplacé par le montant : « 203 € ».
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Cet amendement, qui concerne le tabac à rouler, s’inscrit dans la même logique.
J’indique simplement deux choses : d’une part, le tabac à rouler est surtout consommé par les jeunes, ce qui ne peut que nous inquiéter ; d’autre part, sa nocivité est supérieure à celle des cigarettes.
M. le président. L'amendement n° 298 rectifié, présenté par MM. Mézard, Amiel, Arnell, Barbier, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve et Laborde et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :
Après l'article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les troisième et quatrième alinéas de l'article 575 A du code général des impôts sont ainsi rédigés :
« Le minimum de taxes mentionné à l'article 575 est fixé à 264 € pour mille cigarettes et à 145 € pour mille cigares ou cigarillos.
« Il est fixé par kilogramme à 183 € pour les tabacs fine coupe destinés à rouler les cigarettes et à 90 € pour les autres tabacs à fumer. »
La parole est à M. Guillaume Arnell.
M. Guillaume Arnell. Par cohérence, je retire cet amendement de coordination, qui visait à compléter l’amendement n° 296 rectifié.
M. le président. L'amendement n° 298 rectifié est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 262 et 263 rectifié ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’amendement n° 262 vise à augmenter le prix des cigarettes.
J’ai bien entendu vos arguments, madame Archimbaud. Ils sont d’ailleurs bien connus. À titre personnel, comme beaucoup d’entre nous, je suis tout à fait favorable à une réduction de la consommation du tabac. Le prix y contribue, mais ce n’est pas le seul élément.
La commission des affaires sociales n’ignore pas pour autant le problème des zones frontalières – j’habite moi-même une zone de ce type dans le Nord-Pas-de-Calais. Les buralistes font d’ailleurs notre siège. Nous sommes donc conscients du caractère quelque peu cornélien du choix devant lequel nous sommes placés.
J’estime que nous devons mettre en œuvre une stratégie à moyen terme, sinon nous n’obtiendrons aucun résultat net ou, du moins, si tel était le cas, ces réussites seraient vite balayées, comme nous avons déjà pu le constater, par la vente sur internet ou, dans les zones frontalières, par la vente des produits étrangers. C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable.
L’amendement n° 263 rectifié a pour objet d’augmenter le prix du tabac à rouler.
Il existe bien un report de consommation, en particulier chez les jeunes, de la cigarette vers le tabac à rouler ou le tabac à tuber, qui sont moins chers. L’efficacité de notre stratégie n’exigerait-elle pas d’augmenter le prix du tabac à rouler, à due proportion, par rapport à celui des cigarettes ? Nous pouvons nous poser la question.
L’augmentation que vous proposez nous semble néanmoins très importante. Comme j’ai l’habitude de le dire, une politique efficace et lisible, en matière de lutte contre la consommation de tabac, ne peut procéder par à-coups : elle doit au contraire mettre en œuvre une stratégie à moyen et long terme. À défaut d’une telle stratégie, à laquelle nous serions totalement favorables si elle nous était proposée, la commission a émis un avis défavorable.