compte rendu intégral
Présidence de M. Jean-Pierre Raffarin
vice-président
Secrétaire :
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.
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Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
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Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que la commission des affaires sociales a fait connaître qu’elle a procédé à la désignation des candidats à une éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites actuellement en cours d’examen.
Cette liste a été affichée conformément à l’article 12, alinéa 4, du règlement et sera ratifiée si aucune opposition n’est faite dans le délai d’une heure.
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Renvois pour avis unique
M. le président. J’informe le Sénat que le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne pour la réalisation et l’exploitation d’une nouvelle ligne ferroviaire Lyon-Turin (n° 115, 2013-2014), dont la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées est saisie au fond, est renvoyé pour avis, à sa demande, à la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire.
J’informe le Sénat que le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2014 (n° 117, 2013-2014), dont la commission des affaires sociales est saisie au fond, est renvoyé pour avis, à sa demande, à la commission des finances.
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Avenir et justice du système de retraites
Suite de la discussion en procédure accélérée et rejet d'un projet de loi modifié
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, garantissant l’avenir et la justice du système de retraites (projet n° 71, résultat des travaux de la commission n° 96, rapport n° 95, avis n° 76, rapport d’information n° 90).
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus aux dispositions du titre III.
Titre III
SIMPLIFIER LE SYSTÈME ET RENFORCER SA GOUVERNANCE
Chapitre Ier
Simplifier l’accès des assurés à leurs droits
Article 26
I. – L’article L. 161-17 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Avant le premier alinéa, il est ajouté un I ainsi rédigé :
« I. – Les assurés bénéficient d’un droit à l’information sur le système de retraite par répartition, qui est assuré selon les modalités suivantes. » ;
2° Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « II. – » ;
3° Les troisième et quatrième alinéas sont supprimés ;
3° bis (nouveau) À la fin de la deuxième phrase du cinquième alinéa, la référence : « neuvième alinéa du présent article » est remplacée par la référence : « premier alinéa de l’article L. 161-17-1 » ;
4° Au début du sixième alinéa, est ajoutée la mention : « III. – » ;
5° La deuxième phrase du septième alinéa est ainsi rédigée :
« L’assuré bénéficie d’un service en ligne lui donnant accès à tout moment à son relevé actualisé, l’informant sur les régimes dont il relève et lui permettant de réaliser certaines démarches administratives et d’échanger avec les régimes concernés des documents dématérialisés. » ;
6° Le huitième alinéa est ainsi modifié :
a) Au début, est ajoutée la mention : « IV. – » ;
b) La dernière phrase est supprimée ;
7° Après le huitième alinéa, il est inséré un V ainsi rédigé :
« V. – Dans le cadre de tout projet d’expatriation, l’assuré bénéficie à sa demande d’une information, par le biais d’un entretien, sur les règles d’acquisition de droits à pension, l’incidence sur ces derniers de l’exercice de son activité à l’étranger et sur les dispositifs lui permettant d’améliorer le montant futur de sa pension de retraite. Une information est également apportée au conjoint du futur expatrié. Les conditions d’application du présent V sont définies par décret. » ;
8° Le neuvième alinéa est ainsi modifié :
a) Au début, est ajoutée la mention : « VI. – » ;
b) Les deux premières phrases sont supprimées ;
9° (nouveau) À l’avant-dernier alinéa, les références : « huit premiers alinéas » sont remplacées par les références : « I à V » et, après le mot : « groupement », sont insérés les mots : « mentionné au premier alinéa de l’article L. 161-17-1 ».
I bis (nouveau). – Au huitième alinéa de l’article L. 114-2 du même code, les références : « huit premiers alinéas » sont remplacées par les références : « I à V ».
II. – Le 5° et le b du 8° du I entrent en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard, respectivement, au 1er janvier 2017 et au 1er juillet 2014.
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, sur l'article.
M. Dominique Watrin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cet article prévoit la création, d’ici au 1er janvier 2017, d’un service en ligne donnant à tout moment aux assurés un accès aux informations relatives aux retraites les concernant, ce qui est positif : nous ne sommes évidemment pas opposés à ce que nos concitoyens puissent, à leur demande, obtenir des informations sur leurs droits.
Toutefois, compte tenu de l’importance des informations susceptibles d’être fournies aux assurés, il nous semble important de préciser dans la loi que, si les informations données sont erronées et que les droits se trouvent finalement réduits par rapport à ce que ces informations laissaient entrevoir aux assurés, ceux-ci peuvent demander que les informations communiquées par ce nouveau service soient opposables.
En outre, nous souhaiterions savoir, madame la ministre, quelle sera la nature juridique de l’établissement chargé d’informer les salariés de leurs droits. S’agira-t-il d’un établissement public ou privé ? Les personnels qui renseigneront les salariés bénéficieront-ils d’une formation sur l’ensemble des régimes existants – on le sait, la matière est complexe – et sur les règles de convergence qui peuvent exister ?
L’expérience montre que l’instauration d’un guichet unique, avec la fusion de l’ANPE et des ASSEDIC, ne permet pas de répondre convenablement aux questions et attentes de nos concitoyens si elle n’est suivie d’aucune formation appropriée des personnels concernés.
Par ailleurs, madame la ministre, je veux vous faire part de mon étonnement sur un point particulier. Peu après la présentation de votre projet de loi, vous avez rendu publique la mise en place d’un simulateur web permettant de calculer l’âge de l’accès à une retraite à taux plein : voilà tout de même un renseignement susceptible d’intéresser tout un chacun. Or ce simulateur ne semble pas prendre en compte les périodes de décote, qui sont pourtant importantes.
Cette anomalie a-t-elle d’ores et déjà été réparée ? Sinon, allez-vous faire le nécessaire pour qu’elle le soit ?
M. le président. L'amendement n° 235 rectifié, présenté par Mme Pasquet, M. Watrin, Mmes Cohen et David, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Après le mot :
bénéficient
insérer le mot :
gratuitement
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. L’article 26 prévoit la création, d’ici au 1er janvier 2017, d’un service en ligne donnant à tout moment aux assurés un accès aux informations relatives à la retraite les concernant. L’alinéa 3 prévoit ainsi que « les assurés bénéficient d’un droit à l’information sur le système de retraite par répartition ».
Il s’agit, par cet amendement, que l’on pourrait qualifier de « rédactionnel », de préciser que l’accès à cette information est gratuit. Quitte à se placer sur le terrain du déclaratif, autant que la déclaration soit complète.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cet amendement prévoit que l’accès au compte individuel retraite en ligne se fera gratuitement.
Il est évident que ce service a vocation à être gratuit et que le groupement chargé d’en piloter la mise en place d’ici à 2017 devra s’assurer des conditions dans lesquelles les personnes n’ayant pas accès à internet à leur domicile pourront y accéder.
La commission aimerait connaître l’avis du Gouvernement sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je comprends tout à fait la préoccupation des auteurs de cet amendement. Toutefois, il n’est pas juridiquement utile dans la mesure où il va de soi que ce service est gratuit.
Néanmoins, si le Sénat juge nécessaire d’apporter cette précision dans la loi, je ne m’y opposerai pas. C’est pourquoi le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Lenoir. L’amendement qui nous est proposé présente plus de risques que d’avantages.
Bien sûr, il est souhaitable que l’on puisse consulter sans difficulté un site internet pour bénéficier d’un certain nombre d’informations – nous le faisons tous couramment – et, en l’espèce, pour connaître ses droits à la retraite.
Toutefois, préciser que les assurés bénéficient de ce service « gratuitement » pose problème. En effet, cela signifie a contrario que ce service a un coût.
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Eh oui ! Le service public a un coût !
M. Jean-Claude Lenoir. Qui supportera ce coût ? La sphère publique ou la sphère privée ? S’il s’agit de la sphère privée, il serait intéressant de savoir quels organismes relevant du droit privé devront effectivement le supporter. Assurément, un jour viendra où il nous sera rétorqué que ce coût doit être supporté par les finances publiques ! Et si c’est la sphère publique qui supporte ce coût, je me demande dans quelle mesure l’article 40 de la Constitution ne pourrait pas être opposé à cet amendement.
Dans l’incertitude, j’estime que vous prenez un grand risque, madame la ministre, à entrer dans ce débat : apporter cette précision présente, je le répète, plus d’inconvénients que d’avantages.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Monsieur le président, j’interviendrai très brièvement, car mon collègue Jean-Claude Lenoir vient de dire l’essentiel.
Pour succéder au groupement d’intérêt public Info Retraite, vous allez mettre en place cette Union des institutions et services de retraites – UISR –, dont certains sont paritaires, tandis que d’autres sont publiques. Quoi qu'il en soit, ces institutions et services vont contribuer au fonctionnement de ce service d’information. Or l’activité dont il s’agit n’est pas négligeable puisqu’il faut tout de même reconstituer les droits individuels de tous les futurs retraités, pour ne pas prendre le terme de « pensionnés » utilisé outre-quiévrain, chacun d’entre eux s’interrogeant, à juste titre, sur ce qui l’attend.
Il est positif de mettre en place ce système ; c’est nous qui avions lancé cette idée avec le GIP Info Retraite. Je considère que ce service doit, en effet, être en libre accès et qu’il ne doit pas y avoir d’obstacle financier à sa consultation. Toutefois, le terme « gratuit » est équivoque.
Ce système a un coût, et il est financé par les cotisants, par le biais des associations membres de l’UISR. Le service en question n’a donc rien de « gratuit » !
M. Jean-Claude Lenoir. Voilà !
M. Gérard Longuet. Pour assurer son financement, on fera appel aux crédits soit de l’État, soit des organismes de retraite.
C'est la raison pour laquelle nous nous abstiendrons sur cet amendement.
M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'article 26, modifié.
(L'article 26 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 26
M. le président. L'amendement n° 315 rectifié, présenté par M. Domeizel, Mme Demontès, MM. Teulade, Kerdraon, Daudigny et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’article 26
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 161-17 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À la première phrase du septième alinéa, le mot : « périodiquement » est remplacé par les mots : « dans l’année des trentième, quarantième et cinquantième anniversaires de l’assuré » ;
2° À la première phrase du huitième alinéa, les mots : « à partir d’un certain âge et selon une périodicité déterminée par le décret susmentionné » sont remplacés par les mots : « dans l’année du soixantième anniversaire de chaque assuré ».
La parole est à M. Claude Domeizel.
M. Claude Domeizel. Cet amendement vise à préciser la périodicité de l’envoi à chaque futur retraité, par voie postale, d’un relevé de situation individuelle et d’une estimation indicative globale de la pension à laquelle il devrait avoir droit. Actuellement, de fait, chaque actif reçoit ces informations par l’intermédiaire du GIP Info Retraite à ses trente-cinquième, quarantième, quarante-cinquième, cinquantième et cinquante-cinquième anniversaires.
Dès lors qu’est créé un service en ligne, on pourrait assister à un abandon de la communication de ces informations par voie postale, étant donné que tout le monde pourra désormais consulter son relevé individuel de situation à tout moment, quand il le souhaite.
Pour ma part, je pense qu’il faut maintenir cet envoi postal, en prévoyant cependant un véritable agenda. La loi doit être plus précise et plus directive : le relevé de la situation individuelle serait limité aux trentième, quarantième et cinquantième anniversaires de l’assuré et l’estimation indicative globale serait adressée à chaque actif à son soixantième anniversaire.
Si je propose de fixer ainsi le rythme des envois, c’est pour prévenir les doublons dans l’information, d’autant qu’il existe aussi le rendez-vous du quarante-cinquième anniversaire.
Il faut également voir là une mesure d’économie, car le coût des envois à toutes les cohortes concernées représente chaque année entre 18 et 24 millions d’euros.
Pour avoir mis en place le système actuel en tant que président du GIP Info Retraite, je n’ignore rien de la satisfaction des futurs retraités lorsqu’ils reçoivent des informations relatives à leur situation ; mais je pense qu’il faut savoir limiter le nombre des envois postaux.
Par ailleurs, le trentième anniversaire me paraît préférable au trente-cinquième, parce que je conçois aussi la communication de ces informations comme un moyen de sensibiliser de bonne heure nos concitoyens au système de retraites. De fait, bien souvent, les actifs ne pensent à leur retraite que deux ou trois ans avant d’y parvenir !
M. Jean-Claude Lenoir. En effet !
M. Gérard Longuet. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Les auteurs de cet amendement entendent tirer les conséquences de la création du service en ligne, prévue à l’article 26, en clarifiant les conditions d’envoi à l’assuré du relevé de situation individuelle et de l’estimation indicative globale, qui dont deux documents importants. C’est pourquoi la commission donne un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Monsieur Domeizel, je comprends parfaitement votre objectif et je ne peux que souscrire à votre volonté de réaliser des économies et d’éviter la redondance des informations. Néanmoins, je vous demanderai de retirer votre amendement.
M. Charles Revet. Il est bon, mais il faut le retirer !
Mme Marisol Touraine, ministre. En effet, votre objectif ne pourra être atteint que lorsque le nouveau service d’information en ligne sera complètement opérationnel. Or je ne voudrais pas qu’il y ait une période d’incertitude pendant laquelle les assurés ne recevraient plus par voie postale les informations qu’ils attendent, alors que le nouveau système en ligne n’aurait pas été entièrement mis en place.
En revanche, je peux vous assurer que, parmi les mesures qui seront prises par décret, le passage de l’information par courrier à l’information individuelle en ligne sera prévu.
Monsieur le sénateur, je ne suis pas opposée à votre démarche, mais je veux être certaine que les assurés continueront, au cours de la période de transition, à être correctement informés, de la façon qui paraît aujourd’hui la plus classique et la plus rassurante, c’est-à-dire par courrier.
C’est pourquoi, dans le cas où vous maintiendriez votre amendement, le Gouvernement y serait plutôt défavorable, au nom de la bonne information des assurés.
M. le président. Monsieur Domeizel, l’amendement n° 315 rectifié est-il maintenu ?
M. Claude Domeizel. Madame la ministre, je comprends votre demande ; j’ai, autant que d’autres, le souci de la bonne information des actifs au sujet de leur retraite.
M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
M. Claude Domeizel. La mesure que je propose peut être mise en application dès à présent, dans le cadre du système prévu par l’article 10 de la loi du 21 août 2003. Elle présente l’avantage d’éviter les redondances avec d’autres modes d’information, en particulier avec le rendez-vous à quarante-cinq ans. À cet âge, en effet, si cet amendement n’est pas adopté, les futurs retraités recevront un relevé de situation individuelle en même temps qu’ils auront un entretien : cela fait tout de même beaucoup !
J’insiste aussi sur l’importance qui s’attache au fait d’avancer la délivrance de la première information à l’âge de trente ans. Dans mon esprit, il s’agit de sensibiliser les assurés à la retraite, quasiment au début de leur vie active.
Voilà pourquoi, madame la ministre, je maintiens mon amendement. Je le fais en tant que concepteur du système actuel comme président du GIP Info Retraite, dont je suis aujourd’hui vice-président.
Et je répète, mes chers collègues, que cela permettrait d’économiser de 18 à 24 millions d’euros par an !
M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Monsieur Domeizel, je ne pourrai malheureusement pas voter votre amendement et je suivrai l’avis de Mme la ministre.
M. Gérard Longuet. Une fois de plus ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)
M. Jean Desessard. Je pense en effet qu’il est nécessaire de maintenir l’envoi des informations sur papier.
M. Gérard Longuet. C’est ce que M. Domeizel propose !
M. Jean Desessard. Certes, j’ai bien noté que, selon la proposition de M. Domeizel, ceux qui n’ont pas accès à internet pourraient demander à recevoir par courrier les informations qui les concernent.
Mme Catherine Deroche. Voilà !
M. Jean-François Husson. Pas très écologique, votre position, monsieur Desessard !
M. Jean Desessard. Allons, mon cher collègue, vous n’allez tout de même pas me dire que, selon vous, l’écologie, cela consiste à ne plus vouloir qu’on écrive sur du papier ! C’est une vision vraiment petite de l’écologie ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Je n’avais pas prévu de parler cinq minutes sur cet amendement, mais, si vous m’y poussez (Sourires.),…
M. le président. Rien ne vous y oblige, mon cher collègue ! (Nouveaux sourires.)
M. Jean Desessard. … je vais vous exposer ce qu’est la base de l’écologie. (Nouvelles exclamations sur les travées de l’UMP.)
La base de l’écologie, ce n’est pas de planter une fleur sur un parterre à la sortie d’une ville ; c’est de constater que, au rythme actuel de développement, compte tenu de l’augmentation de la population, de ce que nous consommons et de ce que nous produisons, les ressources de la planète ne seront pas suffisantes pour couvrir les besoins essentiels de l’humanité.
C’est cela, monsieur Husson, la base de l’écologie ! Cela n’implique pas que tout le monde doit devenir végétarien ! Cela veut dire que, globalement, nous devons limiter notre consommation et réduire la production,…
M. Jean-Claude Lenoir. Réduire la production ! Intéressant…
M. Jean Desessard. … faute de quoi nous n’aurons pas assez d’une seule planète.
Bien sûr, il peut y avoir entre nous certaines contradictions – d’ailleurs, qui y échappe ? –, mais la base de l’écologie, c’est cela. C’est une vision globale !
M. Jean-François Husson. Même vos amis socialistes sourient !
Mme Laurence Rossignol. Pas du tout : les socialistes sont d’accord avec cette conception !
M. Jean-François Husson. Une socialiste !
Mme Laurence Rossignol. Plusieurs, mon cher collègue !
M. Jean Desessard. Les socialistes sont en parfait accord avec cela ! (Exclamations amusées sur les travées de l’UMP.) Parfois, ils disent aux écologistes : on va attendre cinq ans pour appliquer telle ou telle mesure, parce qu’on n’est pas encore prêt. Mais, sur l’analyse de fond, ils sont d’accord avec nous : il y a des contraintes environnementales dont il faut tenir compte.
Il est vrai que, parfois, ils sont moins pressés d’agir que nous. (Rires sur les mêmes travées.) Nous allons donc tâcher de nous accorder sur un rythme : chers collègues de l’opposition, vous serez surpris, dans un an, de voir notre cohésion, notre convergence sur de vrais objectifs,…
M. Jean-François Husson. Vous reconnaissez donc qu’il n’y a pas de cohésion aujourd’hui ! C’est un aveu ! (Sourires.)
M. Jean Desessard. … de constater que le Gouvernement fonctionne parfaitement. Ce jour-là, chers amis, vous ferez une triste mine, parce que vous penserez : ils vont encore faire une nouvelle mandature ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste.)
Je reviens maintenant à l’amendement de M. Domeizel.
M. le président. Ah, nous pensions que vous aviez terminé ! (Rires.)
M. Jean Desessard. Veuillez m’excuser, monsieur le président, mais nos collègues de l’opposition me provoquent. Il faut bien que je leur explique l’écologie ! (Sourires.)
Nous ne voterons pas cet amendement parce que nous pensons que les systèmes informatiques ne sont pas encore suffisamment au point et que de nombreuses personnes n’y sont pas habituées. Pour certaines, il n’est pas forcément facile de se familiariser avec les nouvelles technologies ! Et puis on sait bien que, si l’administration n’est pas obligée de suivre la même procédure pour tout le monde, cela crée des problèmes. De plus, lorsque c’est à la personne intéressée de faire la demande, tout est généralement beaucoup plus compliqué, d’autant qu’il n’y a pas toujours les logiciels nécessaires.
Dans vingt ans, monsieur Domeizel, je serai prêt à étudier de nouveau la question…
M. Jean-Claude Lenoir. Nous ne serons plus là !
M. Jean Desessard. Pour le moment, nous voterons contre l’amendement n° 315 rectifié !
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. De tous les biens rares, le plus certainement rare est le temps ; aussi ne faut-il pas le gaspiller car, comme il est écrit dans l’Évangile, nous ne connaissons « ni le jour ni l’heure ». Du reste, depuis le début de ce débat, en dépit de notre appétit de dialogue et d’approfondissement des sujets, nous nous sommes efforcés de l’économiser en respectant nos temps de parole et en évitant les digressions sans rapport avec le problème des retraites. (Mmes Catherine Deroche et Françoise Boog rient. – Murmures sur les travées du groupe CRC.)
Monsieur Desessard, dans un travail collectif, il n’est pas inutile de savoir de quoi on parle, et l’expérience n’est pas un défaut ; nous rendons hommage à celle de M. Domeizel, ancien président du GIP Info Retraite, dont nous voterons l’amendement.
Madame le ministre, mon collègue Philippe Bas a plusieurs fois constaté que vous marchiez dans les pas des législateurs de 2003. J’observe que c’est encore le cas lorsque vous transformez le GIP Info Retraite en une UISR : vous rendez ainsi une forme d’hommage à un travail auquel vous aviez pourtant refusé de participer !
C’est la raison pour laquelle, proactivement, nous poursuivrons l’effort engagé en 2003, puisque vous ne le cassez pas aujourd'hui, et c’est dans cet esprit que nous voterons l’amendement de M. Domeizel.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Nous croyions que le temps était un bien rare…
M. Jean-Claude Lenoir. L’excellente intervention de mon collègue Gérard Longuet me permettra de parler deux fois moins que je ne l’avais prévu.
Les mots que M. Domeizel a choisis m’ont touché. Mon cher collègue, vous avez parlé vrai, en homme de terrain qui a exercé des responsabilités dans une caisse de retraite. Vous avez touché du doigt un aspect essentiel, qui échappe complètement aux sphères du pouvoir, aux cercles parisiens et aux grandes administrations : le vécu de toute personne qui a travaillé relativement au droit fondamental qu’est la retraite.
À l’article 1er du projet de loi, la majorité a rejeté l’un de nos amendements, qui prévoyait simplement transparence et lisibilité. Eh bien, la démarche proposée par M. Domeizel va dans ce sens : elle permettra aux actifs de mieux comprendre et de mieux anticiper.
Comme sans doute nombre de nos collègues, je suis frappé par le désintérêt des jeunes actifs, et même de ceux qui travaillent depuis dix ou quinze ans, pour les problèmes liés à la retraite. Parlez de la retraite à votre fils, à un jeune cousin, à un jeune voisin, sa réaction sera : « Ce n’est pas un sujet qui m’intéresse ! »
Je pense que l’initiative de M. Domeizel participe de l’effort pédagogique consistant à alerter les actifs, y compris les plus jeunes, sur les bienfaits d’un système de prévoyance et de protection en plus du régime général ; il peut en résulter une curiosité, voire un intérêt, pour la souscription à un dispositif.
Mon cher collègue, je vous félicite d’avoir parlé avec tant de sincérité ; en ce qui nous concerne, nous voterons votre amendement !